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Page 1: Lm Dimanche Lmd Lm7 2011 11 06 0000033 Economie

6NOVEMBRE2011 33

Contrôle qualité

Prix gonflés, affichages mensongers, restrictions géographiques…

Les sites de réservation d’hôtelsont des pratiques discutablesTOURISME De plus en plusutilisées par les vacanciers,les plates-formes en ligne tellesque Hotels.com ou Ebookers.chmanquent de transparencesur leurs tarifs. Elles pourraientêtre rappelées à l’ordre par laCommission de la concurrencedans les mois à venir.

Marie [email protected]

Pour des vacances de rêves aux Caraï-bes, le web promet des tarifs excep-tionnels. Bradés, même. Vraiment?Pas pour tout le monde. Si le consom-mateur suisse a l’habitude de payerplus cher son paquet de lessive, il nesait pas forcément que la même logi-que s’applique au secteur du tou-risme. Exemple avec Ebookers.ch,propriété du groupe Ortiz. En cher-chant une chambre pour deux per-sonnes, à Madrid, la semaine de Noël,nous sommes tombés sur un bonplan: le charmant Hôtel Praga, pour388 francs la semaine. Mais en faisantcette recherche depuis un ordinateurbasé en France, le site nous propose lemême établissement pour 273 euros,soit 333 francs. Pour les Suisses, lafacture est plus salée de 50 francs. Ladifférence est même plus importantesi l’on cherche à New York et Lon-dres, dans des hôtels cossus. Or,quelques heures après avoir envoyénos questions à Ebookers.ch, ces dif-férences de prix disparaissent. Ques’est-il passé? «Je ne comprends pas,car nos tarifs sont identiques sur tousles sites et nous actualisons le taux dechange plusieurs fois par jour», tented’expliquer Matthias Thürer, direc-teur marketing de son bureau suisse.

Expedia condamnéeCe qui est sûr, c’est qu’à leur arrivée surle marché du tourisme, il y a quelquesannées, ces sites ont d’abord eu un effetpositif. Booking.com, Opodo.fr, ou en-core Hotels.com et Venere.com – lesdeux derniers appartiennent au groupeExpedia – ont dopé la concurrence etfait baisser les prix. Mais la machines’est enrayée: devenus incontourna-bles, ces adresses ont mis les clients,mais aussi les hôteliers, à la merci deleur politique. D’autant qu’en périodede crise – en septembre 2011, les nui-tées dans les hôtels suisses ont diminuéde 4% par rapport à la même période en2010 – les professionnels comptent

davantage sur ces sites pour attirer uneclientèle étrangère en baisse.

Le 4 octobre dernier, le Tribunal decommerce de Paris rendait un juge-ment historique en condamnant Ex-pedia, la firme américaine, à430 000 euros de dommages et inté-rêts pour «pratiques commercialesdéloyales». Sur le banc des plaignantsse trouvaient les hôteliers français,mais aussi le secrétaire d’Etat au tou-risme hexagonal. Motif de la plainte?En substance, la plate-forme privilé-giait ses hôtels partenaires (compre-nez: ceux qui paient) sans prévenirl’internaute et affichait des hôtelscomplets alors qu’ils ne l’étaient pas.

Le groupe a «pris note» du problème,selon Cyril Ranque, responsable chezExpedia des relations avec les hôte-liers au niveau mondial, dont le bu-reau est situé à Genève. Les versionsfrancophones du portail mentionnentdésormais que certaines chambres nesont «pas disponibles sur Ho-tels.com», laissant finement enten-dre qu’elles pourraient l’être ailleurs.«Et la modification va être faite d’ici àla fin du mois sur les versions italien-nes et allemandes», ajoute Cyril Ran-que. La mésaventure d’Expedia ne faitvisiblement pas peur à Ebookers, quiopte pour la même astuce afin de diri-ger les clients vers ses hôtels parte-

naires (environ 1000 en Suisse). Encherchant une chambre pour un cou-ple à Verbier, du 19 au 25 décembre, lesite mentionne deux établissementscomplets – Le Chalet d’Adrien etl’établissement Les Touristes. Ren-seignements pris, les deux enseignesont bien des lits disponibles à cettedate et ne sont pas sous contrat avecEbookers. Matthias Thürer convientque «ce n’est pas l’idéal». «C’est cri-minel, vous voulez dire, s’emportel’avocat Sébastien Fanti. Les hôtelslésés pourraient porter plainte pourconcurrence déloyale!»

Contraints de payer en francsAucun hôtel n’a franchi le pas pour lemoment, mais à Berne, la Commis-sion de la concurrence (Comco) a étéinformée du dossier. Celui-ci s’ajouteà un cas déjà dans le viseur des autori-tés: Costa Croisières interdit aux in-ternautes suisses d’acheter un séjoursur son site allemand. Nous avonsconstaté que le même problème se po-sait sur la version française du site. Làoù le bât blesse, c’est que le consom-mateur suisse paie mille francs pluscher pour une prestation identiqueque son homologue français.

«Si les faits montrent que noussommes en présence d’un cartel durillicite, alors nous pourrions obliger levoyagiste à corriger son comporte-ment», indique Olivier Schaller, res-ponsable du secteur à la Comco. Enoutre, le prestataire pourrait écoperd’une amende équivalant à 10% deson chiffre d’affaires des trois derniè-res années. La procédure devrait ce-pendant prendre plusieurs mois. x

DÉCRYPTAGE

Les leçons du G20Le rempart anticontagion n’estpas encore assez haut PAGE 43

PETERKÖPPEL

«Romands et Alémaniquesdoivent apprendreà collaborer» PAGE 35

LIVRES NUMÉRIQUES

Enfin en français!Accord des éditeurs francophonesavec Amazon et la Fnac PAGE 44

«Barack Obama est le premierprésident des Etats-Unis à faireun pas vers une taxation des acteursfinanciers. Je lui en suis reconnaissant»

NICOLAS SARKOZYPrésident de la France

£ 26 milliards£

Le chiffre d’affaires d’Expedia en dollarsLe groupe américain est devenu la plusgrande agence de voyages du monde.

£ 4602 francs£

Le prix d’une croisière en Amérique du SudLa même prestation coûte 2966 euros sur lesite français de Costa Croisières, soit environ1000 francs de moins.

£ 2 fois plus£

d’hôteliers suissesont eu recours aux sites de réservation pourtrouver des clients en 2010 qu’en 2009.

ENCHIFFRES

LES HÔTELIERS SUISSES PRÊTS À SE REBELLERPLAINTES Patron d’un grand groupehôtelierromand,EricFassbindnedéco-lère pas. «Certains sites nous prennentjusqu’à 20% de commissions. Et, enplus, il faut leur promettre le prix le plusbas: je ne peux même pas faire un gestecommercial pour les habitués! Je l’ai faitune fois, ils ont rayé mon hôtel de leurplate-forme…» En Suisse, il n’est pas le

seul à se plaindre de la stratégie agres-sive des sites comme Booking ou Ho-tels.com. Quelques collègues ont ré-cemment alerté la Comco, qui doitprouver qu’il y a un «abus de positiondominante» pour pouvoir intervenir.Les associations hôtelières veulent ren-dre leurs membres plus indépendantspar rapport à ces plates-formes, mais

n’ont pas trouvé la solution idéale. Lasection valaisanne va lancer son propreportail de réservation. Dans l’Oberlandbernois, les hôteliers voulaient boycot-ter les sites, mais tous n’étaient pasd’accord. Alors, que faire? «On est entrain d’y réfléchir», répond ThomasAllemann, responsable du service desmembres d’HotellerieSuisse.x

Sabine Papilloud

«C’est criminel.Les hôtels léséspourraient porterplainte pourconcurrencedéloyale!»

SÉBASTIEN FANTIAvocat

Costa Croisières interdit aux internautes suisses d’acheter un séjour sur son site français, où les tarifs sont plus bas. Corbis