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Journal de thérapie comportementale et cognitive (2014) 24, 114—121 Disponible en ligne sur ScienceDirect www.sciencedirect.com ARTICLE ORIGINAL Les apports de la psychologie cognitive et de la neuropsychologie dans la compréhension de l’anorexie mentale The contributions of cognitive psychology and neuropsychology in understanding anorexia nervosa Marion Luyat Laboratoire de neurosciences fonctionnelles et pathologies (EA 4559), UFR de psychologie, université Lille 3, domaine universitaire du Pont-de-Bois, 59653 Villeneuve-d’Ascq, France Rec ¸u le 6 avril 2014 ; rec ¸u sous la forme révisée le 4 juin 2014 ; accepté le 5 juin 2014 Disponible sur Internet le 21 aoˆ ut 2014 MOTS CLÉS Anorexie mentale ; Neuropsychologie ; Représentation du corps ; Schéma corporel Résumé L’anorexie mentale est une maladie psychiatrique extrêmement grave qui apparaît, le plus souvent, chez la jeune fille, à l’adolescence. Cette pathologie mentale se traduit notam- ment par une restriction alimentaire drastique, mettant en jeu la vie de la jeune fille, et par une surestimation de la silhouette et du poids du corps. L’objectif de cette revue est de voir quels peuvent être les apports issus de la psychologie cognitive et de la neuropsychologie dans la compréhension de cette maladie. Les études montrent que l’organisation perceptive, la flexi- bilité mentale, la mémoire de travail et la cohérence centrale sont des composantes qui sont particulièrement affectées. L’intégration multisensorielle, sous-tendue par le cortex pariétal, serait également perturbée chez certaines patientes. Mais surtout, les études sur la surestima- tion du corps révèlent que cette illusion s’ancrerait dans une représentation sensorimotrice du corps : le schéma corporel. La prise de conscience de la maigreur étant une condition indispen- sable à la réussite du processus de renutrition, les thérapies ne doivent pas négliger dans leur programme des techniques centrées sur une meilleure conscience et acceptation du corps. La réalité virtuelle ou le contact réel avec le corps par le biais de massages, lorsque c’est possible émotionnellement pour la patiente, pourrait être utilisés en adjonction à la psychothérapie. © 2014 Association franc ¸aise de thérapie comportementale et cognitive. Publié par Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés. Adresse e-mail : [email protected] http://dx.doi.org/10.1016/j.jtcc.2014.06.002 1155-1704/© 2014 Association franc ¸aise de thérapie comportementale et cognitive. Publié par Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.

Les apports de la psychologie cognitive et de la neuropsychologie dans la compréhension de l’anorexie mentale

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ournal de thérapie comportementale et cognitive (2014) 24, 114—121

Disponible en ligne sur

ScienceDirectwww.sciencedirect.com

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es apports de la psychologie cognitive ete la neuropsychologie dans laompréhension de l’anorexie mentalehe contributions of cognitive psychology andeuropsychology in understanding anorexia nervosa

arion Luyat

aboratoire de neurosciences fonctionnelles et pathologies (EA 4559), UFR de psychologie, université Lille, domaine universitaire du Pont-de-Bois, 59653 Villeneuve-d’Ascq, France

ecu le 6 avril 2014 ; recu sous la forme révisée le 4 juin 2014 ; accepté le 5 juin 2014isponible sur Internet le 21 aout 2014

MOTS CLÉSAnorexie mentale ;Neuropsychologie ;Représentation ducorps ;Schéma corporel

Résumé L’anorexie mentale est une maladie psychiatrique extrêmement grave qui apparaît,le plus souvent, chez la jeune fille, à l’adolescence. Cette pathologie mentale se traduit notam-ment par une restriction alimentaire drastique, mettant en jeu la vie de la jeune fille, et parune surestimation de la silhouette et du poids du corps. L’objectif de cette revue est de voirquels peuvent être les apports issus de la psychologie cognitive et de la neuropsychologie dansla compréhension de cette maladie. Les études montrent que l’organisation perceptive, la flexi-bilité mentale, la mémoire de travail et la cohérence centrale sont des composantes qui sontparticulièrement affectées. L’intégration multisensorielle, sous-tendue par le cortex pariétal,serait également perturbée chez certaines patientes. Mais surtout, les études sur la surestima-tion du corps révèlent que cette illusion s’ancrerait dans une représentation sensorimotrice ducorps : le schéma corporel. La prise de conscience de la maigreur étant une condition indispen-sable à la réussite du processus de renutrition, les thérapies ne doivent pas négliger dans leurprogramme des techniques centrées sur une meilleure conscience et acceptation du corps. Laréalité virtuelle ou le contact réel avec le corps par le biais de massages, lorsque c’est possible

émotionnellement pour la patiente, pourrait être utilisés en adjonction à la psychothérapie.© 2014 Association francaise de thérapie comportementale et cognitive. Publié par Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.

Adresse e-mail : [email protected]

ttp://dx.doi.org/10.1016/j.jtcc.2014.06.002155-1704/© 2014 Association francaise de thérapie comportementale et cognitive. Publié par Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.

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Évaluation cognitive et anorexie mentale 115

KEYWORDSAnorexia nervosa;Neuropsychology;Body representation;Body schema

Summary Anorexia nervosa is an extremely serious psychiatric illness that appears duringadolescence. This illness is an eating disorder and mainly affects young women who, accor-ding to studies, account for nine out of 10 sufferers. It is characterized by the following threesymptoms (DSM-5, 2013): (i) a calorie-restrictive diet in relation to the physiological needs ofthe individual which leads to rapid and massive weight loss, (ii) an intense fear of weight gain,even when extremely low weight has been reached, and (iii) distorted self body representa-tion, in particular an exaggeration of weight and body shape. The patients see themselves asbigger than they actually are. This symptom is extremely important, as it is likely to counteractthe effects of therapy, as the patient never reaches their ‘‘ideal’’ weight. In addition, accor-ding to researchers, dissatisfaction with body shape could be a precursor to the illness. Manyresearchers in genetics, neurobiology and psychology have attempted to gain better understan-ding of this pathology in order to find efficient treatment or therapy. It is clear that, althoughmany treatments and therapies now exist, their effectiveness is still very limited, even forcognitive and behavioral therapy. However, the situation is urgent as anorexia nervosa can leadto death through malnutrition but also suicide. This pathology has the highest suicide rateof all psychiatric disorders. Thus, it would seem important to undertake further research togain better understanding of this pathology. The aim of this review is to see how studies inthe field of cognitive neuropsychology can contribute to improving the care and treatment ofpatients. With regard to intellectual ability, studies lack consensus and it is necessary to carryout wider experiments with larger control groups. However, it would seem that patients, oncethey reach a very low weight, perform less well in classic intelligent tests, affecting all sub-scores. This result could be connected to the decrease in the volume of grey matter that hasbeen evidenced. Fortunately, patients seem to show improved performances once they haveregained weight. Like personality studies that have shown that certain characteristics such asperfectionism, asceticism and fear of maturity are linked to this illness, data from cognitiveneuropsychology seems to highlight certain specific components. Perceptive organization, men-tal flexibility, short-term memory and central coherence are all components that appear to beparticularly affected by anorexia nervosa. Adapted and individualized cognitive therapy couldbe offered to improve the affected components, such as weak cognitive flexibility that can bean obstacle to change the behavior. In addition, studies on the exaggeration of body shape andweight (frequent complaints of patients) show that this illusion does not only concern conscious,emotional and aesthetic body image, but is also linked to a more basic, sensory-motor repre-sentation: the body schema. The parietal cortex seems to be involved in this disorder of bodyschema. Self-awareness about the body is a key element in the success of the renutrition pro-cess. The therapies should focus on the body with real contact (via massage for instance) andwith the help of virtual reality. This could enhance the re-appropriation of the new limits ofthe emaciated body and could permit also to more accept the actual and future enlarged bodyduring the renutrition process. Finally, experimental paradigms from cognitive psychology thatexplore non-classical functions such as multi-sensorial integration and the use of brain imagingtechniques should lead to better understanding of the underlying neural systems. This informa-tion could be added to existing knowledge about anorexia nervosa in order to refine therapiesoffered and to improve the individual treatment of these patients experiencing deep psychicand physical pain.© 2014 Association francaise de thérapie comportementale et cognitive. Published by Elsevier

ved.

Masson SAS. All rights reser

Introduction

L’anorexie mentale est une maladie psychiatrique extrême-ment grave qui apparaît généralement à l’adolescence avecun âge moyen de 17 ans et avec deux pics de fréquence à14 et à 18 ans. Cette maladie fait partie des troubles ducomportement alimentaire (TCA) et touche majoritairementles jeunes filles (neuf femmes pour un homme). Elle se tra-duit par les trois grands symptômes suivants (DSM-5, [1]) :

• une restriction des apports énergétiques par rapport auxexigences physiologiques de l’individu entraînant uneperte de poids rapide importante ;

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une peur intense de reprendre du poids, ceci mêmelorsqu’un poids extrêmement bas a été atteint, pouvantentraîner des comportements visant à contrecarrer cetteéventualité comme, par exemple, la prise de laxatifs oule recours à des vomissements ;

des perturbations de la représentation de son proprecorps.

On observe en effet, presque systématiquement, une

urestimation du poids et de la silhouette, la patiente serouvant plus grosse qu’elle ne l’est en réalité. Comme nouse verrons plus loin, ce symptôme est de toute importancear il est susceptible de contrecarrer les effets de la
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hérapie menée par ailleurs, la patiente n’atteignantamais son « idéal » de poids. Bien que l’anorexie mentaleasculine ne doive pas être négligée, cette présente

evue est centrée sur l’anorexie mentale féminine. Lesaisons en sont la forte prévalence de cette maladie dans laopulation féminine et l’absence jusqu’à présent, à notreonnaissance, d’études concernant à la fois l’anorexieentale masculine et les fonctions cognitives.De nombreux chercheurs, que ce soit dans le domaine

e la génétique, de la neurobiologie ou de la psycho-ogie, ont tenté de mieux comprendre cette pathologiefin de découvrir un traitement ou une thérapie efficace.ependant, force est de constater que si de nombreux trai-ements et thérapies existent, leur efficacité reste encoreujourd’hui très limitée [2,3]. Alors que les thérapies cog-itives et comportementales apparaissent particulièrementfficaces pour traiter la boulimie, elles restent souventrès insatisfaisantes pour soigner l’anorexie mentale [4].a forte résistance au changement et l’ambivalence dea patiente face à la thérapie seraient des freins impor-ants à l’amélioration des symptômes [3]. Il faut soulignerue l’anorexie mentale possède le taux de mortalité sui-idaire le plus élevé de tous les troubles psychiatriques5,6]. Aussi, il semble important de mettre en œuvre touteentative de recherche visant à mieux comprendre cetteathologie. Dans le domaine de la psychologie de la per-onnalité, par exemple, certains chercheurs montrent que’anorexie mentale se caractérise par des traits de person-alité particuliers comme le perfectionnisme, l’ascétismet la peur de la maturité [7]. Le perfectionnisme reflétantes comportements rigides et obsessionnels visant la perfec-ion, il a été suggéré qu’il puisse contribuer à la résistanceu traitement et aux rechutes [8]. On peut également sup-oser que ce trait de personnalité a un rôle non négligeableans la volonté puissante de se priver de nourriture en dépite sensation de faim extrême.

L’objectif de cette revue est de voir dans quelle mesureertaines études conduites dans le champ de la psycholo-ie cognitive et de la neuropsychologie cognitive, à l’instare la psychologie de la personnalité, pourraient apporterertains éléments utiles pour la clinique afin d’améliorera prise en charge des patientes et l’effet des thérapiesomportementales et cognitives.

’évaluation neuropsychologique classique

’acception du terme « neuropsychologie », dans cetteevue, est large et renverra aux études portant sur’évaluation des fonctions cognitives en rapport avec unysfonctionnement cérébral réel (mis en évidence par ima-erie, par exemple) ou supposé. Deux objectifs principauxuident les études qui évaluent les fonctions cognitiveses patientes souffrant d’anorexie mentale. Certaines’intéressent aux effets potentiels que la dénutrition peutvoir sur les fonctions cognitives [9] alors que d’autres visent

dresser un profil neuropsychologique typique. Certains

hercheurs essaient, par exemple, de détecter des facteurssychologiques de vulnérabilité par le biais d’études longi-udinales des enfants de mères souffrant de cette pathologie10] ou par l’étude des fratries de patientes [11].

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M. Luyat

’évaluation des fonctions intellectuelles

es études concernant l’efficience intellectuelle desatientes souffrant d’anorexie mentale ne font pas l’objet’un consensus. Une méta-analyse à partir de 30 articlesubliés à l’international a été effectuée [12]. Deux testsnt été retenus : le National Adult Reading Test (NART13]) et les Échelles d’intelligence de Wechsler, respec-ivement la Wechsler Adult Intelligence Scale (WAIS) [14]t la Wechsler Intelligence Scale Children (WISC) [15].es résultats montrent que les études utilisant le NARTelèvent des scores QI systématiquement plus élevés chezes patientes anorexiques par rapport à la norme (10,8 pointsn moyenne). Pour les études utilisant les tests de Wechs-er, bien qu’une augmentation moyenne soit observée cheza population de patientes (5,9 points), la variabilité inter-tudes est plus importante. La moitié des recherchesontrent en effet un QI légèrement plus élevé, l’autreoitié, un QI, non différent en moyenne de celui de la popu-

ation contrôle. Ces résultats n’ont pas été confirmés pareux obtenus par Weider et al. [16]. Utilisant la WISC, ilsbservent chez 41 patients (39 femmes et 2 hommes) présen-ant un indice de masse corporelle moyen ([IMC] : poids eng/(taille en m)2) de 16,25, une diminution du QI et, ce, sur’ensemble des sous échelles. Selon ces auteurs, le type deest utilisé et la gravité de la maladie seraient susceptibles’expliquer la grande variabilité inter-études.

Koyama et al. [9] restent convaincus que la dénutritionévère observée dans les cas extrêmes d’anorexie mentaleonduirait à une altération cognitive qui serait suscep-ible d’expliquer, en partie, la très forte résistance desatientes à la renutrition. Ils ont ainsi testé 14 patientesouffrant d’anorexie mentale (de type restrictive) pré-entant un IMC très bas (IMCmoyen = 12,84 ± 0,41 kg/m2)t dix participantes contrôles en bonne santé, appariéesur l’âge. Les résultats ont montré un score QI totalWAIS) significativement plus bas chez les patientes (QIotal = 75,86 ± 1,79 versus 106,10 ± 3,40 chez les contrôles).ous les sous-scores du test (QI verbal, QI performance,ompréhension verbale, organisation perceptive, vitesse deraitement, mémoire de travail) étaient abaissés dans leroupe des patientes. Puis après huit mois, huit patientes quivaient regagné suffisamment de poids (IMCmoyen = 18,31)nt repassé les tests. Leurs scores se sont améliorés, enarticulier pour la note QI total, la note QI performance,’organisation perceptive et la vitesse de traitement. Le faitue les notes augmentent lorsque la patiente retrouve unoids acceptable est encourageant. Ceci montre que la dimi-ution de l’efficience intellectuelle chez la patiente qui atteint un IMC extrêmement bas n’est pas irrémédiable. Lee-test a eu lieu huit mois après la première évaluation cog-itive ; on peut donc faire l’hypothèse que les participantesuraient pu retrouver leur pleine capacité intellectuelle surne durée plus longue et après rémission complète.

La faiblesse des performances aux épreuves mesurant’organisation perceptive, de type figure de Rey [17], sembleussi fortement liée à l’anorexie mentale. La figure de Reyst une forme géométrique complexe, non symétrique etans signification qu’il faut reproduire soit par copie (la

gure restant visible), soit de mémoire (la figure n’est plusisible). Les performances sont en effet moins bonnes chezes patientes anorexiques mais elles sont susceptibles d’être
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Évaluation cognitive et anorexie mentale

restaurées après reprise de poids et des menstruations[18].

La baisse de performance en organisation perceptive està relier au concept de « cohérence centrale » qui reflètela capacité à traiter les informations de manière globalepar opposition à un traitement des détails (traitement ana-lytique). Les femmes avec une anorexie mentale seraientsupérieures pour les tâches perceptives nécessitant une ana-lyse locale de la figure (portant sur les détails) commel’Embedded Figures Test [19]. En revanche, elles auraientdes performances moins élevées pour des tâches bénéficiantd’un traitement global comme dans le cas de la figure de Rey.

Ainsi, il n’existe pas de consensus concernant la sta-bilité de l’efficience intellectuelle mesurée par les testsd’intelligence classiques. De nombreux facteurs comme lagravité de la maladie (valeur moyenne de l’IMC) et le type detest utilisé peuvent avoir un effet sur les données. Toutefois,la dénutrition sévère observée dans certains cas extrêmes(IMC proche de 12) affecte les scores d’efficience intel-lectuelle. Ces résultats sur la moindre efficience cognitivepeuvent être mis en relation avec l’observation d’une dimi-nution du volume cérébral de la substance grise chez ungroupe de 15 patientes (IMCmoyen = 16 ± 1,3) après analysedes données obtenues par une IRM structurale [20]. Les fonc-tions intellectuelles semblent pouvoir cependant être res-taurées après regain de poids et reprise des menstruations.

L’évaluation des fonctions exécutives

Les processus cognitifs sous-tendant les fonctions exécu-tives sont des processus de haut niveau pris en chargenotamment par les lobes frontaux. Ils permettent d’avoirdes comportements souples, flexibles, adaptés au contextede la tâche et au but à atteindre. Il semble que les étudesconduites sur ces processus cognitifs s’accordent sur le faitque les patientes souffrant d’anorexie mentale montrentdes déficits dans des tâches mesurant les fonctions exécu-tives. La flexibilité mentale semble en particulier touchée[21,22].

La flexibilité cognitive peut être opérationnalisée dansdes tâches où les participants sont amenés à modifier rapi-dement et avec précision leur comportement en réponse àun changement dans la demande de la tâche. Dans le Wis-consin Card Test par exemple, le participant doit choisird’apparier sa carte avec une autre se trouvant parmi quatrecartes variant selon le symbole, la couleur ou le nombred’éléments. Le sujet doit deviner sur la base de retours don-nés par l’expérimentateur, la bonne règle à adopter. Mais larègle change au cours du test, à l’insu du sujet, de manièreimplicite. Le codage est particulièrement complexe. Onnote en particulier les erreurs de persévération qui reflètentla tendance à continuer à utiliser une règle alors que celle-cia changé. Les patientes ont des scores inférieurs aux partici-pantes contrôles laissant suggérer une certaine rigidité de lapensée [22]. Des déficits ont été trouvés chez les sœurs despatientes [11] laissant suggérer une origine familiale sans

que l’on puisse savoir si la faiblesse de flexibilité mentaleest un biomarqueur ou un endophénotype héritable. Sur leplan clinique, ce trait particulier pourrait expliquer, en par-tie, la très grande difficulté des patientes à sortir du cercle

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nfernal dans lequel elles sont plongées et la résistance àhanger de comportement.

’évaluation de la surestimation du corps

a surestimation du poids et de la silhouette est un desrincipaux symptômes de l’anorexie mentale. De par saomposante perceptive et/ou représentationnelle, il inté-esse tout spécialement le psychologue. Les patientesouffrant d’anorexie mentale se percoivent comme étantlus grosses qu’elles ne le sont en réalité. Même lorsquea patiente a atteint un très faible poids corporel, ellee semble jamais satisfaite, se considérant encore troprosse par rapport à son standard interne. Cette illusion estarticulièrement impressionnante car elle persiste lorsquea patiente regarde sa propre image dans le miroir : ellee percoit pas sa maigreur. À partir d’études réaliséeshez des jeunes filles, certains chercheurs ont suggéré queette surestimation du corps pouvait expliquer le maintienes conduites de restriction alimentaire, même lorsqu’unrès faible poids a été atteint, et pouvait même consti-uer chez la jeune fille un signe prodomique de la maladie23]. Par ailleurs, une étude conduite aux États-Unis [24]

montré que l’insatisfaction par rapport au corps et, enonséquence, la vulnérabilité aux troubles du comporte-ent alimentaire étaient beaucoup plus prononcés chez les

eunes filles « blanches » que chez les jeunes filles afro-méricaines. D’ailleurs, les jeunes filles afro-américaines,ême lorsqu’elles sont en léger surpoids, ont tendance à

ous-estimer leur silhouette et leur poids contrairement auxeunes filles « blanches ». La famille, le regard des pairsinsi qu’une moindre sensibilité aux media véhiculant desmages de jeunes femmes blanches, auxquelles la jeunelle afro-américaine ne s’identifie pas, auraient un rôlerotecteur.

’évaluation classique de la représentation duorps

a surestimation du corps est une plainte qui est parfoisecueillie au cours de l’entretien clinique mais qui peut êtregalement quantifiée par un test spécifique : le « test desilhouettes » ou contour drawing scale [25]. Initialement, ceest est constitué de cartes représentant des silhouettes deemmes de différents IMC. La patiente choisit, parmi ces dif-érentes silhouettes allant de la plus maigre à la plus grosse,elle qui correspond le mieux à sa propre silhouette. L’IMCéel de la patiente est alors comparé à l’IMC estimé. De nom-reuses variantes informatisées existent actuellement et lesilhouettes dessinées peuvent être remplacées par des pho-ographies ou des vidéos de femmes, voire de la patientelle-même dont la silhouette est modifiée. Parallèlement àe type de test, des questionnaires peuvent être administrésomme l’Eating Disorder Inventory (EDI), [26], l’Eating Atti-ude Test (EAT), le Body Scale Questionnaire (BSQ) ; version

alidée francaise, [27]. Ces questionnaires ne mesurent pasirectement l’illusion de surestimation du corps mais plu-ôt les attitudes, les émotions et l’insatisfaction liées auorps.
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a surestimation du corps : schéma corporel versusmage du corps

algré les très nombreuses recherches conduites sur l’imageu corps dans l’anorexie mentale, on ne connaît toujoursas l’origine de la surestimation de la taille et du poids duorps chez la patiente anorexique. Arriver à lever ce symp-ôme permettrait d’amener la patiente à moins résister àa renutrition et aux thérapies entreprises. La difficulté àomprendre l’origine et les mécanismes de cette illusionrovient en partie du fait que la notion d’image du corpsst complexe et renvoie en réalité à différents types deeprésentations du corps et différentes taxonomies [28].lassiquement, on distingue le schéma corporel, représen-ation sensorimotrice du corps impliquée dans la posture etans l’action et l’image du corps, représentation à la foisémantique, esthétique et émotionnelle du corps [29,30].ette dichotomie a fait l’objet de réserves dans la littéra-ure [28]. Certains ont préféré classer la représentation duorps en trois composantes : visuo-spatiale, sémantique etensorimotrice [31] alors que d’autres ont choisi de faire laistinction entre une « somatoperception » (dont ferait par-ie le schéma corporel) et une somatoreprésentation [32].ous s’accordent, cependant, sur l’existence d’une repré-entation du corps sensori-motrice impliquée dans la posturet dans l’action que celles-ci soient imaginées ou réalisées.ur le plan cérébral, l’émergence du schéma corporel pour-ait mettre en jeu un circuit complexe reliant le cortexomatosensoriel et les lobules pariétaux inférieur et supé-ieur. Un élément intéressant est que la macrosomatognosie,ne illusion de membres plus importants en taille, a été aussiiée à un dysfonctionnement du cortex pariétal.

Si l’image du corps en tant que représentationonsciente, esthétique et émotionnelle du corps a étéepuis longtemps étudiée par le biais de questionnairesu du test des silhouettes [33,34], le rôle du schéma cor-orel dans l’anorexie mentale est une idée relativementécente. Des déficits dans des tâches haptiques (tactilo-inesthésiques) chez les patientes anorexiques ont étéontrés [35,36]. Il a été suggéré que ces déficits pouvaient

tre liés à un dysfonctionnement du cortex pariétal droit35,36]. Concernant le schéma corporel proprement dit, unetude a été menée sur des patientes souffrant d’anorexieentale et des patients souffrant de lésions du cortex parié-

al à droite ou à gauche (appariés à des sujets contrôles)37]. Les participants devaient dire si une lumière, en pro-enance d’un pointeur laser robotisé, semblait toucher ouon leurs limites corporelles (tête, épaules). Les résultatsnt montré que les patientes se comportaient comme lesatients souffrant d’une lésion pariétale droite, avec unentensité moindre bien sûr.

Avec l’objectif de vouloir tester le rôle du schéma cor-orel dans l’anorexie mentale, notre équipe a conduitne série d’études. Dans une première série d’expériences38,39], des patientes anorexiques et contrôles étaientlacées à quelques mètres d’un mur sur lequel était pro-etée une ouverture ressemblant à une porte d’habitationuverte. Les ouvertures variaient en largeur et chaque par-icipante devait décider, sans faire réellement l’action, si

’ouverture était suffisamment large pour qu’elle puisseasser sans tourner les épaules. On mesurait un seuil percep-if : l’ouverture critique, qui correspondait à la plus petite

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M. Luyat

uverture pour laquelle la participante estimait pouvoir pas-er sans tourner les épaules. Un ratio perceptif était calculé :p = ouverture critique en cm/largeur des épaules en cm.es résultats ont montré que le ratio perceptif médian étaitignificativement plus élevé pour le groupe des patientes.es patientes anorexiques choisissaient comme ouvertureritique, une ouverture beaucoup trop large par rapport

leur propre largeur d’épaules. Ainsi, non seulement lesatientes se percevraient comme étant plus grosses qu’ellese le sont en réalité, mais elles anticiperaient égalementeurs actions en conséquence. Ces résultats ont été confir-és avec une procédure nécessitant d’effectuer réellement

’action [40]. Nous avons suggéré que la perte de poids mas-ive et rapide pouvait être responsable de la surestimationu schéma corporel [41], approuvant l’hypothèse de Riva42] selon laquelle les patientes seraient « enfermées » dansne représentation allocentrée de leur ancien corps, sto-kée en mémoire à long terme. Un dysfonctionnement dansa mise à jour des nouvelles métriques de leur corps pourraittre à l’origine de cette fausse représentation de soi-même.

D’autres performances spatiales impliquant moins direc-ement le schéma corporel semblent être égalementouchées. L’effet de l’inclinaison latérale du corps sur laerticale subjective dans la modalité tactilo-kinesthésique

été étudiée [43]. La verticale subjective est l’estimation,ar l’individu, de la direction de l’accélération gravitaire,ne référence spatiale cruciale sur terre organisant à la foisotre posture et des tâches cognitives spatiales de plus hautiveau [44]. Dans la posture « allongée sur le côté », uneéviation anormalement élevée de la verticale subjectiven direction de la référence corporelle a été mis en évi-ence chez les patientes. Cet effet a été confirmé en vision45].

La prise en compte du corps dans les thérapies n’est pasouvelle. Des résultats très encourageants sur le rôle desassages dans l’amélioration de la satisfaction envers le

orps ont été publiés [46]. L’exposition fréquente et régu-ière du corps dans un miroir est une technique utilisée parertains thérapeutes et dont l’efficacité a été expérimen-alement montrée [47]. L’utilisation de la réalité virtuelleour améliorer l’insatisfaction corporelle, utilisée depuis lesnnées 1990 [48], est également une technique prometteuseans le traitement des TCA. Il a été montré que son utilisa-ion pouvait améliorer les effets des thérapies cognitives etomportementales [49]. De plus, la réalité virtuelle permete faire « croire » à la personne qu’elle est en train de seegarder, vue de dos [50] ou d’être et d’agir dans le corpse quelqu’un d’autre [51]. L’immersion dans un corps plusince ou plus gros change d’ailleurs la satisfaction envers le

orps chez des personnes contrôles, ne souffrant pas de TCA51]. On peut espérer que l’immersion graduelle et accom-agnée par un thérapeute puisse faire mieux accepter larise de poids, future ou actuelle, des patientes.

’évaluation de l’intégration multisensorielle

es différences de performances ont également été mises

ans l’étude de Case et al. [52], l’illusion classique de Char-entier, plus connue sous le nom d’illusion poids-volume,st étudiée. Ce paradigme consiste à placer deux poids de

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Évaluation cognitive et anorexie mentale

Figure 1 The « rubber hand illusion » paradigme. La maindroite du sujet est cachée de la vue du participant. Celui-civoit à la place une main en plastique. La main droite et la faussemain sont légèrement frottées par les poils d’un pinceau à lamême fréquence. Au bout de quelques minutes, le participanta l’illusion que la main en plastique lui « appartient ».The rubber hand illusion paradigm. The right hand of the sub-ject is hidden from the view of the participant. Instead, he islooking at a plastic hand. The right hand and the fake handare slightly brushed by the bristles of a brush at the same fre-

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cljs’adosser aux connaissances existantes afin de permettre

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même masse dans chacune des mains du participant quigarde bien sûr les yeux ouverts. Malgré l’égalité de poids,c’est le plus petit objet qui sera jugé comme étant pluslourd ou, si on préfère, le plus grand comme plus léger.Cette illusion est interprétée comme le résultat d’une inté-gration entre, d’une part, la vision et le toucher (qui nous« disent » que plus un objet est grand et plus il est lourd)et, d’autre part, la proprioception qui nous informe del’égalité des masses. Dans cette expérience, les patientessont moins sensibles à l’illusion comme si elles accordaientplus de poids aux données proprioceptives ; elles seraientmoins sensibles à l’influence de la vision et du toucher.Un autre paradigme d’intégration multisensorielle a étéutilisé : l’illusion de la main en plastique ou rubber handillusion [53]. Dans ce paradigme, le participant est assisà une table, les mains reposant à plat sur la table. Unedes deux mains, par exemple la droite, est cachée par unpanneau (Fig. 1).

On place, à côté et bien en vue du sujet, une faussemain « droite » en plastique. La main en plastique etla vraie main droite du sujet sont ensuite « caressées »avec un pinceau, simultanément. Au bout de quelquessecondes, le sujet a l’impression que la main en plas-tique lui appartient (phénomène d’embodiement). Cetteillusion s’est avérée plus forte chez les personnes souffrantde troubles du comportement alimentaire [53]. Ces deuxprécédentes études, celle utilisant l’illusion poids-volume

et celle utilisant la rubber hand illusion, montrent unedifférence dans le processus d’intégration multisensoriellechez les personnes souffrant de troubles du comportement

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limentaire. Or, le schéma corporel est supposé êtreonstruit sur la base d’une intégration de multiples sourcesensorielles. Aussi, les perturbations observées dans lesâches d’intégration multisensorielle et les tâches mettantn jeu plus directement le schéma corporel pourraient êtreiées.

onclusion

ue nous enseignent les études issues de la psychologie cog-itive et de la neuropsychologie ? Concernant l’efficiencentellectuelle, les études ne sont pas consensuelles et ilaudrait des programmes expérimentaux de plus grandenvergure avec des groupes contrôles plus nombreux.ependant, il semblerait que les patientes, lorsqu’ellestteignent un poids extrêmement bas, sont moins perfor-antes dans les évaluations classiques de l’intelligence. La

orte dénutrition est susceptible d’expliquer cette chutee performances puisqu’après une reprise de poids, lesatientes recouvrent des performances qui ne sont plus dif-érentes de celles des contrôles. À l’instar des études sura personnalité qui ont montré que des traits particuliersomme le perfectionnisme, l’ascétisme et la peur de laaturité étaient liés à cette maladie, les données issues de

a neuropsychologie cognitive et des neurosciences semblentettre en avant certaines composantes particulières. Ainsi,

’organisation perceptive, la flexibilité mentale, la mémoiree travail, la cohérence centrale sont des composantes quipparaissent comme étant particulièrement affectées par’anorexie mentale. Des remédiations cognitives adaptéest surtout individualisées pourraient être proposées afin’améliorer les composantes touchées comme la flexibilitéognitive, qui peut être un frein important au changementt, donc, à la thérapie.

Les études sur la surestimation de la silhouette et duoids montrent que cette illusion ne concerne pas seule-ent l’image du corps, représentation du corps consciente,

motionnelle et esthétique, mais s’ancre dans une représen-ation plus basique, sensori-motrice : le schéma corporel. Larise de conscience de la maigreur est une condition quasindispensable à la réussite du processus de renutrition. Leshérapies cognitives et comportementales devraient inclurelus systématiquement des techniques centrées sur le corps.es techniques peuvent impliquer un contact réel avec leorps par le biais de massages mais on peut utiliser éga-ement la réalité virtuelle. L’objectif est double. Il s’agitremièrement de permettre une meilleure réappropriationes nouvelles limites du corps émacié lorsque la patiente

atteint un IMC très bas. Deuxièmement, la réalité vir-uelle peut permettre d’habituer la patiente à prendre duoids en l’exposant à l’image visuelle de son corps qui seraitraduellement et artificiellement grossi.

Enfin, l’utilisation des techniques issues des neuros-iences comme l’imagerie cérébrale, permettra, il faut’espérer, de mieux comprendre les systèmes neuraux sous-acents. L’ensemble de ces connaissances pourrait venir

ux thérapies cognitives et comportementales d’avoir desésultats au moins aussi probants que dans le cas de la bou-imie.

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éclaration d’intérêts

’auteur déclare ne pas avoir de conflits d’intérêts en rela-ion avec cet article.

emerciements

e travail a été soutenu financièrement par l’université deille 3 et la LMCU (Lille métropole communauté urbaine)crédits BQR-LMCU).

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