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DOSSIER [ [ [ NRP Février 2015, n°25 NRP Octobre 2016, n°33 Culture/Médias Bienvenue à Azrou n’Thour, lieu de pèlerinage qui attire chaque année des milliers de visiteurs MODERNISATION DE LA JUSTICE Vers une réduction de 50% des déplacements des citoyens vers les structures de justice « HOMMES, FEMMES, ENFANTS : QUEL TRAVAIL ? » Mémoire Droit Psychanalyse et culture en Algérie Rachid Boujedra Arezki saïd

NRP Octobre n°33 - CDEScdesoran.org/document/NRP33.pdf · 2017. 4. 18. · Des milliers de diplômés universitaires occupent la rue, Farid Harbi, p.9-10 Femme au travail: des acquis

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DossierDOSSIER

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NRP Février 2015, n°25NRP Octobre 2016, n°33

Culture/Médias

Bienvenue à Azrou n’Thour, lieu de pèlerinage qui attire chaqueannée des milliers de visiteurs

MODERNISATION DE LA JUSTICE

Vers une réduction de 50% des déplacements des citoyensvers les structures de justice

« HOMMES, FEMMES, ENFANTS :

QUEL TRAVAIL ? »

Mémoire

Droit

Psychanalyse et culture en Algérie

Rachid Boujedra

Arezki saïd

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Sommaire

La NRP est la nouvelle formule de la « Revue de presse », créée en 1956 par le centre des Glycines d’Alger.

[Attestation du ministère de l’information: A1 23, 7 février 1977]

Revue bimensuelle réalisée en collaboration avec le :

Ont collaboré à ce numéroRyad CHIKHI, Bernard JANICOT, Leila TENNCI, Ghalem DOUAR, Omar AOUAB, Mokhtar MEFTAH

Halima SOUSSI, Sid Ahmed ABED, Amine BAGHDADI, Laid Nasro OUENZAR, Sofiane BELKACEM

CENTRE DE DOCUMENTATION ECONOMIQUE ET SOCIALE

3, rue Kadiri Sid Ahmed, Oran • Tel: +213 41 40 85 83 •Site web: www.cdesoran.org / Facebook : Cdes Oran

LES DISPOSITIONS DU NOUVEAU CODE DE TRAVAIL DÉBAT-TUES À ORAN Inquiétudes sur le travail des enfants mineurs,D.Loukil, p.10

Droit

MODERNISATION DE LA JUSTICE Vers une réduction de 50%des déplacements des citoyens vers les structures dejustice, p.12

Le bracelet électronique bientôt substitué à la détentionprovisoire en Algérie ?,p.13

Culture/Médias

Psychanalyse et culture en Algérie, Rachid Boujedra, p.14

LE COUP DE BILL’ART DU SOIR «Gitano», Kader Bakou, p.14

Mémoire

Massinissa, souverain numide, Issam.B, p.15

Algérie : bienvenue à Azrou n’Thour, lieu de pèlerinage quiattire chaque année des milliers de visiteurs,Arezki saïd,p.15-16

Bibliographie,p.17

Dossier

« HOMMES, FEMMES, ENFANTS :QUEL TRAVAIL ? »

Les causes structurelles du chômage et les remèdes,SamiraImadalou , p.4

L’Algérie compte 10,6 millions de travailleurs et 1,4 million dechômeurs, p.5

Le désinvestissement plombe l’emploi,Safia Berkok, p.6-7

Taux de chômage en Algérie : 11,2% en 2015, les femmes plustouchées (16%) que les hommes (9,9%) selon l’OIT qui citel’ONS. ,p.7«Il y a précarisation de l’emploi ces dix dernières années»MoundirLassassi. Maître De Recherche – CREAD , SamiraImadalou, p.8

Des milliers de diplômés universitaires occupent la rue,Farid Harbi,p.9-10

Femme au travail: des acquis à préserver et poursuite de la luttepour la parité, p.10

Élimination du travail des enfants en Algérie :« Des avancéessignificatives » selon un rapport américain, p.11

[email protected]

N° 33, Octobre 2016

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NRP, Octobre 2016, n°33

La NRP Présente tous ses voeux debonheur a Sidahmed et à son épouse à

l’occasion de leur mariage

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Editorial

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NRP, Octobre 2016, n°33

Ghalem Douar

La question du chômage ne cesse d’apparaitre dans le fil d’actualité, aussitôt qu’un compte-rendu

politique ou économique est rendu public. Présent dans un panaché d’articles dont nous avonsmis une partie en exergue, le concept du taux de chômage est un indicateur socioéconomique àl’instar d’autres indicateurs (qualité de l’emploi, pauvreté, qualité de la vie, capital social...). A euxtous, ils forment un « tableau de bord social » ; s’agissant d’un éventail de données quantifiées,

dont l’ambition est de mesurer en quelque sorte le « le bien être de la nation «. Son interprétationrévèle les symptômes des décisions prises et permet ainsi un éventuel remaniement des choixpolitiques.

À l’heure des restrictions budgétaires, sommée par la situation financière défavorable, l’Algérieest prise «en otage» par des mouvements de contestations et de débats (politiques, économiques,

publics, …) relatifs aux mesures du gouvernement jugées «improvisées» ou parfois «incohérentes»vis-à-vis les dossiers à caractère sensible : réforme du système de retraite, rationalisation desdépenses et des effectifs du fonctionnariat, révision des subventions, gèle de projets publics…

Nul besoin d’être expert en économie pour conclure que, sans l’implication des autorités, les joursqui viennent vont s’annoncer pénibles pour les plus démunis, en l’occurrence ceux qui sont sans

emploi, ou ceux qui vont l’être plus tard.

D’un autre côté, d’un ton «bien assuré», le message du gouvernementsoutient que la crise pourra

se révéler une opportunité pouraccélérer notre sursaut collectif, pour rompre avec le confort de larente et réhabiliter également la valeur du travail.

Compte tenu de ces évolutions, l’Etat est appelée à instaurer un dialogue politique, social etéconomique entre les véritables forces, afin d’assurer le passage de l’Etat de « soutien contre larente à l’Etat de droit basé sur le travail et l’intelligence ».

Pour conclure, une pensée d’Albert Camus « La vraie générosité envers l’avenir consiste à tout

donner au présent »

« HOMMES, FEMMES, ENFANTS :

QUEL TRAVAIL ? »

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NRP, Octobre 2016, n°33

DOSSIER

Les causes structurelles du chômage et les remèdes

On peut qualifier le chômage de malendémique le plus important denotre société. Aucun problème necause autant de dégâts aux famillesalgériennes que l’absence d’unemploi, pour la vaste majorité descitoyens. Les fléaux du chômagesont connus : mal-vivre, violences,drogues, pertes de production etgonflement des importations pour lepays, etc. […] Une analyse détailléede l’économie nationale permetd’aff irmer que tous les autresproblèmes sont reliés directementou indirectement au chômage. Lelogement, la santé, la qualité del’éducation, l’ importation, lacroissance économique etl’urbanisme sont d’une manière oud’une autre, en partie, des dégâtscollatéraux du chômage. Lestransferts sociaux représentent unelourde charge pour le budgetnational. On peut les réduireconsidérablement lorsque l’on serapproche du plein-emploi. Leschiffres officiels donnent un tauxd’un peu plus de 10% et de plus de24% pour les jeunes. On ne peut pasapprofondir la question desstatistiques dans ce contexte. Ellenécessite de longs développements.De surcroît la plupart des emploissont précaires (chantiers, CDD).L’avenir demeure incertain dans cedomaine d’autant plus que le taux departicipation est faible et que de plusen plus de femmes vont convoiterdes postes d’emploi. Les facteursresponsables, par ordre de PrioritéGlobalement, il y a trois causesprincipales liées à la problématiquedu chômage. On peut imaginerplusieurs autres facteurs, mais demoindre importance. Nouschoisissons ici les raisonsfondamentales, celles quiexpliquent plus de 80% des cas. Lapremière et la plus importanteconcerne la taille du secteurproductif.L’Algérie possède un tissude PME/PMI de 700 000 unités. Nousavons environ 500 grandesentreprises. Un pays comme le nôtredevrait disposer d’au moins 1 500000 PME/PMI et 5000 grandesentreprises pour pouvoir pesereff icacement sur le marché del’emploi. L’absence d’entreprises ennombre et en qualité induit desimportations massives, une saignéede devises et un chômage importantpour nos citoyens. On produit peu eton importe beaucoup. […]L’investissement productif demeureinsuff isant, mal canalisé et peuperformant pour de nombreuses

raisons. La plus importante demeurel’erreur d’avoir privilégié lesinfrastructures au détriment del’économie productive. Il ne fallaitpas faire des plans toutinfrastructures et négliger la matièregrise, la science et l’économieproductive. Le second facteurconcerne l’adéquation formation/emploi. L’appareil de formation asubi de nombreuses transformationsau cours de son évolution. Il a faitl’objet de mutations internesautonomes qui ont peu de liens avecl’appareil économique et le marchédu travail. Ainsi, alors que l’on veutréindustrialiser le pays, les effectifsqui fréquentent les facultés hard(sciences) constituent moins de 15%

du total. On a gonflé certainesdisciplines des sciences humainesalors que le marché leur tourne ledos. On forme en fonction desfacultés et des professeursdisponibles au lieu de l’évolution desbesoins du marché. Le phénomènese duplique à tous les niveaux : lesmétiers techniques manuelsconnaissent des évolutionsinsuff isantes. Ce n’est querécemment que la formationprofessionnelle a entrepris desréformesprofondes en ce sens. Enattendant, on importe de la main-d’oeuvre qualifiée dans un pays oùle taux de chômage des jeunes estalarmant. Le troisième facteur estculturel. Les métiers manuels sontdésertés par nos jeunes (agriculture,maçonnerie). Dès que quelqu’unaccède à un niveau de formation delycée, il répugne les métiers manuelset ne rêve que d’emploisadministratifs. Les parents et lasociété tout entière valorisent lesemplois des cols blancs.

[…] Nous avons besoin decréer un million d’entreprisesdans les dix prochaines années.Il nous faut créer despépinières et des incubateurspar centaines. Nous auronsdonc besoin de créer desinstitutions de formation deformateurs. […] Le secondpoint aurait trait à la flexibilitédu système de formation.Comment l’adapter le plusrapidement possible en termesde formation et de recyclageaux besoins du marché ? Ladémarche de certains paysasiatiques est à méditer : lepatronat et les employeurspublics participent à

l’élaboration des programmesde formation au niveau de laformation professionnelle etde l’enseignement supérieur.Le dernier point a trait au rejetdu travail manuel.Il requiert tout un effort decommunication, unprogramme où on valorisel’effort physique par desmesures aussi bien concrètesque symboliques. Il s’agit derehausser l’image des métiersmanuels. Ceci est possible àmoyen et long termes, maisdépend de plusieurs autresactions. […] Vaincre lechômage est possible maisavec une vision, une stratégieet des politiques économiquesrénovées.

19 Janvier 2015

Samira Imadalou

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NRP, Octobre 2016, n°33

DOSSIERL’Algérie compte 10,6 millions de travailleurs

et 1,4 million de chômeursALGER - L’Algérie compte une population active de 11,932millions de personnes, répartie entre une populationoccupée de 10,6 millions de travailleurs et un nombre dechômeurs de 1,337 million d’individus, selon les chiffresde l’Office national des statistiques (ONS).Le salariat continue à constituer la forme dominante dela population occupée avec un taux de 69,8%.La catégorie des employeurs et indépendantsreprésente 28,7% de l’ensemble de la populationoccupée.Quant à la structure de l’emploi selon le secteurd’activité, elle fait ressortir que les services marchandset non marchands absorbent 61,6% de la main d’œuvretotale, suivi par le BTP (16,8%), l’industrie (13%) etl’agriculture (8,7%).En fonction du secteur juridique, l’enquête de l’ONSindique que le secteur privé emploie 58% de l’ensembledes employés, mais avec une disparité hommes-femmespuisque l’emploi féminin se concentre en particulier dansle secteur public avec 64,1% de l’emploi féminin global. Pour ce qui concerne l’affiliation à la sécurité sociale dela population occupée, elle est de 61,5% (contre 51% en2005) avec 6,515 millions de personnes affiliées et 4,08millions qui ne le sont pas.

Le taux de chômage en Algérie à plus de 11%, lesfemmes plus lésées

Le taux de chômage a atteint 11,2% en septembre 2015contre 10,6% une année auparavant, selon l’ONSIl est constaté que le taux de chômage chez les femmesest plus important que celui des hommes: 9,9% chez leshommes contre 16,6% chez les femmes.Par milieu de résidence, le taux de chômage est estiméà 11,9% en milieu urbain (10,7% chez les hommes contre15,9% chez les femmes) et de 9,7% en milieu rural (8,3%chez les hommes contre 18,8% pour les femmes).Par niveau de qualification, il est constaté que le taux dechômage des diplômés de l’enseignement supérieur àbaissé à 14,1% en septembre dernier (contre 16,4% enseptembre 2014), avec un taux de chômage de 20,5%pour les femmes et de 8,5% pour les hommes.L’enquête note aussi que la part des chômeurs quiacceptent des emplois inférieurs à leurs aptitudesprofessionnelles est de 78,7%, des emplois pénibles pour28% ou des emplois mal rémunérés pour 81%.

Répartition de la population occupée par secteurjuridique

La population occupée se compose de 10,594 millionsde personnes. Voici la répartition de la populationoccupée entre les secteurs public et privé (Source: ONS):

Hommes Femmes Total -Urbain -Public 40,1% 65,8% 45,5% -Privé-mixte 59,9% 34,2% 54,5% -Rural -Public 31,5% 57,9% 34,6% -Privé-mixte 68,5% 42,1% 65,4% -Ensemble -Public 37,1% 64,1% 42% -Privé-mixte 62,9% 35,9% 58%.

Répartition du taux de chômage selon le niveaud’instruction

Le taux de chômage s’est établi à 11,2% enseptembre 2015. Voici la répartition de ce taux selonle niveau d’instruction et le critère hommes-femmes (Source: ONS): Hommes Femmes Total -Niveau d’instruction: -Sans instruction 3,9% 1,4% 3,6% - Primaire 7,9% 5,5% 7,7% - Moyen 12,9% 17,8% 13,4% - Secondaire 8,8% 14,8% 10,1% - Supérieur 8,5% 20,5% 14,1% -Diplôme obtenu: - Aucun diplôme 9,6% 11,7% 9,8% - Diplômé de la 12,3% 16,9% 13,4% formation professionnelle - Diplômé de 8,2% 20,2% 14,1% l’enseignement supérieur -Taux de chômage: 9,9% 16,6% 11,2%

Le taux de chômage selon l’âge Voici la répartition de ce taux selon les catégoriesd’âge (Source: ONS): Hommes Femmes Total - Moins de 20 ans 38,1% 43,1% 38,8% - 20-24 ans 23,5% 45,7% 27,6% - 25-29 ans 15,9% 25,4% 18,4% - 30-34 ans 8,9% 13,2% 9,9% - 35-39 ans 5,3% 7,5% 5,8% - 40-44 ans 4,1% 7% 4,6% - 45-49 ans 3% 1,7% 2,8% - 50-54 ans 2,9% 0% 2,5% - 55-59 ans 3% 0% 2,7% Total 9,9% 16,6% 11,2%.

01 Mai 2016

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NRP, Octobre 2016, n°33

DOSSIERLe désinvestissement plombe l’emploi

Alors qu’un nouveau code desinvestissements est en voie d’êtreadopté, la politique menée en lamatière par l’Etat depuis plus d’unedécennie vient peut-être de montrerses limites. Des milliards de dinarsinjectés dans des projetsd’infrastructures, d’autres milliardsdans l’aide à l’entrepreneuriat desjeunes, d’autres encore sous formed’incitations fiscales aux entreprisesn’ont eu qu’un effet éphémère surla résorption du chômage.

Selon la Banque mondiale, les paysde la région Moyen-Orient et Afriquedu Nord ont besoin d’une ade 5% aumoins pendant plusieurs annéespour régler durablement la questiondu chômage. En Algérie, la moyennede croissance de ces 15dernières années ararement atteint les 4%.

Un modèle de croissancefondé sur la dépensepublique qui a engloutiquelque 700 milliards dedollars a certes permis deréduire de près de 50% letaux de chômage entre 2004et 2013, mais la tendance estrepartie en hausse enseptembre 2014 pour lapremière fois depuis quatreans, selon les chiffres publiésla semaine dernière parl’Office national desstatistiques (ons). (graphe1)

Plusieurs enseignementssont tirés des chiffres de l’ONS : lesemplois sont de plus en plustemporaires (près de 80% deschômeurs étaient des salariés nonpermanents), le nombre de ceux quitravaillent à leur compte(employeurs et indépendants)régresse et le secteur privé a du malà créer de l’emploi, du moins à enpréserver, puisque les trois quarts deceux qui pointent au chômageétaient employés par le secteurprivé.

Quid de l’investissement industriel ?

Certains experts et économistesavaient à plusieurs reprises appelé àrelativiser les chiffres en baisse duchômage ces dernières années,pointant du doigt la nature desprojets qui sont à l’origine de cettetendance. L’investissement massifdans le BTP a le mérite d’absorberde l’emploi, mais le désavantaged’alimenter le chômage, une fois lesgrands projets de l’Etat achevés.«Actuellement, on investit très mal,on gaspille beaucoup d’argent pour

un résultat insignif iant», déploreArezki Issiakhem, patron du groupeIsserDelice.

Selon le bilan de l’Agence nationalede développement del’investissement (ANDI), plus d’unquart des emplois créés par lesprojets d’investissement déclarésentre 2002 et 2013 sont dans lesecteur du BTPH. L’ONS confirmeque 22% des chômeurs enregistrésviennent de ce secteur. Mais lesservices et notamment lestransports, un secteur très prisé parles jeunes souscrivant à l’Ansejfournissent trois fois plus. (graphe 2)

«L’Etat a investi dans le bâtiment,mais peu dans l’industrie. Aucontraire, il a fermé les usines»,

déplore Amar Moussaoui,responsable d’une entreprise demaroquinerie à Chéraga. Pour AmarTakjout, porte-parole de laFédération des industriesmanufacturières, textile et cuir, cequi a manqué à l’économie nationaleces dernières années, «c’est lamobilisation de notre potentielindustriel». «Beaucoupd’entreprises ont fermé depuis 20ans, le potentiel existant ne peutrépondre à plus de 20% des besoinsnationaux, nous avons besoin de 2mill ions de PME…» Les grandsprojets d’infrastructures «sontporteurs d’emplois, mais ne sont paspermanents», souligne-t-il.

Sur les 14 dernières années,l’industrie n’a représenté que 12% desprojets déclarés à l’ANDI, trois foismoins que le transport par exemple.Cela reste pourtant le secteur le pluscréateur d’emplois (31,8% desemplois créés entre 2002 et 2013),mais aussi le plus coûteuxfinancièrement puisqu’il représente

la moitié des montantsd’investissements déclarés.Mais les investissements sontaujourd’hui surtout le fait dusecteur privé (98% des projetsdéclarés et 85% des emploiscréés), or investir et créer del’emploi semble de plus enplus laborieux.

Impact sur l’emploi

Arezki Issiakhem, qui dit avoir«près de 1050 employés sousle chapeau» estime que les loiset les mesures qui sontappliquées actuellement«n’incitent pas à la créationd’emplois». «J’ai des projetsde création d’entreprises quidatent de 8 ans et demi et il y a

b e a u c o u pd’entreprises dansmon cas».

«J’ai déposé desprojets pour lacréation de 3 hôtels 3étoiles, franchisés.Cela fait 3 ans et je n’aitoujours pas deréponse».

Diff icultés face auxbanques, aux impôts,aux Douanes,prédominance del’informel, manquede main-d’œuvrequalifiée sont autantd’obstacles cités parAmar Moussaoui pour

expliquer les difficultésd’investir. Dans ce cas, voir letaux de chômage repartir enhausse est un peu logique. «Jen’ai pas le courage d’investirsans trouver de la main-d’œuvre. Il faudrait aussi queles formations qui sontprodiguées aux jeunes soientorientées vers les besoins desentreprises et de l’industrie. Ilfaut changer de politique pourles jeunes pour qu’ils sortentde l’assistanat».

Limites

Pour ce chef d’entreprise,comme pour beaucoupd’économistes, les politiquesvisant à encouragerl’entrepreneuriat à travers desdispositifs de type Ansej etCnac ont été dévoyés. Cesdernières années elles ontsurtout consisté en uneredistribution de la rente pourgarder la paix sociale, même

Safia Berkok

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NRP, Octobre 2016, n°33

DOSSIER

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Taux de chômage en Algérie : 11,2% en 2015, les femmes plus tou-chées (16%) que les hommes (9,9%) selon l’OIT qui cite l’ONS

Le Bureau de l’Organisationinternationale du travail (OIT) pourles pays du Maghreb a lancé unprojet pour développer etpromouvoir l’entrepreneuriatféminin en Algérie, qui reste toujoursfaible par rapport à la moyennemondiale. Ce projet, baptisé«Women for growth» (Femmes pourla croissance), a pour principalobjectif d’augmenter le nombred’entreprises et de micro-entreprises dirigées par des femmes,lequel ne dépasse pas 12% du totaldes entreprises créées dans la régiondu Maghreb, a expliqué José ManuelMedina, Conseiller technique de ceprojet lors d’un atelier surl’entrepreneuriat féminin.

D’une durée de 12 mois, ceprogramme prévoit d’appuyer et desuivre quelque 1.200 femmes dansla gestion de leurs entreprises àtravers le renforcement descapacités des prestataires deservices qui accompagnent lesporteurs de projets et les micro-entreprises, a précisé M. Medina.

Des institutions publiques commel’Agence nationale de soutien àl’emploi des jeunes (Ansej), l’Agencenationale de gestion du microcrédit(Angem), la Caisse nationaled’assurance chômage (Cnac), laDirection générale de la petite etmoyenne entreprise (DGPME) et leschambres d’artisanat bénéficierontde ce projet.D’autres institutionsprivées et associations telles que laConfédération générale des

entrepreneurs algériens (CGEA),l’Association des femmes enéconomie verte (Afev) etl’Association nationale: femmes etdéveloppement rural (ANFEDR)seront également touchées par ceprogramme f inancé par leDépartement d’Etat américain.D’ailleurs, un comité consultatif,composé de ces instituions, a été misen place dans le but d’initier uneréflexion et d’adopter la meilleureapproche pour le développement del’entrepreneuriat féminin en Algérie.

Parmi les actions envisagées par leprogramme «Women for growth»f igure aussi l’outil «Famos» quiconstitue un guide destiné auxinstitutions publiques et privéesconcernées pour adapter etaméliorer leurs services offerts auxentreprises dirigées par des femmeset des hommes. Dans ce cadre, l’OITa lancé une formation «Famos» endirection de ces instituions afin deleur permettre de se familiariser aveccette approche et mieux répondreaux besoins des femmesentrepreneurs.

L’entrepreneuriat féminin: un outilpour générer des emplois

Pour le directeur du Bureau de l’OITpour les pays du Maghreb,Mohamed Ali Deyahi, ledéveloppement del’entrepreneuriat féminin devraitcontribuer à la création de l’emploiet de la croissance. Dans ce cadre, ilvoit dans le programme «Women for

growth» de l’OIT un outil quipermet de former des femmesentrepreneurs et d’améliorerleurs capacités de gestion des(PME) dans l’objectif des’intégrer dans la sphèreéconomique et sociale.

Selon les chiffrescommuniqués par M. Deyahi,le taux mondial de participationdes femmes à la populationactive est passé de 52,4% en1995 à 49,6% en 2015 contre79,9% et 76,1% pour les hommessur la même période decomparaison.

L’écart des taux d’emploi entreles sexes s’élevait à 25,5 pointde pourcentage au détrimentdes femmes en 2015, ajoute lemême responsable qui a relevédes inégalités entre hommes etfemmes sur les marchésmondiaux du travail en termesd’égalités de chances.

En Algérie, la situation de lafemme sur le marché du travailconf irme cette tendancemondiale, estime M. Deyahi.Ainsi, sur un taux de chômagede 11,2% en 2015, celui desfemmes dépasse les 16% contre9,9% chez les hommes, selonles chiffres de l’Office nationaldes statistiques (ONS).

si elles ont permis de créer desentreprises et des emplois (plus de800 000 dans le cas de l’Ansej, selonun de ses responsables). «Lesbanques donnent des crédits à desgens qui achètent des fourgons, quiouvrent des pizzerias, mais pas pourl’industrie», remarque AmarMoussaoui.Or, tous les jeunes nesont pas voués à devenir desentrepreneurs. Les derniers chiffresde l’ONS montrent que le salariatreste la principale forme d’emploiavec près des trois quarts despersonnes occupées. Ils révèlentsurtout un recul de l’auto-emploi(moins de 300 000). Un responsablede l’Ansej indiquait récemment surla Radio nationale que certainsjeunes, qui avaient développé desprojets dans le secteur des

transports, avaient proposé àl’agence de faire marche arrière etde restituer leur véhicule. L’agencecherchant en ce moment un moyende leur trouver des solutions.Maispour Amar Takjout, ce retour enhausse du chômage n’est que«conjoncturel». Il s’expliquenotamment par des départs enretraite qui n’ont pas été remplacéset une restructuration du secteuréconomique qui n’a pas encore étémise en place. «Il faut créer lesconditions pour permettre lacréation de nouveaux emplois et passeulement pour remplacer ceux quipartent».

L’exemple a été donné daans lesecteur des textiles, où quelquesgroupes dans la confection et le cuir

ont réussi à recruter 2000travailleurs en trois ans, enremplacement d’environ 1200départs en retraite, soit descentaines de nouveauxemplois créés. Assainirl’environnement économiqueet donner un plan de chargeaux entreprises nationales àtravers un meilleur accès auxmarchés publics serait, nousdit-on, salutaire aussi bien pourl’investissement que pourl’emploi à l’avenir.

03 Avril 2016

19 Janvier 2015

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NRP, Octobre 2016, n°33

DOSSIER

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«Il y a précarisation de l’emploi ces dix dernières années»MoundirLassassi. Maître De Recherche – CREAD

[…] Au-delà de l’augmentation oude la diminution du taux dechômage, un aspect aussi importantn’est généralement pas évoqué,c’est bien la précarité de l’emploi.

Au Cread, l’équipe démographie,économie de travail et protectionsociale travaille sur ces questions.Les analyses de la segmentation dumarché du travail montrent qu’il y aune sorte de précarisation del’emploi ces dix dernières années.Bien que les indicateurs de laprécarité de l’emploi tels que définispar le Bureau international de travail,notamment le salaire, ne sont pastous pris en considération dans lesenquêtes emploi de l’ONS, d’autresindicateurs conf irment uneprécarisation de l’emploi en Algérie:

1) L’augmentation de la part desalariat non permanent dans lapopulation occupée.En effet, la partde salariat non permanent estpassée de 23% en 2004 à plus de 35%en septembre 2014.

2) Bien que le taux d’emploi informeait diminué ces cinq dernièresannées (37,3% en 2013 contre 44,6%en 2009), le rythme de croissance del’emploi informel reste néanmoinsélevé et ce sont les jeunes et lesfemmes qui sont le plus affectés.

3) Le sous-emploi qui reflète la sous-utilisation de la capacité productivede la force de travail est relativementimportant en Algérie. Selonl’enquête emploi de 2013, le taux dusous-emploi est de 20,4% (18,9% en2010), soit une personne occupéesur cinq déclare effectuer unnombre d’heures de travailinsuffisant par rapport au nombred’heures souhaitées.

4) Environ 25% des personnesoccupées expriment leur désir dechanger d’emploi.La première raisoninvoquée est l’instabilité de l’emploioccupé (57%). Pour plus de 27% desoccupés, ils estiment qu’ils sont malrémunérés, c’est la deuxième raisoninvoquée par les personnesoccupées voulant changer de travail.

5) En analysant les trajectoiresprofessionnelles, il ressort que latendance en Algérie est dans lastabilité dans l’emploi.Ainsi, une partnon négligeable des occupéscommencent leur vie active dans desemplois moins qualifiés et terminentleur vie active dans le même travail

non qualif ié. Autrement dit,contrairement aux pays développés,en Algérie, il y a une faible transitiond’un emploi moins qualifié vers unemploi qualifié. Il y a stabilité dansune position instable.

La question qui se pose est : quecherche-t-on ? Une diminution coûteque coûte du chômage sans sesoucier de la qualité de l’emploi, oubien la diminution du chômage et dela protection de l’emploi ? La réponsesemble évidente, pourtant raressont ceux qui mettent côte à côteces deux aspects : chômage etqualité de l’emploi.

Un autre résultat important est lesstratégies utilisées par les chômeursà la recherche d’un emploi. Lesrésultats de l’enquête emploimontrent que les chômeurs utilisentplus fréquemment les réseaux derelation (82,2%), que ce soit pour leshommes (83,1%) ou les femmes (80%)dans la recherche d’un emploi audétriment du recours aux agencespubliques d’intermédiation (ANEM).

[…] Le chômage toucheparticulièrement les jeunes et lesfemmes, notamment cellesinstruites. Le taux de chômageféminin a atteint 21,8%, ce qui signifiequ’une fille sur cinq se retrouve auchômage après la sortie del’université.

[…] Les résultats des enquêtes detype sondage comme l’enquêteemploi doivent être recadrés par lesdonnées des fichiers administratifs,tels que les fichiers de la CNAS et dela Casnos. L’accès aux f ichiersadministratifs par les services del’ONS ne devrait pas poser deproblème. Les fichiers administratifsen Algérie sont très peu exploités.En particulier les données les plusf iables sur la création d’emploisdevraient provenir de la nouvellecaisse de recouvrement descotisations sociales.

- Avec l’annonce de coupesbudgétaires et le gel desrecrutements dans la Fonctionpublique, comment se présente lasituation en 2015 ?

Il faut remarquer d’abord, que lepoids relatif de l’emploi dansl’administration publique estrelativement élevé en Algérie. Lanormalité voudrait que ce soit lesecteur économique qui porte lacroissance de l’emploi et non lesecteur non marchand. […] Les

analyses de type choixoccupationnels montrent quele seul segment où les femmesont plus de chances des’intégrer comparativementaux hommes est le secteurpublic. Cela signifie qu’aveccette mesure, les femmes,notamment celles instruites,vont trouver plus de difficultéspour l’insertion sur le marchédu travail.

[…] Plusieurs étudesempiriques, notamment dansles pays de la région Afrique duNord / Moyen-Orient, montrentque le seul secteur où les écartsde salaires sont faibles entre leshommes et les femmes est lesecteur public, ce dernierprotège plus les femmes de ladiscrimination salariale.

[…] - Les actions menéesjusque-là pour la créationd’entreprises et la promotionde l’investissement n’ont pascontribué à améliorer lasituation. Pourquoi ?

Le critère le plus important dansla conception des politiquesd’emploi en Algérie est leniveau d’instruction. Ce seulcritère n’est visiblement passuff isant pour un meilleurciblage de la populationvulnérable. Les analyses dumarché du travail montrent parexemple que les personnes quivivent dans les régions ruralestrouvent plus de difficultéspour l’insertion sur le marchédu travail. Ce critère n’est paspris en compte en Algérie.

[…] Les dispositifs de lacréation d’entreprises sontconçus spécifiquement pouraider les jeunes promoteursdans la première étape dans leprocessus del’entrepreneuriat. Certes, c’estune étape importante, maisl’étape de développement estd’autant plus vitale que lapremière, une étape qui estmal engagée sur le terrain.L’accompagnement desentreprises dans l’étape decroissance fait défaut enAlgérie.

Samira Imadalou

19 Janvier 2015

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DOSSIER

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Des milliers de diplômés universitaires occupent la rue

[…] Des jeunes diplômés sansemplois restent méfiants quant à lavéracité de ces chiffres et pointentdu doigt les responsables politiquesqui « ne font pas assez pour leurgarantir un avenir meilleur ».Mohamed, Hassiba et Younes, sontdes exemples vivants d’unecatégorie de jeunes au quelle la vierefuse toujours de sourire. […] Cedevait être un grand jour. Diplômeen poche, Mohamed nea met pasbeaucoup de temps pour tourner latête vers le travail et commença alorsà déposer son Cv un peu partout :entreprises, centres de santé,administrations, écoles.. Au bout dedeux mois, il a quasiment sillonné lamajorité des entreprises basées àBoumerdès, sa wilaya de résidence,mais sans parvenir à décrocher lemoindre contrat. Quel est leproblème alors ? Commençait t-il à sedemander. Suite aux multiplesrésultats négatifs dont il faisait objetaprès chaque demande d’emploi, lejeune homme commençait à avoirquelques explications etdécidément un seul moyen pourrale satisfaire : le piston. «Quand tu esfraîchement diplômé en Algérie, il nefaut pas que tu comptes sur tafameuse attestation ou ton savoir-faire pour trouver du boulot», dit-ilironiquement. On te trouve mille etune raisons pour ne pas te recruter;des explications comme : «tu n’aspas fait ton service militaire, tuhabites très loin, ton profil ne nousconvient pas etc». «Mais en réalitéc’est pas ça le problème car si je meprésente au nom d’une personne quiconnait le boss ou qui possède uncertain pouvoir, je serais sans doutenommé au poste dès le premier jour

sans subir aucun entretien». […]Impossible pour moi de travailler à 15000 DA/mois, je ne suis pas unmendiant Plusieurs diplômés del’Enseignement supérieur tombentdans les mains de quelquesemployeurs opportunistes leur seulbut étant de les exploiter aumaximum au plus bas coût. […]Hassiba s’est lancée dans son péripleà la recherche d’e l’emploi et c’étaitune aventure pleine de «mauvaises»surprises. «Je croyais que les chosesallaient fonctionner le plusnormalement du monde pour moi,renchérit-elle, mais c’étaitexactement le contraire qui m’étaitarrivée.

[…] «De nos jours, les hommes sontmoins présents dans les différentsdomaines de travail, ils n’ontdésormais de place que dans leschantiers et les lieux de travauxforcés. La recrudescence du sexeféminin dans le marché du travail

revient à plusieurs causes. Atitre d’exemple, la plupartd’entres-elles ne refusentjamais les conditions –désagréables- qu’imposent lesresponsables. Il y en plusieursqui acceptent de bosser contreune paie miteuse, pour vuqu’elles ne restent pas chez-elles à la maison. Il ne faut pasnégliger aussi le fait que lafemme compte se marier àl’avenir et avoir un époux quisubviendra à ses besoins doncautomatiquement elle ne vapas réfléchir beaucoup trop surle salaire. Toute proposition valui faire les yeux doux».Journaliste qu’il est depuis 6ans, Younes est actuellementen chômage. Il a déclinéplusieurs offres à cause dusalaire qu’il juge à chaque fois «indécent » pour un journaliste.L’oisiveté et le vide ont renduYounes une personneextrêmement marginale etpensive. Il s’inquiète de sasituation actuelle et d’un avenirtoujours incertain. « Je ne vouscache pas que la situation necesse d’empirer, avoue-t-ild’une voix triste. Quand j’aiquitté mon poste dans unechaîne privée, c’était pour direnon au directeur qui voulaitimposer une certaine dictaturesans tenir compte des valeursdéontologiques et les vraisprincipes du travailjournalistique. J’avaisdémissionné avec conviction etsi cela se reproduit mille fois, jeréagirais de la même manière».

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23 Septembre 2016

Femme au travail:des acquis à préserver et poursuite de la lutte pour la parité

ALGER - La femme travailleuse enAlgérie doit préserver ses acquis enmatière d’emploi et en mêmetemps, militer pour obtenir d’autresdroits notamment la parité avecl’homme consacrée dernièrementpar la révision constitutionnelle, asouligné SoumiaSalhi, syndicaliste ausein de l’Union générale destravailleurs algériens (UGTA).«Danscette période où le l ibéralismemenace tous nos acquissociaux, nous en sommesplutôt à la lutte pour lapréservation de nosdroits», a déclaré à l’APScette syndicaliste à la veillede la célébration de lajournée mondiale dutravail.La syndicaliste etmilitante féministe a aussiappelé «à cesser demarginaliser l’énergiecréatrice des femmes et

Mis sous une terrible pression par safamille et ses amis proches pourtrouver un travail, Younes refuse decéder et ambitionne trouver unposte qui répondrait à ses aspirationssinon, il préfère chômer.

[…] La dur réalité concernant le sujetdes «Diplômés chômeurs»constatée à travers plusieurstémoignages fait état d’un sérieuxdésespoir qui frappe cette frange.Alors que le nombre des nouveauxétudiants qui rejoignent le mondeprofessionnel connais chaque annéeune sensible augmentation, lesecteur de l’emploi peine

parallèlement à absorber cettemasse et la société se dirige en effetdroit vers une crise de main d’oeuvrequalifiée. En outre, les spécialisteset les décideurs dans le pays neproposent aucune solution concrèteà ces jeunes qui se retrouvent donccontraints de changer leur métier deprédilection. Mohamed qui aimebeaucoup la psychologie, s’est vuobligé de divorcer avec elle. Cinq ansaprès sa graduation, il travailleaujourd’hui dans un atelier defabrication de panneauxpublicitaires. Hassiba, elle, n’a pasencore trouvé ce travail au salairerespectable dont elle rêvait, elle a

choisi par conséquent decontinuer ses études poste-graduations en architecture.Quant à Younes, il n’a plusenvie de rejoindre uneentreprise médiatiquealgérienne. Il a retrouvé de laconfiance qui l’a motivé à selancer dans une carrière dejournaliste freelance.

permettre leurcontribution audéveloppement. Ilfaut renforcer oucréer desdispositifs d’appui àl’emploi féminin( g a r d e r i e sd’enfants, cantineset transportscolaire), a-t-elle

dit, estimant que «le chantierpour l’instauration de l’égalitéréelle reste ouvert».Mme Salhiestime que «nous sommesloin de la parité dans le mondedu travail», mais les femmesont réal isé la parité dansplusieurs secteurs commel’éducation, la santé oul’administration publique avectoutefois «une majoritéféminine dans l’encadrementqualif ié seulement».«Lespharmaciennes, les femmesmédecins et les enseignantessont plus nombreuses queleurs collègues masculins. Ily’a 40% de femmes juges maisl’accès à la responsabilité etaux postes de décision

demeure très limité», a-t-elledéploré. Elle a égalementdéploré la situation destravailleurs dans le secteurprivé où «les trois quarts destravailleurs, ne sont pasdéclarés et les contratspermanents (CDI) sontrares». «Comment fairerespecter le droit à la sécuritésociale, à la retraite, au congéde maternité quand on nedispose pas d’un contrat de

travail», s’est interrogée lasyndicaliste, se félicitant desdroits obtenus par la femmesurtout en matière de luttecontre l’harcèlement. «Nosluttes contre le harcèlementsexuel ont permis des acquislégaux précieux que ce soitl’article 341bis du code pénal de2004 qui le criminalise ou bienles amendements de 2015 surles violences faites auxfemmes», a-t-elle rappelé.

30 Avril 2016

Farid Harbi

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DOSSIERÉlimination du travail des enfants en Algérie :

« Des avancées significatives » selon un rapport américain

L’Algérie a figuré en 2015 parmi les 16premiers pays dans le monde ayant réa-lisé des avancées significatives sur la voiede l’élimination du travail des enfants,selon un rapport du département du Tra-vail américain (DOL) publié à Washing-ton.

Le rapport qui retrace les efforts entre-pris par les gouvernements en 2015 pouréliminer les pires formes du travail desenfants, précise que seize pays, dont l’Al-gérie, ont réalisé «des avancées signifi-catives» dans ce domaine, figurant ainsidans la première catégorie des pays quiont agi sur plusieurs fronts pour mettrefin au trafic et à l’exploitation des en-fants. Ce classement comprend quatrecatégories de pays, établies en fonctiondes progrès accomplis dans le domainede la lutte contre le travail des enfantsqui sont significatifs, modiques, minimesou bien inexistants. En 2015, l’Algérie estremontée dans le classement annuel deDOL (Department of Labour) pour figu-rer à la première catégorie après avoirété classée l’année dernière dans la troi-sième catégorie relative aux pays ayantréalisé des progrès minimes. Selon cerapport, l’Algérie et la Jordanie sont lesseuls pays dans la région du Moyen-Orient-Afrique du Nord (MENA) qui ontréalisé en 2015 des avancées significati-ves en matière de renforcement du ca-dre juridique relatif à la prévention et àla lutte contre l’exploitation des enfantsdans de pires formes de travail. L’Egypte,l’Irak, la Tunisie et le Maroc ont été clas-sés dans la catégorie des pays qui ontaccompli en 2015 «des progrès modi-ques», selon le rapport. En Algérie, legouvernement a augmenté le montantdes amendes infligées aux personnesimpliquées dans ce trafic tout en renfor-çant le contrôle et la prévention de tou-tes les pires formes de travail des en-fants, relève le département du travailaméricain. Ces efforts se sont traduits parla création d’un comité interministériel,chargé de coordonner les activités liéesà la prévention et à la lutte contre latraite des personnes et l’adoption d’unplan d’action national en la matière, sou-ligne le rapport. En parallèle à ces actions,le gouvernement s’attelle à établir uneliste des travaux dangereux qui serontinterdits aux enfants et a mis déjà enplace des mécanismes institutionnelspour appliquer les lois et la réglementa-tion sur le travail des enfants, tout enrenforçant la formation des inspecteurschargés de mener les contrôles sur site. Durant la période couverte par ce rap-port, 25 officiers de la Direction géné-rale de la sûreté nationale et de la Gen-darmerie nationale ont suivi une forma-

tion sur la lutte contre le trafic des per-sonnes, dispensée par l’Office des Nationsunies contre la drogue et le crime.

Concernant le cadre juridique pour laprotection des enfants, DOL précise queces textes de lois interdissent l’exploita-tion sexuelle des enfants et leur admis-sion à l’emploi dans des activités illicitescomme ils assurent l’accès à une éduca-tion gratuite.

Pour autant, le département du travailaméricain estime que la situation pré-coce des enfants dans le marché de l’em-

LES DISPOSITIONS DU NOUVEAU CODE DETRAVAIL DÉBATTUES À ORAN

Inquiétudes sur le travail des enfantsmineurs

ploi demeure un problème qu’il fautéliminer en Algérie, citant en celaune enquête réalisée en 2015 parl’inspection générale de travail quia révélé 97 cas d’enfants engagésdans diverses activités industriel-les et agricoles.

Les dispositions sont telles que même leBIT a demandé des clarif icationsexpresses sur ce sujet.

L’ inquiétude pour ne pas dire laconsternationa ont été les deuxsentiments largement partagés, samedià Oran, au terme d’une rencontre-débatinitiée par la CGATA, qui regroupe dessyndicats autonomes, des universitaireset des avocats, sur certaines dispositionsdu nouveau code du travail.

Dans la salle, selon leur domaine decompétence, les participants ontvivement réagi à l’exposé de MeMustapha Chafi, spécialiste du droit dutravail. Et ce sont plus particulièrementles articles traitant du travail des enfantsmineurs qui ont choqué l’assistance.Ainsi, l ’orateur dira que certainesdispositions prévoient le travail desenfants mineurs de moins de 16 ans desdeux sexes, avec l’autorisation desparents ou du tuteur. Mais ce qui a étédénoncé, c’est la rédaction même desarticles, notamment 48, 49, et 50,qualifiés de flous, et donc une porteouverte à des interprétations et desdépassements graves. D’ailleurs, ununiversitaire dira : «C’est de l’esclavagedes enfants dont il est question ici, laisséà l’appréciation des recruteurs etemployeurs.» À titre d’exemple, le travailde nuit ne peut être effectué par desenfants de moins de 16 ans, si cela toucheleur intégrité physique. Mais plus loin,un bémol de taille, puisque les rédacteursdu code précisent que «toutefois, il est

autorisé le travail de nuit avec uneautorisation et soumis àdéclaration». Les dispositions sonttelles que même le BIT a demandédes clarifications expresses sur cesujet. Pour des avocats et dessyndicalistes, le flou n’est pas lefruit d’un texte mal préparé, maisune volonté délibérée, puisqu’il esten préparation depuis 2005. Lesintervenants ont tous soulignéencore que le nouveau code dutravail dans son contenu marqueune régression, comparé à l’actuelcode encore en vigueur et de citerdes exemples concrets, comme lesCDD qui deviennent la règle, ladisparition de la notion d’hygiènesur les lieux de travail, on ne parleplus que de santé, les sanctions desemployeurs revues à la baisse etcelles des employés à la hausse,l’ingérence dans l’organisationinterne des syndicats, etc. Un autresyndicaliste du SESS argumenteraencore dans l’actuel code le motnégociation est repris 30 fois, dansle projet du nouveau codeseulement 7 fois, y voyant donc unsigne de régression pour lesemployés et dans le monde dutravail en général.

02 Octobre 2016

05 Novembre 2016

D.Loukil

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MODERNISATION DE LA JUSTICE

Vers une réduction de 50% des déplacements des citoyens vers lesstructures de justice

10 Octobre 2016

Le ministre de la Justice Garde dessceaux Tayeb Louh a annoncé lundià Tipasa un programme demodernisation visant une réductiondurant les deux prochaines annéesde 50% des déplacements descitoyens vers les structures de justicepour diverses démarchesadministratives. «Le gouvernementalgérien est engagé dans lamodernisation de la justice,conformément au programme duprésident de la République, qui aprocédé à la mise en place de lapremière commission de réforme dela justice, dès son investiture en1999», a indiqué M. Louh, dans sonallocution à l’occasion del’inauguration du Centre national dessystèmes informatiques, relevant deson département ministériel à Koléa(Tipasa). Inspectant différentesstructures du centre, deuxième dugenre après celui d’El Biar (Alger),mais doté d’une autonomietechnique et d’équipements à lapointe de la technologie mondiale enla matière, le ministre a estimé qu’ils’agit là de l’»un des mécanismes demodernisation du secteur», auquell’Etat confère une «importanceextrême», du fait que la«modernisation de la justice est liéeà la modernisation d’autres secteurs, au titre d’une série de reformesprofondes engagées par leprésident de la République», a-t-ilobservé. Selon les informationsfournies sur place, ce centre dekoléa a été conçu pour fonctionnerde façon autonome et sansinterruption, même au cas d’un arrêtau niveau du centre d’El Biar. Il a étédoté de moyens humains etmatériels pour sécuriser le systèmeinformatique de la justice, suivant

une conception, fixant à moyen etlong termes, ce processus demodernisation. Cette structure,comportant un centre depersonnalisation des puces pour lasignature électronique, vise enoutre «l’optimisation» del’exploitation des technologies del’information et de lacommunication(TIC), en vue del’abandon «progressif» desdocuments en papier et leurremplacement par des moyensélectroniques, a-t-on expliqué auministre.

«Procès à distance»

Lors de sa visite du tribunal de Koléa,le ministre de la Justice a annoncé lelancement «prochain» au niveau decet établissement, des «procès àdistance» en matière de délits. Unepremière en Algérie, qui sera«progressivement généralisée àd’autres tribunaux du pays», et quipermet de «suivre un procès etd’entendre les accusés a partir de

l’établissement pénitencier». Despréparatifs sont, également, encours, en coordination avec leministère des affaires étrangères, envue du lancement de délivrance descertificats de nationalité et du casierjudicaire au niveau des consulatsalgériens à l’étranger, à titreexpérimental, a, par ailleurs, révéléM .Louh . Le parquet général doits’autosaisir automatiquement danstoute affaire touchant l’opinionpublique Le ministre de la Justice,Garde des sceaux, Tayeb Louh, adéclaré lundi à Koléa (Tipasa) que leparquet général doit s’autosaisirautomatiquement dans toute affairesuscitant l’ intérêt de l’opinionpublique et à engager lesprocédures judiciaires quis’imposent. «Des instructionsécrites ont été transmises à tous lesparquets généraux pour leurrappeler ce principe et les inviter às’autosaisir lorsqu’il s’agit d’uneaffaire susceptible d’avoir un impactsur l’opinion publique», a indiqué M.Louh en marge de l’inauguration ducentre de données informatiques dusecteur de la Justice. Le ministre amis l’accent, dans ce contexte, surla nécessité de veiller au respect deslibertés individuelles et à préserverles droits des prévenus lors desprocédures, tout en rappelant queles décisions de justice sontprononcées uniquement dans lessalles de tribunaux et non en dehorsde ces enceintes.

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[DROIT]

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Le bracelet électronique bientôt substitué à la détention provisoire enAlgérie ?

Le directeur général de lamodernisation au ministère de laJustice, Abdelhakim Akka, aannoncé que des essais étaient encours pour choisir le meilleurbracelet électronique qui sesubstituera à la détentionprovisoire en Algérie pour lespersonnes poursuivies dans desaffaires pénales.

M. Akka a déclaré dimanche àl’APS, qu’il y avait plusieurs typesde bracelets éleactroniques quisont actuellement à l’étaped’essai af in de lesutiliser en substitut dela détention provisoireet de ne pas priver lapersonne mise en causede sa liberté avecgarantie decomparution devant lajustice.

Il a aff irmé quel’application dubracelet électroniquepermettait de suivre«avec précision» lesdéplacements de lapersonne poursuivie enjustice même à bordd’un véhicule, faisant

remarquer que «ces braceletssont de fabrication algérienne».

Le port du bracelet électroniqueprendra effet à la fin de l’annéeen cours, a-t-il encore dit.

Par ailleurs, led i r e c t e u rgénéral del’administrationpénitentiaire etde réinsertion,M o k h t a rFelioune, avaiti n d i q u éauparavant quela décision deport dub r a c e l e télectronique aupoignet qui

entrera env i g u e u rprochainement,était soumise àl ’ a u t o r i t éévaluative dumagistrat»seul,a-t-il expliqué, àse prononcer enfonction dudossier du mis encause pour leport du braceletou la détentionprovisoire.

Après avoirrappelé que l’application dubracelet électronique renforçaitla présomption d’innocenceénoncée par la Constitutionalgérienne, il a précisé que «cettemesure devrait réduire le

placement en détentionprovisoire».

M. Felioune a rappelé quel’Algérie «comptera aprèsapplication de cettemesure, parmi lesquelques pays au mondeayant adopté ce systèmequi requiert destechniques scientifiquessophistiquées, estimantque le ministère de laJustice avait acquis unegrande expérience enmatière demodernisation.

Il a ajouté enfin, que latechnique du braceletélectronique permettait delocaliser avec précisionl’emplacement du mis en causeen cas de tentative de fuite du«procès».

Les pays développés ayantadopté la technique du braceletélectronique ne l’utilisent pasuniquement comme substitut dela détention provisoire maiségalement comme substitut de lacondamnation privative de libertéde «courte durée».

29 Mai 2016

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[CULTURE/MÉDIAS]

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Psychanalyse et culture en Algérie

23 Juillet 2016

Le psychiatre Karl Abraham, undisciple de Freud, dans un livreintitulé Psychanalyse et Culture asurtout concentré ses efforts sur unmythe autrement plus éloquent etplus universel qu le mythe d’Oedipeque Freud appelait « un mythe tropétroit ». C’est-à-dire le mythe deProméthée, ce voleur de feu !

La première constatation que faitKarl Abraham à ce sujet, c’est queProméthée qui déroba le feu auxdieux pour le donner aux hommeset entra ainsi en conflit avec Zeus,« un mythe universel et commun auxpeuples indo-européens, sémites,germaniques.. » Il faudrait expliquerle fait que la collectivité formatricedes mythes se conduit vis-à-vis de sescréations comme le rêveur vis-à-visde ses rêves.Freud nous apporte laclef de cette énigme. La théorie durêve culmine dans cette phrase : »Lerêve est un fragment dépassé de lavie psychique infantile » ; Cetteaffirmation est élaborée à partir dela manière selon laquelle la mémoirefonctionne. Du coup, on peutdéduire de ce qui précède que lemythe est un fragment dépassé dela vie infantile de la collectivité ! Ilcontient, sous une forme voilée, lesdésirs de l’enfance de la collectivité.Parce que -en effet- les mythes ontpris naissance au tempspréhistorique de la collectivité, dontnous n’avons eu aucun témoignageprécis, concret et scientif ique,chaque peuple a voilé l’histoire deses origines à sa façon ; en tenantcompte de certaines spécif icitésd’ordre tant physique que mental.L’accumulation de ces mythesparticuliers à une race, à une religion,ou à une zone géographiquedéterminée produit une culture.C’est-à-dire les différentes pratiquesplus ou moins ritualisées, plus oumoins arrangées et plus ou moinsenjolivées. La culture grecque estdéterminée par les différentsmythes (celui d’Oedipe, deProméthée, d’Ulysse, d’Icare etc…)qui vont secréter une fonctionculturelle inf inie (Sophocle,Aristophane, Aristote, Socrate,Pythagore, Euclide…).Tous cescréateurs qu’il soient poètes,philosophes, mathématiciensprocèdent de la même démarchefondamentale, la mythologiegrecque. Il s’ensuit que la fonctionmythologique de la culture se fond,

après un certain temps plus ou moinslong, dans la fonction sociale« vitale ».C’est ainsi que l’idée d’élanvital découle très naturellement dumythe de Prométhée qui avait voléle feu pour permettre aux hommesde vivre. De même Pythagore,Platon et Euclide étaient lesfondateurs de la géométrie et del’arithmétique mais -avant tout- ilsétaient des devins, des gens quilisaient l’avenir pour les autres. C’estainsi que le chiffre 7 est partout lenombre mythique parce quePythagore en a inventorié toutes lespropriétés arithmétiques qui en

faisaient – scientifiquement- parlant– un chiffre exceptionnel. Samystification viendra du fait que lasociété superstitieuse de l’époqueva le sacraliser parce que Pythagoreétait à ses yeux, un magicien et unsorcier avant tout ! Ainsi, noustrouvons toujours les mythesderrière toute production due ànotre imagination ou à notreintelligence…

Rachid Boujedra

LE COUP DE BILL’ART DU SOIR «Gitano»

Pourquoi, apparemment, per-sonne n’a écrit sur les Gitans en Al-gérie ? C’est la question que nous aposée un Algérois dont la famille aconnu les «Gitano». Cet Algérois serappelle que dans les années 1960,les femmes gitanes tapaient auxportes des maisons et proposaientleurs services pour certains travauxde «denti» (dentelle). Elles por-taient, se rappellent-ils, des robesqui ressemblent aux robes kabyleset elles parlaient courammentl’arabe. Les hommes étaient con-nus, notamment, par leur habiletédans les travaux de carrosserieautomobile. Le soir, c’était souvent«la fiesta» (fijta ou fichta, dans leparler algérien) dans les «camps»gitans. Les Gitans, selon cet Algé-rois, sont restés en Algérie jusqu’àla f in des années 1960. Les Gitans,appelés «Gitano» en parler algé-rien, sont aussi et selon les bran-ches appelés Manouches, Romani-chels, Tsiganes ou encore Roms. Ilsparlent souvent le romani et la lan-gue du pays où ils vivent. Le terme

«guezzane» ou «guezzana», enusage jusqu’à aujourd’hui en Algérieet qui désigne celui ou celle qui pra-tique la chiromancie ou la «divination» tout court, vient peut-être de tsi-gane.

09 Octobre 2016

Kader Bakou

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NRP, Octobre 2016, n°33

[MÉMOIRE]Massinissa, souverain numide…Le dernier colloque internationalorganisé par le département Collo-ques de la manifestation «Constan-tine, Capitale de la Culture arabe»porte sur la personnalité du roi nu-mide Massinissa.Le président duCentre national des recherches pré-historiques, anthropologiques et his-toriques (CNRPAH) a déclaré: «Nousvisons à aborder ce sujet du point devue de l’archéologie, et ce en appré-hendant la figure Massinissa dans lecontexte culturel, historique, géo-graphique et économique d’alors.L’archéologie nous permet de com-prendre comment Massinissa aémergé. À son époque, il y a eu unesédentarisation importante, uneéconomie basée sur la céréalicul-ture, un commercetransméditerranéen important et lamise en place d’un systèmeadministratif. C’était unroyaume immense qui cor-respond à l’actuel Maghreb,et c’est l’occasion de rendrehommage à un souverainextrêmement respecté parles autres.» Ainsi, pendanttrois jours, des chercheurs… ont tenté de mettre enperspective la personnalitédu souverain numide,connu autant pour ces hautsfaits de guerre que pour sesqualités de bâtisseur etd’homme d’État. La pre-mière partie du colloque aété donc consacrée à la pé-riode qui a précédé l’arrivée de Mas-sinissa, alors que la deuxième a portésur la relation entre les trois capita-les, Rome, Massinissa et Carthage.Durant la première journée, NadiaBahra, du département Archéologiede l’université Les frères Mentouri,a révélé qu’une partie des sites ar-chéologiques importants découverts

et répertoriés à travers la wilaya deConstantine, particulièrement ceuxsitués sur le plateau d’Aïn El Bey, sontperdus à jamais, et ce en raison del’urbanisation exponentiel le.IddirSmaïl (CNRPAH) a, pour sa part,présenté un exposé sur la diversitéarchitecturale des monuments funé-raires algériens, lesquels sont conçus

selon des rites particuliers à chaquerégion du pays. Selon l’académicien,certaines traditions, remontant à lapréhistoire, sont toujours vivaces.Enfin, Farid Kherbouche (CNRPAH),a axé sa communication sur le déve-loppement de la céréaliculture enAfrique du Nord avant le règne deMassinissa, démentant notammentl’hypothèse selon laquelle ce terri-toire était particulièrement aride,avec à l’appui quelques exemples,dont les fouilles menées dans la ré-gion de Tazbent (Tébessa) et dont arésulté la découverte d’un ensembled’outillage, ainsi que de divers objetsservant à l’industrie lithique. Durantla deuxième étape, c’était au tour duprofesseur d’Histoire ancienne etd’archéologie, le tunisien M’HamedFantar, de présenter une communi-

cation sur la politique cul-turelle menée par Massi-nissa, «amoureuxdevant la culture ro-maine», ce qui ne l’a pasempêché de s’intéresserde près à celle punique : «Il appréciait beaucoup laculture carthaginoise, ainsique sa langue qu’il consi-dérait comme particulière-ment élaborée», a affirméle communicant. D’autresconférences seront don-nées, notamment par Mus-tapha Khanoussi, profes-seur d’Histoire ancienne àl’Institut national du patri-

moine de Tunis, ou encoreDjahidaMehentel de l’Université Al-ger 2…

17 Mai 2016

Issam.B

Algérie : bienvenue à Azrou n’Thour, lieu de pèlerinage qui attirechaque année des milliers de visiteurs

Chaque année, en août, des milliersde visiteurs se rendent sur les hau-teurs du Djurdjura pour honorer unetradition séculaire berbère ou simple-ment respirer l’air vivifiant des som-mets. Du lever du soleil à son cou-cher, des processions de pèlerins detous âges partent à l’assaut d’unetête d’aiguille perchée à 1 894 m d’altitude. Tels des fourmisqui avancent en colonne, ils gravis-sent l’étroit sentier de chèvres quizigzague entre les rochers et les cè-dres aux troncs noueux pour abou-tir à un nid d’aigle coiffé d’un mau-

solée. La légende dit qu’en cet en-droit précis un ascète venu dans larégion il y a quelques siècles a accom-pli la prière du midi avant de rendrel’âme. Les villageois des alentours luiauraient alors édifié un mausolée surce piton qu’affectionnentaujourd’hui encore les aigles et lesvautours du Djurdjura. On s’y rendchaque année en pèlerinage pourallumer des bougies et prier la mon-tagne sacrée d’intercéder auprèsdes dieux pour guérir un malade,trouver un mari pour sa fille ou ra-mener l’émigré qui s’est oublié de

l’autre côté de la mer. On y vientaussi, plus simplement, pour respi-rer l’air vivifiant des sommets et ad-mirer le majestueux panorama qui sedéroule à ses pieds. D’ici, on peutcontempler, sur 360 degrés, la Kaby-lie et ses myriades de villages accro-chés aux crêtes des montagnes dontils épousent les contours. Festif,convivial et haut en couleur, le fa-meux pèlerinage d’Azrou n’Thour(« le rocher du zénith ») draine cha-que année des milliers de visiteurs.Ce rituel est né de la rencontre del’islam maghrébin avec les anciennes

Arezki saïd 15

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NRP, Octobre 2016, n°33

[MÉMOIRE]croyances des Berbères, qui véné-raient les génies protecteurs dessommets des montagnes. Il en ré-sulte aujourd’hui une tradition rele-vant à la fois du rite païen, de la fêtereligieuse, de la randonnée pédes-tre et de l’attraction touristique.« Chaque année, on vient ici pour labeauté des paysages, la fraîcheur duclimat et l’hospitalité des habitants »,explique Brahim, arrivé de Béjaïa, à200 km à l’est d’Alger, avec safemme et ses deux enfants. Le siteest également le lieu d’estivage desbergers de la région qui transhumentl’été venu. Trois villages du massifcentral du Djurdjura – Zoubga, AïtAdella et Aït Atsou – se relaient pourorganiser les trois éditions du pèleri-nage qui ont lieu les trois premiersweek-ends du mois d’août. Nourri-ture et bénédictions pour tous. Toutvisiteur a en effet droit à un cous-cous garni de viande offert par le vil-lage, accompagné d’eau de sourcefraîche, mais aussi, s’il le souhaite, àdes prières. Si la pitance est assuréepar le village, il revient à l’« agraw »,l’assemblée des sages et des imamsréunie sous une tente, de distribuerà tous ceux qui le sollicitent ses bé-nédictions. S’il est de bon ton defaire une offrande en nature ou enargent, nul n’est tenu à ce geste quetous, cependant, accomplissent debonne grâce, faisant du pèlerinageune source de revenus importantepour le village qui l’organise. Pour un

petit hameau comme Zoubga, offrirnourriture, sécurité et assistance àdes milliers de visiteurs requiert unelogistique. « Nous n’attendons riende l’État. Nous nous prenons entiè-rement en charge », souligneAssirem, 21 ans. Un mois avant l’évé-nement, le comité de village établitles listes des hommes valides char-gés d’encadrer l’événement. Cha-que brigade de bénévoles est enca-drée par un responsable affecté àune tâche bien définie : le net-toyage des lieux, la cuisine, l’inten-dance, le service des repas, l’accueilet la sécurité des visiteurs, le trans-port, l’approvisionnement en eau,

l’affichage, l’infirmerie, chaque dé-tail est passé en revue et planifié. Oncommence également à recueillir lesoffrandes en huile, semoule, bêtessacrificielles ou en argent liquidepour le grand repas du pèlerinage,qui est cuisiné et consommé sur le

site même. « Nous placardons des af-fiches annonçant l’événement à tra-vers toute la Kabylie et même à Al-ger et dans les grandes villes dupays », poursuit Assirem. C’est l’oc-casion pour les villageois installésdans les grandes villes ou à l’étran-ger de revenir au pays, de renoueravec leurs traditions et leurs racines.On vient en général en famille ou engroupes. Les femmes se parent avecgrand soin pour se faire belles, carc’est l’occasion idéale pour beau-

coup de jeunes célibataires de repé-rer leur future moitié. Une fois l’as-cension du pic accomplie, les familless’installent à l’ombre protectriced’un cèdre millénaire pour se repo-ser et déjeuner tranquillement enprofitant des paysages bucoliquesqui s’offrent à leur vue. « Nous te-nons beaucoup à nos traditions, ex-plique un membre du comité de vil-lage. Ce pèlerinage nous rassembleet nous permet de garder vivaces nosvaleurs de solidarité et d’entraide. »Pour accueillir ces milliers de person-nes à une telle altitude, pas un seulgendarme ni policier. Du stationne-ment dans les parkings improvisés le

long de la piste jusqu’au retour, toutela logistique est assurée par les villa-geois eux-mêmes. Les organisateurset les vigiles sont reconnaissables augilet vert fluorescent qu’ils portent.

Ils veillent à chaque instant au bondéroulement de l’événement. À71 ans, BoukaoumaChabane, qui aété « amine » (chef du village) pen-dant cinq ans, est un peu la mémoirevivante de Zoubga. Il conseilleaujourd’hui les jeunes qui ont reprisle flambeau. « Aussi loin que l’on re-monte dans le temps, rappelle-t-il,notre village a toujours été organiséainsi. » Il est juste passé de« tajjmath », la structure tradition-nelle de concertation, au comité devillage dûment agréé par les autori-tés. Le dernier visiteur parti, la mon-tagne retrouvera son calme et sa sé-rénité. Servis dans de grands sala-diers en plastique ou en inox, les platsde couscous vont défiler de midi jus-qu’à la fin de la journée. Sur la grandeesplanade des fêtes communes,c’est l’heure des retrouvailles pourles amis et les familles. Dans le brou-haha des conversations et deschants des femmes sous les cèdres,les prières de l’« agraw » pour lesmalades, les défunts, les absents etles infortunés montent vers un cield’un bleu insolent. Tout en bas dupiton rocheux, c’est une véritablefoire qui s’est installée. Des vendeursde souvenirs, de sandwichs, de po-terie traditionnelle ou de brocanteont pris possession des lieux. Desbergers proposent de petites ran-données à cheval ou une pausephoto sur l’animal contre quelquesdinars. Dans quelques heures, le der-nier visiteur parti, la montagne re-trouvera son calme et sa sérénité. EtAzrou n’Thour sera rendu à ses aigleset à ses pasteurs.

14 au 27 août 2016. N°2901-2902

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[BIBLIOGRAPHIE]

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« Parmi toutes les traditions culturelles dans le mondemusulman, il en est une qui mérite d’étre mise en évi-dence , Nous désignons par là , le hammam , lieu et rituelde bain, entouré de mystére parce que jonction entrele concept spirituel et la conscience diffuse d’un bienêtre physique »

Le hammam en terres d’islamZoubeida MAMERIA

Editions Dalimen , 2015

Le Puits ,2015

Réalisé par Lotfi BOUCHOUCHI

Vivement Septembre

Akram EL KEBIR

Editeur APIC 2016

[FILM]

Wahid, correcteur pour un journal et autres écrivains, estun névrosé qui vivote péniblement dans l’Oran actuelle.Avec pour toute compagne «sa belle solitude » à laquelle iltient....

N°2 Juillet 2016

MADINATI

Métropoles au maghreb : mirages ouréalités

[REVUE]

Confluences Méditerranée

Partis et partisans dans le monde arabepost-2011

N°98 Automnes 2016