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Le loup d'écume

DU MÊME AUTEUR

Tueurs de flics, Néo La Nuit des chats bottés, Néo

Sniper, Fayard Gentil, Faty !, Fayard

L'Adieu aux anges, Denoël Brouillard d'automne, Mazarine

© Éditions Albin Michel S.A., 1986 22, rue Huyghens, 75014 Paris

ISBN 2-226-02682-7 ISSN 0290-3326

A Stéphan Rudy Fajardie

1

Océan Atlantique. Au large de Belo Horizonte. Brésil. 25 mai 1987.

L'U-888 émergea comme un bouchon à quelques encablures du pétrolier Quex do Manàus dont le n o m germano-brés i l i en n ' ava i t j ama i s éveillé d'excessive curiosité.

Le l ieutenant de vaisseau Werner Wedelman, ironique, se tourna vers le troisième officier, l'en- seigne de vaisseau de 1 classe Horst Braun, à qui il avait confié la manœuvre, et lui dit :

— Trop précipité, trop d'air dans les ballasts. Pendant la guerre, de telles erreurs étaient mor- telles.

L'ingénieur mécanicien Otto Schiller sourit avec indulgence tandis que l'officier en second, l'en- seigne de vaisseau de 1 classe Ernst von Ditter- meyer fusi l la i t Braun du regard , exac tement comme on le fait pour un débutant peu doué.

Wedelman, conscient de la brusque tension, cher- cha des paroles conciliantes :

— Nous en sommes tous passés par là. C'est

d'ailleurs sans importance : l'U-888 en a vu d'au- tres.

L'ingénieur mécanicien, hochant la tête en sou- riant, ajouta d 'un air rêveur :

— Chantier de construction Krupp Germania- werke, à Kiel. Lancé en 1938. Pensez !

Le contraste entre les quatre hommes était éton- nant. Wedelman et Schiller, âgés respectivement de soixante-trois et soixante-six ans, affichaient une relative sérénité quand von Dittermeyer et Braun, vingt-cinq et vingt-deux ans, ne parvenaient pas à maîtriser leur nervosité.

Un spectateur non averti qui, pa r un coup de baguette magique se serait retrouvé dans le poste de commandement du sous-marin, aurai t légitime- ment pu penser qu' i l s 'agissait d 'un équipage composé pour moitié de grands-pères et, pour l'au- tre partie, de leurs petits-fils. Mais Wedelman, fidèle à une promesse faite un jour d'avril 1945 à quatre hommes morts depuis, l 'avait voulu ainsi.

On avait embrayé les moteurs diesels et, rapide- ment, les quatre officiers s'étaient hissés sur la passerelle du kiosque. Le pont, ruisselant, émer- geait déjà.

Les signaux lumineux du Quex do Manàus traver- sèrent la nuit et Wedelman ordonna :

— Répondez : plongée prévue dans dix minutes, à 0 heure 00. Vous talonnons. Terminé.

Puis, tandis qu'un homme d'équipage transmet- tait le message au pétrolier :

— Route au 140 ! Comme ça, la barre ! Schiller observa le ciel étoilé. Hormis les rares

sorties d'entretien sur l'Amazone et son affluent

rebaptisé « Thor » depuis 1945 par la petite communauté allemande, il n'avait pas repris la mer et son dernier souvenir de navigation restait cet interminable voyage de Wilhelmshaven au Brésil avec l'angoisse des destroyers et des chasseurs bombardiers de plusieurs dizaines de pays qui avaient attendu l'ultime quart d'heure pour décla- rer la guerre au Reich.

Il n'avait pas peur. Il partait en guerre, peut-être la Troisième Guerre mondiale, avec une ardeur de cadet de l'Académie militaire et un mordant de jeune homme. La veille, avec son fils, officier en second sur le Quex do Manàus, et son petit-fils, second maître de 2 classe au Technisches Personal Zentra le sur l'U-888, il avait dignement arrosé l'événement qui devait bouleverser leurs vies. Trois générations de Schiller au coude à coude, pour l'Allemagne !

Il s 'assombrit auss i tô t : quelle Allemagne? Comment était-elle réellement ? De quelle potentia- lité était-elle porteuse ? Occupée militairement par le monstre soviétique et quadrillée par les plouto- crates américains : qu'avait-elle pu préserver de l'Âme allemande ?

Le son lancinant du klaxon d'alerte chassa immé- diatement ses pensées et il bondit à l'intérieur à la suite de von Dittermeyer.

Encore suspendu au volant du panneau, Wedel- man ordonnait d'une voix autoritaire :

— Plongée immédiate ! Ouvrez les purges !

1. Centrale.

Déjà, les hélices étaient embrayées sur les moteurs électriques.

— Immersion périscopique ! ordonna Wedelman qui, sortant son chronomètre, ajouta d'une voix maussade : Nous pouvons mieux faire ! La pro- chaine fois, les retardataires resteront sur la passe- relle !

Officiers et marins, dépités, baissèrent la tête et Schiller, dont la superstition exigeait que la mission commençât sous les meilleurs auspices, ques- tionna :

— Est-il prématuré de connaître notre objectif, ou du moins d'en avoir une idée approximative, Kapitänleutnant ?

Wedelman, qui connaissait toutes les manies de l'officier mécanicien, répugna à le contrarier mais c'est de mauvaise grâce qu'il répondit :

— On nous a signalé un navire de guerre d'Eu- rope occidentale qui a subi une grave avarie de moteur. Sa vitesse, habituellement de vingt-six nœuds, est réduite à cinq ou six nœuds. Une proie facile pour ouvrir notre campagne, familiariser les hommes et tester le nouveau matériel.

— Fortement armé, commandant ? demanda Braun.

— En effet. Mais la surprise le désarmera totale- ment.

1. Commandant.

Nord-est de Montevideo. Uruguay. 1 j u i n 1987. 22 heures 30, heure locale.

La nui t , u n p e u fraîche, p r o m e t t a i t d ' ê t r e longue et Joël Le Guerrec, quartier-maître de 2e classe sur le Capitaine-Lemonier observait avec ennui les gros nuages sombres qui, par intermittence, masquaient la lune et quelques rares étoiles.

Sa veille, monotone, lui semblait inutile, relevant de la pure brimade, du drill qui, coûte que coûte, demeurait une des traditions les plus ancrées de la « Royale ».

Il ne pouvait même plus espérer une diversion inattendue, ayant croisé un pétrolier qui, par radio, s'était enquis de savoir si le Capitaine-Lemonier désirait de l'aide.

Quelle blague ! Il distinguait encore, par le travers, la très vague

silhouette du petit pétrolier qui s'éloignait poussi- vement. De l'aide ! « Mais comment donc ! » pensa- t-il en riant. Sauf qu'avec la meilleure volonté, il ne voyait pas comment ce vieux rafiot pourrait les aider de quelque façon que ce soit. Certes, le Capitaine-Lemonier n'était pas lui-même de pre- mière jeunesse. A y bien réfléchir, on pouvait même évoquer une casse prochaine malgré deux refontes en profondeur dans les quinze dernières années. Mais il filait encore ses vingt-six nœuds... lorsqu'il fonctionnait !

Ne voulant pas laisser échapper cette rare occa- sion de distraction, le marin français chercha à se souvenir du nom de l'antique pétrolier. Un nom

bizarre. Quelque chose de vaguement bâtard, d'op- posé, de contradictoire. « Calypse »... « Queen »... Non : « Quex » ! Exactement ! « Quex » quelque chose, quelque chose en espingouoin.

Il alluma une cigarette et, le regard perdu en direction du pétrolier, décida de se concentrer tout entier sur cet intéressant problème.

Même lieu. Même date. Même heure.

— Hissez le périscope ! Wedelman, entièrement maître de lui, observa le

tube qui grimpait de son puits et, saisissant les poignées, colla ses yeux aux oculaires.

— Surface ! L'U-888 émergea, deux franges d'écume sur ses

flancs d'acier et, sur la passerelle encore mouillée, le commandant, imité par von Dittermeyer, jumel- les à la main, débouchèrent comme des diables, totalement indifférents au très léger roulis de la coque.

Wedelman, malgré tous ses efforts, ne put empê- cher un certain tremblement de sa voix :

— Marine nationale française. C'est un Aviso- escorteur de la classe « Commandant-Rivière ». Bonne artillerie à grand débit mais ce sont ses mortiers quadritube de 305 qui sont le plus à craindre. Voyez, ils ont désarmé la plage arrière pour y installer un hélicoptère et son hangar... Il n'empêche qu'il est déjà démodé !

— Beau bâtiment tout de même, commandant! lança von Dittermeyer, admiratif.

Wedelman sourit : — Nous attaquerons en surface, à 2 500 mètres.

Ouvrez les portes des tubes I à IV ! Los ! Von Dittermeyer répéta l'ordre par le conduit

acoustique. Très vite, du compartiment des torpil- les une voix excitée répondit :

— Tubes I à IV, parés ! Wedelman réfléchit un instant. L 'étrave, le centre

et l'arrière. Puis, très rapidement, il indiqua la profondeur, la distance et la vitesse des torpilles.

Après un regard à la lunette de mire, von Ditter- meyer entra en communication avec le transmet- teur de gisement de but et le compas gyroscopique connectés sur le circuit des torpilles. Puis, lorsque sa croix de visée fut fixée sur l'avant du bâtiment de guerre, il empoigna les commandes de lancement en disant :

— Tube I, paré à lancer, commandant ! — Feu! Von Dettermeyer cria aussitôt : — Tube I. Feu ! Attention le II ! — Tube II. Feu ! — Tube II. Feu ! Attention le III ! — Tube III. Feu ! — Tube III. Feu ! Attention le IV ! — Tube IV. Feu! — Tube IV. Feu ! répéta von Dittermeyer. Aux ordres, immédiatement exécutés, succédè-

rent de légers heurts à bord du sous-marin, indi- quant à tous les membres de l'équipage les coups de départ.

A trente-cinq nœuds, les torpilles électriques fon- çaient vers la coque de l'Aviso-escorteur.

Même lieu. Même date. Même heure.

Le quartier-maître de 2 classe Le Guerrec, les yeux arrondis pa r la stupeur, observa la torpille venue de nulle par t et qui, distante de quelques dizaines de mètres, arrivait exactement sur lui.

Si la torpille avait été distante de plusieurs milles, il aurait peut-être songé à l'Argentine toute proche et à la récente guerre des Falkland.

Mais il n 'avait plus le temps. A peine s'il lui restait quelques secondes pour fixer cette énorme torpille grise qui, tel un squale, fonçait sur lui.

L'unique pensée à laquelle il s'accrocha révélait, chez cet homme sans grande imagination, un cer- ta in sens de l 'humour, au demeurant peut-être involontaire : « Pourquoi ils me torpillent, moi ? »

Même lieu. Même date. Même heure.

Le grondement sourd qui contenait les quatre explosions fut acclamé par les hourras de l'équipage de l'U-888.

Sur la passerelle, Wedelman, jumelles aux yeux, fixait le long bâtiment qui, d' instant en instant, prenait une gîte aussi impressionnante qu'irréver- sible.

Déjà, les canonniers du sous-marin faisaient ton- ner la grosse pièce d'artillerie du pont qui pilonnait

un point unique : les installations radio de l'Aviso- escorteur.

Le bât iment sembla se stabiliser quelques secondes puis, brutalement, il se retourna, quille en l'air, tel un gros poisson mort.

Les hommes de l'U-888 turent leurs exclamations et, figés, ils virent la poupe s'enfoncer. Puis la proue se dressa à une quarantaine de mètres de haut et le bâtiment français disparut dans une gerbe d'écume.

La silhouette du Quex do Manàus se profila de nouveau, ses puissants moteurs flambant neufs poussés à plein régime. Aussitôt, des signaux opti- ques transmirent : « Félicitations. Nous finissons le travail. »

Wedelman savait. Ce qui se produirait dans quel- ques minutes constituait le point le plus pénible de l'opération et pouvait se résumer par : « aucun survivant ». Pendant des heures, projecteurs allu- més et ses ponts littéralement hérissés de mitrail- leuses, le Quex do Manàus allait « nettoyer le secteur », ratissant chaque pouce d'océan.

— Immersion 60 mètres. Aux postes de plongée ! Quelques instants plus tard, comme des tonnes

d'eau pénétraient dans les ballasts, le comman- dant se dirigea sans un mot vers sa couchette.

Tandis que, tout habillé, il s'allongeait, la ques- tion de l'utilité de cette mission revint le hanter. Assez courageux, ou lucide, pour ne pas se leurrer sur ses sentiments, il se sentait dans la situation d'un homme qui, une fois son plaisir pris avec une partenaire qu'il méprise, en arrive à se dégoûter lui-

même, faute d'avoir su dominer ses passions et le fugitif plaisir qu'elles procurent.

Eh bien oui, son plaisir de commander cet U-Boot était immense. Mais il fallait le payer le prix fort, ou, plus exactement, le faire payer le prix fort à des hommes innocents qui mourraient sans rien comprendre.

Enfin, à tout cela s'ajoutait un grand sentiment de solitude lié à ses fonctions de commandant, certes, mais aussi au fait de cet isolement ressenti tout à l'heure lorsque l'équipage se réjouissait bruyamment. Un isolement total qu'il partageait, peut-être, avec quelques vieux marins du Quex.

Il passa en revue les visages des deux équipages, grimaçant à certaines évocations. Au fond, le seul qui lui avait nettement avoué sa répugnance, c'était, précisément, le commandant du Quex.

Un opposant, quelques vieux ronchonneurs et lui- même qui ne savait pas précisément où se situer : peu, très peu !

Il ferma les yeux et sa main tâtonna vers une bouteille de schnaps.

2 Moscou. 30 avril 1943.

La voiture sort i t du Kremlin après un ult ime contrôle où la garde, une fois de plus, s 'é tai t montrée tatillonne.

L 'homme assis sur le siège arrière était âgé de soixante et un an. Tuberculeux, il ne lui restait que six ans à vivre.

Il posa un regard attentif sur les défenses de la ville hérissée de barrages et creusée de fossés antichars. Des unités blindées, sortant directement de l'usine où leurs équipages avaient été les cher- cher, se ruaient vers le front central.

L'homme sortit un mouchoir blanc de la poche de son veston et cracha. Il observa longuement la mousse rougeâtre puis, froissant le mouchoir, le remit précautionneusement en place.

La voiture fut presque aussitôt stoppée à une intersection pour laisser passer un de ces convois militaires qui bénéficiaient d'une priorité absolue. Sur de lourds camions américains à trois essieux, des grappes de fantassins extrêmement jeunes agi- taient les mains à l ' intention de la population

moscovite. Juché sur le toit d'une cabine, un adoles- cent très blond, le calot sur l'œil et la tunique très décorée, jouait de l'accordéon.

Se sentant observé, l 'homme malade tourna la tête vers le véhicule voisin, stoppé lui aussi. A l'intérieur, un général-major d'artillerie au visage lunaire le salua de sa main gantée.

L'homme malade rendit le salut. Il était habitué à de telles marques de sympathie puisque le monde entier connaissait son visage depuis le procès de Leipzig où il avait ridiculisé le maréchal de l 'air allemand Hermann Goering.

Georgi Dimitrov, secrétaire général de la I I I In- ternationale, réprima une nouvelle toux.

Il se sentait las, écœuré, vidé de toute énergie. Les paroles de Staline lui revenaient sans cesse. Les paroles et la mimique qui les accompagnait, cet air tout à la fois patelin, roublard et bienveillant. Et ce gros rire en ponctuant son verdict par ces mots : « Kommounistitcheski internacional, kaputt ! »

« Le fait du Prince si tant est, pensa Dimitrov, que ce satrape mégalomane puisse être comparé à un prince. »

L'ex-secrétaire général du K o m i n t e r n ne parve- nait pas réellement à réaliser l 'ampleur du désastre. Sa mémoire s 'at tardait sur ce 20 août 1935 où il avait accédé au secrétariat de l 'Internationale pour y prôner immédia tement la politique de Front populaire et d'union de toutes les forces antifas- cistes.

Staline venait, d 'un trait de plume, de rayer

1. Abréviation courante.

l 'Internationalisme prolétarien qui constituait l'es- sence du marxisme-léninisme. Le nouveau tsar, qui s'était autoproclamé maréchal de l'Union soviéti- que le 7 février, avait donc liquidé la poutre maî- tresse du communisme, sans coup férir, plus effica- cement que la réaction internationale et les fas- cismes.

La voiture de l'ex-secrétaire général s'immobilisa devant sa datcha de fonction mais l 'homme ne bougea pas.

Puis, il entendit simultanément les hurlements des sirènes antiaériennes et la voix angoissée de son chauffeur qui lui criait presque :

— Une alerte, camarade secrétaire général ! Il faut gagner l'abri, vite !

— Fous-moi la paix, Stojan ! Vas-y seul ! Réfléchir ! Il fallait réfléchir vite, très vite, et imaginer une

parade, une contre-attaque. Bloquer Staline ! Mais avec quelles forces ? Un complot ? C'était digne des Républiques bananières et de leurs pronunciamien- tos. Et de toutes les façons, l 'homme était trop bien gardé.

Épuisé, Dimitrov chercha des ressources dans l'évocation de son pays, de ses hivers rigoureux, de ses champs de blé et de maïs, et puis la vieille chaîne montagneuse Stara Planina et les cols à l'ouest de l'Iskǎr, « la vallée des roses » et le cours de la Maritza qui va se jeter dans la mer Égée...

Il fallait sauver tout cela, coûte que coûte, contre les déviations droitières de ce fou dangereux. Aucun despote, aucun système n'est à l 'abri pour peu qu'on se donne les moyens de précipiter leur chute.

La faille devait exister quelque par t et, s'il vivait encore quelques années, il saurait bien la trouver.

Dimitrov ouvrit la portière et jeta un regard bienveillant à son chauffeur qui n'avait pas aban- donné son poste.

Sa confiance lui revint. Il suffirait de jouer le jeu. En apparence.

3 Wilhelmshaven. 23 avril 1945.

Le directeur des Opérations fixa le grand amiral Karl Dönitz qui se tenait, très raide, derrière la vitre blindée.

Le visage du commandant suprême de la Kriegs- mar ine n ' expr imai t aucun sentiment. Seule sa silhouette légèrement voûtée trahissait la fatigue et la tension des derniers mois de guerre. Il regardait, comme indifférent, le quai verrouillé militairement. Et même le spectacle des femmes et des enfants, pourtant inhabituel dans une base de guerre, ne semblait pas l'émouvoir.

Le grand amiral concentra son attention sur l'U- Boot gris du type VII B dont l'équipage s'activait aux manœuvres précédant l'appareillage.

— Ils ne tiendront jamais là-dedans. Pas avec des femmes et des gosses.

Les paroles de Dönitz firent taire les murmures et un contre-amiral fit un pas en avant :

— Les essais avec mannequins ont donné entière satisfaction. Nous avons entièrement redéfini l'or- ganisation de l'espace et...

Dönitz le coupa d'un geste : — Quand bien même, cette vieille coque de noix

est périmée ! Sur le quai, une petite jeune fille du B.D.M.

trébucha sur un câble d'acier. Se précipitant, un quartier-maître la releva puis s'inclina légèrement.

Le grand amiral esquissa un sourire puis ordonna :

— Schmidt ? L'ingénieur général de la Marine, département

des sous-marins et torpilles, se figea sur place dans un garde-à-vous d'autant plus prussien que Karl Schmidt avait été exempté de service militaire.

— Parlez-moi de cette vieille coque de noix. Schmidt hésita, toussota pour gagner du temps et

ordonner ses pensées et commença d'une voix incer- taine :

— Le type VII B, quoique équipé pour des mis- sions dans l'Atlantique Sud, ne nous a pas paru présenter les garanties nécessaires. Il avait cepen- dant l'avantage d'un faible tirant d'eau, indispensa- ble pour remonter ce fleuve d'Amérique du Sud...

Le grand amiral le coupa sèchement : — On m'avait informé d'une opération codée.

Vous envisagez d'être le seul à parler en clair, Schmidt ?

L'ingénieur général rougit : — Excusez-moi, je... Le grand amiral ne le laissa pas poursuivre : — Je connais vos problèmes personnels,

1. Bund Deutscher Mädchen : Ligue des jeunes filles alle- mandes (équivalent féminin des Hitlerjugend).

La Golf Rabbit rouge de Sharelli ralentit, place de la Concorde, à la hauteur de l'état-major de la Marine.

Du doigt, il montra à Élisa le bureau où, avec Vang, il avait tenté de comprendre.

Puis, très vite, il embraya et remonta les Champs- Élysées.

Il avait revêtu son grand uniforme où brillaient deux décorations. Le bleu s'harmonisait bien avec la robe de mariée de la jeune femme.

Désignant la foule qui regardait les vitrines ou faisait la queue devant les cinémas, elle lui dit :

— Tu as sauvé tous ces gens-là ! Il haussa les épaules en souriant : — Ils n'aiment pas les sauveurs. Et ils ont raison.

Tante Sarah insistait beaucoup sur la perversité des sauveurs suprêmes.

Puis, se garant en seconde position, il prit sa femme dans ses bras en disant :

— Je ne sais pas ce que tante Sarah aurait dit de toute cette histoire mais je suis bien sûr qu'elle t'aurait trouvée jolie !

— Alors embrasse-moi !

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