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Journal de Gyn´ ecologie Obst´ etrique et Biologie de la Reproduction (2011) 40, 824—826 Disponible en ligne sur www.sciencedirect.com PRÉVENIR LES COMPLICATIONS DE LA CHIRURGIE PROTHÉTIQUE DU PROLAPSUS Méthodologie des recommandations pour la pratique clinique sur la prévention des complications de la chirurgie prothétique du prolapsus Guidelines for clinical practice concerning the prevention of the complications related to the use of prosthetic meshes in prolapse surgery: Methods X. Deffieux a,, V. Letouzey b , D. Savary c , L. Sentilhes d , F. Pierre e a Service de gynécologie-obstétrique et médecine de la reproduction, hôpital Antoine-Béclère, 157, rue de la Porte-de-Trivaux, 92140 Clamart, France b Service de gynécologie-obstétrique, hôpital Carémeau, place du Pr-Robert-Debré, 30029 Nîmes cedex, France c Service de gynécologie-obstétrique, CHU Estaing, 1, place Lucie-Aubrac, 63000 Clermont-Ferrand, France d Service de gynécologie-obstétrique, CHU d’Angers, 4, rue Larrey, 49933 Angers cedex, France e Service de gynécologie-obstétrique, CHU de Poitiers, 86000 Poitiers, France Disponible sur Internet le 5 novembre 2011 Introduction La Haute Autorité de santé (HAS) définit et organise la procé- dure d’accréditation des médecins ou des équipes médicales d’une même spécialité exerc ¸ant en établissements de santé, au regard des référentiels de qualité des soins et des pra- tiques professionnelles. Cette démarche prévue par la loi franc ¸aise est actuellement mise en œuvre par Gynérisq pour ce qui concerne la gynécologie obstétrique, Gyné- risq est donc une émanation de la HAS qui a été créée sous l’impulsion du Collège national des gynécologues et obstétriciens franc ¸ais (CNGOF) et du Syndicat national des gynécologues obstétriciens de France (SYNGOF). Auteur correspondant. Adresse e-mail : xavier.deffi[email protected] (X. Deffieux). La gestion des risques, telle qu’elle est conc ¸ue par la HAS, repose sur la déclaration anonyme à Gynérisq, par les professionnels, d’événements porteurs de risque (EPR) qu’ils ont rencontrés dans leur exercice professionnel. Pour compléter cette action de prévention des risques, le CNGOF et Gynérisq ont décidé de créer une « mini RPC risque » dont la thématique serait déterminée par les professionnels, par l’intermédiaire de Gynérisq. Le thème choisi cette année concerne les risques liés à la chirurgie prothétique du pro- lapsus. La chirurgie du prolapsus génital (avec ou sans prothèse) s’accompagne d’une amélioration significative de la qua- lité de vie et une diminution des symptômes pour une grande majorité de patientes. À court terme, l’utilisation de prothèse synthétique non résorbable diminue le risque de récidive anatomique de la cystocèle. Toutefois, la mise en place de ces prothèses expose à des risques particuliers 0368-2315/$ – see front matter © 2011 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés. doi:10.1016/j.jgyn.2011.09.012

Méthodologie des recommandations pour la pratique clinique sur la prévention des complications de la chirurgie prothétique du prolapsus

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Disponible en ligne sur

www.sciencedirect.com

RÉVENIR LES COMPLICATIONS DE LA CHIRURGIE PROTHÉTIQUE DU PROLAPSUS

éthodologie des recommandations pour la pratiquelinique sur la prévention des complications de lahirurgie prothétique du prolapsusuidelines for clinical practice concerning the prevention of theomplications related to the use of prosthetic meshes in prolapse surgery:ethods

. Deffieuxa,∗, V. Letouzeyb, D. Savaryc, L. Sentilhesd, F. Pierree

Service de gynécologie-obstétrique et médecine de la reproduction, hôpital Antoine-Béclère, 157, rue de la Porte-de-Trivaux,2140 Clamart, FranceService de gynécologie-obstétrique, hôpital Carémeau, place du Pr-Robert-Debré, 30029 Nîmes cedex, FranceService de gynécologie-obstétrique, CHU Estaing, 1, place Lucie-Aubrac, 63000 Clermont-Ferrand, FranceService de gynécologie-obstétrique, CHU d’Angers, 4, rue Larrey, 49933 Angers cedex, FranceService de gynécologie-obstétrique, CHU de Poitiers, 86000 Poitiers, France

isponible sur Internet le 5 novembre 2011

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ntroduction

a Haute Autorité de santé (HAS) définit et organise la procé-ure d’accréditation des médecins ou des équipes médicales’une même spécialité exercant en établissements de santé,u regard des référentiels de qualité des soins et des pra-iques professionnelles. Cette démarche prévue par la loirancaise est actuellement mise en œuvre par Gynérisqour ce qui concerne la gynécologie obstétrique, Gyné-isq est donc une émanation de la HAS qui a été créée

ous l’impulsion du Collège national des gynécologues etbstétriciens francais (CNGOF) et du Syndicat national desynécologues obstétriciens de France (SYNGOF).

∗ Auteur correspondant.Adresse e-mail : [email protected] (X. Deffieux).

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368-2315/$ – see front matter © 2011 Elsevier Masson SAS. Tous droits roi:10.1016/j.jgyn.2011.09.012

La gestion des risques, telle qu’elle est concue par laAS, repose sur la déclaration anonyme à Gynérisq, par

es professionnels, d’événements porteurs de risque (EPR)u’ils ont rencontrés dans leur exercice professionnel. Pourompléter cette action de prévention des risques, le CNGOFt Gynérisq ont décidé de créer une « mini RPC risque » donta thématique serait déterminée par les professionnels, par’intermédiaire de Gynérisq. Le thème choisi cette annéeoncerne les risques liés à la chirurgie prothétique du pro-apsus.

La chirurgie du prolapsus génital (avec ou sans prothèse)’accompagne d’une amélioration significative de la qua-ité de vie et une diminution des symptômes pour une

rande majorité de patientes. À court terme, l’utilisatione prothèse synthétique non résorbable diminue le risquee récidive anatomique de la cystocèle. Toutefois, la misen place de ces prothèses expose à des risques particuliers

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Méthodologie des recommandations

parfois sévères et pouvant mettre en jeu le pronostic vitalou fonctionnel des patientes.

Bien qu’il existe déjà quelques recommandations anté-rieures de sociétés savantes étrangères (Amérique du Nordessentiellement) [1—4], le CNGOF a souhaité réaliser cetimportant travail de synthèse.

Ces recommandations ont pour objectif de focaliserl’attention des chirurgiens sur les éléments pouvant per-mettre de prévenir ou au moins de limiter l’incidence deces complications.

Matériel et méthode

La HAS a défini un certain nombre de principes métho-dologiques que nous avons adoptés pour élaborer cesrecommandations pour la pratique clinique (RPC).

L’objectif de ce travail était de faire une revue critiquede la littérature concernant uniquement les complicationsde la chirurgie prothétique du prolapsus et d’émettre desrecommandations pour la pratique clinique afin de limiterla prévalence de ces complications et leurs conséquences.Nous n’aborderons pas la discussion concernant l’indicationde mise en place des prothèses dans la chirurgie du prolap-sus, ni celle du choix de la voie d’abord entre voie vaginaleet abdominale.

Le promoteur de ces « mini RPC risque » est le CNGOFdont le bureau constitue le comité d’organisation. La chargede ce bureau, en lien avec Gynérisq, est de définir la ques-tion posée de facon précise et de définir ses limites, dedésigner les membres du groupe de travail et de relire etvalider les conclusions du groupe.

Le CNGOF a posé un certain nombre de questions augroupe de travail : quelle est la définition et la préva-lence des principales complications liées à la chirurgieprothétique du prolapsus génital ? Comment prévenir lescomplications de la chirurgie prothétique du prolapsus ?Comment traiter une exposition prothétique vaginale (voiebasse et voie haute) ? Quels sont les facteurs de risquede complications ? Comment limiter les complications de lachirurgie prothétique par voie vaginale ? L’utilisation d’unkit de pose diminue-t-elle le risque de complication pourla chirurgie prothétique par voie vaginale ? Comment limi-ter les complications de la chirurgie prothétique par voieabdominale ? Peut-on implanter une prothèse après uneplaie rectale ? Quelle information doit être délivrée auxpatientes ? Quelles sont les obligations réglementaires enca-drant la chirurgie prothétique du prolapsus ?

Ce travail s’appuie sur une revue exhaustive de lalittérature (PubMed, Medline, Cochrane library, Cochranedatabase of systematic reviews, EMBASE) concernant lesméta-analyses, essais randomisés, registres, revues de lalittérature, études contrôlées et grandes études non contrô-lées publiés sur le sujet jusqu’en mai 2011 (en languefrancaise ou anglo-saxonne). Les études animales ou ana-tomiques ont été exclues. Les experts rédacteurs (VincentLetouzey, Denis Savary, Loïc Sentilhes) ont synthétisé lalittérature pour chacune des questions abordées et les

recommandations ont été élaborées par un groupe de tra-vail (Fabrice Pierre, Xavier Deffieux, Vincent Letouzey, DenisSavary, Loïc Sentilhes, Aubert Agostini, Pierre Marès) puisces recommandations ont été relues et amendées par un

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roupe de relecteurs experts (chirurgiens gynécologues,ynécologues obstétriciens, chirurgiens vasculaires, uro-ogues et digestifs).

Mots clés utilisés pour la recherche bibliographique :esh ; pelvic organ prolapse ; cystocele ; rectocele ; uterinerolapse ; vagina ; apex ; prothesis ; synthetic ; absorbable ;on absorbable ; polypropylene ; complications ; adversevent ; colpopexy ; sacral colpopexy ; sacrocolpopexy ; mesheinforcement ; trocar-guided mesh ; prolift ; erosion ;xtrusion ; infection ; abcess ; transvaginal mesh ; porcinekin collagen ; implants ; anterior vaginal wall ; posterioraginal wall ; gynemesh ; pain ; pelvic pain ; vaginal pain ;yspareunia ; pelvicol ; robotic ; robotically ; sacral osteo-yelitis ; spondylodiscitis ; transobturator ; fascia lata ;erigee ; apogee ; elevate ; pinnacle ; avaulta.

En suivant les recommandations 2010 de la HAS [5,6],’argumentaire scientifique comprenait pour chaque ques-ion un chapitre incluant une synthèse critique et concise dea littérature retenue, un texte référencé avec mention desiveaux de preuve et des tableaux de synthèse, les points’hétérogénéité ou de divergence de pratique ainsi qu’uneonclusion avec les recommandations, gradées et validées à’issue de la phase de finalisation (relecture).

Certaines recommandations sont issues non pas d’étudesliniques avec un certain niveau de preuve, mais découlente textes réglementaires contraignants, en particulier dansa gestion de la prévention du risque infectieux périopé-atoire et dans l’encadrement de la mise en place desispositifs médicaux implantables.

En l’absence de preuve scientifique dans la « méthodeecommandations pour la pratique clinique », une pro-osition de recommandation figurait dans le texte desecommandations soumis à l’avis du groupe de lectureous la dénomination « accord d’experts » si elle obtenait’approbation d’au moins 80 % des membres du groupe deravail (vote à main levée).

Les propositions de recommandations et l’argumentaireomplet ont été envoyés à 57 relecteurs début juillet 2011.in août 2011, 26 (47 %) de ces relecteurs avaient envoyéeurs commentaires et cotation de chaque recommandationt ils ont été pris en compte.

Après analyse et discussion des cotations et commen-aires du groupe de lecture (les relecteurs pouvaient cotereur adhésion à chaque recommandation selon une échellee Likert à quatre niveaux : tout à fait d’accord ; plutôt’accord ; plutôt pas d’accord et pas du tout d’accord),es recommandations initiales ont été éventuellement modi-ées par le groupe de travail selon les règles suivantes. Nousvons considéré qu’une recommandation était « soutenue »ar un relecteur dès lors qu’il se disait « tout à fait d’accord »u « plutôt d’accord » avec la proposition de recommanda-ion. Si le relecteur ne donnait pas de cotation (absence deéponse), nous avons considéré qu’il était « défavorable » àa proposition de recommandation.

En cas de recommandation fondée sur un niveau dereuve élevé (grade A ou B), le groupe de travail a prisn compte les commentaires pertinents pour améliorer laorme, et a éventuellement apporté des modifications sure fond, s’il y avait lieu, en fonction des données supplé-

entaires fournies (article ou données de pratique) avecarfois une modification du grade de la recommandationi nécessaire. Pour les recommandations fondées sur un
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aible niveau de preuve (grade C ou accord d’experts),orsque le groupe de lecture confirme nettement le carac-ère approprié de la recommandation (≥ 90 % des réponsesu groupe de lecture), la recommandation est conservéet les commentaires pertinents sont pris en compte pourméliorer la forme. Lorsque le groupe de lecture est plusargement indécis ou en désaccord avec la recommandationnitiale (< 90 % des réponses du groupe de lecture), le groupee travail discute de la pertinence des commentaires etodifie s’il y a lieu la recommandation. Quand les débats en

éunion ont fait apparaître des divergences de points de vue,n vote en séance du groupe de travail a confirmé l’abandonu la formulation finale de la recommandation modifiée.

iscussion

ne des limites de ce travail est qu’il existe très peu’études de bon niveau de preuve et beaucoup d’étudesortent sur des matériaux qui ne sont plus commercialisés.eaucoup d’industriels renouvellent rapidement leurs pro-uits et toute évaluation à long terme est ainsi rendue trèsifficile, la majorité des études portant sur des matériauxécemment commercialisés. Les matériaux utilisés sont mul-iples, évoluent en permanence et sont utilisés diversementar les opérateurs (hétérogénéité des techniques) et desnterventions très diverses peuvent être arbitrairement clas-ées sous un titre unique. Enfin, la vaste majorité des étudesubliées sont observationnelles, non comparatives et limi-ées à des suivis à court terme (moins d’un ou deux ans).l n’existe pas de consensus concernant la définition desurées de suivi mais nous considérons un suivi comme étantà court terme » dès lors qu’il est inférieur ou égal à un an,à moyen terme » s’il est compris entre un et quatre ans età long terme » s’il est égal ou supérieur à cinq ans.

éclaration d’intérêts

u moment de l’élaboration et de la rédaction de ces recom-andations, les experts rédacteurs (Vincent Letouzey, Denis

[

X. Deffieux et al.

avary, Loïc Sentilhes), le président (Fabrice Pierre), lesutres membres du groupe de travail (Aubert Agostini, Pierrearès) et le méthodologiste (Xavier Deffieux) déclarente pas avoir été et ne pas être consultant pour aucunees sociétés fabriquant des prothèses en urogynécologie.ls déclarent également ne pas être détenteur de brevetoncernant du matériel sur le marché en urogynécologie.ls déclarent également ne pas avoir d’action de ces socié-és et ils n’en percoivent pas de rémunération. Ils déclarentvoir déjà été pris en charge par des sociétés impliquées enrogynécologie (AMS©, Boston Scientific©, Ethicon© (Johnsonnd Johnson©) pour les frais d’inscription et de déplace-ent à des congrès nationaux et/ou internationaux (sans

ontrepartie).

éférences

1] Walter JE, Urogynaecology Committee, Lovatsis D, WalterJE, Easton W, Epp A, et al. Transvaginal mesh proceduresfor pelvic organ prolapse. J Obstet Gynaecol Can 2011;33:168—74.

2] Murphy M, Society of Gynecologic Surgeons Systematic ReviewGroup. Clinical practice guidelines on vaginal graft usefrom the society of gynecologic surgeons. Obstet Gynecol2008;112:1123—30.

3] Committee on Practice Bulletins — Gynecology, American Col-lege of Obstetricians and Gynecologists. ACOG Practice BulletinNo. 79: pelvic organ prolapse. Obstet Gynecol 2007;109:461—73.

4] Committee on Practice Bulletins — Gynecology. ACOG Prac-tice Bulletin No. 85: pelvic organ prolapse. Obstet Gynecol2007;110:717—29.

5] Rédaction de l’argumentaire scientifique et des recom-mandations — Élaboration de recommandations de bonnepratique — Fiche méthodologique de la HAS — Décembre

6] Méthode Recommandations pour la pratique clinique — Éla-boration de recommandations de bonne pratique — Ficheméthodologique de la HAS — Décembre 2010.