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// MÉMO // // ÉPOQUE // FIPF REVUE DE LA FÉDÉRATION INTERNATIONALE DES PROFESSEURS DE FRANÇAIS N° 372 NOVEMBRE-DÉCEMBRE 2010 le français le monde dans // DOSSIER // Interprétations de l’histoire Questions de mémoire Alain Mabanckou et l’enfant de Pointe-Noire L’approche actionnelle version télé-réalité, d’ Helsinki à Montpellier Vizavi, un site de mutualisation pour les enseignants du bilingue en Espagne // MÉTIER // Fred Pellerin raconte Saint-Élie-de-Caxton, Québec

Le français dans le monde 372

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Le français dans le monde numero 372, novembre / decembre 2010,

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// MÉMO //// ÉPOQUE //

FIP

FREVUE DE LA FÉDÉRATION INTERNATIONALE DES PROFESSEURS DE FRANÇAIS

N° 372 NOVEMBRE-DÉCEMBRE 2010

lefrançaisle mondedans

ISSN 0015-9395ISBN 978-2-090-37063-8

www.fdlm.org

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N°3

72

// DOSSIER //

Interprétations de l’histoire

Questions de mémoireAlain Mabanckou et l’enfant de Pointe-Noire

L’approche actionnelle version télé-réalité, d’Helsinki à Montpellier

Vizavi, un site de mutualisation pour les enseignants du bilingueen Espagne

// MÉTIER //

Fred Pellerin raconte Saint-Élie-de-Caxton, Québec

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Le français dans le monde sur Internet : http://www.fdlm.org

Le français dans le monde // 372 //novembre-décembre 2010 1

Sommaire

40L’Amérique latine fête le bicentenairedes indépendances

Interprétations de l’histoireQuestions de mémoire

Métier

Dossier

32. ReportageFrance et États-Unis échangent leurs enseignants

34. InnovationVizavi : lieu de mutualisation pour les enseignants du bilingue

36. InitiativeLes lycéens décernent leur Goncourt

38. TémoinAux origines de l’enseignement du français en Afrique : Jean Dard

40. CélébrationL’Amérique latine fête le bicentenaire des indépendances

42. RessourcesOutils pour la classe et multimédia

ÉPOQUE4. PortraitFred Pellerin, conteux et poète québécois

6. TendancePhilosopher, poussez la porte et entrez…

7. SportLucie Décosse, du judo au journalisme

8. Regard« La singularité est revendiquée par tous »

10. ÉconomieLes métiers d’art, entre tradition et renouveau

12. ExpositionParis est tout petit…

13. ÉvènementUn hommage à la générosité des photographes

14. Librairies francophonesPlacer hors du temps les livres et les lecteurs

MÉTIER18. L’actu

20. FocusVers une nouvelle légitimation des activitésgrammaticales

22. Mot à motDites-moi Professeur…

24. ClésLa notion d’erreur

26. ZoomChacun sa chaussure

28. Savoir-faireDelf-Dalf : priorité à la dimension interculturelle

30. ExpérienceL’approche actionnelle, version télé-réalité

fiches pédagogiques à télécharger sur :www.fdlm.org

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Les fiches pédagogiques à télécharger

EntretienRachid Bouchareb.......................50 DécryptageÀ qui appartient l’histoire ?........52AnalyseDe l’usage politique des symboles historiques.............................54EnquêteEnseigner l’histoire aujourd’hui.......56

• Graphe : « Fête »• Sport : Lucie Décosse,

du judo au journalisme• Économie : Les métiers

d’art, entre tradition et renouveau

• Exposition : Paris esttout petit…

• La notion d’erreur• Dossier : histoire

et mémoire• Jeux

Le français dans le monde, revue de la Fédération internationale des professeurs de français - www.fipf.org, éditée par CLE International – 9 bis, rue Abel Hovelacque – 75 013 Paris Tél. : 33 (0) 1 72 36 30 67 – Fax. 33 (0) 1 45 87 43 18 – Service abonnements : 33 (0) 1 40 94 22 22 – Fax. 33 (0) 1 40 94 22 32 – Directeur de la publication Jean-Pierre Cuq (FIPF) Directeur de la rédaction Jacques Pécheur (Ministère de l’Éducation nationale – FIPF) Secrétaire général de la rédaction Sébastien Langevin Relecture/correction Marie-Lou Morin Relations commerciales Sophie Ferrand Conception graphique Miz’enpage - www.mizenpage.com – Commission paritaire : 0412T81661. Comité de rédaction Dominique Abry, Isabelle Gruca, Valérie Drake, Pascale de Schuyter Hualpa, Chantal Parpette, Jacques Pécheur, Florence Pellegrini, Nathalie Spanghero-Gaillard, Conseil d’orientation sous la présidence d’honneur de M. Abdou Diouf, secrétaire général de l’Organisation internationale de la Francophonie : Jean-Pierre Cuq (FIPF), Pascale de SchuyterHualpa (Alliance française), Raymond Gevaert (FIPF), Michèle Jacobs-Hermès (TV5), Xavier North (DGLFLF), Soungalo Ouedraogo (OIF), Florentine Petit (MEN), Jean-Paul Rebaud (MAEE), Madeleine Rolle-Boumlic (FIPF), Vicky Sommet (RFI), Jean-Luc Wollensack (CLE International).

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MÉMO60. À voir62. À lire66. À écouter

INTERLUDES2. Graphe« Fête »

16. PoésieVictor Hugo, « Quiconque est amoureux… »

44. NouvelleJean-Marie Laclavetine, « Conte de Noël »

56. BDPascal Placeman, « Question piège » et « Bons parents »

68. JeuxLe vocabulaire de Noël…

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par Bérénice Baltamémo // à voir

Voilà un premier film réjouissant. Différent etdrôle ! Les Barons (MK2vidéo), signé du jeuneNabil Ben Yadir, dépeint lavie d’une bande desquartiers de Bruxelles,sans préjugés et avecbeaucoup d’humour. « Infiltrant » la commu-nauté maghrébine de la capitale belge, il suitprincipalement Hassan, garçon talentueuxdans le domaine du rire, mais qui n’ose pasvivre son rêve. Du coup, il s’accroche à la philosophie des Barons qui ont érigé laglande comme mode de vie.

Le cinéma de Jacques Demy (trop tôt disparu il ya vingt ans, à 59 ans) reste enchanté et enchan-teur. Par les sujets traités, inspirés de contes et légendes, ou même lorsqu’il dépeint la vie réelle,emprunts de féerie. Parce qu’il a choisi la comédiemusicale comme genre principal d’expression. Cependant, à y regarder de plus près, il n’est pasrare de déceler une certaine noirceur dans sesfilms et un penchant pour les ambivalences.L’édition de cinq de ses œuvres majeures, par ArteVidéo, Lola, La Baie des anges, Les Parapluies deCherbourg, Les Demoiselles de Rochefort et L’évè-nement le plus important depuis que l’homme amarché sur la lune, révèle des subtilités et des finesses que seuls des DVD peuvent nous offrir…C’est également l’occasion de redécouvrir L’évène-ment le plus important depuis que l’homme a marchésur la lune, moins connu que Les Parapluies de Cher-bourg, Palme d’or du Festival de Cannes 1964. Le

thème pourtant est on ne peut plus modernepuisque Jacques Demy aborde – on est en 1973 – lethème de la grossesse masculine. L’homme « en-ceint » n’est autre que le génial Marcello Mastroianni qui interprète un moniteur d’auto-école marié à une coiffeuse, Catherine Deneuve.Cet état hors norme va attirer sur ce petit coupleune célébrité planétaire et fulgurante… Comme ledisait, non sans justesse, le réalisateur, à propos dece long-métrage inattendu : « C’est une rêverie biensûr, mais c’est toujours basé sur des petites réalités. »Remarque qui vaut pour tous ses films !Ces éditions sont accompagnées de nombreuxbonus qui éclairent et enrichissent la vision du tra-vail de ce cinéaste dont on trouve aujourd’hui deshommages dans Jeanne et le garçon formidable deDucastel et Martineau ou Les Chansons d’amourde Christophe Honoré. Raison de plus pour se(re)plonger dans cet univers unique.

Brèves

C’EST L’HISTOIRED’UN MEC…

LE COMBAT DE M’MAN TINE…C’est un classique universel en version res-taurée que propose Carlotta Films. Adapté duroman antillais de Joseph Zobel, Rue Cases-Nègres d’Euzhan Palcy a secoué tous ceuxqui l’ont découvert à sa sortie, en 1983. Cou-vert de Prix dans les festivals, le film raconte,à l’aube de l’Exposition coloniale de 1931, lecombat de M’man Tine pour que son petit-filsJosé, qu’elle élève seule, reçoive une bonneéducation et une véritable instruction. Uneédition bien documentée grâce à ses bonuset utile pour la classe.

SUR LES AILES DE LA DANSE…Quand Frederick Wiseman, l’un des plusgrands documentaristes du monde, pénè-tre dans les coulisses et sur la scène de

l’Opéra de Paris, il entraînele spectateur à sa suite,dans un labyrinthe fasci-nant où tulle, collants etchaussons rivalisent avecla sueur des artistes. Ainsi,La Danse, le ballet del’Opéra de Paris se savoureavec une réelle délectation.

Jacques Demy l’enchanteur

En voilà une bonne idée ! Proposer en DVD, unefois n’est pas coutume, non pas l’un des nom-breux films de Bourvil (pseudonyme pris en référence au village de son enfance), décédé il ya tout juste quarante ans, mais l’une de ses piècesmythiques : La Bonne Planqueécrite pour lui parMichel André et mise en scène par Roland Bailly. La version que les Éditions Montparnasse offren’est autre que l’enregistrement de cette trucu-lente comédie au théâtre du Vaudeville àBruxelles, en 1964, pour la télévision belge. Il yjoue Antoine Perrin, tranquille fonctionnaire,chez qui un truand, flanqué de sa bonne amieLulu, se réfugie. Et là, place au rire !Tout le, ou plutôt, les talents (acteur, comique,chansonnier…) de Bourvil y sont exploités, cequi ne peut que réjouir l’amateur de ce comédientant aimé du public. Outre des bonus de bon aloi,un CD nous permet, en prime, de réécouter sesplus grands succès musicaux, tels « Les crayons »ou « Salade de fruits »… Joli, joli, on vous dit !

sinon rien !Un Bourvil,

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Âmes sensibles s’abstenir ! L’auteur, Patrick Sénécal, a été surnommé « le Stephen King qué-bécois »… C’est dire ce qui attend le spectateuravec l’adaptation, de l’autre côté de l’Atlantique,de deux de ses romans, Les 7 Jours du Talion,réalisé par Podz et 5150, rue des Ormes (prix duPublic au dernier Festival du film fantastique deGérardmer) par Éric Tessier. Frisson garantidonc, si on se laisse embarquer dans ces thrillersd’épouvante où bizarreries, vengeance, justice,le dispute au machiavélisme des différents pro-tagonistes. On pense au terrible Seven de DavidFincher… Et pour cause, ici aussi on se réfèrebeaucoup à Dieu, à la justice divine et autres péchés capitaux. C’est habile, terrifiant et, il fautbien le reconnaître, assez hypnotique. Deuxfilms proches et pourtant différents qui donnentenvie de mieux connaître la littérature ou le cinéma québécois. Ou, pourquoi pas, les deux.

Olivier Ducastel et Jacques Martineau sont deuxréalisateurs formidables. Tout comme leurs sixlongs-métrages de fiction réalisés entre 1998 et2010, dont le dernier, L’Arbre et la forêt, sort enédition DVD chez Ad Vitam. Outre le film, ceDVD permet de découvrir le documentaire Para-graphe 175, de Rob Epstein et Jeffrey Friedman.L’un et l’autre abordent la question de la dépor-tation des homosexuels durant la SecondeGuerre mondiale, le premier par le biais de l’his-toire de Frédérick qui révèle, à la mort de son fils,le secret douloureusement gardé, le secondgrâce aux témoignages de survivants, pudiquesmais puissants.Et puis, L’Arbre et la forêt, au-delà de son sujet,donne à voir deux comédiens magnifiques, bienqu’assez rares au cinéma, Guy Marchand etFrançoise Fabian, couple d’écran étonnant, maisdont la sincérité et la justesse entraînent les spec-ta teurs jusqu’au plus profond d’eux-mêmes.

En adaptant son œuvre Une pièce espa-gnole à l’écran sous le titre Chicas, Yasmina Reza n’a pas seulement changéle titre, elle s’est approprié l’espace ciné-matographique avec une belle ampleurgrâce à tout ce qui en compose l’essencemême, musique, décors, acteurs… Pourautant, l’intrigue – une mère veut présen-ter son nouveau fiancé à ses filles – resteidentique à celle de la pièce. On reste sé-duit par l’humour, la lucidité, la pertinencedu propos et l’élégance de l’auteur…

La coopérative deproduction audio-visuelle théâtrale, la Copat, re-groupe un grandnombre de théâ-tres de l’espacefrancophone etpermet à un large public, grâce à des cap-tations et des adaptations pour l’écran, l’ac-cès à des œuvres d’auteurs et/ou met-teurs en scène majeurs. Aujourd’hui, onpeut donc appréhender différents travaux d’Olivier Py dont son monumental Les Enfants de Saturne, terrible instantané dutemps présent créé en septembre 2009 àl’Odéon. Excès et audaces côtoient, par-fois, un certain ennui, mais comme c’estfait avec brio, on excuse.

Secret de famille

Le fantastique, version québécoise…

ALLEZ, LES FILLES !

AU THÉÂTRE AVEC OLIVIER PY

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Roman Par Sophie Patois et Bernard Magnier

mémo // à lire

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Une femme algérienne,seule, écrit à son fils quivient d’être assassiné cequ’elle n’a pu ni osé lui dire.Elle dit sa solitude, les vraiestendresses des uns, lesfausses larmes des autres.Elle découvre Assia, l’amiedu fils, rencontre Kheïra,une mère, comme elle, vic-

time du même drame… L’assassin est là aussi,connu, à portée de vengeance… Et derrière cettebouleversante confession (Puisque mon cœur estmort) écrite dans une langue à fleur de poésie, l’Algérie d’aujourd’hui partagée dans l’oubli, le dénides années grises de douleurs et de drames. « Tu faispartie de ceux dont l’histoire ne retiendra pas le nom,de ceux qu’elle se hâte d’oublier »… B. M.Maïssa Bey, Puisque mon cœur est mort, Éditions de l’Aube

Le pêcheur deBagdad

Robinsonnadeécologique

Majid, jeune pêcheur vivant dans larégion de Bassora, part à Bagdad à

la recherche d’unremède pour sau-ver son père ma-lade. Au fil de saquête, il va décou-vrir les formida-bles apports de lacivilisation arabedans les domainesde la médecine,des arts ou desmathématiques…Cette intrigue, si-

tuée au Moyen Âge, constitue le pre-mier tome d’une trilogie qui mènerale lecteur à Byzance et à Aix-la-Cha-pelle, au cœur des Empires byzantin et carolingien. Alliant l’exi-gence du récit historique et l’espiè-glerie du roman d’aventures, voilàun livre particulièrement bienadapté pour les 10-14 ans.

Hugues Beaujard, En route vers Bagdad,Dadoclem Éditions

Maxime a 15 ans. Ses parents l’en-voient passer ses vacances sur une îleméditerranéenne, dans une famillemodeste. Un jour, alors que le garçonse promène en montagne avec les en-

fants de la maison,un typhon s’abatsur l’île. Au milieude la nature rava-gée et de l’orage quicontinue de gron-der, les trois jeunesgens vont vivre lesjours les plus in-tenses de leur vie.Une robinsonnadecontemporaine,sur fond de prise de

conscience écologique et d’une his-toire d’amour naissante…Roland Godel, Prisonniers du chaos, ÉditionsThierry Magnier, 2010.

Maman Pauline, Papa Roger, ses se-crets, « ses deux maisons » et son ad-miration pour le « chanteur à mous-tache qui pleure son copain le chêne »,Tonton René, l’oncle communiste etriche, Caroline et les premiers émoisamoureux, son frère Lounès, le meil-leur ami… Alain Mabanckou – par-

don, Michel, le héros de son dernier roman De-main j’aurai vingt ans – convoque ses prochespour de grandes retrouvailles avec l’enfance dansles années 1970 à Pointe-Noire au Congo… L’oc-casion de feuilleter l’album des souvenirs, vrais ouinventés, d’en restituer les couleurs, les bruits… etles saveurs. Les copains d’école, la magie du pre-mier radio-cassette, les films indiens et Jean-PaulBelmondo « qui ne tombe jamais » dans les ba-garres… La politique du pays avec les annéesmarxistes, le PCT et le « camarade président » Ma-rien Ngouabi et, au dehors, la vie du monde avecla fuite du chah d’Iran, les frasques meurtrièresd’Idi Amin Dada, Valéry Giscard d’Estaing et sescadeaux… Il y a aussi les livres, bien sûr, Tintin,Blek le Roc et Marcel Pagnol, mais aussi les San An-tonio découverts dans la bibliothèque des parents,

Mars 1957, en Algérie, le capitaineAndré Degorce et le lieutenant Horace Andreani, compagnonsd’armes en Indochine, se retrouventune nouvelle fois impliqués dans latourmente de l’Histoire. MéprisantAndreani, fasciné par la noblesse deson ennemi, Tahar, Degorce finit parvaciller. Explorant ce temps de désastre, Jérôme Ferrari décrit sousla forme d’une lente décompositionmorale le destin d’une « belle âme »

(Degorce) confrontée à la réalité sordide du combatet de la torture. Sans céder au manichéisme, en imprégnant son récit d’une patte résolument spiri-tuelle, Jérôme Ferrari offre avec Où j’ai laissé monâme une saisissante réflexion sur la condition humaine. S. P.Jérôme Ferrari, Où j’ai laissé mon âme, Actes Sud

Dans les ténèbresde la guerre

Les larmes d’une mère

Par Agnès Ceccaldijeunesse

et un clin d’œil à Rimbaud et un autre, à la déro-bée, à Tchicaya U Tam’si . Alain Mabanckou gardel’humour tout en baissant la garde de la tendresseet en regardant le passé à travers la lorgnette faus-sement naïve d’un enfant de dix ans. B. M.Alain Mabanckou, Demain j’aurai vingt ans, Gallimard

L’enfant de Pointe-Noire

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Une jeune femme part à la recherche de sasœur qu’elle suivra des bas-fonds d’un bidonvillejusqu’au sommet du Morne Câpresse où s’estréfugiée une communauté de filles perdues sou-mises à d’étranges rigueurs… Une nouvelleplongée de Gisèle Pineau dans les douloureuxtourments d’une femme guadeloupéenne.Gisèle Pineau, Morne Câpresse, Folio

Avec Sympathie pour le fantôme, Michaël Ferrier, qui vit et enseigne la littérature au Japon,propose un roman vif et érudit, situé dans leTokyo du XXIe siècle, mais centré sur la culturefrançaise ! Professeur « moderne et polyvalent »comme il se décrit lui-même, le narrateur tra-vaille aussi pour la télévision japonaise. Il planchesur le projet d’une émission qui proposerait uneHistoire de France « sous un jour nouveau ». Etchoisit d’évoquer le destin de trois « fantômes » ououbliés de l’Histoire : le marchand d’art AmbroiseVollard, né à La Réunion, qui découvre Cézanne,Van Gogh, Picasso…, la noire maîtresse de Baudelaire, Jeanne Duval, et Edmond Albius,petit esclave qui « invente » la vanille. Si le romanne manque pas de diatribes contre la culture« globalisante », l’université et la télévision, ilfourmille aussi de références littéraires et d’en-seignement sur le Japon. Bref, une fiction pleined’esprit et d’échanges culturels… S. P.Michaël Ferrier, Sympathie pour le fantôme, Gallimard

Le destin de trois « fantômes »

La traversée des sols

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Par Bernard MagnierPoches francophones

La vie n’est pas simple lorsqu’enfant, on naîtbossu et fils de sorcier, ou soupçonné del’être… Conteur congolais installé en Belgique,Pie Tsibanda offre avec Je ne suis pas un sorcierune plongée en terres traditionnelles mais aussisur les pistes nauséabondes de l’exclusion…Pie Tsibanda, Je ne suis pas un sorcier, Pocket

Ils se retrouvent, une couleur de peau et un mal-être en partage… à moins que l’amour nevienne à la rescousse… Sous la plume de Léo-nora Miano, Tels des astres éteints : deux Came-rounais et une Guyanaise à Paris ou trois façonsde vivre son identité noire dans la capitale.Léonora Miano, Tels des astres éteints, Pocket

Betty, une jeune femme africaine exilée en Europe, se lie de tendresse avec l’une de sesvoisines qui sera placée contre son gré dansune maison de retraite… Inassouvies, nos viesou la solitude est toujours ce qu’elle étaitselon Fatou Diome…Fatou Diome, Inassouvies, nos vies, J’ai Lu

La quête d’une bibliothécaire invitée à participerà un colloque sur la littérature érotique dans lemonde arabe. Entre journal amoureux, citationsde textes anciens, et réflexions sur le sujet. Poèteet romancière syrienne résidant à Paris, Salwa AlNeimi a participé à la « libre » traduction de LaPreuve par le miel, publié initialement en arabe.Salwa Al Neimi, La Preuve par le miel, Pocket

Véritable OLNI (Objet littéraire non identi-fié) que ce premier roman signé LaurentCohen ! Le titre, Sols, fait référence à la Kab-bale et aux sols spirituels qui correspondentaux sept ciels qui, selon elle, séparentl’homme de l’Infini. La première partie duroman évoque la rencontre entre deux éru-dits : Loïc Rothman, historien spécialiste deVichy et S.G., théologien spécialiste desanges. Le premier a besoin du second pourdécrypter un carnet écrit dans les années1940, sorte de journal de l’Occupation tenupar un intellectuel cosmopolite, truffé de ré-férences mystiques. Ce document com-menté par S.G. et Loïc Rothman constitue ladeuxième partie du récit. Émaillée de noteset références ésotériques précises, cette sin-gulière fiction s’apparente à une espèce dequête intellectuelle jubilatoire. S. P.Laurent Cohen, Sols, Actes Sud

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bande dessinée Par Sébastien Langevin

mémo // à lire

Le français dans le monde // n° 372 // novembre-décembre 2010

John Difool, détective privé de classe (R), revient dansde nouveaux habits : une belle occasion pour (re)dé-couvrir L’Incal, série-phare de la bande dessinée fran-çaise des années 1980. Au cours de l’une de ses enquêtes, John Difool, minable enquêteur de secondezone, trouve un étrange objet triangulaire qui sembleavoir de fantastiques pouvoirs : la possession de l’Incalva attirer vers lui tous les extraterrestres et autres diri-geants gourmands de l’univers. Dans cet univers futu-riste, aussi loufoque qu’inquiétant, une folle course-poursuite s’engage.

Quête mystico-humoristique, L’Incal s’est imposé en six albums comme la série de référence de la bande des-sinée de science-fiction. Au scénario, Alexandro Jodo-rowsky alterne avec brio scènes d’action, gags délirantset pauses philosophiques. Cette saga intergalactique sacrera Mœbius, alias Jean Giraud, comme l’un desmaîtres internationaux du graphisme épuré et onirique.Grâce à un minutieux travail sur les planches originales,cette somptueuse intégrale restitue les couleurs acidesdes années 1980 : 300 pages de bonheur !Alexandro Jodorowsky et Mœbius, L’Incal, l’intégrale, Les Humanoïdes associés

essais Par Philippe Hoibian

Un monument de la BD restauré

L’hebdomadaire Télérama portedepuis plus de soixante ans unregard curieux, critique, engagésur la vie culturelle. Soixante ansde culture et de passions. Enguise de bilan et d’hommage à ses collaborateurs et à seslecteurs, il nous propose une sélection d’entretiens, d’en-quêtes et de photos qui illustrent l’évolution de la revue : lesimple supplément de La Vie catholique est devenu un ma-gazine « multiculturel » de référence qui commente l’actualitédu cinéma, de la littérature, de la musique, de la chanson, dela danse, des arts , des médias… Son souhait a toujours été de rendre la culture plus familièreet plus accessible, de déchiffrer, à travers la création, l’étatd’une société, ses désirs et ses manques, ses interrogationset ses mutations. On y retrouvera des coups de cœur et descoups de gueule, avec une part croissante consacrée à l’ac-tualité qui fait l’Histoire. Le magazine est complété au-jourd’hui par les hors-séries illustrés (sur les grandes exposi-tions, les grands hommes, les grands thèmes de société) etun site Internet (qui propose en plus ses propres productionsaudio et vidéo : http://www.telerama.fr).Télérama se veut un guide de ceux pour qui « la culture n’est

pas seulement un divertissement mais lesuc et le sel de l’existence ». Pour Um-

berto Eco, « ce qui forme une culture,ce n’est la conservation mais le fil-trage », c’est-à-dire le choix, la li-berté d’aimer, de détester, delaisser de côté ou d’encenser. Télérama 60 ans : nos années culture -tomes 1 et 2, Les Arènes

La série defilms, diffuséeen six épisodessur France 2 (disponible en DVD), témoignede l’horreur de la Deuxième Guerre mon-diale (elle aurait fait 50 millions de morts,plus de victimes civiles que militaires) enprésentant les faits militaires et le vécuquotidien des gens ordinaires, à partird’images d’archives auxquelles on a rendules couleurs et les sons d’origine. Le sited’Apocalypse est sur www.france2.fr.Le livre propose le texte intégral du com-mentaire, illustré d’une large sélectiond’images. L’ensemble veut raconter unehistoire de la guerre qui ne soit pas la vic-toire d’un camp sur l’autre mais la défaitede tous. « Si tu veux la paix, connais laguerre », disait Gaston Bachelard.Daniel Costelle, Isabelle Clarke, Apocalypse,

la 2e guerre mondiale, Acropole

LA GUERRE ET LA PAIX UN ANGE PASSE

L’auteur (journaliste anglais plu-rilingue) est depuis des annéesà l’écoute de ce que chaquelangue sait dire de particulier. Ilaffectionne des mots intraduisibles commeschadenfreude (« la joie devant le malheurd’autrui »; en allemand), gedogen (« tolérertout en désapprouvant » ; en néerlandais),lagom (« le juste milieu valorisé » ; en sué-dois), sisu (« mélange de courage de dureté,de dépit face à l’adversité » ; en finlandais). Ils’amuse d’entendre des expressionscomme « cela s’appelle reviens », « un angepasse », « it takes two to tango » et apprécieles différentes façons de déclarer sonamour : « Ti voglio bene » (« je t’aime beau-coup » ; en italien), « Taisetsu » (« tu m’es pré-cieux » ; en japonais). Aux lecteurs de com-pléter sa liste de favoris !Alex Taylor, Bouche bée, tout ouïe : comment tomber

amoureux des langues, J.C. Lattès

Quoi de plus éternel, universel,culturel que la mort ? Quoi deplus lié à la vie, à une société, àune époque ? Ce dictionnaireest un voyage à travers millemots, une approche plurielle

des différentes façons de côtoyer et de penserla mort, ses métamorphoses, ses rituels, sesmythes. Les commentaires sont passionnants,sur des noms attendus comme « au-delà, camp

d’extermination, incinération, religion» et sur desmots moins attendus comme « abandon,beauté, carnaval, cinéma, tango »… Historique-ment, on est passé progressivement d’unemort familière, « apprivoisée », à une mort effa-cée qui la rend impensable et indicible. Ce quin’est pas vrai pour tous les pays : que l’onpense au Japon, au Mexique ou à la Chine…

Philippe di Folco (S/D), Dictionnaire de la mort,Larousse, collection In extenso

LA VIE ET LA MORT

SOIXANTE ANS DE CULTURE ET DE PASSIONS

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Polar Par Nathalie Ruas

En postulant auprès duGroupe, Charlotte rêvaitd’ « un monde sans bêtisesans incompétence ». Vinhvoulait simplement rejoin-dre les meilleurs. De mis-sion en mission, les deuxhéros de Cleer. Une fantai-sie corporate évoluent,bien au-delà d’une simple ascension profes-sionnelle. Avec des gimmicks du monde de l’en-treprise, des variations autour des multinatio-nales et des clins d’œil à la littérature généraleet SF, L. L. Kloetzer compose une fantaisie brillante.L. L. Kloetzer, Cleer, Une fantaisie corporate, Denoël

Et si le Benelux était de-venu dans les années 1970une dictature féministe ?Telle est l’uchronie quisous-tend Les Assoiffées,premier roman de Ber-nard Quiriny, auteur etuniversitaire belge.Que verraient alors des intellectuels français invi-tés à visiter l’Empire ? Etquel serait le quotidien d’une infirmière pro-pulsée favorite de la Bergère ? Entre l’écho desvoyages en URSS et le portrait d’une dictatriceivre de pouvoir et d’elle-même, cette fable seboit comme du petit lait mais avec un arrière-goût amer…Bernard Quiriny, Les Assoiffées, Seuil

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Par Claude Olivieri

Rire : pour quoi faire ? Le nouveauthème inscrit au programme duBrevet de Technicien supérieur aincité J. Destaing et P. Labaune àpublier une anthologie de textes littéraires, articles, chansons,

accompagnée de supports iconographiques va-riés. L’ouvrage situe dans l’histoire les théories etpratiques du rire, de Rabelais aux humoristes actuels, et présente les fonctions du rire sous troisangles : rire pour unir ou uniformiser, rire pourcritiquer, rire pour résister. J. Destaing et P. Labaune, Rire : pour quoi faire ? GF Flammarion, coll.Étonnants classiques

Créateur d’Astérix, de LuckyLuke, du Petit Nicolas ou d’Izno-goud, René Goscinny appartientà notre patrimoine culturel, tantpar l’imagerie gauloise qu’il acréée que par les expressions qu’ila mises à la mode. Sous le titre

Goscinny. Faire rire, quel métier !, Aymar du Cha-tenet et Caroline Guillot retracent le parcours in-solite de celui qui, depuis son plus jeune âge, vou-lait faire rire et qui, en renouvelant l’art de laparodie, a donné à la BD ses lettres de noblesse.Aymar du Chatenet, Caroline Guillot, Goscinny. Faire rire, quel métier !Découvertes Gallimard

Le Meilleur de L’Os à Moelle re-groupe les numéros les plus ca-ractéristiques de ce journal my-thique lancé en 1938 par PierreDac, une grande figure de l’hu-mour loufoque que ses sketches

avec Francis Blanche ont popularisé auprès du public de l’après-guerre. Dépêches farfelues, reportages saugrenus, conseils incongrus, offresd’emploi inattendues : cette anthologie est à fairedécouvrir de toute urgence aux jeunes généra-tions ! Une référence obligée de l’humour français. Le Meilleur de L’Os à Moelle, Seuil, coll. Points

Coffret de trois volumes pourcette adaptation théâtrale parJean-Michel Ribes et Jean-MarieGourio des Brèves de comptoir . Ils’agit d’une mise en scène de citations authentiques recueil-lies dans la vie de tous les jours

par Jean-Marie Gourio, depuis 1988, surtout dansles bars et bistrots. L’absurde, l’humour mais aussil’actualité et parfois la philosophie se côtoient icide manière cocasse.Jean-Michel Ribes, Jean-Marie Gourio, Brèves de comptoir, Actes Sud-Papiers

Avec Une histoire des haines d’écri-vains, Anne Boquel et ÉtienneKern nous livrent une version ori-ginale et réjouissante de notrehistoire littéraire. Cet essai, aussiléger que bien documenté, nousdonne à voir le spectacle des mes-

quineries, des jalousies, des rivalités. Les traitsd’esprit les plus fins, les mots les plus féroces, lespropos les plus acerbes ont pour unique but quede couvrir l’ennemi de ridicule sur la place publique. Aussi méchant que divertissant !Anne Boquel, Étienne Kern, Une histoire des haines d’écrivains,Flammarion, coll. Champs essais

La soif du mâle

Harold n’apparaît sans doute pas au générique des Oiseaux d’Hitchock. Mais Louis-Stéphane Ulysse en afait le héros de son roman éponyme, véritable tragédiegrecque dans les États-Unis des années 1960. Le cor-beau protecteur et confident frappe parfois comme ledestin, dans un tourbillon de névroses hollywoodienneset de crimes mafieux. Un roman noir corbeau d’unegrande envergure.Louis-Stéphane Ulysse, Harold, Le Serpent à plumes

OISEAU DE MAUVAISE AUGUREUn brocanteur à la routine pleine de rituels débusquepresque par hasard un tableau de maître dans une venteaux enchères à Montauban. Il voit dans cette aubaine ledébut d’une nouvelle vie. Hélas, le tableau lui échappe…comme il échappa en son temps à celui qui l’a peint. L’en-quête du marchand de tableau décrite dans le premierroman de Patrick Weiller est plus palpitante que la di-mension policière de la fin du livre. Elle fait du Jugementde Salomon un récit à lire pour sa toile de fond.Patrick Weiller, Le Jugement de Salomon, Biro éditeur

LE JUGE ÉTAIT PRESQUE PARTIAL

Luminescence des échanges en milieu éclairé

Rire… de quoi ? pour quoi ?

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Par Jean-Claude Demari et Edmond Sadakamémo // à écouter

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Des rengaines en reggaecoups de cœur

Le reggae est devenu en quelques décennies un genreplanétaire… Bon nombre d’artistes francophones ontchoisi de s’exprimer sur cette musique née en Jamaïquedans les années 1960. Sélection.

Originaire de Grenoble, le collectif fran-çais Sinsemilia a su renouveler le reg-gae en version française avec destextes militants et une musique flirtantparfois avec le rock.

Dub Inc fait partie du vivier dynamique du reggae français.Ce groupe de huit musiciens propose un reggae tradi-tionnel, avec des apports ragga et orientaux. Au fil desans, son audience s’est considérablement élargie.

Raggasonic revient après une absence de plus de dix ans. Big Red et Daddy Mory se sont réconciliés. Ils ontparticipé cette année à plusieurs festivals, et notammentà la Fête de l’Humanité en septembre 2010. Un albumest attendu pour 2011.

Pierpoljak est l’un des rares artistesblancs à s’être imposé dans ce stylesur la scène française. Il est revenuen 2010 avec Légendaire sérénadeen faisant le choix d’une musiqueplus acoustique.

K2R Riddim, groupe français de reggae et de ska, a étéformé en 1992. Il a choisi la voie de l’autoproduction et a réussi à s’imposer dans la durée en fidélisant un largepublic… Avant de disparaître en 2007.

Ils sont angevins et depuis 1995, ils brassent le reggaedub, le trip hop et l’électro dans un savant dosage. Lequintette Zenzile a sorti un douzième album l’an dernier.

Tonton David est l’un des pionniers du raggamuffin fran-çais (style dérivé du reggae avec un tempo plus rapide).Ces dernières années, il a semblé s’essouffler. Il reste,grâce à ses textes revendicatifs, une valeur sûre.

Il est le précurseur et le symbole du reggae africain : l’Ivoi-rien Alpha Blondy a littéralement secoué l’Afrique del’Ouest dans les années 1980. Il a atteint une consécra-tion internationale avec « Jérusalem » en 1986.

Autre voix forte de l’Afrique militante(Ivoirien lui aussi) : Tiken Jah Fakoly.Ce fils spirituel de Bob Marley est l’undes porte-parole de la jeune généra-tion ivoirienne. Le prix RFI Décou-vertes lui a été décerné en l’an 2000.

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Il est peu courant d’entendre de la house bienfraîche sur laquelle danse un Français bien char-penté. C’est la performance que réalise, avec sonpremier album, Cheese, Paul Van Haver, dit Stro-mae, né le 12 mars 1985 à Bruxelles. « Alors ondanse » a été l’électron libre de l’été en Belgique,en Allemagne, en France et en Suisse. Ses paroles, cruelles, sont bien mises en avant : telleest la marque de Stromae. « Dodo », encore plus culotté, fait sautiller sur une dénonciation crue de l’enfance maltraitée… Mais l’album comporte

aussi desm o m e n t splus festifs :« House’llelu-jah », « Rail demusique »…Stromae s’estd’abord illus-tré dans le rap puis l’a quitté pour se diriger sur lespas de son concitoyen Jacques Brel. Il serait diffi-cile de le lui reprocher. J.-C. D.

Stromae, maestro électro

L’été 2010 a été marqué par un « tube » réputéanti-consumériste, « Je veux ». Jolie mélodie, paroles espiègles, voix légèrement fêlée : il étaitdifficile de bouder son plaisir. Oui, mais après ons’est intéressé à l’album et l’air du soupçon acommencé à tourner. À côté de réussites comme« La fée », « Prends garde à ta langue » ou « Lespassants », on trouve sur cet album les affligeants« Le long de la route », « Dans ma rue » (seconddegré ?) et « Éblouie par la nuit »… Alors, Zaz,chanteuse révoltée ou interprète réaliste récupé-rée avant que d’être née ? Incontestablement, samusique et son univers sont plus proches de ceuxde l’agaçante Cœur de Pirate que de ce qui meutles titis parisiens de Java. Le jazz manouche etla chanson réaliste, comme l’enfer, sontpavés de bonnes intentions. J.-C. D.

Zaz, chansonnière à controverse

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livres à écouter Par Sophie Patois

Dans Les Témoins de la mariée, Didiervan Cauwelaert, sous la forme d’unefable un peu grinçante, disserte sur les limites de l’amitié. Marc Hessler, sédui-sant et célèbre photographe, meurt dansun accident de voiture cinq jours avantson mariage avec une jeune Chinoise.Comment ses amis vont-ils annoncer latriste nouvelle à la fiancée ? Pour cettelecture à plusieurs voix, le prix Goncourt1994 (Un aller simple) se fait chaleureu-sement accompagner par l’auteure de polar et animatrice de radio SophieLoubière et les comédiens Pierre Tissotet Stéphane Ronchewski.

Audiolib

Écrit en 1939, Tropismes de Nathalie Sarraute figure au panthéon de la littéra-ture française moderne. Enregistrés entre1980 et 1999 avec l’auteure et les comédiennes Madeleine Renaud et Isabelle Huppert, ces textes qui indiquentle chemin vers une nouvelle voie littéraire,forte des expressions d’un « for intérieur »,font désormais partie du patrimoine cultu-rel français. Un classique du genre donc.

Bibliothèque des voix, Éditions Des femmes

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Le premier album de Peau, Première Mue,conjugue de façon exigeante l’école électroet celle de la pop folk, un peu plus loin queBjörk ou Camille. Fusion rare en France,couronnée de réussites : « Enola Gay »,« Une petite pluie »…

Incontestablement, il swingue, Yannick Noah, dans Fron-tières, son huitième album ! « Ma pomme », premier mor-ceau, parle énergique-ment de sa vie à NewYork. Mais pour lereste, l’ancien cham-pion n’innove guère,même s’il fait passerquelques bons mo-ments de musiques dumonde aux côtés d’An-gela Davis, de BarackObama et de l’abbéPierre…

Jamaïca, groupe français d’électro-rock, fait songer à sesaînés de Phoenix : mélodies bien pensées, rythmes éner-giques. Comme eux, malheureusement, Jamaïca s’ex-prime en anglais. On aime quand même beaucoup « I Think I Like U 2 », « Short and Entertaining » et « Junior ».Pour quand la V. F. ?

La Québécoise Lynda Lemay a conquis le cœurdes Français dans les années 1990. Son dou-zième album Blessée a été enregistré lors desa dernière tournée européenne. Il compte 18 chansons dont 13 inédites.

On ne dit jamais assez

aux gens qu’on aime

qu’on les aime : c’est letitre du dernier opus deLouis Chédid (en collabo-ration avec son fils M).« Maman, maman » estun hommage à sa mèreAndrée Chédid.

Elle est l’une des artistesmajeures de la scène fran-çaise : Véronique Sansonrevient avec Plusieurs Lunes.On retiendra notamment« La nuit sait attendre », unesalsa chantée en français eten espagnol.

en bref

Auteur, compositeur et interprète, ilappartient indéniablement à la caté-gorie des maîtres de la chanson fran-çaise. Guy Béart a fêté ses 80 ans le 16 juillet dernier. Il est aujourd’huidoublement sur le devant de lascène : il a sorti fin septembre Le meil-leur des choses,un CD de 12 nouvelleschansons (quinze ans après son der-nier album studio Il est temps). Parmiles nouveaux titres : « Télé Attila », un

pamphlet sur le petit écran. Ce nouvelalbum sort en même temps qu’un cof-fret Best Of de trois CD qui comprendses chansons les plus connues tellesque « La vérité », « L’eau vive », « Lescouleurs du temps » ou encore « Legrand chambardement ». Au total,60 chansons qui sont autant de«  tubes  » indémodables pour cet artiste injustement oublié depuis delongues années. E. S.

Le français dans le monde // n°372 // novembre-décembre 2010

■www.fdlm.orgpour retrouver toutes lesréférences des albums.

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Le retour de Guy Béart

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