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© Masson, Paris, 2006. Gastroenterol Clin Biol 2006;30:625-628 625 CAS CLINIQUE L’antre gastrique, localisation primitive exceptionnelle d’un gastrinome dans le cadre d’une néoplasie endocrine multiple de type I Sophie BUYSE (1), Antoine CHARACHON (1), Thomas PETIT (2), Jean-Pierre MARMUSE (3), Michel MIGNON (1), Jean-Claude SOULE (1) (1) Service d’Hépato-Gastroentérologie, (2) Service d’Anatomie-Pathologique, (3) Service de Chirurgie Digestive, Hôpital Bichat-Claude Bernard, Paris. RÉSUMÉ Nous rapportons le cas d’un malade de 18 ans, sans antécédent, présentant des ulcères duodénaux hémorragiques récidivant ayant révélé un syndrome de Zollinger-Ellison. Les examens réalisés initia- lement chez ce malade étaient en faveur d’un gastrinome primitif antral sporadique avec adénopathies satellites ayant conduit à un traitement chirurgical. L’évolution clinique et des tests sécrétoires, ainsi que l’apparition d’une hyperparathyroïdie primaire ont démontré qu’il s’agissait d’un gastrinome dans le cadre d’une néo- plasie endocrine multiple de type 1. Il s’agit à notre connaissance du premier cas décrit de gastrinome primitif antral dans le cadre d’une néoplasie endocrine multiple de type 1. SUMMARY Sophie BUYSE, Antoine CHARACHON, Thomas PETIT, Jean-Pierre MARMUSE, Michel MIGNON, Jean-Claude SOULE We report the case of an 18-year-old man, with no previous medi- cal history, presenting with recurrent hemorrhagic duodenal ulcers revealing a Zollinger-Ellison syndrome. The initial diagnosis of spo- radic gastrinoma of the antrum associated with satellite lymph nodes led to surgical treatment. The evolution of cinical and secre- tory tests associated with the outbreak of a primary hyperparathy- roïdism demonstrated that the patient had a type I multiple endocrine neoplasia. To our knowledge, this is the first described case of primitive gastrinoma of the antrum occurring in a type I mul- tiple endocrine neoplasia. Introduction Le syndrome de Zollinger-Ellison est caractérisé par l’asso- ciation d’une maladie ulcéreuse duodénale et d’une diarrhée, conséquence d’une hypersécrétion gastrique acide due à l’hypersécrétion de gastrine par une tumeur à cellules G (gastri- nome) dont la localisation est le plus souvent pancréatique. Le gastrinome peut être sporadique ou s’intégrer dans une néopla- sie endocrine multiple de type 1 (NEM1). Nous rapportons, pour la première fois à notre connaissance, l’observation d’un gastri- nome de localisation primitive antrale dans le cadre d’une NEM1 ou syndrome de Wermer. Observation L’histoire de la maladie débutait chez ce malade de 18 ans par une hémorragie digestive d’origine ulcéreuse duodénale consécutive à une prise d’anti-inflammatoires non stéroïdiens. La recherche d’Helicobacter pylori était négative. Malgré un traitement par inhibiteurs de la pompe à protons (IPP) bien suivi et l’arrêt définitif des anti-inflammatoires non sté- roïdiens, les ulcères duodénaux hémorragiques récidivaient à 3 reprises en 6 mois. Devant ce tableau, le diagnostic de syndrome de Zollinger-Ellison (ZE) était évoqué. Le malade était alors dirigé vers notre service où les examens suivants étaient réalisés. Une endoscopie œso-gastro-duodé- nale (EOGD) trouvait un ulcère duodénal. La muqueuse antrale était le siège d’une formation polypoïde sessile dont les biopsies montraient une prolifération tumorale neuroendocrine exprimant la gastrine (figure 1). La tomodensitométrie thoraco-abdominale mettait en évidence trois adé- nopathies péri-gastriques (figure 2) dont une était adjacente à l’isthme pancréatique, sans lésion hépatique ni pulmonaire. L’échoendoscopie retrouvait ces adénopathies péri-gastriques dont la plus volumineuse mesurait 50 mm de diamètre (figure 3). L’adénopathie ponctionnée sous échoendoscopie était le siège d’une prolifération tumorale neuroendo- crine bien différenciée exprimant fortement la gastrine, faiblement la chromogranine et faiblement le MIB1. L’octréoscan montrait une fixation unique dans l’aire cœlio-pancréatique (figure 4). Aucun de ces quatre examens morphologiques ne montrait d’autre localisation que la lésion antrale et les adénopathies péri-gastriques. La gastrinémie basale était chiffrée à 942 ng/L (Normale < 110 ng/L). La chromogranine A était mesurée à 2970 ng/mL (Normale < 100 ng/mL). Le tubage gastrique, réalisé sous oméprazole 40 mg/j dans la crainte d’une récidive hémor- ragique n’était pas contributif. Cependant, une élévation importante de la gastrinémie après administration de sécrétine nous permettait de con- firmer le diagnostic de syndrome de ZE. Ni l’interrogatoire de la famille ni l’examen clinique du malade ne laissaient présumer le diagnostic de NEM1. La prolactinémie, le cortisol plasmatique à 8 h, le taux d’ACTH sérique, la calcémie, et le test de surcharge calcique étaient normaux. L’analyse génétique du gène NEM1 ne trouvait pas de mutation. Dans ce contexte de gastrinome isolé, non métastatique, de localisa- tion primitive antrale, un traitement chirurgical était décidé. En per-opéra- toire, la palpation duodénale et pancréatique était normale; la palpation gastrique révélait une formation nodulaire localisée à la face postérieure de l’antre gastrique, fixant à l’octréoscan per-opératoire. Son exérèse était guidée par l’EOGD per opératoire qui ne retrouvait aucune autre lésion. Après résection du nodule antral et des adénopathies satellites, l’octréoscan per-opératoire ne montrait plus de fixation abdominale, alors que l’analyse ex vivo des pièces réséquées confirmait qu’elles fixaient. L’analyse histologique concluait à une prolifération endocrine bien diffé- renciée dont les immunomarquages pour la chromogranine A et pour la gastrine étaient positifs. Le diagnostic de syndrome de ZE sporadique lié à un gastrinome de localisation primitive antrale paraissait conforté. Trois mois après l’intervention chirurgicale, le débit acide gastrique était élevé et la gastrinémie augmentait significativement après injection de sécrétine, témoignant de la présence d’un reliquat tumoral. L’EOGD montrait alors une quinzaine de petites formations polypoïdes gastriques de 6 à 7 mm de diamètre, disséminées dans l’antre et à la jonction antro-fundique, dont l’exérèse était réalisée. Le duodénum était normal. The gastric antrum: a rare primitive location of a gastrinoma within a type I multiple endocrin neoplasia (Gastroenterol Clin Biol 2006;30:625-628) Tirés à part : A. CHARACHON, Service d’Hépato-Gastro-Entérologie, Hôpital Henri Mondor, 51, Avenue du Maréchal de Lattre de Tassigny, 94010 Créteil Cedex. E-mail : [email protected]

L’antre gastrique, localisation primitive exceptionnelle d’un gastrinome dans le cadre d’une néoplasie endocrine multiple de type I

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© Masson, Paris, 2006. Gastroenterol Clin Biol 2006;30:625-628

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CASCLINIQUE

L’antre gastrique, localisation primitive exceptionnelle d’un gastrinome dans le cadre

d’une néoplasie endocrine multiple de type I

Sophie BUYSE (1), Antoine CHARACHON (1), Thomas PETIT (2), Jean-Pierre MARMUSE (3), Michel MIGNON (1), Jean-Claude SOULE (1)

(1) Service d’Hépato-Gastroentérologie, (2) Service d’Anatomie-Pathologique, (3) Service de Chirurgie Digestive, Hôpital Bichat-Claude Bernard, Paris.

RÉSUMÉ

Nous rapportons le cas d’un malade de 18 ans, sans antécédent,présentant des ulcères duodénaux hémorragiques récidivant ayantrévélé un syndrome de Zollinger-Ellison. Les examens réalisés initia-lement chez ce malade étaient en faveur d’un gastrinome primitifantral sporadique avec adénopathies satellites ayant conduit à untraitement chirurgical. L’évolution clinique et des tests sécrétoires,ainsi que l’apparition d’une hyperparathyroïdie primaire ontdémontré qu’il s’agissait d’un gastrinome dans le cadre d’une néo-plasie endocrine multiple de type 1. Il s’agit à notre connaissancedu premier cas décrit de gastrinome primitif antral dans le cadred’une néoplasie endocrine multiple de type 1.

SUMMARY

Sophie BUYSE, Antoine CHARACHON, Thomas PETIT, Jean-Pierre MARMUSE, Michel MIGNON, Jean-Claude SOULE

We report the case of an 18-year-old man, with no previous medi-cal history, presenting with recurrent hemorrhagic duodenal ulcersrevealing a Zollinger-Ellison syndrome. The initial diagnosis of spo-radic gastrinoma of the antrum associated with satellite lymphnodes led to surgical treatment. The evolution of cinical and secre-tory tests associated with the outbreak of a primary hyperparathy-roïdism demonstrated that the patient had a type I multipleendocrine neoplasia. To our knowledge, this is the first describedcase of primitive gastrinoma of the antrum occurring in a type I mul-tiple endocrine neoplasia.

Introduction

Le syndrome de Zollinger-Ellison est caractérisé par l’asso-ciation d’une maladie ulcéreuse duodénale et d’une diarrhée,conséquence d’une hypersécrétion gastrique acide due àl’hypersécrétion de gastrine par une tumeur à cellules G (gastri-nome) dont la localisation est le plus souvent pancréatique. Legastrinome peut être sporadique ou s’intégrer dans une néopla-sie endocrine multiple de type 1 (NEM1). Nous rapportons, pourla première fois à notre connaissance, l’observation d’un gastri-nome de localisation primitive antrale dans le cadre d’uneNEM1 ou syndrome de Wermer.

Observation

L’histoire de la maladie débutait chez ce malade de 18 ans par unehémorragie digestive d’origine ulcéreuse duodénale consécutive à uneprise d’anti-inflammatoires non stéroïdiens. La recherche d’Helicobacterpylori était négative. Malgré un traitement par inhibiteurs de la pompe àprotons (IPP) bien suivi et l’arrêt définitif des anti-inflammatoires non sté-roïdiens, les ulcères duodénaux hémorragiques récidivaient à 3 reprisesen 6 mois.

Devant ce tableau, le diagnostic de syndrome de Zollinger-Ellison(ZE) était évoqué. Le malade était alors dirigé vers notre service où lesexamens suivants étaient réalisés. Une endoscopie œso-gastro-duodé-nale (EOGD) trouvait un ulcère duodénal. La muqueuse antrale était lesiège d’une formation polypoïde sessile dont les biopsies montraient uneprolifération tumorale neuroendocrine exprimant la gastrine (figure 1).

La tomodensitométrie thoraco-abdominale mettait en évidence trois adé-nopathies péri-gastriques (figure 2) dont une était adjacente à l’isthmepancréatique, sans lésion hépatique ni pulmonaire. L’échoendoscopieretrouvait ces adénopathies péri-gastriques dont la plus volumineusemesurait 50 mm de diamètre (figure 3). L’adénopathie ponctionnée souséchoendoscopie était le siège d’une prolifération tumorale neuroendo-crine bien différenciée exprimant fortement la gastrine, faiblement lachromogranine et faiblement le MIB1. L’octréoscan montrait une fixationunique dans l’aire cœlio-pancréatique (figure 4). Aucun de ces quatreexamens morphologiques ne montrait d’autre localisation que la lésionantrale et les adénopathies péri-gastriques. La gastrinémie basale étaitchiffrée à 942 ng/L (Normale < 110 ng/L). La chromogranine A étaitmesurée à 2970 ng/mL (Normale < 100 ng/mL). Le tubage gastrique,réalisé sous oméprazole 40 mg/j dans la crainte d’une récidive hémor-ragique n’était pas contributif. Cependant, une élévation importante dela gastrinémie après administration de sécrétine nous permettait de con-firmer le diagnostic de syndrome de ZE. Ni l’interrogatoire de la familleni l’examen clinique du malade ne laissaient présumer le diagnostic deNEM1. La prolactinémie, le cortisol plasmatique à 8 h, le taux d’ACTHsérique, la calcémie, et le test de surcharge calcique étaient normaux.L’analyse génétique du gène NEM1 ne trouvait pas de mutation.

Dans ce contexte de gastrinome isolé, non métastatique, de localisa-tion primitive antrale, un traitement chirurgical était décidé. En per-opéra-toire, la palpation duodénale et pancréatique était normale; la palpationgastrique révélait une formation nodulaire localisée à la face postérieurede l’antre gastrique, fixant à l’octréoscan per-opératoire. Son exérèseétait guidée par l’EOGD per opératoire qui ne retrouvait aucune autrelésion. Après résection du nodule antral et des adénopathies satellites,l’octréoscan per-opératoire ne montrait plus de fixation abdominale, alorsque l’analyse ex vivo des pièces réséquées confirmait qu’elles fixaient.L’analyse histologique concluait à une prolifération endocrine bien diffé-renciée dont les immunomarquages pour la chromogranine A et pour lagastrine étaient positifs. Le diagnostic de syndrome de ZE sporadique liéà un gastrinome de localisation primitive antrale paraissait conforté.

Trois mois après l’intervention chirurgicale, le débit acide gastriqueétait élevé et la gastrinémie augmentait significativement après injectionde sécrétine, témoignant de la présence d’un reliquat tumoral. L’EOGDmontrait alors une quinzaine de petites formations polypoïdes gastriquesde 6 à 7 mm de diamètre, disséminées dans l’antre et à la jonctionantro-fundique, dont l’exérèse était réalisée. Le duodénum était normal.

The gastric antrum: a rare primitive location of a gastrinoma within a type I multiple endocrin neoplasia

(Gastroenterol Clin Biol 2006;30:625-628)

Tirés à part : A. CHARACHON, Service d’Hépato-Gastro-Entérologie, Hôpital Henri Mondor, 51, Avenue du Maréchal de Lattre de Tassigny, 94010 Créteil Cedex.E-mail : [email protected]

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L’échoendoscopie ne retrouvait pas d’autre anomalie, en particulier pan-créatique. L’examen histologique des nodules antraux réséqués montraitune prolifération neuroendocrine exprimant la gastrine et la chromogra-nine A. Les polypes de la jonction antro-fundique correspondaient à desECLomes.

Un an plus tard, une EOGD retrouvait à nouveau de multiples petitsgastrinomes antraux confirmés par l’histologie, sans lésion duodénaleassociée, comme à l’échoendoscopie qui ne retrouvait pas non plusde lésion pancréatique. L’octréoscan ne retrouvait aucun foyer de fixa-tion pathologique. La gastrinémie basale était élevée à 240 pg/mL(N < 100). Surtout, le bilan phosphocalcique montrait une élévation ducalcium total et du calcium ionisé associée à une hypophosphorémie et àune PTH à la limite supérieure de la normale, faisant poser le diagnosticd’hyperparathyroïdie primaire. L’épreuve de surcharge calcique confir-mait ce diagnostic.

Compte tenu de l’existence d’une hyperparathyroïdie primaire chezce malade atteint d’un syndrome de ZE, le diagnostic de NEM1 était fina-lement retenu. Une surveillance régulière était engagée afin de vérifier lapermanence du contrôle de la sécrétion gastrique acide par les IPP, et desuivre l’évolution des gastrinomes antraux et de l’hyperparathyroïdie.

Discussion

Décrit en 1955, le syndrome de Zollinger-Ellison (ZE) estdans la majorité des cas lié à un gastrinome de localisation pri-mitive pancréatique ou duodénale [1]. Notre malade présenteune localisation primitive rare de gastrinome, l’antre gastrique.Les nodules antraux correspondaient bien à un gastrinome puis-que ces nodules exprimaient la gastrine. Les endoscopies œso-gastroduodénales, les tomodensitométries abdominales, leséchoendoscopies hautes et les octréoscans (de même que lesexplorations per-opératoires) réalisés au cours des deux annéesd’exploration n’ont jamais montré d’autre localisation que leslésions antrales et les adénopathies satellites péri-gastriques. Enparticulier, aucune lésion tumorale duodéno-pancréatique n’aété mise en évidence, y compris en per-opératoire à la palpationde ces organes.

Seuls 5 cas de gastrinomes primitifs antraux ont été décritsdurant les dix dernières années [2, 3]. Ces cas correspondaient à

des gastrinomes sporadiques, une NEM1 ayant été exclue selonles critères usuels. Chez notre malade, il n’y avait initialementpas d’argument clinique, biologique ou génétique pour évo-quer l’intégration du gastrinome dans une NEM1. Cependant,le diagnostic de syndrome de ZE dans le cadre d’une NEM1(ZE-NEM1) a pu être finalement retenu sur les arguments suivants :

1. L’existence de multiples EC-Lomes fundiques macroscopi-ques: Dans le cas du syndrome de Zollinger-Ellison, les EC-Lomesse développent presque exclusivement dans les formes avecNEM1 [4, 5]. En l’absence de NEM1, des tumeurs carcinoïdesargyrophiles fundiques n’ont été observées qu’exceptionnelle-ment [5, 6]. Dans 2 cas publiés, les EC-Lomes étaient uniques etmicroscopiques [7]. En revanche, 13 à 37 % des malades atteintsde ZE-NEM1 sont porteurs d’EC-Lomes, pouvant être de grandetaille [6].

2. La multiplicité des gastrinomes antraux : nous ne disposonspas de donnée concernant les caractéristiques des gastrinomes de

Fig. 1 – Gastrinome antral. Présence dans la muqueuse antrale d’un foyer de prolifération endocrine dont les cellules tumorales fixent fortement l’anticorps anti-gastrine (A : Gastrine x 2,5, B : Gastrine x 10).Presence in the antral mucosa of endocrine proliferation including tumor cells strongly fixing anti-gastrin antibodies.

ABRÉVIATIONS:NEM 1 : Néoplasie endocrine multiple de type 1IPP : Inhibiteur de la pompe à protonZE : Syndrome de Zollinger-EllisonEOGD : Endoscopie œso-gastro-duodénale

Fig. 2 – Tomodensitométrie abdominale avec injection (temps portal) etingestion de produit de contraste, montrant en avant de l’aorte et ducorps de l’estomac deux adénopathies de grande taille (* blanche)partiellement réhaussées par le produit de contraste.Abdominal tomodensitometry with injection (portal time) andingestion of contrast medium, showing 2 large (white *) adenopathiesin front of the aorta and the body of the stomach that are partiallyenhanced by the contrast medium.

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Gastrinome primitif antral et NEM 1

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localisation antrale associés à une NEM1 puisque notre cas estle premier rapporté, mais il est établi que dans les ZE-NEM1,les gastrinomes pancréatiques et/ou duodénaux sont le plus sou-vent multiples [8].

3. L’association d’un syndrome de ZE et d’une hyperparathy-roïdie primaire étant pathognomonique d’une NEM1 [9, 10], onpeut affirmer que notre malade était porteur d’une NEM1 aveclocalisation antrale primitive de ses gastrinomes.

4. La pénétrance du gène de prédisposition à la NEM1, lo-calisé sur le bras long du chromosome 11 [11, 12], est élevée sibien que 90 % des sujets porteurs d’une mutation génétiqueNEM1 expriment biologiquement ou cliniquement la maladieaprès l’âge de 50 ans [13]. Une minorité de malades (10 %) pré-sentant un tableau pourtant typique de NEM1 n’a pas de muta-tion. Ainsi, l’absence de la mutation chez notre malade n’éliminepas le diagnostic de NEM 1.

Notre malade présente donc, à notre connaissance, le pre-mier cas rapporté de ZE-NEM1 au cours duquel les tumeurs gas-trino-sécrétantes sont antrales.

La conduite thérapeutique dans la prise en charge desmalades atteints de syndrome de ZE est désormais bien codifiée[1, 14-18]. L’appartenance du gastrinome à une NEM1 doit êtrerecherchée systématiquement car elle modifie profondément lastratégie thérapeutique: Les syndromes de ZE sporadiques dontles lésions sont réséquables par voie chirurgicale ou endoscopi-que doivent être opérés [19, 20]. Par contre, l’abstention chirur-gicale est la règle dans les syndromes de ZE survenant dans lecadre d’une NEM1 [14, 15, 17]. Chez notre malade, le traite-ment chirurgical réalisé était dicté par l’absence d’argumentpour une NEM1 lors du diagnostic initial du syndrome de ZE.Comme dans les ZE-NEM1 avec localisations duodéno-pancréa-tiques [21, 22], la chirurgie n’a pas guéri le syndrome de ZE.

Dans les ZE-NEM1 avec gastrinomes duodéno-pancréatiques,la chirurgie pancréatique est actuellement réservée aux sujetsayant de volumineuses tumeurs (> 2,5 cm de diamètre) et/ou auxmalades ayant un syndrome fonctionnel mettant en jeu leur sur-vie [14, 23]. Quant aux ECLomes, si leur bon pronostic a étérécemment remis en question, en particulier à long terme [6],leur traitement, dont la place de la chirurgie, n’est pas codifié.

Sur ces différentes données, la décision d’une gastrectomietotale dans l’espoir de guérir notre malade semblait donc abusive.

L’abstention chirurgicale actuelle implique cependant unesurveillance régulière tomodensitométrique, endoscopique etécho-endoscopique. Une gastrectomie serait à envisager en casd’augmentation de la taille d’un ou de plusieurs des gastrinomes(sans attendre qu’ils atteignent 2,5 cm) ou en cas d’extension

tumorale au-delà de la sous-muqueuse [14]. Elle serait à discuterégalement en cas d’EC-Lomes aggressifs [6].

En conclusion, le syndrome de ZE est une maladie rare dontla topographie tumorale antrale est exceptionnelle. La localisa-tion primitive antrale déjà décrite dans quelques syndromes deZE sporadiques est pour la première fois décrite ici dans le cadred’une NEM1. La stratégie thérapeutique actuelle pour les mala-des atteints de syndrome de ZE sporadique est médico-chirurgi-cale, améliorant notablement leur pronostic. En revanche, laprise en charge du gastrinome dans le cadre d’une NEM1repose à ce jour sur le traitement médical. Il est possible quedans le cas présent, unique, d’une localisation antrale des gastri-nomes associés à de multiples ECLomes, cette attitude soit plusdiscutable.

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Fig. 3 – Coupe d’échoendoscopie montrant 2 lésions échogènes homogènes(* blanches) correspondant à 2 volumineuses adénopathies.Echoendoscopic cut showing 2 homogenous echogenic lesions(white *) corresponding to 2 large adenopathies.

Fig. 4 – Scintigraphie des récepteurs de la somatostatine : (* blanche)fixation anormale dans l’aire cœlio-mésentérique, particulièrementintense par rapport aux organes adjacents fixant normalement lasomatostatine (foie, rate, reins).Somatostatin receptor scintigraphy: (white *) abnormal fixation inthe coelio-mesenteric area, particularly intense compared to theadjacent organs fixing normally somatostatin (liver, spleen, kidneys).

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