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8/18/2019 Livres de Secrets , Alexis Le Piémontais - Dédicace Du Traducteur Et Préface de l'Auteur http://slidepdf.com/reader/full/livres-de-secrets-alexis-le-piemontais-dedicace-du-traducteur-et-preface 1/3 TECK YONG Christopher M1 « De la Renaissance aux Lumières »  Néo-latin Devoir de validation Six livres de secrets,  par Alexis Piémontais, contenant une variété admirable de considérations. Traduits de l'italien au latin pour la première fois  par Johann Jacob Wecker, médecin. À son éminence révérendissime D. Caspar Müller, abbé de Saint-Blaise, très digne Seigneur et Patron très vénérable, Johann Jacob Wecker, médecin, adresse ses plus vives salutations. Les deux uniques raisons qui m'ont poussé à traduire ces livres de l'italien au latin, connais- les, révérendissime et excellent père : d'abord que je voulais m'exercer en quelque façon à la langue italienne, ensuite que j'ai pensé que ces livres seront utiles aux hommes de tous genres. De fait, comme nous oublions facilement les langues que nous ne pratiquons pas, c'est pour éviter que cela m'arrive que j'ai souhaité entreprendre la traduction de ces livres ; quant à la mesure de l'utilité qu'ils auront auprès de tous, elle sera évidente à quiconque les lira : puisqu'il n'y a pas ou presque de métier d'aucune sorte auquel il ne porte le plus grand secours. Comme la coutume et l'habitude imposent que celui qui veut éditer une œuvre porte celle -ci à la lumière sous le patronage d'un nom, moi aussi j'imiterai cette habitude honorable : c'est sous ton saint nom que j'ai entrepris de publier ces livres traitant de choses variées et peu connues, parce que tu as toujours accordé tes faveurs aux amateurs des lettres, et que chacun témoigne non seulement de ta bienveillance et de ton grand humanisme, mais aussi des nombreuses et très grandes vertus qui t'ornent, en lesquelles tu surpasses tous les autres hommes. Ainsi, révérendissime abbé, veuille recevoir ces livres de secrets, et accepter de cette façon non la grandeur d'un don, mais l'intention d'un donateur. Ils contiennent en effet des recettes secrètes et obscures de toute sorte, celles-ci non moins variées que vraies, pourvu qu'elles soient bien préparées, et administrées. La premier livre contient des remèdes pour des maladies variées, remèdes rares, certes, mais que la raison a fait trouver  –  toutefois je ne conseille pas de les utiliser sans l'avis des médecins,  puisque quand on veut soigner, il faut connaître beaucoup de choses. Qui en effet soignera correctement et parfaitement une maladie, s'il ignore la partie du corps qui est touchée, lespèce de la maladie, et sa cause ? Personne, ce me semble, sauf peut-être quelques hommes du communs ou empiriques qui, comme des assassins, soignent les gens en leur saignant la gorge, au mépris de la raison. C'est pourquoi, puisque aucun des gens de ce genre, excepté un médecin savant, ne peut trouver quelle est la partie du corps affectée, l espèce de la maladie, sa cause, et toutes ces choses à  partir de quoi il est possible de déterminer et le mode de guérison et son importance, je juge que l'on ne doit utiliser aucun remède à la légère, et seulement si l'on a auparavant pris l'avis d'un médecin compétent. Mais pour en venir au deuxième livre, il présente la façon de fabriquer des huiles, à partir de

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TECK YONG ChristopherM1 « De la Renaissance aux Lumières »

 Néo-latinDevoir de validation

Six livres de secrets, par Alexis Piémontais,contenant une variété admirable de considérations.

Traduits de l'italien au latin pour la première fois par Johann Jacob Wecker, médecin.

À son éminence révérendissime D. Caspar Müller,abbé de Saint-Blaise,

très digne Seigneur et Patron très vénérable,

Johann Jacob Wecker, médecin,adresse ses plus vives salutations.

Les deux uniques raisons qui m'ont poussé à traduire ces livres de l'italien au latin, connais-les, révérendissime et excellent père : d'abord que je voulais m'exercer en quelque façon à la langueitalienne, ensuite que j'ai pensé que ces livres seront utiles aux hommes de tous genres. De fait,comme nous oublions facilement les langues que nous ne pratiquons pas, c'est pour éviter que celam'arrive que j'ai souhaité entreprendre la traduction de ces livres ; quant à la mesure de l'utilité qu'ilsauront auprès de tous, elle sera évidente à quiconque les lira : puisqu'il n'y a pas ou presque de métierd'aucune sorte auquel il ne porte le plus grand secours.

Comme la coutume et l'habitude imposent que celui qui veut éditer une œuvre porte celle-ci àla lumière sous le patronage d'un nom, moi aussi j'imiterai cette habitude honorable : c'est sous tonsaint nom que j'ai entrepris de publier ces livres traitant de choses variées et peu connues, parce quetu as toujours accordé tes faveurs aux amateurs des lettres, et que chacun témoigne non seulement deta bienveillance et de ton grand humanisme, mais aussi des nombreuses et très grandes vertus quit'ornent, en lesquelles tu surpasses tous les autres hommes.

Ainsi, révérendissime abbé, veuille recevoir ces livres de secrets, et accepter de cette façonnon la grandeur d'un don, mais l'intention d'un donateur.

Ils contiennent en effet des recettes secrètes et obscures de toute sorte, celles-ci non moinsvariées que vraies, pourvu qu'elles soient bien préparées, et administrées.

La premier livre contient des remèdes pour des maladies variées, remèdes rares, certes, maisque la raison a fait trouver  –  toutefois je ne conseille pas de les utiliser sans l'avis des médecins,

 puisque quand on veut soigner, il faut connaître beaucoup de choses. Qui en effet soigneracorrectement et parfaitement une maladie, s'il ignore la partie du corps qui est touchée, l’espèce de lamaladie, et sa cause ? Personne, ce me semble, sauf peut-être quelques hommes du communs ouempiriques qui, comme des assassins, soignent les gens en leur saignant la gorge, au mépris de laraison. C'est pourquoi, puisque aucun des gens de ce genre, excepté un médecin savant, ne peuttrouver quelle est la partie du corps affectée, l’espèce de la maladie, sa cause, et toutes ces choses à

 partir de quoi il est possible de déterminer et le mode de guérison et son importance, je juge que l'on

ne doit utiliser aucun remède à la légère, et seulement si l'on a auparavant pris l'avis d'un médecincompétent.Mais pour en venir au deuxième livre, il présente la façon de fabriquer des huiles, à partir de

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composants odorants, ainsi que la composition des liquides, des poudres odorantes et des détersifs,toutes choses qui sont jugées non seulement utiles en beaucoup d'occasions, mais aussi dignes d'êtresues, et très belles.

Le troisième livre enseigne à confire des fruits de tout genre, délicatement et avec art, d'unefaçon qu'à mon avis cette manière de confire est demeurée inconnue jusqu'à ce jour de la majorité desgens.

Le quatrième livre expose ce qui concerne l'embellissement du corps, selon la technique deCypris ; ce livre-ci pourrait peut-être sembler indigne de lecture, si ce n'est que cet artifice pourembellir le corps a aussi du rapport avec une partie de la médecine, et qu'il est nécessaire aux femmesd'un certain rang, ce que Galien atteste dans le premier livre de son traité  De la composition des

médicaments selon les lieux. Criton a écrit un livre sur l'embellissement des corps ; de même,Cléopâtre en composa deux, l'un sur la cosmétique, l'autre sur la beauté féminine, que le même Galiencite tous les deux dans le même passage de son traité. Mais à quoi sert tant d'exemples ?  –  puisque je

 porte à la lumière ces livres, non comme leur auteur, mais comme leur traducteur, dont la mission estde transmettre, avec et scrupules, les bontés qu'il a trouvées chez l'auteur qu'il se donne à traduire.

Passons là-dessus, pour en venir au cinquième livre, qui enseigne à teindre en n'importe quellecouleur os, bois, métaux, peaux et autres matériaux de ce genre ; ce livre est extrêmement utile,

notamment aux artisans, de même que le sixième, qui expose divers points à l'usage des orfèvres etdes autres artisans.

Pour toutes ces raisons, père Révérendissime, je te demande de daigner accepter pour tesvertus singulières ce petit présent, quelle qu'en soit la valeur, en le considérant comme la première

 pierre de mon entreprise. Après lui en effet, je me mettrai en peine de te donner des choses plusgrandes, et plus dignes, par lesquelles tu reconnaisses mieux ma déférence à ton égard et messentiments pleins de gratitude pour tous les tiens. Porte-toi bien, ô mon Maître et Patron. Puisses-tuvivre excellemment et le plus longtemps possible.

Bâle, 7 juillet 1559.

PréfaceMonsieur Alexis le Piémontais au lecteur

Sans doute, ceux que je connais depuis de nombreuses années pourront savoir aussi que jesuis né, par la volonté de Dieu, d'un rang noble (je parle selon l'expression commune et non selonl'opinion vaine de ceux qui mettent la noblesse davantage dans les mérites des autres que dans lesleurs propres) et qu'en outre mon mérite s'ajoute, par Fortune, à tous les biens et commodités quisoient. Je dirai aussi, non pour me glorifier, mais pour rendre grâce aux dons de Dieu, que je me suisoccupé de littérature depuis mon enfance, et que je connais non seulement le latin, le grec, l'hébreu,mais aussi l'araméen et l'arabe, ainsi que plusieurs langues d'autres nations.

Comme surtout je me suis dédié à l'étude de la philosophie, et à la connaissance des secretsde la nature, j'ai voyagé, pendant cinquante-sept ans, afin d'acquérir la science des hommes savants.Aussi ai-je acquis la connaissance de nombreuses choses très secrètes : il faut dire que je n'ai pashésité à les puiser non seulement chez des érudits, mais aussi chez des femmes de peu de vertu, des

 pharmaciens, des paysans. Je me suis rendu par trois fois en Orient, et j'ai aussi parcouru les autres parties du monde, dans lesquelles je suis en mesure d'affirmer avec certitude que je ne suis pas resté plus de cinq mois dans un même lieu.

Cette curiosité et ce désir que j'avais non seulement de savoir les disciplines universelles, maisaussi les expériences et les secrets singuliers, outre qu'ils répondaient à un désir naturel de tous leshommes (tous désirent naturellement savoir), étaient soutenus par une forme d'ambition, de désir de

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gloire et de cupidité ; et surtout je cherchais à savoir ce qui était inconnu des autres. Ce qui fait que je n'ai pas voulu partager mes découvertes, même avec mes amis les plus proches (tant j'étais décidéà en garder le secret). Et en effet je soutenais toujours que, si des secrets sont connus par tous, alorson ne peut plus dire qu'ils sont secrets, mais vulgaires et communs.

Or il arriva –  j'avais alors quatre-vingt-deux ans et sept mois, et je me trouvais à Milan –  qu'un

artisan fut atteint par un calcul si important qu'il ne put rendre son urine pendant deux jours ; unchirurgien, qui voulait le soigner, comme il savait que j'avais des remèdes sûrs contre cette maladie,me pria de lui communiquer une recette, ou de lui fournir le médicament par lequel il puisse soignerde son souffrance le travailleur malade.

Or moi, comme je reconnus qu'il voulait faire son profit des trouvailles des autres, et s'enattribuer l'honneur, je refusai de faire ce qu'il demandait, mais proposai, s'il me conduisait lui-mêmeau malade, d'administrer, et ce gratuitement, un remède au patient. Le médecin alors, soit qu'il euthonte de recevoir d'autrui de l'aide dans son métier (peut-être en effet s'était-il vanté de posséder cesecret-là), soit pour un gain, attendit encore deux jours avant de me mener enfin au malade. Lorsque

 je parvins à son chevet, le pauvre rendait déjà l'âme : et, en me regardant, lamentablement, avec desyeux faiblement ouverts, il passa de vie à trépas.

Je fus si bouleversé de cet état, et affecté d'une compassion si grande, que je désirai moi aussimourir, surtout de constater que c'étaient mon ambition et ma vaine gloire qui avaient empêché quecet homme bon soit soulagé par les remèdes que notre Dieu et Père très clément m'avait communiqués.Et même, cette douleur de mon âme, si vive, avait tant de force sur moi, que déjà je ne désirais plusvivre aux yeux des hommes, mais embrasser une vie de solitude. Comme je savais m'être mis en telledisposition, que je ne pourrais pas vivre en compagnie de moines plus courageux que moi, je mecherchai quelque lieu éloigné de la civilisation ; là, je possède un petit champ pour éviter l'oisiveté,et quelques livres : j 'y mène une vie que je juge monastique et religieuse, avec un seul serviteur, dont

 je me sers pour aller acheter, et non mendier, ma nourriture, et tout ce dont j'ai nécessité.

 Ne pouvant oublier ce malade dont j'avais peu ou prou causé la mort, je voulus publier non

seulement cette recette-là, mais tous mes secrets, dont je sais avec certitude que seuls peu de gens les possèdent, et comme je ne voulais pas publier d'autres choses que des recettes vraies et constatées parexpérience, j'ai passé les deux derniers jours, à partir de mes écrits ou de ma mémoire, à réunirseulement celles dont j'avais reconnu la vérité et la certitude absolues.

S'il apparaît que certaines recettes (peu nombreuses toutefois) apparaissaient déjà dansd'autres publications, il ne faudra pas néanmoins les juger moins utiles, pour la raison que celles quiétaient douteuses auparavant, seront désormais, par la garantie de ma plume, considérées commecertaines et sûres. De fait, je peux affirmer avec certitude que je suis dans de telles dispositions d'âme,que je ne chercherais pas à éditer vainement des choses prétendument vraies et sûres, dont je n'eusse

 pas moi-même reconnu la validité. Et surtout, à mon âge, dans la disposition de corps et d'esprit où je suis, jamais je ne transmettrais au public quoi que ce soit qui doive être pour moi ignominieéternelle.

Je voudrais seulement prévenir les lecteurs de toujours agir avec prudence, et, pour ce quitouche le corps, de demander l'avis et l'aide des médecins ; quoique je n'ignore pas qu'il s'en trouvecertains, qui, par jalousie primaire ou par arrogance, ont pris l'habitude de blâmer tout ce qu'eux-mêmes ignorent.

Et si, pour une des recettes écrites dans cet ouvrage, quelque chose se passe avec trop peu desuccès, qu'on pense qu'il a pu arriver qu'on se fût trompé en quelque étape, et qu'on recommence larecette en question avec une plus grande prudence, en tenant pour certain que rien ne se trouve dansce livre qui ne soit d'une certitude et d'une vérité absolues.

C'est à Dieu que pour finir je rends grâce de tout mon travail, et outre cela, de toutes les autreschoses que tant d'années, de labeurs, de voyages, de frais, d'étude et d'industrie m'ont fait acquérir, etque vous me réclamerez ensuite, si Dieu le veut.