La_Responsabilite_Societale_des_Entreprises_02.pdf

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  • La Responsabilit Socitale des Entreprises (RSE) : un bref tat des lieux Fvrier 2010 Rsum La notion de Responsabilit Socitale des Entreprises (RSE) connat depuis plusieurs annes un certain engouement. Elle trouve ses origines dans un mouvement de contestation de la mondialisation conomique, auquel les entreprises proposent de rpondre de deux manires : en laborant un dialogue avec les parties prenantes de lentreprise (salaris, socit civile) ; et en largissant leurs proccupations aux domaines social et environnemental, dans une logique de dveloppement durable. Comment volue aujourdhui la RSE ? Quels atouts, mais aussi quelles limites lui reconnat-on gnralement ? Enfin, les acteurs publics ont-ils intrt sen inspirer pour leurs propres dmarches ? Sommaire 1. Origines de la RSE ............................................................................................................ 2 2. Dfinition ........................................................................................................................... 2 3. Evolutions de la RSE ......................................................................................................... 4 4. Principales critiques........................................................................................................... 5 5. RSE et collectivits territoriales ......................................................................................... 6

    Rdaction : Aurlien Boutaud pour le compte de la Communaut urbaine de Lyon (DPSA) / Fvrier 2010

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    La RSE trouve ses racines dans lmergence dune critique de la mondialisation conomique et de ses drives. Elle sest ensuite dveloppe avec la monte en puissance de la thmatique du dveloppement durable.

    1. Origines de la RSE Les dmarches de Responsabilit Socitale des Entreprises (RSE) sont en grande partie nes dune critique de la mondialisation de lconomie et de ses drives. Ds les annes 1950, Howard Bowen dcrivait une telle socit mondialise, dans laquelle quelques centaines dentreprises constituent les vritables centres de pouvoirs qui dterminent la vie des citoyens (cit par Ros, 2007). Pour rpondre ce dfi,

    Bowen proposa une synthse trs novatrice : passer de l'opposition classique entre managers et actionnaires l'ide stratgique de soumettre l'entreprise une lgitimit rsultant d'un contrat avec la socit. Ainsi venait de natre la Corporate social responsibility (). La RSE s'affirma ds lors comme rponse l'excs de pouvoir des multinationales, par une limitation du caractre absolu du droit de proprit des actionnaires (en particulier les marchs financiers), au profit de ce que l'on appelle partout aujourd'hui, la suite de R.E. Freeman, les parties prenantes (Ros, 2007). Il sagit donc, lorigine, dune dmarche dauto-rgulation de la part des entreprises qui consiste impliquer une partie de la socit civile pour contre-balancer le pouvoir hgmonique de

    lactionnariat. Concrtement, les dmarches de RSE se sont effectivement dveloppes paralllement la monte en force dune critique de la mondialisation conomique porte par la socit civile, ainsi qu lmergence du concept de dveloppement durable. On observe dailleurs une concomitance entre lapparition du mouvement altermondialiste et la diffusion des dmarches de responsabilit socitale, en particulier depuis la fin des annes 1990. Face cette critique de la globalisation, les entreprises proposent donc une dmarche douverture et de conciliation ( de la confrontation au partenariat (Chauveau & Ros, 2003)) base sur lide dautorgulation.

    2. Dfinition Une dmarche volontaire de dveloppement durable impliquant les parties prenantes de lentreprise : ainsi pourrait tre trs sommairement dfinie la RSE. Dveloppement durable : la Responsabilit Sociale des Entreprises est une premire traduction du terme anglais Corporate Social Responsability utilis par Howard Bowen. On parle de plus en plus souvent en franais de Responsabilit Socitale des Entreprises . Lvolution du terme nest pas neutre, car la RSE a en effet pour objet de grer limpact des entreprises sur la socit, incluant tout aussi bien les hommes et les femmes composant cette socit que leur environnement. Il sagit donc, pour reprendre les termes du Ministre de lcologie et du dveloppement durable, de loutil privilgi visant la contribution des entreprises aux enjeux du dveloppement durable (MEEDM, 2010) comprenant les finalits conomique, sociale et environnementale. Dmarche volontaire : La RSE est une dmarche volontaire, ce qui suppose deux choses : la volont explicite de lentreprise de dpasser les exigences rglementaires

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    La RSE regroupe les actions quune entreprise ralise volontairement dans les domaines environnemental et social, dans le cadre de ses relations commerciales avec les parties prenantes concernes par son activit. Elle se traduit gnralement par la rdaction dune charte thique et dun plan dactions.

    en matire environnementale et sociale ; mais aussi, partir de l, la libert de dfinir son propre champ daction, en dehors de contraintes extrieures nouvelles venant par exemple de lEtat (la RSE nengage pas de responsabilit juridique). Gouvernance & parties prenantes : Par ailleurs, la RSE se caractrise par une forte implication des parties prenantes de lentreprise concernes par son activit. Par partie

    prenante, on entend toutes les personnes plus ou moins directement impliques dans les dcisions prises par lentreprise, comprenant en interne les dirigeants, les salaris et leurs reprsentants (syndicats) ; et en externe les sous-traitants, clients, fournisseurs, partenaires financiers, ONG, riverains, collectivits locales et autres organismes dits de socit civile . Dans son livre vert sur la RSE, la Commission europenne proposait ainsi de dfinir les dmarches de responsabilit socitale comme recouvrant ce que les entreprises ralisent volontairement dans les domaines environnemental et social dans le cadre de leurs relations commerciales avec leurs parties prenantes, une fois satisfaites leurs obligations lgales (Commission de lUnion Europenne, 2001). Pour lAFNOR, la RSE se dfinit plus prcisment encore comme

    la Responsabilit dune organisation vis--vis des impacts de ses dcisions et activits sur la socit et sur lenvironnement, se traduisant par un comportement thique et transparent qui - contribue au dveloppement durable, la sant et au bien-tre de la socit - prend en compte les attentes des parties prenantes - respecte les lois en vigueur et qui est en accord avec les normes internationales de comportement; et qui - est intgr dans lensemble de lorganisation et mis en uvre dans ses relations (AFNOR, 2006). Concrtement, la dmarche de RSE se traduit le plus souvent par la rdaction concerte dune charte volontaire qui dfinit le comportement thique de lentreprise sur les enjeux environnementaux et/ou sociaux, ainsi quun plan daction dcrivant lensemble des oprations menes par lentreprise et/ou un rapport annuel de dveloppement durable. Ces documents de dclaration et daction sont parfois accompagns dun systme dindicateurs ou de reporting qui a pour objet de prciser les objectifs et permettre un suivi plus prcis de la dmarche.

    Un exemple : le rapport dveloppement durable de Monoprix Lenseigne de supermarchs Monoprix a articul sa dmarche de RSE autour de la notion de dveloppement durable. Elle publie chaque anne un rapport dveloppement durable qui rsume la dmarche du groupe et opre un bilan des avances ralises en matire de mise en uvre de sa stratgie de dveloppement durable (adopte en 2000). Le rapport dtaille la manire dont lentreprise se mobilise et se rorganise autour de cet enjeu (volet gouvernance : organisation de la concertation et dfinition partage dun Monoprix idal ) avant de dtailler les engagements et les actions menes dans trois domaines (volets fondamentaux) : conomique, social & socital, et environnemental. Le rapport prsente galement une srie dindicateurs qui permettent de raliser un suivi chiffr des engagements dans le temps. Un reporting est par exemple ralis sur le nombre de produits vendus issus de filires sapparentant au dveloppement durable (objectif conomique), le nombre et le type demplois (objectif social) ou encore les consommations dnergie et de matires premires (objectif environnemental). Une partie non ngligeable de la dmarche est donc tourne sur le fonctionnement de lorganisme et la mobilisation des acteurs, notamment en interne. En matire de communication externe, cest nanmoins

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    La RSE est cadre par un certain nombre de textes internationaux relatifs aux droits de lhomme ou au respect de lenvironnement. Elle fait pour partie lobjet en France dune obligation lgale pour les entreprises cotes en bourse, qui doivent rendre publiques certaines informations relatives leurs pratiques sociales et environnementales.

    Les dmarches de RSE peuvent galement sappuyer sur de nombreux outils de management environnemental ou social (ISO, EMAS, etc.) ou encore des outils daudit comme la notation sociale et environnementale (dite notation extra-financire)

    essentiellement sur le type de produits vendus que lenseigne communique (avec plus de 1300 produits prsents comme issus du commerce quitable, de l'agriculture biologique, des partenariats agricoles ou plus respectueux de l'environnement ) ainsi que sur la proximit et laccessibilit des magasins de lenseigne (la caractristique de lenseigne tant de se positionner prioritairement en centre urbain dense).

    3. Evolutions de la RSE Si la RSE reste une dmarche fondamentalement empreinte de volontarisme, il faut noter tout de mme une volution vers davantage de cadrage au cours des dernires annes, avec lmergence de textes plus ou moins contraignants qui sont apparus diffrentes chelles de territoire pour accompagner les dmarches. A dfaut de rglementations lchelle internationale, se dveloppe donc progressivement une forme de soft law . Textes de type juridique En la matire, il convient avant tout de citer certains textes internationaux qui viennent cadrer les dmarches de RSE. Cest le cas par exemple du

    Global Reporting Initiative (GRI), lanc par les Nations Unies et dont la vocation est de fixer un certain nombre de lignes directrices pour la rdaction des rapports environnementaux et sociaux des entreprises. Le Global Compact , propos lors du forum conomique mondial de 2000 par le secrtaire gnral des Nations Unies, se veut quant lui un code de conduite comprenant une dizaine de principes que les entreprises doivent s'engager respecter lchelle internationale incluant les droits de l'homme, la corruption, les normes de travail ou encore le respect de l'environnement. En France, la loi sur les nouvelles rglementations conomiques (NRE) de 2001 prvoit par ailleurs, dans son article n 116, une obligation lgale de publication dinformations relatives limpact environnemental et social de leurs activits pour les entreprises cotes en bourse. Ces informations doivent tre incluses dans le rapport annuel dactivits, et/ou peut prendre la forme dun rapport de dveloppement durable. Suite au Grenelle de lenvironnement, cette obligation lgale pourrait prochainement tre largie aux

    entreprises non cotes dune certaine taille, et sans doute mme aux acteurs publics locaux (sous une forme adapte qui reste dfinir plus prcisment). Normes et standards Pour mettre en uvre ces dmarches, les entreprises disposent de diffrents rfrentiels ou autres outils de type standards ou normes portant sur les thmatiques sociales et environnementales. Cest le cas par

    exemple dans le domaine social des normes ISO 9000 (scurit) et SA 8000 (conditions de travail). Mais il existe aussi des outils en matire denvironnement : lEMAS (systme de management et daudit environnemental de lUnion Europenne) ou encore la norme ISO 14000. Ces outils sont relativement thmatiques et techniques, tourns sur lorganisation, et donne la plupart du temps accs une certification. Mais on constate galement lmergence doutils adoptant une dmarche plus transversale et ouverte, avec en particulier la norme ISO 26000 qui devrait tre oprationnelle dans le courant 2010. Cette norme internationale, conue comme un guide pratique (et donc non certifiable), a pour objectif de devenir une rfrence en matire de RSE, avec la particularit de proposer une mthode dimplication des parties prenantes assez prcise et structure. Elle sinspire pour partie

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    La RSE est critique par les libraux, qui rejettent notamment ses fondements : savoir que le libralisme conomique serait lorigine de dysfonctionnements cologiques et sociaux

    Les altermondialistes jugent quant eux ces dmarches trop timores, ne sattaquant pas au fondement du problme. Il sagirait par ailleurs de dmarches volontaires ayant pour objet principal de dissuader les Etats dune trop forte intervention.

    des travaux mens en France par lAFNOR avec le guide SD 21000, dj utilis par certaines entreprises. Outils de suivi et de reporting Certains outils de type norme ou standard intgrent ou peuvent tre accompagns doutils dvaluation ou daudit. Cest le cas par exemple de la mthode AFAQ 1000NR propose en France par lAFNOR, qui consiste en une valuation de la prise en compte du dveloppement durable dans le fonctionnement et la stratgie dun organisme, avec la particularit dimpliquer les parties prenantes dans le processus dvaluation (sur la base dentretiens). Dautres dmarches du mme type sont proposes par des agences de notation extra-financires, avec chaque fois lide de soumettre les activits de lentreprises un certain nombre de critres et de questionnements portant sur les enjeux du dveloppement durable, et donnant lieu au final une notation qui peut ensuite tre exploite par lorganisme dans sa communication interne ou externe (Cf. section 5).

    4. Principales critiques Les critiques lgard de la RSE sont nombreuses et proviennent de deux clans a priori opposs : les libraux et les altermondialistes. Pour les premiers, la RSE est une dmarche qui va lencontre de la rationalit pure des marchs et qui rduit le pouvoir des actionnaires en sintressant

    galement aux points de vue des parties prenantes. Partant du principe que la recherche de profits est la motivation premire de laquelle dcoule ensuite la dynamique conomique (et par ruissellement la rpartition des richesses et le bien-tre du plus grand nombre) Milton Friedman rejetait ds les annes 1970 la notion de responsabilit sociale en affirmant de manire ironique que la responsabilit sociale du business est daccrotre ses profits (cit par Ros, 2007). Erwann Quinnec se positionne lui aussi dans cette perspective librale (ou plus exactement libertarienne) : partant du principe que la somme des intrts individuels quivaut plus ou moins lintrt gnral, il en dduit quil est aussi faux que dangereux de postuler une

    antinomie dintrts entre shareholders et stakeholders (Quinnec, 2004). Cette posture se fonde donc sur un rejet de lide selon laquelle le libralisme conomique serait responsable des maux cologiques et sociaux dnoncs par une partie grandissante de la socit civile constat qui lgitime la dmarche de RSE.

    Pour une partie des mouvements altermondialistes, au contraire, la RSE nest quun pansement sur une jambe de bois. Elle viserait prner une autorgulation des firmes multinationales, sous couvert dune soit disant gouvernance largie, ceci afin dviter que des rglementations nationales et internationales ne leur soient imposes. Le fait que ces dmarches alimentent de plus en plus les stratgies de marketing des entreprises est galement dnonc comme une forme nouvelle de greenwashing. La RSE aurait donc de nombreux effets pervers, et serait avant tout un outil permettant aux grandes entreprises de surmonter les critiques de plus en plus virulentes en affichant dans le meilleur des cas quelques actions exemplaires et superficielles, et ce sans remettre fondamentalement en cause

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    La notion de RSE en tant que telle est trs peu approprie par les acteurs publics, qui disposent par ailleurs doutils spcifiques pour mettre en uvre le dveloppement durable.

    Les collectivits territoriales ont pu nanmoins utiliser, ici et l, certains outils sinscrivant dans des dmarches de type RSE, comme par exemple les outils de management environnemental (EMAS, ISO 14001) ou encore les outils de notation extra-financire.

    leur finalit premire : savoir la course au profit et laccumulation course qui serait elle-mme la source des problmes sociaux et cologiques. Do le rejet de plus en plus important des dmarches de RSE parmi certains des mouvements les plus critiques lgard du capitalisme (Robert-Demontrond & Joyeau, 2009 ; Capron & Quairel-Lanoizele, 2007). Une autre limite des dmarches de RSE tient au fait quelles peuvent sappliquer diffremment dun pays un autre, et ce pour une mme entreprise. Ainsi, la mondialisation se caractrise par une stratgie de dlocalisation des multinationales pour trouver des conditions de production moins contraignantes dans les pays du Sud, ce qui nempche pas certaines dentre elles de dvelopper une dmarche de RSE sous prtexte de contraintes volontaires quelles simposeraient dans ces mmes pays lgard des salaris ou de lenvironnement. Or ces contraintes ne correspondraient mme pas au niveau rglementaire exig dans les pays du Nord. Lengouement actuel pour la responsabilit socitale seffectuerait donc dans un contexte marqu par une irresponsabilit sans cesse grandissante des entreprises (Descollonges & Saincy, 2004).

    5. RSE et collectivits territoriales Les acteurs publics semblent jusqu prsent peu concerns par les dmarches de RSE. Et pour cause puisque celles-ci ont t dveloppes prioritairement pour des

    organismes privs, et en particulier pour des entreprises multinationales. La rticence des collectivits territoriales sengager dans des dmarches se rfrant explicitement la notion de RSE sexplique donc probablement au moins pour deux raisons : dune part les collectivits disposent doutils spcifiques visant la mise en uvre du dveloppement durable (en particulier les agendas 21 locaux) ; dautre part elles peuvent savrer rticentes lide dadopter des outils provenant dorganismes privs dont on sait quils jouissent en matire de dveloppement durable dune image plutt ngative dans le grand public alors mme que les acteurs publics locaux

    disposent dune image plutt positive. Les exprimentations menes jusqu prsent se concentrent donc sur des tentatives dadaptation de certains outils thmatiques, comme par exemple la notation extra-financire ou encore les outils de certification environnementale. Les outils normatifs appliqus aux collectivits : ISO, EMAS certains outils

    cits plus haut ont t utiliss avec succs au sein des collectivits territoriales, en particulier dans le domaine de la scurit ou de lenvironnement (ISO 9001 et ISO 14001, mais aussi EMAS). Les expriences sont encore assez peu nombreuses en France (tout au plus quelques dizaines pour ce qui concerne le management environnemental) mais les rsultats montrent que la dmarche est tout fait applicable lchelle dun organisme public (Dumurgier et coll., 2005). Ce genre dinitiative nest dailleurs pas incompatible avec une stratgie plus large, et lengagement dans un processus de management environnemental peut tout fait se prsenter comme une action part entire dun agenda 21 local. Il faut dailleurs noter que la mise en place dun systme de management environnemental peut prendre deux formes : il peut se dvelopper dans les processus internes de la collectivit ou dans la politique mene

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    par la collectivit sur son territoire (ADEME, 2006). En France, une dmarche dadaptation des outils de management du dveloppement durable a galement t mene lchelle des collectivits territoriales, avec en particulier des exprimentations dapplication du guide SD 21000 (AFNOR, 2006). La norme ISO 26000 est dailleurs annonce elle aussi comme pouvant sappliquer toute forme dorganisme, priv ou public. Mais force est de constater jusqu prsent que lide sest encore peu diffuse parmi les collectivits, qui prfrent gnralement sengager sur des dmarches de type agenda 21. La notation extra-financire des collectivits plusieurs agences prives ont propos des outils de notation de la performance environnementale et sociale adapts aux collectivits territoriales. Le principe consiste valuer la prise en compte des enjeux du dveloppement durable par la collectivit dans ses politiques et son fonctionnement propre, en utilisant un systme de notation bas sur une observation des meilleures pratiques constates. Il sagit donc, pour chaque enjeu de dveloppement durable, de situer la collectivit par rapport ce que ralisent dautres organismes publics, en recueillant les tmoignages et les avis des diffrents acteurs, en interne et en externe. Le rendu final prend alors gnralement la forme dun profil dveloppement durable, et mme dune note globale (par exemple AAA, AA, A, BBB, etc.) laquelle sajoute souvent une tendance (++, +, -, --). Il est noter que lidentification des meilleures pratiques, auxquelles la collectivit analyse est compare, prsente lavantage de permettre une identification quasi immdiate des pistes damlioration possibles. Cela rend galement le systme de notation dynamique les niveaux de notation voluant en mme temps que les bonnes pratiques. La collectivit peut ensuite librement choisir dutiliser ou non ce bilan dans sa communication (Cf. encart).

    La notation extra-financire applique aux collectivits : quelques exemples LAssociation des Communauts Urbaines de France (ACUF) a initi en 2006 une exprimentation visant tester deux mthodes de notation extra-financire proposes pour les acteurs publics locaux. Deux collectivits volontaires et deux mthodes de notation ont t retenues : le Grand Lyon a t audit par BMJ Urbi-Valor et Marseille mtropole par Innovest. Les tests ont eu lieu dans le courant de lanne 2006. Les mthodes proposes sont diffrentes, mais leurs lignes directrices sont conformes aux processus de notation extra-financire utiliss dans les entreprises : une grille de lecture abordant les diffrents aspects du dveloppement durable sert de support une analyse dtaille des politiques menes par la collectivit, reposant sur la lecture de documents et lentretien avec les responsables concerns (directeurs de services et/ou lus). Chaque critre donne lieu une notation, qui positionne la collectivit par rapport aux meilleures pratiques constates auprs dautres organismes publics. Les notations sont ensuite agrges, parfois pondres, pour obtenir au final une note globale. Dans certains cas la note donne le droit la collectivit de disposer dun label attribu pour une dure dtermine. Dans tous les cas la collectivit est ensuite libre de communiquer sur ses rsultats. Batrice Hraud note que si dcrocher un A ou un B est souvent la premire motivation des collectivits qui les sollicitent, les agences prviennent : vu le faible nombre daudits lheure actuelle et leur diffrents tats davancement, lintrt rside davantage dans le diagnostique et les recommandations. La note est accessoire , affirme ainsi Chlo Ledoux, ladjointe au directeur des missions dArcet Notation. Certes, mais elle est aussi un lment cl de communication (). Et la note est rarement mauvaise (). Chez BMJ le responsable dUrbi Valor, Benot Agassant avoue lui aussi que pour linstant, les notes sont comprises entre BB et AA, ce qui sexplique notamment par le fait que les collectivits nous sollicitent volontairement et sont donc dj engages dans un processus . De l penser quil est difficile pour les agences de mal noter leurs clients Batrice Hraud constate en tout cas que le march de la notation extra-financire est trs disput, et que le retour sur investissement pour les collectivits savre souvent trs intressant en matire dimage (Hraud, 2009). Hlne Combe et ses collgues, qui ont suivi lexprimentation mene par lACUF, sont plus critiques et considrent au final que ces mthodes sont peu adaptes aux enjeux de lvaluation du dveloppement durable (Combe et coll., 2008). Pour le dlgu gnral de lACUF, les mthodes utilises ne couvrent pas suffisamment le champ que lon peut en attendre . Par ailleurs, les acteurs publics semblent assez rticents lide dtre valus sur la base de critres qui ne correspondent pas forcment leur vision du dveloppement durable, qui plus est lorsque ces critres sont imposs par des organismes privs dont la lgitimit est pour le

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    moins discutable : nous ne voulons pas nous faire imposer un systme de notation auquel nous naurions pas t associs confirme le dlgu gnral de lACUF (cit par Hraud, 2009). Il est noter que lanalyse effectue par le Grand Lyon en 2006 (note A+) na dailleurs gure t exploite jusqu prsent (BMJ ratings & Grand Lyon, 2007).

    L encore, les expriences se sont dveloppes auprs des collectivits sans pour autant que lon puisse parler de vritable engouement (Chron & Ermisse, 2008). Dune part, le retour sur investissement semble intressant pour les collectivits en matire dimage et de potentiel de communication. Mais cette utilisation peut tre double tranchant pour les collectivits, car si les risques de mauvaise note sont en effet plus que faibles, il faut en revanche prendre en compte le fait que les agences de notation ont t trs critiques depuis lclatement de la crise financire ce qui par cascade entrane une certaine mfiance lgard des dmarches dvaluation pilotes par des organismes privs dont la lgitimit pose de plus en plus question.

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    Rfrences ADEME, 2006. Certification ISO 14001 des services de la Ville de Villers-Cotterts , Fiche Les exemples suivre, ADEME : http://www2.ademe.fr/servlet/getBin?name=FB7AB307BD7047E8FDA24E364D87506A1193315406604.pdf AFNOR, 2006. Dveloppement durable et responsabilit socitale. SD 21000 appliqu aux collectivits territoriales. Guide pour la prise en compte des enjeux de dveloppement durable dans la stratgie et le management des collectivits territoriales, Ed. FNOR, Paris. BMJ Ratings, Grand Lyon, 2007. Rapport de mission de notation extra-financire pour la Comunaut urbaine de Lyon, BMJ Ratings, Paris. www.communautes-urbaines.com/Download/Rapport_de_Notation_BMJ_GrandLyon.pdf Capron M., Quairel-Lanoizele F., 2007. La responsabilit sociale dentreprise, Collection Repres, Edition La Dcouverte, Paris. Chauveau A., Ros J-J., 2003. Lentreprise responsable, Editions dOrganisation, Paris. Chron M., Ermisse L., 2008. Repres sur lvaluation au regard du dveloppement durable, Les cahiers de lobservatoire n2, Observatoire national des agendas 21 locaux et pratiques territoriales de dveloppement durable, Paris. Combe H., Landel O., Goxe A., 2008. La notation extra-financire : une voie pour lvaluation des politiques publiques au regard du dveloppement durable ? , pp. 91-125 in Lazzeri Y. (dir.), Dveloppement durable, entreprises et territoires, LHarmattan, Paris. Commission europenne, 2001. Livre vert : Promouvoir un cadre europen pour la responsabilit sociale des entreprises, Office des publications officielle des communauts europennes, Luxembourg. Descollonges M., Saincy R., 2004. Les entreprises seront-elles un jour responsables, Editions La Dispute, Paris. Dumurgier H., Moinier M., Bost F., 2005. Management environnemental et collectivits territoriales, Editions Techni-cits, Voiron. Hraud B., 2009. Les collectivits font valuer leur politique dveloppement durable , in Novethic, 23 avril 2009 : http://www.novethic.fr/novethic/planete/institution/collectivites_locales/les_collectivites_font_evaluer_leur_politique_developpement_durable/120098.jsp Ros J-J., 2007. La RSE saffirme comme rponse lexcs de pouvoir des firmes multinationales , in Journal du Net, 12 juin 2007 : http://www.journaldunet.com/management/0706/0706191-rse-et-mondialisation.shtml MEEDDM, 2009. Responsabilit Sociale des Entreprises , article en ligne sur le site du MEEDDM : http://www.developpement-durable.gouv.fr/spip.php?page=article&id_article=12751

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    Quinnec E., 2004. Un il libertarien sur la Responsabilit Socitale des Entreprises , in Le Qubcois Libre, n148 Robert-Demontrond P., Joyeau A., 2009. Rsistances la RSE : de la critique de lauto-rgulation la critique du systme capitaliste , Actes du colloque du Rseau International de Recherche sur les Organisations et le dveloppement durable, 25-27 juin 2009, Lille.