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Maïté ALVAREZ 1 CHORé GRAPHIQUE VIBRATION

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Maïté AlvArez

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choré

grAphique

vibrAtion

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Maïté AlvArez

choré

grAphique

vibrAtion

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Maïté AlvArez

vibration

choré

graphique

Mémoire de DNSEP Réalisé sous la direction de Olivier Deloignon

Docteur en histoire de la typographie et de l’art

École Supérieure des Arts Décoratifs de Strasbourg DNSEP Communication Graphique

2012

8 9ImprImé à StraSbourg marS 2012

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SOMMAIRE

introDuction

une DAnSe vibrAtoire La vibration, un phénomène physique et psychiqueUne définition scientifiqueUne définition abstraite renouer avec La vibration La danse, une vibration ancestraleVers une « danse libre » une vibration intrinsèque à La danseCorps, espace, temps + Vibration : de la vibration, un leitmotiv La danse vibratoire, un langage corporel et graphique

une vibrAtion choré-grAphique une transdiscipLinarité artistiqueLa naissance d’une danse d’abstractionLa danse : art vivant, art graphique La notation chorégraphiqueDes premières notations à la cinétographie LabanDe nouvelles esthétiques, de nouvelles interactions pour une notation « vibratoire » de La danseUne graphie de l’invisibleUn système de notation vibratoire de la danse

concluSion

biographiesbibLiographieindex des images

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La danse

est un Langage,

eLLe fait même

partie du premier

Langage. eLLe

fait partie

de nous.

rosemary brandt

14 15 introDuction

Si aujourd’hui, une définition universelle de la danse n’existe pas, on peut néanmoins la voir décrite comme une discipline corporelle, qui prend forme à travers des figures réalisées sur un rythme. Ou parfois, comme un art par lequel on s’exprime à travers le corps. Ici, c’est cette deuxième définition qui est particulièrement inté-ressante. La danse est un des premiers, si ce n’est le premier, mode d’expression qui apparaît à l’homme que ce soit dans son évolution à échelle planétaire ou humaine. En effet, quoi de plus naturel pour l’être humain que de danser? Un corps qui s’agite, qui se contracte, se déploie, ou qui s’enroule, est un corps qui s’exprime, à travers son propre langage.

« La danse est un langage, elle fait même partie du premier langage. Elle fait partie de nous. Elle ne se commence pas, au sens de l’ap-prentissage, elle est innée. Elle est un outil pour se déplacer dans l’espace comme avec une carte. »1

Ce langage intègre des signes qui lui sont propres, régis par les lois corporelles, spatiales et temporelles qu’implique la danse. Lorsque le danseur se met en mouvement, il prend en compte en permanence ces trois facteurs, qui font de la danse un art vivant. Loin d’être une expression linéaire, la danse se compose alors, de strates de signes, de gestes et d’émotions, qui dialoguent dans un espace scénique à travers l’espace du corps. La danse, en tant que langage, implique à travers son expression, l’idée de communiquer et d’échanger avec l’autre, qu’il soit danseur, ou spectateur. Cet échange est régi par des flux d’énergies, de fréquences vibratoires dans l’air, qui se multiplient, rebondissent, se fondent, dans un tout harmonieux.

On touche ici à une notion fondamentale de la danse, son essence, qui se caractérise par ce que l’on pourrait nommer vibration : un rayonnement sensible et subtil du danseur exprimant son art, une capacité d’émouvoir, de transmettre des sensations. La danse n’est donc pas une discipline corporelle, mécanique, elle est un langage qui ne prend sens qu’à partir du moment où il est dansé à travers cette vibration.

1 rosemary brandt, lors de la conférence « L’influence de Laban sur la danse d’aujourd’hui ». Colloque rudolf Laban : danseur-chorégraphe (1879-1958), organisé par le Conservatoire de Strasbourg, en partenariat avec le trinity Laban Centre de Londres. Strasbourg, 18 juin 2011.

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« Danser, c’est avant tout communiquer, s’unir, rejoindre, parler à l’autre dans les profondeurs de son être. La danse est union, union de l’homme avec l’homme, de l’homme avec le cosmos, de l’homme avec Dieu. »1

D’un point de vue scientifique, la vibration se définit brièvement par un mouvement saccadé, répété à un rythme rapide. Donc, par essence la vibration est déjà « mouvement », mouvement d’une énergie, qu’il est difficile à cerner, car immatérielle, elle est pourtant au fondement de toute vie. Elle est la source, l’essence de ce qui s’anime, la cause de tout mouvement. Ainsi, la danse et la vibration, à travers le mouvement, se font écho et se nourrissent étroitement.

Savoir capter cette vibration, l’intégrer pour la faire rejaillir sous une autre forme : exprimer une histoire, des sentiments, des émotions, fait partie intégrante du travail du danseur. En effet, si la danse est un art c’est parce qu’elle manie le sensible et en cela elle se distin-gue de toute autre activité physique. Danser, c’est finalement savoir jouer avec cette vibration comme avec un partenaire qui serait au service de la chorégraphie.

La chorégraphie est la manière d’assembler et d’orchestrer des pas et des figures de façon harmonieuse dans le but de composer un ballet. Plus littéralement, le mot chorégraphie, signifie « écrire la danse ». Voici un point de convergence entre le graphisme et la danse : l’écriture. Très justement, depuis que la partition musicale a émergé, on a essayé parallèlement de créer un système de partition pour la danse. En théorisant la danse par le dessin, on a voulu lui donner un nouveau statut, un statut plus scientifique et intellectuel, qui l’élève au rang des arts majeurs tels que la musique, la peinture, l’architecture etc. Plusieurs tentatives ont vu le jour successivement mais, pour différentes raisons, la notation chorégraphique n’a pas su mettre tout le monde d’accord et ne cesse d’être encore aujourd’hui au cœur des recherches et des polémiques.

La mémoire, la transmission, le patrimoine et l’interprétation sont les points essentiels sur lesquels repose le statut de la notation de la danse. « Un des rôle et non unique de la partition […] est de saisir et fixer pour l’éternité, "l’âme" de la danse, c’est-à-dire le

1 maurice béjart, « préface » in danse africaine - afrikanischer tanz - african dance, sous la direction de germaine acogny, page 8, éditions Kunstverlag Weingarten, berlin, 1994.

corps mystique de l’œuvre. »1. En effet, il est important de conce-voir la transmission d’une œuvre après la disparition de l’artiste, où dans tous les cas, en son absence. Mais, pour Rosemary Brandt, la notation est en premier lieu un outil de transmission nécessaire à l’enseignement de la danse. Elle évoque lors d’une conférence , les difficultés qu’elle éprouvait à expliquer à ses élèves ce qu’elle attendait réellement de leur part. L’oralité ne suffisait pas à son enseignement, elle avait besoin d’un support visuel. La notation était donc pour elle un « moyen de s’exprimer intimement sans […] mettre un costume qui serait l’apprentissage par mimétisme ».2

Beaucoup de chercheurs, artistes et chorégraphes, se sont donc attachés à trouver des systèmes de notation chorégraphique. Ce qui a aussi permis, par ailleurs, de faire évoluer la danse vers la forme contemporaine qu’on lui connaît actuellement. Mais il ressort tou-jours de la notation une rigueur très mécanique et pragmatique, où l’on essaie de traduire avec une précision méticuleuse la choré-graphie. On s’évertue parfois à noter chaque élément du corps, ou alors tous les déplacements spatiaux, et encore toutes les notions de temps et de rythmique.

Aujourd’hui cela fait plus d’un demi-siècle que les derniers systèmes de notation ont été mis au point. La danse a continué à évoluer ; son art s'est complexifié, s'est densifié et les pratiques ont changé. La danse n’est pas réduite à une combinaison mécanique de mouve-ments, elle est « animée », au sens de l’âme et d’une énergie sensible, qui passe par la vibration du corps, des sens et de l’émotion.

Il serait donc intéressant de reconsidérer le travail de notation, ap-pliqué à la vibration dans la danse, soulevant ainsi cette question : Est-il possible de retranscrire graphiquement, la notion de vibration en danse ?

1 Simon Hecquet et Sabine prokhoris, « Cartographies du voir : Enjeux » in fabriques de la danse, sous la direction de Fabienne brugère et anne Sauvagnargues , éditions puF, paris, 2007.2 rosemary brandt, lors de la conférence « L’influence de Laban sur la danse d’aujourd’hui ». Colloque rudolf Laban, danseur-chorégraphe (1879-1958), organisé par le Conservatoire de Strasbourg, en partenariat avec le trinity Laban Centre de Londres. Strasbourg, 18 juin 2011.

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une DAnSe

vibrAtoire

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La vibration, un phénomène physique et psychique

UnE DéfInItIOn SCIEntIfIqUE

Conformément à sa définition scientifique, la vibration est « un mouvement d’oscillation rapide »1. Par essence la vibration est donc déjà un mouvement qui renvoie à un phénomène physique de frottement de deux corps physiques dans une matière de résonance énergétique. Si la vibration est instinctivement associée au son, toute source d’énergie émet pourtant un taux vibratoire. En effet, on évoque souvent la vibration de la couleur, de la chaleur ou encore de la lumière, que l’on calcule par longueur d’onde. Mais pour qu’une source énergétique puisse résonner ou rayonner, il faut qu’elle pé-nètre une matière : l’air, l’eau, ou encore de fines particules comme le sable ou la terre peuvent être la matière qui nous permette de ressentir les vibrations, qu’elle soient sonores, visuelles, ou tactiles.

Par extension, nous pouvons donc avancer que toute source de vie possède son propre taux vibratoire rayonné dans l’espace et intégré dans un environnement. Le corps en mouvement tel qu’il s’exprime à travers la danse en fait ainsi parti. Il est « vibratoire » ou « vibrant » à la fois parce qu’il est un être en vie émettant de la chaleur et du son, mais aussi parce qu’il génère du mouvement dont les dynamiques dans l’espace produisent des résonances visuelles perçues par le spectateur. En effet, un corps en mouvement, que l’on parle de la danse ou non, produit déjà de la vibration, car il produit de l’énergie, décuplée, manipulée, rayonnée par un vocabulaire de gestes. Bien entendu, la vibration peut-être une technique de danse en elle-même, c’est le cas par exemple de la danse orientale qui utilise les ondulations et les tremblements comme facteur traditionnel

• Définition extraite du dictionnaire internet Larousse, sous la direction d' Isabelle Jeuge-maynart, éditions Larousse, paris, 2009 (www.larousse.fr) 1 Henri rovel, à propos de la peinture et de la musique, cité dans l'article « art abstrait », Wikipedia

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lA vie eSt cArActériSée

pAr lA vibrAtion. SAnS vibrAtion,

il n’y A pAS De vie. le MonDe entier

eSt SouMiS à cette loi.

henri roveL•

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d’expression. Dans un contexte totalement différent, l’artiste multi-média Doug Aitken1, met en scène le danseur Ali Johnson, dans une interprétation corporelle des vibrations urbaines. Dans Electric Earth2, la vibration corporelle est ici, l’expression des rythmes intériorisés d’un monde électrifié.

Mais si l’on perçoit bien les enjeux du phénomène de vibration au sens physique, sa signification ne s’arrête pas là et induit une sym-bolique bien plus large quant à son rapport à la danse. En effet, il serait trompeur de penser la vibration de la danse uniquement par une manifestation corporelle et visuelle de la vibration ; il s’agirait plutôt de se positionner sur un plan plus subtil afin d’appréhender cette notion de vibration comme une sensation qui prendrait dif-férentes formes.

UnE DéfInItIOn AbStRAItE

De sa définition au sens figuré, la vibration désigne une « excitation, fébrilité, état de celui qui vibre sous le coup d’une vive émotion. »3 Il est donc important de saisir les différents enjeux que le terme « vibration » chorégraphique englobe ici.

Martha Graham4, figure majeure de la danse moderne, considérait que toute expression chorégraphique naît d’une contraction, d’un spasme au cœur de la poitrine. Cette impulsion vibratoire est, selon elle, nécessaire à l’émergence émotionnelle dans le mouvement. La vibration dans la danse ne désigne pas forcément un tremblement au sens formel mais une forme d’énergie, à la fois génératrice du mouvement dont les ondes rayonnent aussi les émotions et les sensations du danseur vers l’extérieur. Nous pourrions dire en dé-finitive que la vibration est intrinsèque à l’expression dans la danse. En cela elle est primordiale, elle est l’élément qui permet de faire la distinction entre la danse, art d’expression corporelle, et d’autres formes d’activité physique.

Dans le cas de la danse, cette expression se manifeste sous la condi-tion d’échanges d’énergies. Ces flux s’expriment à travers le danseur

1 Doug aitken, artiste multimédia américain, né en 1968.2 Doug aitken, electric earth, installation vidéo, 10 min. Whitney museum of american art, New York, 1999.3 Définition extraite du dictionnaire internet Larousse, sous la direction d' Isabelle Jeuge-maynart, éditions Larousse, paris, 2009. (www.larousse.fr)4 martha graham (1894-1991), danseuse et chorégraphe américaine.

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qui, dans le cas présent, en est le centre. Il reçoit des informations sonores, visuelles, tactiles captées par ses sens. Son corps les assi-mile alors comme un vecteur, canal, qui module ce flux d’énergie pour le rayonner sans la forme de mouvements expressifs chargés d’émotions. En fait, c’est un échange constant de sensations-ex-pressions entre le danseur et son espace chorégraphique. Il doit donc être à l’écoute, disponible et attentif, bien ancré, présent dans son corps et dans l’espace qu’il occupe pour s’exprimer justement. Ces sensations physiologiques sont indispensables dans le travail émotionnel du danseur.

La vibration n’est pas toujours à assimiler à l’émotion au sens d’une expression violente des sentiments mais aussi à considérer simple-ment comme une « sensibilité propre à un individu perceptible par autrui », comme elle est entendue dans le vocabulaire de la psycho-logie1. La vibration dans la danse est donc une manière d’évoquer ce qui est de l’ordre du subtil, de l’impalpable au sens des notions abstraites auxquelles elle renvoie. Ici, la vibration renvoie aussi bien à la conscience de son corps, à son intention et à son expression, qu’à la sensibilité et aux émotions véhiculées.

1 Définition extraite du dictionnaire internet du CNtrL, dirigé par le CNrS, Nancy, 2012.(www.cnrtl.fr)

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renouer avec La vibration

LA DAnSE, UnE VIbRAtIOn AnCEStRALE

Dès lors, il apparaît comme une évidence que l’énergie comme vecteur émotif dans la performance est d’une importance considé-rable dans la danse. Le corps dansant est un vecteur, il reçoit une énergie et la transmet à son tour. Le danseur est en quelques sortes un alchimiste puisqu’il transforme cette énergie captée, il la modèle selon un certain nombre de paramètres (personnels et culturels), et la restitue en l’ayant transformée par son vécu et par son corps.

Il est donc difficile de faire l’impasse sur l’aspect métaphysique que peut avoir la danse. Dans certaines pratiques cette vibration s’exprime sous la forme de rituels sacrés. Effectivement, la vibration dans la danse puise ses racines de pratiques ancestrales, reliées à des rituels cosmogoniques et chamaniques1.Son expression vibratoire actuelle est donc à relier étroitement aux besoins que l’homme a eu de communiquer intimement avec les forces de la nature par le corps, faisant ainsi de la danse un des premiers arts apparu sur terre.

Influencée par notre culture, notre éducation et notre époque, la forme actuelle des danses et a fortiori des danses traditionnelles, dé-coule donc directement d’une symbolique complexe, héritée de pratiques bien précises. Par exemple, les rituels de fécondité, de guérison, de funérailles, ou de combats étaient inscrits dans une fonction communicative et sociale en prenant place lors de fêtes et de cérémonies. La création était donc rare car chaque geste avait une fonction et ce schéma était transmis aux générations successives.

1 La cosmogonie renvoie à chercher à expliquer et se représenter l'origine et l'évolution de l'univers. Est chamanique ce qui renvoie aux techniques de l'extase, aux fonctions devinatoires et de guérison. (Définition inspirée du CNtrL)

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Actuellement, il existe encore des pratiques « sacrées » de la danse, notamment avec la transe comme processus amenant à la guéri-son : « Dans la transe, l’organique est poussé à l’extrême. La caisse de résonance du corps se fait résonance de l’univers. Par les tech-niques du souffle, la danseuse va jusqu’à la perte consciente des sens. Cette danse extrême du rythme n’appartient pas à la danse de représentation, ou bien seulement sous forme de mime. Elle exige un certain contexte de cérémonie d’exorcisme ou religieuse ». « Les danseurs en extase se mettent à tourner comme autant de planètes autour du soleil qui symbolise alors le divin. ». « Cette alchimie des substances provoque pour le regard un effet de fascination […] jusqu’à l’hypnose, voire à l’overdose. »1 Ce processus complexe est par ailleurs expliqué dans Les Maîtres Fous2, un documentaire réalisé par Jean Rouch en 1954, qui illustre l’entrée en état de transe par le biais de la danse, dans la secte Houaka au Niger.

Cependant, en Occident, les danses ont peu à peu perdu leur ca-ractère sacré au profit de danses dont l’esthétisme et la prouesse chorégraphique ont été plus valorisées. Selon Pierre Lory3, le facteur déclencheur a été la prédominance de la religion catholique qui voyait en les pratiques cérémonielles de ces danses un mysticisme malsain. À l’époque de l’inquisition, le clergé cherchait à garder un contrôle stricte sur le peuple en interdisant toute pratique qui pourrait le discréditer. De ce fait, la danse s’est totalement coupée de sa partie sacrée pour se focaliser davantage sur la pratique corporelle même. C’est par ce biais que se développe la danse baroque, puis le ballet classique, aux antipodes des danses sacrées, se concentrant uniquement sur l’esthétique et la prouesse du corps. La chorégra-phie est alors intellectualisée et ficelée en amont, les danses de groupes disparaissent au profit des solos et la scène devient le lieu privilégié de la représentation.

« La danse apparaît comme le reflet de l’ethnie, de la civilisation, des croyances comme de la psychologie de ceux qui l’élaborent. Tout groupe humain, tout individu se définit par la façon dont il danse, ou dont il apprécie et privilégie telle manière de danser. L’Occi-dental préfère la verticalité, une gestuelle excentrée, tendue vers

1 Virginie recolin, « Du rythme au ralenti », « Le centre subtil », « L'abstraction alchimique » in introduction à la danse orientale : pratique du mouvement spiral, paris, 2011, pages 200, 130, 86, éditions de l'Harmattan, paris, 2005.2 Jean rouch, Les maîtres fous, documentaire, 36 min. 1954.3 pierre Lory, « Introduction », in danse et spiritualité : l’ivresse des origines, sous la direction de France Schott-billmann, éditions agnès Vienot, paris, 1999.

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l’extérieur, longiligne, bondissante, et l’Oriental, la courbe flexible, les mouvements concentriques. »1

Ainsi, malgré ce rejet ancien des pratiques sacrées de la danse en Occident, elle reste ancrée en nous comme un moyen d’expression intime, autre que la parole. Même si l’on perd de vue l’essence vibratoire de la danse, en passant par les pratiques très rigoureuse du ballet, on va néanmoins renouer avec ses origines à partir de la deuxième moitié du XIXe siècle.

VERS UnE « DAnSE LIbRE »

À partir des années 1850, l’industrialisation engendre une scission entre une mécanisation du monde occidental et paradoxalement un retour aux origines, à la pensée mystique et spirituelle dans les arts. En Europe et aux États-Unis, on assiste à une effervescence de la pensée nouvelle, qui met l’expérimentation, la liberté et l’expression personnelle au cœur des différents domaines artistiques, aidés par ailleurs par le progrès technologique.

Si en Occident, s’exprimer librement à travers son corps était de-venu tabou et désuet, c’est avec les recherches menées par François Delsarte2 que la danse quitte peu à peu son académisme classique pour flirter avec une nouvelle liberté, désinhibée, que l’on nom-mera par la suite « danse moderne ». Chanteur lyrique à l’opéra comique, c’est lorsqu’il s’abîme la voix qu’il commence à réfléchir à une méthode de rééducation mêlant le travail vocal au travail du mouvement. Dans les années 1850, il imagine une autre manière de lire le corps en mouvement : « cette écriture du corps, strictement personnelle, véritable structure identitaire […], est porteuse de sens, qu’elle constitue un langage, représentation d’un monde inconnu, à commencer par le langage verbal »3. L’expression personnelle par le corps devient alors un élément clé dans ses recherches ; selon Delsarte, elle fait écho à la création artistique mais aussi à une cer-taine dimension métaphysique et spirituelle. Il perçoit et conçoit le corps humain comme une trinité « vie-âme-esprit » dont l’émotion est au cœur du geste, primant ainsi sur l’intellect et l’esthétique. Il

1 marie-Françoise Christout et Serge Jouhet, « Introduction », d'après l'article « Danse », Encyclopédie universalis, paris, 2012. (www.universalis.fr)2 François Delsarte (1811-1871), chanteur français, pédagogue et théoricien du mouvement.3 thierry Vila, paroles de corps : La chorégraphie au xxe siècle, éditions du Chêne, paris, 1998.

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expose cette idée à travers un compendium illustrant ce système. Réalisé entre 1850 et 1855, il est complété et rendu populaire par James Steele MacKaye1, un de ses élèves qui a développé la « gym-nastique harmonique ».

Cette méthode inspire notamment les danseurs Isadora Duncan2, Ted Shawn3 et Ruth Saint-Denis4, précurseurs de cette nouvelle manière d’appréhender le corps et le mouvement à travers la danse. Ce sont les prémices de la danse moderne dont l’improvisation, le naturel et l’émotion sont la clef de voûte. Influencés par ailleurs par la my-thologie grecque et la nature, ils délaissent les corsets, tutus, pointes et justaucorps pour danser pieds nus, vêtus de robes ou tuniques amples, pensant désormais que le corps a besoin d’ampleur et de liberté pour s’exprimer justement.

Dès le début du XXe siècle, un autre théoricien bouleverse les pra-tiques en danse. Émile Jacques-Dalcroze5 met au point en 1903 sa « gymnastique rythmique »6. Issu lui aussi du monde de la musique, il est à l’origine de l’eurythmie, théorie qui consiste à apprendre le rythme musical par des mouvements spécifiques du corps corres-pondant à des notes et des accords7. Ses recherches, dans la lignée directe de François Delsarte, partagent également l’idée de trinité vie-âme-esprit, mais se concentrent aussi sur l’importance de la pesanteur du corps et l’expressivité des mains et des bras, rejoignant par là les recherches d’Isadora Duncan. On se rend alors compte que la conscience que l’on a de son corps, du rythme et de son espace chorégraphique sont des conditions sine qua non à l’expression dans la danse.

La danse et les pionniers de la danse moderne sont donc directement influencés par ces nouveaux champs d’études. Parmi eux, Vaslav Nijinski8 provoque en affirmant un ballet regorgeant de bestialité

1 Steele macKaye (1842-1894), dramaturge américain, acteur, directeur de théâtre et inventeur.2 Isadora Duncan (1877-1927), danseuse et chorégraphe américaine.3 ted Shawn (1891-1972), danseur et chorégaphe américain4 ruth Saint-Denis (1878-1968), danseuse américaine, épouse de ted Shwan, fondateurs de la Denishawn School.5 émile Jacques-Dalcroze (1865-1950), musicien suisse, compositeur, et pédagogue.6 La gymnastique harmonique et rythmique repose sur le travail de la coordination par des séquences de danse.7 L’eurythmie a été largement développée par rudolf Steiner au début début du XXe siècle.8 Vaslav Nijinski (1889-1950), danseur et chorégraphe ukrainien.

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un simpLe

mouvement

exprime

notre

être tout

entierfrançois deLsarte •

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et de sensualité dans L’Après-midi d’un faune, en 19121. Puis, Martha Graham s’inscrivant dans cette même continuité, fonde sa propre compagnie en 1926, où l’énergie et la respiration sont au centre de son travail chorégraphique, donnant libre cours aux pulsions psy-chiques et sexuelles du corps. Notamment inspirée par la peinture de Vassily Kandinsky2 donnant naissance à Diversion of Angels en 19483, les principaux thèmes de ses créations chorégraphiques sont ceux de la quête spirituelle et de l’exploration de l’inconscient. Danse très empreinte d’émotions, Martha Graham exprime sa douleur dans Lamentation4, expliquant que le mouvement ne ment jamais : « la tragédie qui hante le corps, cette capacité que nous avons de nous dilater à l’intérieur de notre propre enveloppe, de percevoir et de mettre à l’épreuve les contours et les limites de l’universelle douleur. »5

Une passation s'effectue entre la virtuosité du ballet et les besoins humains d’exprimer son intimité psychique. Tout comme la plume est l’outil du poète pour se révéler, ou le pinceau celui du peintre, le corps devient à son tour un outil permettant au danseur d’aller vers une expression directe de l’inconscient, de ses pulsions instinctives, et des émotions qui l’animent.

• François Delsarte, extrait des cahiers d’étudiants contenant des notes prises pendant les cycles de cours d’esthétique appliquée et dispensée par François Delsarte entre 1850 et 1860 ; repris dans ted Shawn, chaque petit mouvement. à propos de françois delsarte, cité dans « Danses de Soi » in danser sa vie : art et danse de 1900 à nos jours, extrait de, sous la direction de Christine macel et Emma Lavigne, exposition présentée du 23 novembre au 2 avril 2012, page 36 , éditions du Centre pompidou, paris, 2011.1 Vaslav Nijinski, L’après-midi d’un faune, sur la musique du prélude à l'après-midi d'un faune de Claude Debussy (inspiré du poème de Stéphane mallarmé L'après-midi d'un faune), décors et costumes de Léon bakst. ballets russes de Serge de Diaghilev, théâtre du Châtelet, paris, 29 mai 1912.2 Vassily Kandinsky (1866-1944), peintre russe et théoricien de l'art.3 martha graham, diversion of angels, musique de Norman Dello Joio, 1948.4 martha graham, Lamentation, musique de Zoltán Kodály, 1930.5 martha graham,extrait de mémoire de la danse, cité dans « Danse et performance » in danser sa vie : art et danse de 1900 à nos jours, catalogue publié sous la direction de Christine macel et Emma Lavigne, exposition présentée du 23 novembre au 2 avril 2012, page 224, éditions du Centre pompidou, paris, 2011.

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une vibration intrinsèque à La danse

CORpS, ESpACE, tEMpS + VIbRAtIOn :DE LA VIbRAtIOn, Un LEItMOtIV

Ce que l’on peut nommer « vibration », ne peut exister sans l’enve-loppe physique du corps qui la contient et la fait rayonner. Il y a une correspondance permanente entre l’expression physique du danseur véhiculée par les lois du corps, du temps et de l’espace, et son ex-pression vibratoire sous-jacente. C’est cette condition d’échanges qui est nécessaire à l’émergence émotionnelle dans le mouvement.

LE CorpSL’origine physique de la vibration vient du corps, elle émerge en son centre, puis s’articule en pulsations à travers le corps et vers l’extérieur. François Delsarte mettait en avant la primauté du torse dans toute danse comme lieu d’origine du mouvement. Il évoque le rôle de l’épaule qui s’ouvre ou s’enroule selon l’état affectif, entraî-nant tout le corps avec elle. Il démontre que l’incurvation du corps sur lui-même ou son extension constituent les deux mouvements fondamentaux de toute expression humaine. La notion de « corps », revêt alors deux rôles : celui de l’enveloppe charnelle impliquant toute la synergie de l’anatomie qu’elle suggère (contraction des muscles, poids du corps...), qui produit le mouvement tel que nous le voyons. Et d’autre part, l’idée de « présence » entendue au sens énergétique ; c’est-à-dire une sorte de vecteur ou de « prisme » qui capte les flux vibratoires et les diffracte par ses gestes dans l’espace. Le danseur est alors un sujet, auteur et interprète d’une expression individuelle ou collective.

« Une des qualités du prisme de cristal est de faire passer la lumière et de la fragmenter en couleurs. De même, le corps prismatique de la danseuse fragmente le mouvement en "micro-mouvements" respiratoires et articulaires qui donnent l’illusion d’une seule courbe

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fluide et infinie, irisée de nuances. »1

En danse, l’utilisation d’accessoires ou de le choix d’un costume spécifique peuvent être un moyen de décupler le message expressif que l’on souhaite transmettre. Par exemple, Martha Graham utilise une robe « tube » pour ses Lamentations, dont l’expression de sa danse est alimentée par la contrainte de la coupe étroite de la robe et de sa matière élastique : son jeu chorégraphique s’articule autour d’op-pression à laquelle le costume nous revoie, alternant entre malaise et tension. En effet, comme le prolongement du corps, le costume ou l’accessoire conditionnent la mise en relief de la vibration cho-régraphique.

L’ESpaCELa notion de vibration intègre pour le danseur l’idée de plusieurs espaces d’expression. D’un côté, nous avons l’espace scénique, ou l’espace de représentation et de l’autre nous avons l’espace intérieur du danseur, son espace intime. Lorsqu’il s’agit d’évoquer l’expres-sion vibratoire de la danse il est nécessaire de prendre conscience de l’espace intérieur du danseur. C’est au sein de son espace interne que naissent des sensations tactiles, visuelles, auditives, mais aussi des sensations proprioceptives2 de l’ordre de l’équilibre ou du déséquilibre. De ces ressentis internes découlent les moyens mis en œuvre pour faire émerger une expression gestuelle et vibra-toire. D’un autre côté, l’espace extérieur au danseur implique les trois plans sur lesquels le danseur interagit : horizontal, sagittal et frontal, ainsi que toutes les directions spatiales3 qu’il peut prendre sur scène. Cette expression vibratoire dans l’espace questionne l’idée d’amplitude du mouvement ; un geste prendra des nuances émotionnelles très différentes en fonction qu’il sera exécuté de manière étriquée ou avec le maximum d’ampleur. De même, le flux vibratoire n’aura pas la même résonance si l’espace scénique est petit et intimiste ou s’il est grand et plus austère. Le danseur doit donc avoir conscience de tous ces paramètres pour réussir à faire émerger son jeu d’interprète en faisant rayonner la sensibilité de ses gestes.

1 Virginie recolin, « Le corps prismatique » in introduction à la danse orientale : pratique du mouvement spiral, paris, 2011, page 91, éditions de l'Harmattan, paris, 2005.2 Elles désignent l'ensemble des récepteurs, voies et centres nerveux impliqués dans la sensibilité profonde, qui est la perception de soi-même, consciente ou non, c’est-à-dire de la position des différents membres et de leur tonus, en relation avec la situation du corps par rapport à l’intensité de l’attraction terrestre. (Définition extraite de Wikipédia)3 Selon les douze directions de l’icosaèdre établies par rudolf Laban. (voire illustration page précédente)

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Dans le film Pina1, on remarque qu’à chacune des pièces chorégra-phiques réalisées, Pina Bausch2 enrichit l’espace scénique d’acces-soires pour véhiculer l’émotion. Elle utilise notamment le support de la matière, comme la terre ou l’eau comme pour prolonger et décupler l’énergie vibratoire des mouvements de ses danseurs dans l’espace. Ou pour citer un autre exemple, elle utilise la mé-taphore des chaises sur scène comme des particules d’air qui sont violemment projetées pour laisser place à la danseuse qui circule dans l’espace.

LE tEmpSLe troisième facteur incontournable quant à la danse et à sa vibration est le facteur le temps. Celui-ci se définit par le rythme, qu’il soit sonore ou visuel, et par la durée. Ici, la question de rythme prend également en compte le son en tant que source musicale extérieure ou intérieure, aidant le danseur à s’exprimer. Là encore, il s’agit de considérer l’espace intérieur comme intégrant ses propres rythmes physiologiques : la respiration ou les battements du cœur, avec lesquels le danseur peut jouer pour faire émerger la vibration. Le souffle, notamment, évoque énormément de sensations : dans le film La Chambre3 de Joëlle Bouvier et Régis Obadia, la danseuse nous tient sans cesse en haleine, ses respirations évoquant peu à peu palpita-tions, peurs, ou relâchement. En deçà d’être la continuité naturelle du flux d’énergie dans le mouvement, elle en est aussi l’origine.

D’une manière ou d’une autre, le rythme en danse n’est pas que musical, il est avant tout visuel. Par exemple, lorsque l’on se pose la question du « silence » musical, on se pose la question de « pause » visuelle qui est aussi très importante dans l'aspect vibratoire. Souvent précédée d’une vague expressive forte, elle permet au danseur et au spectateur d’intégrer et d’intérioriser ce qu’il a vécu, ou vu.On en vient donc à la notion de temps en tant que durée et vitesse. L’accélération et la décélération, la lenteur ou la rapidité, permet-tent de moduler le flux vibratoire dans l’expression des gestes. Par exemple, la lenteur sera le plus souvent associée à la profondeur et à l’introspection, telle que la chorégraphe Myriam Gourfink4 la travaille.

1 Wim Wenders, pina, documentaire 3D, 1h 43min, 2011.2 pina bausch (1940-2009), danseuse et chorégraphe allemande, à l'origine de la danse-théâtre.3 Joëlle bouvier et régis obadia, La chambre, court-métrage, 1988.4 myriam gourfink, danseuse française, chorégrahe contemporaine, directrice artistique du Centre de recherche et de composition chorégraphique de royaumont, où elle travaille sur le rapport entre le langage informatique et la danse.

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En fait, toute expression en danse prend place grâce à des jeux de contrastes, qu’ils soient corporels (avec des échanges de poids du corps entre tension et relâchement, dureté ou douceur...), qu’ils soient spatiaux (avec une circulation entre introspection et extra-version, espace restreint et espace ample), ou temporels, avec des alternances de bruits et de silences, de rapidité ou de lenteur etc. La vibration en danse est donc une question d’intensité qualitative, jouant sur des variations de nuances d’expression donnant au geste sa couleur, et quantitative, qui grâce à la répétition notamment, aide à faire monter l’intensité du propos.

Ces outils permettent au danseur, d’avoir un vocabulaire d’expres-sion très riche lui permettant de moduler les flux de vibrations qui résonnent intérieurement et dans l’espace scénique. Comme un jeu de ping-pong entre danseurs mais aussi entre danseurs et spectateurs. La vibration n’est pas à considérer uniquement d’un point de vue personnel et intérieur, elle est une énergie qui circule et qui véhicule des émotions, des sentiments et des idées. Elle ren-voie ainsi directement à la fonction première de la danse, en tant qu’objet de communication.

LA DAnSE VIbRAtOIRE, Un LAngAgE

L’homme est un être doté d’expression ; il est pourvu d’une conscience et d’un langage qui lui sert à communiquer des idées, des sentiments. C’est un besoin vital qui se manifeste sous diffé-rentes formes ; alors que la parole est un langage oral, composé de phrases, elles-mêmes composées de mots, puis de sons, la danse, elle, est communément admise comme une forme de langage corporel.

Elle possède ses propres codes, fruits d’un apprentissage technique qui varie selon les styles de danses. Répétés, juxtaposés ou entre-mêlés, leur cohésion permet la construction chorégraphique. Mais à l’inverse de la langue orale ou écrite, le danseur invente sans arrêt de nouvelles figures, de nouveaux signes qui existent et trouvent sens que de manière éphémère, le temps d’une histoire, composées pour le ballet. Aussi, la danse permet l’improvisation du danseur, qui lui, choisira son propre vocabulaire d’expression, né à un instant donné, et lié à la fois à son inspiration créative, à la musique, mais aussi à la mémoire corporelle qu’il garde de la technique apprise en danse. En fait, le danseur, une fois la technique intégrée, peut

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manipuler les signes de sa danse en une infinité de combinaisons, ce qui n’est pas le cas du langage, qui compte en fonction des langues, un nombre maximal de mots. En cela, la danse est un langage très complexe, qui au delà d’être une simple discipline corporelle, est une manifestation artistique de l’être humain, possédant déjà en elle les signes de son langage.

Comme nous venons de l’évoquer, à l’inverse du langage verbal et écrit, le langage gestuel en danse n’est pas linéaire. Il n’est pas qu’une suite de signes qui se déroulent hiérarchiquement dans le temps, mais la danse est organisée en « strates » de signes qui se superposent et se conjuguent. En effet, la danse est un art tridimen-sionnel qui implique des degrés nuancés d’expression, dépendants à la fois des différentes parties du corps, des directions spatiales possibles, du rythme, du temps etc. Aussi, s’il s’agit d’un ballet chorégraphié, ces mêmes notions sont décuplées autant de fois qu’il peut y avoir de danseurs sur scène. Finalement, la danse pourrait en cela, être davantage assimilée à la pensée qui est simultanée.

Cette notion essentielle de simultanéité en danse est conceptualisée par le jeune chorégraphe Noé Soulier1 qui s’intéresse particulière-ment à l’articulation entre danse, langage, discours, et pensée.Dans l'acte II d’Opus-Corpus2, on constate parfaitement les différences qui existent entre le langage verbal et le langage corporel, et de cette idée de simultanéité intégrante de la danse. Le spectateur est capable d’avoir une vue d’ensemble des gestes chorégraphiés par les danseurs mais il est incapable de discerner correctement les mots qui leurs sont associés. Se chevauchant en permanence, le discours oral devient rapidement cacophonique, alors que les enchaînements chorégraphiques des danseurs est saisissable dans sa globalité.

En revanche, si le langage écrit, lui, est en quelque sorte une « co-pie » du langage oral, puisque son but est d’en traduire les concepts par des signes, on a, par ailleurs, éprouvé le besoin d’établir une traduction écrite ou plastique de la danse.

Les arts graphiques et plastiques en général s’y sont particulièrement attelés. Les richesses picturales permettent une expression variée du potentiel de la danse et de sa vibration que ce soit par une traduction

1 Noé Soulier, danseur et chorégraphe français, né en 1987.2 Noé Soulier, « D'un pays lointain », opus corpus, acte II, dansé par le ballet de l'opéra national du rhin, Strasbourg, 2011.

en termes de nuances de couleurs, de vocabulaire de formes, de matières, ou de composition. D’une manière globale, cette rencontre ne s’est vraiment opérée qu’à partir de la fin du XIXe siècle, lorsque la danse s’est libérée du ballet classique.

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UNE VIBRATION

CHORÉ GRAPHIQUE

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une transdiscipLinarité artistique

LA nAISSAnCE D’UnE DAnSE D’AbStRACtIOn

Loïe Fuller1, qui développe son propre concept de danse libre, nom-mée communément « danse serpentine », est l’une des premières danseuses à tisser des liens avec le milieu artistique pour enrichir ses ballets cinétiques. Elle va notamment puiser dans les potentiels de la chronophotographie, alors mise au point par Eadweard Muy-bridge2 (États-Unis) et Étienne-Jules Marey3 (France), pour étudier les formes nées de la décomposition de ses mouvements ondula-toires et des effets hypnotiques qu’ils produisent sur le spectateur. Intéressée par le principe de persistance rétinienne4, elle innove et propose d’être éclairée par des rayons de lumière colorée, pour enrichir sa danse. Elle voue, en effet, un intérêt particulier pour les effets kaléidoscopiques de couleurs et de formes qui transportent le spectateur dans un état de contemplation, de fascination proche d’une sensation d’ivresse. Ces premières interactions questionnent le nouveau statut de la danse, qui est libre et expressive, par rap-port aux études des sciences cognitives qui se développent. Mais aussi, on commence à étudier en quoi l’art peut être un moyen d’enrichissement chorégraphique, autant que la danse peut-être une richesse pour l’art.

Depuis l’apparition du cinéma et de la photographie, la danse a beaucoup évolué, enrichissant à son tour les arts graphiques, en

1 Loïe Fuller (1862-1928), danseuse et chorégraphe américaine.2 Eadweard muybridge (1830-1904), photographe américain d'origine britannique. 3 étienne-Jules marey (1830-1904), physiologiste français, il est un pionnier de la photographie et un précurseur du cinéma. .4 Elle désigne la capacité ou défaut de l'œil à conserver une image vue superposée aux images que l'on est en train de voir. Elle est plus forte et plus longue si l'image observée est lumineuse. Ceci est dû en partie au temps de traitement biochimique du signal optique (Définition extraite de Wikipédia).

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étant un médium qui permet le passage de la danse, en tant qu’art vivant, à sa représentation, en tant qu’art plastique et graphique. Grâce à cette ouverture vers de nouvelles possibilités d’interactions artistiques, la danse devient un objet de fascination pour les peintres, poètes, photographes et sculpteurs qui voient en elle l’expression d’une nouvelle forme d’art.

La danse et la retranscription de ses mouvements et de son ex-pression, influence successivement les courants impressionnistes, cubistes, jusqu’aux futuristes qui identifient leur pensée plastique à cette nouvelle danse libre et moderne. Filippo Tommaso Marinetti1 va même jusqu’à consacrer à la danse, un manifeste qu’il publie sous le nom de Manifeste de la danse futuriste en 1917.

Parallèlement, cette effervescence de la psychée pousse des scien-tifiques à s’intéresser à l’influence des couleurs sur l’organisme, théorie que Vassily Kandinsky va poursuivre bien plus tard, reliée à sa propre approche de la peinture, considérant que la forme et la couleur, réduites à leur essence pure dans la composition picturale, portent déjà en elles la capacité d’émouvoir le spectateur. Il définit la ligne comme « l’empeinte de l’énergie - la trace visible de l’in-visible », ou encore le blanc et le noir comme faisant référence au silence, l’un étant « prégnant de virtualité » et l’autre « la mort et le néant »2. En effet, pour Kandinsky, « (la couleur) provoque une vibration psychique. Et son effet psychique superficiel n’est en somme que la voie qui lui sert à atteindre l’âme. »3

Cette transdisciplinarité nouvelle contribue alors pleinement à ce que la danse puisse s’affirmer et se libérer, mais pose aussi de nou-veaux enjeux liés à la matérialisation graphique de la danse et de son expression vibratoire. Il est donc primordial de considérer le corps dans tous ses aspects ; aussi bien physiques, régis par des lois d’espace, de gravité et de temps, mais aussi psychiques, le corps n’étant que l’instrument permettant au danseur d’exprimer sa na-ture profonde, ses sentiments et ses émotions.

1 Filippo tommaso marinetti (1876-1944), écrivain italien du début du XXe siècle, et initiateur du mouvement littéraire du Futurisme.2 Laurence Louppe, danses tracées : dessins et notation des chorégraphes, marseille, 1994, réedité par les éditions policrom, barcelone, 2008.3 Vassily Kandinsky, du spirituel dans l'art et dans la peinture en particulier, 1911, cité dans l'article « Kandinsky, philosophe de l’abstraction », Zoé balthus publié le 12 août 2009. (http://zoebalthus.typepad.fr)

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« Chacune de nos émotions s’expriment par des gestes et des atti-tudes, traduites directement par les mouvements de notre corps. »1

Rudolf Laban2, à qui l’on doit un des systèmes les plus pointus en matière de notation chorégraphique, a su être un précurseur en menant de nombreuses recherches sur cet aspect physique et mé-taphysique de la danse. Très critique envers la frivolité des cabarets parisiens, sa rencontre avec les Rose-Croix3, Carl Jung, et Vassily Kandinsky est déterminante. Remettre la spiritualité au cœur de l’art devient tout au long de sa vie une de ses préoccupations majeures. En quête d’abstraction, ses recherches s’articulent autour d’un même questionnement sur l’essence qui existe sous la surface d’un geste, d’un mouvement, et de la danse au sens général. Il rejoint par là, le concept de « vibration » ; émanation d’une danse consciente.

Ainsi, loin de la pensée cartésienne qui pense le corps et l’esprit de manière séparée, Rudolf Laban souhaite les faire coïncider en pro-mouvant l’harmonie des corps dans l’espace, allant jusqu’à avancer que l’espace est une métaphore du divin. Très influencé durant sa jeunesse par les danses sacrées, il s’inspire donc de cette notion fondamentale qu’il observe chez les derviches tourneur, issus du soufisme qui pense les mouvements dans l’espace (inclinaisons, positions, directions, figures etc.) comme permettant une ascen-sion vers le divin. Ainsi, Laban est convaincu qu’il faut trouver une nouvelle forme de danse, libérée des schémas, de la musique, du figuratif et du narratif, rejoignant par là les recherches de Kandinsky.

« One of his areas of investigation focused on the problem of how to embody a spiritual dimension in dance. »[Un de ses champs de

1 émile Jacques-Dalcroze, « La musique et nous. Notes sur notre double vie », 1945 cité dans « Danses de Soi » in danser sa vie : art et danse de 1900 à nos jours, catalogue publié sous la direction de Christine macel et Emma Lavigne, exposition présentée du 23 novembre au 2 avril 2012, page 50, éditions du Centre pompidou, paris, 2011.2 rudolf Laban (1879-1958), danseur hongrois, chorégraphe, pédagogue et théoricien de la danse.3 Le mot « rose-Croix » désigne certaines associations à caractère ésotérique. tout ce qui se réclame de ce titre aux avatars innombrables ne fait que puiser dans un vaste fonds commun, celui de l'ésotérisme au sens le plus large, c'est-à-dire dans les traditions alchimique, théosophique, analogique. Ce fonds commun a toujours été du domaine public, même si l'on considère l'éveil intérieur comme le résultat d'une ascèse et d'une quête personnelle. (D'après antoine Faivre, « Introduction », d'après l'article « rose-Croix », Encyclopédie universalis, paris, 2012. (www.universalis.fr))

• rudolf Laban cité par Valerie preston-Dunlop, Living architecture : rudolf Laban and the geometry of dance, Valerie preston-Dunlop et anna Carlislie, documentaire, Londres, 2008.

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recherche se concentrait sur la manière d'incarner une dimension spirituelle dans la danse.]

Formé aux Beaux-Arts, étudiant l’architecture et l’anatomie à tra-vers le dessin, à partir de 1912, Laban se spécialise sur la fonction de l’homme et l’expressivité des ses mouvements. Il regarde le corps humain autrement : la danse est pour lui une « architecture vivante » dont les lois cachées du temps et du corps, et les principes harmoniques de la géométrie physique du mouvement, renvoient à un corps expressif par le fait-même qu’il bouge. Il en résulte un système de notation appelé « cinétographie », fondée sur des lois géométriques et physiques très complexes.

Par la suite, si certains chorégraphes ou plasticiens ont fondé leurs recherches à partir du travail de notation effectué par Rudolf Laban, comme Alwin Nikolais1 a pu le faire avec son Chronoscript2 inspiré de la cinétographie, il est clair que la notation chorégraphique est restée un exercice et un travail à part entière, plus de l’ordre de l’écriture schématique que du traitement plastique. En revanche, l’interaction danse-arts, n’a cessé de prendre de l’ampleur, s’enrichissant perpé-tuellement l’un et l’autre.

LA DAnSE : ARt VIVAnt, ARt gRAphIqUE

La « mise en page » du mouvement dans la danse a pris de multiples formes. De sa représentation la plus figurative à son abstraction totale. La danse a fasciné un grand nombre d’artistes qui n’ont cessé de visualiser formes et couleurs à travers ses mouvements. En cela la vibration est un élément commun aux multiples formes d’art ; elle est l’expression du sensible et de l’émotion à travers une matière, qu’elle soit le corps, l’objectif de la caméra ou le pinceau...

Les recherches menées en chronophotographie sur l’étude du mou-vement et sa décomposition dans le temps et l’espace, pousse la pein-ture à appréhender le mouvement de manière différente, comme Marcel Duchamp s’en inspire pour son Nu descendant un escalier3. Puis, grâce à Kandinsky, qui intègre la danse au centre de ses recherches plastiques, la concevant comme faisant partie d’une « œuvre d’art

1 alwin Nikolais (1910-1993), danseur, chorégraphe et professeur américain.2 alwin Nikolais, chronoscript, années 1940.3 marcel Duchamp, nu descendant un escalier, 1912.

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pousse sa réflexion sur la couleur à son ultime retranchement ; la couleur en tant que telle, élément unique de composition, possède son taux vibratoire, capable de provoquer des sensations chez celui qui la contemple. La vibration chorégraphique et picturale prend alors son sens dans un traitement plastique cinétique, qui fascine et dynamise grandement les supports graphiques. Les constructivistes y voient une radicalité esthétique dont ils s’inspirent pour une nouvelle approche du graphisme. Influencé par le Bauhaus, Josef Müller-Brockmann1 révolutionne notamment la composition gra-phique en utilisant la diagonale pour rendre compte du mouvement. Ailleurs, Jan Tschichold2 met en page le poème Ursonate3, pour lequel il travail le rythme et le son grâce à la typographie et la mise en page.

En graphisme, comme en peinture, la surface d’expression est plane et figée. Il a donc fallu contourner ce problème par les outils même de la représentation graphique. La peinture, le dessin, le collage, ou la typographie, regorgent de signes d’expression ayant la capacité de traduire les répétitions des rythmes, les couleurs des gestes, les nuances de la vibration.

1 Josef müller-brockmann (1914-1994), graphiste suisse et typographe.2 Jan tschichold (1902-1974), typographe allemand, graphiste, enseignant et écrivain.3 Kurt Schwitters, ursonate, mis en page par Jan tschichold, merz, n°24, 1932.

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totale »1, celle-ci va naturellement tendre à l’abstraction, aussi bien dans sa forme même, que comme dans sa représentation picturale. Alors, ami de Gret Palucca2, Kandinsky s’exerce à transposer sché-matiquement les figures photographiées de sa danse, en lignes et en points3. Il visualise davantage la danse comme un processus duquel découlent les formes géométriques du mouvement, plus que dans son aboutissement figuratif. Il multiplie ses expériences picturales par des compositions complexes, entre mouvement, couleur et musique, dont il pousse la confrontation jusqu’à d’impossibles effets de contrastes et de formes.

Par ce biais, la danse s’émancipe du dessin figuratif, car riche de notes, de couleurs et de formes géométriques nées du mouvement dans l’espace, on touche du doigt son essence que l’on a pu définir auparavant comme vibratoire. Ce traitement esthétique de la danse inspire par ailleurs le cinéma, la vidéo et l’animation qui tirent partie des possibilités de montages pour exprimer la danse de manière plus abstraite. Ed Emshwiller4 expérimente un graphisme psyché-délique dans son film Fusion5. Proche des recherches de Loïe Fuller de part les couleurs et les formes ondulatoires, la vibration qui en ressort est indéniable.

La sensation vibratoire dans la danse qui n’est alors pas facile à définir, trouve en la représentation cinétique une alternative. En peinture, l’abstraction et la sensation de mouvements se conjuguent et inspirent František Kupka6, dont les cercles concentriques de ses toiles sont hypnotisant, ou Théo Van Doesburg7, qui travaille avec la répétition du motif rectangulaire. Kasimir Malevitch8, lui, aussi

1 L'œuvre d'art totale (de l'allemand gesamtkunstwerk) est un concept esthétique issu du romantisme allemand et apparu au XIXe siècle en Europe. une œuvre d'art totale se caractérise par l'utilisation simultanée de nombreux médiums et disciplines artistiques, et par la portée symbolique, philosophique ou métaphysique qu'elle détient. Cette utilisation vient du désir de refléter l’unité de la vie. (Définition extraite de Wikipédia)2 gret palucca (1902-1993), danseuse allemande, chorégraphe et pédagogue.3 Vassily Kandinsky, point et ligne sur plan, 1926, et dans l'article « tanzkurven. Zu den tänzen del palucca » [Courbes dansées. à propos de la danse de palucca.] dans la revue das Kunstblatt, 1926.4 Ed Emshwiller (1925-1990), artiste américain connu pour ses nombreuses couvertures de magazines de science fiction et son travail de pionnier dans les films en images de synthèses. 5 Ed Emshwiller, fusion, film expérimental, chorégraphié par alwin Nikolais, 1967.6 František Kupka (1871-1957), peintre tchèque comptant parmi les pères de l'abstraction.7 théo Van Doesburg (1883-1931), peintre néerlandais, théoricien de l'art, architecte et écrivain.8 Kasimir malevitch (1879-1935); artiste russe de l'abstraction, peintre, dessinateur, sculpteur et théoricien.

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La notation chorégraphique

DES pREMIèRES nOtAtIOnS à LA CInétOgRAphIE LAbAn

HIStorIquE DE La NotatIoNDepuis la Renaissance jusqu’à maintenant, de nombreux systèmes de notation chorégraphique ont vu le jour. Parfois admis puis reje-tés ou délaissés, on a difficilement réussi à trouver un système qui réussisse à englober les diverses problématiques liées à l’écriture de la danse. Les notateurs, généralement formés à plusieurs systèmes adaptent ensuite leurs usages en fonction des enjeux chorégra-phiques.

Bien que la danse ait toujours été présente à l’homme, les premières tentatives de notation n’apparaissent qu’à la fin du XVe siècle, sous forme de systèmes graphiques de retranscription du mouvement. Ce n’est qu’au XVIe siècle que les premières publications sur les recherches d’écriture de la danse voient le jour. Thoinot Arbeau1 publie en 1588 un ouvrage sur l’orchésographie2, qui s’attache à décrire les danses baroques françaises du XVIe siècle, sous la forme de corpus détaillé dont l’objectif est pédagogique. Un siècle après, André Lorin3 publie son système d’écriture4 en y incluant un nou-veau paramètre : la notion d’espace. Puis, Pierre Beauchamp5 fait figure de précurseur, en étant à l’origine d’un système de notation très cohérent et complet, repris et publié en 1700 par Raoul Auger

1 Jehan tabourot dit thoinot arbeau (1520-1595), chanoine français, compositeur et écrivain.2 thoinot arbeau, orchésographie : traité en forme de dialogue par lequel toutes personnes peuvent facilement apprendre et pratiquer l’honnête exercice des danses. Langres, 1588, édité par Jehan des preyz, réédité aux éditions Klincksieck, Langres, 1995.3 andré Lorin, très peu connu, les informations sont peu accessibles.4 andré Lorin, Livre de contredanse présenté au roy, 1686.5 pierre beauchamp (1631-1705), intiateur de la « comédie-ballet », il est le chorégraphe attitré de la cour de Louis XIV. Il téorise aussi la danse classique, telle que nous la connaissons.

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Feuillet1, sous le nom de « chorégraphie »2. Le système Feuillet devient ainsi un point de référence dans la diffusion du réper-toire français à travers l’Europe, mais aussi pour tous les systèmes d’inscription chorégraphiques qui lui succèdent bien plus tard. En effet, on ne connaît quasiment aucune tentative de notation qui révolutionne sa notation jusqu’aux recherches de Rudolf Laban au XXe siècle. Le ballet n’ayant que peu évolué jusqu’alors, c’est précisément la tournure moderniste que prend la danse, qui rend le système Feuillet obsolète.

CINétograpHIE LabaNC’est au XXe siècle que la notation chorégraphique prend un nou-veau tournant grâce à Rudolf Laban. Il travaille à établir des lois rigoureuses pour élever la danse au rang des autres arts comme la musique, la peinture ou l’architecture.

Désigné sous le terme de cinétographie (ou labanotation), elle si-gnifie littéralement « écriture du mouvement », à la différence de la chorégraphie qui évoque une « écriture de la danse ». À la manière du système Feuillet, la cinétographie s’écrit et se lit de manière verticale. L’axe du danseur est matérialisé par un trait séparant la page en deux. Tout comme le corps se dresse dans l’espace, l’axe central de la partition représente le tronc du danseur ; sa colonne vertébrale, son torse, son ventre et son dos. Au fur et à mesure que l’on s’éloigne vers les extrémités de la feuille, on s’éloigne aussi vers les extrémité du corps. Symétriquement, après le torse nous avons les bras (gauche et droit), puis les jambes (gauche et droite). Ces grands axes forment l’ensemble de la portée sur laquelle vont se greffer les indications temporelles et spatiales. Celles-ci sont alors désignées par symboles mis en place, évoquant tour à tour l’espace occupé, la durée du mouvement, la place du mouvement, la partie du corps sollicitée et enfin le début et la fin du mouvement. L’ab-sence de signe dans la page, pour Laban, représente une absence du danseur au sol, donc un saut. Comme une sorte de diagramme analytique, les symboles se regroupent ou se décomposent pour former la mesure, et créer un rythme qui ressort déjà visuellement.

La force de cette retranscription graphique réside dans une re-présentation spatiale de la danse relativement intuitive. Mais elle

1 raoul auger Feuillet (1660-1710), danseur français et chorégraphe.2 raoul auger Feuillet, chorégraphie ou l'art de décrire la danse par caractères, figures et signes démonstratifs, 1700, réédité aux éditions arnoldo Forni, paris, 1983.

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requiert cependant un minimum de formation pour être en me-sure de comprendre comment s’articule la notation. Jacqueline Challet-Haas1, lors du colloque Rudolf Laban2 prenait l’exemple de la marelle comme modèle similaire à la représentation du mouve-ment dans l’espace et le temps. Nous avons, inscrits sur un même axe, un point A (la terre, ou début du parcours), un point B (le ciel, ou finalité du parcours), et entre les deux il y a des symboles désignant les actions à effectuer. C’est une notation qui évolue du général au particulier ; sont notés, d’abord les grand axes, les grands déplacements, puis les détails jusqu’au mouvement des doigts ou du visage. C’est une notation modulaire qui peut s’adapter aux besoins chorégraphiques : une partition destinée à l’improvisation peut être schématisée seulement dans les grandes lignes.

Rudolf Laban, alors mentor de la notation pour beaucoup de cho-régraphes, inspire des successeurs tels que Pierre Conté3 et Rudolf Benesh4, qui voyaient en son système des lacunes importantes ou des incompréhensions. D’une part Pierre Conté estime que son sys-tème n’est pas tout à fait adapté à la notation de la danse puisqu’il ne prend pas suffisamment en compte certains éléments comme la biomécanique5 et la musique. Selon lui, la structure de la danse est quasiment conforme à celle de la musique puisqu’elle comporte quatre facteur dont trois communs : le temps, la nuance et l’ac-centuation. Seul change le quatrième : pour la musique il s’agit du son, pour la danse il s’agit de l’espace. Pierre Conté décide donc de conserver les mêmes signes partagés par les deux disciplines et d’en créer de nouveaux spécifiques à la danse. Bien que son système soit très complet et plus axé sur les notions de rythmique, sa similitude avec la partition musicale prête à confusion.

1 Jacqueline Challet-Haas, professeur de danse française, créatrice du cours de notation et d'analyse du mouvement au Conservatoire national supérieur de musique et de danse de paris.2 Jacqueline Challet-Haas, lors de la conférence « Le répertoire en mouvement : étude révolutionnaire », Colloque rudolf Laban : danseur-chorégraphe (1879-1958), organisé par le Conservatoire de Strasbourg, en partenariat avec le trinity Laban Centre de Londres. Strasbourg, 18 juin 2011.3 pierre Conté (1891-1971), danseur français, chorégraphe, théoricien du mouvement et compositeur.4 rudolf benesh (1916-1975), mathématicien français et inventeur de la choréologie.5 La biomécanique est l'exploration des propriétés mécaniques des organismes vivants ainsi que l'analyse des principes d'ingénierie faisant fonctionner les systèmes biologiques. La biomécanique caractérise les réponses spatio-temporelles des matériaux biologiques, qu'ils soient solides, fluides ou viscoélastiques, à un système imposé de forces et de contraintes internes et externes. (Définition extraite de Wikipédia)

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S’en suit alors la notation Benesh, créée en 1955 à Londres par Rudolf Benesh. Bien qu’elle soit la plus récente et l’une des plus utilisée avec la cinétographie Laban, là encore, son fonctionnement reste très froid et pragmatique. Sorte de synthèse des précédentes notations, sa lecture et son écriture s’inscrivent dans un schéma temporel, tout comme la partition Conté, mais les symboles utilisés cette fois sont propres à la danse et n’entraînent donc aucune am-biguïté de lecture par rapport à la musique. Elle permet ainsi une prise de note rapide, ce qui en fait sa principale qualité. Comme le souligne Dany Lévêque, choréologue de la compagnie Preljo-caj1 depuis 1992 : « Avec Angelin, pendant les séances de travail, ce qu’il me demande, c’est d’être très rapide. Il faut le suivre. La méthode Benesh correspond à cette rapidité. Elle permet d’avoir le rythme nerveux qu’Angelin exige. L’autre raison pratique d’adopter Benesh est que c’est une écriture qui se note de gauche à droite et non de bas en haut comme Laban. Et elle est plus visuelle, elle me correspond mieux. Laban est une méthode d’analyse cognitive très lente. »2

En revanche, les systèmes comme celui de Feuillet ou la cinétogra-phie, eux, s’inscrivent dans une écriture spatiale du mouvement. Il n’y a plus de portée horizontale, qui renvoie à la symbolique du temps, mais un ensemble chorégraphique qui progresse vertica-lement sur la feuille. Bien plus universelle, puisque émancipée du facteur culturel quant à la question du sens de lecture (de gauche à droite), et de son écho à la musique, cette notation est aussi plus intuitive en ce qui concerne sa matérialisation dans l’espace de la feuille par rapport à l’espace scénique.

DE nOUVELLES ESthétIqUES, DE nOUVELLES IntERACtIOnS

Grâce à une étude poussée des lois de l’espace, du temps et du corps, Rudolf Laban révolutionne la manière d’envisager la danse et contribue à en faire une discipline artistique amplement reconnue. D’autre part, en ouvrant la danse à de nouveaux champs d’interac-tion, les possibilités de travail deviennent infinies entre la danse et les arts-graphiques, éminemment enrichis par le développement d’une notation complexe. Mais bien que la notation réponde à de

1 angelin preljocaj, danseur et chorégraphe français de danse contemporaine, né en 1957.2 Dany Lévêque, in angelin preljocaj :topologie de l’invisible, sous la direction de Françoise Cruz, page 68, éditions Naïve, paris, 2008.

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nombreux critères formels en lien avec un archivage complexe de la chorégraphie, la danse en tant qu’expression vibratoire et artistique commence à être prise en compte, bouleversant ainsi les rapports entretenus avec la notation chorégraphique.

L’inscription graphique de la danse devient un exercice expérimen-tal à part entière pour de nombreux chorégraphes, qui s’éloignent de sa fonction pragmatique. Mary Wigman1, pourtant formée à la cinétographie, choisit, pour les besoins de sa chorégraphie Totenmal2, de ne retranscrire que les flux de mouvements des danseurs dans l’espace. Ici, on comprend assez bien les passages et les échanges vibratoires, représentés par des vagues de flèches colorées. Au même moment, Valentine de Saint-Point3, créatrice de la danse « méta-chorique », entreprend de matérialiser le concept d’idéisme4 par des flux de points jaillissants de la danseuse en mouvements5. Au fil des recherches menées en art, la stylisation de la danse, elle aussi, tend vers l’abstraction.

Aujourd’hui, ce besoin d’abstraction a été pleinement intégré et de nombreux chorégraphes s’évertuent à écrire leurs propres choré-graphies, et adaptent leur style graphique en fonction des problé-matiques spécifiques auxquelles ils sont confrontés. Merce Cunnin-gham6, Anne Teresa De Keersmaeker7, Philippe Découflé8 ou encore Dominique Bagouet9, sont autant de chorégraphes qui éprouvent le besoin de passer par la représentation graphique de la danse pour enrichir leur travail. Finalement, on peut observer qu’il y a une sorte de séparation, avec d’un côté une notation chorégraphique qui reste un travail méticuleux et rigoureux dans le but d’être un outil de mémoire aidant à la chorégraphie. De l’autre, l’expression plastique devient déterminante dans le processus chorégraphique.

1 mary Wigman (1886-1973), danseuse allemande et chorégraphe.2 mary Wigman, totenmal, 1930.3 Valentine de Saint-point (1875-1953), chorégraphe française, écrivain, poète, peintre, dramaturge, critique d'art, conférencière et journaliste. 4 L'idéisme se fonde sur la considération de l'art n'est que la matérialisation représentative de ce qu'il y a de plus élevé et de plus divin dans le monde : l'idée. (Explication extraite de : danser sa vie : art et danse de 1900 à nos jours, catalogue publié sous la direction de Christine macel et Emma Lavigne, exposition présentée du 23 novembre au 2 avril 2012, page 122, éditions du Centre pompidou, paris, 2011. 5 Valentine de Saint-point par elle-même, gestes métachoriques, poèmes-drames-idéistes. poèmes d'amour et de guerre. bois gravés, 1914-19236 merce Cunningham (1919-2009) danseur américain et chorégraphe.7 anne teresa De Keersmaeker, danseuse belge et chorégraphe comtemporaine, née en 1960.8 philippe Découflé, danseur français et chorégraphe contemporain, née en 1961.9 Dominique bagouet (1951-1992), danseur français et chorégraphe

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Odile Duboc1 fait parti des chorégraphes qui pensent qu’il est es-sentiel pour le danseur d’intégrer les concepts du graphisme ou de la composition picturale pour enrichir son jeu d’interprétation. Elle impose notamment à ses élèves le travail graphique comme faisant partie du travail corporel ; les deux arts permettant conjointement d’améliorer le vocabulaire expressif et créatif du danseur. Selon elle, comprendre une ligne, une figure, des contrastes à travers la matérialité de la composition picturale est nécessaire pour mieux l’exprimer à travers le corps et faire ainsi de la danse une expression vibrante.

Cette conception de la danse et des arts graphiques pousse par ailleurs, un certain nombre d’artistes à mêler les deux dans une seule expression artistique. C’est le cas de certains danseurs-perfor-meurs, comme Trisha Brown2 ou Carolee Schneemann3, qui font de l’écriture plastique une danse, ou de la danse une écriture plastique. En réalisant des toiles monumentales, leurs gestes donnent nais-sance à des traits, courbes, frottés, grattés empreints d’émotions et de vibration, engendrés par les déplacement des pieds et des mains sur la surface de la toile. L’espace scénique est alors confondu avec l’espace graphique, ce qui donne à l’expression graphique et cho-régraphique un autre statut. La notation de la danse sort de son support papier pour être modu-lée au gré du besoin de la création artistique, devenant un tableau ou une performance en tant que telle, rejoignant par là, l’idée de simultanéité de la danse. Kelly Nipper4, danseuse et plasticienne, joue toujours sur ses deux statuts pour mettre en place ses installa-tions et performances. Elle fait aussi bien référence à Mary Wigman qu’à Rudolf Laban dans ses créations, utilisant la notation à la fois pour l’élaboration de ses projets, mais aussi comme matériau pour la performance. Par exemple, pour Floyd on the Floor5, elle va même jusqu’à imprimer sa notation chorégraphique sur une immenses bâche posée au sol. Semblable à une carte, les danseurs progressent sur la surface scénique guidés par les symboles. Finalement, on rejoint la fonction première de la notation, qui, comme le sou-ligne Rosemary Brandt6, est un outil pour se déplacer dans l’espace comme avec une carte.

1 odile Duboc (1941-2010), danseuse française, chorégraphe et pédagogue.2 trisha brown, danseuse américaine, chorégraphe et performeuse, née en 1936.3 Carolee Schneemann, artiste plasticienne américaine, née en 1936.4 Kelly Nipper, artiste américaine, danseuse et performeuse, née en 1971.5 Kelly Nipper, floyd on the floor, performance, 30 min. New York, 2007.6 rosemary brandt, danseuse Sud africaine, chorégraphe, et spécialiste en choréologie.

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Cette idée, Myriam Gourfink l’exploite dans ses créations et installa-tions chorégraphiques. Alors à l’initiative de son propre système de notation, elle décide de lui donner un tout autre statut, en faisant de la notation une écriture en temps réel qui évolue au fur et à mesure de la performance. Elle devient le chef d’orchestre qui dirige ses danseurs par l’intermédiaire de sa partition. C’est ce que l’on ob-serve dans Les Temps Tiraillés1, où ses partitions chorégraphiques sont installées sur des écrans suspendus dans l’espace scénique qu’elle dirige, dos au public, depuis un ordinateur.

La problématique suscitée ici est à la fois de rendre compte des propriétés physiques mais aussi expressives et émotionnelles de la danse. La partition chorégraphique n’est pas forcément à prendre en compte dans une unité ; peut-être qu’une seule partition ne suffit pas, tout comme l’interprétation d’une symphonie musicale induit une partition propre à chaque instrument, ou une portée musicale différente pour la mélodie ou l’accompagnement. La danse est un art qui englobe tellement de dimensions qu’elle demande peut-être à avoir plusieurs partitions, à la manière de strates superposées de signes. Le danseur pourrait alors choisir sur quelle partie de son jeu il souhaiterait axer son travail.

Lorsque nous étudions ces différentes tentatives d’inscription de la danse, nous nous rendons à chaque fois à l’évidence qu’il n’y a pas de système universel qui puisse trouver un commun accord entre les chorégraphes et les danseurs. De plus, il apparaît clairement que la notation chorégraphique implique d’avoir un parti-pris en amont, et de privilégier l’axe sur lequel on souhaite mettre l’accent de la notation. Pierre Conté choisit l’analogie à la musique, Rudolf Benesh souhaite une rapidité d’écriture, tandis que Rudolf Laban se concentre sur les lois harmoniques du corps dans l’espace.

De ce fait, la transcription graphique de la vibration n’a pas forcé-ment à être un système prenant en compte tous les paramètres de la danse, car en s’axant uniquement sur cette expression vibratoire essentielle à la danse, il prend déjà en compte des paramètres com-plexes. Cette nouvelle forme graphique n’est pas en contradiction avec le travail conventionnel de notation ; elle éclaire la danse sous un angle différent sans en exclure les nombreuses propriétés phy-siques qu’elle contient. Cette notation vibratoire peut être considé-

1 myriam gourfink et george Friedrich Haas, Les temps tiraillés, Centre National de la Danse, pantin, 2008

rée comme un outil annexe, s’adaptant éventuellement à un support de notation déjà existant, que ce soit celui de Laban, Benesh ou un autre. Elle prendrait ainsi la forme d’une « écriture » plus graphique, spontanée, sorte de cartographie du sensible.

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pour une notation « vibratoire » de La danse

UnE gRAphIE DE L’InVISIbLE

Il est indispensable de prendre en compte de nouveaux signes gra-phiques adaptés à une symbolique plus intuitive de la retranscription de la danse. Au delà d’une notation schématique, l’expression de la danse peut trouver ses équivalents picturaux dans le monde des arts graphiques comme de nombreux artistes l’avaient entrepris. Mais il est difficile de passer d’une notion abstraite qu’est la vibration dans l’expression de la danse, à une inscription graphique concrète et intuitive. Cependant, selon des études, la danse possèderait déjà en elle, ses propres signes graphiques.

Le biologiste Damien Schöevaërt-Brossault1 à travers la morphogé-nèse2, nous explique que « la forme vient du mouvement .»3

On en revient alors à l’aspect fondamental de la notion de vibration en danse, puisque selon la morphogénèse, c’est cet échange de flux vibratoires internes et externes qui donne naissance à la forme des mouvements dans la danse. C’est très exactement l’énergie émer-gente et contrariée dans l’espace disponible qui conditionne la forme et l’esthétique du mouvement.

Cette contrariété ou « friction » dit-il, n’est pas seulement valable que pour la danse mais elle est à l’origine de toute forme et par extension à l’origine de toute vie. D’une autre manière, cette théorie rejoint les recherches du physicien allemand Ernst Florens Friedrich

1 Damien Schöevaërt-brossault, biologiste français et maître de conférence à l'université paris-Sud.2 La morphogenèse est l'ensemble des lois qui déterminent la forme, la structure des tissus, des organes et des organismes. ((Définition extraite de Wikipédia)3 rudolf Laban cité par Damien Schöevaërt-brossault, lors de la conférence « biodynamique du corps dansant », Colloque rudolf Laban : danseur-chorégraphe (1879-1958), organisé par le Conservatoire de Strasbourg, en partenariat avec le trinity Laban Centre de Londres. Strasbourg, 18 juin 2011.

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La forme

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Chladni1, effectuées au début du XIXe siècle. À l’origine de l’acous-tique, il met en place un dispositif permettant d’observer les images produites par les vibrations du son. À l’aide d’un archet qu’il fait vibrer sur une plaque en métal recouverte d'une fine couche de sable, il observe qu’au moment où le son est émis, les grains de sable vibrent et s’articulent en une figure complexe, parfaitement géométrique. Cette expérience met alors en évidence la propagation des ondes sonores dans les solides ; comme aimantés, les grains de sables se regroupent sur les zones de la plaque de métal où les vibra-tions sont les plus faibles, tandis qu’ils disparaissent là où elles sont les plus fortes.2 Ces formes « cymatiques » peuvent être de natures différentes : plus les sons sont graves, plus les formes générées sont ondulatoires, rondes et vagues. En revanche, plus les sons sont aigus, plus les formes apparaissaient complexes, précises et anguleuses.

Par extension, ce phénomène est identique pour la danse. Le corps en mouvement se ploie et se déploie autour de son axe central qui donne l’impulsion au geste. C’est au sein même de ce centre que co-existent des forces opposées de micro-contractions (ou vibrations) de tension-détente, enroulé-déroulé, retenu-repoussé etc., donnant lieu à des formes géométriques comme le souligne Virginie Recolin3 : « Comme la musique, les mouvements de danse […] ont leurs notes graves et leurs notes aiguës, leurs courbes concaves et leurs courbes convexes. Le concave est souple et doux ; le convexe est fort et tenu. Sans cette combinaison des contraste, […] la danse serait sans vie ni énergie. »4 Ici, les propos de Virginie Recolin sont reliés à la danse orientale, mais l’idée qu’elle avance est fondamentale puisqu’elle traite parfaitement de la relation danse-vibration-graphisme.

Elle n’est d’ailleurs pas isolée puisque dans l’ouvrage Danses Tracées, Laurence Louppe5 établit une analogie similaire en comparant les recherches théoriques de Vassily Kandinsky sur la peinture et celles de Rudolf Laban sur la danse, permettant de visualiser l’expression corporelle et plastique d’un point de vue vibratoire : « La forme or-

1 Ernst Florens Friedrich Chladni (1756-1827), physicien allemand. 2 Explication inspirée de erre : variations labyrinthiques, catalogue de l’exposition présentée au Centre pompidou-metz, du 12 septembre 2011 au 5 mars 2012, pages 194 et sq. éditions du Centre pompidou-metz, metz, 2011.3 Virginie recolin, danseuse française et enseignemente du yoga et de la danse orientale.4 Virginie recolin, « Le principe des contrastes » in introduction à la danse orientale : pratique du mouvement spiral, paris, 2011, page 103, éditions de l'Harmattan, paris, 2005.5 Laurence Louppe (1938-2012), écrivaine, critique et historienne de la danse, spécialisée en esthétique de la danse et des arts visuels et artiste chorégraphique.

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ganique de la peinture et le geste imitateur de la danse "s’effacent" et les formes abstraites, dans les deux média, prennent alors une pleine signification. Élaborées à partir d’innombrables combinaisons de formes et de couleurs en peinture et de formes et de rythmes dans les mouvements de la danse, elles reflètent les résonances harmo-niques de l’âme dans une relation à la fois équilibrée et paradoxale. »1

Il y aurait donc d’un côté des formes abstraites picturales com-parables à des formes abstraites dansées et de l’autre des couleurs comparables à des rythmes. Formes et couleurs qui elles-même renvoient à une symbolique héritée et à une certaine fréquence vibratoire. De même que les vibrations sonores créent des formes au contact d’une matière, nous pouvons observer, notamment grâce à la photographie, que le mouvement possède lui aussi ses formes. En effet, les ondes produites à la surface de l’eau lorsque l’on y jette une pierre ne sont pas sans rappeler la célèbre pho-to du Giclement d’une goutte de lait2 de Harold Edgerton3 qui, grâce à l’invention du stroboscope, réussit à disséquer véritablement les mouvements et micro-mouvements. Les traces fantomatiques qui en résultent sont totalement évocatrices de la dynamique vibra-toire du mouvement. De même, en danse les gestes sont compa-rables à des gammes de vibrations, faites de courbes fluides ou de formes géométriques. William Forsythe4 l’évoque parfaitement dans Lectures from Improvisation Technologies5, où il nous démontre que le mou-vement laisse une empreinte invisible de son passage dans l’espace. Cette empreinte est mise en lumière grâce à un montage virtuel laissant émerger une multitude de formes géométriques. Solides, lignes et spirales se succèdent, créés par les points que le corps organise dans l’espace et le temps.

Créer des formes vibratoires de la danse par l’intermédiaire du graphisme n’est donc pas dénuée de sens. Si la vibration émise par l’expression des mouvements est retranscriptible en images, cela veut aussi dire que les images produites doivent avoir une force équivalente à la réalité chorégraphique. L’image n’est donc plus un signe factice mais possède un réel impact agissant sur le spectateur, au même titre que la vibration émanante d’un ballet agirait sur le

1 Laurence Louppe, danses tracées : dessins et notation des chorégraphes, marseille, 1994, réedité par les éditions policrom, barcelone, 2008.2 Harold Edgerton, giclement d’une goutte de lait, 1936.3 Harold Eugene Edgerton (1903-1990), professeur américain en génie électrique.4 William Forsythe, danseur américain et chorégraphe, né en 1949.5 William Forsythe, Lectures from improvisation technologies, 2011.

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public. Il est donc essentiel de comprendre quelles sont les éléments-clés de la danse qui impliquent cette notion d’expression vibratoire et par quel moyen leur donner une forme graphique.

Un SyStèME DE nOtAtIOn VIbRAtOIRE DE LA DAnSE

« Jamais apparemment on n’a encore pris comme élément le mou-vement en tant que tel, avec toute la force qui est celée en lui d’ac-tion intérieure de l’âme. La signification abstraite du mouvement, l’exclusion de sa conformité matérielle au but, l’utilisation de sa conformité spirituelle au but dans les combinaisons infinies de toutes les parties du corps de celui qui danse, séparément de la mu-sique et ensemble avec la musique, dans la série infinie des éléments parallèles, des oppositions et des combinaisons qui se trouvent en eux, tout cela attend toujours le créateur d’un ballet nouveau. »1

La vibration qui est pourtant impalpable et subtile, est une com-posante omniprésente et non-soustractive, des lois physiques qui régissent le corps dansant. Elle s’exprime à travers des rythmes phy-siologiques, une conscience de l’espace, des sensations corporelles etc. Ce qui, par la suite, peut permettre au danseur d’exprimer des sentiments plus marqués comme la colère, la détresse ou la passion. La prise en compte de tous ces paramètres donne donc lieu à une arborescence de choix en matière de notation. Lorsqu’il s’agit de retranscrire graphiquement la vibration dans la danse, il est alors impossible de vouloir prendre en compte la danse dans tous ces aspects. Noter uniquement la vibration, implique déjà en elle-même, de retranscrire d’une certaine façon, les notions de corps, espace et temps desquelles, la vibration est constituée.

Ce qu’il est important de prendre en compte, c’est l’établissement clair de toutes les notions comprises dans la vibration de la danse, afin d’en établir les signes. Comme nous l’avons vu, la vibration en danse porte déjà en elle cette notion de signe ; formes géométriques qui découlent de la vibration du mouvement. Nous pourrions dire que ces signes se rapprochent des recherches d’abstraction menées aussi bien par Vassily Kandinsky que par les courants graphiques

1 Vassily Kandinsky, « De la composition scénique » (vers 1911-1918), du théâtre, 1998, cité dans « abstraction des Corps » in danser sa vie : art et danse de 1900 à nos jours, catalogue publié sous la direction de Christine macel et d’Emma Lavigne, exposition présentée du 23 novembre au 2 avril 2012, page 187, éditions du Centre pompidou, paris, 2011.

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qui lui ont succédé. Enfin, que ces formes géométriques et couleurs, assemblées, manipulées pourraient elles-mêmes, traduire l’idée de vibration.

Il serait tout à fait possible d’exprimer ces sensations vibratoires par le graphisme qui touche le spectateur en faisant appel à une autre sensibilité, celle de l’image, de l’esthétique, de la concep-tualisation de la pensée par le signe. Le but serait donc d’établir les signes graphiques des concepts de la vibration qui passent par une approche des sensations spatiales, corporelles et rythmiques du danseur dans leur intensité et leur contraste. Bien entendu, ces notions ne sont jamais séparées. C’est leur association qui crée la sensation vibratoire du geste. Leurs signes doivent traduire cette simultanéité, ce que le graphiste est capable de faire, grâce à la richesse des possibilités qu’offrent les signes picturaux et typo-graphiques. Le graphisme consiste, en lui-même, à produire cette simultanéité à travers l’expression d’un maximum d’informations par un minimum de moyens.

Quant au statut et la forme que pourrait prendre cette nouvelle notation, il faut bien faire la distinction entre les notations cho-régraphiques qui ont été établies et cette nouvelle approche. Les notations Laban, Benesh ou d’autres encore, possèdent déjà, en effet, une complexité et une efficacité qui n’est pas à remettre en cause. Ici, ce qui serait plutôt à questionner, c’est le manque de sensibilité des notations chorégraphiques, au sens où les notateurs s’attachent davantage à faire de leurs systèmes graphiques, un support « froid », utilisé uniquement pour la mémoire chorégraphique. C’est un sen-timent partagé par la chorégraphe Carolyn Carlson1, qui ne voit en la notation qu’une écriture sèche. Débarrassée de toute émotion, elle devient un outil2, qui n’est autre qu’un support technique sur lequel le danseur s’appuie pour y greffer son interprétation person-nelle. Cette approche différente de la notation chorégraphique par la vibration, renvoie alors en quelques sortes, à son opposé, en faisant de cette notation, un support plus sensible, plus subtil ; en somme, plus vibrant. Ce que la création graphique permet d’apporter.

1 Carolyn Carlson, danseuse américaine, chorégraphe de danse contemporaine et poétesse, née en 1943.2 Carolyn Carlson, in angelin preljocaj :topologie de l’invisible, sous la direction de Françoise Cruz, page 68, éditions Naïve, paris, 2008.

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L’intention ne serait donc, nullement de se confronter au travail monumental que représente la notation chorégraphique, mais de l’éclairer simplement sous un angle différent, celui de prendre conscience d’un paramètre essentiel à la danse, qu’est la vibration à travers l’expression corporelle. Alors, à considérer plutôt comme un outil pédagogique, cette nouvelle notation trouverait sa place au sein d’un public « en apprentissage » de la danse. En effet, comme le soulignait Rosemary Brant, sa rencontre avec la cinétographie Laban a été déterminante dans sa pédagogie de la danse ; grâce à ce support, il était bien plus facile pour elle de transmettre des notions qu’elle avait déjà intégrées dans son corps et qu’il était difficile d’expliciter à ses élèves, uniquement par la parole.

Elle témoigne que la notation, ou l’inscription graphique de la danse a une réelle légitimité, puisqu’elle explique la danse autre-ment que par son enseignement mimétique. Pour ce qui est de la notation de la vibration, sa légitimité est d’autant plus grande que la vibration est une notion abstraite sur laquelle il est difficile de mettre des mots. De plus, prendre la danse sous l’angle de sa capa-cité expressive est tout à fait intéressant car c’est cette notion qui est centrale ; la technique corporelle n’étant que l’outil permettant de la faire émerger. Pina Bausch en était très consciente en voulant recréer son spectacle Kontakthof1 avec des adolescents qui n’avaient aucune pratique de la danse.

Si cette retranscription graphique est un outil facilitant la prise de conscience de la vibration dans l’expression chorégraphique, elle doit donc avoir un support et une mise en œuvre graphique. Grâce à cela, elle pourrait prendre place au sein d’ouvrages dont les concepts de vibration et d’expression seraient illustrés par cette notation plu-tôt que par des photographies. Cette nouvelle notation peut aussi prendre la forme d’un outil pédagogique, comme un jeu, que les apprentis danseurs pourraient manipuler dans le but de s’exercer à la prise de conscience de leurs mouvements. Enfin, elle pourrait devenir un objet à part entière associée sur scène à la danse. Ce système de représentation graphique de la vibration pourrait donc, une fois créé, prendre de multiples formes, toutes adaptées à un même but : transmettre la notion de vibration exprimée en danse.

1 pina bausch, Kontakthof, 1978 recréé en 2008. Les coulisses de la recréation dans, anne Linsel et rainer Hoffmann, Les rêves dansants. sur les pas de pina bausch, documentaire, 1h 29min, 2011.

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À la question : peut-on retranscrire graphiquement la notion de vibration dans la danse ? Il a fallut d’abord répondre en définissant en quoi la danse pouvait-être perçue comme vibratoire, d’un point de vue scientifique comme abstrait. Au cœur de cette problématique, c’est la facette expressive de la danse qui conditionne cette vibration. Elle passe par l’échange de flux d’énergies, conditionnés à la fois par la dynamique du corps en mouvement, par les bouleversements physiologiques du danseur, mais aussi par les informations qu’il capte dans son espace d’expression. La musique, les échanges entre danseurs et public, les costumes ou les accessoires sont autant de paramètres que le danseur doit intégrer pour nuancer ses propo-sitions gestuelles.

Ancrée en nous depuis toujours, la danse permet de nous exprimer intimement et de communiquer autrement que par la parole. Cette fonction première qui s’était quelque peu perdue dans notre culture occidentale, a pourtant émergé de nouveau, faisant de l’expression corporelle une composante innée à l’homme et à la notion de vibration. Ainsi, la danse en tant qu’art vivant, art du sensible et langage, a depuis sa tournure moderne et contemporaine, fasciné les différentes disciplines artistiques. Considérée alors comme une composante à part entière de l’art, on ne peut évidemment plus remettre en question la richesse des échanges qui s’effectuent entre danseurs, performeurs, plasticiens, vidéastes, graphistes, etc.

Ainsi, on a pu voir que la danse pouvait être retranscrite graphique-ment, grâce aux multiples recherches menées en notation chorégra-phique. Celles-ci ont, en outre, mis en exergue toute la complexité d’une tel exercice. On s’est rendu compte, avec une vision globale des travaux menés, à la fois par des spécialistes de la notation, des artistes ou danseurs, que l’inscription de la danse pouvait s’articuler en une infinité de signes, de langages. Chaque fois, l’angle de vue choisi pour la recherche induit la forme finale de la notation, allant de schémas très mécaniques faits de signes savamment orchestrés, à l’expression plastique comme résultante de l’abstraction du geste dansé. Mais à l’heure actuelle, il n’existe toujours pas de système de notation « idéal » : chaque chorégraphe ou notateur choisit le système qui correspond au mieux à sa méthode de travail.

concluSion

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D’autre part, le graphisme joue un rôle de réceptacle au sens où il reçoit la danse sous toutes ses facettes, pour la retranscrire sous une autre forme. En effet, tout comme le chorégraphe compose un ballet fait de figures et de signes dans un espace scénique, le graphiste compose sa page par des images et des textes faits de signes, dans un espace déterminé par le format du papier. Mais contrairement à la danse qui évolue dans le temps et dans un espace en trois dimen-sions, le graphiste, lui, doit respecter les deux dimensions qui lui rappellent son rôle de « re-présentation ». Finalement, la position du graphiste par rapport à la danse est de matérialiser l’immatériel et immortaliser l’éphémère ; ce qui lui confère un statut primordial dans l’exercice de la notation de la vibration.

En essayant ainsi de répondre au triple enjeu de « vibration choré-graphique », on a pu voir que si la danse pouvait être retranscrite graphiquement, il en était de même pour sa notion de vibration. Grâce aux théories de morphogénèse et d’images cymatiques, il semblerait que l’on puisse déduire de la vibration en danse, qu’elle ait un équivalent visuel, intrinsèque. En outre, que ses images fassent directement référence à la qualité vibratoire qui est mise en avant. Alors, si en effet, il est possible de retranscrire graphiquement la notion de vibration en danse, c’est un travail rigoureux, qui ne peut pas être fondé sur des recherches strictement empiriques, mais qui doit être testé et codifié pour qu’il puisse fonctionner.

De plus, même s’il est possible de retranscrire graphiquement la vibration en danse, il faut cependant faire attention à la finalité d’un tel objet. Effectivement, il ne doit surtout pas s’opposer à la liberté créatrice du danseur. Ce nouveau système de notation doit seulement rester un guide qui éclaire le danseur vers une suggestion d’interprétation. Ou alors, être un outil pédagogique, créé avant tout pour mettre en lumière un aspect de la danse trop oublié. Dans l’enseignement de la danse, on met parfois trop souvent l’accent sur la technique et sur l’esthétique du corps dansant. Ce système graphique est alors davantage à considérer comme un hommage à son essence vibratoire et sensible. Ce nouvel outil pédagogique pourrait prendre la danse et sa notation sous un angle différent ; à savoir « contraindre » le danseur à mettre au premier plan la vibra-tion dans la danse, faisant des directives corporelles et spatiales, un élément secondaire.

concluSion

Ceci a donc soulevé d’autres questionnements, comme les moyens à mettre en œuvre pour élaborer un tel système de notation, qui se fonde sur une approche abstraite et subtile de la danse. Aujourd’hui, grâce aux outils que nous offre le graphisme, les possibilités regor-gent pour obtenir un vocabulaire vibratoire dense. Effectivement, en lien direct avec la danse ou non, le graphisme a toujours développé ses propres signes vibratoires et émotionnels. Mais est-il pour autant possible de conjuguer, d’une part, l’exercice de notation choré-graphique, à un graphisme vibratoire et sensationnel d’autre part ?

Si on a pu voir le glissement qui s’est opéré entre la danse, sa re-présentation picturale et les tentatives de notation chorégraphique, il serait aussi intéressant d’étudier, dans un second temps, en quoi le graphisme peut transmettre la notion de vibration. Contrastes, couleurs, forces, signes, dynamiques, nuances, formes, répétitions, émotions, sont autant de mots qui unissent ici la danse, la vibration et le graphisme.

concluSion

106 107 biogrAphieS

ALwIn nIkOLAIS(1910-1993) Danseur, chorégraphe et professeur américain. Grande figure de la danse moderne, il est un pionnier dans la réalisation d'œuvres multimédia en créant une forme de spectacle total, au sein duquel était donné la même importance aux danseurs, à la lumière, à la scénographie, et à la musique.

AnnE tERESA DE kEERSMAEkER(1960) Danseuse belge et chorégraphe comtemporaine. Elle est une figure majeure de la danse contemporaine belge et mondiale, qui s'est imposée au début des années 1980, grâce à la volonté de renouveler le lien intense entre danse et musique.

AngELIn pRELjOCAj(1957) Danseur et chorégraphe français de danse contemporaine. Son travail chorégraphique est très imprégné de l'histoire des ballets classiques, mais est, néanmoins, résolument contemporain. Angelin Preljocaj dirige depuis 1985 la compagnie Preljocaj. Il est considéré comme l'un des chorégraphes les plus importants alliant fréquemment des recherches formelles originales et des collaborations avec de nombreux autres artistes contemporains de tout horizon sans totalement s'éloigner de la tradition du ballet classique.

CAROLEE SChnEEMAnn(1936) Artiste plasticienne américaine connue pour son discours sur le corps, la sexualité et le genre. Son travail est principalement caractérisé par la recherche sur les traditions archaïques visuelles,

les tabous, et le corps de l'artiste dans sa relation dynamique avec le corps social. Artiste multidisciplinaire, elle a produit peintures, photographies, performances et installations, et également publié de nombreux articles.

DAMIEn SChöEVAëRt-bROSSAULtBiologiste français, maître de conférence à l'Université Paris-Sud, créateur et animateur du groupe Art et science de l'Université Paris-Sud.

DOMInIqUE bAgOUEt(1951-1992) Danseur français et chorégraphe. Il est une grande figure de la danse contemporaine et de la nouvelle danse française.

DOUg AItkEn(1968) Artiste multimédia américain.

EADwEARD MUybRIDgE(1830-1904) De son vrai nom Edward James Muggeridge. Photographe américain d'origine britannique, célèbre pour ses décompositions photographiques du mouvement.

ED EMShwILLER(1925-1990) Artiste américain connu pour ses nombreuses couvertures de magazines de science fiction et son travail de pionnier dans les films en images de synthèses.

éMILE jACqUES-DALCROzE(1865-1950) Musicien suisse, compositeur, et pédagogue. Il est en particulier le créateur de la méthode de rythmique.

ERnSt fLOREnS fRIEDRICh ChLADnI(1756-1827) Physicien allemand fondateur de l'acoustique moderne. Il étudie expérimentalement les vibrations des plaques, en les saupoudrant de sable fin, obtenant ainsi les figures acoustiques qui portent son nom.

étIEnnE-jULES MAREy(1830-1904) Physiologiste français, il est un pionnier de la photographie et un précurseur du cinéma.

fILIppO tOMMASO MARInEttI(1876-1944) Écrivain italien du début du XXe siècle, et initiateur du mouvement littéraire du Futurisme.

fRAnçOIS DELSARtE(1811-1871) Chanteur français, pédagogue et théoricien du mouvement. Ses enseignements jouent un rôle déterminant dans l’émergence de la danse moderne, et sont plus généralement considérés comme l’une des sources de la modernité des arts du spectacle vivant.

fRAntIšEk kUpkA(1871-1957) Peintre tchèque comptant parmi les pères de l'abstraction avec Vassili Kandinsky, Gino Severini et Piet Mondrian.

gREt pALUCCA(1902-1993) De son vrai nom Margarete Paluka.Danseuse allemande, chorégraphe et pédagogue. Formée par Mary Wigman, elle ouvre une école de danse à Dresde en 1925 et poursuit parallèlement

une carrière de soliste qui fait sa renommée. Elle est restée célèbre pour ses sauts qui traduisent l'exubérance et la joie de vivre.

hAROLD EDgERtOn(1903-1990) Professeur américain en génie électrique et photographe. Il est connu pour l'invention du stroboscope à partir duquel il décompose le mouvement en une suite d'images fixes.

ISADORA DUnCAn(1877-1927) Danseuse et chorégraphe américaine. Elle révolutionne la pratique de la danse par un retour au modèle des figures antiques grecques. Par sa grande liberté d'expression, qui privilégiait la spontanéité, le naturel, elle apporte les premières bases de la danse moderne européenne, à l'origine de la danse contemporaine. Influencée par son frère Raymond Duncan sur un retour à l'hellénisme et le culte du corps, elle souhaite redonner toute sa place à la beauté, à l'harmonie du corps, osant s'exhiber presque nue, dissimulée seulement de quelques voiles.

jACqUELInE ChALLEt-hAAS Professeur de danse française, spécialiste de la notation chorégraphique et créatrice du cours de notation et d'analyse du mouvement au Conservatoire national supérieur de musique et de danse de Paris.

jAn tSChIChOLD(1902-1974) Typographe allemand, graphiste, enseignant, écrivain et théoricien de la typographie.

jOSEf MüLLER-bROCkMAnn(1914-1994)Graphiste suisse et typographe. Il révolutionne le graphisme en établissant des lois de compositions graphiques fondées sur des systèmes de grilles rigoureusement calculées.

kASIMIR MALEVItCh(1879-1935) Artiste russe de l'abstraction, peintre, dessinateur, sculpteur et théoricien. Il est aussi à l'origine du courant artistique suprématiste.

kELLy nIppER(1971) Artiste américaine, danseuse et performeuse. Elle associe souvent à son travail la notation chorégraphique détaillée et les directives vocales.

LAUREnCE LOUppE(1938-2012) Écrivain, critique et historienne de la danse, spécialisée en esthétique de la danse et des arts visuels et artiste chorégraphique.

LOïE fULLER(1862-1928) Danseuse et chorégraphe américaine. Initiatrice de la danse libre, elle est célèbre pour sa danse serpentine, faite de longs voiles qu'elle faisait tournoyer.

MARy wIgMAn(1886-1973) Danseuse allemande et chorégraphe. Elle travaille auprès de Rudolf Laban, puis ouvre à Dresde une école pour enseigner sa technique de danse libre. Elle inscrit son art dans un expressionnisme violent et réduit l'orchestre à la percussion en cherchant l'expression tragique du sentiment.

MARthA gRAhAM(1894-1991) Danseuse et chorégraphe américaine. Elle est considérée comme l'une des plus grandes innovatrices de la danse moderne.

MERCE CUnnInghAM(1919-2009) Danseur américain et chorégraphe. Son œuvre a contribué au renouvellement de la pensée de la danse dans le monde. Il est considéré comme le chorégraphe qui a réalisé la transition conceptuelle entre danse moderne et danse contemporaine, notamment en découplant la danse de la musique, et en intégrant une part de hasard dans le déroulement de ses chorégraphies.

MyRIAM gOURfInk Myriam Gourfink, danseuse française, chorégrahe contemporaine, directrice artistique du Centre de recherche et de composition chorégraphique de Royaumont, où elle travaille sur le rapport entre le langage informatique et la danse.

nOé SOULIER(1987) Jeune danseur et chorégraphe français qui fonde ses expérimentations sur l'idée de langage.

ODILE DUbOC(1941-2010) Danseuse française, chorégraphe et pédagogue. Elle est reconnue comme une chorégraphe importante de la danse contemporaine française.

pIERRE bEAUChAMp(1631-1705) Intiateur de la « comédie-ballet », il est le chorégraphe attitré de la cour

de Louis XIV. Il téorise aussi la danse classique, telle que nous la connaissons actuellement.

pIERRE COnté(1891-1971) Danseur français, chorégraphe, théoricien du mouvement et compositeur. Formé à la musique et à la danse traditionnelles, il est connu pour son propre système d'écriture du mouvement.

pInA bAUSCh(1940-2009)Danseuse et chorégraphe allemande, elle admire l'intensité dramatique et l'expression dans la danse. À l'origine de la danse-théâtre, elle parvient à renouveler la danse moderne en Allemagne.

phILIppE DéCOUfLé (1961) danseur français et chorégraphe contemporain. Fortement influencé par le travail d'Alwin Nikolais, il créé des "spectacles totaux", qui incluent souvent, outre l'aspect chorégraphique, un travail plastique important par les costumes, les lumières, etc., ainsi que par le recours à la vidéo.

RAOUL AUgER fEUILLEt(1660-1710) Danseur français et chorégraphe. Il invente son système de notation de la danse, véritable référence du savoir chorégraphique de l'époque.

ROSEMARy bRAnDtDanseuse Sud Africaine, chorégraphe, et spécialiste en choréologie.

RUDOLf bEnESh(1916-1975) Mathématicien français et inventeur de la choréologie. De nos jours, le système de notation Benesh est utilisé par des compagnies et chorégraphes prestigieux comme le Royal Ballet, John Neumeier, ou Angelin Preljocaj.

RUDOLf LAbAn(1879-1958) Danseur hongrois, chorégraphe, pédagogue et théoricien de la danse.Il a inventé de nouvelles conceptions du mouvement et de la notation chorégraphique. Il met au point la cinétographie ou labanotation.

RUth SAInt-DEnIS(1878-1968)De son vrai nom Ruth Dennis, danseuse américaine, épouse de Ted Shwan, fondateurs de la Denishawn School.

tED ShAwn(1891-1972)Danseur et chorégaphe américain. Fondateur de la Denishwan School dont Martha Graham est l'élève.

théO VAn DOESbURg(1883-1931) Peintre néerlandais, théoricien de l'art, architecte et écrivain. Il est le fondateur et de la revue De Stijl, qui engendre un mouvement dont la portée est internationale. Il y expose ses théories sur l'abstraction en peinture et prône le renouvellement radical de l'Art avec la transposition des recherches cubistes dans le domaine de l'Architecture.

thOInOt ARbEAU (1520-1595) De son vrai nom Jehan Tabourot.

113

Chanoine français, compositeur et écrivain. Il met au point le premier manuel de danse qui indique avec précision les pas à exécuter en regard de la partition musicale.

tRIShA bROwn(1936) Danseuse américaine, chorégraphe et performeuse. Figure importante de la danse post-moderne, elle collabore depuis 30 ans avec de nombreux artistes contemporains : plasticiens, compositeurs, musiciens, etc.

VALEntInE DE SAInt-pOInt(1875-1953) Chorégraphe française, écrivain, poète, peintre, dramaturge, critique d'art, conférencière et journaliste. Connue pour être la première femme à avoir rédigé un manifeste futuriste, elle est aussi, avec La Métachorie, à l'origine de l'Art performance.

VASLAV nIjInSkI(1889-1950) Danseur et chorégraphe ukrainien. Reconnu pour sa grande maîtrise technique des sauts et pour être l'auteur d'un système de notation de la danse qu'il inventa pour son usage personnel.

VIRgInIE RECOLIn Danseuse française et enseignemente du yoga et de la danse orientale.

VASSILy kAnDInSky(1866-1944) Peintre russe et théoricien de l'art. Considéré comme l’un des artistes les plus importants du XXe siècle aux côtés notamment de Picasso et de Matisse, il est le fondateur de l'art abstrait : il est généralement considéré comme étant l’auteur de la première

œuvre non figurative de l’histoire de l’art moderne, une aquarelle de 1910.

wILLIAM fORSythE(1949) Danseur américain et chorégraphe. Ses chorégraphies s’appuient sur une reconsidération déconstructive du ballet classique, de ses possibilités, de son langage et de sa théâtralité, tout en gardant une approche de style néoclassique. Durant deux décennies, il travaille et développe avec sa compagnie l’improvisation au sein de ses créations, notamment par l'utilisation des techniques de danse contact. Ses compositions sont toujours le fruit d’une composition, engageant les artistes de sa compagnie à s’investir le plus possible. Il investit les conventions performatives en utilisant l’art contemporain, visuel, architectural, et les multimédia interactifs.

bibliogrAphie

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colloque

Colloque rudolf Laban, danseur-chorégraphe (1879-1958), « Hier, aujourd'hui, demain:une éternité pour la danse. ». organisé par le Conservatoire de Strasbourg, en partenariat avec le trinity Laban Centre de Londres. Strasbourg, du 17 au 19 juin 2011.

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117

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inDeX DeS iMAgeS

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1.

jean RouchLes maîtres fous documentaire, 36 min 1954

2.

françois Delsarte système de françois delsarte compendium, s. d.tableau imprimé sur une planche en couleur51,8 x 38,7 cm(paris, bibliothèque nationale de France)

3.

Rudolf Laban Illustration de la kinésphère, dessin n°1 D'après :Simon Hecquet et Sabine prokhoris, fabriques de la dansepage 58, éditions puF paris, 2007

4.

pina bauschvollmond2006

6.

Rudolf Labanikosaeder tanz [danse de l'ocosaèdre]épreuve gélatino-argentique,24,5 x 21 cmZurich, 1925(bibliothèque du Kunsthaus Zürich)

5.

Martha graham Lamentationsphotographiée par barbara morgan1935

7.

pina bausch café müller1978

8.

joëlle bouvier et Régis Obadia La chambrecourt-métrage1988

9.

Anonyme film produit par auguste et Louis Lumièredanse serpentine [ii] (Cat. Lumière n°765-I), 1897-1899Film 35 mm colorisé au pinceau, transféré sur béta numérique, muet, 1 min

10.

Alwin nikolaischronoscript, années 1940Feuille de notation sur papier-calque 26,5 x 20,2 cm(Collection, mahn Center for archives and Special Collections, ohio university Librairies)

11.

Vassilly kandinsky et Charlotte Rudolph« tanzkurven. Zu den tänzen der palucca » das Kunstlatt, vol. 10, mars 192629 x22 cm(Collection adrien Sina)

12.

františek kupkaprismeHuile sur toile70 x 70 cm1947

16.

josef Müller-brockmannZurich tonhalle musica viva concert affiche1971

15.

kurt Schwittersursonatemis en page par Jan tschichold revue merz, n°24 1932

18.

Marcel Duchampnu descendant un escalierhuile sur toile146 x 89 cm1912(philadelphia museum of art, Collection Louise et Walter arensberg)

19.

Anonyme Le danseur Valentin parnakh dansant épopée devant contre-composition xvi de théo Van Doesburg paris, vers 1925

17.

josef Müller-brockmannZurich museum of arts and crafts affiche de l'exposition 1975

14.

Ed Emshwillerfusion film chorégraphié par alwin Nikolais 1967(paris, cinémathèque de la danse)

13.

john weaverorchesography n°41706

21.

André LorinLivre de la contredance du roy, présenté à Louis xiv (1688) et retranscrit pour Louis xv (1721)manuscrit, papier, portrait du roi Louis XV, musique, représentations figurées des danses, 1701-1800(bibliothèque nationale de France)

20.

Mr Isaacthe favorite, a chaconne notation Weaver1707

22.

Mr Isaacthe union1707

25.

Les figures du balletde monseigneur le duc de vendôme

23.24.

Rudolf Labantables de signes pour choreographie1926

28.

Rudolf LabanLe Lac des cygnespartition, cinétographie

30.

Mary wigmanLe sacre du printemps gouache et crayon de couleur sur papier1957

34.

natasha fridsanctum 2011(d'après le site internet the Choreographer's trust)

33.

Michelle nadaltableau synoptique pierre contéDocument explicatif de la notation((d'après le site internet de l'association art et mouvement)

32.

Raoul Auger feuilletchorégraphie ou l'art de décrire la danse par caractères, figures et signes démonstratifs1700 (réédité aux éditions arnoldo Forni, paris, 1983)

29.

Rudolf Laban organisation de l'usage des signes en cinétographie, dessin n°4 D'après :Simon Hecquet et Sabine prokhoris, fabriques de la dansepage 65, éditions puF paris, 2007

31.

Anonymemanuscrit des basses danses de tarragoneXVIe

27.

philippe Decouflétechnicolor croquis, crayon sur papier1988

35.

Anne teresa De keersmaekerstella1990

36.

Merce Cunninghamspace patterns from summer space crayon sur papier 27 x 21 cm1958

37.

thoinot Arbeauorchésographie : traité en forme de dialogue par lequel toutes personnes peuvent facilement apprendre et pratiquer l’honnête exercice des danses. édité par Jehan des preyz Langres, 1588 (réédité aux éditions Klincksieck, Langres, 1995)

26.

kelly nipperfloyd on the floorcroquis 2007

42.

kelly nipperfloyd on the floorperformance New York, 2007

43.

Myriam gourfinkLes signes des différentes parties du corps, exemple de notationrevue mouvement, février 2012

44.

Myriam gourfink, georg friedrich haasimages d'une oeuvre n°6 : « Les temps tiraillés »,documentaire de martin Kaltenecker et Christian bahier,coproduction Ircam - Centre pompidou, 2009

45.

Ernst florens ChladniFormes cymatiques

46.

henrik gaardup to and including her Limits, (1973-1976)performance : Carolee Schneemanntirage numériqueNew York, galerie ppoW

41.

harold Edgertongiclement d’une goutte de lait1936

47.

william forsytheLectures from improvisation technologies vidéo, performance2011

48.

pina bauschKontakthof 1978, recréé en 2008. Les rêves dansants. sur les pas de pina bauschdocumentaire2011

49.

trisha brownit's a draw, 2002vidéo, environ 20 min par dessin

40.

Merce Cunningham« beacon Events », dia:beaconmuseo Nacional Centro de arte reina Sofía, madrid, 2009

39.

Dominique bagouetso schnell1990

38.

126

IMpRESSIOn

Didier gErbEr

COpy pRInt

55, ruE DE ZurICH

67000 StraSbourg

COnCEptIOn gRAphIqUE

maïté aLVarEZ

typOgRAphIE

texte courant,

Joanna dessiné par éric gill

titres et annotations,

DIN dessiné par albert-Jan pool

REMERCIEMEntS

ESaD / Conservatoire de Strasbourg

ainsi que

alain bErtraND

amandine CHauVIDaN

Claude grEtILLat

Darius popIELarSKI

Denise bErtraND

Jérôme tHomaS

pierre roESCH

philippe DELaNgLE

olivier DELoIgNoN

ImprImé à StraSbourg marS 2012

130