518
1 LE DROIT À L’EAU POTABLE ET À L’ASSAINISSEMENT, sa mise en œuvre en Europe THE IMPLEMENTATION OF THE RIGHT TO SAFE DRINKING WATER AND SANITATION IN EUROPE Académie de l’Eau France 2011

LE DROIT À L'EAU POTABLE ET À L'ASSAINISSEMENT, sa mise

  • Upload
    lexuyen

  • View
    254

  • Download
    12

Embed Size (px)

Citation preview

  • 1

    LE DROIT LEAU POTABLE

    ET LASSAINISSEMENT,

    sa mise en uvre en Europe

    THE IMPLEMENTATION OF THE RIGHT TO

    SAFE DRINKING WATER AND SANITATION

    IN EUROPE

    Acadmie de lEau

    France

    2011

  • 2

  • 3

    Sous la direction de

    Henri SMETS Membre de lAcadmie de lEau

    LE DROIT LEAU POTABLE ET

    LASSAINISSEMENT,

    sa mise en uvre en Europe

    THE IMPLEMENTATION OF THE RIGHT TO

    SAFE DRINKING WATER AND SANITATION

    IN EUROPE

    Rapport prpar pour le

    6me Forum Mondial de lEau, Marseille, 2012

    Acadmie de lEau

    France

    2011

  • 4

    Principales publications de l'Acadmie de l'Eau dans le domaine du droit l'eau potable et l'assainissement

    Par lAcadmie de lEau. Site : www.academie-eau.org

    Le droit l'eau (2002)

    The cost of meeting the Johannesburg targets for drinking water (2003)

    Pour un droit effectif l'eau potable (2005)

    Le droit l'eau en Afrique et en Europe (2005)

    Par lAgence franaise pour le dveloppement (AFD)

    Le droit l'eau dans les lgislations nationales (2005)

    The right to water in national legislations (2005)

    La reconnaissance officielle du droit l'eau en France et l'international (2006)

    Par les ditions LHarmattan, Paris

    La solidarit pour l'eau potable (2003)

    Par les ditions Johanet, Paris

    La prise en charge des dettes d'eau des usagers dmunis en France (2008)

    De l'eau potable un prix abordable (2009)

    Le droit l'assainissement dans les lgislations nationales (2010)

    La mise en uvre du droit leau. Les solutions Paris (2011)

    La tarification progressive de leau potable (2011)

    Cet ouvrage a t ralis avec le soutien

    de la Coalition Eau qui regroupe 31 ONG

    du secteur de leau en France

  • 5

    LE DROIT LEAU POTABLE ET

    LASSAINISSEMENT,

    sa mise en uvre en Europe

    THE IMPLEMENTATION OF THE RIGHT TO

    SAFE DRINKING WATER AND SANITATION

    IN EUROPE

    Sous la direction de HENRI SMETS,

    avec des contributions de :

    Catarina de Albuquerque Sarah Hendry

    David Alves Lucrezia Iapichino

    Isabel Andrade Silke R. Laskowski

    Helle Tegner Anker Valentine Maire

    Lasse Baaner Alexey Makrushin

    Antti Belinskij Victor Marcusohn

    Jean-Pierre Cabouat Andreas Mtzler

    Maguelonne Djeant-Pons Grard Payen

    Peter De Smedt Yvonne Scannell

    Otto Dietrich Henri Smets

    Bernard Drobenko Pascale Steichen

    Willemijn Edinger Wieke Huizing Attila Tanzi

    Antonio Embid Irujo Frdric Tiberghien

    Lena Gipperth Sabrina Urbinati

    Francis Haumont Marleen van Rijswick

    Acadmie de lEau

    France

    2011

  • 6

  • 7

    PRFACE

    Il a fallu dix ans de dbats pour que le droit leau potable et

    lassainissement soit reconnu par les instances internationales au rang des Droits de

    lHomme. En Europe, des traits ont t adopts au plan rgional et mis en uvre

    pour rendre obligatoire laccs de tous leau potable et lassainissement. Des

    Gouvernements europens ont t condamns par des tribunaux pour non-respect

    de ce droit lmentaire, pour fourniture dune eau non potable, pour absence

    dassainissement et pour atteinte la dignit. Un logement sans eau, sans douche

    ou sans toilette est un logement indigne en France et ne peut plus tre mis en

    location.

    En pratique, tous les pays europens fournissent dores et dj laccs

    leau potable la grande majorit des habitants des villes o leau peut y tre

    consomme sans risque. Les pidmies lies leau ont quasiment disparu. Et les

    villes sans gout sont de plus en plus rares. Des investissements considrables ont

    d tre effectus pour que chacun puisse vivre dans un environnement sain.

    LEurope a dj mis en place la plupart des quipements ncessaires pour

    garantir laccs leau potable et lassainissement et a les moyens financiers pour

    rendre accessible tous leau potable et lassainissement. Mme si la mise en

    uvre du droit leau nest pas parfaite, elle rencontre assez peu dobstacles

    conomiques dans la plupart des pays.

    Malheureusement, tous les Europens ne bnficient pas des mmes

    conditions daccs leau ; des discriminations subsistent et l aux plans

    gographique, ethnique, conomique, etc. Cette minorit prive de ce droit

    reprsente cependant plusieurs dizaines de millions de citoyens, notamment en

    Europe orientale, qui boivent une eau insalubre, mettent en pril leur sant et ne

    bnficient pas de toilettes appropries.

    Dans ces pays, les conditions de vie en zone rurale ont peu volu quand

    elles nont pas rgress et dans trop de villages, il ny a ni eau potable, ni

    assainissement.

    Il reste donc de gros efforts faire en faveur des ruraux. Les habitants des

    zones privilgies majoritaires en Europe, devront faire preuve de plus de solidarit

    pour aider les ruraux rattraper rapidement le retard accumul.

  • 8

    Comme les services de leau et de lassainissement sont des services

    payants, il faudra vrifier que leur prix ne constitue pas un obstacle conomique au

    dtriment des plus pauvres, une minorit qui ne peut pas payer son eau. En effet,

    leau est devenue un droit, et nest plus seulement un bien ou un service la

    disposition des plus aiss.

    Mettre en uvre le droit leau potable et lassainissement dans chaque

    pays europen implique une action rsolue des Parlements sur un sujet qui ne

    concerne, certes, quune minorit pour laquelle il faudra cependant, le plus souvent,

    lgifrer afin quelle soit prise en compte avec de nouvelles dispositions pour

    installer des mcanismes de solidarit de financement envers les plus dfavoriss.

    Soucieux de traiter de leffectivit du droit leau et lassainissement,

    lAcadmie de lEau a charg lun de ses membres, Henri Smets, expert reconnu,

    de runir un ensemble de contributions pour montrer comment ce droit a t mis en

    uvre dans les pays europens et en particulier, en France. Les rapports ne se

    contentent pas de promouvoir un nouveau droit, ils mettent en vidence les

    dmarches entreprendre pour corriger les imperfections actuelles, dtaillent les

    lgislations nationales et cherchent en signaler les carences.

    Au plan mondial, il ne faut pas se bercer dillusions : le droit leau

    potable et lassainissement a t affirm par lONU, mais dans de nombreux

    pays europens, il nest pas reconnu en droit positif au plan interne. Quand il est

    juridiquement reconnu, son contenu est souvent vague ; ainsi, peu de pays ont

    interdit au distributeur de priver deau et de toilettes, les mnages pauvres en cas

    dimpays et il a fallu y associer des dispositifs sociaux complmentaires.

    Mettre en uvre le droit leau consiste agir de sorte que chacun acquiert

    et conserve son accs leau potable et lassainissement pendant toute sa vie.

    Pour y parvenir, des dispositions lgislatives protgeant lindividu et organisant la

    solidarit doivent tre adoptes.

    Affirmer un droit ne sert rien, sil nest pas prcis qui satisfera la

    demande et qui en payera le prix. Il faut donner leau celui qui a soif comme on

    donne le pain celui qui a faim et un vtement celui qui a froid. Leau est un bien

    essentiel auquel chacun a droit. La gnrosit doit suppler ltat de prcarit.

    LAcadmie de lEau en publiant ce livre avec Henri Smets espre

    contribuer ladoption rapide de solutions pour que lappel au droit leau et

    lassainissement se concrtise partout et pour tous.

    Professeur Marc Gentilini

    Prsident de lAcadmie de lEau

  • 9

    CET OUVRAGE A T RALIS GRCE AUX

    CONTRIBUTIONS DES AUTEURS SUIVANTS :

    Albuquerque Catarina de, UN Special Rapporteur on the right to safe drinking water and

    sanitation, OHCHR, Geneva, ([email protected]).

    Alves David, Strategic Projects Department, ERSAR, Portugal ([email protected]).

    Andrade Isabel, Legal Analysis Department, Entidade Reguladora dos Servios de guas e

    Resduos (ERSAR), Lisbon, Portugal ([email protected]).

    Anker Helle Tegner, PhD, Professor of Law, Faculty of Life Sciences, Copenhagen

    University. She is also co-ordinator of the Nordic Environmental Law, Governance

    and Science Network, Denmark (www.neln.life.ku.dk ) ([email protected]).

    Baaner Lasse, LLM, PhD candidate in environmental law, Faculty of Life Sciences,

    Copenhagen University, Denmark ([email protected]).

    Belinskij Antti, Researcher in Environmental Law, University of Helsinki, Finland

    ([email protected]).

    Cabouat Jean-Pierre, Ancien Ambassadeur, Trsorier honoraire de lAcadmie de lEau,

    Membre de la CNCDH, France ([email protected]).

    Djeant-Pons Maguelonne, Chef de la Division du patrimoine culturel, du paysage et de

    lamnagement du territoire, Secrtaire de la CEMAT, Conseil de lEurope ([email protected]).

    De Smedt Peter, Ph.D, Environmental Lawyer LDR, affiliate to the Centre for

    Environmental Law (Ghent University), Lawyer at the Bar in Ghent, founder of the

    environmental law firm LDR, Belgium ([email protected]).

    Dietrich Otto, Attorney at Law, Partner at Karasek Wietrzyk Rechtsanwlte GmbH, author

    of Access to Justice in Environmental Matters in Austria [together with M.A.

    Reiterer], Austria ([email protected]).

    Drobenko Bernard, Professeur des universits, Campus International de la Mer et de

    l'Environnement Littoral, Ple universitaire Lille-Nord, Universit du Littoral Cte

    d'Opale, Membre du Centre International de Droit Compar de l'Environnement,

    Limoges. Auteur : Code de leau, Lille-Nord, France ([email protected]).

    Edinger Wieke Willemijn Huizing, LLM, PhD candidate in food law, Faculty of Life

    Sciences, Copenhagen University, Denmark ([email protected]).

    Embid Irujo Antonio, Professor at the University of Zaragoza, Spain ([email protected]).

  • 10

    Gipperth Lena, Associate Professor in Environmental Law, Law department, University of

    Gothenburg, Sweden ([email protected]).

    Haumont Francis, Dr. en droit, Professeur extraordinaire l'Universit Catholique de

    Louvain, Avocat aux barreaux de Bruxelles et de Nice (Haumont-Scholasse et

    partners) ; auteur de plusieurs monographies sur le droit de l'urbanisme et de

    l'environnement, France ([email protected]).

    Hendry Sarah, Dr. Lecturer in Law, IHP-HELP Centre for Water Law, Science and Policy,

    Peters Building, University of Dundee, Dundee DD1 4HN, Scotland

    ([email protected]).

    Iapichino Lucrezia, Ph.D. University of Bologna, Italy ([email protected]).

    Laskowski Silke R., Professor at University of Kassel, Germany (Author of Das

    Menschenrecht auf Wasser ([email protected]).

    Maire Valentine, Juriste, Titulaire du Brevet davocat, DEA en relations internationales,

    Genve, Suisse ([email protected]).

    Makrushin Alexey, Director, National Union of Vodokanals, Moscow, Russian Federation

    ([email protected]) and ([email protected]).

    Marcusohn Victor, LLM en droit de l'environnement, Professeur assistant en droit civil et en

    droit de l'environnement la Facult de Droit de l'Universit cologique de Bucarest,

    Avocat au Barreau de Bucarest, Roumanie ([email protected]).

    Andreas Mtzler, Associate at Karasek Wietrzyk Rechtsanwlte GmbH, Lawyer, Vienna,

    Austria ([email protected]).

    Payen Grard, President of AquaFed (the International Federation of Private Water

    Operators) and member of the United Nations' Secretary-General Advisory Board on

    Water and Sanitation. Author of The right to have access to drinking water,

    economic, institutional and practical factors, IDEF 2005, France

    ([email protected]).

    Scannell Yvonne, LLM(Cantab), LLD (h.c.), Barrister, Professor in the Law School, Trinity

    College, Dublin. She also practices with Arthur Cox, Sollicitors, Ireland's leading

    environmental law firm. Author of Environmental and Land Use Law, Ireland

    ([email protected]).

    Smets Henri, D.Sc., Agrg, Membre de l'Acadmie de l'Eau, France. Ancien Professeur

    invit l'Universit de Paris 1 - Panthon-Sorbonne. Auteur: De l'eau potable un

    prix abordable (2009), France ([email protected]).

    Steichen Pascale, Professeure agrge de droit priv l'Universit de Nice-Sophia Antipolis.

    Directrice du Master Gestion Juridique des Risques et Dveloppement Durable.

    Avocate au Barreau de Nice. Membre du Centre de recherches en droit conomique

    (CREDECO/GREDEG CNRS -UMR 6227). Auteur de Les sites contamins et le

    droit, France ([email protected]).

  • 11

    Tanzi Attila, Ph.D. Full Professor of International Law, Faculty of Laws, University of

    Bologna. Former Chairman of the Compliance Committee of the UNECE Protocol

    on Water and Health (London, 1999) and Chairman of the Legal Board of the 1992

    UNECE Convention on the Protection and Use of Transboundary Watercourses and

    International Lakes (Helsinki, 1992), Italy ([email protected]).

    Tiberghien Frdric, Conseiller d'tat, France. Rdacteur des considrations gnrales 2010

    du Conseil d'tat sur "L'eau et son droit", France (frederic.tiberghien@conseil-

    etat.fr).

    Urbinati Sabrina, PhD, Chercheuse post doctorat auprs de la Facult de droit de

    lUniversit de Milano-Bicocca, Italie ([email protected]).

    van Rijswick Marleen, Dr. Full professor of European and Dutch Water Law at the Centre

    for Environmental Law and Policy and the Institute for Constitutional and

    Administrative Law, Utrecht University, the Netherlands ([email protected]).

    Le responsable de la publication exprime toute sa reconnaissance aux diffrents

    auteurs pour le soutien apport la ralisation de cet ouvrage. H.S.

    LISTE DES 17 PAYS EXAMINS

    Allemagne Italie

    Autriche Pays-Bas

    Belgique Portugal

    Danemark Roumanie

    cosse Russie

    Espagne Slovnie

    Finlande Sude

    France Suisse

    Irlande

  • 12

  • 13

    Toute personne est fonde obtenir la satisfaction des

    droits conomiques, sociaux et culturels indispensables sa dignit et au libre dveloppement de sa

    personnalit .

    (Dclaration universelle des droits de lhomme, Art. 22, 1948).

    Everyone is entitled to realization of the economic, social and cultural rights indispensable for his dignity

    and the free development of his personality.

    (Universal Declaration of Human Rights, Art. 22, 1948).

  • 14

  • 15

    INTRODUCTION

    Une perspective europenne concernant le droit leau potable

    et lassainissement Henri Smets.

    LEurope soutient le droit leau potable et lassainissement

    La France soutient la transcription du droit leau

    dans la ralit.

    LEspagne contribue la promotion internationale du droit leau

    Henri Smets

    Les besoins en eau potable dans le monde sont sous-estims :

    des milliards de personnes sont concernes Grard Payen.

  • 16

  • 17

    UNE PERSPECTIVE EUROPENNE CONCERNANT

    LE DROIT LEAU POTABLE ET LASSAINISSEMENT

    Henri Smets

    Acadmie de lEau, France

    1. Une obligation morale

    Dans la Gense, un serviteur demanda Rebecca:

    Laisse-moi boire, je te prie, un peu d'eau de ta cruche. Elle rpondit:

    Bois, mon seigneur. Et elle s'empressa d'abaisser sa cruche sur sa main, et

    de lui donner boire .

    Leau selon les traditions les plus anciennes est un bien collectif qui est rparti entre

    tous et chacun a droit en recevoir. On ne peut pas plus refuser laccs leau quattenter la

    vie dautrui. Selon la tradition musulmane, Il faut donner aux autres leau que lon nutilise

    pas soi-mme ainsi que leau pour tancher la soif (hadith Boukhari, Vol. 3, Livre 40,

    N543-544).

    la fin du XXme

    sicle, en raction une tentative de considrer leau comme une

    marchandise comme les autres, sest cr un puissant mouvement pour faire reconnatre le

    droit leau potable et lassainissement en tant que droit de lhomme.

    En 2006, le Conseil cumnique des glises a dcid d'appuyer la cration

    d'instruments juridiques et de mcanismes garantissant l'application du droit l'eau en tant

    que droit humain fondamental, aux niveaux local, national, rgional et international .

    En 2008, le Pape Benot XVI a dclar : En ce qui concerne le droit l'eau, il faut

    souligner qu'il s'agit d'un droit qui a son fondement dans la dignit de la personne

    humaine .

    Plus rcemment, lEncyclique Caritas in Veritate exposait :

    Le droit lalimentation, de mme que le droit leau, revtent un rle

    important pour lacquisition dautres droits, en commenant avant tout

    par le droit fondamental la vie. Il est donc ncessaire que se forme une

    conscience solidaire qui considre lalimentation et laccs leau comme

    droits universels de tous les tres humains, sans distinction ni

    discrimination 1.

    1 The right to food, like the right to water, has an important place within the pursuit of other rights,

    beginning with the fundamental right to life. It is therefore necessary to cultivate a public conscience

    that considers food and access to water as universal rights of all human beings, without distinction or

    discrimination. Pope Benedict XVI, Encyclical Letter Caritas in Veritate on Integral Human Development in Charity and Truth (2009).

  • 18

    Les reprsentants des diffrents mouvements de pense en Europe et des diffrents

    mouvements religieux sont tous devenus dardents dfenseurs du droit leau malgr les

    obstacles accumuls par les tenants de lultra-libralisme. Le Parlement europen et

    lAssemble parlementaire du Conseil de lEurope ont demand la reconnaissance officielle

    du droit leau comme droit de lhomme. Les reprsentants de la plupart des tats europens

    ont soutenu cette approche ou sy sont rallis (voir larticle suivant).

    2. Un droit officiellement reconnu

    Au plan politique, les tats ont soutenu de trs nombreuses dclarations et

    rsolutions en faveur du droit leau potable et un nombre plus faible en faveur du droit

    lassainissement. Au cours des annes 2000-2009, quelque 190 tats se sont prononcs

    officiellement en faveur du droit leau dans des runions au niveau ministriel. En juillet

    2010, au cours dun vote historique, lAssemble gnrale des Nations unies a reconnu le

    droit leau potable et lassainissement . On notera quaucun tat na vot contre cette

    rsolution2 et que dans des votes ultrieurs, au Conseil des droits de lhomme, il ny eut pas

    une seule abstention3.

    En revanche, quelques tats semblent toujours avoir des rticences et hsitent

    reconnatre officiellement ce droit. Parmi les tats europens, une quasi-unanimit prvaut

    sur ce sujet4, seul le Royaume-Uni ayant exprim clairement et de faon rptitive des

    rticences mais uniquement concernant le droit lassainissement5. On notera cependant

    2 Les diffrentes rsolutions cites figurent en annexe 2 de cet ouvrage. 3 On notera en particulier lappui affirm des tats au droit de lhomme leau lors de la dernire

    runion du Comit des droits de lhomme (septembre 2011). Dans une Rsolution, le Comit a salu

    (welcome), ce qui est une attitude positive et approbabatrice. The Council welcomes the recognition of

    the human right to safe drinking water and sanitation by the General Assembly and the Human Rights

    Council, and the affirmation by the latter that the human right to safe drinking water and sanitation is

    derived from the right to an adequate standard of living and inextricably related to the right to the

    highest attainable standard of physical and mental health, as well as the right to life and human

    dignity. This important Resolution (Annex 2) was co-sponsored by 65 States including: Albania, Algeria,

    Armenia, Andorra, Austria, Belgium, Benin, Bosnia and Herzegovina, Botswana, Bulgaria, Cambodia,

    Cape Verde, Chad, Chile, Costa Rica, Cte dIvoire, Croatia, Cyprus, Denmark, El Salvador, Estonia,

    Finland, France, Georgia, Germany, Greece, Guatemala, Honduras, Hungary, Iceland, Ireland, Italy,

    Latvia, Lithuania, Luxembourg, Morocco, Netherlands, Nigeria, Norway, Panama, Palestine, Peru,

    Poland, Portugal, Qatar, Macedonia, Maldives, Republic of Moldova, Monaco, Montenegro, Romania,

    Saint Kitts and Nevis, Senegal, Serbia, Slovakia, Slovenia, Solomon Islands, Spain, Sweden,

    Switzerland, Tajikistan, Tunisia, Ukraine, Uruguay, Zimbabwe and Yemen. For Europe,it should be

    pointed out that there are only a few missing states : United Kingdom, Czech Republic, Belarus and

    Turkey who are in fact lobbying against the text but not acting against its adoption. 4 On notera par exemple la dclaration du Reprsentant de lUE au Conseil des droits de lhomme

    (15 septembre 2011) qui a toutefois signal que tous les tats Membres ne reconnaissent pas qu'il

    s'agisse d'un droit . part le Royaume-Uni, il nest pas clair quels seraient les tats de lUE qui ne

    reconnaissent pas ce droit. Aucun autre reprsentant na tenu de propos semblables. 5 At the 64th General Assembly of the World Health Organisation (May 2011), the UK Government

    confirmed its position: Dr. Watt (United Kingdom of Great Britain and Northern Ireland) said that her

    Government was fully committed to supporting the achievement of the Millennium Development Goals

    and placed a high priority on providing the poorest people in the world with clean water and sanitation.

    Her Government recognized human rights that had a clear basis in international human rights law,

    thereby enabling each State to be aware of its obligations to its people, and each individual to know

    what his or her rights were. It recognized a right to water as an element of the right of everybody to an

    adequate standard of living, and acknowledged that inadequate sanitation undermined the protection of

    human rights. It did not, however, consider that a right to sanitation currently existed under international human rights law. Nor was there an internationally agreed definition of what such a right

  • 19

    quun certain conservatisme prvaut dans certains milieux europens o existe une certaine

    gne admettre que le droit leau potable et lassainissement a dsormais le statut dun

    droit de lhomme et quil sapplique de faon universelle y compris au plan interne.

    3. Un droit de lhomme encore mal dfini

    Le droit leau potable et lassainissement na pas jusquici t reconnu

    explicitement6 dans une convention mondiale7, mais il figure dj dans des instruments

    rgionaux (Amrique latine, Afrique, pays islamiques8). Quand bien mme ce droit serait

    reconnu en droit international positif, sa porte devrait tre clarifie. A quoi prcisment est

    tenu un Etat comme la France qui reconnat officiellement ce droit hormis aux dispositions de

    son droit interne ?

    Dans une rsolution adopte lunanimit en 2011 lors de sa 64me

    Assemble

    mondiale, lOrganisation mondiale de la Sant invite les tats membres soutenir la

    ralisation progressive du droit humain leau et lassainissement qui habilite chacun, sans

    discrimination, disposer pour son usage personnel et domestique dune eau et dun

    assainissement qui soient suffisants, sans risque, acceptables, accessibles physiquement et

    abordables . Cette dfinition a t adopte par les reprsentants des tats en pleine

    connaissance des implications que son adoption pourrait avoir. Elle a encore linconvnient

    dtre un peu imprcise et surtout de ne pas dfinir ce quil faut comprendre par

    assainissement.

    would comprise. Official Record A/64/B/PSR/5 (20th May 2011). 6 Ainsi lArt. 24.2 de la Convention sur les droits de lenfant prescrit que : Les tats parties prennent des

    mesures appropries pour lutter contre la maladie et la malnutrition, y compris dans le cadre des soins de

    sant primaires, grce notamment l'utilisation de techniques aisment disponibles et la fourniture

    d'aliments nutritifs et d'eau potable, compte tenu des dangers et des risques de pollution du milieu

    naturel . Il existe bien une obligation de lutter contre la maladie pour les tats mais pas un droit de

    lenfant leau potable. 7 On notera que certains pays font une analyse diffrente. Lors du dbat au Conseil des droits de

    lhomme en septembre 2011, M. Reinhard Schweppe, dlgu de lAllemagne parlant au nom d'un

    groupe de pays appel le Groupe bleu , a rappel que le droit l'eau et l'assainissement est inscrit

    dans de nombreux traits internationaux et a donc un caractre obligatoire. Le dfi reste de mettre en

    uvre ce droit et de le transformer en ralit. Le Groupe bleu est proccup par le fait que 884 millions de personnes n'ont pas accs l'eau potable et que 2.6 milliards d'habitants de la plante n'ont pas accs

    l'assainissement. Dans ce contexte, les pays membres du Groupe bleu restent engags mettre en

    uvre les droits de l'homme et notamment le droit l'eau et l'assainissement et soutenir la

    Rapporteuse spciale dans l'accomplissement de son mandat. 8 En 2004, la Ligue arabe adopte la Charte arabe des droits de lhomme qui reflte les tendances actuelles

    dans ce domaine. Toute personne a droit un niveau de vie suffisant, pour elle et sa famille, qui leur

    assure le bien-tre et une vie dcente, y compris la nourriture, les vtements, le logement et les services, et

    a droit un environnement sain. Les tats parties prennent les mesures requises en fonction de leurs

    ressources pour assurer ce droit (Art. 38). Les services associs au logement incluent leau et

    lassainissement. En effet, lArt. 39 prescrit : Les mesures que les tats parties prendront comprennent :

    la garantie chacun de la nourriture de base et de leau potable ; la lutte contre les facteurs de pollution de

    lenvironnement et fourniture de moyens dassainissement (en anglais : providing proper sanitation systems).

  • 20

    Concernant le droit leau potable, il existe depuis 2002 une dfinition qui fait

    autorit (Observation gnrale N15 du Comit des droits conomiques, sociaux et culturels9)

    mais qui nengage pas les tats. Concernant le droit lassainissement, il est mis en uvre au

    plan interne mais sa dfinition na pas encore fait lobjet dun vritable dbat au niveau

    international10. Il vise probablement protger la sant, la dignit et lenvironnement et

    comporte de nombreuses obligations. Il concerne des sujets dont on parle peu tels que les

    toilettes et les matires fcales mais ne sy limite pas. Aprs quelques hsitations, il semble

    actuellement acquis que lassainissement concerne toutes les eaux uses des mnages, eaux

    grises comme eaux noires11 et quil ne se limite en aucune faon un concept plus troit et

    dailleurs mal dfini comme lassainissement de base.

    En Europe, il est frquent que laccs leau et lassainissement soit peu

    subventionn et donc relativement cher. Comme le droit leau potable et lassainissement

    porte sur un service essentiel, voire vital, il est dsormais acquis que lexercice de ce droit ne

    doit pas tre limit par des considrations conomiques et que la personne concerne ne doit

    pas ptir du fait dun prix trop lev de ce service. Toutefois lobscurit est totale sur le sens

    prcis12 accorder la notion dun prix trop lev. Pour lUE, le droit un prix abordable de

    leau a t inscrit dans le Trait de Lisbonne (Protocole n9/26).

    4. Un droit partiellement protg en Europe

    Si lon peut regretter linexistence dun acte juridique contraignant au plan mondial

    instaurant le droit leau potable et lassainissement, la situation est diffrente en Europe

    car il ne manque pas de dispositions et dactes juridiques applicables.

    9 On notera tout particulirement le paragraphe 10 : Le droit leau consiste en des liberts et des

    droits. Parmi les premires figurent le droit daccs ininterrompu lapprovisionnement en eau

    ncessaire pour exercer le droit leau, et le droit de ne pas subir dentraves, notamment une

    interruption arbitraire de lapprovisionnement et davoir accs une eau non contamine. Par contre, les seconds correspondent au droit davoir accs un systme dapprovisionnement et de gestion qui

    donne chacun la possibilit dexercer, dans des conditions dgalit, le droit leau . 10 La dfinition de la Dclaration sur lassainissement adopte par le CDESC en novembre 2010

    (E/C.12/45/CRP.1) na quune lgitimit trs limite. Le texte ne correspond pas celui de la

    Rsolution de lAssemble gnrale des Nations unies (Annexe 2, A/RES/65/153 de dcembre 2010), ni

    la pratique des pays europens et il ne donne quune citation tronque du texte de lExpert

    indpendante.

    (Texte de la Dclaration du CDESC : 8. In line with the definition of sanitation as proposed by the

    Independent Expert on water and sanitation as a system for the collection, transport, treatment and

    disposal or re-use of human excreta and associated hygiene, States must ensure that everyone, without

    discrimination, has physical and affordable access to sanitation, in all spheres of life, which is safe, hygienic, secure, socially and culturally acceptable, provides privacy and ensures dignity). La

    rsolution de lAGNU a le mrite dmaner des reprsentants officiels des tats. 11 Selon Wateraid, sanitation is the collection, transport, treatment and disposal or reuse of human

    excreta, domestic waste water and solid waste, and associated hygiene promotion, The sanitation

    problem, Wateraid, 2011, p. 8. This definition was developed for the International Year of Sanitation

    2008 by the Water Supply and Sanitation Collaborative Council and approved by the UN-Water Task

    Force on Sanitation. For Europe, see definition in Protocol on Water and Health Sanitation means

    the collection, transport, treatment and disposal or reuse of human excreta or domestic waste water,

    whether through collective systems or by installations serving a single household or undertaking. 12 Dans louvrage De leau potable un prix abordable , lauteur ne conclut pas que le niveau de 3%

    des dpenses du mnage soit un niveau dinabordabilit dans tous les pays mais considre au vu de la

    pratique des tats que ce niveau est appropri pour les pays de lEurope de lOuest. Toutefois il y a peu dtats qui se soient prononcs dans ce sens.

  • 21

    Tout dabord, on peut prsumer que les Tribunaux internes en Europe considreront

    que le droit leau potable et lassainissement fait partie du droit un niveau de vie

    suffisant de lArt. 11 du Pacte, du moins dans tous les tats qui ont approuv cette

    interprtation. On voit mal un Tribunal en Europe qui refuserait une telle interprtation qui a

    reu, depuis 2010, un soutien quasi-unanime mme sil y eut de nombreuses abstentions en

    juillet 2010 lors du vote de lAssemble gnrale. Depuis lors, le camp des abstentionistes a

    quasiment disparu, mais il reste des rticents.

    Par ailleurs, il ne manque pas daccords internationaux trs pertinents mais limits

    lEurope qui couvrent trs bien le champ de ce droit. En particulier, des obligations

    internationales de fourniture deau et dassainissement sont nonces dans le Protocole Eau et

    Sant13 et des obligations de fournitures deau de qualit et dassainissement figurent aussi

    dans des directives communautaires.14

    Finalement, certains aspects du droit leau et lassainissement sont dj protgs

    par la Cour europenne des droits de lhomme (CEDH)15 et par le Comit europen des droits

    sociaux (CEDS)16 qui statue en droit sur la conformit des situations nationales avec la

    Charte sociale europenne rvise . Ainsi, la CEDH a dj condamn un tat pour un

    manque daccs des toilettes17 ou pour la dgradation de laccs leau potable. La CEDS a

    critiqu le manque dinstallations sanitaires pour les Roms18. Lorsque loccasion se

    prsentera, la CEDH apportera son soutien au droit leau.

    13 Ce protocole (OMS/CEE) relatif la Convention de 1992 sur la protection et lutilisation des cours

    deau transfrontires et des lacs internationaux a t ratifi par 16 pays et est entr en vigueur en aot

    2005. 14 Directive 98/83/CE du Conseil du 3 nov. 1998 relative la qualit des eaux destines la

    consommation humaine. Directive 2000/60/CE du 23 oct. 2000 tablissant un cadre pour une politique

    communautaire dans le domaine de leau. Voir les rapports nationaux dans cet ouvrage, la Compilation

    of Good Practices (A/HRC/18/33 Add.1, juillet 2011) prpare par lOHCHR, ltude UN-ECE : NO

    ONE LEFT BEHIND. Good practices to ensure equitable access to water and sanitation in the pan-

    European region, dec. 2011. Il existe peu de plans et de stratgies en Europe occidentale ou centrale pour le motif que les amliorations apporter sont marginales.

    15 Le droit la vie prive et familiale et au domicile (Art. 8 CEDH), le droit un procs quitable (Art. 6),

    le droit la vie (Art. 2) et le droit un recours effectif (Art. 13). 16 Le Comit europen des droits sociaux est une institution du Conseil de l'Europe, juge de la conformit

    des lgislations et des pratiques nationales des diffrents tats membres la Charte sociale europenne. 17 Payet c/ France Requte N19606/08, 20 janvier 2011. Peers c/Grce (Requte N28524/95, 19 avril

    2001. La Recommandation du Conseil de lEurope Rec(2006)2 du Comit des Ministres aux tats

    membres sur les Rgles pnitentiaires europennes prcise les conditions de dtention respecter dans

    le domaine de laccs leau et lassainissement : 19.3 Les dtenus doivent jouir dun accs facile

    des installations sanitaires hyginiques et protgeant leur intimit. 19.4 Les installations de bains et de

    douches doivent tre suffisantes pour que chaque dtenu puisse les utiliser, une temprature adapte au climat, de prfrence quotidiennement mais au moins deux fois par semaine (ou plus frquemment si

    ncessaire) conformment aux prceptes gnraux dhygine. 19.7 Des mesures spciales doivent tre

    prises afin de rpondre aux besoins hyginiques des femmes. 22.5 Les dtenus doivent avoir accs

    tout moment leau potable . 18 CEDS : LArticle 31, 1 garantit laccs un logement dun niveau suffisant, ce qui signifie un

    logement salubre (cest--dire disposant de tous les lments de confort essentiels : eau, chauffage,

    vacuation des ordures mnagres, installations sanitaires, lectricit) ; prsentant des structures saines ;

    non surpeupl ; et assorti d'une garantie lgale de maintien dans les lieux. Affaire CEDR c/Italie,

    7/12/2005. Selon le CEDS, il faut entendre par l un logement (voir CEDR c. Grce, rclamation

    N15/2003, dcision sur le bien-fond du 8 dcembre 2004, par. 24) - prsentant des structures saines -

    dot de tous les lments de confort essentiels (eau, chauffage, vacuation des ordures mnagres,

    installations sanitaires, lectricit), - dune taille suffisante compte tenu de la composition de la famille qui loccupe, - et assorti dune garantie lgale de maintien dans les lieux.

  • 22

    De son ct, la Cour de justice de lUnion europenne a condamn des tats pour

    manquement la mise en uvre de dispositions de droit communautaire en matire

    dassainissement ou de qualit des eaux de boisson. Son rle a t dterminant pour obliger

    les Etats installer plus dgouts et de stations de traitement des eaux uses19.

    Malgr lexistence de ces actes internationaux, il serait avantageux pour promouvoir

    le droit leau quexiste en Europe un texte de droit international sur le droit leau et

    lassainissement.

    5. Un droit mis en uvre principalement au niveau local

    La mise disposition dquipements de distribution deau et dassainissement nest

    pas laisse lentire discrtion des pouvoirs locaux car ceux-ci sont dj tenus par la plupart

    des lgislations nationales de prendre des mesures protectrices de la sant et de

    lenvironnement. Sils nont pas les moyens financiers, ces pouvoirs locaux sont tenus de les

    demander aux autorits suprieures. Pour obliger les autorits respecter les dispositions de

    droit interne, voire de droit international ou de droit communautaire, concernant leau et

    lassainissement, il faut gnralement sadresser aux tribunaux nationaux. Les chances de

    succs seront plus grandes si le plaignant peut se fonder sur des dispositions prcises dans

    lordre interne, car les dispositions gnrales du droit international ont peu deffets directs.

    6. Laccs leau et lassainissement dans la ralit europenne

    En Europe comme dans tous les pays dvelopps, presque tout le monde a dsormais

    accs leau potable et lassainissement (les statistiques europennes sont prsentes

    lannexe 1) et pour la plupart des personnes, le droit leau et lassainissement est une

    ralit. Le taux de mise en uvre de ce droit se situe au-del de 90% et atteint parfois 99%

    des personnes. Ce rsultat a t atteint par un effort continu commenc au XIXme

    sicle et

    surtout une amlioration considrable des conditions de vie aprs 1945. Il se caractrise par le

    branchement de tous les logements un rseau deau potable, la fourniture continue deau

    potable pr les rseaux, la prsence de lavabos, de douche/bain et de toilettes dans tous les

    logements et par lvacuation des eaux uses dans un gout ou un systme dassainissement

    individuel. Dautre part, les btiments publics et les lieux de travail (y compris les coles,

    hpitaux, mairies, etc.) ont un branchement leau potable et lassainissement.

    Il existe bien sr des diffrences dans le degr dquipement des mnages

    lintrieur des pays entre le monde urbain et le monde rural et entre pays europens trs

    dvelopps et pays moins dvelopps. Ces diffrences deviennent de moins en moins

    acceptables et sestompent progressivement.

    Nanmoins, le retard dans lquipement sanitaire est considrable en Europe de lEst

    et du Sud-est, particulirement dans les zones rurales (Annexe 1). Cette situation nest pas

    dramatique si lon se rappelle comment tait la France rurale en 1950. cette poque,

    seulement 5% des logements franais disposaient dinstallations sanitaires et de toilettes

    lintrieur des logements. En 1954, 27% seulement des logements avaient des toilettes

    intrieures.

    19 Sur ce sujet, voir le rapport de M. van Rijswick dans cet ouvrage.

  • 23

    En matire daccs leau, une partie importante de la population rurale en Europe

    orientale dpend encore aujourdhui de sources naturelles deau dune potabilit non

    garantie20. De lAtlantique lOural, plus de 75 millions deuropens nont pas accs de

    leau de rseau21. Ainsi en Roumanie, seuls 26% des habitants en zone rurale ont accs un

    rseau deau. Dans les zones urbaines, il existe des rseaux qui distribuent en permanence ou

    frquemment une eau insalubre. Comme dans le temps pass, lquipement en bains ou

    douches est parfois trs faible. Il concerne seulement 22% des logements en Bosnie-

    Herzgovine et 30% en Moldavie22.

    La situation en matire dassainissement est galement mauvaise dans certaines

    rgions. En 2006, plus dun quart des logements en zone rurale navaient pas

    dassainissement amliors dans des pays comme lAzerbadjan, la Lettonie, la Moldavie et la

    Russie. En Roumanie, la situation est encore pire avec 46% des logements en zone rurale sans

    assainissement amlior. Entre 1995 et 2006, on a observ peu damliorations des services

    deau dans le monde rural.

    Dans la plupart des pays europens, lvolution de laccs leau et

    lassainissement rpond aux Objectifs du Millnaire. Chaque pays fait des efforts pour

    accrotre le nombre de branchements et pour amliorer lassainissement. Toutefois les progrs

    sont trs insuffisants dans le secteur de laccs leau en Moldavie et dans le secteur de

    lassainissement de base en Azerbadjan, en Belarus, en Roumanie et en Russie. Dans

    quelques pays dEurope orientale, la situation se dgrade faute dentretien des installations

    existantes.

    Il existe donc en Europe des rgions o de grands progrs sont ncessaires pour que

    le droit de lhomme leau potable devienne une ralit. En particulier, il sera ncessaire de

    se proccuper des populations discrimines ou marginalises car on ne peut faire semblant

    dignorer les conditions de vie faites aux sans abri, aux personnes en grande prcarit et aux

    12 millions de Roms dans de nombreux pays europens. Lannexe 1 donne un aperu des

    millions de personnes trs dmunies en Europe.

    7. Des actions entreprendre dans les pays europens au plan interne

    Une fois reconnu officiellement en principe le droit leau potable et

    lassainissement, il convient de donner un caractre concret cette reconnaissance et de

    passer de laffirmation dun droit la mise en uvre de ce droit qui doit tre opposable.

    20 In a letter to Member States of 2/2/2011, the Commission General Director Falkenberg stated that

    more than one third of the small supplies (50 to 5 000 citizens) delivered water were not complying

    with the values set in the Drinking Water Directive and that EU citizens currently do not receive safe

    drinking water. En comparaison, la qualit de leau dans les villages franais est trs bonne. 21 Sur la base des statistiques officielles, la population sans accs leau de rseau dpasse 108 millions

    de personnes (annexe 1). Elles se rpartissent en 24 millions de personnes dans 17 pays dEurope de

    lEst et du Sud-est, 54 millions de personnes en Belarus, Russie, Ukraine, Armnie, Azerbadjan et

    Gorgie, et 30 millions de personnes en Asie centrale (5 pays). Il manque des statistiques sur la qualit

    de leau des rseaux, surtout dans le monde rural. Bien que cela soit gnralement contraire la loi, de

    nombreux rseaux en Europe de lEst fournissent une eau non potable ou insalubre. Parmi les personnes

    avec eau de rseau, il existe une proportion significative qui ne reoit pas deau potable (voir article de

    G. Payen). 22 United Nations: The MDGs in Europe and Central Asia: Achievements, Challenges and the Way

    Forward, 2011.

  • 24

    Plusieurs questions se posent :

    i) Qui na pas accs leau potable et lassainissement en Europe ? Cette situation est-elle en conformit avec le droit positif en vigueur dans le pays

    concern ?

    ii) La loi interne reconnat-elle le droit individuel leau potable et lassainissement ? Permet-elle des recours de la part des citoyens ?

    iii) Quelles sont les amliorations envisageables au plan lgislatif, rglementaire et institutionnel pour mieux garantir la mise en uvre au plan interne du droit

    leau potable et lassainissement ?

    Bien videmment, la solution des ces questions ncessitera dans de nombreux cas de

    procder aux travaux dentretien et de rparation et de renforcer les investissements. Une

    augmentation des prix des services sera ncessaire mais il faudra tenir compte des aspects

    sociaux et ne pas ignorer que pour un nombre important dEuropens le service de leau est

    dj ou risque dtre inabordable.

    8. Mise en uvre effective du droit leau comme droit de lhomme en Europe

    Le Conseil des droits de lhomme ne sest pas content daffirmer lexistence du

    droit leau potable et lassainissement. Il a prcis23 que les tats devraient laborer les

    outils et mcanismes appropris, qui peuvent consister en des mesures lgislatives, des

    stratgies et plans gnraux pour ce secteur, y compris caractre financier, pour atteindre

    progressivement le plein respect des obligations en matire de droits de l'homme qui

    concernent l'accs l'eau potable et l'assainissement, notamment dans les rgions

    actuellement non desservies ou mal desservies .

    En outre, les Etats devraient assurer la totale transparence de la procdure de

    planification et de mise en uvre dans la fourniture d'eau potable et de services

    d'assainissement ainsi que la participation active, libre et authentique des communauts

    locales concernes et des parties prenantes intresses .

    De plus, ils devraient accorder une attention particulire aux personnes appartenant

    aux groupes vulnrables et marginaliss, en veillant notamment au respect des principes de

    non-discrimination et d'galit entre les sexes .

    Les trois volets de cette stratgie adopte par le Conseil des droits de lhomme sont :

    i) dvelopper un plan daction et des lois ; ii) assurer la transparence et promouvoir la participation; iii) veiller la protection des minorits.

    En Europe, les deux derniers volets sont dj couverts par des conventions

    rgionales et des lgislations nationales. Ainsi, la convention dAarhus oblige les parties

    contractantes (44 pays) informer le public et organiser la participation24. Il faut maintenant

    23 Rsolution adopte par la Conseil des Droits de lHomme (A/HRC/RES/15/9) sur le droit de lhomme

    et laccs leau potable et lassainissement. 24 Convention sur l'accs l'information, la participation du public au processus dcisionnel et l'accs la

    justice en matire d'environnement (Aarhus 1998).

  • 25

    lappliquer de faon plus complte dans le domaine de laccs leau et lassainissement.

    Le droit communautaire traite aussi de ces questions. Dans lUnion europenne, la Cour de

    justice peut contribuer rendre effectif la Charte europenne des droits fondamentaux,

    notamment en matire de protection du droit la dignit et de mise en uvre des directives

    (qualit de leau, eaux uses)

    Deux conventions rgionales permettent de lutter contre les discriminations et de

    protger les minorits si elles nont pas accs leau et lassainissement (Convention de

    sauvegarde des droits de l'homme et des liberts fondamentales, Art. 14 et Protocole N12,

    Charte sociale rvise, Arts. 30 et 31). Ces conventions ont chacune un mcanisme propre de

    mise en uvre.

    Par ailleurs, au cours des dernires annes, quelques pays europens ont pris des

    mesures au plan lgislatif pour rendre opposable le droit leau potable et lassainissement.

    Ainsi la France a adopt au cours des cinq dernires annes cinq nouvelles dispositions

    lgislatives diffrentes pour amliorer laccs leau et lassainissement (voir section

    France, chapitre 2).

    Mais dune manire gnrale, on doit constater lexamen des rapports nationaux25,

    les faibles progrs au cours des annes rcentes dans les pays europens en vue de donner

    plus de porte au droit leau et lassainissement. Devant une telle passivit en Europe et

    ailleurs, le Secrtaire gnral des Nations unies Ban Ki Moon sest adress aux

    Gouvernements et leur a expos que les pays qui navaient pas encore inscrit le droit leau

    potable et lassainissement dans leur ordre interne devraient le faire sans dlai 26.

    Des rsolutions ont t adoptes par le Conseil des droits de lhomme dans le mme

    sens. En particulier, il conviendra de mettre en uvre la recommandation du Conseil des

    droits de lhomme de septembre 2011 qui invite les tats amliorer leur lgislation :

    To assess whether the existing legislative and policy framework is in line

    with the right to safe drinking water and sanitation and to repeal, amend

    or adapt it in order to meet human rights standards and principles.

    La question fondamentale en Europe est dassurer une mise en oeuvre aussi complte

    que possible de ce droit qui est devenu un droit de lhomme. Les pays europens ne devraient

    pas avoir trop de difficults puisquils satisfont dj de nombreuses obligations en matire

    daccs leau et lassainissement et ne devraient rencontrer que peu dobstacles pour

    rendre ce droit opposable.

    Les tats europens se sont dj engags par un trait en vigueur agir au niveau

    lgislatif. Aux termes de lArt. 2 du Pacte international relatif aux droits conomiques,

    sociaux et culturels27, les tats parties sont dj tenus dagir au maximum de leurs

    ressources disponibles, en vue d'assurer progressivement le plein exercice des droits reconnus

    25 Voir les rapports nationaux dans cet ouvrage, la Compilation of Good Practices (A/HRC/18/33 Add.1,

    juillet 2011) prpare par lOHCHR, ltude du CEE-NU sur les pratiques quitables (dc. 2011). Il

    existe peu de plans et de stratgies en Europe occidentales ou centrales pour le motif que les

    amliorations apporter sont marginales. 26 Adresse du 27 juillet 2011 lONU. Reproduite dans cet ouvrage en tte du Chapitre 2. 27 Chacun des tats parties au prsent Pacte s'engage agir, tant par son effort propre que par l'assistance et

    la coopration internationales, notamment sur les plans conomique et technique, au maximum de ses

    ressources disponibles, en vue d'assurer progressivement le plein exercice des droits reconnus dans le prsent Pacte par tous les moyens appropris, y compris en particulier l'adoption de mesures lgislatives.

  • 26

    dans le prsent Pacte par tous les moyens appropris, y compris en particulier l'adoption de

    mesures lgislatives . Les tats europens devraient donc adopter des textes de droit interne

    en vertu desquels le droit leau serait considr comme tant un droit opposable. En

    particulier, ils devraient prciser quelle autorit doit intervenir pour que ce droit soit effectif.

    Comme le montrent les tudes nationales de cet ouvrage, la plupart des pays

    europens ont charg les autorits locales ou rgionales de cette tche. Lencadr 1 donne

    quelques exemples daffirmation de ce droit leau en termes gnraux. Toutefois ces textes

    ne sont pas suffisants par eux-mmes car il faudra aussi prciser comment est assur laccs

    leau pour les plus dmunis, les plus isols et les plus vulnrables.

    CONCLUSIONS

    En Europe, la voie normale pour mettre en uvre le droit leau potable et

    lassainissement implique que les Parlements nationaux de la plupart des pays se saisissent de

    ce sujet et amendent et compltent les lgislations sur leau potable et lassainissement dans

    des aspects o cela parat particulirement ncessaire. Un premier objectif est de veiller

    assurer autant que possible laccs leau potable et lassainissement aux minorits

    dmunies ou vulnrables qui en sont dmunies. Il va de soi que des investissements

    supplmentaires peuvent savrer ncessaires, notamment en zone rurale et dans les

    priphries des villes, car il existe de grandes disparits gographiques dans laccs leau.

    Indpendamment de cette action au plan interne, il serait utile dentamer, dans la

    perspective dune action au niveau international, lexamen dun texte par lequel le droit

    leau potable et lassainissement serait formellement reconnu comme un droit de lhomme.

    En effet, certaines critiques faites lencontre de la rsolution de lAssemble gnrale des

    Nations unies ne sont pas sans objet. Il parat en effet difficile dassurer leffectivit dun

    droit si celui-ci est mal dfini ou si sa dfinition ne fait pas lobjet dun consensus. Il est

    indispensable de bien prciser les obligations respectives des diverses autorits comptentes

    pour que le droit leau soit un droit opposable.

    Par ailleurs, il existe une responsabilit des tats membres de lUnion europenne de

    mettre en uvre en droit communautaire, le droit un service dintrt conomique gnral

    relatif leau car ceci implique dapporter pour des motifs dordre social des drogations aux

    rgles gnrales applicables en droit communautaire. Ayant accept au sein du Conseil de

    lUE des obligations internationales en matire daccs leau et lassainissement, les tats

    membres pourraient mettre en uvre les droits associs aux obligations souscrites.

    Pour que le droit leau pour tous devienne progressivement une ralit dans toute

    lEurope, il faudra sinspirer des solutions mises en place dans les pays europens les plus

    avancs. Toute lEurope reconnat lexistence dun droit leau potable mais seule une petite

    partie des pays peut affirmer que ce droit est juridiquement reconnu dans leur ordre interne.

    Les tudes prsentes dans cet ouvrage montrent la diversit des approches et des degrs

    davancement pour faire du droit leau un vritable droit de lhomme. Elles montrent aussi

    que des dizaines de millions dEuropens ne bnficient pas du droit leau potable et

    lassainissement et ont besoin de laide des pays les plus dvelopps pour surmonter leur

    retard.

  • 27

    Encadr 1

    EXEMPLES DE DISPOSITIONS LGISLATIVES INSTAURANT LE DROIT

    LEAU POTABLE EN EUROPE28

    Droit communautaire

    Les services de leau potable et de lassainissement sont considrs en droit communautaire

    (DCE, 2000/60/CE, Pramb. 15) comme des services dintrt gnral. A ce titre, ils doivent

    satisfaire des critres noncs dans le Protocole N9 (actuellement N26) sur les services

    dintrt gnral au Trait de Lisbonne (2007) :

    Les valeurs communes de lUnion concernant les services dintrt conomique gnral

    comprennent notamment... un niveau lev de qualit, de scurit et quant au caractre

    abordable, lgalit de traitement et la promotion de laccs universel et des droits des

    utilisateurs . (A high level of quality, safety and affordability, equal treatment and the

    promotion of universal access and of user rights).

    CEE-ONU

    Dans le cadre de la Commission conomique pour lEurope, le Protocole sur leau et la sant

    (1999) nonce les critres auxquels laccs leau doit satisfaire : Un accs quitable

    l'eau, adquat du point de vue aussi bien quantitatif que qualitatif, devrait tre assur tous

    les habitants, notamment aux personnes dfavorises ou socialement exclues .

    Belgique

    En 1996, la Rgion flamande a adopt un dcret qui stipule que :

    Chaque abonn a droit une fourniture minimale et ininterrompue dlectricit, de gaz et

    deau des fins dutilisation mnagre afin de pouvoir mener une vie dhomme suivant le

    niveau de vie en vigueur .(Dcret du 20 dcembre 1996 de la Rgion flamande (Art. 3).

    En 1999, la Rgion wallonne a adopt un dcret qui stipule que :

    Toute personne a droit de disposer dune eau potable de qualit et en quantit suffisantes

    pour son alimentation, ses besoins domestiques et sa sant . (Dcret du 15 avril 1999 de la

    Rgion wallonne relatif au cycle de leau et instituant une entreprise publique de gestion de

    leau (Arts. 1.2, 4.2 et 6.2.5).

    En 2006, la Rgion Bruxelles-Capitale a adopt une ordonnance qui stipule que :

    Toute personne a le droit de disposer d'une eau potable de qualit et en quantit suffisante

    pour son alimentation, ses besoins domestiques et sa sant . (Ordonnance du 20 novembre

    2006).

    Espagne

    Selon lArt. 19 du Statut dautonomie de lAragon (2006) :

    Los aragoneses, en el marco del desarrollo sostenible, de la participacin y de la

    utilizacin eficaz y eficiente del recurso, tienen derecho a disponer del abastecimiento de

    agua en condiciones de cantidad y calidad suficientes para atender sus necesidades presentes

    y futuras, tanto para el consumo humano como para el desarrollo de actividades sociales y

    econmicas que permitan la vertebracin y el reequilibrio territorial de Aragn .(Les

    Aragonais dans le cadre du dveloppement durable, de la participation et de lutilisation

    28 Pour des exemples de dispositions hors dEurope, voir Henri Smets : Laccs lassainissement, un

    droit fondamental, ditions Johanet, Paris, 2010.

  • 28

    efficace et efficiente de la ressource ont droit disposer de lalimentation en eau dans des

    conditions de quantit et de qualit suffisantes pour satisfaire les ncessits prsentes et

    futures, tant pour la consommation humaine que pour le dveloppement dactivits sociales et

    conomiques que permettent la structuration et lquilbre territorial de lAragon).

    Selon lArt. 17 du Statut dautonomie de la Communaut valencienne (2007) :

    Los ciudadanos y ciudadanas valencianos tienen derecho a gozar de una cantidad de agua

    de calidad, suficiente y segura, para atender a sus necesidades de consumo humano y para

    poder desarrollar sus actividades econmicas y sociales de acuerdo con la Ley. (Les

    citoyens valenciens ont droit disposer dune quantit deau de qualit, suffisante et sre,

    pour rpondre aux ncessits de la consommation humaine et pour pouvoir dvelopper leurs

    activits conomiques et sociales en conformit avec la loi).

    Selon lArt 98 du Statut dautonomie de Castilla-La Mancha :

    Los ciudadanos de Castilla-La Mancha tienen derecho a la implantacin en todos los

    municipios de su territorio de unos servicios adecuados de abastecimiento de agua potable y

    de saneamiento y depuracin de las aguas residuales, en las condiciones que establezca la

    ley. (Les citoyens de Castilla-La Mancha ont droit limplantation dans toutes les

    municipalits de son territoire de services adquats deau potable, dassainissement et de

    traitement des eaux uses dans les conditions tablies par la loi).

    France

    ...chaque personne physique, pour son alimentation et son hygine, a le droit d'accder

    l'eau potable dans des conditions conomiquement acceptables par tous (Code de

    lenvironnement, Art. L210-1).

    La Charte de lenvironnement reconnat pour toute personne le droit de vivre dans un

    environnement quilibr et respectueux de la sant et lobligation de prvenir les atteintes

    quelle est susceptible de porter l'environnement .

    Portugal

    Chacun a le droit pour lui et sa famille un logement de taille adquate, rpondant aux

    standards dhygine et de confort et prservant lintimit personnelle et familiale

    (Constitution de 1976, Article 65).

    Suisse

    La Confdration et les cantons sengagent, en complment de la responsabilit individuelle

    et de linitiative prive, ce que: toute personne en qute dun logement puisse trouver, pour

    elle-mme et sa famille, un logement appropri des conditions supportables (Constitution,

    Art. 41.1).

  • 29

    LEUROPE SOUTIENT LE DROIT LEAU POTABLE

    ET LASSAINISSEMENT

    Laccs leau relve dun droit trs ancien selon lequel chacun pouvait puiser leau

    dune source ou dun cours deau et devait recevoir leau pour tancher la soif. La nouveaut

    depuis une trentaine dannes a t de reconnatre lexistence dun droit de lhomme une

    quantit deau ncessaire pour les usages essentiels et dun droit de lhomme

    lassainissement. Jusque-l, on ne reconnaissait que lexistence dun besoin fondamental ou

    dun objectif politique sans consquences juridiques. En 1992, la Dclaration de Dublin sur

    l'eau dans la perspective d'un dveloppement durable (1992) a considr quil est primordial

    de reconnatre le droit fondamental de lhomme une eau salubre et une hygine adquate

    pour un prix abordable 29

    . Ce type de dclaration qui na videmment aucune porte

    contraignante est indicatif de la tendance actuelle.

    Au niveau communautaire, les 27 tats europens membres de lUnion sont tenus de

    mettre en uvre les Directives sur les eaux rsiduaires urbaines30

    (1990) et sur la qualit de

    leau31

    (1998). Par ailleurs, ils ont approuv la Charte des droits fondamentaux de lUnion

    europenne (2000) qui reconnait notamment le droit la dignit.

    Les tats europens ont sign en 1996 la Charte sociale rvise qui reconnat le droit

    un logement sain. Depuis 2005, il est admis que la Charte sapplique tant pour laccs

    leau que pour laccs des toilettes dans les logements. Cette Charte a valeur de trait et a

    t ratifie par 31 tats (symbole S, tableau 1).

    La Convention sur l'accs l'information, la participation du public au processus

    dcisionnel et l'accs la justice en matire d'environnement (Aarhus 1998) reconnat le

    droit de chacun de vivre dans un environnement propre assurer sa sant et son bien-tre

    (Art. 1) et cre des droits linformation et la participation dans le secteur de leau.

    En 1999, le Protocole sur leau et la sant est sign Londres et inclut des

    obligations trs larges charge des tats en matire daccs leau et lassainissement.

    24 tats europens (symbole P, tableau 1) reprsentant 60% de la population europenne ont

    ratifi ce Protocole qui contient aussi la recommandation : Un accs quitable leau,

    adquat du point de vue aussi bien quantitatif que qualitatif, devrait tre assur tous les

    habitants, notamment aux personnes dfavorises ou socialement exclues . Ce texte fixe un

    objectif et non une obligation.

    Au Sommet europen de Nice (2000), les Chefs dtat et de Gouvernement ont

    adopt32

    lobjectif de promouvoir laccs de tous aux ressources, aux droits, aux biens et

    services . Ceci concerne laccs de chacun un logement dcent et salubre ainsi qu des

    services essentiels ncessaires, compte tenu du contexte local, une existence normale dans

    ce logement (lectricit, eau chauffage...) .

    29

    Dclaration de Dublin (1992) de la Confrence internationale sur leau et lenvironnement. 30

    Directive N91/271 du 21/05/91 relative au traitement des eaux urbaines rsiduaires. 31

    Directive N98/83/CE du 03/11/98 relative la qualit des eaux destines la consommation humaine. 32

    Objectifs de lutte contre la pauvret et lexclusion sociale , J.O.C.E., C 82/4 (13/3/2001).

  • 30

    En mars 2000, la Dclaration ministrielle de La Haye sur la scurit de leau au

    21me

    sicle (Deuxime Forum Mondial de lEau) se fixe lobjectif : laccs de tous

    suffisamment deau potable un prix raisonnable pour mener une vie saine et productive .

    Elle reconnat que laccs leau et lassainissement sont des besoins humains de base

    essentiels la sant et au bien-tre . Les Ministres ont aussi dcid de tenir compte des

    besoins fondamentaux des pauvres et des plus dfavoriss .

    Les dclarations de Gro Harlem Brundtland, Directrice gnrale de lOMS et ancien

    Premier Ministre de la Norvge, exposent la vision des annes 2000 :

    Laccs leau salubre et des moyens dvacuation salubre des excrta

    est un besoin universel et, la vrit, un droit fondamental de lhomme

    (novembre 2000). Elle affirme que : lapprovisionnement en eau salubre

    et lexistence de services dassainissement adquats permettant de protger

    la sant figurent parmi les droits de lhomme fondamentaux (mars 2001)33

    .

    En 2001, les 47 tats Membres du Conseil de lEurope adoptent une

    Recommandation du Conseil des Ministres (Recommandation - Rec. (2001)14) selon laquelle

    Toute personne a le droit de disposer dune quantit deau suffisante pour satisfaire ses

    besoins essentiels . Cette affirmation incluse dans un texte dun acte juridique adopt par les

    reprsentants officiels des tats Membres constitue la premire reconnaissance officielle du

    droit leau en Europe.

    En mars 2006, au cours du 4e Forum mondial de leau Mexico, lUnion

    europenne a fait une Dclaration sur le droit daccs leau et lassainissement selon

    laquelle: LUnion europenne soulignele fait que les autorits publiques doivent prendre des

    mesures adquates pour quil soit effectif et abordable. Ce texte vise laccs leau.

    En mars 2010, la plupart des tats europens ont soutenu la Dclaration de lUnion

    europenne du 22 mars 2010 (annexe 2) (symbole *, tableau 1). En outre, certains dentre eux

    ont soutenu une rsolution adopte au 5me

    Forum mondial de leau Istanbul en 2009 (F) ou

    une Dclaration dite de Beppu (B)34

    .

    Selon lObservation gnrale N15 Le droit leau (2002), le droit leau fait

    partie des droits conomiques et sociaux mais cette interprtation qui navait pas t adopte

    par les reprsentants des tats na finalement t reconnue par ceux-ci quen septembre 2010

    dans le cadre du Conseil des Droits de lhomme.

    Tous les tats europens sont parties au Pacte international relatif aux droits

    conomiques, sociaux et culturels et tous, sauf le Royaume-Uni, ont accept en 2010

    33

    Voir www.world waterday.org/lgfr/thematic/hmnrihts.html (mars 2001). 34

    (P) : Protocole Eau et Sant (Londres, 1999) Les Parties prennent toutes les mesures appropries pour assurer : 1) Un approvisionnement adquat en eau potable salubre, 2) Un assainissement adquat

    (Art. 4.2). NA : Dclaration du Sommet des Non-aligns de La Havane (2006) The Ministers

    acknowledged the right to water for all. NA : Dclaration du Sommet des Non-aligns de Sharm el

    Sheik (2009) Les chefs d'tat ou de gouvernement ont reconnu le droit l'eau sans discrimination .

    (B) : Dclaration de Beppu (2008) We, the leaders of the Asia-Pacific, do hereby agree to recognise

    the people's right to safe drinking water and basic sanitation as a basic human right and a fundamental

    aspect of human security. (F) : Dclaration annexe dIstanbul (mars 2009) We recognize that access

    to water and sanitation is a human right and we are committed to all necessary actions for the progressive implementation of this right.

  • 31

    linterprtation que le droit un niveau de vie suffisant inclut le droit leau potable et

    lassainissement). En 2011, les seuls pays europens qui semblent avoir encore des rticences

    concernant le droit leau potable et lassainissement sont le Royaume Uni (opposition au

    droit lassainissement) et peut-tre la Turquie (rticences concernant le droit leau)

    (tableau 1).

    Tableau 1. LES 47 TATS MEMBRES DU CONSEIL DE LEUROPE

    Les tats qui suivent ont adopt la recommandation du Conseil de lEurope de 2001

    (Rec. (2001)14) et dautres textes pertinents :

    Albanie*, P, S Liechtenstein*

    Allemagne*, P Lituanie*, P, S,

    Andorre, S Luxembourg*, P

    Armnie*, B, S Anc. rp. Yougoslave de Macdoine*

    Autriche*, S Malte*, S

    Azerbadjan, B, P, S Moldavie*, P, S

    Belgique*, P, S Monaco

    Bosnie-Herzgovine*, S Montngro*, NA, S

    Bulgarie*, S Norvge, S

    Chypre*, S Pays-Bas*, S

    Croatie*, P Pologne*

    Danemark* Portugal*, S

    Espagne*, F, P Roumanie, S

    Estonie*, P, S Royaume-Uni*

    Finlande*, P, S Russie, P, S

    France*, P, S Saint-Marin

    Gorgie*, S Serbie*, S

    Grce* Slovaquie*, P, S

    Hongrie*, P, S Slovnie*, S

    Irlande*, S Sude*, S

    Islande* Suisse, P

    Italie*, S Rpublique tchque*, P

    Lettonie* Turquie, S

    Ukraine*, P, S

    En outre, les cinq tats suivants dAsie centrale sont membres de la Commission conomique pour lEurope : Kazakhstan (B), Kirghizistan(B), Ouzbkistan, Tadjikistan(B), Turkestan (NA). Hormis

    lOuzbkistan, ils ont souscrit la Dclaration de Beppu (B) ou celle des Non-aligns (NA) en

    faveur du droit leau mais ils ne sont pas signataires du Protocole Eau et Sant. NB. P : Ratification du Protocole Eau et Sant ; S : Ratification de la Charte Sociale ; F : Dclaration

    Istanbul : * S : soutien la Dclaration du Conseil de lUE.

    Au niveau parlementaire, le Parlement europen et lAssemble parlementaire du

    Conseil de lEurope ont systmatiquement soutenu le droit de lhomme leau. En mars

    2009, une rsolution en faveur du droit leau35

    a t vote par ces deux institutions.

    35

    Rsolution du Parlement Europen du 12 mars 2009 sur l'eau L'accs l'eau potable devrait tre un droit

    fondamental et universel . Rsolution de l'Assemble parlementaire du Conseil de l'Europe (mars 2009) L'Assemble souligne que l'accs l'eau doit tre reconnu comme un droit de l'homme fondamental .

  • 32

  • 33

    LA FRANCE SOUTIENT LA TRANSCRIPTION DU DROIT LEAU

    DANS LA RALIT

    Intervention de la France lors de la runion du 27 juillet 2011 de lAssemble gnrale

    des Nations unies (M. Emmanuel Bonne)

    Mon pays se flicite de ladoption de la rsolution 64/292 qui

    reconnat le droit de lhomme leau potable et lassainissement par

    lAssemble gnrale des Nations unies. Elle a permis, depuis un an,

    dintensifier la mobilisation des gouvernements et des autres acteurs sur le

    terrain. A la suite de cette avance historique, le Conseil des Droits de

    lHomme a adopt par consensus la rsolution 15/9 le 30 septembre 2010,

    qui lie ce droit essentiel au droit un niveau de vie adquat.

    Il faut maintenant dpasser cette tape et travailler, avec ladhsion

    pleine et entire de tous les acteurs responsables du droit leau potable et

    lassainissement, la perspective qui simpose dsormais tous : mettre

    en uvre ces rsolutions et transcrire dans la ralit le droit de tous leau

    potable et lassainissement.

    Cest avec cet esprit que la France sengage, avec un groupe dtat

    informel, ouvert et transrgional, le blue group, pour la promotion du

    droit l'eau potable et l'assainissement et son application.

    Le droit leau potable et lassainissement est une priorit de

    laction internationale de la France. Il est indispensable de rappeler la

    responsabilit premire des tats dans llaboration dune organisation

    adquate pour la mise en uvre de ce droit et des mcanismes de contrle

    de son application. La France est particulirement attache la

    clarification des rles respectifs des diffrents acteurs.

    Convaincue que cest laction conjointe aux diffrents niveaux de

    dcision politique qui permettra des avances significatives adaptes aux

    contextes respectifs, elle appelle notamment une plus grande

    reconnaissance du rle des autorits locales dans la fourniture des services,

    dans le cadre des lois et rglements nationaux. Il appartient tous les

    acteurs publics concerns de se mobiliser, et de sengager mettre en place

    des solutions solidaires pour garantir chacun un accs effectif leau

    potable et lassainissement .

  • 34

  • 35

    LESPAGNE CONTRIBUE LA PROMOTION INTERNATIONALE

    DU DROIT LEAU

    Henri Smets

    Acadmie de lEau, France

    1. Gnralits

    LEspagne est lun pays europen o le manque deau potable pour lalimentation

    des populations a parfois t tel quil a fallu importer de leau potable de ltranger. Depuis

    lors, des units de dessalement de leau de mer ont t mises en place. Des difficults ont

    parfois surgi entre les rgions autonomes de lEspagne du fait de la pnurie deau en cas de

    scheresse.

    Au niveau des mnages, laccs leau potable et lassainissement est

    particulirement lev en Espagne puisque 99.7% des logements principaux sont branchs

    leau courante et 99% sont branchs un gout ou un systme individuel dassainissement.

    Le droit leau pour tous a t mis en uvre ds le XIXme

    sicle par la mise en

    place de bornes fontaines deau potable o lon peut sans difficult remplir son seau. Dans de

    nombreux villages, on trouve encore les lavoirs municipaux et les abreuvoirs datant parfois

    du Moyen-ge. Actuellement, on observe une augmentation du nombre de ces bornes dans

    les villes et villages o chacun peut se servir deau potable sans payer. Toutefois cette action

    participe plus dune approche symbolique que dun besoin avr car trs peu de personnes

    utilisent ces bornes fontaines.

    Au cours des dernires annes, lEspagne a pris de nombreuses mesures au plan

    international et au plan interne pour mettre en uvre le droit leau et en promouvoir la

    reconnaisance.

    a) Qualit de leau potable

    La qualit de leau distribue en Espagne est trs leve. Selon les sources

    officielles, la qualit sanitaire des eaux de consommation en 2009 est approprie pour la

    consommation humaine dans 99.6% des bulletins officiels danalyses transmis au SINAC 36.

    Dautres statistiques sont moins positives37. Les donnes sur la qualit dans les diverses

    rgions font apparatre de grandes diffrences : leau potable en Murcie est trop souvent de

    faible qualit. Des amliorations seront aussi ncessaires en Andalousie38. Laction entreprise

    par la Commission europenne (encadr 2) montre limportance du problme.

    36 Calidad del agua de consumo humano en Espana, Informe technico - Ano 2009 publi par le Sistema

    de Informacion Nacional de Aguas de Consumo (SINAC), Ministerio de Sanidad. 37 Sur 759 zones de distribution deau de plus de 5 000 habitants, on a observ en 1996-98 un certain nombre

    de zones o les paramtres de qualit de leau potable de lUE nont pas t respects. La liste suivante

    donne le nombre de zones (sur 759) o un non-respect pour un paramtre a t observ : coliformes,

    60 zones ; sulphate, 59 ; aluminium, 53 ; temprature, 48 ; sodium, 41 ; nitrates, 35 ; magnsium, 33 ;

    potassium, 31 ; coliformes fcaux, 19 ; streptocoque fcaux, 19 ; turbidit, 15 ; fer, 14 ; manganse, 9.

    coloration, 5. Il apparat donc que les normes sont respectes peu prs partout. Mais il y a nanmoins

    plus de 60 zones sur 759 o des non-conformits de qualit de leau ont t observes dont 19 avec

    matires fcales. Les chiffres actuels devraient tre meilleurs. Synthesis Report on the Quality of Drinking

    Water in the European Union period 1996-1998 (Directives 80/778/EEC and 91/692/EEC), KIWA, 2002. 38 Les communauts autonomes ayant le plus grand nombre de cas de non-conformit sont la Murcie (20%),

    lAndalousie (16%), Madrid (11%), Communaut valencienne (8%). Les provinces de Murcie et de Madrid ont eu 20% et 11% de non-conformit.

  • 36

    Encadr 2

    LE DROIT LA QUALIT DE LEAU POTABLE EST PROTG PAR

    LA COMMISSION EUROPENNE

    La Commission demande lEspagne de prendre des mesures pour amliorer la qualit de

    leau boisson Las Filipinas, une localit de San Miguel de Salinas, situe dans la province

    espagnole dAlicante. La Commission constate avec inquitude que depuis plus de dix ans,

    leau dont disposent les habitants de cette localit est impropre la consommation humaine.

    Malgr des ptitions adresses au Parlement europen en 2005 et 2006, et la reconnaissance

    de la ralit de cette situation par les autorits espagnoles elles-mmes, aucune mesure

    concrte na t prise pour y remdier.

    Une lettre de mise en demeure a t adresse l'Espagne ce sujet en 2009, et malgr

    plusieurs rponses, aucune mesure satisfaisante na t mise en uvre ce jour. Sur

    recommandation du Commissaire europen lenvironnement, M. Janez Potonik, la

    Commission adresse donc un avis motiv l'Espagne, qui dispose prsent d'un dlai de

    deux mois pour se mettre en conformit, faute de quoi la Commission pourrait saisir la Cour

    de justice de l'Union europenne.

    Manquements rpts lobligation dagir

    Des tests raliss sur leau de boisson locale Las Filipinas ont rvl maintes reprises

    que celle-ci enregistre des dpassements des valeurs fixes pour plusieurs paramtres,

    notamment la teneur en sodium, en nitrates et en chlorures ainsi que la conductivit ; le fait

    que cette eau soit actuellement impropre la consommation humaine nest dailleurs

    contest par personne.

    Les autorits locales avaient inform la Commission qu'un projet portant sur la construction

    de nouvelles infrastructures dapprovisionnement en eau tait ltude. La Commission a

    engag la procdure dinfraction lencontre de lEspagne en lui adressant une lettre de

    mise en demeure en mai 2009. Aprs examen des rponses qui lui sont parvenues depuis lors,

    la Commission a conclu que la Directive europenne sur l'eau potable ntait toujours pas

    respecte et qu'aucun projet navait t mis en uvre pour remdier la situation. Un avis

    motiv a donc t envoy l'tat membre.

    Rappel

    En Europe, la qualit de leau de boisson relve de la Directive sur leau potable, dont

    lobjectif est de garantir la salubrit et la propret des eaux destines la consommation

    humaine. En vertu de ces dispositions, les eaux ne doivent pas contenir de micro-organismes,

    de parasites ou toutes autres substances constituant un danger potentiel pour la sant des

    personnes. Conformment la directive, quelques 48 paramtres microbiologiques et

    chimiques doivent tre contrls et tests rgulirement. Si la qualit de leau potable

    natteint pas le niveau requis, des mesures correctives et des restrictions dutilisation doivent

    tre mises en place prioritairement. (Communiqu de presse de la Commission, 16 juin

    2011).

    NB : La Commission joue un rle trs utile pour contraindre les tats respecter leurs obligations communautaires, notamment en matire de qualit de leau potable ou daccs un assainissement appropri.

    Le droit la qualit de leau potable est protg efficacement par le droit communautaire et fait partie des

    obligations de sant publique en Espagne.

  • 37

    b) Assainissement

    Si des progrs ont t enregistrs au cours des dernires annes, la situation actuelle

    nest pas toujours conforme la Directive sur les eaux rsiduaires urbaines39. Comme dans

    dautres pays de lUnion europenne, le respect de cette directive contribuera la mise en

    uvre du droit lassainissement.

    Tableau 2. TRAITEMENT DES EAUX USES EN CATALOGNE

    Aucun systme Systme inadquat Systme adquat

    Municipalits (%) 34.57 40.48 24.95

    Population (%) 4.59 3.67 91.74

    En Catalogne, le traitement des eaux uses est satisfaisant pour 92% de la population

    mais insuffisant pour 75 % des municipalits40 (tableau 2). On voit quel point il y a des

    diffrences entre les zones urbaines et les zones rurales.

    Ces insuffisances affectent 34% des rivires, 4% des zones humides, 38% des eaux

    ctires et 38% des eaux souterraines de Catalogne. On constate que des amliorations restent

    faire en zone rurale et que les statistiques sur la population dans son ensemble sont

    trompeuses.

    c) Prix de leau

    Le prix moyen de leau et de lassainissement en Espagne en 2009 est de 1.42 /m3

    soit environ la moiti du prix franais. Toutefois, comme le revenu moyen du dcile infrieur

    en Espagne est de 5 243 /an, soit 60% du revenu moyen du dcile infrieur en France. Par

    consquent, les problmes sociaux lis laccs leau se posent dans des conditions assez

    semblables dans les deux pays.

    Les dpenses moyennes deau et dassainissement sont de 19.5 /m3 par mois pour

    une consommation 12 m3/mois41. Ramenes un revenu disponible moyen de 1 391 /mois

    par personne, il apparat que les dpenses deau sont assez peu significatives dans le budget

    des mnages moyens, soit 0.52% du revenu disponible moyen en Catalogne en 2010. Cette

    proportion est beaucoup plus leve pour les mnages dmunis et notamment pour les

    39 Malgr les progrs notables accomplis depuis 10 ans, la Cour de Justice europenne a condamn

    lEspagne pour des insuffisances en matire de collecte et de traitement des eaux uses dans des villes de plus de 15 000 habitants. Voir Arrt du 14 avril 2011 : Manquement dtat Directive 91/271/CEE

    (affaire C-343/10). En nassurant pas la collecte des eaux urbaines rsiduaires des agglomrations de

    plus de 15 000 EH de et le traitement des eaux urbaines rsiduaires des agglomrations de plus de

    15 000 EH de, le Royaume dEspagne a manqu aux obligations qui lui incombent en vertu de cette

    directive . 40 Agencia Catalana del Aigua : Water in Catalonia. Diagnosis and proposed actions, juin 2008. 41 En 2011, le prix TTC de leau Barcelone est de 66.3 pour 10 m3 par mois (soit 2.2 /m3). Ce prix

    comporte une taxe municipale mtropolitaine pour les dchets (TMTR) de 12.4 qui est module en

    fonction du nombre de personnes, de leur degr dhandicap, de leurs revenus (rabais de 50% pour les

    personnes gagnant moins que le salaire minimum interprofessionnel). Il ny a pas de modulation

    tarifaire en fonction du revenu pour les autres lments de la facture, seul interviennent le dbit de

    branchement (part fixe), le volume consomm et le nombre de personnes au domicile (taille des tranches de consommation).

  • 38

    chmeurs dans un pays o le taux de chmage est lun des plus levs en Europe (plus de

    20%). Ceci rsulte du fait que le revenu moyen des mnages dmunis est trs faible42.

    En Catalogne o leau cote en moyenne 1.76 /m3, plus de 22.6% des

    municipalits, soit 66.6% de la population catalane, ont cru ncessaire de complter le tarif

    progressif de leau par des mesures sociales en fonction du nombre de personnes dans le

    mnage et 11%, soit 14.3% de la population, ont aussi tenu compte des revenus (chmeurs,

    personnes dmunies) ou du statut (pensionns, retraits) dans la tarification43.

    2. Actions aux niveaux rgional et local

    En Espagne, la Loi nationale de 1985 sur les municipalits44 prescrit une comptence

    obligatoire des municipalits pour lapprovisionnement en eau et pour lassainissement45. Ce

    texte a permis un plaignant de faire reconnatre par la Cour Suprme son droit

    lassainissement46.

    Ces comptences obligatoires sont exerces dans le cadre des statuts dautonomie.

    Pour la Catalogne, le Statut de 2006 prescrit que les municipalits sont charges des services

    de base et des quipements municipaux47.

    La Loi catalane de 1987 sur les municipalits et les rgimes locaux dispose que les

    municipalits doivent au minimum fournir la distribution deau domicile et des gouts et

    que si cela savre trop coteux, les comarques (cantons) doivent les fournir la place des

    municipalits48. Le texte en vigueur en 2003 est trs dtaill et peut aisment servir une

    42 En Espagne, le revenu moyen des mnages du dcile infrieur est 2.3 plus faible que le revenu mdian.

    Croissance et Ingalits, OCDE, 2008 (graphique 1.7 pour une comparaison avec les autres pays). Le

    rapport D5/D1 est de 2.32 en Espagne, soit beaucoup plus quen France (1.82) (tableau 1A2.2).

    (graphique 1.7). En Espagne, le revenu moyen du premier dcile est 5 243 /an par uc et le revenu

    mdian de 17 979 . Pour la France, les montants correspondants sont 8 697 et 20 660 . 43 Agencia Catalana de lAigua : Observatori del preu de laigua a Catalunya, 2010. 44 LEspagne a publi lun des premiers ouvrages juridiques sur le droit leau : A. Embid Irujo : El

    Derecho al Agua, Thomson, Zaragoza, 2006. 45 Los municipios, por si o asociados debern prestar en todo caso los servicios siguientes: ....

    abastecimiento de agua potable, alcantarillado (Loi 7/85 du 2 avril 1985 Reguladora de las Bases del

    Rgimen Local, Art. 8/198730, 26.1). Lexpression en todo caso implique un trs haut degr de mise

    en uvre. 46 La Cour Suprme dans un arrt du 25 avril 1989 a reconnu le bien-fond de la plainte dune personne

    qui ne bnficiait pas dun accs lgout. 47 Estatut de Catalunya. Art. 84. Competencies locals. Aquest Estatut garanteix als municipis un nucli de

    competncies prpies que han d'sser exercides per aquestes entitats amb plena autonomia, subjecta

    noms a control de constitucionalitat i de legalitat. Els governs locals de Catalunya tenen en tot cas

    competncies prpies sobre les matries segents, en els termes que determinin les lleis:- L'ordenaci i la prestaci de serveis bsics a la comunitat, - La regulaci i la gesti dels equipaments municipals.

    48 Voir Art. 64 et 65 de la Loi 8/1987, DOGC, N832 du 27/4/1987 remplace par le Decret Legislatiu

    2/2003, de 28 d'abril, pel qual s'aprova el Text refs de la Llei municipal i de rgim local de Catalunya.

    Art. 66.3 El municipi t competncies prpies en les matries segents: l) El subministrament d'aigua

    , les clavegueres i el tractament d'aiges residuals. Art. 67 Serveis minims. Els municipis,

    independentment o associats, han de prestar, com a mnim, els serveis segents: a) En tots els municipis

    abastament domiciliari d'aigua potable, clavegueres, Art. 68 Dispensa de prestaci de serveis. Art.

    68.1 Si l'establiment o la prestaci de serveis a qu es refereix l'Article 67 resulta impossible o de molt

    difcil compliment, els municipis poden sollicitar al Govern de la Generalitat la dispensa de l'obligaci

    de prestar-los. Art. 68.2 En aquest cas, correspon a la comarca de prestar els serveis municipals

    obligatoris, d'acord amb el que estableix aquesta Llei. Art. 68.3 La intervenci supletria a qu es

    refereix l'apartat 2 no s necessria quan la dispensa es justifica en la innecessarietat de la prestaci del servei, d'acord amb les caracterstiques particulars del municipi. En aquest cas, a la sollicitud de

  • 39

    action contentieuse en cas de non-accs injustifi leau potable49.

    La loi catalane prescrit, ds 2003, que la quantit deau pour le service minimum

    obligatoire est de 100 l par personne et par jour50. Barcelone, le distributeur ne peut couper

    laccs leau dun usager en retard de paiement quavec laccord de lautorit publique

    mtropolitaine charge des services de leau et du traitement des dchets51. On constate donc

    que la Catalogne avait de facto mis en place ds 2003 les lgislations ncessaires pour la mise

    en uvre du droit leau.

    La question des coupures deau en cas dimpays a t rcemment aborde. Depuis

    un accord du 23/1/2011, les principaux distributeurs deau de Catalogne ne peuvent plus

    couper leau en cas dimpays si une rclamation portant sur la facture impaye a t

    prsente par voie judiciaire ou extra-judiciaire. Une coupure ne peut tre effectue que si

    deux factures sont restes impayes et si lusager a t prvenu auparavant et bnfici dun

    dlai de 10 jours ouvrables pour rgler la facture en instance.

    Le Parlement de Catalogne sest interrog ds 2004 sur le