10
La thalassémie béta zéro eurasiatique et les migrations mongoles* L.-C. BRUMPT et J.-F. PAYS** Les hémopathies génotypiques traversent les millénaires. Le lieu et la date de la mutation peuvent parfois être précisés. Ainsi, l'hémoglobine E semble être apparue dans le sud-est asiatique à la fin de la dernière glaciation. La béta-zéro thalassémie plonge ses racines dans la préhistoire; ensuite des événements historiques éclairent sa répartition géographique en Eurasie. La thalassémie a été décrite en 1925 aux États-Unis, à Détroit, par deux pédiatres, Cooley et Lee. Les symptômes sont les suivants : 1° Une anémie érythroblastique, hypochrome, microcytique avec une aniso- poikilocytose caractéristique. La maladie apparaît dès la première année de la vie et son évolution fatale se fait en deux ou trois ans. * Communication présentée à la séance du 27 février 1988 de la Société française d'Histoire de la Médecine. 65 ** Professeur L.-C. Brumpt, 8, avenue d'Eylau, 75016 Paris.

La thalassémie bét eurasiatiqua zéro e et les migration s ......quitté l'Asie centrale, conquis l'Afghanistan, pénétré dans le nord-ouest de l'Inde. Ils 70 Fig. 4. — L'empire

  • Upload
    others

  • View
    1

  • Download
    0

Embed Size (px)

Citation preview

  • La thalassémie béta zéro euras ia t ique et les migrat ions m o n g o l e s *

    L.-C. BRUMPT et J.-F. PAYS**

    Les hémopathies génotypiques traversent les millénaires. Le lieu et la date de la mutation peuvent parfois être précisés. Ainsi, l'hémoglobine E semble être apparue dans le sud-est asiatique à la fin de la dernière glaciation.

    La béta-zéro thalassémie plonge ses racines dans la préhistoire; ensuite des événements historiques éclairent sa répartition géographique en Eurasie.

    La thalassémie a été décrite en 1925 aux États-Unis, à Détroit, par deux pédiatres, Cooley et Lee.

    Les symptômes sont les suivants :

    1° Une anémie érythroblas t ique, hypochrome, microcytique avec une aniso-poikilocytose caractéristique. La maladie apparaît dès la première année de la vie et son évolution fatale se fait en deux ou trois ans.

    * C o m m u n i c a t i o n présentée à la s é a n c e d u 27 février 1988 d e la S o c i é t é f rança i se d 'His to i re d e la

    M é d e c i n e .

    65

    ** Profes seur L . -C . B r u m p t , 8, a v e n u e d ' E y l a u , 7 5 0 1 6 Paris .

  • Fig. I. — Étalement de sang. Giemsa. Anisopoikylocytose.

    Trois hématies cibles. Nombreux érythroblastes.

    2° Une hépato-splénomégalie considérable.

    3° Une ostéoporose généralisée d'autant plus marquée que la survie se prolonge. Au niveau du crâne, elle réalise l'aspect bien connu de « poils de brosse. »

    4° Le faciès mongol fera l'objet de nos discussions. Il est entendu qu'il n'a rien à voir avec une trisomie 21.

    5° Enfin, les Auteurs ont précisé que les parents des malades étaient originaires des pays de la Méditerranée orientale.

    Le fait fut confirmé rapidement en Italie. Grâce à un autre symptôme biologi-que de la thalassémie, la résistance osmotique globulaire augmentée dans les solu-tions salées hypotoniques, Silvestroni et Bianco purent effectuer des enquêtes de masse. Sur quarante-sept mille examens, ils établirent une fréquence moyenne de 2 % en Italie avec quelques foyers de grande fréquence comme la plaine du Pô, que nous retrouverons à propos du siège d'Aquilée en 452 après J.-C. ; dans les îles, Sicile et surtout Sardaigne.

    Dans cette dernière, la fréquence est de 5 à 10% dans les montagnes du centre et de 10 à 2 0 % dans les plaines côtières, autrefois palustres.

    66

  • Certaines théories incriminent le paludisme à l'origine de la mutation et dési-gnent la thalassémie comme «la fille maudite du paludisme».

    Nous proposons une explication différente.

    Fig. 2. — Répartition de la Thalassémie en Italie. D'après les travaux de Silvestroni et Bianco.

    (% de Thalassémie dans la population).

    La thalassémie, probablement originaire des steppes glacées de la Haute Asie non palustres n'a pas la même distribution géographique que le paludisme. Quand le conquérant, Byzance, a occupé la Sardaigne, il s'est soucié de «tenir les côtes» avec ses mercenaires mongols, cependant que la population autochtone gagnait le maquis.

    En Grèce, la répartition de la thalassémie est plus homogène, mais élevée, 5 % in moyenne.

    67

  • Jean Caminopetros, à l'Institut Pasteur d'Athènes, recevait des enfants por-teurs de splénomégalie avec les diagnostics supposés de paludisme ou de kala-azar. Il acquit ainsi une expérience considérable de la thalassémie. Il démontra que les parents du malade présentaient une résistance globulaire augmentée. La confirma-tion du caractère héréditaire de la maladie et son interprétation génétique fut appor-tée plus tard par Valentine et Neel (1944).

    L'anémie de Cooley, ou îhalassemia major, représente l'état homozygote ; tha-lassemia minor, l'état hétérozygote, peut réaliser une thalassémie minime ou mineure selon qu'elle est complètement latente ou comporte quelques symptômes cliniques atténués.

    Caminopetros interpréta le faciès mongolique en insistant sur l'œil mongoli-que ; il signala chez plusieurs malades la tâche bleue mongolique et trouva que parfois les Grecs réfugiés d'Asie Mineure avaient des parents chinois ou mongols à la deuxième ou troisième génération.

    Ces travaux souvent publiés en français n'eurent pas d'écho. Surtout qu'entre temps Wipple et Bradford, en trouvant le nom évocateur de thalassémie, avaient pour longtemps scellé l'origine de l'hémopathie. Ainsi, après 1943, quand les pre-miers cas furent trouvés chez des enfants chinois aux États-Unis, le titre des publica-tions indiquait plus souvent « l'anémie méditerranéenne » que la maladie de Cooley. Ensuite, la maladie fut décrite au Canada par Siddoo. Dans une communauté de Sicks réunis pour une fête religieuse à Vancouver, l'auteur dépista 6 % d'hétérozy-gotes. Au Penjab, d'où les Sicks sont originaires, la thalassémie fut retrouvée.

    Beaucoup d'auteurs s'interrogent sur la personnalité des voyageurs méditerra-néens qui auraient pu introduire la thalassémie en Asie. Le nom d'Alexandre le Grand vient à l'esprit ; mais l'on se souvient que ses soldats, victorieux mais lassés de la guerre, refusèrent d'aller plus loin que l'Indus.

    La route ou les routes de la soie, car il y eut trois tracés selon les événements politiques, n'étaient pas des chaussées royales mais des pistes dans le désert. Dans les oasis existaient des plateformes où s'échangeaient les marchandises. Ce n'était pas les mêmes caravaniers qui allaient de la Méditerranée à la mer de Chine.

    Parmi les rares voyageurs qui firent tout le parcours, citons Marco Polo. Certes, il était accompagné de son père et de son oncle, et le séjour dura dix-sept ans. Mais le récit de voyage de Marco Polo ne rappelle en rien les mémoires de Casanova. Plus tard furent incriminées les grandes navigations des Portugais ; mais le Portugal est le moins thalassémique des pays voisins de la Méditerranée et les voyageurs débarqués étaient des missionnaires voués au célibat. Telles étaient les idées que nous avions reçues quand nous eûmes l'occasion de décrire les premiers cas de thalassémie en Indochine en 1952.

    Les circonstances de guerre à Hanoï faisaient interpréter nos enquêtes généti-ques comme des inquisitions policières. Les familles alarmées faisaient évader les malades.

    En 1954, au Cambodge, le climat psychologique était très différent. Nous avons été aidés dans nos recherches par trois jeunes médecins cambodgiens, Thor Peng Thong, Sok Heansun et Keo Sankim, qui ont, depuis, tragiquement disparu, victimes du génocide khmer-rouge.

    68

  • Nous avons pu établir que le trait thalassémique était toujours transmis par des ascendants chinois. Ces recherches étaient facilitées :

    1°) Parce que les Cambodgiens ou Khmers appartiennent à une race brune austroasiatique, totalement différentes des races mongoloïdes. Le métissage se reconnaît à travers plusieurs générations.

    2°) L'immigration chinoise est relativement récente. Elle a commencé après le déclin d'Angkor aux X i v c - X V L siècles ; mais elle a été importante dans tout le sud-est asiatique surtout aux x ix c et XXe siècles.

    Au Cambodge, à la différence des pays limitrophes, les Chinois n'étaient pas suspectés de marxisme et n'avaient pas à cacher leur origine. Les Sino-Cambodgiens représentaient une fraction importante de la classe moyenne urbanisée. L'origine chinoise de la thalassémie, confirmée par Flatz en Thaïlande, peut sans doute être une règle générale dans le sud-est asiatique.

    L'étape suivante de nos recherches fut Hong-Kong où nous avons rencontré Mac Fadzean et Tood. Ils avaient, en quinze ans, étudié quatre cent quatre vingt-

    Fig. 3. — La Thalassémie en Chine selon Mac Fadzean et Tood.

    69

  • cinq cas de thalassémie chez des Chinois réfugiés. La plupart venaient des provinces proches de Hong-Kong à cause des facilités d'évasion ; mais d'autres venaient de toutes les provinces chinoises. Que les malades fussent Chinois ou Méditerranéens, les signes cliniques, hématologiques et biochimiques sont rigoureusement les mêmes.

    L'unité de la mutation génétique s'impose ; mais le sens de la propagation de l'hémopathie doit être révisé. Le flux massif de gènes d'ouest en est n'est pas conforme à l'histoire, tandis que l'inverse correspond aux grandes migrations mongoles.

    Plusieurs siècles avant notre ère, les Hiong-Nou menaçaient l'Empire chinois. La Grande Muraille avait été construite deux cent cinquante ans avant J.-C. contre les incursions de ces barbares sans une efficacité absolue.

    Puis ils disparaissent de l'histoire pendant des siècles jusqu'au jour où ils menacent les grands empires qui possèdent des historiens et des analystes comme la Chine, l'Inde, la Perse, Byzance et Rome.

    Ainsi, en 376 après J . - C , sur le Danube, les Huns font une entrée fracassante en Occident. Leur présence n'est pas forcément synonyme d'actions guerrières. Les vieux empires décadents utilisaient volontiers les cavaliers mongols comme merce-naires. L'empire romain d'Occident fut sauvé plusieurs fois par ses mercenaires hunniques des invasions des Germains de Radagaise et des Goths d'Alaric.

    En 425, Aetius, consul romain, futur vainqueur des champs Catalauniques, commandait, en Italie, une armée de soixante mille Huns. L'arrivée d'Attila fut une menace constante pour l'Empire romain d'Orient. A prix d'or, les diplomates byzan-tins dévièrent sa trajectoire vers l'Ouest. En 451, il ravagea le Nord de la Gaule mais se trouva aux champs Catalauniques devant trois armées coalisées : les Wisigoths étaient à l'aile gauche commandés par Théodoric, les Francs de Mérovée au centre, les légions romaines d'Aetius à l'aile droite.

    Au soir du 20 juin 451, Attila, vaincu, s'était retranché derrière ses équipages de gros chariots, attendant l'assaut final. En effet, les Wisigoths voulaient venger la mort de leur roi Théodoric tué pendant la bataille. Pour des raisons de haute diplomatie, Aetius laissa Attila repartir sans combattre, traverser le Rhin et retrou-ver ses bases de Hongrie. Le consul romain était soucieux de conserver un équilibre parmi les peuples barbares stationnés sur le limes romain.

    En 452, Attila franchit les Alpes, organisa le siège d'Aquilée dont la durée permit aux Huns de ravager la plaine du Pô, haut lieu de la thalassémie. L'année suivante, en 453, Attila mourut d'une hématémèse foudroyante. Après sa mort, ses nombreux fils se livrèrent à des luttes fratricides. De plus, ils furent attaqués par leurs anciens alliés, les Ostrogoths et les Gépides. Beaucoup de cavaliers huns entrè-rent comme mercenaires au service de leurs anciens ennemis les Byzantins. Ils parti-cipèrent sôus le commandement de Bélisaire et Narsès à la reconquête de l'Afrique du Nord sur les Vandales et de l'Italie du Sud contre les Ostrogoths. Ensuite, les mercenaires furent disséminés dans toutes les garnisons de Méditerranée. La d i s t r i -bution géographique de la thalassémie correspond à la carte de l'Empire de Byzance à son apogée, à la mort de Justinien I e r en fin du V I e siècle.

    Entre-temps, d'autres Mongols, les Huns hephtalites ou Huns blancs, avaient quitté l'Asie centrale, conquis l'Afghanistan, pénétré dans le nord-ouest de l'Inde. Ils

    70

  • Fig. 4. — L'empire de Byzance à la fin du règne de Justinien I e r .

    y combattirent du V e au V I I e siècles et furent littéralement absorbés par les peuples qu'ils avaient soumis. Ainsi expliquons-nous la fréquence de la thalassémie au Pen-jab, au Rajastan, au Gudjerat et au Marwar.

    Dans le reste de l'Asie, l'extrême dispersion de l'hémopathie correspond à l'immense empire de Gengis khân allant de la mer Méditerranée à la mer de Chine.

    Des recherches appronfondies menées en Iran ont montré près de la mer Caspienne des fréquences de 4 1 % de thalassémiques.

    Il manque encore beaucoup de précisions sur les républiques d 'U.R.S.S. et de la Chine qui apporteront de précieux renseignements sur les migrations tous azimuts des peuples d'Asie centrale.

    71

  • En somme, la thalassémie existe partout en Asie, sauf au Japon, où jamais les Mongols n'ont pu pénétrer malgré leur attrait pour le mirage de l'or. Les fils de Kûbilay lancèrent deux grandes expéditions. La première en 1270 mobilisa cent mille cavaliers embarqués sur une flotte coréenne. Avant le débarquement sur l'île de Kiushu, un «kamikaze», ou typhon salvateur, dispersa la flotte au grand soulage-ment des Japonais. En effet, les samouraïs n'étaient pas préparés pour affronter la tactique des Mongols cavaliers et archers.

    En 1281, un corps expéditionnaire semblable réussit à débarquer; mais ins-truits par la première expérience, les Japonais avaient construit une muraille. Les combats retardataires permirent d'atteindre la saison des typhons. Là encore un kamikaze anéantit les at taquants.

    Le premier cas d'anémie de Cooley ne fut publié au Japon qu'en 1968, et de temps en temps sont décrits de rares cas de formes mineures. Ainsi se trouve posé le cadre historique et géographique de la thalassémie et de son origine mongole. Rap-pelons cependant deux arguments importants, le faciès mongol et la tâche mongoli-que. Le faciès mongol est souvent mal interprété. Il faut distinguer les modifications dues à l'ostéoporose et celles des parties molles. Le crâne en tour, l 'exophtalmie, le nez ensellé, les pommettes saillantes, la lèvre supérieure découvrant les dents à cause du prognatisme maxillaire sont dus à l'ostéoporose et à la soufflure des os. Ils rappellent peut-être un magot chinois mais non un Chinois.

    Au contraire, l'oeil mongolique est significatif : œil en fente, obliquité de la fente palpébrale, hypertélorisme epicanthus qui est le repli de la paupière supérieure fermant l'angle nasal de l'œil. L'œil mongolique semble transmis, comme la thalassé-mie, selon le mode mendélien dominant, mais ne siège pas sur le même chromosome. Les deux signes peuvent coexister mais sont génétiquement indépendants. La tache bleue mongolique n'est pas un caractère exclusif des races xanthodermes. Celui-ci est fréquent en Chine (98 %) , au Japon (90 %), au Viêt-nam (80 %), en Turquie (15 %) , non exceptionnel en Italie, surtout en Sardaigne (2%), en France (1 %o). Dans le diagnostic d'une thalassémie, ce signe a plus de valeur en Europe où il est rare.

    Diagnostic positif et différentiel des thalassémies : r

    1° Le diagnostic de la thalassémie mineure est souvent porté avec une déplora-ble facilité.

    Or, voici une dizaine de symptômes importants :

    — anisopoikilocytose très caractéristique y compris hématies cibles; — hypochromie avec tantôt anémie, tantôt polyglobulie ; — fer sérique augmenté; — microcytose, diminuation du volume globulaire moyen ; — leptocytose; — M.C.H.C. diminuée; — R.G. augmentée (résistance globulaire aux solutions salées hypotoniques) ; — augmentation de la fraction A 2 de l'hémoglobine, selon Kunkel et Wallenius,

    entre 3 et 6 % (normale: moins de 3 % ) ; — enquête familiale montrant la réciprocité de la permanence des gènes.

    Certains auteurs se contentent d'un seul signe et sont conduits à trouver l'hé-

    72

  • mopathie partout, même chez les Tamouls ou les Amérindiens de l'Oyapok.

    2° La béta + thalassémie.

    Depuis quatre décennies nous insistons sur la moindre gravité de l'hémopathie africaine, même homozygote ou associée aux hémoglobines S ou C.

    En Amérique, où Ton a l'expérience des deux thalassémie 0 et + , les biochi-mistes distinguent :

    — la béta 0 thalassémie où le gène mutant freine totalement la synthèse des chaînes béta et la béta + thalassémie où la synthèse n'est pas complètement inhibée;

    — la béta + est aussi appelée American Black Thalassemia. Nous est-il permis d'y ajouter les African Blacks.

    3° La persistance héréditaire de l'hémoglobine fœtale.

    Cette anomalie désignée comme « thalassemia like gene, » pseudo, thalassémie ou gène F est caractérisée par des taux aussi élevés de F que dans les anémies de Cooley, mais elle est admirablement supportée, même à l'état homozygote. Elle se situe sur les chaînes béta et semble un allèle des hémoglobines C.S.E. La technique de Kleinhauer et Betke montre que dans l'hémopathie F les hématies contiennent un mélange uniforme de F et de A tandis que le sang de thalassémique est formé de deux populations d'hématies porteuses soit de F soit de A.

    4° L'alpha-thalassémie est une hémopathie létale à l'état homozygote où elle se manifeste par une anasarque fœto-placentaire (hydrops fœtalis). L'état hétérozy-gote est pratiquement indiscernable cliniquement chez l'adulte. Il eut fallu à la naissance rechercher l'hémoglobine Bart's dans le sang du cordon. Sa distribution dans le monde est assez disparate.

    Discussion.

    Notre insistance pour limiter à l'Eurasie l'aire de dispersion de l'hémopathie est motivée par sa gravité et ses conséquences socio-économiques. Ainsi, en Sardaigne, cent naissances d'homozygotes sont attendues chaque année. Jadis, ils mouraient avant l'âge de trois ans ; maintenant, ils survivent en moyenne jusqu'à quinze ans. Le nombre de sujets sous traitement se trouve multiplié. Les transfusions sont indispen-sables. L'idéal est de transfuser des hématies jeunes, ce qui diminue les effets de l 'hémochromatose. De toute façon, il faut ajouter un chélateur du fer sous formes d'injections de Deferoxamine.

    Le coût très élevé du traitement souligne l'importance de la prévention qui consiste dans :

    — le dépistage des hétérozygotes; — le conseil génétique; — la détection des couples à risque et des grossesses à risque; — le diagnostic prénatal par le prélèvement de sang fœtal ; — l'interruption volontaire de grossesse proposée, sinon acceptée.

    En Sardaigne, un considérable effort communautaire des services médicaux du gouvernement et de la population a donné des résultats remarquables. Mais l'avenir réside dans les greffes de mœlle dont une centaine a déjà été réalisée. Les succès sont d'autant plus grands que le sujet greffé est plus jeune. Bien entendu, l'étude de

    73

  • compatibilité des facteurs H.L.A. augmente les chances de succès.

    Le déploiement d'une telle action sanitaire admirablement décrite par le Pr Li-cinio Contu met en jeu des efforts considérables. Pourrait-on suivre le plan de ces projets pilotes à l'échelon de deux continents, l 'Europe et l'Asie?

    De telles campagnes sanitaires nécessitent l'adhésion totale de la population. Le Génie mythique du paludisme, Alexandre le Grand, et Marco Polo sont des personnages plus médiatiques qu'Attila le fléau de Dieu. Sans vouloir vulgariser les faits exposés, nous le soumettons seulement à la réflexion des médecins.

    B I B L I O G R A P H I E

    B R U M P T L . - C , P H A N - D I N H - T U A N et N G U Y E N F L U Y C A N . A n é m i e d e C o o l e y c h e z un en fant v ie t -

    n a m i e n . A c t a m e d i c a v i e t n a m i c a 1960 - IV - I.

    B R U M P T L. -C. A p r o p o s de l 'anémie d e C o o l e y : T h a l a s s é m i e o u S i n é m i e ? Bul l . A c a d . N a t . 19-20. 3 3 3 .

    C A M I N O P É T R O S J. R e c h e r c h e sur l 'anémie é r y t h r o b l a s t i q u e d e s p e u p l e s d e la M é d i t e r r a n é e o r i e n -

    tale . É t u d e a n t h r o p o l o g i q u e , é t i o l o g i q u e et p a t h o g é n i q u e . La t r a n s m i s s i o n hérédi ta ire d e la ma lad ie .

    A n n . M é d . , 1 9 3 8 ; 4 3 , 104.

    L I C I N I O C O N T U . U n e x e m p l e d e c o o p é r a t i o n c o m m u n a u t a i r e à p r o p o s d e la t h a l a s s é m i e . C o l l o q u e

    M é d e c i n e M é d i t e r r a n n é e 1987. Institut d e s S c i e n c e s de la S a n t é , Paris .

    C O O L E Y T. -B . a n d L E E P. Ser ies o f casses o f s p l e n o m e g a l y in ch i ldren wi th a n e m i a and p a r t i c u l a r b o n e c h a n g e s . Tr. A m . Pediat S o c 1925, 3 7 ; 29 .

    F A D Z E A N M a c a n d T O O D D . T h e d i s t r ibut ion o f C o o l e y ' s a n e m i a in C h i n a . T r a n s . R o y . S o c . T r o p .

    M e d . H y g . , 1964 - 5 8 ; 4 9 0 .

    P A Y S J . - F . La t h a l a s s é m i e e ur as ia t ique . T h è s e . Paris , 1971. B ib l io . 321 réf.

    S I D D O O J . -K. , S 1 D D O O S. -K. , C H A S E M . - H . , M O R G A N - D E A N L. a n d P E R R Y W . - H . , T h a l a s s e -m i a in S i k h s . B l o o d 1956 - II - 197.

    S I L V E S T R O N I E. a n d B I A N C O I. T h e d i s t r ibut ion o f m i c r o c y t h a e m i a s (or t h a l a s s a e m i a s ) in Italy. A b .

    H b : S y m p . C l O M S Backwe l l O x f o r d 1959.

    M A T H O R P E N G T H O N G — La t h a l a s s é m i e a u C a m b o d g e . T h è s e . Paris 1958.

    V A L E N T I N E W . - N . a n d N E E L J.^V. H e m a t o l o g i c a n d gene t i c s tudy o f the t r a n s m i s s i o n o f t h a l a s s e m i a . A r c h . Int. M e d . 1 9 4 4 ; 7 4 ; 185.

    W H I P P L E G . - H . a n d B R A D F O R D L, : Racia l o f fami l ia l a n e m i a o f ch i ldren a s s o c i a t e d wi th f u n d a m e n -tal d i s t u r b a n c e o f b o n e a n d p i g m e n t m e t a b o l i s m ( C o o l e y - V o n J a k s c h ) . A m . J. D i s C h i l d . 1932 - 4 4 336 .

    74