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Memotec n°7 RÉVISION A DATE : 01/01/2006 www.gls.fr L’élimination des nitrates pour la production d’eau potable PAGE 1 PRÉSENCE DES NITRATES DANS L’EAU Les nitrates (NO 3 - ) sont présents naturellement dans l’eau. Ils sont en effet issus du cycle naturel de dégradation de la matière organique. Cependant les apports dus aux activités agricoles (fertilisants et élevages), industrielles et domestiques (rejets non traités), restent prépondérants. Il est difficile d’établir des concentrations moyennes dans les eaux françaises, car il existe de fortes disparités régionales. L’Institut Français de l’Environnement (IFEN), dans son dernier rapport sur la qualité des eaux en France, fait état que sur le millier de sites surveillés, 62 % présentent une concentration de nitrates supérieure à 10 mg/l, 10 % présentent des teneurs (50 à 100 mg/l) incompatibles avec une distribution de l’eau sans un traitement spécifique, et 1 % sont totalement impropres à la production d’eau potable. EFFETS ET NUISANCES L’effet des nitrates sur la santé humaine a fait l’objet de très nombreuses études à l’origine de la réglementation actuelle. Les nitrates sont réputés comme étant cancérigènes et provoquant la méthémoglobinémie du nourrisson (asphyxie qui peut aller dans les cas extrêmes, mais très rares, jusqu’à la mort). Pourtant, une étude publiée en 1996* qui fait le bilan sur les données épidémiologiques connues, fait ressortir qu’il n’existe objectivement aucun résultat permettant de corréler l’absorption de nitrates et les conséquences sur la santé qu’on lui attribue. En fait, cette étude met en exergue les relations entre les nitrites et certains dérèglements du corps humain. Or, au delà de l’âge de 6 mois et en dehors de toute fragilité maladive, le corps a naturellement les capacités d’éliminer les nitrites. Dans le cas contraire, les nitrites réagissent avec des amines et amides pour produire des nitrosamines qui sont cancérigènes. * Les nitrates et l’homme. Le mythe de leur toxicité . Par le professeur Jean L’hirondel et le docteur Jean-Louis L’hirondel. Les éditions de l’environnement.1996. RÉGLEMENTATION La directive européenne 98/83/CE du 3 novembre 1998 et sa transposition en droit français par décret n°2001-1220 du 20 décembre 2001, codifié en 2003 dans le code de la santé publique (voir Memotec n°12), mentionnent une limite de qualité de 50 mg/l pour les nitrates. En ce qui concerne les nitrites, la limite de qualité est de 0,50 mg/l, avec une restriction : la concentration en nitrites doit être inférieure à 0,10 mg/l en sortie des usines de production d’eau potable. En outre, il existe un critère supplémentaire à respecter, à savoir [NO 3 - ]/50 + [NO 2 - ]/3 < 1 mg/l. TECHNIQUES D’ÉLIMINATION ENVISAGEABLES Aujourd’hui, trois techniques prévalent pour respecter les normes concernant les nitrates : o le procédé biologique de dénitrification ; o la dénitratation par résines échangeuses d’ions ; o la nanofiltration. La dénitrification biologique : un procédé efficace mais très délicat à mette en oeuvre La dénitrification biologique repose sur l’utilisation de bactéries, essentiellement de la famille des Pseudomonas, qui utilisent les nitrates à la place de l’oxygène de l’air, et qui les transforment en azote gazeux. La chaîne de décomposition des nitrates peut être simplifiée de la façon suivante : Il existe deux types de dénitrification : autotrophe et hétérotrophe. Pratiquement, seule la dénitrification hétérotrophe est utilisée pour des raisons de cinétique de réaction. Celle-ci suppose les conditions d’exploitation suivantes : o milieu anoxique (absence d’O 2 ) ; o renouvellement constant d’une source de carbone organique ; o apport de phosphore ; o mélange homogène des bactéries, des nutriments et des nitrates. On utilise principalement des lits fixés dans lesquels un matériau granulaire sert de support aux bactéries (figure 1). Cette technique est efficace mais délicate à mettre en oeuvre, car elle suppose de maintenir en équilibre les conditions citées ci-dessus. En outre, plusieurs facteurs influencent la dénitrification : o la température : on considère en général qu’une élévation de température favorise la dénitrification, o le brassage biologique : il doit être efficace afin que les bactéries soient en contact avec les nitrates et le carbone, o l’âge des boues : de meilleurs rendements sont obtenus si l’âge des boues n’est pas trop élevé. NO3 - NO2 - NO N2O N 2 Aération Réacteur biologique Filtre Coagulant (FeCl3) Eau traitée Air de lavage non chlorée Air de lavage Eau à traiter Ethanol Acide phosphorique Figure 1

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  • Memotec n7

    RVISION A

    DATE : 01/01/2006

    www.gls.fr Llimination des nitrates pour la production

    deau potable PAGE 1

    PRSENCE DES NITRATES DANS LEAU Les nitrates (NO3-) sont prsents naturellement dans leau. Ils sont en effet issus du cycle naturel de dgradation de la matire organique. Cependant les apports dus aux activits agricoles (fertilisants et levages), industrielles et domestiques (rejets non traits), restent prpondrants. Il est difficile dtablir des concentrations moyennes dans les eaux franaises, car il existe de fortes disparits rgionales. LInstitut Franais de lEnvironnement (IFEN), dans son dernier rapport sur la qualit des eaux en France, fait tat que sur le millier de sites surveills, 62 % prsentent une concentration de nitrates suprieure 10 mg/l, 10 % prsentent des teneurs (50 100 mg/l) incompatibles avec une distribution de leau sans un traitement spcifique, et 1 % sont totalement impropres la production deau potable.

    EFFETS ET NUISANCES

    Leffet des nitrates sur la sant humaine a fait lobjet de trs nombreuses tudes lorigine de la rglementation actuelle. Les nitrates sont rputs comme tant cancrignes et provoquant la mthmoglobinmie du nourrisson (asphyxie qui peut aller dans les cas extrmes, mais trs rares, jusqu la mort). Pourtant, une tude publie en 1996* qui fait le bilan sur les donnes pidmiologiques connues, fait ressortir quil nexiste objectivement aucun rsultat permettant de corrler labsorption de nitrates et les consquences sur la sant quon lui attribue. En fait, cette tude met en exergue les relations entre les nitrites et certains drglements du corps humain. Or, au del de lge de 6 mois et en dehors de toute fragilit maladive, le corps a naturellement les capacits dliminer les nitrites. Dans le cas contraire, les nitrites ragissent avec des amines et amides pour produire des nitrosamines qui sont cancrignes. * Les nitrates et lhomme. Le mythe de leur toxicit. Par le professeur Jean Lhirondel et le docteur Jean-Louis Lhirondel. Les ditions de

    lenvironnement.1996.

    RGLEMENTATION La directive europenne 98/83/CE du 3 novembre 1998 et sa transposition en droit franais par dcret n2001-1220 du 20 dcembre 2001, codifi en 2003 dans le code de la sant publique (voir Memotec n12), mentionnent une limite de qualit de 50 mg/l pour les nitrates. En ce qui concerne les nitrites, la limite de qualit est de 0,50 mg/l, avec une restriction : la concentration en nitrites doit tre infrieure 0,10 mg/l en sortie des usines de production deau potable. En outre, il existe un critre supplmentaire respecter, savoir [NO3-]/50 + [NO2-]/3 < 1 mg/l.

    TECHNIQUES DLIMINATION ENVISAGEABLES Aujourdhui, trois techniques prvalent pour respecter les normes concernant les nitrates : o le procd biologique de dnitrification ; o la dnitratation par rsines changeuses dions ; o la nanofiltration.

    La dnitrification biologique : un procd efficace mais trs dlicat mette en oeuvre La dnitrification biologique repose sur lutilisation de bactries, essentiellement de la famille des Pseudomonas, qui utilisent les nitrates la place de loxygne de lair, et qui les transforment en azote gazeux. La chane de dcomposition des nitrates peut tre simplifie de la faon suivante :

    Il existe deux types de dnitrification : autotrophe et htrotrophe. Pratiquement, seule la dnitrification htrotrophe est utilise pour des raisons de cintique de raction. Celle-ci suppose les conditions dexploitation suivantes : o milieu anoxique (absence dO2) ; o renouvellement constant dune source de carbone

    organique ; o apport de phosphore ; o mlange homogne des bactries, des nutriments et des

    nitrates.

    On utilise principalement des lits fixs dans lesquels un matriau granulaire sert de support aux bactries (figure 1). Cette technique est efficace mais dlicate mettre en uvre, car elle suppose de maintenir en quilibre les conditions cites ci-dessus. En outre, plusieurs facteurs influencent la dnitrification : o la temprature : on considre en gnral quune lvation de temprature favorise la dnitrification, o le brassage biologique : il doit tre efficace afin que les bactries soient en contact avec les nitrates et le carbone, o lge des boues : de meilleurs rendements sont obtenus si lge des boues nest pas trop lev.

    NO3- NO2- NO N2O N2

    Aration

    Racteur biologique Filtre

    Coagulant (FeCl3)

    Eau traite

    Air de lavage non chlore

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    Figure 1

  • Memotec n7

    RVISION A

    DATE : 01/01/2006

    www.gls.fr Llimination des nitrates pour la production

    deau potable PAGE 2

    Aprs passage de leau dans le racteur biologique leau est are, puis filtre La dnitratation par change dions : un procd simple qui pose le problme de ses propres rejets Le principe de ce procd repose sur lchange des ions nitrates et autres anions prsents dans leau avec les ions chlorures contenus dans la rsine, selon lquation suivante :

    Lordre daffinit entre les diffrents anions varie avec les caractristiques des rsines, car il existe des rsines plus ou moins slectives des nitrates. Aprs saturation, les rsines doivent tre rgnres, soit co-contre, le rgnrant percolant dans le mme sens que leau en cycle production, soit contre-courant. Cette dernire mthode permet surtout dconomiser du rgnrant, et de rduire les fuites de nitrates la reprise de la production. Elle ncessite le blocage de la rsine. Ce blocage peut seffectuer selon trois mthodes : o par un courant deau introduit la partie suprieure de lappareil ; o par lair ; o mcaniquement.

    Les deux premires mthodes ont t aujourdhui pratiquement abandonnes, au profit du blocage mcanique, et en particulier de la technique qui consiste bloquer le lit de rsine par un plancher crpin plac en partie suprieure de lappareil, laide dun fort courant deau ascendant (figure 2). Le plancher suprieur tant trs proche du niveau haut de la rsine, le lavage priodique des rsines ne peut seffectuer dans lappareil. Pour ce faire les rsines sont transfres hydrauliquement dans une colonne de lavage.

    La rgnration contre-courant se dcompose en quatre phases : o un compactage du lit par un fort courant deau ascensionnel ; o une rgnration de la rsine contre-courant ; celle-ci seffectue avec une saumure de NaCl dilue 10 % ; o un rinage lent contre-courant, le lit tant toujours bloqu ; o un rinage rapide co-courant.

    Les luats de rgnration concentrs en nitrates posent le problme de leur devenir. Plusieurs voies dlimination sont envisageables : o rejet vers une station dpuration dans les limites de ce quelle peut absorber en terme de charges polluante et

    hydraulique ; o envoi vers une lagune dvaporation ; aprs vaporation ( 90 %), les rsidus sont envoys en CET ; o dispersion en rivire petit dbit pour bnficier du phnomne de dilution, et donc limiter limpact de la pollution ; ces

    rejets sont rglements par larrt du 23 fvrier 2001.

    La nanofiltration : pour un traitement combin de plusieurs problmatiques Le taux dlimination des nitrates par les membranes de nanofiltration, est de lordre de 45 %. Ce procd est conomiquement envisageable que si un ou plusieurs paramtres supplmentaire sont corriger : duret, sulfates, pesticides, matires organiques. Pour plus de dtails se reporter au Memotec n1.

    CONCLUSION

    La dnitrification biologique a lavantage de procder la dcomposition totale des nitrates, et dtre peu sensible le teneur en MES de leau traiter. Par contre, son exploitation est trs contraignante, car non automatisable, et sensible aux variations de dbit et de temprature ; elle ncessite en outre un personnel spcifiquement form. Le procd utilisant les rsines changeuses dions est automatisable. Ses performances sont indpendantes des variations des dbits ; par contre, leau traiter doit prsenter une faible teneur en MES et ne pas comporter doxydants. En outre, les luats, quil faut liminer, sont concentrs en nitrates et sulfates. Enfin, la nanofiltration peut tre envisage si leau ncessite dautres traitements que celui de la seule limination des nitrates.

    4 R-Cl + {NO3- + SO42- + HCO3-} {R-NO3 + 2 R-SO4 + R-HCO3}+ 4Cl-

    Figure 2

    Eau traiter Colonne de lavage

    Saumure dilue

    Eau de service

    Eau traite