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LES RAISONS INSTITUTIONNELLES DE LA PERIURBANISATION ----- Lettre de commande n° 00 MT 34 DRAST – Ministère des Transports PREDIT 1996-2000 Ministère de l'Equipement, des Transports et du Logement PLAN URBANISME, CONSTRUCTION ET ARCHITECTURE Lettre de commande n° F 0099 du 13 novembre 2000

LES RAISONS INSTITUTIONNELLES DE LA PERIURBANISATION

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LES RAISONS INSTITUTIONNELLES

DE LA PERIURBANISATION

-----

Lettre de commande n° 00 MT 34 DRAST – Ministère des Transports

PREDIT 1996-2000

Ministère de l'Equipement, des Transports et du Logement PLAN URBANISME, CONSTRUCTION ET ARCHITECTURE

Lettre de commande n° F 0099 du 13 novembre 2000

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FICHE RESUME DE LA RECHERCHE :

« LES RAISONS INSTITUTIONNELLES DE LA PERIURBANISATION »

1) PROBLEMATIQUE Cette recherche fait suite à celle intitulée « forme et intensité de la périurbanisation ; aptitude à la canaliser » Elle avait constaté que l’intensité de la périurbanisation connaissait des variations entre les villes dues à d’autres facteurs que les choix d’aménagement des collectivités locales. Le degré d’éparpillement de cette périurbanisation était également fort variable même quand des espaces agricoles étaient abondants à portée de déplacement des agglomérations. Quelles en étaient les raisons ?

2) METHODOLOGIE Quatre agglomérations furent choisies pour les valeurs extrêmes du degré d’éparpillement de leur périurbanisation. Brest et Dunkerque avaient des valeurs minimales, et Caen et Strasbourg des valeurs élevées en 1990.Des entretiens avec des élus et des professionnels ont permis de remonter aux causes particulières à chaque site sur les raisons d’une attitude plus ou moins volontaire pour retenir ou non la périurbanisation aux bords des agglomérations dans les décennies 70/80.

3) RESULTATS La périurbanisation éparpillée n’est une fatalité que là où rien n’est fait pour la retenir. Elle est la banlieue résidentielle que les ménages ne peuvent se payer. Il fut relativement exceptionnel que les projets des communes et des institutions intercommunales convergent vers cet objectif. A Dunkerque, le projet de développement industriel suscita la création de la communauté urbaine permettant à la volonté des communes périphériques de ne pas laisser les salariés dépendants du ramassage de l’employeur de s’imposer. A Brest, la communauté urbaine fut créée pour cela, le contexte tant matériel que culturel du milieu rural y contribuant. Rien de tel à Strasbourg et Caen où aucune initiative des collectivités n’eut cette ambition. La ville était affaire de collectif et la coupure d’avec le milieu rural plus ancrée peut-être parce que celui-ci est ici plus prospère. Ce résultat permet de pronostiquer une périurbanisation plus éparpillée là où les collectivités voudront s’y opposer par les seules voies réglementaires (sans action foncière) au nom du développement durable et de la priorité à la reconquête de la ville sur elle-même.

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S O M M A I R E

Synthèse de l'analyse comparée de la périurbanisation à Brest, Caen, Dunkerque et Strasbourg……………………… p. 5 1. Place de ces quatre agglomérations en matière de périurbanisation p. 6 2. Méthode et résultats p. 8 3. Conclusion p. 12 Synthèse de l'analyse par entretiens de la périurbanisation à Brest…………………………………………………………… p. 14 1. L'évolution du rythme d'urbanisation (1975-1999) dans le pays de Brest, et le contexte institutionnel p. 15 2. Analyse de l'attitude des acteurs p. 19 La périurbanisation autour de Caen………………………… p. 27 Analyse du cas Dunkerquois………………………………… p. 41 Eléments de synthèse - ADEUS Strasbourg -………………. p.45

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Cette recherche a été coordonnée par M. WIEL de l'ADEUPa de Brest. Les entretiens ont été réalisés par : - BREST Emmanuelle CHAMPOT (ADEUPa) Pierre-Henri EMANGARD (MESTRANS) Marc WIEL - DUNKERQUE Laurent GABIHAN (Agence de Dunkerque) Marc WIEL - CAEN Pierre-Henri EMANGARD Marc WIEL - STRASBOURG ADEUS Danielle BARBOZA Laurence DEBACQ Joël FABERT Vincent FLICKINGER Colette KOENIG Christian MEYER Michel MESSELIS Nadia MONKACHI Marc WIEL

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SYNTHESE DE L'ANALYSE COMPAREE

DE LA PERIURBANISATION à BREST, CAEN, DUNKERQUE

et STRASBOURG

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La comparaison de la périurbanisation propre à ces quatre agglomérations fait suite à un travail d'analyse plus large que nous résumerons succinctement en même temps que nous situerons ces quatre agglomérations dans l’ensemble des autres agglomérations françaises. 1. PLACE DE CES QUATRE AGGLOMERATIONS EN MATIERE DE PERIURBANISATION

La comparaison nationale a été conduite en situant chaque agglomération par rapport à deux notions : l'intensité de la périurbanisation et son degré d'éparpillement. Elle n'a porté que sur l'habitat et s'est surtout préoccupée de la dimension formelle (morphologique) du processus. La dimension sociale de ce dernier avait fait l'objet d'autres analyses (Optimisation du temps et organisation de l’espace WIEL 2001) qui concluaient qu'en fonction de leur histoire, les villes « retenaient » fort différemment les ménages aisés mais que ce n'était pas cela qui primait dans les différences de rythme de la périurbanisation. La priorité accordée à cette dimension formelle nécessitait une nouvelle définition de l'agglomération, pour homogénéiser les situations faisant l’objet de comparaison. Le critère d'appartenance à la partie agglomérée de la ville est, pour l'INSEE, la continuité du bâti. Ceci s'explique très bien par l'histoire des villes antérieurement à la périurbanisation. C’est bien pour intégrer cette nouveauté que récemment l’INSEE a inventé la notion d’aire urbaine. La conséquence est que les unités urbaines de l'INSEE (appelées maintenant pôles urbains) disposent en leur sein d'une quantité très variable d’une agglomération à l’autre de surfaces potentiellement constructibles pour les maisons individuelles. Or la périurbanisation, c'est-à-dire la croissance discontinue de la ville, a une ampleur fonction de la quantité et de la qualité de la disponibilité effective de ces terrains, selon leur localisation dans ou hors de l’unité urbaine. Pour cette raison a été imaginée la notion d'agglomération restreinte qui regroupe les communes contiguës au-dessus d'un seuil donné du rapport entre emplois de la commune et surfaces agricoles. Nous approchons mieux de la sorte la notion de ville compacte. Nous ne nous étendrons pas ici sur cette notion qui a fait l'objet, ailleurs (Forme et intensité de la périurbanisation et aptitude à la canaliser WIEL 2000), de nombreux développements, d'autant qu'hormis quelques agglomérations, son usage ne bouleverse pas aussi fondamentalement qu’il était attendu, la hiérarchie du degré de périurbanisation quand celui ci est calculé à partir de la définition de l'unité urbaine de l'INSEE. L'intensité de la périurbanisation fut définie comme la proportion, parmi les ménages ayant au moins un conjoint dont l’emploi était situé dans l'agglomération restreinte, de ceux qui habitaient à l'extérieur de celle-ci. Elle est minimale (environ 10% en 1990) dans des contextes de marché foncier contraint par la géographie (exemple : Le Havre), ou quand s'ajoute à la contrainte géographique la concurrence des touristes et des retraités (Nice et Toulon). Elle est maximale (plus de 40% en 1990 à Amiens, Caen, Le Mans, Perpignan) là où les contraintes foncières sont, du fait de la géographie, certes minimales mais ce n’est plus le critère déterminant. Pour la plupart des agglomérations françaises, le réseau routier met à portée des emplois qui s’y trouvent beaucoup d’espaces constructibles. Dans ce cas, bien avant le

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profil social de la ville, le facteur explicatif de la valeur plus ou moins élevée du taux de périurbanisation sera l'appartenance à une région où l'accession en maison individuelle est plus ou moins développée (et secondairement le dynamisme économique). Par rapport à ce critère, nos quatre agglomérations se situent de la façon suivante : Du point de vue de l'aire d'appartenance, Strasbourg se distingue nettement des trois autres. La maison individuelle y est plus rare, de diffusion plus récente et massivement située à l’extérieur de l’agglomération restreinte. La proportion des locataires est plus forte car quand ils accèdent à la propriété ce sera à un âge plus tardif. Ces traits sont également ceux de l'Allemagne par rapport à la moyenne française. Les trois autres agglomérations appartiennent à des régions où l'accession est plus précoce et la tradition de la maison individuelle mieux établie. Toutefois le parc d'accédants en collectif est moins négligeable à Brest qu’à Dunkerque ou Caen car, comme pour les autres villes bretonnes, l'attrait en elle-même de l'accession à la propriété fait du logement collectif un « tremplin vers l'individuel », ou en tout état de cause fait de l’accession en collectif une solution plus appréciée que la situation de locataire. Cela participe de l’explication du taux de périurbanisation moyen à Brest Caen et Dunkerque appartiennent au même type de région du point de vue de l’attrait de la maison individuelle sans avoir néanmoins la même intensité de la périurbanisation. Cela tient au fait qu’à Caen les maisons individuelles sont proportionnellement plus nombreuses hors de l’agglomération restreinte qu’à Dunkerque. Ici la résistance à l’éparpillement , dont nous allons parler, a interféré avec l’intensité de la périurbanisation telle que nous l’avons mesurée. Le deuxième indicateur, l'éparpillement de la périurbanisation, fut évalué en calculant le nombre de communes dans lequel allait s'installer une même proportion des ménages périurbains c’est à dire attachés par l’emploi d’un au moins des conjoints à l’agglomération restreinte mais n’y habitant pas. Là encore la disparité est forte mais obéit à des critères pour partie différents de ceux qui expliquent les disparités de l'intensité de la périurbanisation. L’éparpillement est plus faible quand la contrainte foncière est très forte (Nice, Toulon, Le Havre) mais il devient vite important quand celle-ci n’est que moyenne. Bordeaux et Rouen, par exemple, sont dans cette situation en raison de la proximité de vastes massifs forestiers. La contrainte de la présence forestière n'est pas suffisante pour retenir toute la périurbanisation aux franges de l’agglomération mais son éparpillement s’en trouve stimulé dés lors qu'elle a sauté la barrière forestière. L'éparpillement le plus fort correspond aux agglomérations dont les principales communes sur le plan démographique (qui aussi ont le plus de contribuables) n'ont plus de terrains

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disponibles à offrir pour la construction individuelle (Lille, Lyon, Rouen, Bordeaux par exemple). A l'inverse l'éparpillement le plus faible caractérise les agglomérations "coincées" par le relief mais aussi celles dont la croissance de l'emploi avait, dans la période 1975 -1990, été modérée (Le Havre, Dunkerque, Brest, Limoges). Ces raisons étaient elles les vraies ou les seules raisons ? C’est l’objet de la présente recherche D’après nos analyses antérieures l'intensité de la périurbanisation paraissait échapper à la volonté politique locale. En effet les critères principaux dégagés pour expliquer leur disparité étaient les caractéristiques du site et de la région d'appartenance. Si les modalités du financement national du logement avaient une quelconque responsabilité dans le processus nous ne pouvions le mettre ici en évidence car cela aurait été une cause nécessairement commune à toutes les agglomérations étudiées. En était-il de même du degré d'éparpillement ? Les quatre agglomérations déjà nommées ont été choisies en raison des contrastes qu’elles présentaient du point de vue de l'éparpillement périurbain mais sans que les contraintes foncières (physiques ou liées à la pénurie d'espaces constructibles dans les plus grandes communes) l’expliquent pour la période analysée (1975-1990). Caen et Strasbourg avaient connu un éparpillement maximal et Dunkerque et Brest, minimal. Pourquoi ? 2. METHODE ET RESULTATS

La démarche statistique, auparavant privilégiée, fut abandonnée, car nous avions le sentiment d’en avoir épuisé les ressources, au profit d’entretiens avec des acteurs locaux. A Brest et Strasbourg la démarche fut plus approfondie et les entretiens plus nombreux car les causes des différences observées apparurent moins facilement qu’à Caen et Dunkerque. Le trait commun que nous avons trouvé dans toutes ces villes confirme bien l'intuition que nous avions initialement. Partout nous avons rencontré des maires qui nous ont justifié la nécessité – tant pour des raisons politiques que financières - de modérer l'ouverture à l'urbanisation, voire d’être encore plus restrictif qu’auparavant. Les raisons les plus fréquemment évoquées tournaient autour de l’absurdité de construire des écoles pour devoir les fermer quelques années plus tard, du défaut de ressources liées à l’insuffisance des emplois, de la préoccupation de pas déstabiliser le fonctionnement de la vie associative liée à la gestion des équipements existants, enfin que personne ne leur avait demandé un autre comportement, au contraire qu’ils ressentaient toute velléité de croissance plus rapide de leur part comme maintenant devenue incongrue tant pour les pouvoirs publics que pour les représentants du pouvoir d’agglomération car prenant le risque de vider et d’appauvrir cette dernière. Le maître mot est ainsi devenu partout de « se développer un peu mais pas trop ». La résistance à se développer des petites communes de l’agglomération ou immédiatement proches de celle ci, est bien la cause majeure non de la périurbanisation mais de son

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éparpillement. Elle est bien, comme certaines enquêtes nous l'avaient fait comprendre (Crepah, Rouen 1997), une « banlieue résidentielle par défaut », celle que la majorité des ménages voudrait bien se payer mais qui est « encore » hors de portée de leurs moyens financiers. Dans l’enquête citée ils ne désespéraient pas que cette situation ne s'inverse un jour mais reconnaissaient au moment où ils étaient interrogés qu’ils n’en savaient rien. Malgré l’abondance foncière globale, le coût de l'immobilier ou du foncier aux franges de l’agglomération (très différent d’une agglomération à l’autre en fonction surtout du taux de croissance et de la taille) est consolidé voire amplifié par cette résistance des communes. Cela suscite d’autant plus l’élargissement du champ de l’éparpillement périurbain car la mobilisation d‘un large territoire devient nécessaire pour couvrir toute la gamme des besoins exprimés. Nous préférons le mot d’éparpillement à celui, plus souvent utilisé, d’étalement du fait que la méthode utilisée introduit une distinction entre les nappes de maisons individuelles soudées à la partie agglomérée (agglomération restreinte) et les constructions dispersées ou collées aux bourgs et villages périurbains isolés de l’agglomération. L’emploi habituel du mot étalement est source de confusion car il ne fait pas cette distinction. La périurbanisation est, rappelons le, d’abord le fait de communes de moins de 2000 habitants, celles que l’INSEE qualifie de rurales. S’il s’agit de lutter contre l’étalement c’est déjà gagné, la croissance continue en tache d’huile est quasiment terminée depuis longtemps. Alors, pourquoi de telles différences du degré d’éparpillement si les acteurs disent se comporter de façon quasiment identique ? En fait la périurbanisation mesurée en 1990 était le résultat des politiques urbaines des années 70 et 80. Pour connaître, non les motivations actuelles mais celles passées, nous devions par conséquent nous intéresser à l’histoire. Dans le cas de Dunkerque la faible progression de l'emploi des années 80 a certainement freiné cette périurbanisation éparpillée. Mais avant cela, l'aventure industrielle des années 70 (Usinor) décidée par l'Etat afin de mettre au bord de l'eau une partie de la sidérurgie française fut le facteur déclencheur de la création de la communauté urbaine. La création de la communauté urbaine fut certes volontaire (plus qu’à Lille, Lyon et Bordeaux mais moins qu’à Brest) mais elle accompagna naturellement (personne ne le contesta) l'aventure industrielle, l’Etat la présentant comme une des conditions de sa réalisation. Cette aventure justifia que la ville de Dunkerque accepte d'être minoritaire dans la communauté urbaine et elle mit pour condition de garder une certaine liberté de décision sur son propre territoire (exemple : un vice-président à l’urbanisme appartenant à la majorité de la commune-centre fut pendant plusieurs mandats différent de celui ayant en charge les problèmes d’urbanisme de la périphérie). Contrairement aux autres communautés urbaines volontaires, sa création n’émana pas d’une initiative de la commune-centre mais d’une proposition de l'Etat dans le cadre de la mise en œuvre du projet d’industrialisation. Ainsi furent montées de vastes opérations publiques pour l'accueil industriel mais aussi pour l'habitat que cette industrie induisait. Les communes périphériques de la communauté urbaine eurent pour souci de rapatrier ou de garder sur leur territoire commun les ouvriers d'Usinor pour ne pas laisser l'employeur maître du jeu social en développant le ramassage du personnel dans l’arrière-

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pays. L'enjeu était syndical (Monopolville, Manuel Castells et Francis Godard 1974). Une tradition syndicale inspira donc le contenu du projet urbain de l'institution communautaire, celui de contrarier la périurbanisation au bénéfice du développement urbain des municipalités supports du développement industriel. C'est seulement depuis la décennie 90 que les communes de banlieue adhèrent à l'idée de conforter la ville-centre pour le profit de l’ensemble de l’agglomération, et de chercher à plus unifier une organisation urbaine ici particulièrement multipolaire du fait de son processus historique de formation. La communauté urbaine dunkerquoise est une exception : elle seule s'est construite sur la base d’une connivence, pourrait-on dire, entre l’Etat et la périphérie à l’intérieur de la communauté urbaine. Le cas Brestois, l’autre cas où la périurbanisation fut relativement bien contenue sur un petit nombre de communes, présente des analogies avec la situation dunkerquoise. C'est-à-dire que la retenue de la périurbanisation fait aussi partie du projet fondateur de l'institution communautaire. Mais la différence est qu’ici celui-ci doit peu de chose à l'Etat. Le développement de l'intercommunalité fut d’abord une initiative de la commune-centre. Les motivations de cette initiative sont multiples et furent d'abord celles d'un homme politique (Maître Lombard, maire de Brest) qui voulait contrarier un virtuel déclin brestois (surtout par rapport à Rennes, compte-tenu du caractère mono-industriel du bassin d'emploi et d’une économie locale longtemps portée par la Reconstruction). L'alliance avec la périphérie immédiate avait, entre autre, pour objet d'aider ces communes à se développer. Il fallait donc que ces communes ne répugnent pas à une telle perspective. C'était assurément l’attitude à l'époque, même si ce n’est plus aussi vrai maintenant. Les communes périphériques de la communauté urbaine avaient l’ambition d’atteindre une taille de plus de 10 000 habitants, d’être de petites villes bien équipées et néanmoins proches de la nature. Cela n’était pas d’ailleurs spécifique aux communes situées à l'intérieur de la communauté urbaine mais à toutes les communes déjà suffisamment importantes (y compris extérieures). Répondre à la demande périurbaine qui se manifestait dès les années 60 était une sorte de revanche de l’exode rural caractérisant les périodes antérieures. Cela s’accordait bien avec une conception du développement social et économique de la région, avec l’importance accordée au rôle de la commune dans l'animation locale. Cela rencontrait également l'intérêt des agriculteurs désireux de valoriser une partie de leur outil de production en particulier pour compenser la faiblesse de leurs ressources lors du départ à la retraite. Dans cette période la surface moyenne des exploitations agricoles crût très significativement (faute de repreneurs lors de la cessation d’activité) reflétant l’apparition d’une transformation profonde du milieu rural pour la première fois depuis longtemps affecté par un excès d’offre en terrains. En définitive, la retenue de la périurbanisation fut encouragée par l'innovation institutionnelle dont c'était un des éléments majeurs du projet la justifiant, un des éléments du « pacte » que, au travers elle, la commune-centre nouait avec sa périphérie. Le cas Strasbourgeois met aussi en exergue la responsabilité du fonctionnement de l'intercommunalité, mais en quelque sorte, pour des raisons inverses aux cas précédents.

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Certes, nous sommes en présence d'une intercommunalité "autoritairement" décrétée par l'Etat puisqu'elle relève officiellement d'une initiative de ce dernier, mais chacun sait à Strasbourg qu'il s'agit aussi d'une initiative locale car Strasbourg ne faisait pas partie au départ des agglomérations que l'Etat avait l'intention de doter de cette innovation institutionnelle. Par contre, pour les acteurs locaux, la motivation communautaire n'intégrait pas la retenue de la périurbanisation. Elle était fondée sur d'autres raisons et en particulier sur la place de la ville dans son environnement national ou international. Le pacte communautaire se devait de respecter scrupuleusement la responsabilité communale dans le champ de l'aménagement, or les communes avaient une faible ambition en la matière. La commune rurale est ici une petite "patrie". La commune de Strasbourg concevait uniquement son développement sous une forme relativement dense. Dans cette région, la conception traditionnelle de la ville, sa représentation, insiste sur la franche distinction d’avec le milieu rural. La ville se doit d’être dense et compacte. Concevoir des grandes opérations publiques ou privées avec, comme à Brest et Dunkerque, une forte proportion de maisons individuelles n’est pas dans la culture locale. Favoriser un tel développement au sein de la communauté urbaine eut été, compte tenu des coûts fonciers, du gâchis et un peu une « trahison » vis à vis de cette vision partagée de la ville. La protection de l’écrin de verdure et du milieu agricole fut un objectif très tôt affirmé par le président de la communauté urbaine, à la naissance de cette dernière, comme une façon de rassurer les petites communes qui composaient sa périphérie. Autrement dit, culturellement, le discours urbanistique habituel (de défense des manifestations traditionnelles de l’urbanité), trouvait ici un substrat favorable. Nous sommes, par ailleurs au milieu de terres très riches, dans une région – l’Alsace-, qui sans nier que Strasbourg soit sa capitale, se pense en dehors d'elle. Finalement, même les villes dites « Rhénanes » sont concernées par l’économie urbaine... La « culture urbaine » prônée et défendue par les institutions ne rencontre pas obligatoirement celle des habitants dans leurs choix de localisation. Caen a en commun avec Strasbourg d'avoir connu un éparpillement très élevé. La coupure entre milieu urbain et rural est ici également culturellement forte, même si la maison individuelle est ici une tradition plus ancienne. La richesse de l’agriculture joua probablement un rôle analogue à Strasbourg. Le développement de l’intercommunalité par contre fut plus tardif. Le district n’acquit la compétence urbanisme qu’en 1995. Le développement de l’urbanisation en matière d’habitat fut par conséquent le résultat des diverses initiatives communales. Une commune de banlieue, Hérouville Saint-Clair, manifesta une ambition analogue à celle des villes nouvelles en désirant doter le grand ensemble qu’elle construisait d’un véritable centre urbain. Mais plusieurs communes de la périphérie caennaise au sein de l’intercommunalité centrale résistèrent à toute extension significative et les autres étaient trop petites et trop peu nombreuses pour absorber un développement significatif. A l’extérieur du district la progression très mesurée de l’extension des bourgs et villages fut la politique courante. Le processus ne se bloqua pas pour autant car la plaine de Caen connaît un tel niveau de morcellement communal (qui malgré son ancienneté a peut-être toujours un lien avec l’attitude de défense patrimoniale

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observée dans le milieu rural) que le nombre des communes à portée des emplois de la ville était suffisant à fournir l’offre foncière nécessaire à l’extension urbaine. Mais cela explique le caractère exceptionnel de l’éparpillement constaté. 3. CONCLUSION

Les différences d'éparpillement de la périurbanisation confirment qu’il ne s’agit pas d’un phénomène fatal. Elles sont la conséquence de plusieurs facteurs mais où domine nettement l'attitude des institutions communales et intercommunales. Le contexte agricole joue un rôle, de même que le taux de croissance de l’agglomération, mais réduire l’éparpillement périurbain et le canaliser sur un nombre restreint de pôles assez gros pour justifier d’équipements, exige surtout une offre de terrains constructibles en proportion suffisante et à des coûts maîtrisés. Or une telle ouverture à l'urbanisation suppose la convergence d’un projet communal et d’un projet communautaire, sinon les communes périurbaines captent la croissance urbaine en se développant toutes à la même vitesse. Cette situation de rétention délibérée de la périurbanisation ne s'est rencontrée qu'exceptionnellement dans le passé et ne reproduira pas spontanément à l’avenir à l'initiative des acteurs locaux. Le consensus le mieux partagé qui s’est généralisé depuis au moins une décennie est que le rythme d'urbanisation est affaire communale. Or les communes en quasi-totalité sont devenues, nous l'avons dit, très prudentes en ce domaine. Le vieillissement des populations n’est certainement pas un facteur favorable à un changement des attitudes car il devrait favoriser le souci de rester « entre soi ». La prise en compte des contraintes environnementales qui justifie de réduire l’éparpillement périurbain ne peut résulter du choix vertueux des multiples communes ni même des intercommunalités mais de toutes les institutions concernées par l’organisation des formes urbaines. Déconcentrer la compétence de la lutte contre l’effet de serre à l’échelle communale n’aurait pas d’efficacité, chacun en convient, mais implicitement l’absence de la prise en compte par l’Etat de cette exigence dans le financement du logement aboutit pourtant à faire comme si une telle déconcentration avait eu lieu… La loi SRU pose apparemment bien le problème mais n’envisage pas de solutions à sa mesure. Une planification urbaine rénovée n’y suffira pas car la question à résoudre n’a pas d’encadrement possible qui soit strictement réglementaire. La vitesse des déplacements sans contrepartie financière suffit à expliquer l’essentielle des mutations urbaines en cours et l’éparpillement périurbain induit sera d’une ampleur proportionnelle à la « vitesse » octroyée. Contrarier (ou canaliser) le processus et non l’encourager suppose d’aider l’aménagement (alléger la charge foncière dont le montant moyen est du même ordre que l’aide au logement) plutôt que le « seul » logement, en tenant compte de la répartition spatiale des coûts d’aménagement. La crainte d’alimenter la spéculation foncière a fini par la banaliser. A cette seule condition d’une telle aide recentrée sur l’aménagement les attentes légitimes des ménages seront satisfaites sans majorer inutilement les charges collectives ni ignorer les conséquences environnementales du

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processus pour les générations futures. Mais actuellement chacun se repasse la « patate chaude » comme il est dit trivialement. A défaut, nous resterons dans l’incantation du développement durable ou de la (très louable dans ses intentions et très juste dans ses objectifs) recomposition de la ville sur elle-même. Ces idéologies sont sympathiques mais viennent justifier la restriction des capacités constructives périphériques par la seule voie réglementaire. Si cette option est prise sans contrepartie d’accroissement de l’offre immédiatement constructible elle ne peut qu’aggraver l’éparpillement observé, c’est à dire faire exactement le contraire du but visé. La vraie question à résoudre est la nature des contreparties à offrir aux communes (dont la qualité par la desserte en transport public le justifie) pour qu’elles acceptent d’avoir une croissance plus rapide que celle des autres communes. Cela suppose également que les groupements de communes d’agglomération, du moins certaines, soient géographiquement moins étriqués et que les procédures de planification ne soient que le point de départ de « contrats » entre toutes les institutions concernées par le développement. La loi CHEVENEMENT n'a pas vraiment intégré l'objectif de la loi SRU, et la loi VOYNET comporte les éléments attractifs qui manquent à la loi SRU. L'architecture de ces lois n'empêche certes pas un mode d'emploi local vertueux par les collectivités locales mais elle ne l'induit pas nécessairement. La décentralisation a eu lieu.

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SYNTHESE DE L’ANALYSE PAR ENTRETIENS

DE LA PERIURBANISATION A BREST

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1. L’évolution du rythme d’urbanisation (1975-1999) dans le pays de Brest, et le contexte institutionnel

Avant d’aborder l’analyse de la position des acteurs telle que nous l’avons recueillie à partir d’entretiens, nous rappellerons sommairement les grandes données du rythme d’urbanisation. Nous distinguerons les unités territoriales suivantes :

Variation annuelle de l’accroissement des résidences principales (occupées)

1975-1982 1982-1990 1990-1999 Brest commune 0,92 0,54 1,41 CUB sans Brest Ouest 9,55 4,29 1,92 CUB sans Brest Est 3,68 3,11 1,56 CC Iroise < 20 kms 4,45 3,38 2,27 CC Plabennec < 20 kms 4,71 1,96 1,77 CC Landivisiau < 20 kms 3,26 1,84 1,36 CC Iroise >20 km 1,77 1,51 1,65 CC Plabennec >20 kms 1,75 1,87 1,61 CC Lesneven > 20 kms 2,22 1,57 1,18 CC Landerneau > 20 kms 3,18 1,89 0,59 TOTAL 2,05 1,44 1,52

Le tableau d’ensemble évoque bien l’évolution d’une poussée (une vague) qui progressivement s’amortit, s’étale, et correspond à des taux qui s’uniformisent. Cette tendance à l’uniformisation des taux de croissance est un phénomène relativement général et il s’accompagne d’une tendance à l’amoindrissement des écarts des prix fonciers. Cet étalement du taux correspond à deux évolutions de fond très différentes qui se superposent : le réveil de la commune-centre, qui s’organise pour résister à l’évasion urbaine, et la première couronne qui, ayant pris la première vague de front, commence à modérer ses ambitions. Dans le cas de Brest, nous verrons comment cette évolution coïncide bien avec l’évolution de la politique de la communauté urbaine depuis trente ans. Une caractéristique de l’agglomération brestoise est de n’avoir, à côté de la commune de Brest, que des communes périurbaines. La fusion, en 1945, des quatre communes qui maintenant forment Brest lui a, en effet, donné l’espace nécessaire pour contenir sur son propre territoire l’essentiel de l’extension urbaine antérieure aux années 1970 et en particulier tous les collectifs (sociaux ou non) construits à cette époque. Quand la périurbanisation se manifesta au début de ces années 1970, elle fut accueillie comme une promesse de développement à ne pas gâcher. La fièvre de la reconstruction avait

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suscité un potentiel constructif qui trouva pour partie son emploi dans l’extension urbaine de la ville agglomérée (ZUP, ZAC, etc…) qui se confondait alors avec la commune de Brest, mais qui demandait encore et toujours à s’employer. Le Maire de cette période, Maître LOMBARD, qui fut à l’origine de la communauté urbaine, avait une vision que nous qualifierons volontiers « d’épique » du développement tant spatial qu’économique de Brest. A ce volontarisme s’opposait (de la part de l’opposition de gauche) une autre vision qui se voulait plus réaliste et plus proche des besoins du quotidien de ceux qui occupaient les quartiers déjà construits. C’est ainsi que la création de la communauté urbaine (qui avait été conçue comme une alliance de Brest et des sept communes qui la bordaient pour développer une politique de retenue de l’urbanisation sur son territoire) suscita très vite un conflit institutionnel1 majeur (avec la commune-centre) qui dura jusqu’en 1989 (la communauté urbaine avait été créée en 1974). Au centre du conflit, il y avait, outre la contestation des rôles de chacun, la question de la priorité à l’extension urbaine ou à la réparation urbaine. Le chiffre des recensements traduit ces évolutions avec une « hystérésis » propre à ce type de décisions. La période 1975-1982 voit donc une progression plus forte globalement sur la première couronne. Elle coïncide avec la première phase de la vie de la communauté urbaine mais reflète des décisions précédemment purement réfléchies (parallèlement au débat sur la création de la CUB), en particulier la création de la ZAC de la Cavale Blanche sur Brest et de la ZAC de Castel Névez sur Plouzané (où l’Etat a fortement pesé sur la décision). Ces deux opérations publiques contribuent pour l’une à compenser (statistiquement) la dédensification des quartiers anciens de Brest, pour l’autre à expliquer le « pic » de la construction dans les communes de la périphérie de la communauté urbaine (9,55 %). Mais nous observons que dans cette période les communes proches de la CUB, mais externes à celles-ci, connaissent aussi des taux élevés. Les résultats de la deuxième période, 1982-1990, résultent également pour une part des évolutions politiques antérieures. En 1977, la gauche prend la mairie de Brest (et la CUB) et donc rend opérationnelles surtout des opérations de réhabilitation qui ne peuvent pas prétendre avoir des impacts quantitatifs aussi nets qu’une politique d’extension urbaine. Elle perd les élections de 1983 mais la période ne se prête plus au volontarisme expansionniste. Nous avons donc un premier rapprochement des taux en périphérie pour une progression devenue très faible dans Brest. Les difficultés de l’opération de la Cavale Blanche à accueillir la demande attendue caractérisent cette période de révision des politiques antérieures. On renonce aux grands collectifs envisagés et le fait de vouloir vendre au coût réel du bilan de la ZAC les terrains en individuel freine la captation d’une demande davantage attirée par les prix de la périphérie.

1 Nous disons bien institutionnel, car de 1977 à 1989, les équipes majoritaires qui se succèdent tant à Brest que dans la CUB étaient de couleurs différentes.

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La troisième phase, 1990-1999, inaugure une nouvelle politique. En 1989, la gauche revient au pouvoir (et la guerre institutionnelle s’éteignit avec la nomination du maire du Brest comme président de la communauté urbaine), et très vite elle abandonne la politique des grandes opérations publiques qui lui paraît un gouffre sans fond. Elle préfère poursuivre sur Brest une double action marquée par le souci de faciliter l’ouverture des zones NA mais sans investissement foncier public préalable et par la politique des quartiers qui s’appuie surtout sur de la construction sociale en collectif (neuf ou réhabilité). Le résultat exceptionnel sur Brest (1,41 %) par rapport aux périodes antérieures résulte néanmoins aussi d’une autre raison : l’explosion universitaire qui mobilise « frénétiquement » les investisseurs privés si bien que très vite, l’explosion passée, la surproduction devient manifeste dans ce marché bien particulier. Parallèlement, l’attitude de la périphérie est devenue moins entreprenante dans les communes périphériques (de la CUB ou à l’extérieur de celle-ci mais en restant proche : moins de 20 kilomètres). Nous analyserons plus loin la position des acteurs mais la nouveauté de cette phase est que la communauté urbaine rejoint en quelque sorte le point de vue des communes périphériques la composant. Elle est d’autant plus motrice en matière d’extension urbaine qu’il s’agit du territoire brestois2. Brest craint les conséquences fiscales de l’hémorragie de sa population aisée, ce qui l’incite à encourager sur son territoire l’ouverture des zones NA mais parallèlement le marché l’oblige, pour pouvoir entreprendre les opérations de réhabilitation -le marché étant ce qu’il est-, à privilégier le social. Si Brest était une exception pour la période 1975-1990, dans l’ensemble des agglomérations françaises, elle l’est de moins en moins depuis, dans la mesure où le degré d’éparpillement de la périurbanisation, beaucoup plus faible autrefois qu’ailleurs, a maintenant tendance à s’accroître. La politique communautaire de départ procédait d’une vision volontariste et délibérément expansive. Cette vision a disparu, mais les visions communales qui maintenant prévalent n’en sont pas pour autant contradictoires. Il est probable que nous soyons dans une phase intermédiaire précédant (peut-être) une phase plus volontariste s’appuyant plus sur la périphérie de la CUB pour proposer une alternative à la périurbanisation lointaine tout en engageant des restructurations plus lourdes du parc social ou des quartiers anciens. Cette nouvelle vision, si elle émergeait, ne coïnciderait pas spontanément avec la somme des visions communales. En particulier, l’idée de canaliser la périurbanisation aux franges n’a pas de porteur naturel (il ne peut s’agir que d’un choix collectif volontariste) et c’est bien ce qui explique que Brest soit apparu (avec Dunkerque) comme une exception dans la diversité des situations françaises. L’intercommunalité reste une « alliance » entre acteurs locaux et la décentralisation n’a pas permis de prétendre faire partager par la seule conviction toutes les préoccupations du développement durable. Il y a encore besoin d’une négociation entre partenaires locaux et

2 Sans opération publique ni investissement foncier, ce qui limitait sa marge de manœuvre. Au surplus, elle arrive maintenant à épuisement des zones NA pas trop coûteuses.

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non locaux. Plus nous montons dans la hiérarchie institutionnelle, plus les enjeux se technicisent3, plus nous descendons, plus ils se politisent (selon une vision du politique qui devient micro-territoriale). La conscience des intérêts locaux alimente les attitudes politiques locales et celle des intérêts généraux, les administrations de niveau supérieur. Cela renvoie sans doute à l’histoire de nos institutions et ne se change évidemment pas en un jour. 2. Analyse de l’attitude des acteurs Nous tenterons ici de donner une interprétation globale des entretiens réalisés auprès d’un certain nombre de personnes, principalement de maires de communes périurbaines dans ou hors la CUB. Le déroulement de ces entretiens était organisé autour de trois séquences :

• Comment analysez-vous le processus de périurbanisation et son évolution dans le temps ?

• Quelle est la philosophie de votre POS et quel est votre pronostic ou votre souhait en matière de rythme futur d’urbanisation ?

• Quelle contrepartie demanderiez-vous pour hisser ce taux, si on vous le demandait ? Les réponses obtenues (voir compte-rendu détaillé ci-joint) sont d’une très grande homogénéité. Nous relaterons donc d’abord comment est construit le point de vue commun, avant d’évoquer les nuances qui peuvent parfois les colorer. • La position des communes périurbaines face à la périurbanisation Cette position commune est construite comme une position moyenne « équilibrée » entre deux périls opposés. Le premier péril est celui de l’isolement, de la fermeture identifiée au vieillissement sur place. L’acceptation principale de la périurbanisation répond par conséquent au souci d’avoir toujours des jeunes, de remplir l’école qui, sinon, devrait fermer ses classes (mais aussi les équipements), d’éviter la prise du pouvoir des retraités (le péril gris = moins actifs mais pas moins exigeants) et probablement aussi d’assurer les ressources fiscales supplémentaires4 sans pour autant majorer les investissements. Suivant les acteurs, on sent fréquemment une sorte d’obligation morale à respecter une demande extérieure à base économique. Nous pourrions résumer cette position de la façon

3 Sont portés par l’administration selon sa vision de l’intérêt public que les représentants politiques de la nation « modulent » plus souvent qu’ils n’inspirent mais en ayant l’inconvénient de s’enfermer dans des visions sectorielles. Si bien que, paradoxalement, c’est peut-être le local qui, malgré sa fragmentation territoriale, et parce que confronté aux effets de la transversalité des problèmes peut accéder à une nouvelle vision transversale des politiques à mettre en oeuvre. 4 Nous avons rencontré des maires qui pensaient qu’un ménage de plus coûtait plus à la commune qu’elle ne lui rapportait mais c’était l’exception.

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suivante : « nous n’avons pas le droit de bloquer la machine ». Si c’est là la préférence des gens, mais nous avons à faire valoir nos intérêts car ce sont eux les demandeurs. Or notre intérêt est de minimiser les risques financiers et politiques (c’est là le deuxième péril) et pour cela le régulateur, c’est le rythme de l’urbanisation. Les avantages attribués à cette modération dans l’intérêt des demandeurs sont de deux ordres :

• La taille du lotissement doit rester modique car le grand lotissement fait peur « Small is beautiful » se conjugue à toutes les échelles : la maison, le lotissement, la commune, etc…

• L’insertion dans la commune doit se faire « sans vague » ; cela suppose un dosage au fil du temps de la quantité de « nouveaux ».

Ce discours intègre les réactions supposées (et peut-être réelles) d’une opinion qui craindrait les chamboulements liés à un afflux excessif. Il y a une symétrie établie entre l’équilibre municipal et celui de chaque association. La nouveauté est désirable si son intensité ne fait pas prendre le risque d’une déstabilisation dans les équilibres relationnels préexistants. Il y a là l’idée qu’une société locale se construit dans la durée, réclame des « rites », doit surtout éviter de cristalliser des attitudes compromettant la cohésion du groupe. Il ne faut surtout pas que les règles (le juridique) du jeu prévalent sur la fabrication à chaud des consensus au travers des relations de face à face (l’inter-connaissance propre à l’univers rural). La taille et la lenteur de la croissance sont les deux secrets de la préservation d’un certain type de sociabilité. Celui qui vient de la ville, l’ « urbain », est à « recycler » pour qu’il apprenne qu’il est sur un territoire qui préexiste à sa venue. Accepter de l’accueillir ne lui donne pas d’emblée tous les droits, il aura à les mériter. Cette attitude existe aussi dans les quartiers urbains à ceci près que le filtre de la présence dans ce quartier est le marché immobilier sur lequel personne n’a prise. Là c’est plutôt le marché foncier mais chacun fait « comme si » il s’agissait d’une cooptation. Les lotissements communaux sont mieux vus que les lotissements privés parce qu’ils donnent justement l’impression d’avoir fait cette cooptation. Nous sommes dans un processus d’hybridation des sociabilités rurales et urbaines telles que chacun du moins les imagine. L’attitude vis-à-vis de la périurbanisation a évolué avec le temps des deux côtés. Il y a toujours dans le discours émis un avant et un après. L’avant (dans les années 1970), c’est la nouveauté du processus, le milieu rural qui est encore surpris d’intéresser les urbains, mais aussi des urbains pas très rôdés à la nouveauté de la situation, donc peu exigeants sur l’environnement de la maison. L’après, ce sont les leçons de l’apprentissage (y compris l’apprentissage du maire car ils se renouvellent peu) et en particulier les leçons tirées des observations dans les autres communes : l’impact sur les élections, sur les finances locales, etc… Côté demande, l’après, c’est la montée d’une plus grande attention aux facteurs environnant le logement, ce qui se répercute dans les communes par des stratégies variées traduisant une préoccupation ou non d’attirer ou de sélectionner, de filtrer les nouveaux

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venus. Nous rentrons dans des logiques fines de différenciations sociales qui une fois établies s’auto-entretiennent. La question scolaire apparaît centrale : quel gâchis de devoir construire des écoles puis de devoir fermer des classes ! Les variations des statistiques scolaires sont donc scrutées avec beaucoup d’attention et la moindre anomalie nourrit beaucoup d’hypothèses que l’on s’efforce de vérifier. Les autres équipements de superstructures5 –de type sportif ou socio-culturel- sont aussi évoqués comme une sorte de prolongement de l’univers de l’école. Ils sont réputés coûteux mais dit-on par ailleurs « on ne voit jamais assez grand ». Les équipements, supports de la vie associative, sont la fierté de la commune, le cœur du réseau de sociabilité dont la commune se considère l’animatrice. La « compétence municipale » se situe et se mesure dans ce champ qui est de fait l’encadrement public de la gestion du temps libre. Le périurbain se confond avec l’espace de la « résidentialité choisie », une autre ville, qui n’en est pas vraiment une, à côté de la ville agglomérée. • Les nuances spécifiques à certains acteurs ou territoires Ce discours commun est si prégnant et exprimé avec tant de conviction que l’enquêteur a parfois le sentiment que toutes les personnes qu’il interroge se sont données le mot… Et il est difficile de trouver beaucoup de différences. Elles existent mais ne remettent pas en cause le modèle global, au contraire…

• La dimension fantasmatico-politicienne du problème

Nous avons évoqué la notion de risque politique. Les acteurs en sont très conscients. La limite des 3 500 habitants qui correspond au seuil du scrutin de liste pour les élections municipales correspond à ce qui est vécu comme une mutation du rapport à la politique : le risque du passage de l’unanimisme aux divisions politiciennes pouvant faire la part belle aux « aventuriers » de toute sorte, l’idéologie pouvant venir justifier des actions qui, bien que « minoritaires », seraient jugées dans l’intérêt de tous par les seuls décideurs. La commune de Plouzané qui bascula à gauche en 1977 a fait référence et d’autres changements politiques ont par la suite confirmé le risque d’un taux trop rapide d’urbanisation pour le pouvoir en place. Cette conjoncture peut susciter une cristallisation de l’opposition à partir des réseaux associatifs, d’où l’importance de les contrôler. Cela a pu expliquer un ralentissement de l’urbanisation mais paradoxalement, nous constatons maintenant la prudence maximale chez ceux dont la couleur politique laisserait penser qu’ils mettraient toute leur énergie dans un développement à la fois conquérant et « partageux ».

5 Sans doute cela a été différent dans le passé mais le souci d’atteindre une taille critique permettant d’élargir la palette d’équipements ne semble plus un ressort affiché des raisons d’accueillir, même avec modération, les candidats à la périurbanisation.

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Face à l’opinion locale, les discours se sont presque inversés alors que les chiffres montrent des résultats très semblables du rythme d’urbanisation. Ceux-là qui doivent donner des gages sont les plus demandeurs de dossiers prospectifs (schémas de référence) qui prouveront enfin leur bonne foi quand ils affirment leur souci de modération vis-à-vis du rythme d’urbanisation. Le développement durable et plus généralement certains thèmes écologiques sont mobilisés par des opinions très diverses, soucieuses de cultiver leur jardin à l’abri des foules anonymes et dangereuses. Il y a une diabolisation d’un Brest « HLMisé » et paupérisé. Selon certains maires (en la circonstance, plutôt conservateurs), l’impact de la télévision a réussi à faire croire aux Français que chaque tour est un quartier des Minguettes en puissance, lieu promis un jour ou l’autre aux violences les moins prévisibles. Une commune avait la réputation d’avoir en quelque sorte choisi de privilégier l’agriculture sur la périurbanisation. Si dans le discours du maire, nous avons retrouvé ce thème, nous ne l’avons pas vu dans les résultats quantitatifs. Par contre, nous avons bien mesuré à quel point le langage de la DDE était partout adopté, qu’il s’agisse du « mitage » ou du « recentrage sur le bourg », principe de toutes les révisions du POS.

• Rythme et capacité d’urbanisation Nous avons pu constater que le choix du rythme d’urbanisation ne procédait pas d’une démarche collective (même dans la CUB). Le PLH se soucie quand il existe d’autres critères (logements sociaux en particulier), car pour le reste, le marché est supposé en décider. De plus, il n’y a pas de schéma directeur qui aurait pu justifier, légitimer des rythmes inégaux. Faute de références collectives, les acteurs se situent par rapport à deux critères principaux :

- Ouvrir à l’urbanisation sans ouvrir ni fermer de classes nouvelles ; - Prolonger ou non le rythme passé.

La position la plus courante, sauf exception, est de poursuivre le rythme passé si cela ne contraint pas à ouvrir de nouvelles classes. Les exceptions sont liées aux communes ayant eu un rythme antérieur un peu plus élevé. Il n’y a pas de communes disant qu’elles arrêteront leur urbanisation. En fait, elles avaient cru en 1993 (au moment du ralentissement de la construction) la source tarie et elles furent toutes favorablement surprises par le regain de la périurbanisation d’après 1996 et même quelquefois débordées car elles avaient, pour certaines, recalé les capacités de leur POS sur des rythmes plus faibles. Certains maires connaissent très précisément leur capacité d’urbanisation mais la plupart en ont une notion vague. Dans ce cas, ils considèrent que ce n’est pas un problème, il suffira de réviser le POS, sauf exception, ce n’est pas l’espace qui manque.

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L’horizon « pensable » communément admis du développement est la décennie. La bonne taille de la commune est presque toujours la population actuelle plus environ 10 à 20 %. Au-delà de cette période, on ne peut plus rien dire ni prévoir, et la conviction la plus courante est qu’à ce stade la périurbanisation sera achevée ou quasiment (cela ne peut durer indéfiniment, et si ça dure, aux autres de grossir, de toute façon, on en jugera quand on y sera). Ceci nous confirme bien que nous sommes dans un raisonnement qui s’élabore à partir d’une appréciation de type « tendanciel » et non à partir d’un souhait exprimé par rapport à un objectif ou une image finale.

• L’attitude face aux prix, à l’engagement public de l’urbanisation Concernant le marché foncier, nous observons deux attitudes différentes. L’une plus fréquente chez les maires les plus familiers des questions de gestion économique est d’expliquer le dérapage des prix par le défaut d’offre. Ceux-là souvent sont plus volontiers interventionnistes mais comme ils le disent sans excès. La formule des « PAE » leur convient assez bien. L’idée est de ne pas subventionner les opérations mais de répartir les charges et d’éviter le dérapage des prix. L’autre attitude est de se désoler de l’évolution des prix fonciers en l’imputant à la spéculation foncière donc aux appétits démesurés des propriétaires quand ce n’est pas à la solvabilité excessive de certains demandeurs (particuliers ou investisseurs) qui n’évaluent pas la conséquence pour les autres de l’acceptation de certains prix. La prise de conscience que les prix sont la résultante d’une attitude collective de leur part n’est même pas soupçonnée. L’existence de la « rente foncière », c’est-à-dire d’une composante des prix qui échappe à la reconnaissance d’un travail est interprétée comme si, de toute façon, le marché foncier est plus ou moins hors de la rationalité ; s’il y a en a une c’est celle de la demande, c’est-à-dire que les prix dépendraient surtout des clients, de ses possibilités eu égard à l’urgence pour le vendeur de devoir vendre le terrain mais pas de l’offre. Le point de vue le plus partagé concernant l’action publique est qu’elle n’a pas de légitimité que si elle a une finalité sociale (jusqu’à un certain point car beaucoup d’élus se sont plaints de devoir financer la charge foncière des logements sociaux). Sinon, il ne peut s’agir que d’une « avance ». Le raisonnement sur les coûts d’aménagement effectués à partir du seul échelon communal ne peut effectivement pas aboutir à autre chose puisque les autres dépenses concurrentes ne sont pas à ce niveau territorial.

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• A quelle condition hausser ponctuellement le rythme d’urbanisation ? La question n'a pas été systématiquement posée tant elle paraissait incongrue aux maires interrogés. L’idée d’une programmation issue d’une autre autorité différente de la leur est pour eux « inimaginable ». La difficulté de l’imaginer ne vient pas pour autant d’une volonté farouche de défendre des prérogatives menacées. Si la question ne se pose pas, c’est pour d’autres raisons. La première est l’abandon maintenant ancien des politiques publiques d’habitat d’extension urbaine ; de telles initiatives sont d’une autre époque et seulement capables de produire de l’« anonymat de masse ». Le lotissement communal n’a pas cette connotation négative à condition d’être soigné et de faible taille. Cela fait que pour les élus c’est le marché qui décide. Autrement dit, ils n’ont pas vraiment conscience que la somme de leurs comportements « filtrants » la demande suffise à susciter l’étalement. Les ménages périurbains qui vont particulièrement loin de Brest doivent avoir de bonnes raisons pour cela (des attaches, le goût pour ce secteur, etc…), ce n’est pas imputé au mécanisme du marché foncier, c’est-à-dire qu’il n’y a pas le sentiment d’une responsabilité collective dans le processus en cours. Pouvons-nous quelque chose si les gens fuient la ville ? A la rigueur, c’est à la ville de prendre les moyens de les retenir. Côté ville, le sentiment est inverse, c’est-à-dire que le sentiment partagé est de ne pouvoir résister à une compétition déloyale puisque les prix de la périphérie seront toujours moins élevés. La faible conscience de l’impact du prix des terrains tient aussi à sa très faible incidence sur le prix total de la construction. Le raisonnement consistant à proportionner prix du terrain (quitte à rogner sur la taille du lot) au prix de la construction est beaucoup mieux connu des professionnels montant les dossiers de prêts avec les particuliers que des élus, faute de données d’observations fines ou d’enquêtes de motivation, objectivement, les arbitrages effectués par les ménages. Les réponses obtenues à la question des « contreparties » renvoyaient donc toujours à l’idée d’une aide pour ne pas avoir à répercuter de contraintes financières sur des contribuables par ailleurs non demandeurs (financement de l’école, par exemple) d’une croissance démographique les amenant à partager le « paysage » qu’ils se sont plus ou moins approprié. La question de la disparité des taux de croissance de l’urbanisation n’est donc légitimable que si la collectivité de niveau supérieur, l’intercommunalité, a de bonnes raisons et si la commune-centre donne l’exemple. Le développement des transports collectifs sera peut-être jugé la bonne raison envisageable. Nous n’avons pas approfondi le problème mais nous pourrions imaginer une sorte d’engagement réciproque portant simultanément sur la qualité de la desserte en T.C., le

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rythme d’urbanisation, les objectifs en matière de logements sociaux et la prise en compte par l’intercommunalité des surcoûts en investissements d’équipements de superstructures due au rythme subi. Si les rythmes restent modérés, cela est envisageable et correspond assez bien à la représentation que les maires ont, au sein de la CUB au moins, du « pacte communautaire ». Cela formaliserait quelque chose suffisamment proche de ce qui a implicitement prévalu au cours de la première phase du développement communautaire (même si à cette époque, la commune-centre l’estimait très coûteux pour elle). L’initiative revient à la communauté et cela suppose qu’elle abandonne des logiques trop sectorielles au profit d’une négociation globale entre les territoires. Le rôle des transports collectifs comme « marqueurs » de la limite géographique de l’institution communautaire est fortement ressenti dans la communauté urbaine et beaucoup moins au-delà. Dans la CUB, beaucoup de communes ont une partie de leur urbanisation qui colle à Brest, donc peut prétendre bénéficier de la fréquence des lignes brestoises. De même, une partie de l’urbanisation hors CUB colle aux limites de la CUB. Chacun sait bien que ce qui justifie cette urbanisation est précisément d’abord la présence des transports collectifs. Les communes périphériques hors CUB interrogées sont réticentes à faire de la desserte en T.C. le point de départ d’une négociation de leur développement avec la CUB. Même si le bus est d’abord l’affaire des scolaires, les inconvénients de « faire le chauffeur » sont assez notoires pour les ménages pour que la qualité de la desserte en bus soit appréciée. Il y a là assurément la piste principale d’une démarche contractuelle interne à l’intercommunalité mais qui suppose de bien articuler entre eux divers secteurs de compétences. La fréquence des bus ne serait pas sans relation avec la taille démographique. Pour l’instant, le souci d’équité entre les communes périphériques n’en tient pas compte. En fait, cela suppose une ambition en matière du rôle des T.C. dans l’organisation urbaine qui ne s’identifie pas, comme actuellement, à la seule finalité sociale. Cette conception du rôle des T.C. ne peut que pérenniser l’idée d’un minimum égal pour tous, quelle que soit la répartition des densités et des masses démographiques. • Position de l’intercommunalité et des autres acteurs Nous l’avons évoqué implicitement tout au long des pages précédentes dans ses différentes dimensions.

• Historico-politique Dans la phase conflictuelle de son histoire, son projet était plus centré sur une retenue de la périurbanisation par des opérations publiques ou la libération des contraintes des communes périphériques à la communauté urbaine (les investissements d’infrastructures permettant à la commune de consacrer ses ressources aux équipements de superstructures). Ensuite, le projet communautaire s’identifie au projet brestois (réhabilitation, dimension sociale) mais cela correspond également à

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moins d’empressement des communes périphériques au sein de la CUB de se développer. • Idéologique Une certaine conception de la « bonne ville » comme étant la ville compacte et de la maison individuelle comme le comble de l’individualisme petit bourgeois a probablement à l’origine suscité des réticences. Mais l’exigence principale reste l’équité fiscale et la mesure en terme de coût d’investissement (compte-tenu d’une priorité accordée au « développement » par rapport à l’« aménagement ») surtout quand il n’y a pas de justification par une préoccupation d’ordre social.

La démarche politique entreprise au niveau du pays de Brest depuis 1995 a été l’occasion d’entamer un dialogue de la CUB avec la périphérie extérieure à la CUB. Ce dialogue a fait évoluer les esprits de part et d’autre : meilleure compréhension par la périphérie extérieure à la CUB des enjeux pour Brest des équilibres sociaux et fiscaux internes à la communauté urbaine ; meilleure compréhension de la part de la CUB que la situation actuelle résultait plus de sa propre attitude que de la « voracité » des communes périurbaines extérieures. Ce dialogue a bien fait émerger l’idée que le pacte intra-communautaire (le projet d’agglomération) ne pouvait être que très différent (et sur des thèmes bien distincts) du pacte interne aux groupements de communes à l’échelle du pays (charte de pays). La position des professionnels enquêtés ne contredit pas les résultats précédents, tout au plus les ont-elles un peu mieux éclairés. • La priorité accordée par la CUB au développement économique stricto sensu est perçue

par certains professionnels de l’aménagement comme une insuffisante prise en compte l’impact de l’aménagement sur le développement (image du centre-ville, importance d’un parc d’habitat de standing visible, etc…).

• Les professionnels de l’immobilier ne connaissent pas et comprennent encore moins bien les facteurs inclinant les élus à ouvrir ou non à l’urbanisation. Ils sont plus familiers des facteurs influant sur la localisation des ménages et confirment le pôle central du prix des terrains. Une politique foncière (avec prêt foncier à taux modéré) leur paraît envisageable mais ils remarquent qu’une harmonisation des différés de taxe foncière serait aussi une mesure cohérente avec un souci de recentrage de l’urbanisation.

Les représentants du mode agricole manifestent une évolution des esprits plus favorable qu’auparavant au « partage de l’espace", tout au moins au sein de la CUB; Tous ces "autres acteurs" nous confirment la forte perception, par eux-mêmes et par l'opinion, de la frontière administrative que représente la communauté urbaine et en quoi tout serait différent suivant que l'on se situe d'un côté ou de l'autre de cette limite.

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ANALYSE DU CAS DUNKERQUOIS

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La question centrale était d’expliquer pourquoi Dunkerque se détachait des autres agglomérations en 1990 en ce qui concerne le faible taux d’éparpillement de sa périurbanisation. Les réponses principales apportées ont été les suivantes : La principale est que le « séisme industriel » du début des années 1970 a été accompagné par une politique volontaire d’aménagement mise en place en même temps que la communauté urbaine, c’est-à-dire que, comme à Brest, la communauté urbaine « volontaire » avait été « faite pour ça ». Dunkerque constitue donc une illustration de la préoccupation portée par l’Etat à cette époque de combiner la réforme institutionnelle des collectivités et la mise en œuvre des nouvelles méthodes de planification urbaine et d’urbanisme opérationnel appuyée sur de vastes opérations publiques. Cette mise en place a nécessité un accord politique local (le Grand Dunkerque) dont un des artisans majeurs fut Monsieur DENVERS, Maire de Gravelines et Président de la Communauté Urbaine tout en étant d’un bord opposé à celui de la commune-centre (à cette époque). La situation exceptionnelle provoquée par « l’événement industriel » et la forte implication de l’Etat ont donc naturellement accéléré une évolution apparue incontournable qui réussit à susciter une mobilisation locale dépassant les clivages politiques. L’originalité de Dunkerque au sein de son agglomération est d’avoir (par rapport à d’autres agglomérations) un poids démographique relatif assez faible malgré la fusion de communes avec Malo-Les-Bains. Morphologiquement, nous avons une agglomération peu unifiée, c’est-à-dire une agrégation d’organisations urbaines fortement marquées par les spécificités propres à chaque commune. C’est ainsi que le poids de l’hypercentre dunkerquois est notoirement plus faible que celui trouvé ailleurs pour une agglomération de cette taille. Les projets en cours visent à rectifier cette situation. Cette configuration spatiale de Dunkerque rend compte d’un rapport centre/périphérie original qui rendait peut-être moins étonnant que la communauté urbaine ait été initialement beaucoup impulsée par la périphérie. Le développement urbain, rendu nécessaire par l’extension industrielle, se localisa en périphérie, là où les emplois s’implantaient, et venait ainsi conforter ce poids relatif de la périphérie.

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Le suivi de l’urbanisme dans la commune de Dunkerque resta longtemps l’affaire d’un élu Dunkerquois bien distinct (même s’il était coordonné) du rôle joué par un élu périphérique gérant les problèmes d’extension urbaine périphérique. L’homogénéisation politique de la majorité dans Dunkerque avec celle de la communauté urbaine permit de passer une nouvelle étape dans l’intégration des compétences communautaires. Cette homogénéisation correspondit aussi avec un nouvel intérêt pour un projet urbain soucieux de renforcer la centralité dunkerquoise (opération Neptune entre autre). La communauté urbaine fut donc l’instrument actif, surtout avant 1985, d’une politique volontariste d’extension urbaine privilégiant l’ouest de l’agglomération conformément à la localisation des emplois industriels. La tradition industrielle du Nord de toute façon n’avait pas d’autre modèle que celui de la proximité habitat-travail (lutter contre les avantages, pour l'employeur, du système de ramassage du personnel). Cela allait avec également un système de valeur partagé. Le parti d’aménagement du Schéma Directeur de 1974 ratifiait un souci de qualité urbaine, mais dans un concept d’aménagement qui correspondait aux idées de cette époque. C’est progressivement qu’une vision plus intégrée du fonctionnement urbain apparut préférable, mais elle transgressait les spécialisations sociales et fonctionnelles antérieures et réclamait une homogénéisation suffisante des colorations politiques. Cette spécialisation à l’ouest a amené à un fort déséquilibre des logements sociaux. Elle fait partie des corrections nécessaires pour éviter à l'avenir la non-maîtrise de processus de dévalorisation. Elle exige donc un parc locatif de qualité et plus généralement une diversification du parc qui évite de devoir choisir uniquement entre la ZUP et le périurbain. Cela exige de l’action foncière fine et une grande rigueur dans la stratégie « communautaire » d’une action nécessairement interventionniste pour contenir les démarches qui ne seraient conçues qu’à partir des points de vue communaux. La nouvelle autoroute, plus conçue comme une rocade urbaine que comme une autoroute interurbaine, risque d’impulser maintenant une périurbanisation jusqu’à présent d'autant mieux canalisée qu'elle n'était pas réalisée. Même reformatées, les opérations publiques ont toujours contribué à accueillir la majorité des logements supplémentaires. Les maisons individuelles ont toujours panaché la construction en collectif, et cela a suffit, au moins jusqu’en 1990 de façon

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flagrante, à (par rapport à d’autres agglomérations) modérer une périurbanisation plus lointaine. La politique envisagée pour l’avenir réclame d’autres moyens que ceux du passé (politique foncière, diversification du parc) et cela sera probablement complexe à monter. Le processus de croissance urbaine avec ses pics et ses phases atones a eu des incidences sur la structure d’habitat récente dans un contexte où les revenus étaient relativement faibles. Il semble avoir amplifié (par rapport à ailleurs) la propagation des processus de valorisation ou de dévalorisation. Cela explique sans doute maintenant la forte attention accordée aux actions privilégiant la réparation urbaine sur l’extension urbaine. Cet équilibre sera peut-être plus facile à maintenir si l’accroissement démographique reste mesuré.

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ELEMENTS DE SYNTHESE

ADEUS - STRASBOURG

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L'analyse de l'ensemble des entretiens confirme les hypothèses initiales, et apporte quelques points nouveaux : ♣ L'importance du phénomène de périurbanisation, sa pénétration, son intensité

(mesurée par les dires sur la demande en individuel non satisfaite) et l'inscription dans la durée du phénomène. En outre, il n'est pas mentionné de facteurs susceptibles de le limiter ou de l'encadrer, même si quelques interlocuteurs perçoivent les limites des pratiques actuelles.

♣ L'importance du rôle des élus ou plutôt, caractère déterminant de leur attitude. Ceci ressort "positivement" des rencontres avec les élus et, "négativement" (en creux ?) des discussions avec les techniciens.

♣ Le calibrage de l'offre foncière trouve ses sources : - par les éléments obtenus sur les attitudes des habitants qui renvoient aux clichés ordinaires sur le sujet. Dans les lotissements, les derniers arrivés "ferment la porte", et cherchent à empêcher de nouvelles extensions, - par le souci exprimé par la plupart des interlocuteurs de veiller à ne pas "saturer" la capacité d'intégration sociale au sein des communes, - enfin, par des préoccupations de bonne gestion des investissements dans les équipements publics et en particulier les écoles.

♣ Les mécanismes fonciers semblent eux aussi classiques : rétention généralisée du sol (si on peut se permettre ce genre de raccourci quand le mode d'action est réglementaire). Cette pseudo-politique foncière encadre-t-elle une propension, probablement variable selon les secteurs, à la vente des sols par les agriculteurs ? Sur ce point, l'emboîtement des mécaniques de fonctionnement du marché du sol agricole (vente/location) et du marché du terrain à bâtir (raréfaction par le réglementaire) est peut-être à expliciter davantage.

♣ Les mécanismes d'alimentation du phénomène, cités le plus souvent, et bien sûr plus à l'extérieur de celle-ci qu'à l'intérieur de la CUS, renvoient prioritairement à son rôle à travers deux éléments dont les effets se cumulent :

- la rétention foncière qu'elle pratiquerait (via l'action réglementaire) et qui empêcherait qu'elle fixe, dans ses limites, la demande en logement individuel, à des tarifs abordables, - l'image répulsive, et non gérée, que génèrent l'encombrement et les nuisances, un cadre de vie perçu comme dégradé d'abord, la concentration des "quartiers à problèmes" ensuite, les questions de sécurité, provoquant des réductions extrêmement fortes de ces phénomènes au logement collectif globalement, et du logement collectif au logement social.

♣ L'attitude parfaitement passive de la Communauté Urbaine de Strasbourg. Cette passivité semble avoir plusieurs sources (explications) :

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- La réduction de la ville à son centre, ce centre étant pensé comme lieu de formation et d'identification de sa bourgeoisie. Cette attitude, pérenne chez nombre de dirigeants strasbourgeois, confortée par les fortes valeurs culturelles et sociales de la ville et de la campagne peut expliquer le retard de la prise de conscience du phénomène de la périurbanisation, - les conditions ou les circonstances de sa création : elle est construite au départ sur la base des services techniques de la Ville de Strasbourg et sur la base de l'unanimité. Elle a pour but essentiel d'équiper et non de gérer du sol. - son positionnement (ou ce qui en a tenu lieu). Strasbourg et par assimilation la CUS, capitale non discutable de l'Alsace, adossée à une économie solide et assez largement diversifiée. Cette position a probablement occulté la nature et l'ampleur du phénomène. On peut risquer ici une hypothèse : l'arrivée en 1989 d'une équipe de gauche a sans doute contribué au maintien, voire à l'aggravation de cette occultation, en raison de l'état précaire ou pour le moins insatisfaisant du parc social de la CUS au moment même où "ses clients" ou usagers naturels avaient tendance à partir vers la périphérie.

♣ La périurbanisation des activités est réelle et semble motrice d'une périurbanisation de l'habitat dans quelques cas au moins. Il semble que ce phénomène "périurbanisation activités" est celui qui a mis le plus la CUS en alerte.

♣ Si la mobilité est évoquée comme élément facilitant la périurbanisation, on constate en même temps que nos interlocuteurs disent que :

- la politique routière récente du département n'a probablement pas été décisive, le réseau routier départemental étant dès le départ très dense, - ce qui revient à dire que la "consommation" des ressources "réseaux" est probablement plutôt liée aux modes de gestion (volontaristes ou par défaut, selon l'endroit) du sol qu'aux seules politiques de déplacements ou routières.

Dans l'ensemble, la situation observée semble devoir durer, même si des limites sont perçues à travers la saturation des systèmes de transports, et les déficits d'image trop importants de la CUS. Pour autant, il ne semble pas que la question de la solidarité, mise en avant par la loi SRU, puisse, en l'état, être prise en considération. Cependant, l'essentiel des interlocuteurs estime, au bout du compte, que la CUS oriente les phénomènes, que ces phénomènes produisent des effets qui lui sont parfois préjudiciables. Ils admettent également que ce rôle d'orientation devrait être investi de façon plus explicite, quitte à ce que cet investissement soit concerté ou négocié. Dans cette attente, les attitudes de départ de la ville dense vers des lieux "non denses", perdureront, de même que des refus catégoriques de densification, même faible, des lieux actuellement les moins denses.

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LES RAISONS INSTITUTIONNELLES

DE LA PERIURBANISATION

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A N N E X E S

Lettre de commande n° 00 MT 34 DRAST – Ministère des Transports

PREDIT 1996-2000

Ministère de l'Equipement, des Transports et du Logement PLAN URBANISME, CONSTRUCTION ET ARCHITECTURE

Lettre de commande n° F 0099 du 13 novembre 2000

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RESTITUTION DES ENTRETIENS DES ELUS ET DES TECHNICIENS Maires de : Bohars Monsieur BATAILLER (Crédit Agricole)

Bourg-Blanc Monsieur ANDRE (Cté agriculture de la CUB) Gouesnou Landerneau Monsieur OLLIVIER (lotisseur) Locmaria Plouzané Loperhet Milizac Plabennec Plougastel-Daoulas Plouzané Saint-Renan

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Maîtrise de la périurbanisation

Compte rendu de l'entretien avec le Maire de Bohars

12 SEPTEMBRE 2000

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1. Analyse du passé Pendant tout le temps de la forte croissance périurbaine, Bohars a eu une croissance modérée pour des raisons de refus d’être une commune dortoir et faute de pouvoir financer des équipements à la mesure de ce qu’une telle politique aurait nécessité. Cela a été la position communale jusqu’à la ZAC des années 80 qui a occasionné une progression de l’urbanisation un peu plus forte. Préserver le caractère de Bohars a été le souci des équipes successives (J. ROPARS l’incarnait sans doute le plus) et cela ne lui a pas mal réussi. Une préoccupation importante reste le financement des équipements qui, compte-tenu de notre faible importance, occasionne toujours des à-coups dans le budget. Nous n’avons pas certains équipements (exemple : salle polyvalente) malgré une vie associative très active. 2. Situation du POS Kérampir est notre réserve principale mais avant de la consommer, nous achèverons de remplir les petites zones NA que nous avons. Notre objectif est de remonter au-dessus des 3 500 habitants qu’un recensement partiel nous avait accordé et que le recensement de 1999 nous a repris… Cela représente 200 000 F de DGF. Mais au-delà de cet objectif, nous ne sommes pas pressés de consommer nos réserves pour les raisons précédemment évoquées. Il y a une pression de la demande bien réelle mais il y a aussi des prix fonciers quelque peu dissuasifs. L’opinion, si on l’écoutait, serait pour l’arrêt pur et simple de la construction. Si la CUB souhaite un effort du rythme d’urbanisation, nous sommes prêts à l’étudier et arrêterons notre position en fonction de ses conséquences, en particulier financières, pour la commune. Nous sommes en-dessous du seuil des logements sociaux bien que nous ayons participé d’une diversification du peuplement communal. Si la loi l’exige, nous augmenterons notre quota mais cela devra s’étudier avec la CUB (demande à l’Agence de disposer d’un schéma de référence).

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Maîtrise de la périurbanisation

Compte rendu de l'entretien avec le Maire de Bourg Blanc

23 SEPTEMBRE 2000

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1/ Histoire du processus Nous pouvons distinguer trois périodes :

• Les années 70-80 où la périurbanisation n’a pas été très organisée, mais bon an mal an, le rythme était autour de 20 logements nouveaux par an.

• La période de crise de la première partie de la décennie 90 (liée à la situation nationale).

• Une forte demande depuis 1995 et une stratégie communale plus affirmée.

Cette stratégie communale consiste à organiser l’offre de terrains pour lisser la progression du parc autour d’une moyenne située entre 15 et 20 logements. Cela correspond à un lotissement –généralement communal- ou une tranche de lotissement. Cette unité est la bonne pour les relations entre les nouveaux arrivants, et entre ceux-ci et la population déjà installée. La préoccupation majeure est celle de l’intégration des nouveaux ménages dans une population où chacun se connaît. En plus, cela stabilise les effectifs scolaires et les renouvelle. Cela nous amène à produire moins que la demande ne le permettrait. La demande nous paraît progressivement évoluer vers plus d’exigence. Pour la plupart, ils viennent de Brest, donc ont en matière de services ont une référence. Cela exige de nous mettre à niveau et cela explique que la demande s’adresse de façon privilégiée aux bourgs déjà un peu équipés. Le prix n’explique pas tout dans les comportements. Coat-Méal est moins cher mais moins attractif. En fait, le prix des lots varie peu, car quand le prix au m2 est plus faible, les gens en profitent pour agrandir le lot. Ici le lot est de 120 000 à 170 000 F pour une taille allant de 500 à 800 m2. Le lotissement privé que nous avons laissé faire n’était pas beaucoup plus cher (150 000 à 250 000 F) mais les lots variaient de 1 000 à 2 500 m2. Le luxe c’est l’espace. Notre politique a été plus prudente que celle des autres communes, par exemple, Plouvien, notre voisine, a dans la dernière décennie été beaucoup plus vite que nous. 2/ Situation du POS Le POS a été récemment révisé. Sa philosophie a été un rééquilibrage, au bénéfice du bourg, pour avoir les réserves nécessaires dans la décennie à venir, avec le rythme actuel. Pas de problème avec les agriculteurs. Si le rythme d’urbanisation s’est égalisé par rapport aux communes périphériques de la CUB, c’est parce que la périphérie de la CUB a freiné. 3/ Motivation : freiner/accélérer

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freiner : Premier objectif : « l’intégration », ne pas changer d’ordre de grandeur, de taille, ne pas changer de type de relations internes à la commune. Tout doit pouvoir se régler par le face à face au travers des rapports personnalisés. Minorer la charge d’équipements qu’impliquerait un rythme plus rapide. Accélérer :

- répondre aux besoins des jeunes (un peu de social), - rajeunir la population, lui permettre de se renouveler, - ne pas contrarier trop la demande puisqu’elle existe.

Cela justifie le rythme visé, mais la demande étant ce qu’elle est, ne justifie pas non plus d’investissement de la commune au profit des acquéreurs. La commune préfinance en visant l’équilibre financier à terme et cela suffit à contrarier le dérapage des prix. 4/ Préoccupation par rapport aux services publics

• Exemple : problème de La Poste qui ne remplace pas les personnes malades, ni adapte pas ses heures d’ouverture à la demande.

• La gendarmerie de Guilers à laquelle nous allons être rattachés, et on l’apprend par la presse, alors que nous ne sommes pas bien reliés.

• Autre question : en 2002, la déviation de Bourg Blanc, prévue par le Département, va mettre Bourg Blanc plus en concurrence avec le littoral Nord en matière d’urbanisation.

• Pas de problème en matière de car. Ce qui existe (Cars des Abers) suffit. On ne nous demande rien.

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Maîtrise de la périurbanisation

Compte rendu de l'entretien avec le Maire de Gouesnou

15 SEPTEMBRE 2000

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1. Analyse du passé Brest « manquait d’air » et la première vague de périurbanisation s’est faite sans trop d’exigence de l’environnement. L’essentiel était d’avoir la maison et le terrain pour pas trop cher, pas au prix brestois, le rapport était facilement au départ de 1 à 3 entre Gouesnou et Brest, ils sont maintenant presque identiques. La prise de conscience du coût du transport a certainement fini par calmer certaines ardeurs et même produire des recentrages. Mais par contre, les impôts locaux n’ont jamais été déterminants dans le comportement des accédants. La position privilégiée de Gouesnou est bien de réaliser une synthèse entre les avantages de la ville et la campagne. Il y a les équipements, le bus et l’accès à l’emploi, du coup, les prix se rapprochent. Les Maires antérieurs étaient peut-être plus prudents. Moi, j’ai souhaité favoriser l’urbanisation à un rythme intermédiaire : 40 logements par an pour sauvegarder le caractère de la commune. La pression de la demande a toujours été forte. J’ai toujours eu le souci de ne pas profiter du taux favorable de Taxe Professionnelle pour ne pas augmenter la Taxe d’Habitation, par prudence vis-à-vis de l’avenir. Maintenant les ménages sont plus exigeants et intègrent le contexte du logement dans leurs raisons de préférence de localisation. Cela explique que la demande en notre endroit contenue d’être toujours aussi forte. Il n’y a pas eu de résistance des agriculteurs. Kergaradec leur a donné la mesure des avantages qu’ils avaient à vendre. Mon projet est de garder une population diversifiée. Nous avons pas mal de cadres du Crédit Mutuel de Bretagne, la Vallée Verte, c’est un peu le peuplement que l’on retrouve à Bohars. La qualité de « l’environnement » est la clef de l’attractivité. 2. Position par rapport au POS Le POS compte encore pas mal de zones et quand il ne permettra plus le rythme actuel, il faudra élargir les nouvelles zones constructibles (NA). Je ne crois pas que le rythme d’urbanisation suscite des réactions négatives dans l’opinion communale. La seule crainte de l’opinion que je recueille concerne les logements sociaux (cf. la nouvelle loi). Il faudrait que la TV arrête de « diaboliser » la question du logement social. Je ne sens pas de dérapage des prix fonciers qui sont quelque fois (au bourg) proches de ceux de la périphérie brestoise. Sur le fond, nous ne pouvons refuser de satisfaire la demande d’habiter, simplement, il ne faut pas pour autant compromettre le caractère de la commune. Une chose qui ne paraît symptomatique, c’est l’attitude de Plabennec qui a fait sa zone d’activité seul (car la CUB a refusé de la brancher sur le réseau d’assainissement) puis a construit pour environ 400 personnes qui fréquentent les écoles de Gouesnou. Plabennec nous dédommage en coût de fonctionnement. Pourquoi sont-ils venu construire là ? Pour le bus qui fait la différence avec le centre-bourg de Plabennec.

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Maîtrise de la périurbanisation

Compte rendu de l'entretien avec le Maire de Landerneau

21 JUILLET 2000

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1. Interprétation de l’évolution passée La population de Landerneau stagne depuis 25 ans malgré une progression dans la même période de 34 % de son parc de résidences principales, et nous sommes là devant une situation classique pour une petite ville qui avait un parc ancien important dont le peuplement s’est déconcentré. Toutefois, il se pourrait que la délocalisation en 1977 du CMB ait convaincu les élus de l’époque que les besoins n’étaient plus là et donc jusqu’en 1989, il n’y a pas d’impulsion politique dans le sens d’une relance de l’urbanisation. Par contre ce dynamisme s’est manifesté dans les communes périphériques situées entre Brest et Landerneau. Au début, c’est plutôt Saint-Divy , Saint-Thonan et La Forest-Landerneau, situées au Nord de l’Elorn, qui ont joué la carte de leur position géographique puis ce fut plutôt le Sud de l’Elorn avec surtout Dirinon et Loperhet. Pas de résistance agricole notable. 2. Etat du POS, projets Le POS vient d’être révisé et réajusté. Le solde aboutit à une très légère diminution des espaces constructibles (moins de 10 ha). Sa philosophie est de donner priorité à la densification de la partie centrale, ce qui suppose une politique interventionniste. La ligne action foncière représente 1 MF, ce qui à l’échelle de Landerneau (15 000 habitants) est important. L’idée est de faire du collectif en panachant accession et locatif. Le rythme passé a été de 75 logements par an depuis 25 ans et c’est celui-là que nous essaierons de tenir, ce qui ne fait que compenser la dédensification des autres logements. J’aimerais faire plus mais la contrainte est financière. Pour relancer cette politique interventionniste sur la partie la plus dense de Landerneau, il a fallu aller chercher des opérateurs, en général privés. Mais la demande locative est réelle et pas seulement sociale. J’ai pu hisser depuis 1989 le taux de logements sociaux de 12 à 13,6 %. Nous avons une OPAH thématique spécialisée sur le recyclage des logements vacants (commerces et logements). Nous essayons d’être actifs sur l’extension urbaine mais en préférant jouer l’individuel groupé. Une opération s’inspirant des cottages britanniques est en préparation, j’espère qu’elle fera école. 3. Raisons de pousser l’urbanisation ou de la freiner. Landerneau a un problème de territoire, il est partiellement résolu du fait que Dirinon et Pencran, limitrophes, construisent en continuité de notre frontière. Les habitants de ces quartiers lisent notre magazine municipal, donc ils doivent se considérer un peu de Landerneau. Depuis longtemps, les communes collaborent pour financer des équipements de superstructures ou l’assainissement par le biais de conventions.

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Nos derniers espaces agricoles seront urbanisés et pour cela, il est vraisemblable que nous devions réviser le POS dans quelques années peut-être, avant la fin du prochain mandat, cela dépendra du rythme de consommation de nos réserves. Mais j’ai tenu à mettre la priorité sur la réhabilitation/densification des espaces centraux, ma philosophie étant que le bien-être social suppose un enracinement que l’on ne trouve pas dans la production urbanistique « de masse ». Ce qui nous freine est finalement les finances car nous voulons faire de la qualité et elle coûte nécessairement. A terme, nous engloberons la ZUP de kergréis, actuellement isolée, et la rattacherons au reste de la ville. Cela supposera d’urbaniser l’intervalle. 4. Quoi demander pour aller plus vite ? - D’abord revoir le financement du logement social. Devoir mettre 50 000 F par logement est

excessif. - Ensuite nous aider dans notre politique foncière. Nous pourrions faire beaucoup

plus si nous avions plus de moyens. 5. Loi SRU - Pas de désaccord avec la règle des 20 %. - Embêté de ne pouvoir lever le V.T. pour couvrir nos charges en T.C. Or la

communauté de communes ne peut devenir communauté d’agglomération car il manque 7 000 habitants pour atteindre les 50 000 habitants fatidiques. Les communes limitrophes ont refusé de s’associer à Landerneau pour les T.C. Un syndicat mixte départemental serait-il la solution ?

Remarque : Le Maire ne sait pas quelle population permet son POS. La préoccupation qualitative (forme de la ville, mixité, sentiment d’appartenance) l’emporte manifestement sur une approche strictement quantitative (répondre aux besoins) mais elles ne s’opposent pas obligatoirement. L’état antérieur de l’intercommunalité et l’absence de schéma directeur récent ne le favorisaient pas.

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Compte rendu de l'entretien

avec le Maire de LOCMARIA PLOUZANÉ

JUILLET 2000

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ANALYSE DE L'EVOLUTION PASSEE, EXPLICATION DE LA CROISSANCE DE LA COMMUNE, SITUATION ACTUELLE, AVANTAGES ET INCONVENIENTS. Depuis 1996, on assiste sur la commune à une véritable explosion de la construction individuelle alors que, pourtant, le POS qui a été modifié à cette période est actuellement beaucoup moins permissif que dans les années précédentes. La demande est visiblement très forte. Le maire ne trouve pas de raisons objectives à cette forte progression récente, si ce n'est l'attrait de la côte, et la volonté pour de nombreux ménages de quitter "la ville" (Brest et la C.U.B.). La municipalité actuelle dit chercher par son P.O.S. à contraindre beaucoup plus qu'auparavant l'urbanisation, notamment sur la bordure littorale, et à inciter à l'inverse la densification du bourg. Elle a souhaité encadrer, par les modifications du POS en 1996, l'urbanisation actuelle en limitant l'éparpillement, et affirme également vouloir mieux la gérer dans le temps (en ayant essentiellement transformé des zones NAH en 2NAH, lesquelles ne seront "débloquées qu'en cas d'extrême besoin, malgré la pression actuelle des professionnels de l'immobilier". La commune dit subir plus qu'elle n'encourage la construction neuve individuelle. Le Maire constate une progression des prix des terrains, surtout sur les deux dernières années, les prix pratiqués sur le littoral se répercutant par ailleurs aujourd'hui sur le bourg. Mais la collectivité n'a pas pour autant la volonté de maîtriser les prix fonciers. Elle n'en a en outre pas les moyens, compte-tenu de son niveau d'endettement actuel. Chercher à accueillir plus de ménages aujourd'hui sur Locmaria-Plouzané génèrerait plus de charges que cela ne rapporterait –par la fiscalité- à la commune. La commune (4300 habitants) est aujourd'hui à une taille critique (en deçà des 5000 habitants), ses commerces apparaissent insuffisants, ses équipements le deviennent petit à petit. Elle dispose de peu de marges de manœuvre pour se mettre au niveau des besoins de la population, et ne souhaite donc pas trop se développer. Elle est confrontée par ailleurs de plus en plus fréquemment à une "revendication" de la population –notamment les "néo-ruraux" arrivés récemment- de ne pas trop augmenter le nombre d'habitants dans la commune, afin de conserver son caractère, son ambiance, notamment au travers de la vie associative. De nombreux habitants récemment arrivés sur la commune s'avèrent de ce point de vue beaucoup plus exigeants que la vague d'urbanisation antérieure : exigences de qualité de vie et d'environnement essentiellement contre l'agriculture et ses inconvénients par exemple, ou contre de nouvelles constructions individuelles. Ils souhaitent par exemple que Locmaria ne ressemble surtout pas à Plouzané dont le développement urbain est jugé trop important, trop rapide et avec insuffisamment de cohérence et de convivialité dans ses formes. En termes de capacités d'urbanisation au travers du P.O.S., et compte-tenu du rythme actuel de la construction, la municipalité actuelle estime disposer d'un mandat de prévisions d'ouvertures de zones NA, ce qui lui apparaît en outre cohérent et compatible avec la pression de la population de maîtriser le développement de la commune. En conclusion : Locmaria-Plouzané apparaît clairement se situer à une étape charnière et quelque peu critique de son développement, avec une population proche de 5000

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habitants. Le Maire est très clairement face à un dilemme partagé entre répondre à la forte demande de constructions nouvelles sur la commune tout en encadrant certes leur localisation en densifiant le bourg et en freinant le développement anarchique passé de la bordure littorale –et les "revendications" croissantes d'une part de la population (notamment les plus récemment arrivés…) de fortement freiner, si ce n'est stopper l'accueil de nouveaux venus, de peur d'y perdre son caractère. A ce stade de développement de la commune, les commerces, les équipements parascolaires, sportifs et culturels sont tous arrivés à saturation mais la population actuelle est néanmoins insuffisante pour réellement permettre l'équilibre de nouveaux équipements (un nouveau restaurant scolaire est toutefois en construction et la supérette va passer à 500 m² ; l'équilibre de cette dernière apparaît néanmoins fragile). La commune dispose de très peu de marges de manœuvre. Dans ce contexte, de nouvelles marges de manœuvre peuvent-elles être introduites par de l'emploi nouveau ? Cela peut-il être pertinent au regard des autres zones d'activités du Pays de Brest, et plus particulièrement de la C.C.P.I. à laquelle appartient la commune ?

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Compte rendu de l'entretien avec le Maire de Loperhet

6 SEPTEMBRE 2000

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1. Analyse de l’évolution passée Nous pouvons reconstituer les phases du processus de la façon suivante :

• La pression périurbaine est bien apparue dans les années 1970 mais a pris de l’ampleur au milieu des années 1980.

• Cette accélération est le résultat du choix de la politique communale d’avoir une politique d’offre foncière au centre-bourg (ZAC) en combinant lotissements communal et privés. Si la moyenne de progression a été 75/99 de l’ordre de 30 logements par an, autour des années 1985, nous étions à 100 logements par an et cela a engendré un pic de demande scolaire (600 élèves) qui a disparu (autour de 500). Le lien entre construction neuve et effectif scolaire est étroit ; dès qu’elle fléchit, nous avons une inflexion dans la courbe de nos effectifs scolaires.

• Le succès de notre initiative s’explique évidemment d’abord globalement par notre situation géographique, plus que par des facteurs micro-locaux. Evidemment surtout au début du mouvement de périurbanisation, on a senti l’incidence par exemple de la proximité de certaines entreprises (exemple : Radar de Bretagne) mais un peu moins ensuite. Notre position géographique (voie express) mettait de l’espace pas cher à portée en temps d’une demande abondante, et si nous avons fait mieux que d’autres communes proches (dont certaines depuis se rattrapent, exemple : Dirinon), c’est sans doute parce que nous n’avons pas subi le processus mais que nous nous sommes efforcés à notre échelle de développer parallèlement habitat et équipement.

• Le contexte agricole a certainement été un facteur favorable Nous sommes dans un secteur où le foncier est très morcelé, avec beaucoup de petites exploitations avec à leur tête des personnes âgées (comme Plougastel, mais moins accentué). Il y a donc eu des opérations de regroupements qui laissaient toujours des terres disponibles pour la construction. La faiblesse des retraites agricoles créait donc les conditions telles que les agriculteurs étaient vendeurs. Le premier POS (des années 1980) le traduisait. Celui que nous venons d’adopter a cherché à réduire la dissémination des terrains constructibles autour d’un minimum de pôles et de ménager des espaces agricoles d’un seul tenant sans mitage (au Nord et au Sud du bourg, eu égard à la forme de la commune).

2. Situation du POS Nous venons d’adopter notre nouveau POS en 1999 et cette période de mise au point (2/3 ans) a certainement ralenti des décisions, donc le rythme d’urbanisation. Cette révision s’imposait du fait de la loi Littoral, et de la loi sur l’Eau. Nous attendons l’agrément par la station d’épuration que nous implantons au Sud du bourg. Cette décision conditionne le rythme futur d’urbanisation mais nous ne voyons pas pourquoi la Préfecture ne nous l’accorderait pas. Elle a été calibrée conformément au POS pour permettre une progression démographique à terme nous permettant de passer de 3 500 à 4 000 habitants dans les dix ans. Ce qui nous distingue peut-être des autres communes (en particulier de la CUB) c’est la taille des lots. Ils sont de 800 à 1 200 m2. Nous avons la population qui veut

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cette taille et, compte-tenu des prix et de leurs revenus, peut se la payer. Les capacités du POS permettent la poursuite du rythme passé et nous ne prétendons pas à plus. Nous nous demandons seulement si l’actuel dérapage des prix fonciers ne va pas éloigner la demande un peu plus loin. 3. Position sur le rythme d’urbanisation future souhaité Il y a bien sûr une réticence de l’opinion à une croissance même raisonnée de la commune. Ce sont soit les anciens qui ont naturellement une vision un peu conservatrice de la commune, soit des arrivés récents qui trouvent qu’avec eux on a fait le plein. Ils sont dans leur esprit un peu propriétaires du paysage qu’ils ont acheté avec leurs biens, donc pas prêts à le partager avec de nouveaux venus. C’est un point de vue que je juge indéfendable même si je ne prône pas une croissance à tout crin ? Nous n’avons pas défini notre POS avec cette perspective. Mais c’est vrai que l’accueil de population nouvelle est bénéfique à la gestion communale si elle reste mesurée, et de la sorte, ne remet pas en cause la nécessité d’accroître les infrastructures ou superstructures existantes. Maintenant que la Taxe Professionnelle Unique est intercommunale, la Taxe d’Habitation est bien notre ressource principale. Commentaire : La question de la contrepartie éventuelle à une croissance plus rapide n’a pas été abordée. Cela aurait amené la question du Pont de Plougastel et plus généralement, elle n’est pas venue naturellement. Il me semble que pour lui la principale justification d’une attitude offensive ne pourrait résulter que d’une pression manifeste du marché. Dans ce cas, il l’accompagnerait probablement. Dans tout l’entretien, j’ai eu l’impression que l’existence d’une demande, dans sa conception des choses (sans être exclusive d’autres considérations) légitimait de son point de vue sa politique d’accueil. On n’a pas le droit de refuser de satisfaire une « demande » dont l’intérêt économique local ne lui paraît pas contestable. Une partie de l’entretien, un peu hors sujet, a porté sur l’étonnement de ne pas avoir jusqu’à présent vu le triangle Brest-Landerneau-Daoulas (au centre duquel il est) décoller plus nettement économiquement. Le dynamisme se concentre en effet au Nord du triangle mais pas au Sud.

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Maîtrise de la périurbanisation

Compte rendu de l'entretien avec le Maire de Milizac

7 SEPTEMBRE 2000

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1. Analyse du passé Il y avait avant 1983 (moment où j’ai pris la Mairie) un processus du mitage auquel je me suis efforcé de remédier en faisant un POS plus restrictif. Ma préoccupation a été de faire revenir le prix des terrains constructibles non équipés à 30 F le m2, alors qu’il avait tendance à être le double à cette époque. Parallèlement la position de la population agricole a changé. Elle était plus âgée et plus prête à vendre de ce fait. Maintenant elle est plus sur la défensive vis-à-vis de la présence urbaine. Nous continuons actuellement à « payer » le laxisme de la première période (cf. nos problèmes actuels d’implantation de l’usine de traitement du lisier). Les nouveaux arrivants sont des cadres moyens comme beaucoup des ménages périurbains d’autres communes. Ils sont triés par leurs « revenus ». Si Milizac n’a pas connu un essor supérieur, c’est bien sûr parce que nous ne l’avons pas cherché sans pour autant avoir voulu l’empêcher. Une vingtaine de logements en moyenne par an pour notre taille c’est déjà beaucoup. Le fait que notre équipement scolaire (classes mobiles) était jusqu’à peu de temps vieillot et que nous soyons un peu à l’écart des grandes routes a peut-être aussi joué. Nous n’avons pas voulu faire en matière sociale plus que nos besoins propres (les jeunes) car nous ne pensons pas rendre service à ces populations que de vouloir les accueillir à tout prix (bus, coût du logement, etc…). « C’est une idée de technocrate cette histoire d’égaliser les proportions de logements sociaux ». Nous sentons depuis 18 mois un regain de la pression de la demande. 2. Situation du POS ET position face à l’avenir Le POS actuel a 60 hectares de réserve foncière constructible au bourg (zone NA). Au rythme actuel, cette situation est confortable (plus de 40 ans d’urbanisation). Si le marché le justifiait, le rythme actuel d’urbanisation pourrait s’accroître mais j’en prévois les inconvénients pour la commune. Nous avons en particulier un vaste réseau routier communal, des chemins ruraux dont l’entretien est à notre charge et qu’il faudrait traiter différemment si la commune devenait plus résidentielle. Il ne faudrait pas trop compter sur la communauté de communes (si cette compétence était transférée) qui elle ne s’intéresse qu’aux grands itinéraires. Si donc, pour une raison quelconque, il fallait urbaniser plus vite, il faudrait nous aider à en assumer les conséquences financières. Commentaire : Le projet du Maire est bien de conserver autant que possible le caractère de ruralité à sa commune et les arguments se subordonnent bien à cette vision centrale. Cela explique probablement le paradoxe de son raisonnement lui faisant associer baisse des prix fonciers et restriction de l’offre foncière. Il a plus généralement une position dubitative sur les avantages qu’il pourrait retirer de l’intercommunalité. S'il y avait des zones d’activités nouvelles ce sera pour les autres, pas pour lui en vertu de la hiérarchie existante entre plus grosses et plus petites communes. Il n’est pas opposé

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à « rendre du territoire » (Bohars, Saint-Renan) comme d’ailleurs cela s’est fait dans le passé pour aider les communes voisines à se développer plutôt que de devoir, lui, assumer une croissance peu souhaitée mais pas tout à fait refusée. Toujours cette notion de rythme optimal.

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Maîtrise de la périurbanisation

Compte rendu de l'entretien avec le Maire de Plabennec

24 JUILLET 2000

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Maîtrise de la périurbanisation

Compte rendu de l'entretien avec le Maire de Saint-Renan

20 JUILLET 2000

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1. Retour sur le passé, comment expliquer la croissance de Saint-Renan. Aurait-elle pu être supérieure, etc. Le développement de Saint-Renan est dû :

à sa position géographique (proximité de Brest et de ses équipements) à ses atouts propres qui sont surtout le bon niveau de service en équipement. La

clinique, l'hôpital rural, la maison de retraite ont joué un rôle important, ainsi que l'offre commerciale ou en services aux particuliers, les établissements scolaires, etc. C'est ainsi que Saint-Renan qui faisait 5 000 habitants en 1977 en fait maintenant environ 7 000. La taille de la ville et son peuplement lui vaut un milieu associatif très vivant. La demande d'habitat se diversifie et vise maintenant du locatif. Ce qui nous a fait entreprendre divers programmes. Nous avons 280 logements sociaux soit 12 % du parc. Nous prévoyons des petits programmes de réhabilitation dans le cœur de la ville en collectif (locatif.) Le développement aurait pu être supérieur nous avons dû modérer les demandes des propriétaires fonciers et remettre de l'ordre dans le POS pour mettre en cohérence le développement urbain et nos équipements d'infrastructure (réseaux.) Au début des années 90 nous avons réduit les espaces constructibles de 50 ha et transféré des espaces de U en NA. Il fallait en particulier réaliser la station d'épuration et le réseau d'assainissement de la commune et réaliser les équipements socioculturels. Actuellement il y a 300 logements en chantier ce qui est une pointe exceptionnelle mais la demande est forte. 2. Schématisation du POS actuel – Réserve d'urbanisation. Les zones NA que nous consommons progressivement représentent une capacité en population de 1 000 à 1 500 personnes, c'est à dire que Saint-Renan devrait pouvoir atteindre les 8 000 habitants. Si le rythme était celui de la période 75-99 cela représenterait 10 ans de consommation (500/50 = 10) mais ce rythme est un grand maximum. La contrainte n'est pas financière ni du côté de la demande mais du côté de l'opinion qui diabolise un changement de taille qui lui ferait perdre les avantages actuels de Saint-Renan. Cette opinion craint beaucoup le déversement de Brest (Pontanézen, avoir des cas sociaux, des gens qui cassent tout.) Nous devons rassurer la population et ne faire que des logements sociaux de qualités. Dans le passé 220 logements ressortent d'une intervention volontaire de la commune (lotissement communal.) Maintenant nous préférons la méthode du PAE qui permet de se faire rembourser nos préfinancements des réseaux. Le terrain se vend 55 à 60 F le m² avant équipement. 3. Arguments vis à vis du rythme d'urbanisation. Crainte de la sanction de l'opinion mais pas pour des raisons financières. Il y a toutefois un seuil lié à la capacité de la station d'épuration qui a coûté cher (16 MF) même si elle est subventionnée à 80 %. 4. A quelle condition aller plus vite ?

Ne peut l'imaginer … Pense que cela ressortirait d'une aide intercommunale pour payer les équipements

nécessaires mais préfèrerait que d'autres communes se développent Plouarzel ?

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Milizac ? Pour Milizac il s'étonne qu'elle ne progresse pas plus alors que sa position géographique est favorable.

Compte tenu de la taille de la commune serait gênant de devoir mordre sur les derniers terrains agricoles qu'il considère comme une ressource économique surtout si les serristes se développent.

Personne ne pousse à la croissance de l'habitat dans la population locale ni les commerçants ni les entreprises locales.

Beaucoup de particuliers cherchent du locatif de standing (Thomson, etc.) Autres commentaires

Favorable au partage de la TP bien que défavorable à Saint-Renan mais craint ses effets négatifs (moindre dynamisme pour attirer les activités.)

Attend encore beaucoup de l'amélioration des accès routiers à Brest. Sceptique sur l'utilité de développer les TC (clientèle faible.) Sensible à la non-fermeture des écoles, intérêt du locatif de ce point de vue.

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Maîtrise de la périurbanisation

Interview de :

- Monsieur BATAILLER (Crédit Agricole)

- Monsieur ANDRE (comité agriculture de la CUB)

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♦ Monsieur BATAILLER (Crédit Agricole) L’interview a surtout porté sur la vérification de notre analyse par des professionnels au contact de la demande. Par contre, leur manque de contact avec les Maires fait qu’ils n’approchent pas ce qui motive les élus en matière d’ouverture à l’urbanisation. Leur approche de la sensibilité de la demande à la localisation du terrain confirme l’importance du coût du terrain en balance évidemment avec l’accessibilité, les équipements, etc… Ils comptent : - Sur la petite taille des lotissements qui répond au souci de la convivialité

d’échapper au collectif horizontal ; ce qui renvoie aussi aux soucis d’intégration manifestés par les élus.

- Sur la taille des lots. Il n’y a pas que celui qui a moins d’argent qui va plus loin mais aussi celui qui donne priorité à l’espace.

- Sur la coupure CUB/hors CUB qui est toujours dans les esprits même si l’écart s’amenuise. CUB = plus cher mais il y a le bus.

Ensuite, la discussion a tourné autour du réalisme d’une politique foncière de la CUB. La crainte évidemment serait que la périphérie aligne ses prix. Une suggestion intéressante concernerait de pratiquer l’exonération de la taxe foncière ciblée sur des opérations concrètes (celles où la collectivité voudrait offrir une alternative à la périurbanisation en deuxième couronne) et des catégories de revenus. ♦ Monsieur ANDRE (Agriculture) Confirme la proximité culturelle croissante urbain/rural, le recul de ceux qui souhaitent s’isoler, tout en reconnaissant l’utilité d’être rigoureux dans le partage (mais le partage quand même du territoire). Le POS a servi l’agriculture de la multiplication des friches et le mélange urbain/rural est une promotion de l’agriculture au rang d’activité urbaine. Il y a eu rencontre des milieux, apprentissage réciproque (et c’est formidable !) à une cohabitation respectueuse des composantes de chacun. Chacun doit mettre du sien mais au bout, la ville périurbaine lui paraît un avantage pour autant les agriculteurs que les urbains périurbanisés. Et ça peut être lié à une proximité culturelle entre urbain et rural propre aux Bretons. Il manque d’éléments de comparaison. Il revendique même d’être de la ville. Il en est fier. Val Ouest : plusieurs unités plus petites auraient été préférables mais pas d'accord avec l’idée que ça stimule le productivisme agricole. Les retraités de l’agriculture se sentent chez eux dans la ville périurbaine (ex-bourg de Plouzané). Ils y ont leurs attaches.

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Interview de Monsieur OLLIVIER (lotisseur)

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L’entretien a porté sur la confirmation/infirmation de nos conclusions provisoires, et les principaux avis exprimés par Monsieur OLLIVIER sont les suivants : 1. Rôle prépondérant de la personnalité du Maire, de sa conception du

développement, de son projet communal implicite ou explicite. • Ouvert ou non au privé ; • Respecte le marché ou veut le contrarier ; • Veut sélectionner ou non sa population (par la taille des lots) ; • Craint ou non son opinion publique.

Points communs :

- ne pas dépasser le rythme exigeant des investissements scolaires ; - ne pas vider non plus les écoles. « Faire vivre la commune ».

2. Rôle moins important de l’intercommunalité. On sent que la CUB veut développer Brest plus que les communes périphériques de la CUB. Donc freiner la périphérie qui elle-même est inégalement entreprenante. Mais double handicap de Brest : X image globale X fiscalité Ce qui fait que la périphérie de la CUB va dépasser Brest en foncier !… Atout déterminant du bus de la CUB vis-à-vis du hors CUB. 3. Exigence croissante des ménages à tout point de vue, donc les « prestations

qualitatives deviennent plus vendables ». De plus les gens bougent et revendent. 4. Opinion vis-à-vis d’une politique foncière combinant :

X écart zone 2/zone 3 X prêt à taux zéro ciblé sur le foncier X allègements fiscaux liés aux revenus.

Oui ça marcherait, mais problème pour les petites communes privées de leur manne !… 5. Le temps prime : ¼ d’heure de Brest est la clé. De ce fait, certaines communes dans l’orbite de Landerneau, accueillent maintenant des Brestois.

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