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Les systèmes socioécologiques en Afrique du

Nord et de l’Ouest face au changement global :

Gouvernance, adaptation, viabilité et résilience

Édité par :

Mohamed BEHNASSI, Olivier BARRIÈRE, Josiane STOESSEL-RITZ, Fatima ARIB

et Carlo PRÉVIL

CERES Publishing

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À PROPOS DU CERES Le Centre de Recherche en Environnement, Sécurité Humaine et Gouvernance (CERES), auparavant le Centre Nord-Sud de Recherche en Sciences sociales (NRCS)/2008-2015, est un organisme de recherche indépendant et sans but lucratif fondé par un groupe de chercheurs et d’experts appartenant à des disciplines différentes et associant des compétences originaires à la fois des pays du Sud et du Nord. Le CERES a pour but de développer la recherche et l’expertise dans les domaines de l’environnement, de la sécurité humaine et de leur gouvernance dans une perspective multidimensionnelle et interdisciplinaire. En tant que Think Tank, le CERES aspire à servir de point de référence, à la fois localement et globalement, par la recherche rigoureuse et un engagement actif auprès de la sphère décisionnelle. Grâce à son programme de recherche ambitieux, le CERES focalise sur l’étude des impacts des changements environnementaux/climatiques sur la sécurité humaine et leurs implications en matières de recherche et de décision. Le CERES, mobilisant un réseau croissant de chercheurs et de partenaires, vise à entreprendre des recherches avancées, fournir de l’expertise et contribuer aux débats scientifiques et politiques pertinents via des publications, des rencontres scientifiques, de l’expertise et du renforcement des capacités des acteurs concernés.

© Éditions CERES, 2017 (1ère édition)

Dépôt légal : 2017MO3163 Bibliothèque Nationale du Royaume du Maroc, Rabat ISBN : 978-9954-38-259-2 Imprimé au Maroc

Les travaux publiés dans cet ouvrage collectif ainsi que les opinions qui y sont exprimées engagent leurs auteurs, mais restent en ligne avec les choix scientifiques du Centre de Recherche en Environnement, Sécurité Humaine et Gouvernance (CERES). Toute reproduction intégrale ou partielle, copie, transmission, traduction ou vente de cette publication, sous n’importe quelle forme, sans le consentement préalable du CERES est une violation de ses droits de propriété intellectuelle.

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TABLE DES MATIÈRES

Liste des auteurs……………………………………………………………………………

5

Liste des acronymes et abréviations…………………..…………………………………

7

Remerciements………………………………………….…………………………………

11

Introduction……………………………………………….………………………………

13

CADRE CONCEPTUEL DE RÉFÉRENCE : Viabilité et adaptation des systèmes socioécologiques……….……………………….. Mohamed BEHNASSI, Olivier BARRIÈRE, Josiane STOESSEL-RITZ, Fatima ARIB et Carlo PRÉVIL

22

PARTIE 1 DE LA NÉCESSITÉ D’UNE GOUVERNANCE ENVIRONNEMENTALE REPENSÉE………………………………………………………………………

33

1 Gouvernance mondiale du changement climatique : une analyse géopolitique… Mohamed BEHNASSI

35

2 L’enjeu du droit face à l’urgence écologique : la coviabilité des systèmes socioécologiques……………………………………………….……………………… Olivier BARRIERE

69

3 Système intégré d’aide à la décision (SIAD) pour l’opérationnalisation des politiques de l’eau dans la gouvernance territoriale : cas de la région du Souss-Massa, Maroc…..……………………………….……………………………………… Carlo PRÉVIL, Mohamed BERRAJA, Lhoussaine BOUCHAOU, Tarik TAGMA, Leslie DOLCINE, Abdelhamid ASLIKH, Qaimi ABDEL

99

4 Opportunités pour une nouvelle gouvernance des eaux souterraines en Tunisie : enjeux de la transition d’une approche économétrique à une approche basée sur l’AMCD…….……………………………………………………………..………... Hedia TRABELSI, Carlo PRÉVIL, Mohamed S. MATOUSSI

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PARTIE 2 QUELLE ADAPTATION DES SYSTÈMES EN CONTEXTE DE CHANGEMENT CLIMATIQUE ? …………………………………………..…

149

5 Les écosystèmes forestiers au service du développement durable et de l’adaptation au changement climatique. Cas de la région de Souss Massa Draa au Maroc………….……………………………….……………………………...……. Fatima ARIB

151

6 Changement climatique et évolution des pratiques culturales dans le Nord Bénin.....… ……………………………….……………………………………………. Guy NOUATIN, Ismail MOUMOUNI, Mohamed N. BACO, Honorat EDJA et Jérémie Y. DEDJAN

178

7 La gestion des facteurs de production comme une adaptation aux variations climatiques inter-saisonnières : Cas de la riziculture au Bénin…………...………. Jacob Afouda YABI, Rosaine Nérice YEGBEMEY, Silvère Dansinou TOVIGNAN

201

8 Dynamique spatio-temporelle d’un paysage forestier du nord-ouest de la Tunisie : le cas des écosystèmes forestiers d’Aïn Snoussi………………………….. Mohamed HAMDI, Guy LEMPERIÈRE, Yves PETIT-BERGHEM

222

PARTIE 3 PRATIQUES LOCALES RÉGÉNÉRATRICES OU FRAGILISANT LA VIABILITÉ ET LA RÉSILIENCE DES SYSTÈMES SOCIOÉCOLOGIQUES…..

240

9 Agriculture et développement durable : des solidarités et des compétences pour le bien commun…………………………………………..……………………… Josiane STOESSEL-RITZ

242

10 Vulnérabilité et dynamiques d’adaptation des éleveurs transhumants aux perturbations climatiques au Nord du Bénin………………….……………………. Georges DJOHY, Ange HONORAT EDJA, André JONAS DJENONTIN, Marcel HOUINATO

260

11 Les effets de la marchandisation de l’arganier sur la biodiversité locale…………. Aziz LARBI, Mohammed BOUSSAID, Marc MORMONT, Khalil ALLALI, Jihane BEJBOUJI

277

12 La biodiversité de l’igname survit-elle encore dans un contexte de changement climatique au Nord-Bénin ?………………………………………..………………….. Janvier EGAH, Mohamed NASSER BACO et Ismail M. MOUMOUNI

292

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13 Le Moringa oleifera et le Jatropha curcas : nouveaux végétaux « miracles » pour une protection environnementale et un développement humain (bassin versant de la Doubégué, Burkina Faso)……………………………………………………….. Elodie ROBERT

313

14 La vulnérabilité des systèmes socioécologiques face au changement climatique et ses répercussions sur la santé - Région de Kénitra comme exemple………....... Rachida EL MORABET, Mostafa OUADRIM, Mohamed ANEFLOUSS, Said MOUAK

336

15 La réponse du droit marocain face au gaspillage - Cas de la Charte nationale de l’environnement et du développement durable……….……………………………. Hind MAJDOUBI

373

Conclusion…………………………………………….……………………………………

389

Liste des Figures…………….…………………………….………………………………..

393

Liste des Tableaux et Encadrés…………………………….…..…………………………. 396

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CHAPITRE 14

La vulnérabilité des systèmes socioécologiques face au changement global et ses répercussions sur la santé Région de Kénitra comme exemple Rachida EL MORABET1, Mostafa OUADRIM², Mohamed ANEFLOUSS², Said MOUAK3

1 Professeure et Membre du Laboratoire « Dynamiques des Espaces et des Sociétés (LADES) », Faculté des Lettres et des Sciences Humaines de Mohammedia (Maroc) ; Chercheure au Centre de Recherche en Environnement, Sécurité Humaine et Gouvernance (CERES). e-mail : [email protected] ; Tél. +212 661153385.

2 Professeurs et Membres du Laboratoire « Dynamiques des Espaces et des Sociétés (LADES) », Faculté des Lettres et des Sciences Humaines de Mohammedia (Maroc). e-mails : [email protected] ; [email protected]

3 Doctorant et Membre du Laboratoire « Dynamiques des Espaces et des Sociétés (LADES) », Faculté des Lettres et des Sciences Humaines de Mohammedia (Maroc). e-mail : [email protected]

Résumé Le changement global est devenu un sujet de préoccupation à l’échelle mondiale vu les tendances pour les trente dernières années qui ont constitué un véritable défi pour les systèmes socioécologiques et à la sécurité humaine. Au Maroc, qui ne fait pas l’exception, les données disponibles indiquent un réchauffement significatif durant les dernières décennies avec une augmentation importante de la fréquence et de l’intensité des événements extrêmes du type sécheresses et inondations. Le problème est surtout aggravé par des pratiques socioéconomiques non durables et une mauvaise planification de l’utilisation des terres. Les rapports réalisés sur la situation dans le pays reflètent l’ampleur de la dévastation, notamment en termes de dégâts humains et matériels. Partant d’un territoire extrêmement important d’un point de vue écologique et socioéconomique, mais soumis à une double contrainte liée aux pressions humaines (pollutions) et climatiques (événements extrêmes), nous montrons dans ce chapitre comment le changement global a le potentiel d’affecter l’équilibre des systèmes socioécologiques, ce qui peut contribuer à la fragilisation de la santé humaine par l’émergence ou l’aggravation de certaines maladies. Plus précisément, le but est d’analyser la vulnérabilité au changement global de la région de Kénitra en se basant sur les interactions entre les éléments physiques et humains notamment en lien avec le bassin versant de Sebou. L’approche utilisée est basée sur des méthodes mixtes à la fois quantitatives (analyse des données) et qualitatives (entretiens et enquêtes).

Mots clés Changement global • Vulnérabilité • Kénitra • Bassin versant de Sebou • Systèmes socioécologiques • Maladies • Santé

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Introduction

La Terre est présentement en train de subir un phénomène appelé « changement global », impliquant, entre autres, le réchauffement de la planète, phénomène amorcé il y a 300 ans. Le climat global a subi une hausse d’environ 0,6 °C durant le dernier siècle avec deux périodes de réchauffement, soit entre 1910 et 1945 et de 1976 à aujourd’hui. Cette dernière période aurait connu jusqu’à maintenant le plus haut taux de réchauffement comparativement à n’importe quelle autre période depuis le dernier millénaire (Walter et al., 2002). Bien que le phénomène soit normal, l’activité humaine semble accélérer le processus (Wittmann et Baylis, 2000).

En fonction du lieu, du moment où elles se produisent et de leur quantité, les précipitations peuvent avoir un impact sur la santé et les moyens de subsistance des populations ; une pluviométrie trop importante ou trop faible peut avoir des conséquences catastrophiques.

Jusqu’à une époque récente, les chutes de pluie et de neige suivaient des schémas réguliers qui déterminaient, entre autres, le moment des semailles et des récoltes pour les paysans. Mais avec le réchauffement climatique, le volume d’eau évaporée comme la quantité d’humidité potentiellement présente dans l’air, ont augmenté. Nous pouvons, de ce fait, prévoir que le volume global des précipitations va augmenter au fur et à mesure que la Planète continue de se réchauffer.

Les phénomènes extrêmes – comme les inondations – pourraient devenir plus fréquents avec le changement climatique. Les pluies torrentielles aggravent les risques d’érosion des sols, de glissements de terrain et d’inondations, ce qui met en péril la productivité et les infrastructures agricoles, représentant ainsi une grave menace pour la sécurité physique et économique des populations. Les inondations peuvent également contaminer les réseaux d’adduction d’eau et aggraver les risques de maladies d’origine hydrique (Nguon, 2003).

Face aux événements extrêmes, la vulnérabilité des systèmes socioécologiques comprend : la disposition de ce système à être endommagé (l’exposition de ce système à cet événement) ; la sensibilité du système considéré ; et la résilience.

La sensibilité au changement climatique ne se réduit pas au problème des inondations ou de sécheresses, quelle que soit leur importance. La réflexion doit être focalisée plutôt sur : les conditions de vulnérabilité susceptibles de déterminer des réponses exceptionnelles de la part des systèmes exposés aux événements extrêmes ; et les liaisons complexes et variées que ces systèmes entretiennent avec leur environnement.

La vulnérabilité au changement climatique dépend donc du contexte dans lequel se produisent ces événements, obligeant à prendre en compte d’autres échelles spatiales, temporelles et fonctionnelles dans l’analyse. Ainsi, l’hétérogénéité des dynamiques « naturelle » et « sociale » nécessite une approche spatialisée à l’échelle d’un territoire (dans cette étude le « bassin versant »).

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La délimitation du territoire dans lequel s’est effectuée l’étude est sous une double contrainte liée aux pressions humaine et climatique, dont les emprises ne sont pas les mêmes. Cette étude représente, donc, la dimension des changements environnementaux liés aux services fournis par les écosystèmes et par les perturbations induites par l’activité anthropique. Les liens entre les différents compartiments sont exprimés.

D’un point de vue temporel, l’existence de différentes échelles de temps nécessite la mise en œuvre de dispositifs d’études spécifiques dédiés à des dynamiques lentes ou rapides, selon les caractéristiques du système. Une telle approche correspond parfaitement à celle menée au sein de la zone d’étude.

Plusieurs chercheurs sont d’avis que le changement global a le potentiel d’affecter l’équilibre délicat de la nature, ce qui peut contribuer à l’émergence et à la propagation de plusieurs maladies dans des régions qui en sont jusqu’à présent épargnées (Vicki, 2001). À titre d’exemple, rappelons l’impact économique, social et environnemental qu’une pollution peut représenter pour la population à l’échelle d’une région donnée. Et la santé humaine est directement affectée par la pollution de l’eau, les inondations en sont le vecteur majeur dans l’espace et le temps, situation souvent amplifiée par la hausse des températures comme manifestation du changement climatique, avec toutes les conséquences sociales et environnementales que l’on peut imaginer.

Le changement climatique est donc un phénomène qui induit des changements rapides générant un impact environnemental très fort. Le bassin de Sebou, zone extrêmement importante d’un point de vue socio-économique, en est un exemple frappant.

Une analyse de la situation est nécessaire pour répondre explicitement aux enjeux sociaux et écologiques, violemment induits par ces situations « inondations », en termes d’exposition, de sensibilité et de résilience.

1 Développement socioéconomique de la région d’étude et son impact sur l’environnement

1.1 Situation géographique

Situé au Nord-Ouest du Maroc, le bassin de Sebou s’étend sur une superficie d’environ 40 000 km2, représente 6% de l’aire du territoire national et 30% des ressources en eau de surface du Maroc, drainé par l’oued Sebou qui a une longueur totale de 614 km depuis sa source. Il a à son amont les eaux de la région rifaine (Oued Leben affluent de l’Oued Inaouen, lui-même affluent de Sebou et Oued Ouargha) et celles des crêtes (Oued Guigou, Oued Zlouh, Oued Mikkés), et l’Oued Inaouen de la région de Taza où il borde les régions moyennes-atlasiques et pré-rifaines. Après avoir traversé les collines pré-rifaines, le Sebou débouche dans la plaine du Gharb, où il va recevoir l’Oued Beht et l’Oued R’dom au Sud. Il rejoint l’Atlantique près de Kénitra à Mehdia. Son débit moyen s’élève à 137 m3⋅s-1. En

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hiver, la moyenne la plus élevée est celle du mois de février (350 m3⋅s-1), pouvant atteindre 6 000 m3⋅s-1 en période de fortes crues.

Figure 14.1 Réseau hydrographique du bassin de Sebou

Les ressources en eau du bassin du Sebou sont estimées à près de 6 900 millions de m3 en moyenne par an. Les ressources en eau de surface, estimées à 5 600 millions de m3, soit 30% des apports des eaux de surface de l’ensemble du pays. Les ressources en eau souterraine constituent une part importante du patrimoine hydraulique du bassin. Elles représentent des réserves accumulées depuis de longues années, et une richesse qui se reconstitue d’année en année grâce à l’infiltration des eaux de pluies. Le volume exploitable des eaux souterraines est de l’ordre de 800 mm3 par an, soit près de 20% du potentiel national (ABHS, 2013).

À l’échelle du bassin, on peut distinguer une douzaine de nappes caractérisées par une large répartition dans l’espace. Elles contribuent ainsi au développement du bassin en assurant l’approvisionnement en eau potable d’une grande partie des centres urbains et ruraux et en participant à la mise en valeur de grandes superficies irriguées au moyen de multiples stations de pompage.

1.2 La dynamique démographique et son impact sur l’environnement

Le bassin du Sebou est le deuxième bassin le plus peuplé du Royaume, il compte 7,4 millions d’habitants (statistiques de 2014), soit 21,7% du total de la population marocaine.

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Sa population augmente plus rapidement que la moyenne nationale, avec un taux d’accroissement moyen interannuel de 1,8% contre 1,4% pour le reste du pays entre 2004 et 2014.

Il n’y a pas de relation simple entre la taille de la population et les modifications de l’environnement. Cependant, comme la population continue à s’accroître, la disponibilité limitée des ressources est devenue une préoccupation grandissante.

La dynamique démographique a également un impact important sur l’environnement. La taille de la population en elle-même ne représente qu’une variable, certes importante, dans cette relation complexe ; d’autres dynamiques démographiques, comme les changements de flux et de densité de la population, peuvent avoir des répercussions très sérieuses sur l’environnement.

Figure 14.2 Population et densité dans le bassin de Sebou (statistiques de 2014) Source : Traitement des données de HCP.

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Figure 14.3 Évolution de la population dans le bassin de Sebou (2004-2014) Source : Traitement des données de HCP.

La façon dont la population est répartie a également une influence sur l’environnement. L’urbanisation, dépasse le rythme de développement des infrastructures et des réglementations sur l’environnement, ce qui entraîne des niveaux de pollution élevés.

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Figure 14.4 Dynamique de l’espace bâtis de la ville de Kénitra entre 1912 et 2014.

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Figure 14.5 Évolution de l’indice de végétation de la différence normalisée (NDVI) à Kénitra entre 1987 et 2014.

Un des domaines spécifiques illustrant le caractère complexe de l’influence des dynamiques démographiques sur l’environnement, on peut citer les schémas d’occupation des sols. Pour satisfaire les besoins d’une population croissante, des changements dans ces

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schémas se sont imposés tels que l’accroissement de la production alimentaire par l’intensification de la production sur les terres déjà cultivées ou le développement des infrastructures nécessaires pour supporter cet accroissement de la population. Ces types de changement dans le schéma d’occupation des sols ont plusieurs impacts écologiques.

De telles pressions sur l’environnement peuvent être tout aussi importantes dans les régions où les niveaux de revenu sont bas par rapport à celles où les niveaux de revenu sont élevés. La pauvreté peut entraîner des modes d’utilisation des ressources naturelles insoutenables pour pourvoir aux besoins de subsistance sur une durée limitée. Dans les régions où le revenu par habitant est élevé, la consommation élevée va de pair avec une production accrue des déchets ménagers, ce qui entraîne des problèmes de pollution critiques. La nature de plus en plus complexe et hétérogène de ces déchets implique des difficultés au niveau de leur gestion (collecte, tri, stockage, valorisation, etc.). Une grande partie des déchets ménagers est mise en décharge de manière incontrôlée et sans précautions, ce qui constitue une menace réelle et permanente pour l’environnement et la santé humaine.

Les facteurs culturels jouent enfin un rôle important dans les façons avec lesquelles la population affecte l’environnement. En fonction des valeurs culturelles, les attitudes des citoyens envers l’environnement et ses composantes influencent souvent l’élaboration et la mise en œuvre des lois et des politiques environnementales.

• La pollution d’origine domestique

Le volume total des rejets des eaux usées domestiques est estimé à plus de 200.000 m3/jour, dont 86% sont déversées dans les cours d’eau, 2% épandues sur les sols, et 12% rejetées en mer. Ces rejets proviennent de plusieurs régions et génèrent une pollution organique totale annuelle de l’ordre de 76.000 tonnes de DBO5 par an, représentant 25% du total national dont près de 47% provient de la pollution domestique. Cette pollution est véhiculée essentiellement par les oueds Sebou (Fès et Kénitra), l’impact des rejets de Fès sur ce dernier reste mesurable sur plus de 100 km, Rdom (Meknès) et Beht (Khémisset), Inaouène (Taza), Ouerega (Taounate), Aggay (Sefrou), Tizguit (Ifrane) dont la qualité est généralement mauvaise à très mauvaise (ABHS, 2013).

Il est à signaler que le taux d’épuration des rejets urbains était quasiment nul jusqu’à 2015. Une station d’épuration des eaux usées de Fès, inaugurée en novembre 2014, et qui est opérationnelle (partiellement depuis 2015), permettra la dépollution et l’amélioration de la qualité des eaux de l’oued Sebou. Elle permettra également la réutilisation des eaux traitées dans les activités agricoles. Cette nouvelle station, qui est la première du genre en Afrique du Nord, est à même d’avoir des impacts positifs sur les conditions socio-économiques de la population, sur l’irrigation, l’abreuvage des animaux, les conditions de potabilisation de l’eau, etc.

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Outre la dépollution du bassin de Sebou, cette station permettra aussi d’assurer le rejet des eaux usées dans un milieu récepteur après un traitement compatible avec les normes en vigueur, d’améliorer les conditions sanitaires de la population, de favoriser les activités agricoles et de préserver la nappe phréatique (El Mahjoub, 2014). Toutefois, cette station ne sera complètement opérationnelle qu’en 2016.

• Pollution par les décharges publiques

La production des déchets ménagers en milieu urbain dans le bassin de Sebou est en constante hausse en raison de la croissance démographique, des dynamiques de l’espace bâti des grandes villes du bassin et de l’évolution des modes de consommation. Le traitement de ces déchets reste très peu développé en dehors de la mise en décharge sauvage (non contrôlée), quasi-généralisée par les communes marocaines. Le maximum de pollution par les décharges provient généralement des villes de Fès, de Meknès, de Kénitra, de Sidi Kacem et de Taza.

De par leur localisation, en général, à côté des villes et parfois non loin des milieux hydriques (oueds, nappes), elles dégagent des lixiviats qui rejoignent les eaux superficielles ou souterraines selon la géologie du site, constituant ainsi une source de pollution non négligeable. La décharge de Taza par exemple présente un réel risque de pollution parce qu’elle est située dans le lit d’oued Larbaa (El Haji et al., 2012). Idem pour la décharge de Kénitra « Ouled Barjel ».

La décharge d’Ouled Barjel, qui existe depuis 1973, couvre une superficie de 20 ha et reçoit, en moyenne, 510 tonnes par jour et 186 000 tonnes par an de déchets de toutes sortes : ménagers, industriels, hospitaliers, abattoirs, commerce et voiries. La caractérisation des lixiviats générés par la décharge incontrôlée et à ciel ouvert d’Ouled Berjel à Kénitra a montré que l’environnement de la décharge présente un niveau de pollution élevé. La composante microbiologique se caractérise par de fortes charges en coliformes fécaux, en staphylocoque, l’AFMAT, et Salmonelle…Ces lixiviats à forte charge polluante risquent de contaminer la nappe phréatique qui circule à des faibles profondeurs (de 4 à 15m), sous un substratum perméable (Abed et al., 2012).

Cette gestion insuffisante des déchets est à revoir radicalement et d’urgence étant donnés les dommages importants causés à l’environnement, aux ressources naturelles (pollution des eaux souterraines et superficielles, pollution du sol et de l’air, impact sur la biodiversité, etc.) et à la santé humaine (EL Fadhel et al., 1997). À l’exception de la ville de Fès qui dispose d’une décharge bien aménagée, la majorité des autres villes sont au stade des études d’aménagement et de choix de nouveaux sites.

1.3 L’activité économique

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Les ressources en eau dans le bassin versant de Sebou ont permis l’installation d’une activité économique assez importante dans la région.

• L’activité agricole

Le bassin de Sebou est une des régions à vocation agricole les plus importantes du Maroc. Il constitue l’une des régions qui ont un potentiel en terres irrigables et irriguées les plus importantes au niveau national. En effet, le bassin de Sebou occupe près de 20% de la surface agricole utile (SAU) irriguée (soit 357 000 ha), et 20% de la SAU du pays (soit 180 000 ha). Il connaît une intensification agricole par le recours à l’irrigation et à l’utilisation des engrais et des produits phytosanitaires. Il en résulte l’infiltration dans les eaux souterraines des produits agrochimiques. Les charges polluantes sont dispersées en proportions différentes dans le bassin, elles sont constituées essentiellement des nitrates et des phosphates, et sont estimées à 8 670 tonnes par an de l’azote total et 2 050 tonnes par an des phosphates. La consommation globale des pesticides est environ 2kg/ha, soit 20 700 kg au total du bassin dont 60,2% de fongicides, 21,6% d’insecticides, 15,2% d’herbicides et 2% d’acaricides. Ces produits, sont entrainés par les eaux de ruissellement et d’infiltration jusqu’aux rivières ou aux nappes d’eau souterraines. La nappe du Gharb est durement touchée (ABHS, 2013).

• L’activité industrielle

Le secteur industriel est très diversifié dans le bassin du Sebou. Les principales activités industrielles qui figurent parmi les activités demandeuses en eau sont : l’agro-alimentaire1 (sucreries, huileries, laiteries, conserveries,…) ; les papeteries ; les tanneries et le textile2 ; le raffinage de pétrole ; la levurière ; et la production d’alcool.

Les secteurs industriels du bassin du Sebou contribuent avec des degrés différents à la pollution des ressources en eaux. En effet, en premier lieu on trouve la pollution par les margines dont la production constitue une part importante de la pollution globale. Elle est concentrée essentiellement dans les régions de Sefrou, de Taza, de Fès et de Taounate. Cette pollution est d’autant plus sensible qu’elle a des pics saisonniers extrêmement forts (elle a atteint le triple de la charge de matières organiques des effluents non traités de la ville de Fès).

1Pour l’agroalimentaire, il y a environ 200 huileries importantes, produisant 120 000 tonnes d’huile d’olive et 70 000 tonnes d’huiles végétales, ce qui représente plus de 65% de la production nationale. Par ailleurs, 184 000 tonnes de sucre sont produites par an dans le bassin, ce qui représente la moitié de la production nationale.

2L’industrie du cuir et du textile est très développée dans le bassin. La région est riche en tanneries, elles sont réparties dans les villes de Fès, Meknès et Kénitra, et produisent 60% de la production nationale.

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La pollution industrielle est responsable de 40% de la pollution organique, de 20% de la pollution azotée et phosphorée et de 100% des rejets en métaux lourds (ABHS, 2013).

1.4 Changement climatique dans la Région d’étude

• Le climat de la Région

Le climat régnant sur l’ensemble du bassin est de type méditerranéen à influence océanique. Cette influence se manifeste par des vents pluvieux du secteur ouest et des hauteurs de pluie qui décroissent en s’éloignant de la mer. A l’intérieur du bassin, le climat devient plus continental où les effets de la latitude, de l’altitude et de l’exposition se combinent et où le froid, le gel, la neige et les pluies d’hiver s’opposent aux chaleurs et orages de l’été.

La pluviométrie moyenne du bassin est de 700 mm avec une grande variation entre 400 mm sur le haut Sebou et les vallées encaissées de Beht et 1 200 à 1 800 mm sur les hauteurs du Rif. Les précipitations moyennes sont caractérisées par l’existence de deux saisons, une sèche de mai à septembre et une humide d’octobre à avril, d’une part, et une variabilité interannuelle d’autre part. Quant aux chutes de neige affectant le bassin, elles interviennent de novembre à mars, au-dessus de 800 m d’altitude (Ifrane, le haut Atlas et le haut Rif).

Les températures sont maximales en juillet et août et minimales en janvier. Les températures moyennes annuelles varient suivant l’altitude et la continentalité entre 10 et 20°C. L’amplitude de variation de la température est importante et oscille entre 20 et 30°C.

• Le changement climatique dans la Région

Au Maroc, les observations enregistrées durant ces quatre dernières décennies montrent des signes évidents de l’impact du changement climatique et permettent de dégager un certain nombre de risques tendanciels pour les années 2020. Parmi ces derniers on distingue : une tendance nette à l’augmentation de la température moyenne entre 0.6°C et 1.1°C ; une tendance à la réduction des précipitations de l’ordre 4% par rapport à 2000 ; une augmentation de la fréquence et de l’intensité des orages frontaux et convectifs dans le nord et à l’ouest de la chaîne de l’Atlas et des sécheresses dans le sud et à l’est du pays ; une concentration des pluies d’hiver sur une courte période ; et une réduction de la durée d’enneigement et un retrait du manteau neigeux (Secrétariat d’État Chargé de l’Eau et de l’Environnement, 2009).

L’étude climatique du bassin de Sebou a permis de caractériser le climat de la zone d’étude avec ses variations spatio-temporelles. En effet, la zone d’étude est une région caractérisée par son réseau hydrographique dense. Le phénomène d’inondations de la rivière a menacé à plusieurs reprises les populations locales causant des dommages

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matériels et humains importants. L’intensité des précipitations au cours des dernières années explique clairement les inondations exceptionnelles, qu’a connues la zone d’étude.

Au niveau de Kénitra, des indicateurs du changement climatique ont été suivis (données du Bureau Régional d’Investissement Agricole, 2009) :

• La fréquence des sécheresses : Cet indicateur montre le plus grand nombre de jours consécutifs dont les précipitations sont de moins de 1 mm.

• La fréquence des vagues de chaleur : Cet indicateur montre le nombre moyen de jours dans le mois, avec la température maximale quotidienne.

• Fréquence d’inondations : Cet indicateur montre le nombre de jours avec des précipitations dépassant 30 mm.

Figure 14.6 Fréquence de la sécheresse dans la région de Kénitra (1990-2009).

Source : Bureau Régional d’Investissement Agricole (2009).

020406080100120140160

1985 1990 1995 2000 2005 2010

Fréquencedelasécheresse

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Figure 14.7 Fréquence de vague de chaleur dans la région de Kénitra (1990-2009). Source : Bureau Régional d’Investissement Agricole (2009).

Figure 14.8 Fréquence des inondations dans la région de Kénitra (1990-2013). Source : Bureau Régional d’Investissement Agricole (2009) et OREDD (2014).

0

2

4

6

8

10

12

1985 1990 1995 2000 2005 2010

Fréquencedesondesdechaleur

012345678910

1985 1990 1995 2000 2005 2010 2015

Fréquencedesinondations

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Figure 14.9 Taux de précipitations annuelles dans la station Kénitra (1980-2013). Source : Bureau Régional d’Investissement Agricole (2009) et OREDD (2014).

Figure 14.10 Les taux annuels de la température dans la station de Mnasra (1974-2008). Source : Bureau Régional d’Investissement Agricole (2009) et OREDD (2014).

La fréquence de la sécheresse dans la région de Kénitra a augmenté proportionnellement entre 1990 et 2009, de 95 jours à 105 jours, c’est–à-dire de 10 jours dans 20 ans. Et La fréquence des vagues de chaleur dans la région a augmenté de 6 à 7,5 jours de chaleur, ce qui représente 25% dans 20 ans. En ce qui concerne la fréquence des inondations, elle est restée relativement stable au cours des 20 ans. En résumé, durant la période entre 1990 et 2009, la région de Kénitra a connu une augmentation marquée de la température et de la

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fréquence des vagues de chaleur, tandis que les périodes d’inondations sont restées relativement stables.

Les aléas climatiques ont une incidence considérable sur le développement socio-économique. La fréquence, l’ampleur et la durée des conditions climatiques non favorables et dures évoluent. Aussi, les efforts de lutte contre les effets des conditions climatiques défavorables sur le développement humain doivent s’inscrire dans une vision du développement à plus long terme.

À l’échelle d’une région marocaine, il n’est pas possible de dire que le réchauffement climatique observé dans la région soit directement dû aux activités anthropiques et naturelles régionales. Il s’agit bien, à 99,9 %, d’une menace qui vient de l’extérieur puisque l’ensemble du pays subit le changement climatique global qui est d’ordre planétaire. La région du Gharb a connu des vagues de chaleur en 1995 et en 2001, et qui ont été équivalentes en bordure de l’Océan atlantique (Kénitra) et à l’intérieur de la région (Sidi Slimane). En ce qui concerne les inondations, la région a connu trois pics lors des années 1996, 2002 et 2009. Enfin, la région a traversé une période de sécheresse entre 1999 et 2004, surtout en zone continentale. L’année 2010 était également une année où la région a connu un pic des précipitations engendrant des inondations sur la majorité des territoires de la région (OREDD, 2014).

D’après Agoumi (2004), les données climatiques relevées dans la région durant le 20ème siècle indiquent un réchauffement durant ce siècle estimé à plus de 1°C avec une tendance accentuée les 40 dernières années. Ces données montrent aussi une augmentation nette de la fréquence des sécheresses et des inondations. Ainsi, on est passé d’une fréquence de sécheresse de 1/10 ans au début du siècle à 1/5 ans lors des trois dernières décennies. Cette nouvelle situation est accentuée par la rareté des années humides avec une pluviométrie très forte et répartie sur une courte période de l’année : on voit ainsi des centaines de millimètres d’eau tomber dans des régions arides en quelques jours et rien pour le reste de l’année.

Dans le cadre d’études doctorales sur les changement climatique au Maroc, Driouech (2010) a pu établir que le climat du pays, et par conséquent celui de la région, tend vers une baisse des précipitations allant de -10% à -20%, une hausse des températures de l’ordre de 1,05°C et une augmentation de l’évapotranspiration de l’ordre de 0,05%.

Un nouveau type de pression qui, d’après les scientifiques, semble possible est l’exacerbation de la violence des épisodes pluvieux. Cela signifierait que même si la quantité de pluie qui tombe annuellement est en baisse, chaque évènement de pluie pourrait être plus court et plus intense que par le passé (OREDD, 2014).

Le réchauffement climatique est un phénomène planétaire. Il fait référence à l’augmentation moyenne de la température dans le monde par rapport à une moyenne à

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long terme. La température moyenne de la planète a augmenté d’environ 0,85 degré entre 1880 et 2012 et le rythme du réchauffement s’est accéléré au cours des 50 dernières années, d’après le Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC) (Stocker et al., 2013). Les moyennes mondiales masquent d’importantes disparités dans le réchauffement observé d’une région à l’autre. Par ailleurs, le réchauffement de la Planète n’augmente pas à un rythme constant. D’une année à l’autre, la température mondiale moyenne peut soit augmenter soit baisser, mais sur plusieurs décennies la tendance au réchauffement est scientifiquement établie avec un degré de certitude plus avancé.

Le 5ème Rapport du GIEC a indiqué en 2013 que le degré de température serait « probablement compris entre 2°C et 4,5°C, l’estimation la plus crédible étant d’environ 3°C tandis qu’il est très improbable qu’il soit inférieur à 1,5°C » (Stocker et al., 2013).

1.5 Géomorphologie de la région

L’étude du rôle de la topographie sur l’écoulement superficiel et souterrain nécessite la définition du système d’écoulement. Un système d’écoulement est l’ensemble des lignes d’écoulement fictif dans lequel deux lignes d’écoulement voisines, en un point quelconque du bassin, restent voisines à travers toute la surface d’écoulement, c’est-à-dire entre la région alimentaire et la région d’exutoire. Si on considère une surface normale à deux lignes d’écoulement, il n’y a d’écoulement à travers cette surface que dans un sens. Ainsi, chaque système possède une zone de recharge et une zone de décharge connexe et continue.

Si l’on compare la distribution des écoulements de l’eau dans le cas où la surface libre est à pente à « ondulations », on observe qu’il se forme de nombreux systèmes d’écoulement proche de la surface. Sur la coupe topographique, on différencie clairement les écoulements locaux (écoulement de la colline à la dépression voisine), des écoulements intermédiaires (séparés par des écoulements locaux) et des écoulements régionaux (qui s’écoulent d’un bout à l’autre du bassin). La conséquence principale de cette répartition des écoulements en système réside dans le mélange d’eau d’origine très diverse dans les zones de décharge. Selon l’importance des amplitudes, les importances relatives des systèmes d’écoulement peuvent beaucoup varier. Et peut même créer une zone de décharge insoupçonnable.

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Figure 14.11 Coupe topographique au niveau du bassin de Sebou

De point de vue géologique, le bassin de Sebou est situé à la jonction entre quatre domaines structuraux (Chamayou et al., 1967 ; Fedan, 1989, Saadi et al., 2003) :

• L’Ourgha en amont du barrage AL Wahda : constitué essentiellement par des terrains argilo-marneux imperméables de crétacé.

• Les bassins de Gharb et du Saiss et le couloir Fès-Taza (contenus entre les chaînes du Rif et du Moyen Atlas) à remplissage essentiellement tertiaire et quaternaire perméable. Les deux dernières unités renferment également des formations calcaires du Lias.

• Le Beht est constitué par des formations permo-traisiques et primaires imperméables.

• Le haut Sebou, qui fait partie du domaine atlasique, essentiellement constitué par les calcaires jurassiques perméables.

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Figure 14.12 Carte piézométrique de la nappe Gharb

Les unités géologiques aquifères d’extension régionale sont comprises dans la couverture sédimentaire du soubassement primaire. Ainsi, les grands réservoirs aquifères qui peuvent être soit libres, soit captifs, se situent dans les formations géologiques suivantes :

• Formation gréso-sableuses et palio-quaternaires du littoral atlantique (Gharb et Maamora).

• Formations fluvio-lacustres et palio-quaternaires de l’intérieur (bassin de Fès-Meknès).

• Formations calcaires (calcaire de lias moyen du bassin de Meknès-Fès).

2 Impact de la pollution sur la qualité des eaux du bassin

L’augmentation des installations industrielles, le développement du secteur agricole et l’extension des zones urbaines provoquent une dégradation rapide et incontrôlée de la qualité des eaux du bassin.

Durant ces dernières années, une nette dégradation de la qualité des eaux a été observée en amont des prises d’alimentation en eau potable. Cette dégradation atteint des niveaux très critiques lors des campagnes d’activités des huileries, à cause de l’importance de la charge polluante.

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2.1 Impact sur la qualité des ressources en eaux de surface

L’analyse des données physicochimiques, microbiologiques et biologiques des stations de prélèvement du bassin de Sebou permet l’obtention des deux cercles de répartition des qualités physicochimique, microbiologique et biologique.

Le cercle de répartition de la qualité physicochimique, microbiologique de l’ensemble du bassin de Sebou montre que la qualité est moyenne (27%) à bonne (61%), contre de mauvaise qualité (11%), alors que seulement 1% du bassin est d’excellente qualité.

L’analyse du cercle de répartition de la qualité biologique (IBG-RCS) du bassin montre le même pourcentage pour les classes de qualité « mauvaise » et « excellente ». Le reste du bassin est de moyenne à bonne qualité, avec respectivement 51% pour la classe moyenne et 26% pour la classe bonne.

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Figure 14.13 La qualité des ressources en eaux de surface dans le bassin de Sebou Source : Traitement des données de l’ABHS (2013).

La majorité des stations secondaires du bassin de l’oued Sebou ont une qualité très mauvaise à mauvaise (en 2013). On comparant ces résultats avec ceux de 2007, on

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remarque une augmentation de la contamination des eaux du cours d’eau dans la plupart des stations secondaires du bassin. En 2007, 42% des points possèdent une qualité d’eau bonne à moyenne, par contre 58% des points disposent d’une qualité mauvaise à très mauvaise. En 2013, seulement 28% des stations présente une qualité bonne à moyenne, alors que le reste des stations présente une qualité des eaux de type mauvais à très mauvais. Le degré de pollution entre 2007 et 2013 dans les stations secondaires a augmenté, ce qui indique que l’état de qualité des eaux de surface du bassin de Sebou s’aggrave au fil des années.

2.1 Impact sur la qualité des ressources en eaux des nappes phréatiques

La forte charge polluante risque de contaminer – ou plutôt contamine – les nappes phréatiques qui circulent à des faibles profondeurs (de 4 à 15m), sous un substratum perméable.

Figure 14.14 La qualité des ressources en eaux des nappes phréatiques dans le bassin de Sebou.Source : Traitement des données de l’ABHS (2013).

La dépollution dans le bassin de l’oued de Sebou revêt un caractère urgent si l’on veut sécuriser l’alimentation en eau, améliorer les conditions d’hygiène sanitaire et assurer le développement économique et social de la région.

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2.2 Impact sur la biodiversité

La pollution est très visible et très contraignante dans de nombreux points. Pratiquement, toutes les lagunes et tous les oueds en souffrent ainsi que de nombreux points de la côte où sont mis en place des collecteurs d’eaux usées domestiques ou industrielles ou encore des décharges non contrôlées. C’est une pollution qui n’affecte pas uniquement la biodiversité en tant qu’écosystème, espèce ou ressource génétique, mais cause d’importants dégâts sur le plan socio-économique. En effet, hormis les mortalités causées dans certaines populations de la biodiversité, la pollution était à l’origine de la fermeture des unités de production, provoquant par la même occasion des contraintes socio-économiques non négligeables (perte de recettes/revenus, perte de postes de travail, chômage, etc.).

Il est admis que le changement climatique constitue une menace universelle pour tous les écosystèmes, mais faute d’informations scientifiques précises sur la vulnérabilité des différentes composantes de ces écosystèmes et leurs dynamiques face aux impacts actuels et futurs, il est difficile de pouvoir s’exprimer clairement avec déterminisme quand il s’agit de ces aspects. Certes, dans une région comme Kénitra, l’impact sur la biodiversité ne peut être aussi perceptible et spectaculaire comme c’est le cas pour les événements extrêmes (inondations, sécheresses, etc.), mais tous les écosystèmes demeurent très sensibles aux impacts climatiques dans la mesure où ils font déjà face à plusieurs facteurs de stress tels que la destruction des habitats, le recul du potentiel hydrique, l’avancement de l’urbanisation et l’augmentation des pollutions. Ci-après quelques manifestations :

• Perte d’habitats humides : L’assèchement direct par drainage fut pratiqué pendant longtemps dans les régions du Gharb. Induisant des pertes d’habitats sur leurs marges, par recouvrement/remblaiement au profit de l’agriculture ou de l’urbanisation.

• Les pompages effectués dans les nappes (eau potable, irrigation) sont devenus si nombreux qu’ils sont arrivés à mettre en péril certaines ressources, en particulier lors des périodes de sécheresse.

• La transformation d’habitat : les modifications des cours d’eau engendrées par les barrages sont si importantes qu’elles devraient être considérées comme des pertes d’habitats naturels. Les lits des rivières à l’aval des retenues sont pratiquement réduits à des chenaux temporaires, voire à des canaux d’évacuation d’eaux usées. Les pertes en biodiversité conséquentes à ces retenues sont inestimables.

• La surexploitation des ressources aquatiques est un fait tout à fait attendu, vu la forte croissance démographique.

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• L’exploitation de la végétation (coupe et pâturage) a atteint des seuils intolérables. L’élimination du couvert végétal signifie la disparition (partielle ou totale) de types d’habitats ; il en résulte forcément un décroissement, sinon la disparition, de populations animales. Les oiseaux, très sensibles (rares/menacés), sont les premiers à être affectés.

• Les pressions anthropiques et les transformations de l’espace pour satisfaire les besoins en développement socio-économique provoquent des dégradations plus ou moins prononcées des ressources biologiques et paysagères et en services écologiques. Ces effets négatifs sont souvent aggravés par des phénomènes naturels défavorables tels que les sécheresses prolongées et récurrentes, l’ensablement des barrages, etc.

• La pollution : les cours d’eaux constituent dans de nombreux cas, des exutoires à ciel ouvert où sont rejetés les déchets de diverses origines domestiques, industrielles et agricoles.

Une grande partie de la dégradation de la biodiversité dans le bassin de Sebou est due principalement à la dégradation de la qualité de l’eau. Une étude sur la biodiversité de l’Institut Scientifique de Rabat, qui a dressé le premier inventaire national des macros invertébrés et des poissons d’eau continentale, a proposé un schéma typologique pratique de ces eaux et une synthèse des impacts et des activités humaines qui affectent leur biodiversité (Dakki, non daté).

3 Impact sur la santé humaine

Les conséquences des événements climatiques, qu’elles soient directes ou indirectes, sont souvent tragiques, notamment pour la santé des populations, sachant que cet aspect retient encore une attention insuffisante de la part des chercheurs et des décideurs.

Bien que les impacts sanitaires du changement climatique soient divers et complexes, on se limitera dans ce travail aux maladies transmises par l’eau. On entend par «maladies liées à l’eau » celles contractées par ingestion, par contact direct ou encore les maladies pour lesquelles l’eau est le milieu de vie d’hôtes de larves ou de parasites.

Des études et des preuves scientifiques de plus en plus nombreuses suggèrent fortement que le changement climatique a et aura des effets considérables et divers sur la santé humaine. L’augmentation de la température, ainsi que les événements climatiques extrêmes (comme les inondations), entraînent une accumulation de débris et la pollution de l’eau, ce qui ne fait qu’exacerber les maladies.

Selon l’Organisation Mondiale de la Santé (OMS) (2015), « les inondations contaminent les sources d’eau douce, accroissent le risque de maladies à transmission hydrique et créent des gîtes larvaires pour des insectes vecteurs de maladies infectieuses » (OMS, COP 21).

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Selon May (2012), « il faut considérer les maladies infectieuses comme des complexes en soi ». L’auteur a classé les maladies selon le nombre de facteurs impliqués. Les maladies à deux facteurs comprennent l’agent infectieux et l’humain. Celles à trois facteurs comprennent les mêmes facteurs auxquels on ajoute le vecteur. Finalement, l’hôte animal constitue le quatrième facteur de la dernière classe (zoonose). L’environnement affecte chacun de ces facteurs et les complexes à trois et à quatre facteurs seront les plus touchés par le changement climatique. La distribution de ces maladies est généralement limitée par la disponibilité du vecteur et la disponibilité d’hôtes constituant le réservoir. Ces deux éléments sont directement ou indirectement limités par la température ou les précipitations.

3.1 Les maladies hydriques dans la région de Kénitra

Il s’agit en premier lieu des « maladies hydriques » qui sont provoquées par de l’eau contaminée par des déchets humains, animaux ou chimiques. Elles comprennent entre autres le choléra, la typhoïde, la polio, la méningite, l’hépatite A et E, et la diarrhée. Chaque jour, 60 007 personnes meurent dans le monde à cause de maladies diarrhéiques. En 2001, près de 2 millions de morts ont été recensés, dont plus de la moitié sont des enfants. Ces maladies ont ainsi tué plus d’enfants au cours de la dernière décennie que tous les conflits armés depuis la fin de la seconde guerre mondiale (Vedura, 2015).

Figure 14.15 Distribution de typhoïde dans le bassin de Sebou, 2012 Source : Traitement des données de la Direction de la Planification et des Ressources Financières sur la situation sanitaire du Maroc.

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Les enquêtes de l’étude de BECOM menée en 2004 dans les centres de la région de Sebou (Shaker, 2004), montrent que le taux de prévalence de gastro-entérites atteint à proximité de l’oued Sebou près de 98%, contre 5% des centres de santé éloignés de l’oued Sebou. De même, les taux de prévalence de typhoïde et de choléra sont de 4 à 6 fois plus élevés. Ces données ont été confirmées par les études publiées par la Direction de la Planification et des Ressources Financières sur la situation sanitaire du Maroc (62% des cas de typhoïde déclarés sont au niveau du bassin du Sebou).

3.1.1 Répartition des maladies hydriques dans la région de Kénitra

Les résultats de l’enquête menée à l’hôpital principal de la région du Gharb en 2015, montrent l’étendue de la propagation des maladies transmises par l’eau dans la région.

Figure 14.16 Répartition des maladies hydriques dans la région Gharb-Chrarda-Béni hssen (2014). Source : Enquête sur le terrain en 2015.

3.1.2 La fréquence de certaines maladies associées à l’eau contaminée selon « les groupes d’âge »

Les états pathologiques associés à la pollution de l’eau (anémie, colique rénale, inflammation de la peau, diarrhée, gastro-entérite, hépatite (A + E), hypothyroïdie, leishmaniose, méningite, typhoïde) que nous avons inventoriés à l’Hôpital Idrissi,

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concernent toutes les tranches d’âge, avec une fréquente assez élevée chez les enfants et les personnes âgées, c’est-à-dire les groupes les plus vulnérables.

Figure 14.17 Fréquence des maladies hydriques selon les tranches d’âge dans la région Gharb-Chrarda-Béni hssen (2014). Source : Enquête sur le terrain en 2015.

3.1.3 Répartition mensuelle de certaines maladies liées à l’eau contaminée

Pour justifier le lien entre le réchauffement climatique et l’émergence de maladies, nous avons évalué la distribution mensuelle de maladies associées à l’eau contaminée selon les mois. Ainsi, on a remarqué que la plupart des cas pathologiques ont été enregistrés au cours des mois de mai (127 cas), de juin (117 cas), de juillet (112 cas) et de septembre (109 cas), ce qui signifie que l’été (la hausse de température) est considéré comme la période la plus importante en ce qui concerne la propagation de ces maladies, en particulier les maladies de la peau et celles liées à l’inflammation de l’estomac et des intestins (gastro entérite).

Tableau 14.1 Fréquence des maladies hydriques dans la région de Gharb-Chrarda-Béni hssen selon les mois (2014).

Total Typhoïde Méningite Gastro-entérite

Hépatite )A+E(

Goitre Diarrhée Dermatose colique

néphrétique Anémie Mois

76 1 0 40 5 0 7 2 5 15 Janvier

77 0 0 39 5 1 8 1 6 17 Février

94 0 0 50 6 2 5 4 7 20 Mars

99 0 1 58 3 2 4 6 7 18 Avril

127 0 0 66 5 1 8 12 17 18 Mai

117 0 1 59 4 2 4 8 21 18 Juin

112 1 0 67 3 0 6 5 10 20 Juillet

020406080100120140160

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96 0 1 54 3 1 3 3 12 19 août

109 0 2 47 5 0 3 2 16 34 Sept

77 0 1 32 5 0 7 3 15 14 Oct

77 0 1 36 5 0 5 1 10 19 Nov

93 0 1 36 3 0 15 0 14 24 Déc

1153 2 8 584 52 9 75 47 140 236 Total

Source : Enquête sur le terrain en 2015.

3.1.4 Variation de la contamination par les maladies hydriques par catégorie de sexe

Les données extraites des registres de l’hôpital Idrissi montrent que les femmes représentent la majorité des catégories atteintes de maladies liées à la pollution de l’eau (61% des cas enregistrés).

Tableau 14.2 Fréquence des maladies hydriques selon le sexedans la région de Gharb-Chrarda-Béni hssen (2014).

Total

Typhoïde

Méningite

leishmaniose

Gastro-entérite

Hépatite

(A+E)

Goitre

Diarrhée

Dermatose

colique néphréti

que

Anémie

450 2 3 1 231 26 3 22 18 66 78 nbre H

39 0 0 0 20 2 0 2 2 6 7 %

704 0 5 0 353 26 6 53 29 74 158 nbre F

61 0 0 0 31 2 1 5 3 6 14 % 115

4 2 8 1 584 52 9 75 47 140 140 nbre

Total 100 0,2 0,7 0,1 50,6 4,5 0,8 6,5 4,1 12,1 12,1 %

Source : Enquête sur le terrain en 2015.

3.2 Analyse de la relation santé humaine - changement climatique

Dans tous les groupes de populations, les personnes très âgées et très jeunes sont celles qui risquent le plus de subir les impacts sanitaires du changement climatique et, de manière générale, les femmes sont plus vulnérables que les hommes. En plus, les taux de mortalité, lors des événements climatiques extrêmes, sont souvent plus élevés pour les femmes que pour les hommes car les femmes sont soumises à de nombreuses barrières politiques, sociales, économiques et autres qui restreignent leurs capacités à se protéger. Ces mêmes catégories de personnes qui sont les plus vulnérables sont aussi souvent les moins en mesure de s’adapter.

Comme nous l’avons montré ci-haut, les conditions climatiques ont de fortes incidences sur les maladies d’origine hydrique (comme le choléra) qui prospère en période d’augmentation des précipitations. Aussi, la hausse des températures est susceptible d’avoir une incidence sur le cycle de vie des moustiques, ce qui favoriserait la transmission de

Sexe

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maladies par ce vecteur. D’autres maladies, comme la fièvre provoquée par un virus que les moustiques transmettent aux humains, devraient voir leur prévalence augmenter.

Si ces conditions sont amplifiées par le changement climatique, on doit s’attendre à une augmentation des épidémies, en particulier dans les régions ayant de mauvaises conditions sanitaires (infrastructures sanitaires, équipements, personnels,…) ou frappées par des inondations.

Dans son rapport de 2008, l’OMS estime que l’eau sale est à l’origine de 9,1% des maladies et de 6% des décès enregistrés chaque année dans le monde. Les enfants sont les premières victimes, puisque l’eau est en cause dans 22% des maladies chez les moins de 14 ans. Par ailleurs, il y a une forte inégalité entre les pays riches et pauvres dans ce domaine : l’eau est à l’origine de moins de 1% de la morbidité dans les pays développés tandis que cette proportion atteint 10% dans les pays en développement. Le chiffre des décès varie de 0,5% pour les pays développés à 8% pour les pays en développement. Chez les enfants, l’eau sale est responsable d’un quart des décès. La conséquence directe est que 1,6 million de personnes meurent chaque année de maladies diarrhéiques. 90% de ces personnes sont des enfants de moins de 5 ans, vivant pour la plupart dans les pays du Sud.

Les problèmes dus à une mauvaise qualité biologique de l’eau sont aussi bien connus. Ce sont les maladies du péril fécal (eaux souillées, aliments souillés, mains sales) : diarrhées infectieuses en particulier le choléra, la fièvre typhoïde et les hépatites virales A et E, auxquelles il faut ajouter la leptospirose. De plus, les inondations favorisent indirectement la prolifération des maladies à transmission vectorielle, en favorisant la multiplication des gîtes larvaires.

Les conséquences de certaines contaminations, en particulier les contaminations bactériologiques, sont telles que les mesures préventives et les traitements correctifs sont d’une importance capitale et ne doivent faire l’objet d’aucun compromis (Aubry et Gaüzère, 2012).

Wittmann et Baylis (2000) affirment de leur part qu’un des impacts les plus immédiats et observables du changement climatique est la modification de la distribution géographique et de l’abondance de plusieurs espèces d’insectes. Une expansion de la distribution et une population plus abondante affectent nécessairement la prévalence des maladies transmises. Le climat ne manque pas d’influencer aussi grandement la physiologie et la densité de la population de ces derniers. Une température plus élevée accélère le cycle de vie du vecteur.

Barry Alto, de l’Université de Floride, avait examiné comment la température affecte le cycle complet des moustiques. Il avait examiné le développement de ces moustiques à différents niveaux de température. Il conclut qu’une population exposée à une température

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plus élevée grandit plus rapidement et que les moustiques ont un temps de développement plus court (Vicki, 2001). Un temps de développement plus court augmente le nombre de générations et d’adultes pouvant être produits au cours d’une seule saison (Wittmann et Baylis, 2000). Ainsi, un été plus chaud occasionne une production plus rapide du vecteur adulte.

Par contre, il est à noter qu’une hausse de la température ambiante n’est pas nécessairement significative de facilitation de la transmission des maladies nécessitant des vecteurs. En effet, une chaleur excessive, tout comme un froid excessif, tue les insectes. Cependant, dans les limites de température qui permettent leur survie, l’air plus chaud pourrait permettre une prolifération plus rapide des moustiques et ainsi plus de morsures (Vicki, 2001).

Il est à noter que la relation entre les indices climatiques et la capacité des vecteurs à transmettre les maladies est non linéaire parce qu’il existe plusieurs autres facteurs tels que : l’augmentation de la pauvreté, l’augmentation de l’urbanisation, la croissance de la population, etc. (Jonsson et Reid, 2000). En effet, le fait qu’il y ait des moustiques compétents en hiver n’est peut-être pas dû au réchauffement global, mais plutôt à l’existence de nombreux égouts servant d’abris aux moustiques durant l’hiver (facteur d’urbanisation).

« Il existe un lien très étroit entre l’émergence de nouvelles maladies et les changements environnementaux ", a déclaré Nick Nutall, porte-parole du Programme des Nations Unies pour l’Environnement (PNUE). « Nous commençons seulement à le comprendre. Les changements rapides que subissent les écosystèmes mondiaux dus principalement au déboisement et au changement climatique pourraient créer une instabilité dans la toile de la vie, ce qui semble favoriser la prolifération d’animaux nuisibles », a-t-il dit à la Chronique de l’ONU (Lloyd, 2016).

Depuis 1976, l’OMS a noté l’émergence de trente nouvelles maladies humaines, ainsi que la résurgence et la redistribution des maladies existantes. En s’y penchant de plus près, les scientifiques ont constaté l’existence d’un lien étroit entre les évènements climatiques extrêmes et les maladies. En effet, après la survenance de tels événements, on constate l’apparition des maladies d’origine hydrique. Le choléra en est un exemple, il est favorisé par les inondations. Il est transmis aux êtres humains par la consommation de nourriture ou d’eau contaminée, par exemple quand les égouts débordent et se déversent dans les réservoirs d’eau potable. Le choléra est responsable d’un grand nombre de maladies et de décès.

Les températures élevées favorisent le développement de maladies transmises par les moustiques ; dans ces conditions, des poches d’eau se forment dans les canalisations qui,

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associées à des températures élevées, créaient un environnement riche en matières organiques et idéal pour la transmission des maladies (Lloyd, 2016).

4 La vulnérabilité socioécologique

4.1 La sécurité hydrique : un enjeu vital

Le Sebou est l’une des ressources en eau les plus importantes du Maroc ; pourtant, il est parmi les fleuves les plus pollués de toute la région. Les pollutions au niveau du bassin ont atteint des seuils critiques, elles dépassent de loin toutes les normes nationales. Leurs effets négatifs sur la biodiversité, le développement agricole, etc. risquent de constituer un vecteur potentiel de prolifération des épidémies. La situation actuelle peut être considérée comme catastrophique.

La région de Kénitra, à l’instar d’autres régions du Royaume, est sous une pression anthropique grandissante à partir d’une variété d’utilisations ; avec comme conséquences des niveaux de pollution importants et un système socioécologique vulnérable. À ce chapitre, il faut noter que les dynamiques des systèmes socioécologiques sont influencées par de nombreux facteurs, y compris les politiques publiques et les facteurs contextuels liés aux processus tant locaux que globaux. Les décisions prises dans un endroit affectent souvent les personnes et les écosystèmes lointains. Par ailleurs, les impacts écologiques et socio-économiques peuvent ne pas être immédiatement observables ou prévisibles en raison des décalages dans le temps entre l’interaction entre actions anthropiques et dynamiques naturelles et l’apparition des conséquences écologiques et socio-économiques.

La question de la sécurité hydrique – qui est définie dans cet article commeun niveau acceptable des risques liés à l’eau pour les humains et les écosystèmes, couplée à la disponibilité de l’eau en quantité et en qualité pour soutenir les moyens de subsistance, la santé humaine, des services écosystémiques suffisants et la sécurité nationale – a fait l’objet d’un intérêt accru au cours de la dernière décennie. En même temps, la gouvernance de l’eau – définie comme l’ensemble des processus politiques, organisationnels et administratifs par lesquels les intérêts de la communauté sont articulés, les décisions sont prises et mises en œuvre, et les décideurs sont tenus responsables dans le développement et la gestion des ressources en eau et la prestation des services d’eau – a été de plus en plus reconnue comme un élément essentiel de la viabilité à long terme des ressources en eau. Peu d’attention a toutefois été accordé aux dimensions de la gouvernance de la sécurité hydrique.

Le processus de gouvernance des bassins versants multi-parties prenantes a été lancé au Maroc pour plusieurs raisons, y compris la gestion intégrée des questions environnementales par bassin versant ; la sensibilisation sur les causes multi-niveaux et les

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impacts des menaces liées à l’eau et la prise en compte des implications du changement climatique pour les ressources en eau.

En somme, la réalisation de la sécurité hydrique nécessite la coordination des acteurs dans un cadre régulatoire approprié et favorable, avec une implication forte des pouvoirs de surveillance et d’application.

4.2 Analyse de la vulnérabilité

Les sociétés contemporaines réalisent un peu plus chaque jour à quel point elles sont confrontées à des problèmes complexes. Les catastrophes liées aux événements climatiques extrêmes font partie de ces problèmes (Décamps et Mathieu, 2005). La communauté scientifique, toutes disciplines confondues, prend peu à peu conscience de ses responsabilités à l’égard de ces événements (WMO, 2004 ; ICSU, 2006 ; McBean, 2006). Encore, cette communauté doit-elle s’interroger sur la solidité de ses référentiels conceptuels, sur les conditions de leur utilité et sur la manière de les rendre accessibles aux décideurs. Une telle réflexion s’avère indispensable, du moins si l’ambition, comme l’évoque Jean-Christophe Gaillard, est « une remise en cause totale de l’approche contemporaine des catastrophes » ; une ambition bien plus partagée que ne le laisse entendre cet auteur (Décamps, 2007).

Une analyse de la vulnérabilité se doit de prendre en compte le concept de résilience à côté de ceux d’exposition et de sensibilité. Elle peut alors permettre d’expliquer les réponses possibles à des perturbations diverses et variées, et d’identifier quelles mesures assurent la durabilité dans un environnement incertain.

La résilience, autre composante de la vulnérabilité, est la capacité des systèmes socioécologiques à absorber les perturbations tout en conservant leurs structures essentielles, ainsi que les processus à l’origine de ces structures (Walker et al., 2002). La résilience reflète aussi l’aptitude à l’auto-organisation, à l’apprentissage, à l’adaptation (Folke et al., 2002) ; une aptitude liée en partie à la capacité de régénération après des crises. En fait, le concept de résilience remet en cause la vision traditionnelle de systèmes écologiques revenant toujours vers un même état d’équilibre stable, pour adopter celle de systèmes écologiques passant d’un domaine de stabilité à d’autres domaines, de manière inattendue, parfois irréversible, à la faveur de perturbations récurrentes, d’intensités plus ou moins fortes (Scheffer et al., 2001). Les systèmes résilients disposent ainsi de mécanismes variés qui leur permettent de faire face aux changements et aux crises (Gunderson et Holling, 2002 ; Allenby et Fink, 2005 ; Adger et al., 2005).

La vulnérabilité aux événements extrêmes dépend donc du contexte dans lequel se produisent ces événements ; un contexte démographique, économique et environnemental actuellement en transformation rapide sur l’ensemble de la planète. Réduire cette vulnérabilité passe par une organisation des connaissances scientifiques en liaison avec les

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processus de prise de décision (Sarewitz et Pielke, 2001). Une organisation dans laquelle : les catastrophes dues aux événements extrêmes sont considérées dans le contexte de systèmes socioécologiques ; la réduction de la vulnérabilité correspond à l’objectif privilégié des recherches ; les processus de décision visant à cette réduction intègrent la connaissance et l’action. Ces processus sont eux-mêmes variés, complexes et changeants, impliquant à la fois des individus et des organisations plus ou moins vastes. Ils sont indissociables d’une réflexion permanente sur l’efficacité des décisions, leur amélioration et les solutions alternatives possibles (Décamps, 2007).

Figure 14.18 Les liaisons susceptibles d’affecter la vulnérabilité d’un système en un site donné. Source : Adapté de H. Décamps : Natures Sciences Sociétés 15, 48-52 (2007)

Les influences extérieures au site, humaines (1) et environnementales (2), sont à l’origine de perturbations (3) dont les effets sont déterminés par des conditions d’exposition (4), de sensibilité (5) et de résilience (6, 7, 8) propres au site. (1) influences humaines extérieures : macroéconomie et politique, institutions, tendances globales ; (2) influences environnementales extérieures : état de la biosphère, changement environnemental global ; (3) perturbations : stress et événements soudains dus à une variabilité « normale » ou exceptionnelle (événements extrêmes) d’origines externes ou internes ; (4) éléments d’exposition : individus, groupes sociaux, pays, écosystèmes exposés à des événements de diverses fréquences, ampleurs et durées ; (5) systèmes socioécologiques caractérisés à la fois par un capital humain et social (populations, droits à l’échange, institutions, structures

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économiques) et un capital naturel (sols, eau, climat, minéraux, écosystèmes) ; (6, 7, 8) mécanismes de réponse aux perturbations, caractérisant la résilience du système considéré.

Conclusion

Les impacts du changement climatique sur les systèmes socioécologiques et la santé sont associés aux questions de gouvernance.

À l’échelle du territoire de la région étudiée, peu de mesures sont lancées pour engager un processus d’adaptation. Les acteurs n’ont pas établi de plans appropriés de surveillance de la vulnérabilité socioécologique, de surveillance des maladies et de leurs vecteurs, de lutte contre ceux-ci ou de préparation aux situations d’urgence. En outre, ils ne possèdent qu’une connaissance scientifique limitée, un cadre réglementaire et politique relativement favorable, des ressources humaines et financières limitées, des infrastructures insuffisantes et des systèmes de santé fragmentés. Autant d’éléments qui constituent des handicaps pour une bonne préparation aux effets préjudiciables du changement climatique.

L’ampleur de la situation rend impérative une action dynamique de sensibilisation aux menaces que représente le changement climatique. Toutefois, pour ce faire, il faut mettre en place d’urgence une planification stratégique et un financement adéquat. Une réponse efficace passe par une évaluation des risques pour le système socioécologique et pour la santé, une action intégrée des investissements financiers et une collaboration multisectorielle. Par ailleurs, la base de connaissances doit être améliorée pour faciliter les changements de politique et les actions multisectorielles dans les domaines de l’environnement, de la santé, de l’éducation, du commerce et de l’industrie.

Un effort concerté doit être fait pour promouvoir des partenariats associant des réseaux locaux et nationaux et toutes parties prenantes, pour mettre en place des plans complets visant à atténuer les effets pressentis du changement climatique. Des recherches sur l’évaluation de ces effets sur les systèmes socioécologiques et sur les maladies transmises par l’eau et par les vecteurs doivent être élargies à d’autres régions.

De plus, le développement de système de surveillance et de moyens d’identification des maladies est extrêmement important. Les systèmes de surveillance permettent de suivre l’étendue de la propagation dans l’espace et le temps (pour montrer la propagation géographique et temporelle), d’identifier les régions à risque et de développer des stratégies pour prévenir les infections. Ces systèmes de surveillance ne doivent pas impliquer seulement les régions affectées, mais aussi toutes les régions avoisinantes puisqu’elles sont à haut risque d’être atteintes.

En résumé, nous ne possédons à présent que très peu de données et d’informations, il est donc évident qu’on ne peut faire une conclusion précise quant à l’impact du changement global sur les systèmes sanitaires et socioécologiques au Maroc. Par contre, nous ne pouvons nier l’influence des inondations et du réchauffement climatique sur les maladies

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hydriques et celles transmises par vecteur puisqu’ils affectent les vecteurs, composants importants dans la transmission de l’agent infectieux, et donc de l’établissement d’une endémie.

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