Les Secrets de l Energie

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    'Mon opinion est qu'il ne faut rien ngliger dans un art quiintresse tout le monde"

    Hippocrate

    Le monde regorge de gurisseurs de toutes sortes, mi-mdecins,mi-mdiums, mi-savants. Beaucoup dpassent les conclusions

    scientifiques et peuvent prtendre la dfinition qu'Oscar Wildedonnait du pote : "Celui qui rpond des questions non encore

    poses".

    Christian H. Godefroy

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    Le Partage

    Pourquoi m'arrtez-vous ? demandai-je aux deux policiers entrs

    chez moi sept heures du matin pour m'intimer l'ordre de les suivre.Je ne pouvais me souvenir d'aucune peccadille susceptible

    d'attirer l'attention de la police. Craintif de nature, indiffrent ce quin'tait pas ma vie intrieure, soucieux de ne m'attirer de dmls avecquiconque, je mettais soigneusement des oeillres chaque matin. Maseule proccupation tait de satisfaire tout le monde en m'intgrant auschma que la socit m'avait fix une fois pour toutes.

    - Allez-vous m'expliquer ?

    - Expliquer ? C'est vous qui vous expliquerez tout l'heure, quand

    on vous interrogera.- Dites-moi au moins de quoi il s'agit.

    Ils haussrent ensemble leurs lourdes paules:

    - Suivez-nous et pas d'histoires.

    Nous marchions dans les rues, paisibles cette heure, moi entreeux, comme des camarades qui reviendraient d'une nuit bienemploye. J e remarquai, dans le ciel tonnamment clair, des branchesdpouilles qui s'y gravaient en profondeur, surpris de m'attacher aux

    arbres et la lumire alors qu'il semblait tre question de ma libert. Ilfallait ragir.

    - Regardez au moins qui vous arrtez, dis-je mes compagnons.Je suis la crme des citoyens, incapable de discuter un rglement.

    - Tous des petits saints, grommela mon bonhomme de droite, et iln'y a pas pire. Au moins, avec les vrais bandits on sait quoi s'entenir.

    - T'en fais pas, ructa son copain de gauche. Est-ce que le moutonnoir sait qu'il est noir ?

    J 'entendais l'cho de ces judicieuses paroles quand nous arrivmesau but. C'tait une longue pice grise tapisse de dossiers. Derrire unbureau gris, un homme tait install qui me parut incolore.

    - Alors me dit-il d'une voix sifflante, aprs avoir pris contact avecles deux policiers, il parat que vous ne savez mme pas de quoi ils'agit ?

    - Pas du tout, dis-je, mais vous allez me l'apprendre.

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    - Foutez-le au ballon, a lui rafrachira la mmoire.

    On me dlesta de ma cravate, de ma ceinture, de mes lacets et

    de mes objets personnels.Gestes rudes, paroles humiliantes, rancurs glaireuses, fade odeur

    de crasse dans le relent d'infamie, la cellule c'tait tout cela. "Cela"incomprhensible, inadmissible, mconnaissable dans une existencecomme la mienne.

    Assis croupetons sur l'inconfortable tabouret - on m'avaitprvenu qu'il tait interdit de s'tendre avant la nuit - la tte entre lesmains, je m'efforais de jauger l'imbcillit de cette affaire et le gchisqu'elle apporterait mon emploi du temps.

    Calcul facile et vite fait. Aprs quoi, dans le silence hostile, jevoulus penser. Peine perdue.

    Que se passait-il ? J e crus que l'exaspration tait la grandecoupable et me ridait la cervelle. Mais il me fallut dchanter. Si je metrouvais incapable de penser, c'tait parce que j'avais pris l'habitude delaisser l'environnement penser ma place. L'environnement,autrement dit l'vnement, les dsirs et les habitudes. En dehors de cecercle que restait-il ? Ni espace, ni temps, pas mme moi. Quelquechose d'autre avait pens ma place.

    Curieuse impression. Le monde se dissolvant contre les murs dema cellule, je me trouvais tout coup disponible pour un quelconquedevenir.

    J 'avais donc chemin jusqu' ce jour dans un couloir troit qui merassurait parce que je m'appuyais tantt un mur tantt l'autre. Cesmurailles je les concevais comme des soutiens. Et me voil soudaintransport sur une surface plane et obscure, comme un aveugle qui n'ajamais imagin le vaste ciel.

    Les heures se chevauchant toute lenteur me laissaientdsempar. Je les rduisais une hypertrophie du prsent.

    Enfin, vers le soir, la porte s'ouvrit, violemment lance par ungardien. Je bondis. Je ne supportais plus l'isolement.

    - Bougez pas ! dit-il. C'est pas pour vous. Laissez passer.

    Deux autres gardiens entrrent, tranant par les bras un hommevanoui, si grand et si fort qu'ils eurent de la peine le hisser sur lebat-flanc face au mien.

    - Il s'est drlement fait arranger, dit le gardien-chef. On le laisse

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    l, provisoire. Surveillez-le. S'il passe l'arme gauche, appelez ! Vousn'aurez qu' cogner la porte.

    La porte referme, comme un peu de lumire filtrait par leguichet, rejoignant la clart de la lucarne, j'en profitai pour examinerle bless. Son visage tumfi devait tre beau. Le sang coulait encored'une arcade sourcilire ouverte et des narines. Au coin des lvres unemousse rostre faisait de petites bulles.

    Il demeurait inconscient, peut-tre dans le coma. Je lui donnaisentre vingt-cinq et trente ans car ses cheveux blonds se dressaient druset abondants sur un front bas. Les paupires enfles faisaient auventau-dessus des yeux ferms et des crispations nerveuses dformaient cevisage comme des tics. Il y avait de la boue sur ses vtements dchirspar endroits, et jusque sur son visage. D'o je conclus qu'il sortaitd'une rixe de la rue. Il devait souffrir intensment car, dans soninconscience, il criait et gmissait sans arrt.

    Il mit prs d'une heure reprendre connaissance. Ses yeux nes'ouvraient toujours pas. Toutefois ses lvres remurent sans parvenir articuler une parole. Je me penchai sur lui, anxieux, essayant decomprendre, quand il se mit hurler comme un tortur en lanant satte de droite gauche comme pour se l'arracher du cou. Je lui pris latte deux mains pour la maintenir en place mais il hurla encore plusfort. Quand je le lchai, mes mains taient poisses d'un sang pais.

    Sa souffrance tait telle que j'en perdais le sens. Alors je me mis cogner de toutes mes forces contre la porte, avec mes poings d'abord,puis avec le tabouret, pour appeler le gardien.

    Personne ne venait. Il fallait pourtant soulager ce malheureux. Onne pouvait pas lui laisser passer la nuit ainsi. Ses hurlementss'enfonaient dans ma poitrine.

    Alors je rapprochai mon tabouret de son grabat, toucher soncorps de mes genoux, fixant intensment le beau visage ensanglant. Ilfaisait nuit prsent, si bien que, pour retrouver ce visage, je devais lerecrer dans mon imagination tel qu'il m'tait apparu tout l'heure. Lapiti que j'en prouvais m'unissait cet tre la faon d'un cble. Et jem'aperus qu'un nuage noir, plus tnbreux que l'obscurit, montait delui. Cette opacit devenait tangible: c'tait sa souffrance qui sematrialisait et m'atteignait.

    Je frais par respirer avec peine dans ce brouillard crasant. Malgrle tragique de l'instant, j'eus la sensation trs douce d'un "dj vcu".J 'avais dj connu cette identification avec la souffrance d'un autretre. Mais alors, terrass par ma douleur personnelle, j'avais t deuxfois vaincu. Tandis qu' prsent je voyais l'ennemi.

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    Un ennemi, on le combat. De quoi tait-il fait, celui-ci ? Autantdemander de quoi tait forme la souffrance qui faisait pantelerl'homme devant moi.

    Une souffrance, on le sait, est particulire chacun de nouscomme son visage. Seulement, le visage, ce n'est pas la forme qui lecaractrise mais l'expression. Par l je pouvais donc arriver uneprcision.

    Ce qui caractrisait la souffrance de ce bless, c'tait qu'elle l'avaitvid de son individualit. Arrt total d'une pense qui ne se manifestaitplus que par la douleur. A moins que ce ne ft une douleurparticulire.

    Je fus tent, puisque cette douleur tait le rsultat de coups et de

    blessures, de la situer dans les saignements et les ecchymoses. Erreur.Dans ce cas elle aurait t diffuse, alors que mon intuition ladistinguait sous l'apparence d'un nud atroce et compliqu,impitoyablement insr entre les deux yeux. Je percevais, sur ce pointprcis, une lourdeur minrale qui, si on ne l'extirpait pas tout de suite,se liqufierait en produit corrosif et amnerait forcment la mort.

    Le temps passait. L'aube commenait claircir l'atmosphre.Concentrant mon attention sur le front du bless, je dtectai, bien entreles sourcils, une dchirure des chairs en forme de triangle. La lame quiavait entam ce point dlicat surgit devant mes yeux. Aussitt je m'en

    emparai et la retournai contre moi. Mon front prouva la quintessencede la dchirure en sensation si aigu que j'en perdis conscience.

    Avais-je cri ? M'tais-je vanoui ? Mon front saignait-il ? Non,rien de tout cela, puisque mon intervention tait reste mentale. Jetouchai mon front plusieurs reprises. Il ne saignait pas. N'empcheque la petite blessure imaginaire qui m'avait rempli d'angoisse mesecouait comme un ciel d'orage.

    J 'tais entr de plein front dans le nuage qui s'tait form au-dessus du bless. Sa douleur, empreinte par une malfaisance, merpugnait prsent comme un animal d'ombre. J 'avais des frissons depeur et de dgot.

    Mais il n'tait pas question de cela. Si mon compagnon, crascomme il l'tait, ne pouvait se dfendre, je le pouvais, moi, pour deux.J 'tais fort, en parfaite sant, libre quand mme...

    Alors je pris ses deux mains saignantes entre les miennes et nosbras devinrent les membres d'un seul et mme tre: le combattant.Fixant sur le visage flou la plaie en triangle, je crus voir mon visages'y dcalquer.

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    J 'tais simplement devenu lui. J 'avais mal partout en crier. Maisje me rptais: "Je ne souffre pas, je me bats. Ce n'est pas moi quihalte, c'est lui en moi. Nous ne sommes pas deux prisonniers mais un

    prisonnier et un guerrier. Maintenant que je suis sa douleur, je doisdtacher cette douleur de nous deux. J 'y arriverai."

    Dans ce but, je forais ma vie personnelle remplir en totalitmon cerveau, mes penses, mes sensations, tout mon moi enfin. Cecime constitua une armure intrieure que je n'avais plus qu' dplacervers l'extrieur, ce que je ris. La douleur trangre tomba aussitt dema chair comme une peau morte.

    La bataille tait gagne. Le bless avait cess de gmir. Il dormaitpaisiblement. Moi j'tais heureux, en paradis. Une joie nouvelledbordait de mon corps comme une lumire.

    Quand la porte de la cellule s'ouvrit, j'eus l'impression dem'vader d'un rve.

    - On dirait qu'il va mieux, dit le gardien en se penchant sur lebless. Ce n'tait pas grave. Cette fois c'est pour vous qu'on vient.Suivez-moi !

    - Qu'allez-vous faire de lui ? demandai-je.

    - L'emmener l'infirmerie, bien sr. Hier soir il n'y avait plus deplace. Et ce qu'on va faire de vous, a ne vous intresse pas ?

    Je haussai les paules. Avant de suivre le gardien, je me tournaivers le bless pour le regarder une dernire fois.

    - Merci mon ami, mon enfant, mon frre, lui dis-je intrieurement.Tu ne sauras jamais qu'il te fallait endurer cette torture pour que, dansma vie sans but, je voie se lever une aube.

    - Vous avez compris que nous avions fait erreur, me dit lefonctionnaire qui m'accompagnait la grand'porte. Nous nousexcusons.

    Je ne rpondis pas. Il n'aurait pas compris que je lui prenne lesdeux mains pour le remercier.

    Je me sentais bien dans cette lumire neuve, car j'en faisais partiemaintenant, non plus en spectateur anonyme mais en tmoin intgr.Quelque chose d'indfinissable s'mouvait en moi, comme lorsqu'onentend de trs loin la musique d'un autre monde apporte par le vent.

    Je n'prouvais plus la ncessit d'tre quelqu'un de dfini parrapport quelque chose de prcis. J e marchais sans penser la route,

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    ivre d'une joie informule.

    L'immense vrit qui m'avait foudroy montait comme un Graal.

    C'tait bien cela: le contact avec le divin par la lutte contre le mal, laconception du partage humain enfin simplifie, une moiti del'humanit consumant de sa compassion la dsolation de l'autre moiti,la dlivrant de sa douleur et lui offrant ses forces...

    La piti, que l'on avait toujours considre comme une valeurstatique, manifestait une puissance incontestable. Prendre et donnerseraient les deux plateaux d'une mme balance, mue par la dcantationde la pense.

    En arrivant dans ma chambre, comme je m'tendais pour mereposer, j'ouvris machinalement un livre qui tranait sur ma table.

    Ce livre me parla. Il dit:

    "La notion de rvlation au sens o, brusquement, avec uneincroyable sret, une finesse indicible, quelque chose devient visible,audible, quelque chose qui nous branle et vous bouleverse jusqu'autrfonds, ne fait que dsigner l'tat de fait.

    On coute, on ne cherche pas, on accepte sans demander quidonne; comme un clair brille la pense... Un ravissement dontl'immense tension se rsout parfois en un flot de larmes... Un total"hors de soi" avec la conscience trs distincte d'un nombre infini defrissons subtils, de ruissellements qui descendent jusqu'aux orteils, uneprofondeur heureuse o le plus douloureux, le plus sombre ne fait pascontraste mais apparat comme conditionn, comme provoqu, commeune teinte ncessaire l'intrieur d'une telle surabondance de lumire:un instant de rapports rythmiques qui couvrent de vastes espaces deformes; l'extension, le besoin d'un rythme qui tout embrasse... Toutcela se passe de faon absolument involontaire mais comme dans unebourrasque de sentiment, de disponibilit, de libert, de puissance, dedivinit" (Nietzsche).

    Comment ne pas reconnatre la main de la destine ?

    Grce ce livre je sus que je ne me trompais pas, que ma journed'hier, sordide et rvoltante, avait t une naissance.

    Et l'homme que j'tais devenu, dcida quoi qu'il dt lui en coter,de se consacrer cette nouvelle naissance.

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    Naissance dun pouvoir

    Mais comme il est prudent de mesurer ses convictions celles

    d'autrui, je me confiai au Docteur V., mon ami de toujours.- Ne t'exalte pas, me dit-il. C'est entendu, tu as fait une

    dcouverte, et elle te donne l'impression d'un monde nouveau. Je neveux pas te dcourager. Pourtant, tout prendre, qu'as-tu dcouvert ?Une ralit vieille comme le monde: la puissance de l'altruisme.Conviens qu'il n'y a l rien de plus.

    - Rien de plus ? Ceci ne te suffit pas ? Moi je l'envisage commeun infini. Pour tout te dire, j'ai dcid de construire ma vie autour decette dcouverte.

    - Illusion ! On ne construit pas sa vie. Le gros uvre existe djquand on vient au monde. Bien sr, on peut diriger, contrler. Si tu ytiens vraiment, je te conseille de rester tout simplement disponible. Tun'as qu' rejeter les ides prconues, mme celles qui te paraissentmerger de ton "infini". C'est moins facile qu'on ne croit. Et d'abord...

    - D'abord quoi ?

    - Prouve-toi toi-mme que tu es la hauteur de ce destin.

    - Comment cela ?

    - Pour l'instant, mon avis, tu n'as rien de mieux fairequ'attendre la suite des vnements sans te monter la tte.

    - Attendre les vnements ? On me donne un phare et tu veux queje le mette sous le boisseau ?

    - Un phare ! Comme tu y vas ! Disons une lanterne. Ou unetorche pour te faire plaisir. On reparlera du phare quand il dominera lamer et balaiera l'espace de sa lumire pour guider les naufrags. Nousn'y sommes pas encore. Ne t'impatiente pas. Des naufrags, il y enaura toujours. J'en fais l'exprience.

    - Alors, mon exprience moi, tu n'y crois pas ?- Je crois la ralit que tu as ctoye et qui vit en toi.

    Je crois que "la science n'tant autre que la marche la dcouvertede l'Unit" (Vivekananda) nous nous retrouverons peut-tre au bout duchemin. Mais il te faudra pour cela obtenir d'autres aboutissementsincroyables d'o devra dcouler une mthode avec ses rgles, surlesquelles d'autres, non forms par toi, pourront se baser.

    - Tu teins tout avec ton scepticisme. Pourtant, en qualit de

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    docteur, tu devrais avoir accs la volupt de gurir.

    -Je la connais, n'en doute pas. Je suis mme convaincu que celui

    qui a, comme toi, une fois au moins dans sa vie et par n'importe quelmoyen, arrach et combattu sur lui-mme la souffrance d'autrui, celui-l a franchi des limites. Il est n un autre monde.

    - Voil ce que je voulais t'entendre dire. Veux-tu m'aider ?

    - Je t'aiderai. Attendons notre heure.

    La projection

    - J 'ai ton affaire, me dit mon ami, quelques jours plus tard. Une de

    mes malades doit tre ampute des mains la semaine prochaine. C'estune petite jeune fille de dix-huit ans, atteinte d'une gangrne dont nousne venons pas bout. Tu penses bien que tout a t essay. Tout...sauf ce qui n'est pas officiel, bien entendu. La petite a maintenant surles mains quatorze excoriations qui vont jusqu' l'os. Veux-tu essayerde la soigner ? Etant donnes nos relations, cela restera discret. J e nevois plus d'autre remde.

    - C'est toi, mdecin des hpitaux, qui me lances dans cetteaventure ? Tu sais pourtant que j'ignore tout, absolument tout dudomaine mdical. J e ne m'y suis jamais attaqu, mme par curiosit.

    Si c'est aussi grave que tu le dis !... Comment veux-tu que je m'yprenne ?

    - Tu as du fluide dans les mains. Sers-t-en.

    - Je n'ai jamais prtendu avoir du fluide. Le magntisme est unmtier.

    - Mais quand tu as soign ton bonhomme...

    - Je n'ai pas "soign mon bonhomme", comme tu dis. J 'ai euterriblement piti de lui et...

    - ...Et l'esprit frittant l'acte, tu as inconsciemment accumull'nergie qui pouvait se substituer la sienne. Il est donc superflud'employer les grands mots: fluide, magntisme. On ne t'en demandepas tant. N'as-tu pas piti de cette petite qui se prpare une vie atroce ?Fais pour elle ce que tu as fait pour le bonhomme, c'est--dire ce quetu pourras.

    - Aucun rapport.

    - C'est inou de penser que le mme individu qui se croyait

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    devenu un phare n'ose plus allumer sa lanterne. J e vais donc prciser:cette jeune fille souffre d'une carence vitale. Toi tu as de la vie revendre. Puisque tu sais irradier, dirige simplement ton irradiation sur

    les parties des chairs o le sang ne circule plus. Ce n'est pas sorcier ilme semble. Insuffle-lui des forces vives et ne t'occupe pas de savoirquel nom elles portent. Etant donns la jeunesse de cette petite et sondsir de vivre, tu verras que ces forces s'activeront en elle commes'active une greffe sur un organe sain. Tu as compris ?

    - J 'ai parfaitement compris mais je ne vois pas comment agir surune circulation sanguine dont j'ignore tout. Laisse-moi le temps de medocumenter.

    - Qui te parle de circulation sanguine et de documentation ? Dieu,que nous serions heureux, nous, les docteurs, si les gurisseursn'essayaient pas de comprendre ! A chacun son mtier. Depuis vingtans que je m'vertue rsoudre les problmes de la maladie, chaquejour me remet devant une nouvelle nigme. Non, ce que je veux de toi,c'est profiter de ta bienheureuse ignorance qui laisse libre cours l'intuition et libre l'instinct. J 'ai l'intention, comme tu peux l'imaginer,de surveiller quotidiennement ton travail, sans toutefois intervenir.Pour l'instant, il s'agit seulement de revigorer un courant vital dficientafin d'en rtablir l'quilibre. Aprs j'y pourvoirai. a ira tout seul.

    - Tout seul ? Tu en parles ton aise.

    -Je sais ce que je dis: phare ou lanterne, c'est une affaire entre toiet toi. Je te recommande la prudence. Ne te lance pas tte baisse. Faisdes essais afin de ne pas risquer d'erreur dans le maniement du fluide.

    - Explique-toi, docteur. Tu me parais plus savant que moi-mmeen cela.

    - Peut-tre. Ce qu'il faudra, tout d'abord, ce sera dterminerl'tendue et la densit du champ magntique de ta malade. Notrepatiente est si dvitalise que tu auras du mal y arriver. Ensuite, pourrgler les courants, je te conseille des ruses de Sioux sur le sentier dela guerre. Un fluide donn s'accorde ou ne s'accorde pas avec untemprament donn. C'est la mme histoire qu'avec le sang, sauf que,pour les fluides nous n'avons pas encore mis au point les procds deprhension et de vrification. Nous n'en sommes pas loin. Toutefois,pour l'instant, on ne peut compter que sur l'instinct du vitaliseur. Jesuis sr que ce travail ne prsentera pas de difficult pour toi.

    - J 'ai l'impression que ce "travail" te parait aussi normal-que defaire une piqre ou rdiger une ordonnance. Ce que, du reste, tu viensde faire verbalement.

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    - Encore plus normal que tu n'imagines. Les fluides semblentdous d'une meilleure intelligence que nous. Il faut les mettre, biensr, et que la pense les dirige. Mais il arrive que, mme laisss leur

    convenance, ils vont se fixer d'office au point o le corps en a besoincar ils sentent qu'ils y seront bien accueillis. Alors ! Tu es convaincu ?

    - Je rflchirai.

    - Parfait ! Dpche-toi car je serai l demain avec la petite, avantmon service l'hpital.

    J 'avoue avoir t boulevers par la proposition de mon ami. Nousnous connaissions depuis nos vingt ans et j'avais toujours prouvpour lui tant de l'admiration que du respect car il tait la foisexcellent mdecin et savant. En tant que savant son esprit fonctionnait

    longueur de temps la recherche de conceptions nouvelles. En tantque mdecin il n'avait jamais pu s'habituer comme le font tant d'autres, considrer sans malaise la souffrance de ses malades. Pour lui,l'annihilation de la douleur tait le devoir le plus strict et la fonctionindiscutable du respect de la Vie qu'il crivait avec un grand V.

    - Une porte n'est jamais seule s'ouvrir, m'avait-il dit enentendant mon rcit. Il y en a d'autres. Ne les manque pas. Le fluide jesavais que c'tait monnaie courante et que, plus ou moins, nous enavions tous. Les dernires expriences photographiques n'avaient-ellespas prouv que les mains des mdiums "mettaient des vibrations

    lumineuses en forme de flammes colores, brillantes et claires, tandisque celles des non-mdiums ne donnaient qu'une clart floue etchaotique" ?

    Etant donn que rien au monde n'avait pu me faire souponnerque j'tais mdium - tat dont je me sentais mille lieues - Je nevoyais pas pourquoi mes mains auraient eu une puissance gurisseuse.A moins que cette puissance ne ft la porte de tous...

    Je ne dormis gure cette nuit-l. Assis sur mon lit, j'appelais detoute mon me le secours d'intensit qui porte notre pense sonparoxysme. Mais, part l'agacement inutile des heures d'insomnie, jene pus me rappeler la moindre ide valable. Une seule rponse mesefforts: le vide.

    Mon ami arriva le lendemain matin, prcis comme une horloge. Ilfit passer devant lui une toute jeune fille blonde, au teint troptransparent, aux yeux d'un bleu d'enfance.

    Comme je l'engageais s'asseoir, il me dit prcipitamment:

    - Je suis trop press. J e vous laisse. J e reviendrai chercher la petite

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    aprs mon service.

    Je ne savais vraiment pas que dire cette enfant qui restait plante

    devant moi, muette de timidit, serrant contre sa jupe ses mainsbandes dont elle avait honte.

    - Le docteur vous a amene ici, lui dis-je, pour que j'essaie survous un traitement.., un peu spcial. Vous a-t-il expliqu ?

    - Il m'a seulement dit, Monsieur, que vous alliez me gurir sansme faire mal et que je redeviendrais comme avant. Je n'y croyais pasbeaucoup, il y a si longtemps que je suis malade ! Mais prsent queje vous ai vu, j'en suis sre. D'ailleurs, le docteur ne voudrait pas metromper. Il est si bon ! Je n'ai pas d'argent du tout, vous savez.

    - Aucune importance. Que faisiez-vous dans la vie jusqu' votremaladie ?

    -J 'ai commenc travailler trs jeune comme domestique, maisun jour je n'avais plus de forces. Et puis la maladie s'est dclare.

    -Je ferai de mon mieux pour vous aider. Si je n'y arrivais pas...

    - Oh ! Monsieur, si je ne peux pas gurir, je suis dcide ne pasaccepter de vivre. Une infirmire m'a dit qu'on devrait me couper lesmains. J 'allais me marier. Alors vous pensez bien...

    Elle hoquetait d'motion et je sentis qu'elle avait d pleurer jour etnuit depuis la terrible rvlation de l'infirmire. Elle n'avait pas encoreos me regarder en face.

    - Asseyez-vous, lui dis-je, essayez de vous dtendre. Soyez calme.Posez vos deux mains plat sur ce coussin.

    Nous tions face face, des deux cts d'une table troite.

    - Dois-je enlever mes pansements ?

    - Pas encore.

    Craignant que la ralit visible me dissimult la ralit profonde laquelle je voulais accder, je retardais le moment dcisif. Je mesentais inexpert et dnu d'intentions justes. Pour me donner unecontenance, j'tendis mes mains ouvertes une vingtaine decentimtres au-dessus des mains malades. Qu'attendais-je ? Mes mainsse glaaient. Etait-ce l'motion ?

    Pour emprunter l'troit chemin par lequel progressait l'aide autrui, une grande rigueur de direction tait indispensable. Or, larigueur n'est possible que si l'on se sent matre de l'acte accomplir.

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    Pourtant, bien observer, il me semblait vaguement que descourants lgers s'tablissaient dj entre mes mains et les mainsmalades. Sans doute tais-je victime de la fixation de l'effort, cette

    fixation qui renvoyait mon dsir comme un miroir.Quand mon ami revint, un simple coup dil lui fit comprendre

    que j'tais dsempar, prt me dsister. Aussi repartit-il en trombeaprs m'avoir cri:

    - Merci et excuse-moi. A demain !

    Le lendemain, j'tais bien dcid ne pas renouveler cettecomdie inutile. Ce renoncement m'humiliait, je l'avoue, non tantparce qu'il tait l'aveu d'une incapacit notoire, que parce qu'il merejetait hors du monde dont je m'tais propos de devenir un citoyen

    part entire.Si je n'avais pas os regarder les plaies de la jeune fille, c'est parce

    que je me les reprsentais en cauchemar. Elles accentueraient lepnible contraste avec le mince visage et les yeux si clairs.

    Assis dans mon jardin, j'essayais de dissoudre la lutte qui selivrait en moi. Mes penses me faisaient mal. Pour les chasser jevoulus m'en abstraire. Alors elles s'abmrent en un remous d'os'vaporaient galement l'attrait et le retrait. Ce remous, quim'entranait dans sa pesanteur, me remmora la solitude de la prison.

    Je tournais en rond, je voulus en sortir.Je relevai la tte: Le ciel banal, bleu avec des nuages blancs,

    m'offrit une surface transparente qui ressemblait - mais oui, quiressemblait de la joie. Comment exprimer l'inexprimable quim'envahit soudain ? Je le crus sans motif. Toutefois, cette joie, jerespirai aussi profondment que possible. J'en emplis mes poumons.Elle tait d'une qualit la fois sereine et lgre, constructive surtout.Et je sus, comme si on me l'avait cri, qu'elle devenait l'ennemie de laterrible gangrne, et qu'elle m'avait imbib pour que j'arrive vaincrece mal.

    Une heure plus tard, la jeune fille entrait:

    - Le docteur m'a laisse au bas de l'escalier. Je dois le retrouverdevant la porte dans une heure. Il passera me prendre en auto.

    Elle s'assit la mme place qu'hier sans attendre que je ly invite.Comme hier, elle posa ses deux mains bandes sur le coussin. Jerexaminai attentivement:

    - Qu'avez-vous ce matin ? Les traits tirs, les yeux cerns...Qu'est-ce qui se passe ?

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    - Oh ! Rien de spcial ! J 'ai pens cette nuit que je devais faire uneffort, moi aussi, pour aider.., quelque chose de difficile. Tenez !D'abord je vous ai apport toutes mes conomies dans ce sac. Ce n'est

    pas beaucoup, je sais, mais je complterai quand j'aurai repris montravail. Et puis, je voulais vous dire: cette nuit je ne me suis pascouche. J e suis reste genoux devant mon lit et j'ai pri tout letemps. Je ne savais rien faire d'autre. On dit qu'il faut donner quand onveut recevoir. Croyez-vous que cela nous aidera ?

    La gorge serre par tant de foi je ne rpondis pas. Mais unebrusque impulsion fit que je dgageai aussitt les mains de leurspansements. Elles apparurent longues, minces, les doigts dforms,gonfls de pus.

    - Ce n'est pas beau, n'est-ce pas ?

    Je continuais garder le silence. De ces jeunes mains proches dela pourriture montait un appel aussi net qu'un cri. Mes mains setendirent vers cet appel, s'y chauffrent comme une flamme. Despicotements, m'envahissant les doigts, gagnrent mes coudes sousforme d'lancements. Mes bras me firent mal au point que bientt cene fut plus supportable. Alors je retirai mes mains, fermai les yeux etpris une profonde aspiration. J'touffais, j'avais des vertiges.

    Quand je rouvris les yeux, la jeune fille plongea son regard dansle mien.

    - Oh ! Monsieur, dit-elle; comme vous m'avez fait du bien. jecrois que bientt je pourrai remuer les doigts.

    Quoi qu'il eu soit, reposez-vous aujourd'hui et dormez longtempscette nuit pour rattraper votre veille. Nous aurons beaucoup faireaux prochaines sances. Votre appel a t entendu.

    Nous avions, l'un et l'autre, envie de rire et de pleurer la fois.Quand retentit le klaxon du docteur, la petite m'embrassa sur les deuxjoues.

    - Comme si j'tais votre fille, me dit-elle.On ne pouvait mieux exprimer ni plus simplement la sensation

    d'union par le sang que donne la communication des fluides.

    Le rle de cet appel, qui s'tait avr indispensable pourdclencher le rsultat attendu, me hanta toute la soire.

    L'appel avait donc t l'lment de base ? Quoi d'tonnant cela ?N'est-ce pas l'appel qui dtermine, sous des apparences diverses, ladirection des trajectoires, la cohsion chimique, les transmissions

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    physiques comme biologiques, les combinaisons mathmatiques,musicales, etc. ?

    Il tait logique qu'aprs le violent assaut de la maladie, le corpstout entier, entrevoyant un espoir de gurison, se ft appuy sur sondsespoir pour jeter l'appel de dtresse.

    Ceci devait m'amener comprendre plus tard que, si les enfants etles animaux sont facilement gurissables, c'est parce qu'ils projettentd'instinct un appel l'aide que ne freinent ni les faux principes ni lesides prconues. Humble et direct, leur appel n'est entach d'aucunemfiance.

    Il y eut encore pour ma malade neuf sances conscutives, faitesd'autant d'esprance que de dception. Quand elle me dit un jour:

    - Regardez ! Mes phalanges se sont ouvertes. La peau a craqu.

    De fait, l'endroit des infections profondes, la peau prsentait delgres dchirures. Alors je projetai avec force sur ces ouvertures unfluide, non plus en pluie mais en rayons qui pntraient profondment.Ces rayons vibrrent comme les cordes d'un instrument. Aussitt, lesdoigts malades, demeurs presque inertes jusque l, mirent leur tourdes vibrations: lentes et lourdes au dbut, presque incontrlables, maiss'activant peu peu.

    Je regardai ma malade, plus blme que jamais, les dents serres,crispe pour lutter contre l'vanouissement.

    - J 'arrte, lui dis-je. Nous reprendrons demain.

    - Oh, non ! Je vous en prie, continuez, continuez !

    - Mais vous souffrez. Est-ce des mains ?

    - Pas des mains, de tout le corps. Comme si une fivre brlanteme creusait. Ca fait mal, trs mal. J e ne me rends pas comptepourquoi. Je sais seulement que c'est un bon mal. Quelque chose vachanger pour moi.

    Afin d'allger mon action, je soulevai mes mains au-dessus dessiennes, sans toutefois dplacer la direction des rayons. A ma grandesurprise, le pus monta des plaies et s'coula le long des doigts. Enaugmentant ou diminuant la puissance des rayons, je m'assurai que jen'tais pas victime d'une hallucination.

    Le pus obissait l'intensification. Ce n'tait pas une illusion. Lesplaies se vidaient par aspiration de fluide.

    Je ne sais comment se dfinit la beaut. Mais j'ose affirmer que

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    rien au monde ne me paraissait plus beau que ce fluide que j'pongeaisavec de la ouate.

    Quand mon ami vint ce jour-l, il nous trouva dans un dlire dejoie.

    - Qu'est-ce qui vous arrive ?

    - La partie est gagne, dis-je.

    Elle montra ses deux mains nues o ne subsistaient que quelquestranes jaunes.

    - J 'ai envie de danser, fit-elle, les yeux brillants.

    - Moi aussi, bien que je n'aie plus l'ge. Nous allons fter cette

    victoire, je vais chercher du champagne.- Doucement ! fit le docteur, toujours prudent. Ce n'est encore

    qu'un dbut de victoire. J 'ai nanmoins l'impression qu'une fois lesplaies compltement vides, elles se cicatriseront vite. Allons ! Donnequand mme ton champagne.

    Ce traitement, pourtant parfaitement russi, puisqu'il n'y eut pasde rechute, me laissa songeur.

    Un change de vitalit ?Le rsultat que j'avais obtenu au premier essai, sur le bless de la

    prison, je l'avais compris. C'tait clair: l'excs de souffrance de moncompagnon, multipli par nos conditions un peu spcialesd'immobilisation, de limitation d'espace, d'isolement dans lesquelsnous nous trouvions, avait dclench en moi une rvolte intrieure, undsir de combattre, de vaincre tout prix. D'o l'instinct avait dgagle procd d'change: "Tu souffres, tu es vaincu, je prends tasouffrance comme on prend dans la bataille la place d'un camaradebless, je m'attribue ton mal, je me bats pour toi et pour moi, aprs

    quoi je rejette ton mal qui ne m'tait pas destin".Dans ce cas particulier, ma responsabilit avait donc jou par voie

    de dcision. Ce que j'avais ralis, j'en pouvais aligner les motifs unpar un. Cela me rassurait. Tandis que, dans la gurison de la gangrne,il n'y avait eu aucun apport volontaire de ma part: ni physique, nimoral, ni psychique. Tout au contraire, je luttais contre la rpulsion etle dsir de fuir. Compte tenu de la piti que l'on prouve forcmentpour un tre jeune atteint en plein panouissement, je n'avais russi susciter en moi qu'une concession de principe.

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    Donc, le contact psychique ayant t nul, il me fallait reconnatreque le seul fluide de mes mains, indpendamment de tout autre apport,avait fait voluer la maladie.

    Autrement dit, la peau avait ractiv la peau. Ce qui m'ouvrait unnouvel horizon: le semblable vitalisant son semblable par recours lasimilitude.

    Ainsi la peau malade pouvait dire une peau saine: "Donne-moita vitalit", et lui en tracer le chemin. La peau saine fournissait alorsune mission d'nergie dont l'autre s'emparait.

    - Les dductions auxquelles tu te livres, pourraient tre pour toiune source de fortune. Puisque la peau agit par projection directe surla peau, ce ne te serait qu'un jeu de rgnrer les peaux marques par

    les soucis quotidiens. Quelques minutes de traitement de temps autreet furie la vieillesse avec ses rides. Qu'en dis-tu ?

    -Je t'avoue avoir dj fait quelques expriences de ce genre parcuriosit. Mais il y a mieux faire, tant donne la vitalit que cela mecoterait, que prendre la place d'une pommade. Sans compter que lachirurgie esthtique pare merveilleusement bien aux marques devieillesse. Toutefois on peut envisager...

    - Quoi donc ?

    - La jeunesse pourra tre volont rendue tous les visages dsque sera au point la machine, actuellement l'tude, qui permettrad'emmagasiner le fluide du vitaliseur et de le rpartir suivantncessit. Ds lors, n'importe quel vitaliseur pourra remplir lamachine, et nous verrons des camionnettes marques DON DUFLUIDE rouler derrire leurs anes qui affichent DON DU SANG.Le travail sera plus objectif, plus prcis.

    -Trs bien. Mais, en attendant, que comptes-tu faire ?

    - Etendre l'tude de l'influence des similitudes sur les diversorganes qui constituent le corps humain, et me rendre compte, sitt

    que l'occasion m'en sera donne, si un cur peut aider un cur, le foieun foie, les poumons des poumons.

    - De quelle faon puisque tout cela est interne ?

    - Par simple afflux mental de vitalit, projet, travers la pense,par l'organe sain l'organe ls, sous forme de don gratuit: le dond'altruisme.

    - Si jtais toi, me dit mon ami, je viserais moins haut. C'est ledocteur qui te parle maintenant. Tu risques duvrer dans le brouillard

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    et que cela te cote cher, tu peux m'en croire. Sans compter que je medemande quel fou pourrait prter foi cette forme d'utilisation de lavitalit ?

    Cela devrait me coter cher en effet, puisque le premier rsultatd'une recherche, mme dsintresse, est toujours dprci. Mon amine s'tait tromp que sur un point: le "fou" n'tait pas loin car ce futlui, en personne, qui m'appela.

    L intgration

    Mon ami avait une fille unique de vingt ans dont nous venions defter le mariage. Elle tait l'image du bonheur de vivre. Ses yeux verts

    faisaient penser aux regards dont on disait dans les contes de fesqu'ils brillaient comme des escarboucles. Je l'avais connue toute petiteet elle m'aimait presque autant que son pre. Aussi avais-je t, moiaussi, ce jour-l, invit pendre la crmaillre.

    Je souriais Reine qui se prodiguait, allant de l'un l'autre,offrant des rafrachissements. Mais, en la regardant mieux, quelquechose me gna dans son visage, comme une fausse sonorit intrieure.Je me frottai machinalement les yeux.

    - Qu'as-tu tout coup ? me demanda mon ami. Tu as changd'expression.

    - Ce n'est rien, dis-je, je t'expliquerai plus tard.

    Je chassai de mon esprit l'impression dsagrable. Reine avaitretrouv son clat.

    J 'avais dj entendu parler, sans m'y intresser vraiment, de cettetrange manifestation, peu de chose prs de mme nature que l'aura,qu'on appelle le "masque agissant". Il varie selon l'tat psychique del'tre dont il reprsente l'avenir proche. De mme que le son va moinsvite que la lumire et que le tonnerre vient aprs l'clair, quand nousamorons une ralisation dans notre existence, c'est aprs-coup. Nous"ralisons" ce qui a dj eu lieu. Autrement dit, nous vivons sur du"dj accompli".

    Le jour o je m'entretins de cela avec mon ami, il s'en irrita.

    - Tu fais de la schizophrnie, me dit-il. Moi j'ai beau regardervivre Reine, je ne peux en dduire qu'une chose: elle est heureuse.

    - Je suis sr que quelque chose d'inattendu la menace. L'aspectparticulier de son visage ne trompe pas.

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    - Que veux-tu qui la menace ? Un accident ?

    - Ou une maladie. Je ne sais pas encore.

    Impressionn quand mme par mon insistance, mon ami fit subir sa fille tout ce qu'a pu imaginer la mdecine comme radios, analyses,etc.

    - Elle est en parfaite sant, me dit-il enfin. C'est toi que je vaissoigner. Ce n'est pas tonnant que tu t'inquites. Reine vient dechanger de vie et cela dclenche certainement des bouleversements enelle. Du reste, depuis sa naissance tu l'as couve, t'affolant au moindrebobo. Avoue-le ! Tu as une imagination suspecte.

    Je ne protestai plus. Pourquoi faire ? Les mots sont lettre morte

    bien que faciles grouper pour convaincre. La vraie preuve de ce quel'on souponne sans parvenir le dmontrer, ne peut tre finalementfournie que par la vie. La vie, on la comprend ou on ne la comprendpas. Peu importe puisque, d'une faon ou d'une autre, elle s'impose tel titre qu'on ne peut plus discuter. Et, Dieu sait si elle rserved'tranges surprises aux sceptiques !

    Ne possdant aucune des donnes scientifiques qui tapissaient lecerveau de mon ami, je ne pouvais donc que m'en tenir l'irraisonnde l'intuition.

    Mme lorsque les tres voluaient en d'identiques occupationssociales, aux mmes couches de la socit, je les voyais, moi, semouvoir en des couches d'existences diffrentes. Car il y a unegnalogie de la vie comme des profondeurs du sol. Et, semblables ausol qui se transforme sans cesse, bien qu'insensiblement, sous nospieds, les tres se transformaient insensiblement aussi dans leurexistence sous-jacente. J 'aurais aim pouvoir indiquer chacun saminralogie psychique afin qu'il connt le point idal sur lequel ildevrait diriger son attention pour une parfaite harmonie.

    Il n'est rien au monde de plus obstin que le chercheurdsintress. Or, ce qui m'avait frapp sur la personne de Reine, et fait

    prsager un malheur, existait forcment chez les autres. Simplement,je ne l'avais pas remarqu parce que je n'y avais pas t sensibilis parexcs d'affection.

    Une attention ne pourrait que servir mes fins. Aussi me mlai-jependant des heures aux foules afin d'observer les gens sans qu'ils s'enaperoivent.

    Je remarquai alors que le "masque agissant" n'tait perceptibleque sur ceux dont l'tat moral ou physique se trouvait perturb.

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    Plac quelques millimtres du visage de chair pour lequel iljouait le rle de visage "avanc", il le rvlait totalement.

    Un visage normal pouvait camoufler son expression tandis que le"masque agissant", plus subtil, ne se pliait pas la volont de sonpersonnage. Manifestement il reprsentait le prototype de l'tre danssa vrit. Il tait le concentr du cur, du corps, de l'esprit, mme dela silhouette. De sorte qu'il en exprimait le devenir inluctable.

    Chez les inconscients, les inertes, les brutes, le masque restaitidentique au visage, coll en paisseur la chair. Il n'y ajoutait ni n'enretranchait rien.

    Tandis que chez les crbraux et les sensitifs, il se montrt souple,mallable, actif, et se maintenait un peu en avant du visage dont il

    transformait ou corrigeait l'expression lorsque les traits necorrespondaient plus la pense.

    Je pouvais donc partager mon classement en deux catgories: lesgens dont le "masque agissant" adhrait totalement la chair jusqu's'y confondre, donc y perdre son existence propre, et ceux,diamtralement opposs, o c'tait la chair qui s'vadt de sa lourdeurpour s'-unir l'tat fluidique du masque, capable de le reprsenter danssa valeur intrinsque.

    Comment protger un tre quand on ignore la nature du danger

    qui le menace ? Chaque fois que je revoyais Reine, son visage meparaissait plus flou et plus gris. Je ne savais pas qu'il me faudrait vivreencore des annes avant de connatre les divers moyens de protectionqu'on peut employer, tant contre un destin que contre de mauvaisesinfluences, pour soi et pour les autres.

    Le temps passait. La menace ne se concrtisait pas, Reine vivaitjoyeusement dans le scintillement de son bonheur tout neuf. Et je finispar me convaincre que j'avais t victime de mon imagination. Je neris donc plus la moindre allusion ce problme.

    Huit mois plus tard - il tait deux heures du matin - je vis arriver

    chez moi mon ami, si hagard, si boulevers que j'eus peine lereconnatre.

    - Reine, me dit-il en bgayant, Reine, elle est perdue. Tu avais vujuste avec la menace.

    - Un accident ?

    - Non, nous venions de dner tous ensemble hier soir quand elle aeu un brusque vomissement de sang que rien n'avait pu prvoir.L'hmoptysie a dur prs d'une heure. Aucun coagulant ne l'arrtait. Je

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    croyais devenir fou voir cette petite se vider ainsi.

    - Elle est l'hpital ?

    - On l'y a transporte d'urgence. Tu penses bien que rien n'a tpargn des mdications possibles. Mais elle est encore dans le coma.

    -Tu as demand une consultation ?

    - Le Professeur H. s'est drang en personne. Tu sais qu'il estnotre plus grand physiologiste. Il s'est emport contre moi, fou derage. Il m'a dit que Reine tait dans les conditions d'un grandtuberculeux jamais soign depuis dix ans.

    -Tu lui as montr les radios ?

    - Bien sr ! Et les tomos. Heureusement que tu m'avais oblig les faire.

    - Qu'a dit le Professeur ?

    - Il ne comprend plus. Il tudie le cas. Il ne m'a pas cach que celasort des normes habituelles. La vraie mdecine ne peut rien. Nousn'avons que des palliatifs.

    - La "vraie mdecine" ? dis-je, pensif.

    - Je suis sr que, toi, tu peux faire quelque chose. Nous sommes

    prts tout essayer. Je t'en supplie, sauve-la moi !- Puis-je venir avec toi l'hpital ?

    - Si tu veux. Son mari est auprs d'elle. Alors, pour l'amour duCiel, qu'il ne se doute de rien. S'il imaginait...

    - Que nous sommes prts la gurir par tous les moyens, il seraitscandalis ?

    - Peu importe. Viens.

    Reine tait tendue, raide et trs ple, sur ce lit d'hpital. J 'tais siboulevers que rien ne me vint l'esprit, dire ou faire. Je restais l,debout, prs d'elle, hbt sous les regards hostiles du mari.

    - Ne perdons pas de temps, dis-je mon ami, je lui serai plus utilede loin que de prs.

    - Le professeur H. dclare que si nous venions la garderseulement trois jours en vie, nous aurions franchi un cap. Essaie ! Ellet'aimait tant. Rappelle-toi: quand elle tait petite et qu'elle avait duchagrin elle n'acceptait que toi pour la consoler.

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    - Je donnerais volontiers ma vie pour elle, dis-je. Tiens-moi aucourant de la moindre fluctuation.

    Travail distance

    Une fois rentr chez moi, je fis ce que les prsences trangresm'avaient empch de faire. J e pris mentalement Reine dans mes braset lembrassai avec force comme lorsqu'elle tait petite. Puis je laremis sur son lit d'hpital et m'efforai de considrer son tatobjectivement.

    Son corps physique inanim se dissolvait dans ma mmoire maisje distinguais parfaitement son corps subtil, tout lan et transparence,

    l'innocence mme.Ma mditation fit de Reine un cristal de rsonance travers par

    une douceur fluide au got d'illimit, s'vaporant, se diluant, puisresserrant le contact.

    Je sus par l que l'nergie mise par mon affection pour Reineavait touch en elle un centre correspondant. J e lui dis alors, en touteintensit: "Vis de ma vie, petite bien- aime, et que mon souffle soitton souffle".

    Puis je tombai dans un sommeil sans fond.

    Je sortis de ce mystrieux sommeil dans un tat d'puisementtotal, comme si l'on m'avait vid moi-mme de mon sang. J 'eus peine la force d'atteindre le tlphone.

    - Tu dormais donc ? me dit mon ami scandalis. Je sonne depuisdix minutes.

    - Je n'entendais pas. Quelles sont les nouvelles ?

    - Elle est sortie du coma. Elle m'a parl. Elle a mme essay desourire. Elle ne souffre pas. Je te rappellerai tout l'heure.

    Il me fallut attendre le soir. La voix de mon ami tait peineaudible:

    - Elle a eu de nouvelles hmoptysies, extrmement violentes. Dix-sept dans la journe. J e ne l'ai pas quitte une seconde. L'hmoptysiese dclenche au moindre mouvement. La nuit est redouter.Immobilise-la mais sans qu'elle en prouve d'angoisse car elle sedbattrait. Toi-mme, ne t'endors pas ! Emmne-l dans le mondeauquel tu crois.

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    Puisque Reine avait senti mon affection, puisqu'elle tait djsortie du coma sur mes supplications, c'est qu'elle entendait le langagede ma pense.

    Je fixai mon attention sur sa pense jusqu' ce que je sentisse undclic extrmement lger prouvant que nous changions de terrain.

    Alors je dessinai mentalement dans son lit la forme exacte de soncorps, en suivant troitement sescontours. Puis je creusai la place dece corps comme font les enfants qui jouent au sable.

    Reine se tenait donc insre en quelque sorte cette place etentoure d'un relief. J e lui expliquai en pense que, si elle sortait de cerelief, ou si, mme, elle se mouvait l'intrieur, cela me ferait perdrele combat pour sa vie. Je lui ris jurer mentalement qu'elle garderait

    une immobilit de statue. Ce qu'elle fit.Je recommenai le soir suivant, de faon moins stricte. Le

    subconscient de Reine, s'tant pntr de l'importance de l'immobilit,obirait de lui-mme.

    La troisime nuit s'coula galement sans encombre. Reine et moitions parfaitement accords l'un l'autre.

    - Le danger imminent est conjur, me dit mon ami au tlphone.Nanmoins elle a encore beaucoup de peine respirer. L'inspirationdclenche des douleurs. Viens la voir, elle te rclame. Ds quelle seratransportable je l'enverrai en sana. J 'attends des rponses.

    Je prvoyais ce que donnerait ma visite Reine:

    - Ne me laisse pas partir, supplia-t-elle en s'accrochant ma main.Je ne veux pas tre loin de vous tous. Je serais trop malheureuse. Tun'as qu' me gurir ici.

    - Que dit ton mari ?

    - Il est affol et ne veut que ce que veulent les docteurs. J e nepartirai pas, je te le jure. Ou sinon, j'irai plus mal exprs.

    Aucun raisonnement ne prvalut contre cette obstination. Si bienque je proposai mon ami la chose suivante:

    - Donne-moi seulement trois semaines pour sortir Reine de cemauvais pas. Mais, jusque l, ne parle plus de dplacement. Si ellen'est pas gurie dans trois semaines partir d'aujourd'hui, jen'insisterai pas.

    - Que dirai-je au mari ? Il est jaloux et se mfie de toi comme dela peste.

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    - Dis-lui que Reine a choisi d'emble. C'est elle de dcider de sapropre vie. Trois semaines.

    -

    Elle a de profondes cavernes, une surtout, et un tas d'rosions,sans compter...

    - Fais faire des radios et des tomos ds maintenant. On les refera nouveau dans trois semaines. Cela te satisfait-il ?

    - Puisque tu dis que Reine y tient, je veux bien essayer. Mais jet'avertis que, tout de suite aprs...

    - Je me serai retir du jeu si je n'ai pas gagn.

    LintgrationDs cet instant, je me clotrai chez moi et mis une pancarte sur ma

    porte: ABSENT. EN VOYAGE. Personne ne me drangerait.

    Je voulais tter d'un procd qu'on nomme l'intgration, grceauquel un tre se substitue totalement un autre tre par identification.

    J 'avais tant observ le jeu des concordances dans les similitudesque je pouvais les affronter sans crainte. Mespoumons respireraientpour les poumons de Reine.

    En me concentrant fortement sur le corps en dtresse de ma petiteReine, je parvins tout d'abord reprer, puis voir nettement sespoumons malades. Je les distinguais bien mieux que sur les radios car,moi, je les voyais tels qu'ils taient, avec leur couleur. Tachs par lesrosions, et d'un aspect gris, ils pendaient comme deux grandes pochesflasques. J 'allais tout d'abord les revitaliser en les remplissant de monsouffle. Ensuite, je les ravauderais.

    Pendant des heures et des heures, mettant mentalement mespoumons dans le thorax de Reine, je respirai lentement, avec milleprcautions, pour viter la douleur, dosant soigneusement la lgret

    d'entre de l'air.Ce travail, que j'aurais cru facile, me devint bientt si pnible qu'il

    me sembla avoir un fer rouge dans la poitrine. N'y tenant plus, vers lesoir, je m'interrompis pour aller marcher un peu. Je me disais quej'avais quand mme aussi le droit de vivre.

    En rentrant chez moi j'entendis le tlphone:

    - Qu'est-ce qui se passe ? me disait mon ami. Depuis ta visite hier,Reine allait tellement mieux. Et voil que cette aprs-midi les

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    douleurs ont repris ainsi que les touffements. Peux-tu m'expliquer ?

    -Je me reposais. Ne t'inquite pas, je me remets tout de suite au

    travail.Le rythme des soins s'imposait de lui-mme. D'abord

    revitalisation, afin de fournir des rserves au corps. Puis intgration demes poumons sains afin que les poumons malades retrouventl'atmosphre du tonus indispensable, et, enfin, tissage fluidique pourrparer les muqueuses entames: ce que j'appelais le ravaudage.

    Pour la revitalisation, je projetais sur Reine le fluide s'chappantde mes mains tendues, paumes en avant, hauteur de sa poitrine. Jesavais par exprience que le rsultat serait immdiat et spectaculaire.Ensuite je respirais pour elle, la faon dj dcrite. Pour le

    ravaudage, j'installais en face de moi l'cran lumineux que m'avaitprt mon ami, sur lequel je pouvais prsenter et lire les radios.

    Je m'attaquai d'abord la caverne la plus importante.

    J 'en entourai les bords d'une ligne fluidique et je les "travaillai" unpeu comme un peintre travaille un trou qu'il faudra boucher sur la toilepour le rendre invisible.

    Cela me prit beaucoup de temps: des jours et des jours. Car il me.fallait sans cesse reprendre la revitalisation gnrale ainsi que lerythme artificiel de respiration.

    Enfin, un matin, je sentis que les bords de la caverne devenaientvivants. Je crus les voir onduler et j'intensifiai mon action. De jour enjour la muqueuse s'tendit sur la cavit jusqu' ce qu'il n'y restt plusqu'un point creux.

    Je ne sais combien d'autres plaies il y eut ainsi reboucher maisje terminai tout juste quand arriva le jour fatidique marquant la fin destrois semaines.

    - On refait les radios cette aprs-midi, me tlphona mon ami.Reine a pu se lever. Elle viendra te voir avec moi comme une grandefille. Mais je te prviens. Sa place est rserve au sana que j'avaiscontact. En principe, elle partira demain.

    - Avoue que tu n'as jamais eu vraiment confiance en moi.

    - Nous en reparlerons demain.

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    Plus de trace de lsions !

    Je ne pourrai pas prtendre avoir tranquillement attendu cette

    visite. Mon cur battait grands coups.Ils arrivrent, le pre soutenant la fille encore bien faible. J e serrai

    Reine dans mes bras sans oser poser de questions. Son pre, lui, selaissa lourdement tomber sur un fauteuil. Il gardait la tte baisse. J em'inquitai.

    - Dis vite ! Est-ce pire ?

    - Que de choses nous ignorons ! dit-il. On ne voit plus trace deslsions. Peut-tre peine une ombre de cicatrice l'endroit de lacaverne profonde. Le reste est lisse. Guri.

    Nous nous regardions, muets, avec l'envie mal dlimite de nousembrasser ou de nous battre. Ce fut Reine qui rompit le silence:

    - Qu'avez-vous tous les deux ? On dirait que vous avez vu unfantme. Papa m'avait dit que j'tais gurie, que je ne partirais pas ausana. Alors, ce n'tait pas vrai ?

    Vous n'avez pas l'air content.

    - Mais oui, petite Reine. Tu es gurie et c'est l'essentiel, tu asraison: ton pre est un peu inquiet parce que nous avons pch par la

    forme: un pch social. Tu comprendras tout cela plus tard.- Disons-nous au-revoir. Nous repartons tout de suite.

    J 'embrassai Reine et me tins sur le pas de la porte tandis qu'elledescendait l'escalier au bras de son pre. Arriv la dernire marche,celui-ci se retourna et remonta quatre quatre. Il me prit les deuxmains et me dit:

    - En toute hypothse, merci !

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    "La conqute d'une nouvelle connaissanceest comme un rapt de feu divin".

    Carl J ung

    Laccident

    Ce qui m'avait sembl tre un apport - plus encore : un lien avectous les autres - se rvla comme une cassure.

    J 'exasprais certainement mon entourage avec mon enthousiasme

    et mes dmonstrations. Mes amis m'vitrent et je leur en voulus dupeu d'attention qu'ils prtaient ma merveilleuse dcouverte. Jem'efforais de convaincre tout prix: "Ds que vous voyez quelqu'unsouffrir, vous pompez sa douleur. Si celle-ci rsiste, vous vousl'adjugez. Et le calme revient au malheureux, qu'il soit homme,femme, enfant ou animal. Quel bonheur !"

    - Tu es fou, me disait-on. Tu prends le mal sur toi.

    - Et aprs ? Quand le mal ne vous appartient pas en propre, ons'en dbarrasse facilement.

    On haussait les paules et l'on avait raison. Une souffrance, sur untre donn, n'est pas due au hasard. Elle a sa raison d'tre, souventprofonde, commande par un pass bien dfini et ordonnant lespossibilits d'avenir.

    - Quelle folie de vouloir se substituer la Providence ! disaientencore mes amis. Et quel orgueil !

    Ce n'tait pas de l'orgueil puisque je gardais soigneusementl'anonymat. Et je pensais, avec une ambitieuse envie, cet hommedont j'avais lu les souvenirs, qui, ne parvenant plus soulager enparticulier tous ceux qui venaient le supplier, les groupait et les

    gurissait en bloc.

    Donc la souffrance tait bien une entit presque indpendante del'individu qu'elle gouvernait. On pouvait la soumettre. Moins lapersonnalit d'un tre tait exceptionnelle et plus facile tait la tchecar cela intervenait alors par voie de classification.

    Jusqu' prsent je n'avais analys la souffrance physique que chezles autres. Je croyais la comprendre mais je restais en dehors.L'instinct seul m'avait inform. On ne conoit profondment que ce

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    que l'on a prouv soi-mme. J 'tais donc dans une impasse. Lesportes taient fermes. Je ne pouvais qu'attendre en patience lemoment o elles se rouvriraient.

    Ce fut le malheur qui les rouvrit.

    Un trs grave accident de la route, provoqu par une tiercepersonne, me priva de mouvements: fractures des vertbres cervicales,plaies la tte, paralysie partielle, etc.

    D'aprs les pronostics, la mort devait survenir d'un moment l'autre. J e l'attendais, elle ne vint pas. Non seulement elle ne me faisaitpas peur mais j'tais curieux de constater le changement d'tat qu'elleproduirait.

    De quoi aurais-je eu peur ? Je n'avais plus grand'chose perdre.Mon corps tait devenu une loque dont seule la proccupation tait des'empcher de hurler de douleur. C'tait cette loque qui prfiguraitdsormais pour moi l'univers. Matresse de la place, capricieuse endiable, elle commandait, feignait d'organiser pour mieux dsorganiseret supprimait ma vie intrieure sur laquelle elle avait pris la barre.

    Je souffrais comme un tortur. Mes rares rpits taient du rve ets'appelaient morphine. La douleur m'encerclait, m'asphyxiait, mebrisait les os. Elle avait repris son compte les supplices desbrodequins, du chevalet, de la roue, tout ce que !es hommes croient

    avoir invent pour le plaisir de leur cruaut.Elle ne me laissait pas souffler parce qu'elle savait bien que j'en

    aurais aussitt profit pour l'analyser et la combattre. Bien qu'on nepuisse agir la fois comme plaie et comme baume, j'aurais engag lalutte. Mais, la moindre vellit de rsistance, elle m'crasait.

    Devant un ennemi ce point impitoyable, il fallait user de ruse. Jeris ce que fait un insecte menac. J 'abondai dans son sens. Je fus "laflamme immobile" de l'attente.

    Pour sortir de l'attachement de ma chair lime fallait sortir de moi-

    mme, raliser une totale annihilation de ma personnalit. J'esprais,en me partageant carrment en deux, laisser d'un ct la loque qui jouret nuit se tordait de souffrance, et de l'autre garder intacte ma pense.Peine perdue, la loque tait la plus forte et elle en profitait.

    Docteurs et amis se relayaient mon chevet avec le maximum dedvouement, endoloris eux-mmes par l'inefficace piti qu'ilsprouvaient mon gard. Ils devaient penser - mais ils nel'avoueraient jamais - que je subissais tout bonnement le choc enretour des souffrances que j'avais cru vaincre.

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    Ce n'tait pas tout fait mon avis. La vengeance procde d'unesprit superficiel. Or, ce qui m'avait amen combattre, lors de mesexpriences, procdait d'une puissance bonne et suprieure.

    N'empche que je me posais la question: "Cette torture mnerait-elle au soleil ou l'clipse ?"

    Face mon lit une large baie ouvrait sur le jardin. Elle taitprolonge par une terrasse o je m'tendais souvent autrefois. La nuits'annonait tide bien que ce ft une nuit de Nol. Mes amis, mafamille, tout le monde tait parti. Seule la prsence de infirmiretroublait encore ma solitude.

    Je lui dclarai que je me sentais parfaitement bien et que jevoulais dormir, la suppliant d'aller se joindre aux clbrations.

    Heureuse de ce cong, elle partit son tour, m'assurant qu'ellereviendrait le lendemain matin, ds la premire heure.

    Tout aussitt l'espace s'agrandit. Je redevins un lment enpuissance, et le flux de ma vie se prcipita comme l'eau d'une riviredont on a t la digue.

    La lueur des toiles, que je n'avais pas remarque jusque l, entradans ma chambre, porteuse de mille penses informules.

    Toutefois le temps continuait de s'couler avec lourdeur et malibert retrouve me faisait plus dsesprment sentir le garrot del'immobilit force.

    Je sus avec prcision que, si je ne ragissais pas tout de suite, parn'importe quel moyen, un gouffre s'ouvrirait sous moi etm'absorberait.

    Etait-ce l'ide de ce gouffre qui intensifiait ma souffrance ? Uneintolrable douleur me poignarda, me projetant vers une fosseinvisible.

    Cette douleur, cette annihilation, cette pulvrisation du corps,cette fosse... Mais oui, cela m'tait familier, "dj vu". Je l'avais djressenti de la mme manire, la fois o un autre dsespoir cause d'unautre tre, m'avait vid le monde.

    J 'en conclus que l'intolrable douleur ne naissait pas directementde mon corps. Serait-elle "projete" par une force extrieure ?

    Sans aucun doute, les douleurs comme les joies, les heurts et lesharmonies prexistent dans notre orbe, crs en mme temps quenous, mal dlimits mais srement dtermins, la solution tant ctdu problme. Nous ne sommes donc pas ds vainqueurs ou des

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    vaincus. Nous sommes lucides ou pas.

    Je me trouvais, par l'effet de cette "intolrable douleur", devant un

    seuil dont elle tait le gardien. J 'en reconnaissais l'trange arrire-got.En effleurant mon cerveau douloureux, cette pense fit jaillir une

    timide tincelle qui brilla l'espace d'un quantime de seconde, viteteinte par un lancement aigu.

    Il devenait vident qu'un signal de dpart avait t donn.

    J 'aspirai l'air aussi profondment que je pus afin de dgager mapense des brumes. L'air n'entrait pas dans mes poumons. C'tait autrechose, c'tait la lueur de cette nuit.

    Entrer moi-mme dans cette lueur ! En sentir le contact, quoi qu'ildt m'en coter. La plaquer sur ma peau ! Je ne pouvais plus vivresans cela: mon dsir irraisonn tournait l'hypnose.

    Au temps du bonheur vcu, la chre voix si tendre me disait lesoir: "Viens ! Allons respirer les toiles. Ne nous privons pas de cettemerveille". Et nous nous tendions cte cte sur la terrasse, nosmains s'treignant dans le silence, cependant qu'au-dessus de nous laVoie Lacte tendait son vertige.

    Le son de cette voix retrouve me galvanisa. J e ne sus plus quij'tais ni le nom de ma maladie. Me tournant grand'peine, je me

    laissai glisser au bas de mon lit. Puis je rampai jusqu' la terrasse.Un incoercible dsir s'tant substitu la douleur, la paralysie de

    mon ct gauche ne faisait plus partie de mon corps. L'action venaitd'ailleurs. Comme le juge procde la reconstitution du crime, il mefallait reconstituer le bonheur perdu.

    Ayant atteint la terrasse, je parvins m'y mettre genoux enm'accrochant la rambarde. Beau rsultat ! Cela me fora seulement me rendre compte que ma tte, cause des fractures cervicales,demeurait baisse, menton viss contre ma poitrine comme par descrous. Regarder les toiles tait hors de question.

    Je devais, en toute bonne foi, m'avouer vaincu. Alors jem'croulai par terre, ananti, dans la pose force des prosternations,visage au sol sur lequel tombaient mes larmes. A chacun des sanglotsqui me secouaient une lame me transperait.

    Masse informe, engloutie par le malheur, qu'avais-je donccherch, espr qui m'et sauv de ce dchirement ? J 'tais lemollusque dont un enfant inconscient spare les membres et qui n'estplus que rtraction.

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    La dlivrance

    Alors, lger comme un duvet de souvenirs, le son familier de la

    voix tendre glissa dans ma chair:- Viens !

    Mon sang fut prcipit vers les puissances innommes qui nousrgissent et mon imploration jaillit en fuse:

    - Faites, oh faites que je puisse lever la tte vers les toiles et voirle ciel ! Dlivrez-moi pour que je boive sa lumire !

    Mon corps devint une transparence qui se mua en lgret. Je meredressai lentement et fus debout comme si un fer de lance me

    maintenait rigide.Mon visage se releva. Malgr ses blessures, mon cou l'entrana en

    arrire. Ce visage, je sus qu'en dpit de sa dtresse il ne refltait plusque l'ineffable douceur de la grce.

    Le temps qui passait rejoignait l'aube. Qu'il se prolonge, ce tempsbni, jusqu' mon dernier souffle. Les toiles s'taient effaces.Diffrentes, les forces de la terre m'investissaient.

    J 'tais un nud de ces forces. Et ce fut en traversant d'un pasassur la rgion surnaturelle que je retournai m'tendre dans mon lit.

    Entoure de lumire, l'action, quelle qu'elle soit, devient pierreprcieuse.

    Or, la lumire m'avait projet dans son illimit et transform encentre d'clatement. Elle serait la rponse toutes les interrogations, lagurison de toutes les blessures.

    Comment n'avais-je jamais pens cela ? Comment ne l'avais-jepas compris, n'en avais-je pas tenu compte ?

    C'tait trop simple. La lumire prodiguait ses richesses et je ne

    savais pas que c'taient des richesses parce que je n'avais jamais eul'occasion d'couter son langage.

    C'tait elle l'immensit dcouvrir. A projeter.

    L'itinraire tait trac : la mme route que prcdemment. Laprojection.

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    La lumire, force, vitalit, vie

    Les ondes lumineuses pouvaient se projeter au mme titre que les

    ondes magntiques et elles taient inpuisables. Mais ce qui mebouleversait, moi, c'tait de me dire que la pense pouvait les diriger.La pense toute-puissante, la pense qui nous fait jaillir hors de nous-mmes et traverser sans peine les milliers de kilomtres de notreespace.

    L'aspect visible nos yeux des ondes lumineuses n'taient-ce pasles couleurs ? Dcanter les rayons et s'en servir comme thrapeutique,de la mme faon qu'on se sert de la chromothrapie, voil quidevenait admirable.

    Ce qui me faciliterait le travail, c'est qu'on avait fait de moi un

    parfait cobaye. Pour l'occasion ce serait un cobaye heureux, ce quidevait tre rare. Car je groupais sur mon corps assez de maux pour quemes expriences fussent riches et varies.

    Aprs m'tre dment entran tenir bien en mains les rayonsrecherchs, je les essaierais sur moi-mme l'un aprs l'autre et noteraissoigneusement les ractions de ma chair. Je me doutais que les dbuts-qui pouvaient durer longtemps - seraient faits de ttonnements, defaux-pas et de dceptions, mais n'est-ce pas toujours ainsi ? Une seulerussite m'apprendrait que la route tait bonne.

    Je ne pouvais me dissimuler que, s'il tait dj important dediversifier, analyser et manier les rayons par la pense, laconnaissance de leur maniement tait encore plus essentielle.

    Pour les cas o l'tat gnral tait soigner, j'employai la lumirediffuse dans laquelle on pouvait plonger le malade. C'tait indiqudans les cas d'anmies, de fivre persistante, mais surtout lorsqu'ils'agissait de maladies mentales pour lesquelles l'environnement joueun rle primordial. J 'obtins des rsultats pour des malades habitant des centaines de kilomtres, qui ne m'avaient jamais vu et ne savaientpas qu'ils taient traits, bien qu'en gnral je me russe interdit

    quelque action que ce ft sans l'accord complet du malade - le maladesain d'esprit bien entendu.

    L'exprience qui avait forc ma confiance dans cettethrapeutique fut la rapide cicatrisation d'une plaie que mon accidentm'avait occasionne la tte.

    Les docteurs disaient qu'elle tait profonde et mesurait environsept centimtres. Elle n'avait pas t traite par ce que l'un d'entre eux,sage entre tous, avait dclar: "Laissons-le tranquille. Ajouter un iotade souffrance de plus l'excs qu'il endure serait le tuer. Attendons !"

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    La plus minime projection d'un rayon sur cette plaie mecontractait les mchoires et me faisait grincer des dents. Je les essayaipourtant, patiemment, avec prudence, l'un aprs l'autre. Quand j'en

    arrivai au violet, qui tait le dernier de ma liste, j'eus un sursaut et jevis que le rayon avait tourn au rouge. Il y avait donc une ractioncertaine.

    J 'essayai encore et recommenai encore et encore jusqu' ce quele rayon gardt sa couleur. Cela dura plusieurs jours dont je necomptai pas les heures.

    Quand je vis le rayon tourner au mauve je sus que 1 traitementtouchait son terme. La couleur s'claircissait et j'en arrivai un blanc peine iris.

    Alors je ris venir un coiffeur qui me lava et me coupa lescheveux. L'endroit de la plaie tait indolore quoique sensible. Elledevait rester sensible toute ma vie, prte se rveiller au moindrechoc.., ou la moindre pense.

    Car je dois dire que ce n'est pas seulement dans la Bible qu'onrisque de se trouver chang en statue de sel lorsqu'on se retourne pourconsidrer la catastrophe.

    Ma gurison se ralisa en un temps record. Deux mois plus tard jeme levai et repris le cours normal de la vie, marchant et gesticulant

    comme tout le monde.Mais capter la lumire, la dcanter, la rpartir suivant ncessit.

    Et puis m'en emplir pour mon propre panouissement comme font lesvgtaux, et la rayonner, l'exemple de certains minraux quirestituent dans les tnbres les clarts qu'ils ont absorbes au soleil,voil ce que serait ma vie dsormais.

    Avec la foi reconnaissante en l'infini du don.

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    Annexe de l'auteur

    Comment accder la Lumire

    Vous tes dans la lumire. Elle fait partie de votre existence. Ellevous est donne gratuitement tous et vous pouvez vous enaugmenter comme font les plantes pour activer leur croissance.

    Vous pouvez aussi l'absorber comme l'absorbent certainsminraux qui en restituent ensuite le rayonnement pendant la nuit.

    Car elle est la vie, le lien de fraternit entre tout ce qui existe surnotre plante, le vainqueur du mal, le secret du langage universel.

    Par elle nous sommes intgrs les uns aux autres. C'est la patrieunique, l'origine indiscutable de tout, le mythe sans mystre.

    Lumires et couleurs ont sur tout tre une influence prpondrantede vie et de mort.

    Malheureusement, ce qui nous est donn gratuitement: la lumire,le rayonnement, les vibrations et les divers magntismes, nous n'en

    faisons aucun cas: ignorance, mfiance, ides prconues, orgueil,nous barrent la route. Pourtant il y a encore, grce Dieu, pas mal degens qui font fi des barrires mentales, qui s'attachent approfondirces questions, et, finalement, osent puiser dans les trsors offerts leurbonne volont et leur comprhension.

    Tout individu possde en propre sa parcelle d'identit. Il est unmonde compos avec son ciel, ses lments divers, ses toiles, sonenvironnement. Sur tout cela, la lumire, qui, elle, est universelle ettotale, peut s'adapter chaque individu, se doser, se diluer ous'identifier. Elle se transforme selon l'individu qui la reoit. Donc tout

    lui est ouvert, tout lui est permis, dans le domaine de ceux qui lacomprennent et acceptent de s'en servir.

    Il n'est pas ncessaire de la rechercher ni de l'appeler. Elle est l.Elle s'offre. Elle sera diffrente selon le mode de chacun. Et celui quil'aura, une fois, admise en lui-mme se rendra compte qu'elle estdevenue lui-mme, mais avec plus de force et de dtermination, avecdes possibilits dmultiplies dans tous les domaines.

    Elle ne demandera pas l'individu de renoncer lui-mme. C'est

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    elle qui se mettra son service, avec cette sorte d'humilit que seulesconnaissent les formules exceptionnelles. Elle lui obira, et lui n'aurajamais l'amertume de douter, cause d'elle, de sa propre

    indpendance. La douceur du rgne de lumire aura aplani lesdifficults, amorti les chocs, favoris ses efforts.

    Etre sa propre lumire. Que peut-on imaginer de plus souhaitable?

    Le secret de la vitalit

    Le secret pour s'alimenter la lumire, le "Ssame ouvre-toi", estrelativement simple. Il suffit de s'entourer consciemment de la lumirenaturelle, c'est dire de celle qui nous est prodigue par le soleil, de

    vivre avec, d'y plonger, de la savourer, de l'intgrer notre moi.Le Rayon Mental Thrapeutique, auquel nous vous proposons de

    vous initier aujourd'hui, fait partie d'une des sciences les plus antiquesdu monde: la Science Solaire, rserve autrefois aux seuls initis.

    Cette science a t longtemps garde secrte dans les couventstibtains, interdits aux profanes. Les sages, qui la possdaient et lamaniaient, se montraient particulirement habiles dans l'art sacr deprvenir la souffrance et de gurir la maladie.

    Les rayons lumineux sont crateurs. La lumire reprsente

    manifestement l'Essence de la cration. Il suffit de s'identifier ellepour qu'elle vous concde tout ou partie de sa puissance. Elle estl'intense coordination, le lien suprme, puisque tout l'ensemble del'univers "se tient, est uni par des ondes".

    Ces sages qui dtiennent la Science Solaire, sont appels Matresde Lumire. Ils ont l'art d'absorber les luminosits et de les garder eneux pour les rpartir ensuite, suivant ncessit, par l'intermdiaire desrayons mentaux. Ce sont des virtuoses. Ils jouent de ces rayonscomme les musiciens jouent des notes. Du reste, ces rayons sontproches de la forme musicale, puisque les ondes projetes, lumineuses

    au lieu d'tre sonores, sont quand mme des ondes de prochecatgorie.

    Or, ces ondes, enregistres par qui veut s'en servir, subissentl'volution laquelle nous voulons vous initier. Etant purementmentales, elles agissent par linfluence de la pense.

    Newton disait dans son Optique: "Ne serait-il pas possible que lescorps et la lumire se transforment les uns dans les autres ? Et neserait-il pas possible que les corps reoivent la plus grande part de leurprincipe actif par les particules de lumire qui entrent dans leur

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    composition ?

    Cela tant admis, puisque la lumire est le plus actif des corps que

    nous connaissions, et puisque cette lumire fait partie de tous les corpscomposs par la nature, pourquoi ne serait-elle pas le principergissant toutes nos activits ?"

    Ne nous posons plus de questions. Acceptons le fait que lalumire soit "le principe rgissant toutes nos activits".

    Il est facile de s'en rendre compte. Facile n'est d'ailleurs pas lemot juste. Car n'est-il pas extrmement compliqu de croire ce qu'onne voit pas ? Que de gens ne voient tout simplement rien de ce quileur est montr ! Pourquoi ? Parce qu'ils ne regardent pas.

    On observe cela en cours de voyage. Les gens qui sont en autoregardent en gnral l'intrieur de leur auto, moins qu'ils ne se fixentsur les kilomtres que mange la route. Dans les trains, c'est pareil.Sans parler de l'avion qui commence s'assimiler un salon ferm.

    Si vous voulez vivre inconsciemment dans la lumire, quellequ'elle soit, elle vous demeurera extrieure. Entre vous et elle il n'yaura pas de lien vritable. Pour qu'elle entre en vous, pour que vous enfassiez partie, pour que vous fassiez vtre ses vibrations, il vous seraindispensable de vous unir elle, d'en prendre conscience; defusionner avec elle.

    Vous verrez comme cette attitude change tout. D'autorit, cesondes vibratoires s'agrgeront vos propres vibrations, vous assurantleur protection et dmultipliant votre puissance en bien des cas.

    Vous ne croyez pas, bien sr, parce que vous trouvez que cespropos ne sont pas ralistes. C'est entendu.

    De toutes faons, l'espace conqurir est immense, pour ne pasdire infini. Car, avec la meilleure volont, nous ne captons qu'uneinfime partie tant des ondes qui subsistent dans tous les corps, que durayonnement qu'elles mettent.

    Savez-vous qu'on peut, jusque dans les plus basses ralits, "fairepasser comme on veut le flux vital auquel rien n'est impossible" ?

    Car la lumire est un lment particulirement vivant. Vivant, nonseulement physiologiquement, mais aussi psychiquement etspirituellement.

    Quand vous saurez manier la lumire, vous vous rendrez comptequ'elle est hyper-sensible et que certaines intentions non formules, oucertaines inhibitions, agissent directement et immdiatement sur elle.

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    Expliquons-nous. Ce que nous dnommons lumire, en toutemconnaissance, est l'lment qui prsente la plus grandediversification de degrs connus, plus une immense force de

    dtermination, plus de multiples moyens de ralisation.Or, cette puissance en soi obit la pense.

    La pense, issue d'un tat actif de concentration, peut manier lalumire son gr. Elle peut la condenser sur un point, la diriger,changer la densit de ses ondes, lui donner la forme et l'aspect quiconviennent au but poursuivi.

    Nous pouvons nous servir de la lumire spirituelle au mme titreque la lumire matrielle, (si l'on peut toutefois oser employer ce motde "matriel" pour une pareille conqute).

    La lumire spirituelle, nous l'apprhenderons par le chemin dudsir de l'lan, de l'attente.

    Les secrets de lnergie lumineuse

    Un travail trs simple va vous l'apprendre. Toutefois, deuxconceptions de la lumire devront tre mises au point avant quedbute le travail.

    Ce travail auquel nous nous rfrons ici est le travail sur soi.Aprs quoi, vous seront enseignes les prmices du travail sur lesautres, celui qui rgnre et gurit.

    Nous aurons donc divers rsultats obtenir en utilisant lapuissance de la lumire.

    Or, il est vident que se servir d'un lment implique le fait depossder les instruments adquats l'objectif poursuivi.

    Cet instrument, ce sera vous-mme.

    On distingue deux catgories de lumire: la lumire phnomnale,

    telle que nous la concevons, dans la vie courante, et la lumirenoumale qui serait, en principe, virtuelle et porteuse de l'Esprit.

    C'est cette lumire que, palier par palier, nous allons analyserclairement afin de parvenir nous l'agrger. Dites-vous donc que vouscommencez une nouvelle vie qui vous enrichira et vous ouvrira toutgrand, non seulement un seuil, mais un ciel tout entier.

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    Le travail sur soi

    Mettez-vous en pleine lumire.

    Pour commencer il sera prfrable d'tre dehors, au grand air.Mais, si vous ne pouvez faire autrement, restez chez vous dans unepice bien claire. Quand nous parlons d'clairage c'est toujours, bienentendu, celui de la lumire solaire.

    Fermez les yeux. Tchez de ne penser tien. Ce qu'il vous fautpour le moment c'est observer, puis ressentir ce qui va se passer.

    Ne vous agitez pas, ni physiquement, ni mentalement. Attendezpatiemment. Attendez !... Bientt la lumire entrera en vous. Il voussuffira d'y penser et de l'appeler. Elle commencera par baigner votre

    visage, elle traversera vos cheveux, puis elle s'efforcera d'adhrer votre corps travers les tissus de protection. Guettez-la. Ne bougezpas. Vous aurez l'impression de l'absorber tandis qu'elle-mme vousabsorbera.

    Quand vous sentirez que vous tes en parfait accord avec elle, ilvous faudra apprendre la dlimiter.

    Ce n'est qu'une illusion car les ondes lumineuses peuvent, enralit, se superposer, s'tendre et se mler. C'est un univers enperptuelle cration. Mais nous n'en sommes pas encore l.

    Vous avez dj ressenti la lumire sur votre corps. Vous vous tesincorpor elle. Maintenant respirez bien fond. Mas ne respirez pasdistraitement comme vous avez l'habitude de le faire, car, le plussouvent, vous respirez autour de la lumire.

    Vous voil dj au point o vous pouvez l'aspirer carrment,devenir propritaire part entire de la lumire qui vous baigne.

    En aspirant profondment, fixez votre pense sur le fait que vousintgrez de la lumire et pas seulement de l'air.

    Une fois, deux fois, trois fois.

    Pour l'instant elle est transparente et vous rares figure de simplepostulant. Bientt vous deviendrez son auxiliaire.

    Certaines personnes ont besoin de plusieurs jours d'exercices pourse rendre compte de ce qui leur arrive. Pour d'autres, c'est plus simple.

    Grce cette prise de conscience, certains parviennent tout desuite mettre au point l'utilisation pratique. Cela dpend uniquementde leur forme d'intellect. Mais le temps importe peu. Ce que nous

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    pouvons garantir, c'est que les aspirations profondes, jointes unemticuleuse observation du rsultat provoqu, susciteront en vous uneeuphorie qui vous fera peut-tre souponner une ivresse. Ne vous en

    inquitez pas. Cette ivresse trouvera son utilisation particulire.Aprs cet exercice, vous devez sentir la lumire agissante jusqu'au

    bout de vos doigts.

    Recommencez ! Voici que se dgagent des vibrations inattendues.C'est une espce d'lectricit qui parcourt votre corps. Voil lemoment de crer et recrer volontairement cette impression qui,lorsque vous en aurez pris l'habitude, deviendra votre instrumentindispensable.

    Vous avez donc pris conscience de la lumire en vous.

    Maintenant vous allez lui rendre la libert de se manifester par ondeslumineuses.

    Il est ncessaire de vous prciser que, dans la lumire polarise,les ondes lumineuses s'tablissent en sens progressif.

    Les sons et les couleurs sont des instruments de prcision bienque vous les maniez encore inconsciemment comme l'enfant qui ona donn un crayon pour la premire fois. Mais, l, ce sont desinstruments de prcision que nous ne pouvons manier utilement quesous le contrle de la pense. Et la pense, pour ordonner juste doit

    remplir deux obligations: hauteur et concentration. Elle n'atteindraseulement alors son quilibre, qui est l'intriorisation absolue, unencessit menant l'autre. La pense est alors la fibre conductrice.

    Le pouvoir des diffrentes couleurs

    Passons la ralisation des exercices : adjugeons-nous le bleud'abord: le bleu d'un ciel pur.

    Je respire profondment, mais ce que j'absorbe n'est plus unetransparence: c'est du bleu un bleu clair, lger, trs pur. Je l'ai aspirprofondment. L'expiration, maintenant ; je devrai la faire en lanantl'onde lumineuse dans mes membres, bras et jambes. Je n'ai pas rejetl'air bleu expir, je l'ai projet travers mon corps.

    Quand vous serez plus avanc, on vous enseignera - et vousl'aurez sans doute, ds lors, constat par vous-mme - que l'ondelumineuse bleu ple est un merveilleux calmant. L'onde lumineusebleu ple diffuse la paix, la dtente. C'est une luminescence heureuse.

    Mais notons que le bleu change compltement d'influence s'il est

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    projet en bleu nuit, c'est--dire ml de noir. Sous cette forme ilcombat les tumeurs et parvient les dissoudre.

    Vous recommencerez le mme exercice de respiration et dediffusion dans votre corps avec des ondes lumineuses de couleursdiverses. Ceci vous amnera concevoir et traduire le langage de lalumire.

    Ce langage, commenons le dchiffrer directement sur lemalade.

    Il faudra alors que la simple exprience vous enseigne la mthodeselon laquelle la projection d'un rayon doit tre. mise, comment ilvous faudra penser cette projection et la doser, et commentl'observation mticuleuse vous renseignera sur l'accueil qui lui aura

    t fait par le malade.Par la suite, vous pourrez aussi vous servir de la lumire comme

    lment de protection. Vous verrez que c'est une armure d'immunit.

    Il nous est arriv un jour de rencontrer, en plein milieu d'une fte,parmi les nombreux invits qui tous riaient et causaient gaiement, unejeune femme qui ne se dpartissait pas du plus aimable des sourires.Or, nous emes la stupfaction de remarquer qu'un halo de lumired'un noir pais (si l'on peut parler de lumire noire) entourait cettejeune femme des pieds la tte. Et ce halo tait large de cinquante

    centimtres. Bien qu'il y et autour d'elle un groupe de gensmanifestement gais, rien n'entamait ce terrible halo de lumire noire"car l'tre et l'me constituent une totalit o tout est en rapport avectout".

    Renseignements pris, nous apprmes que cette personne venait deperdre son enfant dans d'affreuses circonstances.

    Nous n'avons pas os lui rvler la barricade de tnbres qui semanifestait entre elle et le monde. Si elle avait connu le langage de lalumire, elle aurait peut-tre russi chasser cette ombre et s'incorporer une luminosit de combat qui l'aurait aide souffrir

    moins.

    Comment vous protger

    S'entourer de lumire blanche aide survoler les dtails pniblesd'une existence difficile. Accepter autour de soi cette lumireinvincible aide monter et planer sans qu'il soit toutefois ncessaired'abandonner ses responsabilits.

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    C'est une merveilleuse prise de conscience, une croissancesymbolique, une lente mtamorphose qui s'accompagne d'unesensation de protection.

    Que cette lumire s'intgre un tre qui lui fait confiance, on levoit voluer en monte. Elle devient alors brillante, comme poudred'or, et stimule toutes les facults.

    En dfinitive, centrer son attention sur la lumire, quivaut larecrer en soi. On en devient le foyer. On y distingue autant departicularits et de variances que dans un visage humain. Voil ointervient le pouvoir de gurison.

    Chaque temprament appelant sa lumire propre, se sent riche,heureux, libr, sitt qu'il en est entour.

    La plupart des maladies, commencent par une non adaptation une lumire donne. Une fois rtablies autour du malade les vibrationsqu'il souhaite, sa souffrance disparat.

    Travail sur le malade

    Avant de commencer les soins, il faut prparer le malade lesrecevoir.

    Moralement il est sous-entendu qu'il est d'accord puisqu'il croit envous et vous attend. Mais ce n'est pas suffisant. Voici la prparationinitiale tablir.

    Tout d'abord, par voie d'observation aigu et continue, dtectezquel rayonnement est celui de ce malade, et la catgorie de lumirequ'il appelle, mme inconsciemment.

    De cette lumire aux vibrations colores prcises, vous constituezun nuage dans lequel vous plongez le malade.

    Ce nuage provoqu, vous l'entourerez d'un cordon magntique

    l'intrieur duquel passera le courant ncessaire au rayonnement voulu.Ce rayonnement, attnu par l'ampleur de son dveloppement,

    baignera tout l'tre malade, le pntrant par tous ses pores, et luiapportant ainsi l'aide ncessaire.

    Souvent ce procd est suffisant. Il active les forces, le malade ypuise et, d'emble, se gurit de lui-mme.

    Il ne suffit pas de projeter savamment le rayon color et d'enmesurer l'intensit. Il est souvent ncessaire:

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    1. De mlanger les rayons, soit par couches, soit par fusion.

    2. De leur imprimer le mouvement adapt la maladie en

    question. Le rayonnement par nappes peut-tre plaqu en immobilit.Bien entendu la question de temps intervient. Toutefois il sera bon dedistinguer s'il doit tre lger ou pesant, s'il doit onduler ou crpiter.

    L'ondulation lumineuse engourdit le mal. Elle endort le maladecomme le bercement endort l'enfant.

    Le crpitement peut s'exercer sur toute l'paisseur d'un cataplasmede lumire, ou bien, selon les conditions tenir en surface. Au cas ole systme nerveux du malade serait exacerb, il serait utile de laisserune nappe colore (mentale bien entendu) en contact avec la chair, etde maintenir le crpitement trs au-dessus, spar de la peau par

    quelques centimtres de vide.Ce c