17
MUTATION DANS LA FAMILLE ET SES INCIDENCES Marcel Gauchet ERES | La revue lacanienne 2010/3 - n° 8 pages 17 à 32 ISSN 1967-2055 Article disponible en ligne à l'adresse: -------------------------------------------------------------------------------------------------------------------- http://www.cairn.info/revue-la-revue-lacanienne-2010-3-page-17.htm -------------------------------------------------------------------------------------------------------------------- Pour citer cet article : -------------------------------------------------------------------------------------------------------------------- Gauchet Marcel,« Mutation dans la famille et ses incidences », La revue lacanienne, 2010/3 n° 8, p. 17-32. DOI : 10.3917/lrl.103.0017 -------------------------------------------------------------------------------------------------------------------- Distribution électronique Cairn.info pour ERES. © ERES. Tous droits réservés pour tous pays. La reproduction ou représentation de cet article, notamment par photocopie, n'est autorisée que dans les limites des conditions générales d'utilisation du site ou, le cas échéant, des conditions générales de la licence souscrite par votre établissement. Toute autre reproduction ou représentation, en tout ou partie, sous quelque forme et de quelque manière que ce soit, est interdite sauf accord préalable et écrit de l'éditeur, en dehors des cas prévus par la législation en vigueur en France. Il est précisé que son stockage dans une base de données est également interdit. 1 / 1 Document téléchargé depuis www.cairn.info - - - 201.52.240.55 - 28/03/2015 04h27. © ERES Document téléchargé depuis www.cairn.info - - - 201.52.240.55 - 28/03/2015 04h27. © ERES

Mutation Dans La Famille Et Ses Incidences

  • Upload
    zen6574

  • View
    215

  • Download
    1

Embed Size (px)

DESCRIPTION

Gauchet Marcel

Citation preview

  • MUTATION DANS LA FAMILLE ET SES INCIDENCES

    Marcel Gauchet

    ERES | La revue lacanienne

    2010/3 - n 8pages 17 32

    ISSN 1967-2055

    Article disponible en ligne l'adresse:--------------------------------------------------------------------------------------------------------------------

    http://www.cairn.info/revue-la-revue-lacanienne-2010-3-page-17.htm--------------------------------------------------------------------------------------------------------------------

    Pour citer cet article :--------------------------------------------------------------------------------------------------------------------

    Gauchet Marcel, Mutation dans la famille et ses incidences , La revue lacanienne, 2010/3 n 8, p. 17-32. DOI : 10.3917/lrl.103.0017--------------------------------------------------------------------------------------------------------------------

    Distribution lectronique Cairn.info pour ERES. ERES. Tous droits rservs pour tous pays.

    La reproduction ou reprsentation de cet article, notamment par photocopie, n'est autorise que dans les limites desconditions gnrales d'utilisation du site ou, le cas chant, des conditions gnrales de la licence souscrite par votretablissement. Toute autre reproduction ou reprsentation, en tout ou partie, sous quelque forme et de quelque manire quece soit, est interdite sauf accord pralable et crit de l'diteur, en dehors des cas prvus par la lgislation en vigueur enFrance. Il est prcis que son stockage dans une base de donnes est galement interdit.

    1 / 1

    Doc

    umen

    t tl

    cha

    rg

    depu

    is ww

    w.ca

    irn.in

    fo -

    - -

    201

    .52.

    240.

    55 -

    28/0

    3/20

    15 0

    4h27

    . E

    RES

    Docum

    ent tlcharg depuis www.cairn.info - - - 201.52.240.55 - 28/03/2015 04h27. ERES

  • Mutation dans la famille et ses incidences 1

    Marcel GauchetDirecteur dtude lE.H.E.S.S.Rdacteur en chef du dbat

    La Revue Lacanienne

    17

    Une tape capitale dans lhistoire de lhumanit

    Nous sommes tmoins de quelque chosequil faut bien appeler une mutationanthropologique: lavnement dune nou-velle humanit. Ce mouvement se pour-suit, se vrifie, samplifie et nous avons essayer de comprendre ce qui arrive lhumanit dans nos socits du fait deleur mouvement. Ce phnomne, les psy-chanalystes sont bien placs pour leconstater du point de vue clinique qui estle leur. Ce que nous pensions connatre delhumanit et de ses ressorts a chang grande vitesse. Pourquoi cette mutation? quoi correspond-elle? Jai eu loccasionde tenter dapporter une premirerponse ces questions, en les liant auprocessus dindividualisation contempo-rain et ce que ce processus dindividua-lisation change quant au mode dtre ensocit : savoir la mtamorphose desconditions de constitution de lindividua-lit concrte, la mtamorphose des condi-tions de la venue au monde de lenfant etdes conditions de son entre dans la vie.Lhypothse, que je voudrais envisager etdiscuter, est la suivante : ce qui a fonda-mentalement chang au cours des trenteannes qui viennent de scouler, ce sont,dune part, les conditions sociales et psy-chiques dans lesquelles les enfants sont

    1. Extraits de Limpossible entre dans la vie ; conf-rence prsente Bruxelles ; janvier 2008.

    attendus, conus, procrs, mis au monde,et ce sont, dautre part, les conditionssociales et psychiques dans lesquelles ilrevient ces enfants de grandir, dtreduqus, de devenir adultes et de sins-crire dans la socit. Tels sont les change-ments qui fondent parler de mutationanthropologique .Pour le dire dune proposition abrupte, larvolution fondamentale de notre tempsqui se tient derrire cette mutationanthropologique, est une rvolution dulien social. Cest elle qui a dtermin ladsinstitutionnalisation de la famille,cest--dire cet vnement norme danslhistoire humaine quest la disparitiondes liens de parent comme liens sociauxde plein exercice. La famille a cess deremplir la fonction dinstitution, dans laplnitude du terme, en ceci quelle nestplus un rouage de lordre social : on ne luidemande plus de contribuer la fabrica-tion du lien de socit. La famille nestplus ce quelle a archi-millnairement t:la cellule de base du fonctionnement de lasocit. Elle na plus rien faire avec lor-ganisation publique, elle est devenuerigoureusement prive, dans un sens quinous oblige mme redfinir cette notion

    01 Lacanienne 8 8/11/10 15:33 Page 17

    Doc

    umen

    t tl

    cha

    rg

    depu

    is ww

    w.ca

    irn.in

    fo -

    - -

    201

    .52.

    240.

    55 -

    28/0

    3/20

    15 0

    4h27

    . E

    RES

    Docum

    ent tlcharg depuis www.cairn.info - - - 201.52.240.55 - 28/03/2015 04h27. ERES

  • La Revue Lacanienne n 8

    18

    Le dossier La famille, fin dun drame psychique ?

    de priv. Cela se traduit par la dissociationde deux sortes de liens entre les tres : lesliens constituants obligatoires, ceux quonne choisit pas et qui simposent nous,qui sont du ct du politique, et les lienslibres la disposition des individus quidfinissent ce quon appelle commun-ment la socit civile. Ces liens sont libresparce quils sont ports en fait par linfra-structure politique.Si nous jouissons aujourdhui dunelibert, sans gale dans lhistoire, de nouerles rapports que nous voulons, avec quinous voulons et comme nous le voulons,cest dans la mesure o nos relations detous les jours avec nos pareils ne sont pasen charge dtablir le lien social, cettecharge de constituer le lien social tantremplie par ailleurs. Cest vrai notammentde la famille et cest la cl de ses change-ments. Cest ce qui la rendue informelleet affective au lieu dtre institutionnelle,avec les contraintes de rle que supposaitlinstitution. Dans lordre de la parentsincarnait linstitutionnalisation de lacontrainte de reproduction de la collecti-vit. Lessence du social, par rapport lindividuel, cest la perptuation dans letemps. Une socit existe dans la mesureo elle dure par rapport la vie brve deses membres. Une socit nexiste quedans la mesure o elle est capable de seperptuer biologiquement. Cest cettecontinuit temporelle passant par ledevoir de reproduction qui se matrialisaitdans la famille. Elle avait pour missiondengendrer des nouveaux venus destins remplacer les morts et de produire destres pour la socit, en faisant passer cesnouveaux venus de la nature animale quiest la base de notre humanit la culture, lexistence selon les rgles de la collec-

    tivit. Cela a disparu corps et biens avec lafamille institutionnelle.Notre socit a cess de sorganiser autourde la contrainte de se reproduire. Il enrsulte aussi bien cet autre phnomne sispectaculaire du contemporain questlmancipation de la sexualit ou dessexualits. De la mme source quedcoule semblablement le parachvementde lmancipation des femmes puisquecest sur leur assujettissement que repo-sait linstitutionnalisation de la contraintede reproduction. Si la sexualit est deve-nue libre, cest parce quelle a complte-ment chang de statut du point de vue dela vie sociale. La sexualit nest plus unequestion intimement lie lexistencemme du collectif et contraignante par lmme, elle est intgralement la disposi-tion des individus, elle ne regarde queux.La collectivit na pas en connatre.Consquence immdiate, la reproductionde nos socits, du point de vue biolo-gique et du point de vue culturel, est deve-nue un problme, un problme qui nefait que commencer.Autre consquence du mme phnomne,la maturit sest efface. La maturit, soitce qui donnait sens lge adulte. Lamaturit, avant dtre un fait dge, taitun fait social. Elle consistait dans la priseen charge de cette contrainte de la repro-duction, soit la charge de famille, la chargede perptuer la collectivit qui justifiaitchaque existence comme le maillon dunechane destine se prolonger. Voil, soitdit au passage, la racine du surgissement,si frappant dans lactualit rcente et lasensibilit contemporaine, de la questionexistentielle du sens de la vie. Seule sepose la question du sens de sa vie, unindividu dont la vie nest que pour lui-

    01 Lacanienne 8 8/11/10 15:33 Page 18

    Doc

    umen

    t tl

    cha

    rg

    depu

    is ww

    w.ca

    irn.in

    fo -

    - -

    201

    .52.

    240.

    55 -

    28/0

    3/20

    15 0

    4h27

    . E

    RES

    Docum

    ent tlcharg depuis www.cairn.info - - - 201.52.240.55 - 28/03/2015 04h27. ERES

  • La Revue Lacanienne

    19

    Mutation dans la famille et ses incidences

    mme, alors que jusquil y a peu, le sensde la vie tait tout simplement la perp-tuation de la vie. Une vie qui certes passepar nous, mais destine porter infini-ment plus loin que nous. Nous touchonsici, avec leffacement de ce qui faisait deltat adulte le fate de lexistence, unlment cl de la redfinition des ges dela vie. Nous sommes les premiers ne pastre requis de mettre nos vies au servicede lexistence mme de la socit dans satranscendance temporelle. Comment lareprsentation de leur cours pourrait-ellene pas en tre affecte?

    Lenfant du dsir

    On peut rsumer dune expression ce sta-tut indit du nouveau venu en parlant delenfant du dsir. Son avnement est fonc-tion de ce changement de statut de lafamille. Lenfant du dsir est lenfant de lafamille prive, intimise, dsinstitutionna-lise, informelle, qui na dautre raisondtre que lpanouissement affectif de sesmembres. On fait un enfant non pour lasocit, pour la perptuation de lexistencecollective, mais pour soi et pour lui-mme.Soulignons la prsence des deux faces quirecouvre en ralit une contradiction, unetension vitale. La venue de lenfant idale-ment parlant en tout cas, cest le nouvelidal social en la matire na de sens quesil est dsir. Lhorreur en ce domaine,cest la contrainte ou le hasard.Lenfant tait le fruit de la ncessit de lavie qui se poursuit, de lindispensable per-ptuation de la ligne, il devient le fruit dudsir singulier, personnel, de ses parents,un dsir portant sur sa singularit dindi-vidu. Insistons sur ce point car la notiondenfant du dsir peut faire natre lqui-

    voque. Lenfant du dsir est le contraire delenfant du dsir sexuel avec ses cons-quences inattendues, hasardeuses, nondsires. Le dsir dont il sagit est et doittre un dsir concert denfant, n de lamatrise du dsir sexuel, utilis en loccur-rence comme un instrument. Il se joue icitout un problme du sexuel dans la pro-cration qui est de la plus grande cons-quence pour la reconfiguration de lasexualit dans notre monde. Il y a unesexualit quon pourrait dire rcrative, la disposition des individus, dont ils fontce quils veulent, et puis (prenons gardede tout mlanger), il y a une sexualitsrieuse, celle qui dbouche sur la repro-duction. Cette dissociation emporte lesplus grandes consquences pour limagede lenfant dans ses rapports avec lasexualit. Elle nest sans doute pas tran-gre la crainte fantasmagorique dupdophile qui hante limaginaire contem-porain et la vritable phobie qui pousse sparer absolument lenfant de la sexualitdans les reprsentations. Comme si len-fant issu de la sexualit procratrice nedevait en aucun cas tre expos la sexua-lit rcrative. Car il faut bien poser laquestion: quest-ce qui rsulte de ce dsirgnrateur dsormais install au centrede lacte de procration? Quest-ce quien rsulte pour les parents vis--vis delenfant ? Quest-ce qui en rsulte plusencore pour lenfant vis--vis de sesparents?

    Qui dsire?

    Qui dsire? Les parents, mais lesquels ?Limage idale, abondamment cultive partoute une littrature spcialise, est natu-rellement laccord des dsirs des parents

    01 Lacanienne 8 8/11/10 15:33 Page 19

    Doc

    umen

    t tl

    cha

    rg

    depu

    is ww

    w.ca

    irn.in

    fo -

    - -

    201

    .52.

    240.

    55 -

    28/0

    3/20

    15 0

    4h27

    . E

    RES

    Docum

    ent tlcharg depuis www.cairn.info - - - 201.52.240.55 - 28/03/2015 04h27. ERES

  • La Revue Lacanienne n 8

    20

    Le dossier La famille, fin dun drame psychique ?

    au sein du couple, valant ratification delentente intime des curs. Dans les faits,ce sont les femmes qui dsirent desenfants, alors que leurs conjoints suiventen renclant plus ou moins, pouremployer une expression prudente. Cestsur ce front que se joue lcroulementfinal du principe patriarcal. La domina-tion masculine culminait dans le pouvoirde faire des enfants une femme un traitque lon peut encore observer dans beau-coup de cultures travers le mondeaujourdhui, en dehors du monde occi-dental. Ctait cela qui fondait la figure dupatriarche comme gniteur fcond. Il sejoignait cette puissance la responsabilitdassurer lexistence de femmes et enfantssur le plan matriel, soit lexercice du rlede chef de famille , une notion qui taitencore en grand usage jusque dans lesannes 1960 et dont on observera quellene veut plus rien dire aujourdhui. Le chefde famille, le magistrat paternel, le predans sa figure forte, tait celui sur quireposait la responsabilit de la cellulefamiliale vis--vis de la socit globale. Ilse tenait larticulation de la socitdomestique et de la grande socit. Il fai-sait le lien. La dsinstitutionnalisation dela famille a vid cette fonction de sens.Ajoutons-y la vocation des femmes lautosuffisance matrielle par le travailet lon obtient larrive ce fait capital :lclipse de la fonction paternelle.Un fait que tous constatent, mais dont lamesure ne semble pas avoir t prise. Leproblme nest pas de clbrer ou decontester le principe paternel, mais de sai-sir les motifs de sa liquidation et leursimplications. Il ne sagit pas que dun faitsocial. Les choses vont infiniment plus loinet plus profond. Il sagit galement dun

    fait libidinal. La procration na plus desens du point de vue masculin. Elle nen aque par association au dsir fminin. Dansla plupart des cas, cest en effet la rsigna-tion par amour qui aboutit au dsir mascu-lin, raccroch celui de sa compagne(laissons de ct les conflits et lclatementdes couples qui se jouent frquemmentautour de cette preuve) : dans un nombrenon ngligeable de cas, cette initiative pro-cratrice signifie domination fminine. Ilest permis de parler de matriarcat au senspsychique, en ce point, les femmes tantcelles qui portent la fois le dsir denfantet lautorit dans les familles. Leur rlematernel est le seul pouvoir justifier desprrogatives du type de celles quon appe-lait paternelles . Il nest pas excessif dedire que lvolution va vers un type defamilles o les mres sont en mme tempsles pres tandis que le gniteur na quuneexistence rsiduelle. Il est au mieux un taidu pivot maternel, sans fonction psychiqueet symbolique distincte. Mais cette mater-nit qui tend absorber la paternit nestplus du tout la mme que celle quonconnaissait. Cest par ce constat de renou-vellement quil faut commencer lanalysede ses effets.

    Le nouvel idal des parents

    Quest-ce donc quun enfant du dsir ?La question est double : quelles sont lesattitudes quinduit chez les parents cedsir, quels sont ses effets sur lenfant? Ence qui concerne les parents, deux traitsprincipaux semblent retenir.En premier lieu, lenfant du dsirimplique dabord un dsir chang quantau bonheur de lenfant. En soi, la chosenest pas du tout nouvelle, videmment.

    01 Lacanienne 8 8/11/10 15:33 Page 20

    Doc

    umen

    t tl

    cha

    rg

    depu

    is ww

    w.ca

    irn.in

    fo -

    - -

    201

    .52.

    240.

    55 -

    28/0

    3/20

    15 0

    4h27

    . E

    RES

    Docum

    ent tlcharg depuis www.cairn.info - - - 201.52.240.55 - 28/03/2015 04h27. ERES

  • La Revue Lacanienne

    21

    Mutation dans la famille et ses incidences

    Les parents ont toujours voulu le bon-heur de leurs enfants. Mais il y a unegrande diffrence entre la faon dont ilsconcevaient ce bonheur et la faon dontils le conoivent aujourdhui. Le bonheur,dans lesprit des parents de la famille ins-titutionnelle, jusqu tout rcemment,tait celui dun enfant qui ferait son che-min dans la vie en tant bien arm pour lavie sociale. La mission de la famille taitdonc de ladapter cette existence pour lasocit qui tait la condition de son bon-heur. Il sest produit cet gard un renver-sement complet qui, du point de vue delducation, est un des changements lesplus importants que nous ayons aujour-dhui grer. Le bonheur idal de lafamille informelle, cest le bonheur intimepar la protection contre la socit. La fic-tion psychologique, alimente par une lit-trature nombreuse, est que lenfant, unefois panoui par-devers lui-mme, seraarm pour faire son chemin dans la vie. Lesoutien inconditionnel des familles dau-jourdhui lgard de leurs rejetons va depair avec une difficult constitutive dac-cepter la rgle de base de la vie sociale quiest limpersonnalit. Du point de vue de lavie sociale, nous sommes tous interchan-geables et encore plus dans des socitsgalitaires. Nimporte qui vaut nimportequi et doit tre trait comme nimportequi : tel est le principe dimpartialit quela rgle veut voir rgner envers chaqueindividu.De l, lintrieur de la famille actuelle,une relation contentieuse avec cettesocit qui ne livre pas ses membres lareconnaissance quils sont en droit dedemander et pour cause, puisque encoreune fois, la vie sociale est fonde sur lin-diffrence ce que nous sommes en par-

    ticulier. Il existe sur ce chapitre un grandflottement dans les lectures contempo-raines de la demande de reconnaissance.Sans doute la socit peut-elle et doit-elleveiller reconnatre leur gale dignit ses membres dans toutes les situations.Mais la reconnaissance de la dignit portesur la dignit de chaque humain en tantquhumain, comme nimporte qui ; ellena rien voir avec la reconnaissance delidentit singulire de tel ou tel tre. Cestpourquoi les politiques dites de la recon-naissance chouent systmatiquement satisfaire la demande qui leur est adresse,parce que cette demande ne porte pas enralit sur lgale dignit, avec ce quelleimplique dindiffrence lidentit destres ; cest une demande de reconnais-sance de la singularit des tres. Demandequaucune socit, a fortiori une socitdmocratique, rationnelle, lgale, nest enmesure de procurer ses membres. Lafamille est devenue de ce point de vue unfoyer de contestation des rgles du fonc-tionnement de la vie sociale dont le pointdapplication lectif est lcole. Lereproche interminable, indfini, inpui-sable, auquel il ny a pas de rponse, desparents contemporains lgard de lcoleest que, en tant quinstitution, elle mcon-nat, elle ignore, elle refoule, elle pitine lareconnaissance due la singularit deleurs rejetons.En second lieu, la transformation entra-ne par lenfant du dsir du ct desparents comporte un autre aspect nonmoins important. Comme cela a t pointplus haut, lenfant est dsir pour lui-mme en mme temps que pour soi. Pourlui-mme dans sa singularit, dans sonindividualit particulire. Do lextraordi-naire passion de lautonomie de lenfant

    01 Lacanienne 8 8/11/10 15:33 Page 21

    Doc

    umen

    t tl

    cha

    rg

    depu

    is ww

    w.ca

    irn.in

    fo -

    - -

    201

    .52.

    240.

    55 -

    28/0

    3/20

    15 0

    4h27

    . E

    RES

    Docum

    ent tlcharg depuis www.cairn.info - - - 201.52.240.55 - 28/03/2015 04h27. ERES

  • La Revue Lacanienne n 8

    22

    Le dossier La famille, fin dun drame psychique ?

    qui caractrise les dmarches ducativesspontanes des parents dans la familleinformelle contemporaine. Tout doit trefait pour faire aller lenfant vers son auto-nomie, ce qui veut dire que la charge duparent est de faire exister une autonomiequi nexiste pas. Lenfant, cest sa dfini-tion, na pas, en effet, les moyens de lau-tonomie laquelle il sagit de le faireadvenir. Do le partage, le dilemme, latension des parents entre lhyperprotec-tion et labstention. Tantt prvaut la sub-stitution, littralement, lenfant, pourfaire comme sil tait autonome. Tantt,cest le laisser-faire qui lemporte puisquetout dirigisme intempestif peut aboutir tuer dans luf lautonomie dont il doittre capable. Cela donne un parent qui apeur de lui-mme, en peine de se situer,avec de trs grandes consquences duca-tives. Celles-ci sont loin dtre homognes,cela dit. Elles prsentent de notables dif-frences selon les classes sociales. Ilsemble que la racine de lingalit nou-velle, en matire de capital social , tellequelle incube dans le laboratoire desfamilles, se situe ici. Pour le dire trs sch-matiquement, en durcissant le trait, lesmilieux privilgis sont beaucoup mieuxarms face cette tension entre abstentionet intervention, ils savent ngocier la ten-sion; les milieux populaires y ont beau-coup plus de peine. Les attitudes les plusdmissionnaires lgard des enfants sob-servent clairement aujourdhui dans lesclasses dfavorises. Cest un renverse-ment spectaculaire. Jusquil y a deuxdcennies peut-tre, toutes les observa-tions des ducateurs de tous ordres sontconvergentes sur ce point : les milieuxpopulaires avaient une attitude rpressiveen matire dducation, quand les milieux

    duqus tendaient vers une attitude per-missive, avec tous les dgrads, lesnuances, les complications quil faut faireintervenir dans un tel tableau. Aujour-dhui, cest linverse. Les milieux duqussavent mieux faire passer la contrainte et lalimite lgard de leurs enfants, quand,face cette contradiction du parent delenfant du dsir, les milieux populairessont dsarms et impuissants. Ils adressentdailleurs une demande grandissante auxinstitutions de faire le travail leur place : Nous, on ne sait pas faire.

    La constitution de lidentit subjective

    Pour en venir lautre face du problme,du ct de lenfant, et pour nous centrersur ce qui semble le plus important, cest--dire ce qui regarde un processus deconstitution de lidentit subjective quinous restait cach, car il allait de soi :quest-ce qui rsulte dtre dsir, denatre enfant du dsir ? En devenant pro-blmatique, il est galement devenu acces-sible lanalyse. Laissons de ct un pointqui nest pourtant pas ngligeable par sesretombes, savoir ladvenue lautono-mie dans la dpendance. Laspiration lautonomie passait, chez ladolescent, parla conqute de lindpendance vis--visde ses parents. Changement non ngli-geable, lautonomie napparat aucune-ment incompatible, dsormais, avec ladpendance envers ses parents, aucontraire. Somme toute, la bonne maniredtre autonome, est dtre sustent danslexistence par une instance extrieure pastrop pnible supporter. Cette initiationaux avantages de la libert, sans linconv-nient majeur que reprsente la ncessitde pourvoir ses moyens de subsistance,

    01 Lacanienne 8 8/11/10 15:33 Page 22

    Doc

    umen

    t tl

    cha

    rg

    depu

    is ww

    w.ca

    irn.in

    fo -

    - -

    201

    .52.

    240.

    55 -

    28/0

    3/20

    15 0

    4h27

    . E

    RES

    Docum

    ent tlcharg depuis www.cairn.info - - - 201.52.240.55 - 28/03/2015 04h27. ERES

  • La Revue Lacanienne

    23

    Mutation dans la famille et ses incidences

    nest pas sans consquence. Elle pourraitbien tre en train de prendre valeur demodle, en entranant une rvision desidaux de la vie sociale en gnral dont onna pas fini de mesurer les effets. Passonsde la mme faon sur les dilemmes dontce dsir est source pour lenfant. Pointnest besoin de se demander do lui vientla question.Ce dsir est devenu un objet de culture, part entire, omniprsent dans le dsirsocial, dont le discours des parents. Ondisait communment jadis que nul nepouvait tre sr dtre lenfant de sonpre. Le fantasme culturellement consacrtait de ne pas tre lenfant de ses parents.Aux psychanalystes de nous dire ce quilen est aujourdhui du roman familial, maislimpression suggre que le foyer de lima-ginaire sest sensiblement dplac. Laquestion qui hante lexprience infantileest dun autre ordre, environnementoblige. Elle est linexorable question: ai-jevraiment t dsir? Et, pire encore: suis-je lenfant qui correspondait vraiment audsir de mes parents? Comme il nest pasde rponse possible cette interrogation sauf dlirante , il sensuit un douteexistentiel infini qui ronge lexistence debeaucoup de nos nouveaux venus. Lana-lyse de ses manifestations reste largement faire. Tout cela simplement signal, titre douverture pour la discussion.Nous en arrivons au point qui semble leplus important et mme tout fait capital :ce sont pour finir les conditions de lindi-viduation psychique qui sont affectes parce rgime du dsir. Il faut ici introduireune question laquelle nous ntions pashabitus et que nous allons devoirapprendre affronter. Comment deve-nons-nous des individus par-devers nous?

    Comment accdons-nous la puissancedindividu, si nous navons pas la navetde penser que cette capacit nous est toutsimplement donne par la nature? Ellerelve dune gense psychique. Il estncessaire de savancer ici sur le terraindune thorie de lindividuation psy-chique dont nous avons peine les pre-miers rudiments. Nous devenons capablesde fonctionner comme des individusnotamment par une opration psychoaf-fective qui parat au moins aussi crucialeque le processus dipien. Si la psychana-lyse nous a appris reprer ce dernier et en discerner les enjeux, nous sommescompltement dsarms devant cet autreaxe de la constitution subjective que nousentrevoyons partir de sa perturbation.Pour formuler de manire abrupte lhypo-thse qui semble simposer de manire en faciliter le dbat : nous devenons indi-vidus, nous devenons vritablement desindividus au sens psychique, en assumantla contingence qui prside notre exis-tence. Exister, cest navoir pas choisidexister, voil une intressante limite lindividualisme. Je me choisis mais je naipas choisi de pouvoir choisir. Je nai paschoisi, videmment, les parents dont jesuis n, je nai pas choisi le moment o jesuis n, je nai pas choisi la tte que jai cest trs important dans la vie , je naipas choisi les aptitudes ou les inaptitudesqui me sont chues et avec lesquelles jau-rai me dptrer. tre un individu, deve-nir un individu, accder la puissancedindividu, cest prendre en charge cettecontingence dans la singularit et la soli-tude qui sy attachent. Cest cela qui fondenotre capacit dindpendance psychique,notre capacit faire avec ce que noussommes, cest--dire ce que nous navons

    01 Lacanienne 8 8/11/10 15:33 Page 23

    Doc

    umen

    t tl

    cha

    rg

    depu

    is ww

    w.ca

    irn.in

    fo -

    - -

    201

    .52.

    240.

    55 -

    28/0

    3/20

    15 0

    4h27

    . E

    RES

    Docum

    ent tlcharg depuis www.cairn.info - - - 201.52.240.55 - 28/03/2015 04h27. ERES

  • La Revue Lacanienne n 8

    24

    Le dossier La famille, fin dun drame psychique ?

    pas choisi. Cest en ce point que se jouepour une part dcisive la constitution delidentit personnelle, dans son doubleaspect de sentiment de ce que lon a dir-rductiblement singulier et de sentimentque ce que lon a de singulier est parfaite-ment contingent, donc relatif. Nous nesommes pas enferms dans cette singula-rit, cest tout le contraire. Nous ne la pos-sdons et nous ne la subissons que dans lamesure o nous sommes dcentrs parrapport elle.Il est permis de dire que les conditions decette preuve dassomption de la singula-rit et de la contingence sont brouilleschez lenfant du dsir. La contingence quiprside toute existence est recouvertepour lenfant du dsir par une ncessitfantasmatique aussi profonde et puissante,peut-tre, que ce que lon a pu dcrire enpsychanalyse sous le nom de fantasme delorigine. Ce nest plus : Je suis monpropre auteur , mais Je ne suis pas lefruit du hasard, jai t dsir comme jesuis. partir de ce noyau de conviction,ce sont les conditions mmes de lindivi-duation qui sont touches. Impossible, outrs difficile, de se dgager de cette adh-sion primordiale ce qui fait de vous ceque vous tes. Trs problmatique, demme, de se distancier jamais de ce dsirautre qui soutient votre identit, puisquilest celui qui la justifie pour ce quelle est.En prenant du recul, on peut reformulerlide sous un autre angle, en replaant lephnomne dans son contexte social: len-tre en possession de soi-mme est pertur-be par la manire dont lenfant estprcocement reconnu dans son individua-lit singulire. La reconnaissance de lindi-vidualit joue contre la capacit de devenirindividu. Pour le ramasser dans une for-

    mule : lindividualisation, fait social, seretourne contre lindividuation, fait psy-chique. Lindividualisation se retournecontre la formation de cette capacit fonda-mentale de disposition de soi-mme horsde laquelle la libert de lindividu na pasgrande porte.

    Lenfance mythifie

    Pour circonscrire lesprit gnral de cettetransformation de la phase initiale delexistence, il convient de revenir rapide-ment sur les expressions plus particuliresque cet esprit emprunte chacune de sestapes. De ce point de vue, nous pouvonsparler de trois phnomnes distincts : pre-mirement, lextension de la responsabi-lisation de lenfance ; deuximement, ladconstruction de ladolescence ; et, troi-simement, la liquidation de ltat ditadulte. La question poser ici est celle dela mythification de lenfance produite parcette logique des reprsentations collec-tives, mythification qui fait de lenfance letemps rv de la pure advenue soi-mme, protger du monde tel quil est.Mais est-ce l ce que demande lenfantrel ? Il y a de grandes raisons de penserque non et que notre monde cache der-rire son culte de lenfant imaginaire (lefameux enfant-roi , ce qui nest pas fauxdu point de vue de la surface des compor-tements collectifs) beaucoup dindiff-rence lenfant rel.

    Rester jeuneEn deuxime lieu, dconstruction deladolescence, ronge par les deux bouts.Ladolescence est une constructionrcente qui na gure quun sicle et demi

    01 Lacanienne 8 8/11/10 15:33 Page 24

    Doc

    umen

    t tl

    cha

    rg

    depu

    is ww

    w.ca

    irn.in

    fo -

    - -

    201

    .52.

    240.

    55 -

    28/0

    3/20

    15 0

    4h27

    . E

    RES

    Docum

    ent tlcharg depuis www.cairn.info - - - 201.52.240.55 - 28/03/2015 04h27. ERES

  • La Revue Lacanienne

    25

    Mutation dans la famille et ses incidences

    et qui ne sest vraiment gnralisequaprs 1945. Cette construction est entrain de sclipser du fait de llargisse-ment de lenfance un bout et lautrebout, du fait de la disparition du modlede la maturit sur lequel elle se calait.Ladolescence devient dun ct un pro-longement de cette enfance conuecomme temps, non pas de la prparation lexistence sociale, mais de ladvenue soi-mme; de lautre ct, ladolescence,qui tait prparation un type dterminde vie adulte, sest brouille dans sa dfi-nition avec le brouillage des contours decette vie adulte en fonction de laquelleelle tait conue. Cela a t voqu tout lheure, le contenu prcis quil fallaitmettre derrire cette notion d tatadulte , ctait la maturit comprise rel-lement comme la vie sous le signe de lamort, cest--dire la vie responsable sousle signe de la reproduction et de la perp-tuation de la vie. La maturit dans ce sens-l, du point de vue des reprsentationscollectives, a cess dexister. Il nexisteplus dtat adulte, en tant que missionimpose du point de vue des rles sociaux,avec les bnfices de reconnaissancesociale qui allaient avec. Sous cet angle,pour la vie adulte au sens objectif, celledonc qui se droule au-del de 25 ans,lidal nest pas datteindre une maturitqui na plus de sens, cest de rester jeune.Quest-ce que rester jeune? Quest-ce quise cache derrire cette formule qui peutparatre vidente mais qui ne lest pas dutout? Rester jeune, cest garder du pos-sible devant soi. Ce qui dvalorise ltatadulte aujourdhui dans les reprsenta-tions collectives, cest quil est dtermin,donc limitatif sur tous les plans. treadulte, cest tre enferm (au sens objec-

    tif du terme) dans des limites sur tous lesplans ; sentimental : un partenaire lex-clusion des autres ; professionnel : il y ace que lon sait faire et donc le reste quelon ne sait pas faire ; et social : les liensque lon a nous, les engagements quelon a pris, vous contraignent et vousarrtent.Lidal de rester jeune, cest lidal de res-ter aussi affranchi de dterminations quepossible, car une vie longue est une viefaite pour tre recommence. Cest unevie qui ne peut et ne doit pas trouver saforme dfinitive du premier coup, une viepar principe ouverte plusieurs dpartssur tous les plans. On comprend partirde l que lon puisse vouloir reculer ind-finiment lentre dans la vie par une peurprofonde de mutiler ce possible quiappartient dabord la jeunesse. Bienentendu, dans les faits, cest toute unegamme de comportements quil faudraitdtailler ici depuis celui-l, le franc refusdentrer dans la vie, qui est une limitepathologique, jusqu des vitementsbeaucoup plus bnins mais non moinssignificatifs. Dans tous les cas, la volontde rester jeune est luvre, au sens dumaintien de la disponibilit, de louver-ture intacte au choix. Lidal de la matu-rit, en fonction du rle quil sagissaitdy remplir, cette ide, ctait la matrisede soi et lidal de faire de mieux en mieuxce que lon savait faire. Autant didauxsociaux fonds sur laboutissement, laralisation, la plnitude dans la voie quelon a choisie, qui perdent sens au profitde la puissance de rinvention et derecommencement : quoi bon persisterdans ce que lon sait dj faire ? On naplus rien se prouver, ni prouver auxautres.

    01 Lacanienne 8 8/11/10 15:33 Page 25

    Doc

    umen

    t tl

    cha

    rg

    depu

    is ww

    w.ca

    irn.in

    fo -

    - -

    201

    .52.

    240.

    55 -

    28/0

    3/20

    15 0

    4h27

    . E

    RES

    Docum

    ent tlcharg depuis www.cairn.info - - - 201.52.240.55 - 28/03/2015 04h27. ERES

  • La Revue Lacanienne n 8

    26

    Le dossier La famille, fin dun drame psychique ?

    Ce qui sinvente sur ce front est un nou-vel idal de lindividu. Un individu, dupoint de vue de lidal contemporain,est un entrant permanent dans la vie,disposant de cette facult propre lajeunesse de tout remettre en question,facult quil sagit par excellence, dsor-mais, de conserver. La question que lonne peut pas ne pas poser, propos de cetidal, est celle de lexistence relle delindividu qui vit sous son empire. Lersultat de cet idal du rester jeune ,sans surprise, cest la frustration, ladception vis--vis de ce que lon est etla disposition la dpression, dans uneacception o la culpabilit emprunte unnouveau visage. Car la culpabilit dont ilsagit est une culpabilit lgard de soi.Nous sommes loin de la figure cano-nique dun surmoi social crasant lindi-vidu sous le poids dune loi extrieure.Ici, tout se joue par-devers soi : jai toutrat, je suis pass ct. On na decomptes rendre qu soi dans cetteperspective, mais qui a dit que le soi taitmoins tyrannique que la figure de lauto-rit sociale ? Force est de constater quecest faux. Un idal social repris par unindividu par-devers lui peut tre autantet plus tyrannique que la figure du com-mandement collectif. Il faut ajouter autableau, et nous bouclons ici la boucle,en revenant au point sur lequel il avaitt conclu avec lenfant du dsir : la fai-blesse du moi rel, la faiblesse de lindi-viduation qui habite par ailleurs cetteindividualisation sociale si frappante dela scne contemporaine. Une chose estdtre m par lidal du choix de soi,autre chose est den avoir la puissancepsychique, avec ce que cette capacit dese poser comme soi implique de dta-

    chement vis--vis de ceux auxquels ondoit la vie et de mesure de la contin-gence du lien qui unit aux parents. Voille cur de la nouvelle difficult dtre laquelle nous confronte le spectacle dufonctionnement de nos socits. Len-fant dsir fabrique des individus hantspar une alination irrvocable leursorigines.

    Une possible alination aux origines de lenfant du dsir

    De quoi sagit-il quand on parle de foliedes origines ? Ces gens formulent uneplainte extrmement prcise : Je ne saispas quelles sont mes origines. Cela ren-voie en particulier aux gens qui, dans lasituation franaise, sont des enfantsabandonns, ns de ce que lon appelaitles accouchements sous X. Lanonymatde la mre tant garanti, labandon lanaissance faisait que lenfant ignorait quitait sa vritable mre, a fortiori son pre.Ces gens formulent une plainte endisant : Tant que je ne sais pas qui estma mre, je ne peux pas exister. Si je nesais pas quel est le dsir dont je suis n,mon existence est impossible. Face cette situation, ce trouble a fini par trereconnu, avec de trs grandes cons-quences, par des thrapeutes pousant lacause de leurs patients, y reconnaissantune vritable pathologie. Do il rsultela rclamation dun droit la connais-sance de ses origines. Derrire cettedemande, il faut dchiffrer la formula-tion dune alination radicale aux ori-gines. La possibilit dexister de manireindpendante est totalement suspendue ce qui rend leur existence subjective-ment ncessaire du point de vue de celui

    01 Lacanienne 8 8/11/10 15:33 Page 26

    Doc

    umen

    t tl

    cha

    rg

    depu

    is ww

    w.ca

    irn.in

    fo -

    - -

    201

    .52.

    240.

    55 -

    28/0

    3/20

    15 0

    4h27

    . E

    RES

    Docum

    ent tlcharg depuis www.cairn.info - - - 201.52.240.55 - 28/03/2015 04h27. ERES

  • La Revue Lacanienne

    27

    Mutation dans la famille et ses incidences

    qui leur a donn naissance. Ce qui sou-lve un grand problme : savoir le posi-tionnement de ces thrapeutes qui, aulieu de rflchir sur la nature du dis-cours auquel ils sont confronts, secontentent de lpouser sans mesurer lasignification vritable qui se cache lderrire. Ladmission de la proposition : Je ne peux pas exister sans connatre ledsir dont je suis issu est une ngationstricte de lassomption de la contin-gence, dfinie tout lheure commecondition de la fondation de lidentit,de lindividuation. Cest de l, aussi res-pectable que soit la souffrance de cesgens, que devrait partir le travail thra-peutique. Au lieu dadhrer leur dis-cours, sa vise devrait tre au contrairede le dconstruire et de lanalyser, ycompris dans ce quil a de fou. Juste-ment, il convient de leur apprendre exister en assumant la condition tout fait particulire dans laquelle ils sontns. On pourrait dire, en durcissant letrait, quil est possible de surmonter lefait de navoir pas t dsir explicite-ment puisquen effet, et surtout par lepass, ctait une situation extrmementbanale. Rien que la littrature, sans allerchercher dans les annales de la clinique,nous offre cet gard dassez abondantstmoignages. Cela se surmonte.La certitude davoir t dsir est proba-blement ce qui ne se surmonte pas. Parceque : quest-ce qui a t dsir? Cest celala question. Elle est multiples dtentes :mes parents dsiraient un enfant, maispas moi. Jai t dsir, mais je ne suispas lenfant que mes parents dsiraient.Cest un foyer dincertitudes norme.Quel tait vraiment le dsir de mesparents puisque je sais quils en avaient

    un, mais en quoi consistait-il ? La pr-sence de ce dsir est par nature source deperplexit infinie alors que le fait denavoir pas t dsir, qui peut tre assezdur vivre dans ses consquencesconcrtes, est, somme toute, quelquechose de tout fait surmontable, dupoint de vue justement de la prcipita-tion de cette preuve de lindividuation.Eh bien oui, je nai pas t dsir, moide jouer, cela ne dpend plus que de moi.Avoir t dsir, cest le poids porter de comment sortir de ce dsir dont je nepeux jamais tre sr dans sa nature vri-table ? parce que lincertitude va depair avec le sentiment de ce dsir. Onpourrait aller regarder du ct desannales des cours dassises. Comme vousle savez, il y a de moins en moins demeurtres dans nos socits, mais de plusen plus de meurtres qui se jouent dansles familles, avec une monte rcente tout fait curieuse des parricides, des matri-cides, choses qui taient exceptionnelles.On a eu en France des cas de parentsadorant leurs enfants et cela a fini par desmeurtres effroyables. Une situationincomprhensible, nous dit-on, puisqueces parents adoraient leur enfant. Ehbien oui, justement, cest lourd porter.

    La diffrence entre lenfant du dsir et lenfant des socits traditionnelles

    Le point essentiel ici est que le dsir den-fant nest pas un invariant anthropolo-gique qui traverserait les sicles et lescivilisations. Pour la plupart des culturesavant la ntre, lenfantement relve de laparticipation un processus vital et collec-tif qui assure tout simplement la perptua-tion de la socit. Plus on a affaire des

    01 Lacanienne 8 8/11/10 15:33 Page 27

    Doc

    umen

    t tl

    cha

    rg

    depu

    is ww

    w.ca

    irn.in

    fo -

    - -

    201

    .52.

    240.

    55 -

    28/0

    3/20

    15 0

    4h27

    . E

    RES

    Docum

    ent tlcharg depuis www.cairn.info - - - 201.52.240.55 - 28/03/2015 04h27. ERES

  • La Revue Lacanienne n 8

    28

    Le dossier La famille, fin dun drame psychique ?

    socits traditionnelles, plus la venue delenfant est comprise dans ses liens aveclancestralit. Cest tout le sens dinnom-brables varits de croyances autour de ceque reprsente le nouveau venu par rap-port ceux qui taient dj l avant. Il y abeaucoup de socits traditionnelles quipensent tout simplement un remplace-ment place pour place. Le nouveau venuest lanctre que lon connaissait dj trsbien. Il faut raisonner chaque fois dedeux points de vue diffrents, le point devue des parents, le point de vue desenfants. Du point de vue des parents,lacte de procration est un acte dintgra-tion dans la socit et de soumission laloi. Dailleurs, dans beaucoup de socitsdites traditionnelles, on est vraiment unadulte, on est vraiment quelquun qui a ledroit de parler partir du moment o onest pre ou mre. Cest la venue de len-fant qui signe la maturit, le nombre den-fants ayant une grande importance danslattribution dun statut prestigieux. Cenest pas une alination au dsir, cest unesoumission la loi. Du point de vue delenfant, cette conception se traduit parune sorte dindpendance native de len-fant lgard de ses parents, qui est aussiquelque chose de psychiquement trsimportant. Certes, je suis lenfant de mesparents, mais mes parents eux-mmes nesont quun maillon, je suis fondamentale-ment le descendant de mes anctres. Lelien la prcdence de la ligne est uneressource dindpendance prcoce pourles enfants des socits traditionnelles. Ilssont responsabiliss par le statut qui leurest attribu. Ils sentendent dire : tu es lereprsentant, la rincarnation il y atoutes sortes de variantes de tel ou telanctre, il faut que tu sois digne de tes

    anctres, tes parents singuliers sont lesreprsentants dune ncessit qui lesdpasse et dans laquelle tu es toi-mmepris. Ils sont dots trs tt dune sorte de conscience sociale , si lon peut sexpri-mer ainsi.

    La nature exacte des nouvelles pathologies lies cette mutation anthropologique

    Au fond, les pathologies classiques, lespathologies nvrotiques ou psychotiques,taient troitement lies au rle institu-tionnel de la famille qui en faisait unefamille rpressive dans le cadre de la fabri-cation autoritaire dtres-pour-la-socit.La famille prenait en charge lescontraintes de la vie sociale son chelleet faonnait les enfants en fonction de cesexigences. Ce que les parents ressentaientcomme leur devoir jusqu une date tout fait rcente, ctait de faire des enfantspour la socit, avec les effets psychiquesquavait ce comportement autoritaire plusou moins bien administr. Tout le mondene savait pas trs bien sy prendre et il yavait pas mal de dgts.Nous sommes dans une situation compl-tement transforme. Le gradient du chan-gement varie selon les lieux, maislvolution est trs claire. La famille estdevenue un refuge contre la socit et, enparticulier vis--vis des enfants, une ins-tance de protection contre les contraintesde la vie sociale en gnral. La socit estvue comme un monde dangereux, lapdophilie tant le symbole de ce prilextrieur attach au monde des adultes,pril labri duquel il faut mettre lesenfants. La famille repose sur unensemble de valeurs prives, individuelles,

    01 Lacanienne 8 8/11/10 15:33 Page 28

    Doc

    umen

    t tl

    cha

    rg

    depu

    is ww

    w.ca

    irn.in

    fo -

    - -

    201

    .52.

    240.

    55 -

    28/0

    3/20

    15 0

    4h27

    . E

    RES

    Docum

    ent tlcharg depuis www.cairn.info - - - 201.52.240.55 - 28/03/2015 04h27. ERES

  • La Revue Lacanienne

    29

    Mutation dans la famille et ses incidences

    fondes sur la reconnaissance des singu-larits, qui la distinguent totalement dunevie sociale laquelle, par dfinition, est ledomaine de limpersonnalit, surtout dansune socit dmocratique. Celle-cirequiert le mme traitement pour tous,elle implique donc lanonymat de principedes relations et des rgles.Il y a antinomie entre le fonctionnementdes valeurs dans le cadre familial et dansle cadre social. Le grand problme se jouel. Comment des enfants peuvent-ilsapprendre dans ces conditions les rglesde la vie sociale? Cest probablement lacl des problmes et des pathologies : lepassage limpersonnel fait difficult. Onpeut dtailler les cas, les manires dontcela se passe, mais on tient l le cur dece qui fait de larticulation famille-socitun foyer pathogne. Il y a dautre part, un niveau plus profond, tout ce qui relvedes accidents du processus dindividua-tion. La famille est l pour tre dpasse,sa nature est dtre une institution laquelle on doit chapper : le meurtre dupre a servi pendant trs longtemps desymbole cette mancipation ncessaire.Vous remarquerez que lon ne parle plusde cela. Ces murs sanguinaires ne sontplus de saison. La famille nen reste pasmoins quelque chose dont on doit sortir.Mais comment peut-on sortir de cettenouvelle famille ? Elle nest pas faite pourquon y chappe.Un exemple : pourquoi la phobie sco-laire ? Pour la comprendre, il ne suffitpas de scruter les motivations des enfantsou des adolescents, il faut se poser laquestion de leurs parents. Elle est fonc-tion de limage que les parents ont delinstitution scolaire, comme une insti-tution o leurs enfants ne seront pas

    reconnus, une institution qui, par nature,ne peut pas comprendre ce quils sontsingulirement. Dans ces conditions, eneffet, pourquoi y aller ? Cela dit, sanstre, en tout cas, un fervent partisan duretour la tradition et la restauration delautorit dans la plnitude de ses attribu-tions classiques et tout en tant pourlmancipation des femmes, la matrisede la procration et pour le fait que lonsoccupe bien des enfants, cela nem-pche pas de mesurer les problmes quefont natre les progrs mmes des prin-cipes auxquels on adhre. De ce point devue, on peut dplorer lobscurantismequi rgne aujourdhui. Il est terrible deraisonner en disant que puisque noussommes pour ces principes, nous devonsnous interdire dexaminer les cons-quences. En effet, puisque nous sommespour les causes, les effets ne peuvent trequexcellents ! Cette attitude dfinit le no-obscurantisme contemporain.Le combat des Lumires aujourdhui sedoit de consister analyser sans fard lesdgts causs par ce qui est ni plus nimoins une exprimentation sur lhumain grande chelle. Nous mettons en uvredes principes nouveaux, des modes derelations entre les tres absolumentindits. Comment cela pourrait-il allersans problme? Il faut regarder ceux-ci ettcher de les comprendre pour y rem-dier. Sur le terrain de lducation, nousarrivons une situation de contentieuxentre les familles et linstitution qui estune impasse. Il ne sert rien de faire dela dmagogie pro-familiale et il ne sert rien non plus de dire aux familles : la loide linstitution est celle-l, vous passezsous la table et puis cest tout. Nousavons besoin dy voir clair, dans cette

    01 Lacanienne 8 8/11/10 15:33 Page 29

    Doc

    umen

    t tl

    cha

    rg

    depu

    is ww

    w.ca

    irn.in

    fo -

    - -

    201

    .52.

    240.

    55 -

    28/0

    3/20

    15 0

    4h27

    . E

    RES

    Docum

    ent tlcharg depuis www.cairn.info - - - 201.52.240.55 - 28/03/2015 04h27. ERES

  • La Revue Lacanienne n 8

    30

    Le dossier La famille, fin dun drame psychique ?

    relation. Lclairer a un enjeu dautantplus grand que cette articulation famille-socit est aujourdhui le foyer majeur dereproduction et damplification desingalits qui senracinent dans linga-lit de traitement des enfants dans lesfamilles. Pour que les choses voluent,cela suppose de regarder ce qui se passesans aucun esprit de censure.

    La famille monoparentale et le foyer de trouble susceptible dtre engendr

    Juste une observation, pour commencer,sur cette notion de famille monoparen-tale. On a beaucoup dit et ce nest pasfaux, que cest un euphmisme destin camoufler ce qui drange. Procd trshabituel dans notre socit. Cela admis,la notion a nanmoins une significationtrs profonde. Si la notion est passedans le langage courant, cest quelle ditquelque chose dimportant. La famillemonoparentale, dans 95 % des cas, estune femme seule avec un enfant ou desenfants. Il y a quelques pres en situa-tion de famille monoparentale mais pasbeaucoup. Cette situation dit quelquechose : la famille, rduite son noyauprimordial aujourdhui, est la relationdune mre et dun enfant. Quand on acela, on a tous les rles possibles quidfinissent une situation de parentalit.Il est implicitement reconnu dans notresocit quune femme est en mesuredendosser tous les rles. Ici le constat valoin. De ce point de vue, la famillemonoparentale dit la vrit de la famille parentale . Cela veut dire que cest partir de la famille monoparentale quonatteint la vrit des rles familiaux

    actuels o ledit pre est un adjuvant pasdu tout ncessaire et o, de faon gn-rale, la position maternelle est la condi-tion daccs la fonction paternelle. Celaveut dire aussi que ce nest pas du ctde labsence de pre quil faut situer lasource des problmes.Il ny a videmment pas un facteurunique, au contraire, de nombreusesdterminations interviennent dont sou-vent la dtresse sociale, qui narrangerien. lintrieur de cette multitude defacteurs, le vrai foyer de trouble dans lasituation des familles monoparentalestient au fait que lenfant souvent unenfant unique, pas toujours, mais il y aune prvalence de lenfant unique dansles familles monoparentales qui est assezsignificative se trouve dans une placecompltement brouille : la famille mono-parentale est la famille o les enfantssont le plus individualiss dans le sensfort de cette notion. Ils sont lalter ego deleur mre, donc un autre individu prco-cement individualis. Avec en plus uneconfusion des rles. Lenfant, dans cettesituation, est le partenaire. Cest unesituation dure porter pour un enfant,notamment du point de vue de ce qui at point au titre des rquisitions duprocessus dindividuation. Ce sont cesenfants qui ont la plus grande difficult cet gard de par le rle indispensablequils jouent auprs de leur mre. Il estdifficile de devenir un individu par-devers soi quand on est dj un individudans et par sa famille. Cest de ce ctquil faut chercher.

    01 Lacanienne 8 8/11/10 15:33 Page 30

    Doc

    umen

    t tl

    cha

    rg

    depu

    is ww

    w.ca

    irn.in

    fo -

    - -

    201

    .52.

    240.

    55 -

    28/0

    3/20

    15 0

    4h27

    . E

    RES

    Docum

    ent tlcharg depuis www.cairn.info - - - 201.52.240.55 - 28/03/2015 04h27. ERES

  • La Revue Lacanienne

    31

    Mutation dans la famille et ses incidences

    Le caractre exclusivement fminin du dsir denfant

    Nous sommes ici dans la zone obscurepar excellence. On voit certes encore fonc-tionner une figure tout fait tradition-nelle du dsir denfant chez les hommes :la figure machiste patriarcale. Le dsirdenfant, dans son cadre, cest le dsir desoumettre une femme en lui faisant unenfant. La procration, cest la domina-tion. Cette figure traditionnelle est tom-be assez en dshrence, mais comme toutcontinue dexister trs longtemps, on entrouve encore quelques spcimens. Engnral, aujourdhui, dans le cadre de lanouvelle philosophie de lexistence, ilsrenouvellent lexprience plusieursreprises dans leur vie. Cela fait desuperbes familles recomposes, avec labase de multiples mariages et des enfantsmlangs dans tous les sens, qui font lajoie des psychologues. Dans le cas de lho-moparentalit, nous avons affaire unphnomne tout fait diffrent. On voitbien le sens de la revendication : Noussommes capables de faire une famillecomme les autres. Il sagit dune reven-dication sociale, dont il ne faut dailleurspas exagrer les proportions, elle est rela-tivement minoritaire et rpartie trs diff-remment selon les sexes. En pratique,lhomoparentalit concerne essentielle-ment des couples lesbiens. Reste que cestune revendication symbolique trs forte,une revendication dgalit, o le dsirdenfant est le moyen daccomplir jus-quau bout la demande de similitudesociale : une famille avec enfants commetout le monde.Pour le commun des hommes, la ques-tion se pose encore autrement. Ce serait

    un sujet denqute extrmement impor-tant et lon peut tre tonn du peu din-trt qua soulev jusqu prsent leproblme. La question pose privment un certain nombre de psychanalystes asurpris alors quelle est dune grandeimportance. Les professionnels les plussensibles sont ceux qui soccupent deconjugalit, celle en particulier desjeunes couples. La cause de la dissolutiondun trs grand nombre de jeunescouples nest autre que le dsir denfantde la femme qui provoque la fuite delhomme. Mais, au-del des conflits, laquestion fondamentale est de savoir quelest le sens de lenfant pour un hommeaujourdhui ? Le sentiment est quil sersume, dans la plupart des cas, au dsirde faire plaisir la femme aime, motiffort honorable, dailleurs ! Mais pour soi-mme, quest-ce que cela veut dire ? Dupoint de vue de lidentit masculine,aussi bien sociale que psychique, ce dsirne semble plus constitutif. On peutobserver des pres qui sinvestissentbeaucoup plus quavant, ds le plusjeune ge, dans lducation de leurenfant. Mais, comme on le sait bien, cesont des comportements minoritaires,dsesprment minoritaires, en dpit desfortes incitations en ce sens-l. Quant lamotivation fondamentale qui inspire leshommes, elle parat tre avant tout derussir leur couple. Ce nest pas le rap-port lenfant comme tel qui les motive,cest lidal du lien dgalit quils cher-chent tablir avec leur femme. Est-cequils sont mus par un investissementlibidinal spcifique pour les enfants ? Cenest quune hypothse et Dieu sait quesur ce terrain, il faut avancer avec pru-dence. Quant au comportement maternel

    01 Lacanienne 8 8/11/10 15:33 Page 31

    Doc

    umen

    t tl

    cha

    rg

    depu

    is ww

    w.ca

    irn.in

    fo -

    - -

    201

    .52.

    240.

    55 -

    28/0

    3/20

    15 0

    4h27

    . E

    RES

    Docum

    ent tlcharg depuis www.cairn.info - - - 201.52.240.55 - 28/03/2015 04h27. ERES

  • La Revue Lacanienne n 8

    32

    Le dossier La famille, fin dun drame psychique ?

    des pres vis--vis de leurs enfants, onpourrait avancer que le comportementlgitime lgard des enfants, peuimporte quil soit le fait dun homme oudune femme, est le comportementmaternel. La chose qui frappe le plus,dans cette ligne, est que lautorit ne peuttre valablement porte que par unefigure maternelle. Cest une vraie rvolution.

    Bibliographie

    GAUCHET, M. 2002. Essai de psychologiecontemporaine , dans La dmocratie contreelle-mme, Paris, Gallimard, coll. Tel .GAUCHET, M. 2004. La redfinition desges de la vie , Le dbat, 132, Paris, Galli-mard, novembre-dcembre.GAUCHET, M. 2004. Lenfant du dsir ,Le dbat, 132, Paris, Gallimard, novembre-dcembre.

    01 Lacanienne 8 8/11/10 15:33 Page 32

    Doc

    umen

    t tl

    cha

    rg

    depu

    is ww

    w.ca

    irn.in

    fo -

    - -

    201

    .52.

    240.

    55 -

    28/0

    3/20

    15 0

    4h27

    . E

    RES

    Docum

    ent tlcharg depuis www.cairn.info - - - 201.52.240.55 - 28/03/2015 04h27. ERES