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1 Le rôle de la création de lien client-vendeur dans la construction de l’expérience de magasinage : une approche par le contenu de l’expérience Intissar Abbes Assistante à l’ESCT-Université de la Manouba Docteur en Sciences de Gestion 2, rue khézama, el Menzeh 5, 1004 Ariana, Tunis, Tunisie Tél : +216 98 255 604 [email protected] Samira Zine- Danguir Professeur à l’IHEC-Carthage Université de Carthage [email protected] Isabelle Barth Professeur à l’EM Strasbourg Université de Strasbourg HuManiS [email protected]

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Le rôle de la création de lien client-vendeur dans la construction de

l’expérience de magasinage : une approche par le contenu de l’expérience

Intissar Abbes

Assistante à l’ESCT-Université de la Manouba

Docteur en Sciences de Gestion

2, rue khézama, el Menzeh 5, 1004 Ariana, Tunis, Tunisie

Tél : +216 98 255 604

[email protected]

Samira Zine- Danguir

Professeur à l’IHEC-Carthage

Université de Carthage

[email protected]

Isabelle Barth

Professeur à l’EM Strasbourg

Université de Strasbourg

HuManiS

[email protected]

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Le rôle de la création de lien client-vendeur dans la construction de l’expérience de

magasinage : une approche par le contenu de l’expérience

Résumé:

Le rôle de la création de lien client-vendeur a souvent été marginalisé par les études sur la

valeur de la consommation expérientielle. En nous inscrivons dans une approche par le

contenu de l’expérience et en nous basons sur les résultats d’une enquête terrain auprès de 500

consommateurs sur le lieu de vente, nous évaluons le niveau d’influence de la dimension

« création de lien » client-vendeur sur l’expérience globale de magasinage que nous

conceptualisons selon trois phases : « le cœur de l’expérience », « l’expérience d’achat » et

« l’expérience du souvenir ».

Mots-clés : création de lien client-vendeur, expérience de magasinage, contenu de

l’expérience, regret anticipé et besoin de ré-expérience.

The role of the creation of customer-seller relationship in the construction of the

shopping experience: an approach by the content of experience

Abstract:

The role of the creation of customer-seller relationship has often been marginalized by the

studies on the value of experiential consumption. As we write in approach by the content of

experience and we rely on the results of a field survey of 500 consumers at the point of sale,

we assess the level of influence of the dimension creating relationship customer-seller on the

overall shopping experience that we conceptualize in three stages: "heart of the experience",

"buying experience" and "experience of remembering."

Keywords: shopping experience, contents of experience, coproduction consumer-store,

anticipated regret and need of re-experience.

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Le rôle de la création de lien client-vendeur dans la construction de l’expérience de

magasinage : une approche par le contenu de l’expérience

Introduction

Depuis l’apparition du libre-service dans les années trente aux États Unis, ce modèle

commercial n’a cessé de se développer et de conquérir différentes formes, types et natures de

lieux de vente. Qu’il soit perçu comme une forme d’instrumentalisation du consommateur

(Porter, 1985 ; Achrol et Kotler, 1999) ou bien comme un moyen de co-créer de la valeur avec

lui (Vargo et Lusch, 2004 ; Lusch et Vargo, 2006), cette nouvelle politique de vente a marqué

la régression du facteur humain, en remplaçant le personnel de vente1 par des machines (e.g.

substituer des automates ou des scanettes aux employés de caisse) ou par la participation du

client en lui-même qui devient « employé partiel de l’entreprise » (Mills et Morris, 1986 ;

Kelley, Donnelly et Skinner, 1990). Cette nouvelle « culture » peut ne pas déranger ceux qui

sont venus pour se ravitailler en produits nécessaires à leur quotidien et à celui de leur famille

« les utilitaire », à partir du moment où elle leur fait gagner du temps et de l’argent (« valeur

d’efficience », Fernandez, Iniesta-Bonillo et Holbrook (2009)). Et même dans le cas de ces

« utilitaires », l’interaction sociale du client avec le personnel de vente permet de renforcer le

cadre opérationnel d’efficience lié au déroulement de la prestation avec des dimensions

sociales et culturelles (Gadrey & de Bandt, 1994). Qu’en est- il des personnes qui se rendent

dans ce type de lieux de vente à la recherche d’autre chose ? Quelque chose qui va au-delà de

la simple motivation utilitaire (faire ses courses). Ceux qui sont à la recherche de contact,

d’échange, de lien social, de chaleur humaine, d’expérience (« les hédonistes » e.g. les séniors

dans le cadre des courses ordinaires au super/hyper-marché (Barth et Anteblin, 2009))

(« valeur sociale » Fernandez, Iniesta-Bonillo et Holbrook (2009)). Comment satisfaire cette

1 Dans le cadre de notre recherche les appellations vendeurs et personnels de vente seront utilisées d’une manière

interchangeable.

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catégorie importante de consommateurs à la recherche d’expérience ? Les enseignes

commerciales peuvent-elles penser leur offre expérientielle sans tenir compte d’une

orientation relationnelle ?

L’offre de la consommation expérientielle dans le domaine de la distribution comme un

moyen de différentiation et de fidélisation du client ne cesse de se développer dans de

nombreux types de lieux de vente. Nous citons à titre d’exemples : Niketown (Penaloza,

1999), Nature et Découvertes (Hetzel, 2002) ou encore les brands stores Nivea (Roederer,

2008).... Néanmoins, en examinant les travaux les plus important sur le domaine de la

consommation expérientiel (Holbrook, 1999 ; Aurier, Evrard et N’Goala, 2004 ; Mencarelli,

2008, Fernandez, Iniesta-Bonillo et Holbrook, 2009 et Filser, 2009), nous constatons une

dévalorisation du lien client-vendeur et un manque d’intérêt de plus en plus ressentie à

l’orientation relationnelle de l’entreprise. En effet, dans une approche par la valeur, les

échanges et les relations informelles qui peuvent se créer entre le client et le personnel de

vente (la composante relationnelle du magasin) ont été marginalisés au profit de l’efficience et

de la qualité de service. Ce constat, nous conduit à identifier notre objectif de recherche :

développer et tester empiriquement un modèle permettant de mieux comprendre l’influence

de la création de lien, dimension relationnelle de l’orientation client des vendeurs, sur

l’expérience globale de magasinage. De ce fait, nous faisons le choix de nous inscrire dans

une approche par le contenu (Roederer, 2008), en vue d’évaluer le niveau d’influence de la

dimension création de lien de l’orientation client des vendeurs, comme une composante des

stratégies de différenciation par l’expérience, sur l’expérience globale de magasinage que

nous conceptualisons selon trois phases : « l’avant expérience », « le cœur de l’expérience » et

« l’après expérience » (Roederer, 2008).

Dans une première section, nous présentons une analyse critique de l’orientation client des

vendeurs pour rappeler le manque d’intérêt accordé à la dimension « création de lien ».

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Ensuite, nous présentons l’approche théorique que nous adoptons pour conceptualiser

l’expérience de magasinage. Dans une deuxième section, nous explicitons un modèle

explicatif du rôle de la création de lien dans l’expérience globale de magasinage. Ensuite,

dans une troisième section, nous décrivons la méthodologie de notre étude terrain, auprès de

plus de 500 consommateurs. Dans une quatrième section, nous présentons les résultats de

notre enquête validant ainsi, notre modèle et nos hypothèses de recherche.

1. Cadre théorique

1.1 l’orientation client des vendeurs : l’importance de la création de lien

Saxe et Weitz (1982) conceptualisent l’orientation client en sept axes : « le désir d’aider le

client à prendre de bonnes décisions d’achat, l’aide au client pour évaluer ses besoins, l’offre

de produits qui satisfont ces besoins, la description conforme au produit, l’adaptation des

présentations de l’offre à l’intérêt du client, l’évitement de tactiques d’influence

manipulatrices et l’abstention de l’usage de pression sur le client » (Pellat, Poujol et Siadou-

Martin, 2010). A ces sept composantes, d’autres comportements relationnels sont à intégrer :

la créativité, la réactivité et la disponibilité des vendeurs (Humphreys et Williams, 1996) ou

encore l’écoute du client et son aide au-delà de l’opération ponctuelle de la vente. De

nombreux auteurs jugent que l’ensemble de ces éléments dépassent le cadre temporel de la

vente et le strict rôle du travail de vendeur2 , pour revêtir un rôle plus sociétal, plus citoyen et

donc plus humain (Bettencourt et Brown, 1997, Poujol, 2008). En effet, Pellat, Poujol et

Siadou-Martin (2010) soulignent le manque d’intérêt accordé aussi bien par les managers que

par les théoriciens aux aspects relationnels de la vente et plus particulièrement à l’axe

2 Brown, Mowen, Donavan et Licata (2002) définissent l’orientation client des vendeurs dans les services

comme « la tendance ou la prédisposition de l’employé à répondre aux besoins des clients dans le contexte de

son travail ».

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« création de lien » dans l’évaluation de l’orientation client des vendeurs. A partir d’une étude

exploratoire, par la méthode des incidents critiques, auprès d’un échantillon de 76

consommateurs, ces auteurs ont réussi à identifier les sept facettes de l’orientation client des

vendeurs initiées par Saxe et Weitz (1982). En plus de ces sept dimensions théorisées qui ont

plus trait à la transmission d’expertise vendeur-client, Pellat, Poujol et Siadou-Martin (2010)

ont réussi à identifier deux autres dimensions de l’orientation client des vendeurs qui ont trait

à la création de lien : une dimension humaine et une dimension temporelle. La première

dimension humaine se rapporte à la reconnaissance du client comme être humain dans une

relation commerciale et aux marques de politesse et d’attention exprimées par le vendeur

envers le client. La deuxième dimension temporelle concerne la réponse adéquate aux besoins

d’autonomie du client (disponibilité et serviabilité du vendeur dans le respect de la liberté et

du désir d’autonomie du client). De plus, Pellat, Poujol et Siadou-Martin (2010) identifient

une structure théorique latente entre les composantes de l’orientation relationnelle et la

satisfaction du consommateur de l’expérience vécue. En vue de ces constats, nous choisissons

d’appréhender l’orientation client des vendeurs du point de vue du client en nous concentrons

sur l’axe « création de lien », longtemps négligée par les travaux antérieurs sur l’orientation

client des vendeurs. Notre objectif est d’identifier le rôle du lien client-vendeur dans la

construction du consommateur de sa propre expérience de magasinage, expérience que nous

conceptualisons en trois phases : l’expérience en soi ou le cœur de l’expérience, l’expérience

d’achat et enfin l’expérience du souvenir ou l’après expérience (Arnould, Price et Zinkhan,

2002 ; Roederer, 2008 ).

1.2 Les trois dimensions de l’expérience

L’expérience de magasinage n’est qu’un exemple d’expérience de consommation générique,

résultat de l’interaction entre une personne et un objet de consommation, dans une situation

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donnée (Punj et Stewart, 1983). Cette interaction s’inscrit dans un processus dynamique

(Arnould, Price et Zinkhan, 2002), puisqu’elle possède une dimension temporelle et une autre

fonctionnelle. C’est dans ce sens, que Roederer (2008) identifie trois phases à une expérience

générique : l’avant-expérience, le cœur de l’expérience et l’après- expérience. Ces trois

phases rappellent la conceptualisation d’Arnould, Price et Zinkhan (2002) du « processus de

génération de consommation expérientielle » (cité dans Carù et Cova, 2006) qui se

décompose en quatre temps : l’expérience d’anticipation, l’expérience d’achat si elle a lieu,

l’expérience en soi et l’expérience de souvenir. L’expérience d’anticipation correspond à

l’avant-expérience selon la distinction de Roederer (2008) et peut correspondre dans le cadre

de l’expérience de magasinage au fait de planifier, budgétiser, rêver éveillé ou encore

fantasmer sa visite. L’expérience en soi correspond au cœur de l’expérience selon la

classification de Roederer (2008). Elle concerne la rencontre et l’interaction « personne -

objet » et peut être matérialisée comme dans le cas de l’expérience de magasinage (interaction

consommateur-environnement marchand) ou totalement dématérialisée comme dans le cas de

l’expérience du silence (Roederer, 2008). Le contenu de l’expérience vécu par le

consommateur à l’intérieur du lieu de vente constitue le résultat de cette rencontre et de cette

interaction consommateur-offre. C’est à partir du résultat de cette interaction que les pulsions

et les impulsions d’achat sont induites. Ces pulsions font partie du champ affectif de

l’individu (Izard, 1977) et donc de toute expérience de magasinage. En effet, les impulsions

d’achat représentent l’un des éléments constitutifs de l’expérience vécue par le consommateur

à l’intérieur du lieu de vente et l’une des sources de valorisation de l’expérience de

magasinage (Arnould, Price et Zink, 2002 ; Roederer, 2008). La jonction entre pulsions et

acte d’achat forme l’expérience d’achat selon la conceptualisation d’Arnould, Price et Zink

(2002). Néanmoins, il convient de souligner que le consommateur peut vivre et construire sa

propre expérience en interagissant avec les différents éléments de l’environnement du lieu de

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vente (facteurs d’ambiance, du design et du social) et cela indépendamment de l’acte d’achat.

La disjonction entre l’acte d’achat et l’acte de consommation constitue l’un des apports les

plus significatifs de l’approche expérientielle. Enfin, l’expérience de souvenir correspond à

l’après-expérience selon la conceptualisation de Roederer (2008). Elle résulte de l’interaction

« personne – objet – situation » et se rapporte aux conséquences ou encore aux traces que

laisse le cœur de l’expérience chez la personne, pouvant être, aussi bien positives que

négatives. Dans le cadre de l’expérience de magasinage, l’après-expérience peut correspondre

à la satisfaction (vs insatisfaction) retirée de la visite, à des comportements d’achat (vs

absence de comportements d’achat), à des intentions de ré-expérience (vs absence

d’intentions de ré-expérience).

1.3 Le contenu de l’expérience de magasinage : résultat d’une coproduction

consommateur- entreprise

La gestion du point de vente est passée d’une orientation purement fonctionnelle à une

orientation plus centrée sur les valeurs intangibles et hédoniques de l’offre (Filser, 2002).

Aujourd’hui, plusieurs travaux se sont penchés sur les techniques susceptibles d’être

déployées par la distribution pour transformer les lieux de vente classiques en lieux de

production d’expérience pour le consommateur (Bouchet, 2004). Carù et Cova (2007)

distinguent trois types d’expériences : l’expérience conduite par le consommateur

(« consumer-driven »), l’expérience co-conduite par le consommateur et par l’entreprise

(« co-driven ») et l’expérience conduite par l’entreprise (« company-driven »). Cette dernière

s’inscrit dans une perspective de pilotage de l’expérience par les managers des points de vente

qui tentent d’offrir aux consommateurs une expérience « prête à vivre » (Filser, 2002).

Néanmoins, il convient de souligner qu’en réalité, l’entreprise ne fait que mettre en place un

contexte expérientiel, par la combinaison des variables du mix (produit/marque, prix,

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communication et distribution) et des variables de l’atmosphère (ambiance, design et social)

(Kotler, 1973), dans lequel elle espère que le consommateur s’immergera (Carù et Cova,

2003). Ainsi, le consommateur reste « le producteur de sa propre expérience » (De Certeau,

1990 ; Kozinets, 2002 ; Kozinets et Handelman, 2004 ; Roederer, 2008). C’est dans ce sens

que nous nous rapprochons du continuum de l’expérience conduite par le consommateur,

énoncé dans la typologie de Carù et Cova (2007) (« consumer-driven experiences ») en

considérant l’expérience de magasinage comme une expérience coproduite par le

consommateur et l’entreprise (« co-driven experience »). Le contexte de l’expérience mis en

place par la distribution n’est qu’une simple plateforme qui permet au consommateur de créer

sa propre expérience (Carù et Cova, 2007) et de lui donner le sens qu’il entend (Le Breton,

2006). En effet, Carù et Cova (2006) distinguent deux épisodes à l’expérience de

magasinage : le contexte de l’expérience produite par l’entreprise et l’expérience vécue par le

consommateur. Le contexte de l’expérience mis en place par l’entreprise a été présenté par ces

auteurs comme « un assemblage de stimulus (produits) et de stimuli (environnement,

activités) propre à faire advenir une expérience ». En effet, le consommateur mobilise ses

propres ressources pour accepter, rejeter ou encore transformer les ressources mises à sa

disposition par le système marchand (Arnould, 2005 ; 2007). Dépasser, ainsi, la perspective

unidimensionnelle des pionniers de l’économie de l’expérience (Filser, 2002), devient

indispensable vers une perspective qui admet l’interaction entre le consommateur et son

environnement (ambiance, désigne et personnel du magasin) (Bonnin, 2002 ; Ladwein, 2002).

Le terme central n’est plus l’émotion induite, mais plutôt l’appropriation de l’espace par le

consommateur et son immersion dans une expérience, qui peut être qualifiée d’absorbante

(Carù et Cova, 2003). Plusieurs auteurs ont tenté d’ouvrir « la boite noire » du contenu de

l’expérience et de conceptualiser ses dimensions structurelles. Lacher et Mizerski (1995)

conceptualise le contenu de l’expérience vécue par le consommateur suite à sa consommation

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d’un produit musical en cinq dimensions : émotionnelle (plaisir, éveil, dominance),

sensorielle, expérientielle, imaginative et analytique. Roederer (2008) conceptualise le

contenu d’une expérience décontextualisée en trois dimensions : une dimension physique ou

sensorielle, une dimension praxéologique (actions dans le cadre du contexte expérientiel) et

une dimension rhétorique (attribution de sens). Ces différentes conceptualisation nous ont

inspiré dans de précédentes recherches pour théoriser les dimensions structurelles du contenu

de l’expérience de magasinage en cinq dimensions : émotionnelle (plaisir, éveil et

dominance), sensorielle, imaginative, expérientielle (immersion) et analytique (Abbes, Barth

et Danguir, 2011a ; Abbes, Barth et Danguir, 2011b).

2. Proposition d’un modèle explicatif du rôle de la création de lien client-vendeurs dans

l’expérience de magasinage

2.1 Le rôle de la création de lien client-vendeur dans le cœur de l’expérience

Mencarelli (2008) souligne que le contenu de l’expérience vécue par le consommateur à

l’intérieur du lieu de vente résulte de la combinaison de plusieurs éléments qui viennent

enrichir l’acte d’achat. C’est ainsi que les entreprises utilisent de multiples techniques et

combinent plusieurs types de stratégies pour construire une offre d’expérience. En accord

avec leur positionnement et leur stratégie de différenciation, chaque responsable de magasin

ou d’enseigne « crée son propre théâtre en fonction des ressources structurelles et de son

positionnement », en espérant que le consommateur interagisse avec, pour créer sa propre

expérience (Bouchet, 2004). L’expérience créée par l’entreprise ne constitue pas son offre de

base, mais plutôt « une mise en intrigue » de son offre commerciale (Roederer, 2008). Pour

les partisans du courant expérientiel, le vendeur constitue un élément de la plateforme

expérientielle mise en place par l’entreprise pour que le consommateur interagisse avec et

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crée sa propre expérience (Carù et Cova, 2007). Il joue un triple rôle dans l’expérience du

consommateur (Filser, 2002). Le rôle de « meuble », élément du décor du magasin, le rôle

d’ « acteur », messager et porte parole de l’entreprise mais aussi le rôle de « guide »,

accompagnateur du consommateur dans son processus d’appropriation du contexte

expérientiel, mis en place par l’entreprise pour faciliter son immersion dans l’expérience

(Arnould & Price, 1993). C’est dans ce sens qu’il a été assimilé par certains auteurs à un

animateur (Ladwein, 2002) ou à un maestro (Cova & Carù, 2003).

D’où l’hypothèse H1: La création de lien client-vendeur a une influence positive directe sur le

contenu de l’expérience vécue par le consommateur à l’intérieur du lieu de vente.

2.2 Le rôle de la création de lien client-vendeur dans l’expérience d’achat

Comme nous l’avons explicité plus haut le processus impulsion-acte d’achat forme

l’expérience d’achat selon la conceptualisation d’Arnould, Price et Zink (2002). Face à une

impulsion d’achat, le consommateur peut tenter de se maitriser et de se contrôler en évaluant

le bien-fondé de sa décision. Un conflit intérieur est alors engagé. Dans une précédente

recherche, nous avons réussi à montrer le rôle du regret anticipé d’achat et du regret anticipé

de non achat (« émotions anticipées ») dans l’aptitude du consommateur à s’autocontrôler

(Abbes, Barth et Danguir 2012). L’observation sur le terrain (Barth et Anteblian, 2010),

comme l’expérience personnelle, montre que lors de ces débats intérieurs, nous invitons des

tiers à notre délibération intime, des personnes bien identifiées auxquelles nous prêtons des

intentions ou un avis sur notre prise de décision. Parboteeah (2005) soutient que le personnel

du magasin influence la concrétisation des impulsions d’achat des consommateurs par des

actes d’achats effectifs. En effet, en plus de l’aide que peuvent apporter les vendeurs aux

clients en termes de renseignements et d’aide à la prise de décision, les marques de politesse

et d’attention exprimées par le vendeur envers le client (« dimension humaine » de

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l’orientation client des vendeurs) et la subtilité de son intervention dans l’expérience

personnelle du consommateur (disponibilité et serviabilité du vendeur dans le respect de la

liberté et du désir d’autonomie du client) (« dimension temporelle » de l’orientation client des

vendeurs) permettent de rassurer le consommateur, de réduire sa frustration (risque perçu) et

de l’accompagner dans son processus d’achat (Bergadaà et Coraux, 2008). Ce type d’échange

pourrait être précurseur d’une relation privilégiée client-vendeur. Une telle relation client-

vendeur peut transformer une simple visite en magasin en une expérience inoubliable et riche

en émotion. Ce type d’expérience peut affaiblir la capacité du consommateur à se contrôler et

à évaluer les conséquences de sa décision, en anticipant un éventuel regret d’achat ou de non

achat (Giraud et Galan, 2009). Il sera plus vulnérable, se laissera plus facilement submerger

par ses émotions et sera ainsi plus susceptible d’éprouver des impulsions d’achat (Shiv et

Fedorikhin, 1999). Ainsi, nous pouvons émettre les hypothèses suivantes :

H2: La création de lien client-vendeur a une influence positive directe (a) mais aussi indirecte

(b) sur l’impulsion d’achat par la médiation du contenu de l’expérience.

H3: La création de lien client-vendeur a une influence négative directe (a) mais aussi

indirecte (b) sur le regret anticipé d’achat par la médiation du contenu de l’expérience.

H4: La création de lien client-vendeur a une influence positive directe (a) mais aussi indirecte

(b) sur le regret anticipé de non achat par la médiation du contenu de l’expérience.

2.3 Le rôle de la création de lien client-vendeurs dans l’expérience de souvenir

L’expérience de souvenir ou encore l’après expérience par référence au cœur de l’expérience

selon la conceptualisation de Roederer (2008) pourrait être appréhendé à travers le besoin de

ré-expérience. Ce type de besoin traduit l’intention du consommateur de revisiter le magasin

et pourrait être évalué en deux temps : à l’instant de l’expérience et 15 jours après.

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Un consommateur peut avoir envie de revenir dans le magasin, rien que pour renouveler

l’expérience vécue, abstraction faite de l’acte d’achat et de l’évaluation post-achat. En effet,

certains auteurs mettent en avant le sentiment d‘attachement au lieu, comme l’une des

conséquences de l’expérience vécue à l’intérieur du lieu de vente (Gentric, 2005). Ce type

d’attachement pourrait être le résultat de l’attachement du client à l’une des composantes du

lieu ou à la combinaison de plusieurs. Les vendeurs ainsi que le personnel du magasin en

contact direct avec le client pourraient être l’une des composantes qui permettent de renforcer

l’engagement du consommateur envers le magasin (Cova et Giannelloni, 2010). Mägi (2003)

soutient que la perception positive des vendeurs et du magasin favorise la fidélité des clients.

Que le consommateur ait ou non acheté, il aura envie de revenir pour renouveler sa visite, parce

qu’elle a été accompagnée d’une expérience inoubliable, riche en émotions et en impulsions.

La satisfaction retirée de l’expérience vécue dont le contact avec le personnel de vente

constitue l’une de ses composantes, peut à elle seule induire un besoin de ré-expérience, qui

traduit une intention de revisite (Bonifield, 2002). Cette dernière peut être aussi durable que la

durabilité des traces que laisse le contenu de l’expérience vécue chez le consommateur (Richins

et Bloch, 1986 ; 1991). D’où les hypothèses :

H5: Le contenu de l’expérience vécue par le consommateur à l’intérieur du lieu de vente a une

influence positive directe sur le besoin de ré-expérience du client, exprimé à l’instant de

l’expérience (a) et 15 jours après (b).

H6: La création de lien client-vendeurs a une influence positive directe sur le besoin de ré-

expérience du client, exprimé à l’instant de l’expérience (a) et 15 jours après (b).

Le modèle ci-dessous (figure 1) synthétise l’ensemble des hypothèses émises plus haut.

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3. Méthodologie du test du modèle conceptuel

3.1 Méthode de collecte de données

En vue d’épurer nos échelles de mesure et de tester les hypothèses de notre recherche, deux

collectes de données ont été menées auprès de deux échantillons de clients des magasins

d’habillement et accessoires du centre commercial Géant Casino à Tunis (Tunisie). Ce centre

a la particularité de regrouper plus de 40 enseignes nationales (Dixit, Blue Island, Sasio, etc.)

et surtout internationales (Zara, Mango, Guess, Etam, Gap, Aldo, Motivi, Benetton, Sebago,

Geox, Lufian, City Sport, Transit, Sens inverse, etc.), spécialisées dans la vente des produits

d’habillement et accessoires. Notre premier échantillon se compose de 178 consommateurs

alors que le deuxième comporte 376 consommateurs. Les consommateurs ont été interrogés

dans un premier temps, en face à face, à la sortie des magasins. On leur a demandé de nous

parler de leur expérience dans le magasin dans lequel ils ont ressenti une/des impulsion(s)

d’achat. S’ils ont ressenti des impulsions d’achat dans plusieurs magasins, on leur a demandé

d’en choisir un et de nous préciser le nom. Dans un deuxième temps, ces consommateurs

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interrogés ont été rappelés téléphoniquement 15 jours après, pour les questionner sur leur

intention de revenir dans le même magasin. Seulement 222 consommateurs ont accepté de

nous renseigner sur leur intention de revenir dans le magasin, 15 jours après. Les réponses ont

été données sur une échelle de Likert en 7 points, allant de « Tout à fait d’accord » à « Pas du

tout d’accord ».

3.2 Opérationnalisation des variables du modèle

Pour mesurer la création de lien, dimension relationnelle de l’orientation client des vendeurs,

nous avons mobilisé la troisième dimension de l’échelle de la perception du consommateur de

l’environnement du point de vente mobilisée par Lombart, Filser et Labbé-Pinlon (2006)

(tridimensionnelle : l’ambiance, le design et le social, 19 items). La troisième dimension de

cette échelle semble rendre compte d’une manière assez globale et synthétique de l’aspect

relationnel de l’échange entre client et vendeur. Elle couvre essentiellement la dimension

humaine (« amicaux » et « sympathique ») et la dimension temporelle (« serviables » et

« disponibles ») du lien client-vendeur (Pellat, Poujol et Siadou-Martin, 2010)3. Pour mesurer

l’impulsion d’achat, nous nous sommes inspirés de la mesure réalisée par Piron (1991) et par

Jeon et reprise par Giraud (2002) (unidimensionnelle, quatre items). Pour mesurer le regret

anticipé, nous nous sommes inspirées de l’échelle de Delacroix et Jourdan (2007) (Abbes,

Barth et Danguir, 2012) (bidimensionnelle, 8 items). Pour mesurer le besoin de ré-expérience,

nous avons utilisé une mesure probabiliste, mono-item se rapportant à l’intention de revenir.

Enfin, pour mesurer le contenu de l’expérience de magasinage, nous avons suivi les étapes de

la procédure de Churchill (1979). La démarche de construction de cette échelle de mesure est

détaillée dans les annexes (A1).

3 Il convient de souligner que nous n’avons pas mobilisé l’échelle SOCO de Saxe et Weitz (1982) car elle ne

permet pas de rendre compte de la dimension création de lien client-vendeur.

Page 16: Le rôle de la création de lien client-vendeur dans la construction de · 3 Le rôle de la création de lien client-vendeur dans la construction de l’expérience de magasinage

16

4. Résultats

Dans le souci d’épurer nos échelles de mesure et d’aboutir à des mesures fiables et valides,

nous nous sommes inspirés de la procédure de Churchil (1979). Ainsi, nous procédons à des

analyses factorielles exploratoires sur le premier jeu de données (178 répondants). Ensuite,

sur le second jeu (376 répondants), nous procédons à des analyses confirmatoires. Les

modèles de mesure et celui de structure relatif à notre modèle conceptuel de la recherche sont

examinés par la méthode des équations structurelles sous le logiciel AMOS 16. Pour nous

assurer de la stabilité de nos résultats, nous avons utilisé la procédure de bootstrap (500

réplications). Après nous être assuré de la fiabilité, de la validité convergente et discriminante

des échelles de mesure mobilisées, nous passons au test des hypothèses de la recherche. Dans

le cadre de cette section, nous nous limitons à la présentation des détails des résultats du test

du modèle de structure. Les résultats relatifs aux tests des modèles de mesure figurent en

annexes (A2).

4.1 Le rôle de la création de lien client-vendeur dans le cœur de l’expérience

L’examen des résultats de notre modèle structurel (figure 2, ci-dessous) montre que la

création de lien client-vendeur a une influence positive directe sur le contenu de l’expérience

de magasinage (λ = 0,37 ; p < 0,01), validant ainsi l’hypothèse H1.

4.2 Le rôle de la création de lien client-vendeur dans l’expérience d’achat

En évaluant l’influence de la création de lien client-vendeur sur les forces intérieures en

situation d’achat (impulsion, regret anticipé d’achat et regret anticipé de non achat), nous

constatons que la création de lien client-vendeur influence négativement le regret anticipé

d’achat (λ = -0,21 ; p = 0,01). Ainsi, seule l’hypothèse H3a qui stipule que la création de lien

client-vendeur a une influence négative directe sur le regret anticipé d’achat, est acceptée.

L’hypothèse H2a et H4a relatives à l’influence directe de la création de lien client-vendeur sur

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17

l’impulsion d’achat et sur le regret anticipé de non achat, sont rejetées. Nous passons à présent

à l’examen de l’effet médiateur du contenu de l’expérience dans l’explication de la relation

entre création de lient client-vendeur et impulsions d’achat (H2b), création de lien client-

vendeur et regret anticipé d’achat (H3b) et création de lien client-vendeur et regret anticipé de

non achat (H4b) en suivant la procédure de Zhao, Lynch et Chen (2011). En mobilisant la

méthode de bootstrap préconisée par ces auteurs, nous constatons que les effets indirects

suivants : création de lien-impulsion d’achat et création de lien-regret anticipé de non achat

sont significatives. En effet, les deux intervalles de confiances de 95% relatifs à ces relations

ne comportent pas de zéro et sont respectivement égales à (0,06 à 0,26) et (0,08 à 0, 40). Ces

deux effets de médiation sont établis. En vue de déterminer la nature de la médiation, nous

examinons l’effet direct (Zhao, Lynch et Chen, 2011). Les deux effets directs relatifs à

l’influence de la création de lien sur l’impulsion d’achat (H2a) et sur le regret anticipé de non

achat (H4a) sont tous les deux rejetés. En vu de ces résultats et en nous référant à l’arbre de

décision de Zhao, Lynch et Chen (2011), nous considérons ces deux médiations comme

seulement indirectes. Les hypothèses H2b et H4b sont partiellement validées.

4.3 Le rôle de la création de lien dans l’expérience de souvenir

Nous testons les hypothèses relatives à l’influence du contenu de l’expérience et de la création

de lien client-vendeur sur le besoin de ré-expérience mesuré à l’instant de l’expérience vécue

(H5a, H6a) et 15 jours après (H5b, H6b). L’examen des résultats de notre modèle structurel

(figure 2, ci-dessous) nous permettent d’infirmer les hypothèses relatives à ces relations. Les

hypothèses H5 et H6 sont ainsi rejetée.

Page 18: Le rôle de la création de lien client-vendeur dans la construction de · 3 Le rôle de la création de lien client-vendeur dans la construction de l’expérience de magasinage

18

5. Discussion et implication

Cette recherche propose et teste un modèle processuel dynamique, explicatif de l’expérience

de magasinage. En nous basant sur une approche par le contenu de l’expérience, nous avons

cherché à évaluer l’influence de la création de lien, dimension relationnelle de l’orientation

client des vendeurs, sur le contenu de l’expérience vécue par le consommateur à l’intérieur

du lieu de vente, les forces intérieures en situation d’achat (regret anticipé d’achat et de non

achat) et le besoin de ré-expérience du consommateur (intention de revisiter le magasin lieu

de l’expérience) mesuré en deux temps : au moment de l’expérience et 15 jours après.

Ainsi, l’interaction du consommateur avec la plateforme expérientielle mise en place par la

distribution, le cas échéant des vendeurs du magasin, a été vérifiée (H1). Nous avons

également établi que la création de lien, dimension relationnelle de l’orientation client des

vendeurs influençait uniquement le regret anticipé d’achat (H3a). Ce résultat rejoint les

travaux de Pellat, Poujol et Martin (2010) qui ont comparé la relation vendeur-client à la

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19

relation mère-enfant à la base de la théorie de l’attachement (Ainsworth, 1969 ; Bowlby,

1969). Tout comme le rôle rassurant de la mère, le vendeur accompagne le client dans son

expérience de découverte du magasin, l’encadre dans son processus décisionnel et le

« réassure » par rapport à un potentiel regret post-achat. Plus confiant et plus rassuré, le

consommateur anticipera moins ou pas un regret d’achat. Bien que la création de lien client-

vendeur semble influencer dans une certaine mesure les forces intérieures de l’individu en

situation d’achat (H3a validée), son influence directe sur l’impulsion d’achat et le regret

anticipé de non achat et le besoin de ré-expérience, n’ont pas été prouvés (H2a et H4a

rejetées). Seule l’influence indirecte de la création de lien sur l’impulsion d’achat et le regret

anticipé de non achat par la médiation de contenu de l’expérience sont établis (H2b et H4b).

Ce résultat nous permet de déduire que ce n’est pas la simple perception du consommateur de

l’attitude et du comportement des vendeurs du magasin qui détermine sa décision d’achat

mais plutôt son interprétation de cette dernière. En effet, le consommateur interagit avec le

personnel du magasin qui, à travers un phénomène d’interprétation symbolique, tente de lui

attribuer un sens (Le Breton, 2004). Seul le contenu de l’expérience vécue par le

consommateur à l’intérieur du lieu de vente (résultat de son interaction avec la plateforme

expérientielle mise en place par la distribution dont le personnel de vente constitue l’un de ses

composants) est explicatif des impulsions d’achat et de leur concrétisation par des actes

d’achat effectifs. Loin d’être un outil de manipulation, la création de lien client-vendeur

influence le vécu du consommateur à l’intérieur du lieu de vente ainsi que ses décisions

d’achat.

Les résultats de notre recherche, nous permettent ainsi de souligner le rôle de la création de

lien client-vendeur dans la construction du consommateur de son vécu à l’intérieur du lieu de

vente. Au-delà d’une simple expérience standard et prête à vivre, le consommateur

d’aujourd’hui est à la recherche de vrai et d’original pour interagir avec l’offre du magasin et

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20

construire sa propre expérience. Même dans les expériences les plus infraordinaires (e.g.

l’achat quotidien d’une baguette de pain ou d’un paquet de cigarette), le facteur humain y joue

un rôle indéniable (Barth et Bobot, 2010).

Néanmoins, la prise en compte du rôle du vendeur dans l’élaboration des stratégies des

enseignes est de plus en plus marginalisée avec le développement du libre-service. Trop

couteux et assez difficile à manager, la relation commerciale tend à être désintermédiée et le

personnel de vente tend à disparaitre avec la montée en puissance de la distribution sur

Internet et la généralisation du libre-service (Barth, 2008). Réussir à concilier libre-service et

création de lien avec le consommateur, permet de doter les enseignes commerciales d’un

véritable avantage concurrentiel défendable et perceptible aux yeux de leurs clients. En effet,

il ne s’agit plus d’adopter une « logique de continuum » où transactionnel ne rime pas avec

relationnel ou à l’inverse, une « logique de cohabitation » où transactionnel et relationnel se

concurrencent (Coviello, Roderick, Peter et Wesley, 2002). Il s’agirait plutôt d’adopter une

logique de complémentarité où transactionnel et relationnel se renforcent mutuellement pour

servir le positionnement stratégique de l’entreprise (Barth et Bobot, 2010).

Pellat, Poujol et Martin (2010) constatent l’incompétence des vendeurs sur la dimension

relationnelle de l’orientation client des vendeurs et plus particulièrement sur l’axe création de

lien. En effet, en plus de l’expertise, qualité essentielle du métier de vendeur, un « bon »

vendeur devra avoir un certain nombre d’aptitudes et de qualités personnelles propices à la

communication, au partage et aux échanges informelles. Jacob, Guéguen et Boulbry (2011)

parlent de « compétences interactionnelles » des vendeurs. Les former aux techniques

d’écoute et de conseil, leur donner les moyens techniques de ne pas être désarmés face à un

client de plus en plus informé et exigeant, renforcer leur capacité à se confronter avec des

clients, parfois mécontents et de plus en plus agressifs… sont autant de voies de

recommandations auprès des managers.

Page 21: Le rôle de la création de lien client-vendeur dans la construction de · 3 Le rôle de la création de lien client-vendeur dans la construction de l’expérience de magasinage

21

Conclusion et voies futures de la recherche

Notre recherche sur le rôle de la création de lien client-vendeur pour optimiser la gestion de

l’expérience globale de magasinage présente un apport théorique considérable dans la

compréhension de l’expérience de magasinage, mais aussi, enrichie les recherches portant sur

le marketing expérientiel d’une manière générale. En effet, pour influencer le contenu de

l’expérience vécu par le consommateur à l’intérieur du lieu de vente, susciter en lui des

impulsions d’achat, le rassurer, le mettre en confiance et l’accompagner dans son processus

décisionnel, les managers des enseignes commerciales devront valoriser l’aspect relationnel

de la fonction vente par la création de plus de lien et de proximité avec le client.

Créer une bonne relation client-vendeur pourrait influencer l’attachement du consommateur

envers le vendeur et pourrait par voie de conséquence renforcer l’attachement du

consommateur à l’égard de l’enseigne ou du magasin. Cette piste mérite d’être approfondie

d'autant plus que l’hypothèse qui se rapporte à l’influence de la création de lien client-vendeur

sur le besoin de ré-expérience du consommateur mesuré en deux temps, a été infirmée. Ce

résultat peut nous laisser soupçonner une potentielle variable médiatrice qui se rapporte à une

variable catégorielle différenciant entre les profils d’acheteurs selon leur sensibilité aux

différentes variables de l’offre commerciales et leurs attentes par rapport à l’expérience de

magasinage (Abbes, Barth et Danguir, 2010).

De plus, le taux de réponse téléphonique de 60% que nous avons obtenu 15 jours après, nous

a contraint à limiter notre échantillon à 222 répondants à la place de 376. Cette limite relatif à

la taille de l’échantillon pourrait expliquer la faible significativité de l’influence du contenu de

l’expérience et de la création de lien sur le besoin de ré-expérience mesuré en deux temps (au

moment de l’expérience et 15 jours prés) (Abbes, 2012). De ce fait, nous préconisons dans de

futures recherches de prévoir un échantillon plus important en vu de vérifier ces relations.

Page 22: Le rôle de la création de lien client-vendeur dans la construction de · 3 Le rôle de la création de lien client-vendeur dans la construction de l’expérience de magasinage

22

Une troisième piste de recherche mérite d’être creusée. Cette dernière se rapporte au contexte

de notre recherche. En effet, le choix des magasins spécialisés dans la vente des produits

d’habillement et accessoires est fortement réducteur quant à la généralisation de nos résultats.

De plus, le terrain tunisien peut présenter des spécificités économiques (prix de la main

d’œuvre) et culturelles (le caractère individualiste/collectiviste de la culture) par rapport à

d’autres terrains. Selon le champ de la Consumer Culture Theory (CCT), les comportements

de consommation sont considérés comme des phénomènes socioculturels et non uniquement

économiques et/ou psychologiques (Arnould et Thompson 2005). Dans de futures recherches,

il conviendrait de vérifier la stabilité de nos résultats sur : d’autres catégories de produits à

caractère plus utilitaire et avec un modèle d’utilisation partagé, d’autres natures de lieux et de

contextes de vente (grande surface : cas des achats ordinaires, magasin virtuel : cas des achats

sur internet4, etc.), ainsi que sur d’autres types de terrains et de cultures.

4 Incapacité des sites de vente sur internet à recréer le lien client-vendeur.

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30

ANNEXES

A1.- Démarche de construction de l’échelle de mesure du contenu de l’expérience de

magasinage

Pour construire l’échelle de mesure du contenu de l’expérience de magasinage, nous suivrons

les étapes du paradigme de Churchill (1979). Après définition du domaine du construit

(Abbes, Barth et Danguir, 2011a ; 2011b), nous avons mené une étude qualitative (entretiens

semi-directifs et entretiens en profondeurs) en vue de générer une liste d’items réflectifs de

chaque dimension théorisée du contenu de l’expérience de magasinage. Une première lise de

75 items est ainsi obtenue. Liste que nous avons complétée à partir de la littérature et de

l’expérience du chercheur (observation participante). Au final, nous avons obtenu une liste

exhaustive composée de 105 items représentatifs du contenu de l’expérience de magasinage,

réparties en sept dimensions : émotionnelle-plaisir, émotionne-éveil, émotionnelle-

dominance, imaginative, sensorielle, expérientielle (immersion) et analytique. Après

épuration par quatre experts, une liste de 37 items est retenue. Deux collectes de données

exploratoires ont été menées auprès de deux échantillons d’étudiants. Les résultats des

analyses factorielles exploratoires et confirmatoires, nous ont permis d’explorer le contenu de

l’expérience de magasinage et d’obtenir une première structure décontextualisée composée de

cinq dimensions: émotionnelle-plaisir, émotionnelle-éveil, sensorielle, expérientielle et

analytique. Néanmoins, cette première structure n’est pas très satisfaisante, vu qu’elle

présente un nombre réduit d’items pour quatre de ces cinq facteurs (deux items par facteurs).

Pour ce faire, et dans le but d’obtenir une mesure qui couvre au mieux le domaine de notre

construit, et après avoir explicité certaines formulations qui ont paru relativement ambigües

pour certains interrogés, nous avons procédé à une nouvelle épuration par experts. En effet,

nous avons demandé à deux experts en distribution et en comportement du consommateur, de

classer la liste initiale d’items avant épuration par experts (105 items) selon les cinq

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dimensions obtenues suite aux résultats de cette première phase exploratoire. Seuls les items

qui ont fait l’objet de consensus entre ces deux experts sont retenus. Au final, une liste de 35

items représentatifs des cinq dimensions du contenu de l’expérience vécue par le

consommateur à l’intérieur du lieu de vente est ainsi obtenue: émotionnelle-plaisir (6 items),

émotionnelle-éveil (6 items), sensorielle (6 items), expérientielle (7 items) et analytique (10

items). En vue de valider cette structure, nous avons choisi de la tester sur le cas particulier

des clients des magasins d’habillement et accessoires en procédant à une troisième et

quatrième collecte auprès de deux échantillons de consommateurs sur le lieu de vente. Le

tableau 1 ci-dessous récapitule l’ensemble de ces étapes.

Tableau 1.- Procédure de création d’une échelle de mesure du contenu de l’expérience vécue

par le consommateur à l’intérieur du lieu de vente, inspirée du paradigme de Churchill (1979)

Étapes Intitulé Descriptifs

1ère

étape Définition des domaines des construits

et conceptualisation théorique

Revue de la littérature

Entretiens semi-directifs et en profondeur

2ème

étape Génération des items Revue de la littérature, entretiens semi-

directifs et en profondeur et l’expérience du

chercheur (observation participante)

3ème

étape

1ère

collecte de données 1er

échantillon de 208 étudiants

Vérification de la structure de la

mesure et purification

Analyse factorielle exploratoire

Alpha de Cronbach

4ème

étape

2ème

collecte de données 2ème

échantillon de 259 étudiants

Vérification de la structure de la

mesure et purification

Alpha de Cronbach

Analyse factorielle confirmatoire

Coefficient Rhô de Jöreskog

Procédure de Fornell et Larcker

5ème

étape

3ème

collecte de données 3ème

échantillon de 178 acheteurs d’un

centre commercial

Vérification de la structure de la

mesure et purification

Analyse factorielle exploratoire

Alpha de Cronbach

6ème

étape

4ème

collecte de données 4ème

échantillon de 376 acheteurs d’un

centre commercial

Vérification de la structure de la

mesure et purification

Alpha de Cronbach

Analyse factorielle confirmatoire

Coefficient Rhô de Jöreskog

Procédure de Fornell et Larcker

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A2.- Résultats du test des modèles de mesure

Dans le cadre de cette section, nous nous limitons à la présentation des détails des résultats

confirmatoires relatifs aux différentes échelles de mesure mobilisées. Nous commençons

notre analyse par l’échelle du contenu de l’expérience. Ainsi, une analyse factorielle

confirmatoire est menée sur une structure stable du contenu de l’expérience de magasinage

composée de quatre dimensions5 (résultat de l’analyse factorielle exploratoire menée sur le

premier jeu de donnée : 178 interrogés) : une dimension plaisir, une dimension éveil-

sensoriel, une dimension expérientielle et une dimension analytique (Abbes, Barth et Danguir,

2011a). L’examen de la force de la corrélation entre ces quatre dimensions de premier ordre

(Roussel, Durrieu, Campoy et El Akremi, 2002), nous indique que la corrélation entre les

dimensions plaisir, éveil-sensoriel et immersion avoisine le 0,5, avec une moyenne de l’ordre

de 0,47. En revanche, les corrélations avec la dimension analyse sont assez faibles (0,09, 0,16

et 0,23). De même, les contributions factorielles des construits de premier ordre dans la

formation du construit de second ordre excédent 0,5 et présentent des valeurs de variances

expliquées assez importantes à l’exception du construit analyse (λ = 0,21 et R² = 0,04). Au vu

de ces résultats, nous optons pour la suppression de la quatrième dimension, l’analyse. Ainsi,

nous pouvons penser que le contenu de l’expérience de magasinage est un construit de second

ordre composé des trois dimensions restantes. La comparaison des indicateurs du bon

ajustement du modèle à trois dimensions aux données plaide en faveur de ce résultat

(X²/ddl=1,54, GFI=0,98, AGFI=0,96, RMSEA=0,038, CFI=0,99). Les pourcentages de

variances expliquées (R²) relatifs aux facteurs de premier ordre sont assez satisfaisants. Elles

sont égales à 0,53 pour le plaisir, à 0,58 pour l’éveil-sensoriel et à 0,34 pour l’immersion. De

même, les niveaux de fiabilité sont également satisfaisants avec des valeurs de Rhô de

5 Ces quatre dimensions sont le résultat de l’analyse factorielle exploratoire menée sur le premier jeu de donnée :

178 interrogés. Lors de l’analyse en composante principale la dimension éveil et la dimension sensorielle ont

fusionné pour former une dimension unique : l’éveil-sensoriel.

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Jöreskog toutes supérieures à 0,8 et une valeur globale de 0,73. La cohérence interne du

construit de second ordre est ainsi vérifiée. Les contributions factorielles mesurant le construit

de second ordre présentent des valeurs supérieures à 0,6, (la dimension plaisir 0,73 et la

dimension éveil-sensoriel 0,76) à l’exception de celles relatives à la dimension immersion qui

présente une valeur, certes inferieure à 0,6 mais tout de même très proche, 0,584. Cette valeur

est explicative de la valeur globale du rho de la validité convergente du facteur de second

ordre (0,484) qui est très proche mais tout de même inferieur au seuil de 0,5 (Fornell et

Larcker, 1981). Néanmoins, étant donné que toutes les contributions factorielles des variables

mesurant le construit de second ordre sont significatives (test de Student > 1,96), nous

pouvons conclure à une validité convergente moyennement forte de la mesure du contenu de

l’expérience de magasinage (Roussel et al., 2002). Nous passons ensuite à la vérification de la

validité discriminante relative à cette mesure. En effet, la valeur de la variance moyenne

extraite (rho de la validité convergente) relative à la mesure du contenu de l’expérience est

supérieure au carré des corrélations que partage ce construit second ordre avec les autres

construits du modèle (Fornell et Larcker, 1981). La validité discriminante relative à la mesure

du contenu de l’expérience de magasinage est ainsi vérifiée (voir tableau 4).

Le tableau 2 ci-dessous récapitule l’ensemble des résultats relatifs au test du modèle de

mesure de second ordre de l’échelle du contenu de l’expérience de magasinage.

Tableau 2.- Résultats de l’analyse factorielle confirmatoire relative au modèle de mesure de

second ordre du contenu de l’expérience de magasinage

Construits de

2ème ordre

Construits de

1er ordre

Contributions

factorielles

Rho de

Jöreskog

Rho de la validité

convergente

Contenu de

l’expérience de

magasinage

Plaisir 0,73 (6,07)

0,734 0,49 Immersion 0,58 (6,18)

Éveil-sensoriel 0,76

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Concernant les autres échelles de mesure mobilisées (l’impulsion d’achat, la création de lien

client-vendeur et le regret anticipé d’achat et de non achat), il convient de souligner que les

résultats des analyses factorielles exploratoires et confirmatoires sont satisfaisants et

conformes à la littérature avec des valeurs de Rhô de Jöreskog supérieures ou égales à 0,7, des

indices de validité convergente supérieurs à 0,5 et des valeurs de variance moyenne extraite

(rho de la validité convergente) relative à chaque mesure supérieures au carré des corrélations

que partage chaque construit avec les autres construits du modèle (Fornell et Larcker, 1981).

L’ensemble de ces résultats figurent dans les tableaux 3 et 4, ci-dessous).

Tableau 3.- Résultat du test du modèle de mesure globale

Items

Poids factoriels

standardisés

Test en T

Impulsion d’achat

Quant vous avez vu ce produit que vous avez soudain eu très envie de

l’acheter 0,672 -

Quant vous avez vu ce produit, vous n’avez pas pu résister au désir de

l’acheter 0,839 9,56

Vous vous êtes senti tout de suite très emballé à l’idée d’acheter ce produit 0,631 9,84

Cohérence interne (rhô de Jöreskog) 0,77

Validité Convergente 0,53

Création de lien

Un espace dans lequel les employés sont amicaux 0,82 -

Un espace dans lequel les employés sont serviables 0,95 23,70

Un espace dans lequel les employés sont sympathiques 0,87 21,09

Un espace dans lequel les employés sont disponibles 0,83 19,45

Cohérence interne (rhô de Jöreskog) 0,92

Validité Convergente 0,76

Plaisir

Vous étiez serein à l’intérieur de ce magasin (reposé) 0,69 _

Vous étiez content à l’intérieur de ce magasin 0,85 14,85

Vous étiez heureux à l’intérieur de ce magasin 0,84 14,67

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Vous avez ressenti du plaisir à l’intérieur de ce magasin 0,77 13,70

Cohérence interne (rhô de Jöreskog) 0,86

Validité Convergente 0,62

Éveil-sensoriel

Vous étiez serein à l’intérieur de ce magasin (reposé) 0,69 _

Vous étiez content à l’intérieur de ce magasin 0,85 14,85

Cohérence interne (rhô de Jöreskog) 0,81

Validité Convergente 0,69

Immersion

Vous aviez l’impression de voyager 0,75 _

Vous êtes rentré dans un monde nouveau 0,77 12,34

Vous étiez complètement déconnecté de la réalité 0,74 12,41

Cohérence interne (rhô de Jöreskog) 0,80

Validité Convergente 0,55

Regret anticipé d’achat

Vous avez pensé que vous alliez peut être regretter votre achat 0,92 -

Vous avez pensé que si jamais vous achetiez, immédiatement après, vous

ressentiriez comme un poids sur la conscience 0,86 22,96

Vous avez pensé que si jamais vous achetiez, vous alliez vous demander,

après, si vous aviez bien fait 0,79 19,62

Vous vous êtes dit : « de toute façon, je ne regrette jamais mes achats» 0,72 16,67

Cohérence interne (rhô de Jöreskog) 0,89

Validité Convergente 0,68

Regret anticipé de non-achat

Vous avez pensé que si jamais vous n’achetiez pas ce produit, vous

continueriez à vous dire pendant longtemps : « j’aurais dû acheter ça » 0,83 _

Vous avez pensé que si jamais vous n’achetiez pas le produit désiré, vous

alliez souvent y penser en estimant que vous auriez dû l’acheter

0,94 24,84

Vous avez pensé regretter le produit désiré, si jamais vous ne l’achetiez

pas 0,95 24 ,96

Cohérence interne (rhô de Jöreskog) 0,93

Validité Convergente 0,83

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Tableau 4.- Évaluation de la validité discriminante du modèle

Contenu de

l’expérience

Création

de lien Impulsion

Regret

anticipé

d’achat

Regret

anticipé de

non achat

Contenu de

l’expérience 0,49*

Création de lien 0,13** 0,76

Impulsion 0,29 0,10 0,53

Regret anticipé

d’achat 0,00 0,02 0,02 0,68

Regret anticipé de

non achat 0,10 0,00 0,11 0,00 0,83

Rhô de Jöreskog 0,73 0,92 0,77 0,89 0,93

*Rho de la validité convergente, ** Corrélation au carrée