15
Il a arrêté ses apprentissages, il a fait de la prison et il a été héroïnomane: la biographie de Hansjörg Isler correspond en tout point au poncif du bénéficiaire de l’aide sociale. Et en même temps, c’est l’histoire d’un homme vulnérable qui souhaite gérer sa vie au mieux. «Je ne regrette rien» ACCENT l Pauvreté et exclusion l ZESO 1/2010 D’abord, il essaie d’annuler notre rendez-vous, ensuite, il le déplace au dernier moment du centre-ville au Stei- bach’s Café 51 à Berne Bümpliz où il habite : la pression que Hansjörg Isler vit actuellement est manifeste. Les soucis pour la compagne hospitalisée l’ébranlent. En plus, il doit faire à manger à sa fille à midi, raison pour la- quelle il est passé de six heures de travail par jour à qua- tre. Des circonstances comme celles-ci peuvent l’amener à augmenter sa consommation de méthadone… et ris- quent de compromettre son but d’arrêter la drogue d’ici fin 2010. UN MAUVAIS DÉPART Une vie bien réglée, cet homme de 38 ans ne l’a connue que chez les autres. Il a grandi dans un foyer et il s’est lais- sé pousser dans un apprentissage de boucher. « Tuer des animaux, cela me faisait mal », déclare M. Isler qui a in- terrompu sa formation au cours de la troisième année, ne supportant plus la situation. Une décision que ses pa- rents ne comprenaient pas et qui a été le point de départ d’une discorde qui dure jusqu’à nos jours. La suite, c’était l’héroïnomanie et plusieurs peines de prison pour atta- que à main armée, possession de drogues et délits com- mis pour se procurer de la drogue, un apprentissage de menuisier commencé pendant l’exécution de la peine et «SI JAMAIS »: HANSJÖRG ISLER A L’EXPOSITION Dans le cadre de l’Année européenne de lutte contre la pauvreté et l’exclusion sociale 2010, la CSIAS lance une ex- position consacrée à l’aide sociale qui sera présentée entre avril et la fin de l’année dans différentes villes et commu- nes alémaniques et romandes. L’exposition « Si jamais » montre ce que c’est de vivre la pauvreté au quotidien dans la riche Suisse. A cet effet, nous avons créé 15 objets clés qui illustrent le sujet – entre autres par des bornes pré- sentant des portraits grandeur nature de bénéficiaires de l’aide sociale. Celles-ci permettent une rencontre virtuelle avec des personnes touchées par la pauvreté. L’un de ces portraits vidéo est consacré à Hansjörg Isler. Avec cette exposition, la CSIAS veut sensibiliser l’opinion publique aux questions de la pauvreté et de l’exclusion sociale et renfor- cer ainsi l’acceptation de l’aide sociale dans la société. Informations sur l’exposition: www.si-jamais.ch arrêté après la libération ainsi qu’une brève période com- me entrepreneur quand, avec un partenaire, il gérait cinq magasins de chanvre. Son indépendance a pris une brus- que fin lorsque sa femme a divorcé. « Pendant une an- née, j’étais complètement largué », dit M. Isler quand il évoque cette époque. UN PÈRE ATTENTIONNÉ Aujourd’hui, le père de deux enfants dont la fille aînée vit dans un foyer semble relativement solide. Il est soutenu par l’aide sociale, mais il n’a aucune idée comment rem- bourser les 80’000 francs de dettes qui se sont accumu- lées au cours de sa vie. Cette situation, qu’il essaie de dis- simuler en présence de sa fille, il la qualifie de « merde ». Ce qui le chagrine tout particulièrement, c’est que sa fille doit renoncer à beaucoup de choses. « Je dois souvent di- re non, et ça fait mal », avoue M. Isler. Et il est heureux quand sa fille peut aller faire du ski avec sa grand-mère ou même faire un voyage à l’étranger. UN JOB PRÉCAIRE Pour sortir de la misère, Hansjörg Isler voudrait travailler à plein temps. Mais dans la recherche d’un emploi, son passé le rattrape régulièrement. « Au mieux, on me pro- pose des jobs temporaires », dit Hansjörg Isler qui, de- puis le mois de juin de l’année passée, démonte des ordi- nateurs et des téléviseurs chez Jobbrügg, un atelier de re- cyclage. 50% de son activité ne sont pas rémunérés, puis- qu’ils correspondent à un travail d’utilité publique pour un délit de drogue, la moitié de salaire qu’il touche lui est déduit de l’aide sociale à titre de revenu. Quant à savoir s’il peut continuer à travailler chez Jobbrügg quand il aura fait les 200 heures restantes, la question est encore ouverte. Et pourtant, Hansjörg Isler est en harmonie avec sa vie: « Je ne regrette rien – même s’il y a beaucoup de choses qu’aujourd’hui je ferais différemment. » Karin Meier

Pauvreté et exclusion «Je ne regrette rien» - skos.ch · PDF file«Je ne regrette rien ... doit renoncer à beaucoup de choses. « Je dois souvent di-re non, et ça fait mal »,

  • Upload
    vantu

  • View
    219

  • Download
    1

Embed Size (px)

Citation preview

Page 1: Pauvreté et exclusion «Je ne regrette rien» - skos.ch · PDF file«Je ne regrette rien ... doit renoncer à beaucoup de choses. « Je dois souvent di-re non, et ça fait mal »,

Il a arrêté ses apprentissages, il a fait de la prison et il a été héroïnomane: la biographie de Hansjörg Isler correspond en tout point au poncif du bénéficiaire de l’aide sociale. Et en même temps, c’est l’histoire d’un homme vulnérable qui souhaite gérer sa vie au mieux.

«Je ne regrette rien»

accEnt l Pauvreté et exclusion l

� ZESo 1/2010

D’abord, il essaie d’annuler notre rendez-vous, ensuite, il le déplace au dernier moment du centre-ville au Stei-bach’s Café 51 à Berne Bümpliz où il habite : la pression que Hansjörg Isler vit actuellement est manifeste. Les soucis pour la compagne hospitalisée l’ébranlent. En plus, il doit faire à manger à sa fille à midi, raison pour la-quelle il est passé de six heures de travail par jour à qua-tre. Des circonstances comme celles-ci peuvent l’amener à augmenter sa consommation de méthadone… et ris-quent de compromettre son but d’arrêter la drogue d’ici fin 2010.

Un maUvaIS départUne vie bien réglée, cet homme de 38 ans ne l’a connue que chez les autres. Il a grandi dans un foyer et il s’est lais-sé pousser dans un apprentissage de boucher. « Tuer des animaux, cela me faisait mal », déclare M. Isler qui a in-terrompu sa formation au cours de la troisième année, ne supportant plus la situation. Une décision que ses pa-rents ne comprenaient pas et qui a été le point de départ d’une discorde qui dure jusqu’à nos jours. La suite, c’était l’héroïnomanie et plusieurs peines de prison pour atta-que à main armée, possession de drogues et délits com-mis pour se procurer de la drogue, un apprentissage de menuisier commencé pendant l’exécution de la peine et

«SI JamaIS »: HanSJörg ISlEr a l’EXpoSItIondans le cadre de l’année européenne de lutte contre la pauvreté et l’exclusion sociale 2010, la cSIaS lance une ex-position consacrée à l’aide sociale qui sera présentée entre avril et la fin de l’année dans différentes villes et commu-nes alémaniques et romandes. l’exposition « Si jamais » montre ce que c’est de vivre la pauvreté au quotidien dans la riche Suisse. a cet effet, nous avons créé 15 objets clés qui illustrent le sujet – entre autres par des bornes pré-sentant des portraits grandeur nature de bénéficiaires de l’aide sociale. celles-ci permettent une rencontre virtuelle avec des personnes touchées par la pauvreté. l’un de ces portraits vidéo est consacré à Hansjörg Isler. avec cette exposition, la cSIaS veut sensibiliser l’opinion publique aux questions de la pauvreté et de l’exclusion sociale et renfor-cer ainsi l’acceptation de l’aide sociale dans la société.

Informations sur l’exposition: www.si-jamais.ch

arrêté après la libération ainsi qu’une brève période com-me entrepreneur quand, avec un partenaire, il gérait cinq magasins de chanvre. Son indépendance a pris une brus-que fin lorsque sa femme a divorcé. « Pendant une an-née, j’étais complètement largué », dit M. Isler quand il évoque cette époque.

Un pèrE attEntIonnéAujourd’hui, le père de deux enfants dont la fille aînée vit dans un foyer semble relativement solide. Il est soutenu par l’aide sociale, mais il n’a aucune idée comment rem-bourser les 80’000 francs de dettes qui se sont accumu-lées au cours de sa vie. Cette situation, qu’il essaie de dis-simuler en présence de sa fille, il la qualifie de « merde ». Ce qui le chagrine tout particulièrement, c’est que sa fille doit renoncer à beaucoup de choses. « Je dois souvent di-re non, et ça fait mal », avoue M. Isler. Et il est heureux quand sa fille peut aller faire du ski avec sa grand-mère ou même faire un voyage à l’étranger.

Un Job précaIrEPour sortir de la misère, Hansjörg Isler voudrait travailler à plein temps. Mais dans la recherche d’un emploi, son passé le rattrape régulièrement. « Au mieux, on me pro-pose des jobs temporaires », dit Hansjörg Isler qui, de-puis le mois de juin de l’année passée, démonte des ordi-nateurs et des téléviseurs chez Jobbrügg, un atelier de re-cyclage. 50% de son activité ne sont pas rémunérés, puis-qu’ils correspondent à un travail d’utilité publique pour un délit de drogue, la moitié de salaire qu’il touche lui est déduit de l’aide sociale à titre de revenu. Quant à savoir s’il peut continuer à travailler chez Jobbrügg quand il aura fait les 200 heures restantes, la question est encore ouverte. Et pourtant, Hansjörg Isler est en harmonie avec sa vie: « Je ne regrette rien – même s’il y a beaucoup de choses qu’aujourd’hui je ferais différemment. »

Karin Meier

Page 2: Pauvreté et exclusion «Je ne regrette rien» - skos.ch · PDF file«Je ne regrette rien ... doit renoncer à beaucoup de choses. « Je dois souvent di-re non, et ça fait mal »,

I Pauvreté et exclusion I accEnt

1/2010 ZESo �

Une vie bien réglée, il ne l’a connue que chez les autres: Hansjörg Isler.photo: Jos Schmid

Page 3: Pauvreté et exclusion «Je ne regrette rien» - skos.ch · PDF file«Je ne regrette rien ... doit renoncer à beaucoup de choses. « Je dois souvent di-re non, et ça fait mal »,

�  ZeSo 1/2010

accent  i   Pauvreté et exclusion  i

Les familles dans le besoin doivent être soutenues par des prestations complémentaires: c’est l’une des mesures que la cSiaS propose pour soulager la pauvreté.      Photo: Keystone

C’est ainsi que la CSIAS veut lutter contre la pauvreté en Suisse

Récemment, une personne victime de pauvreté a envoyé une lettre à la CSIAS qui disait : « C’est tout en l’honneur de la CSIAS qu’elle veuille enfin à son tour faire quelque chose pour les innombrables hommes et femmes que la société a exclus et continue à exclure. Mais faut-il vraiment attendre une Année européenne de lutte contre la pauvre-té ou une déclaration de l’ONU pour s’y décider ? ». La question – rhétorique – m’a interpellé. Le moment d’agir contre la pauvreté dans notre pays n’est-il pas venu depuis longtemps ? Pourquoi n’est-ce que maintenant que nous lançons une stratégie de lutte contra la pauvreté ? En effet, le fait est que depuis des années, le taux de pauvreté en Suisse reste pratiquement stable à un niveau élevé : entre 7 et 9%. Même en période d’essor économique, il n’a pas été possible de la réduire de manière significative. Les mu-tations structurelles, les nouvelles formes de vie familiales

et la migration continuelle peuvent servir d’explications. Mais la réalité est que la question de la pauvreté ne suscite pas beaucoup d’attention dans la politique et dans l’opi-nion publique. Et ce qui ne suscite pas l’attention, on ne s’en occupe pas. On sait que c’est la roue qui grince qui est la première à être huilée.

La Pauvreté intéreSSe PeuNombreux sont celles et ceux qui prennent acte de la pauvreté en haussant les épaules, comme s’il s’agissait d’un phénomène naturel. Ainsi, ils ne voient pas la néces-sité d’agir. Pour d’autres, la pauvreté est un scandale auquel il faut remédier. Les discussions rationnelles sur la question comment réduire efficacement la pauvreté sont rares. Par ailleurs, les causes de la pauvreté sont rat-tachées à l’individu, son manque de formation, son échec

La pauvreté n’est pas populaire. La politique ferme les yeux. c’est pourquoi la cSiaS présente un plan concret qui montre comment réduire de moitié la pauvreté en Suisse. 

Page 4: Pauvreté et exclusion «Je ne regrette rien» - skos.ch · PDF file«Je ne regrette rien ... doit renoncer à beaucoup de choses. « Je dois souvent di-re non, et ça fait mal »,

1/2010 ZeSo  �

i  Pauvreté et exclusion  i  accent

familial, son addiction ou son état psychique. L’indivi-dualisation de notre société trouve son pendant dans la fixation sur les facteurs individuels. La réussite ou l’échec sont le fait de la personne elle-même. Parfois, des destins individuels arrivent à capter l’attention des médias. Mais il est rare qu’on réfléchisse sur les causes structurelles de la pauvreté, telles que les chances de formation ou la conception de la politique familiale. Alors qu’il y a égale-ment des exemples positifs qui permettraient de montrer comment lutter avec succès contre la pauvreté en Suisse : grâce à un système de prestations complémentaires ac-cessibles pratiquement à tous, le nombre de personnes âgées pauvres a considérablement diminué en Suisse.

Débat en SuiSSe et en euroPe L’année européenne de lutte contre la pauvreté et l’exclu-sion sociale offre la chance de thématiser la question de la pauvreté. Le Conseil fédéral a promis au parlement de lui présenter une stratégie de lutte contre la pauvreté. Et si le projet a pris du retard, la stratégie annoncée peut néanmoins être attendue au cours des premiers mois de cette année. Elle devra être débattue largement: les can-tons, les villes, les communes, les organisations privées, les personnes touchées par la pauvreté sont invités à y ap-porter leurs idées. Une conférence nationale constituera le cadre extérieur de ce débat. L’Année européenne per-met de placer la lutte contre la pauvreté dans un cadre de référence international. Un coup d’œil au-delà de nos frontières peut être tout à fait utile. En outre 2010 de-vrait rendre visibles les conséquences réelles de la crise économiques. Alors que pour les uns, la crise semble dé-jà être surmontée, pour d’autres, elle ne fait que com-mencer pour de bon.

La cSiaS PréSente DeS ProPoSitionS De SoLutionSCette année, la CSIAS a été la première organisation à présenter un plan concret qui montre comment la pau-vreté et l’exclusion sociale peuvent être combattues effi-cacement. Les 31 mesures proposées par la CSIAS se veulent les éléments d’une stratégie nationale en matière de pauvreté. Centré sur les solutions, le rapport reprend tant des idées nouvelles que des propositions qui font l’objet de la discussion politique depuis un certain temps déjà.

commencer Par LeS riSqueSDans un chapitre consacré à la prévention et à la maîtrise de la pauvreté dans différentes phases de la vie, le rapport relève des situations typiques présentant un risque de pauvreté. En font partie par exemple le passage à la vie active, l’entretien d’une famille avec enfants ainsi que le chômage de longue durée. Un autre chapitre décrit les

thèmes présentant un lien particulièrement étroit avec la pauvreté : la conception du monde du travail, du système de santé, de l’environnement d’habitat. Le rapport tient compte également de l’intégration des étrangères et étrangers et de l’impact de celle-ci pour la prévention de la pauvreté. Et finalement, la CSIAS examine en profon-deur le système de la couverture du minimum vital col-lectif et ses faiblesses actuelles. Il est manifeste que l’aide sociale, les assurances sociales et les prestations cantona-les liées aux besoins doivent mieux être accordées entre elles.

La Lutte contre La Pauvreté De manière trèS concrèteLa mise en œuvre de cette stratégie n’est possible que si la Confédération, les cantons et les communes s’enga-gent à l’adopter. Dans ce contexte, la CSIAS propose des mesures concrètes dont voici quelques-unes: l’introduc-tion de prestations complémentaires pour les familles, la promotion précoce, la validation des acquis, l’exonéra-tion d’impôts du minimum vital, la prévention santé, le renforcement de la collaboration interinstitutionnelle (CII) jusqu’à la création d’une loi fédérale cadre sur la couverture du minimum vital. Le rapport relie ces propo-sitions à des objectifs concrets à atteindre, puisque la pauvreté ne peut être réduite que si la politique se met d’accord sur des objectifs.

une queStion De réPartitionA la fin reste la question du financement. Il y a deux répon-ses à cela. Primo : aujourd’hui, les dépenses en matière de transferts sociaux, qui s’élèvent à quelque 150 milliards de francs par an, sont consacrées avant tout aux prestations liées aux besoins, donc à assurer la prospérité. Moins de 10% des transferts sociaux servent directement ou indirec-tement la prévention de la pauvreté. Vu sous cet angle-là, il s’agit d’une question de répartition et de priorités. La ques-tion essentielle est : combien voulons-nous dépenser pour assurer la prospérité et combien pour lutter contre la pau-vreté ? Secundo : une grande partie des mesures proposées s’entendent comme des investissements. La prévention, la promotion de chances de formation ou l’optimisation des systèmes de prestation tout particulièrement ne doivent pas uniquement être considérés comme des coûts, puis-qu’elles renforcent également l’infrastructure sociale du pays. Et permettent ainsi d’éviter efficacement les coûts consécutifs à la pauvreté.

Walter Schmid, Président de la CSIAS

Le rapport peut être téléchargé sous: www.skos.ch

Page 5: Pauvreté et exclusion «Je ne regrette rien» - skos.ch · PDF file«Je ne regrette rien ... doit renoncer à beaucoup de choses. « Je dois souvent di-re non, et ça fait mal »,

14  ZeSo 1/2010

L’ «inconduite», c’est du passéMonsieur Vogel, la Suisse aura bientôt une loi mo-derne sur la protection de l’adulte. Qui en profi-tera ?

Toutes les personnes qui ont besoin d’être protégées. La nouvelle loi met au centre les besoins individuels et l’autodétermination des personnes concernées.

Quelles sont les changements majeurs que la nou-velle loi apportera ?

Jusque là, on distinguait dans le domaine des mesu-res tutélaires la curatelle, le conseil légal et la tutelle. La nouvelle loi ne prévoit plus qu’une catégorie, la curatelle. Celle-ci doit être taillée sur mesure en fonction des be-soins de la personne. Cela veut dire que l’autorité de pro-tection de l’adulte détermine dans chaque cas individuel si et dans quelle mesure la capacité d’exercer les droits civils de la personne concernée est limitée et définit les tâches à confier à la personne chargée du mandat.

Une telle mesure, à quoi ressemble-t-elle dans le cas concret ?

La nouvelle loi offre une marge de manœuvre qui per-met de limiter la capacité d’exerces d’une personne dans

interview  l  Urs vogel, spécialiste de la nouvelle loi sur la protection de l’enfant et de l’adulte  l

«Le domaine de la tutelle ne dispose pas de véritable lobby politique. C‘est la seule explication de cette révision tardive qui n‘est entreprise qu‘au terme de 100 ans.» 

Bild

er: C

hris

tine 

Bärlo

cher

Protéger plutôt que de tenir sous tutelle: telle est le message véhiculé par la nouvelle loi sur la protection de l’enfant et de l’adulte. Urs vogel, spécialiste en droit, accompagne des communes et des cantons dans la mise en œuvre. il constate : « Le système social doit être réorganisé à de nombreux endroits. »

Page 6: Pauvreté et exclusion «Je ne regrette rien» - skos.ch · PDF file«Je ne regrette rien ... doit renoncer à beaucoup de choses. « Je dois souvent di-re non, et ça fait mal »,

1/2010 ZeSo  15

des domaines partiels uniquement. Il est possible que telle personne a besoin d’une administration des revenus ou des rentes, alors qu’une autre personne doit peut-être être assistée dans le domaine du logement. Nous dispo-sons désormais d’un instrument qui permet de répondre au besoin de protection individuel de la personne.

Y aura-t-il d’autres innovations ?Les personnes incapables de discernement vivant

dans une institution stationnaire seront dorénavant mieux protégées. Une autre innovation essentielle réside dans la possibilité d’instituer un mandat dit de prévoyan-ce qui permet à toute personne de décider de manière précoce qui doit la prendre en charge en cas d’incapacité de discernement.

Cela implique toutefois que les gens sont au cou-rant de cette possibilité.

C’est un point essentiel. C’est pourquoi il faut une campagne d’information afin que les gens apprennent les possibilités offertes par la nouvelle loi. Cela ne vaut pas seulement pour le mandat de prévoyance, mais éga-lement pour les directives anticipées du patient qui sont désormais réglées sur le plan du droit fédéral.

Quels sont les cas dans lesquels les directives anti-cipées du patient sont-elles appliquées ?

Dans tous les cas d’une personne incapable de discer-nement qui nécessite une mesure médicale. Il faut alors vérifier si le patient a rédigé au préalable des directives anticipées. Ces directives définissent le traitement sou-haité par la personne incapable de discernement.

La population est-elle davantage touchée par la nouvelle loi que par l’ancien droit de tutelle ?

Avec la nouvelle loi, la responsabilité individuelle est élargie, puisque les modalités d’une éventuelle impoten-ce peuvent être réglées au préalable. Mais la nouvelle loi continuera à être appliquée en tant que dernier filet de la prise en charge sociale. Notre système est basé sur la subsidiarité. Cela veut dire que l’Etat ne doit intervenir que lorsque les mesures privées ne permettent pas d’at-teindre l’objectif.

L’actuel droit de la tutelle remonte à 1907. Pour-quoi n’est-il révisé que maintenant ?

Il y a 50 ans déjà, de premiers efforts de révision ont été entrepris. Les experts du terrain ont souvent constaté que le système manque de souplesse. A plusieurs repri-ses, ils ont demandé de meilleurs instruments. Mais le domaine de la tutelle n’a pas de véritable lobby politique.

Cela explique que tous les autres domaines du Code ci-vil, à savoir le droit de la succession, le droit matériel, le droit de la famille et du divorce ont déjà été révisés. Le droit de la tutelle est une matière juridique marginale. Par rapport à l’ensemble de la population, les personnes qui entrent en contact avec cette loi sont peu nombreu-ses.

Cela surprend : les conditions sociales changent pourtant énormément en l’espace de 100 ans.

Les situations à problèmes dans le domaine de la pro-tection de l’enfant et de l’adulte sont restées similaires même après 100 ans. En revanche, la terminologie est complètement obsolète. Aujourd’hui, on ne parle plus d’ »inconduite » ou d’ «ivrognerie ».

La nouvelle loi stipule l’institution d’une autorité spécialisée à la place de l’autorité communale de tutelle. Pourquoi ?

L’élaboration de solutions taillées sur mesure impli-que des exigences élevées vis-à-vis de la compétence pro-fessionnelle des autorités. La situation individuelle de la cliente ou du client doit être évaluée sous des aspects dif-férents, ainsi par exemple sous l’aspect médical, social ou juridique. C’est pourquoi la nouvelle autorité doit réunir des spécialistes des groupes professionnels respectifs.

Quelles sont les qualifications dont ces membres de l’autorité doivent disposer ?

La loi fédéral dit uniquement qu’il doit s’agir d’une autorité professionnelle. Le message complémentaire du Conseil fédéral fournit des indications quant aux qualifi-cations. On demande des personnes provenant du droit, du travail social, de la psychologie, de la médecine et du domaine fiduciaire. La Conférence des cantons en ma-tière de protection des mineurs et des adultes (COPMA) a élaboré des recommandations relatives à la compétence professionnelle.

l  Urs vogel, spécialiste de la nouvelle loi sur la protection de l’enfant et de l’adulte  l  interview

Urs VogelUrs vogel ist rechts- und Unternehmensberater im Be-reich öffentliche verwaltung sowie für das Sozial- und Gesundheitswesen. von 2000 bis 2003 führte er das Sekretariat der vereinigung Schweizerischer Amtsvor-münder.  im  Zusammenhang  mit  dem  neuen  Kindes- und erwachsenenschutzrecht wirkt er als experte bei weiterbildungen  und  berät  Kantone  bei  der  Umset-zung. Urs vogel  ist Jurist und Sozialarbeiter und ver-fügt über einen Master of Public Administration. 

>

Page 7: Pauvreté et exclusion «Je ne regrette rien» - skos.ch · PDF file«Je ne regrette rien ... doit renoncer à beaucoup de choses. « Je dois souvent di-re non, et ça fait mal »,

16  ZeSo 1/2010

interview  i  Urs vogel, spécialiste de la nouvelle loi sur la protection de l’enfant et de l’adulte  i

Les communes sont donc appelées à fournir un travail de titan ?

De nombreuses communes ne pourront plus s’acquit-ter elles-mêmes de cette tâche, puisqu’elles manquent des ressources nécessaires, tant professionnelles que fi-nancières. La régionalisation est dès lors un impératif de fait.

La fonction des membres de l’autorité continuera-t-elle à être une activité annexe ?

Actuellement, les cantons sont en phase préparatoire pendant laquelle différents modèles sont envisagés. La tendance va vers un agrandissement des régions cou-vertes ce qui peut créer une activité principale pour les nouveaux membres de l’autorité. J’insiste cependant sur le fait que les cantons s’occupent actuellement de la préparation. Ensuite, les projets de loi seront soumis aux différents parlements cantonaux. C’est qu’à ce moment-là qu’on verra de quelle manière les différents cantons mettront la nouvelle loi en pratique.

> Que signifie cette réorganisation pour les servi-ces sociaux qui, auparavant, étaient également en charge de la tutelle ?

L’organisation de la tutelle et de l’aide sociale est très différente d’un canton à l’autre. C’est pourquoi les pas-serelles ne pourront être définies partout de la même manière. Je suppose que dorénavant, la protection de l’adulte ne pourra plus être rattachée à l’aide sociale. Et c’est bien comme ça, puisque le professionnalisme dont l’autorité de protection de l’enfant et de l’adulte aura be-soin n’est pas le sujet central de l’aide sociale.

Il y a pourtant certains chevauchements.Certes, mais il est absolument juste de séparer ces

deux fonctions. De par le passé, les décisions prises au niveau de la tutelle étaient souvent évaluées sous l’aspect des finances, puisque la même autorité était compétente en matière d’aide sociale. Dorénavant, les intérêts seront clairement séparés. C’est une chance.

Constate-t-on des résistances contre cette réorga-nisation ?

Tout changement rencontre des résistances. Mais je constate depuis un certain temps déjà que les membres des autorités – notamment dans les communes de petite taille – touchent à leurs limites dans le domaine de la tutelle. Tout particulièrement quand il s’agit de cas complexes de protec-tion de l’enfant, par exemple de retraite de la garde ou de personnes présentant des particularités psychiques étran-ges. En ce qui concerne la question de l’argent, les choses risquent d’être plus difficiles: le nouveau système des auto-rités professionnelles occasionnera des frais supplémentai-res puisque le bénévolat diminuera considérablement.

Qui prendra ces frais en charge ?Cela dépend de la manière dont la nouvelle loi sera

mise en œuvre. Un canton qui devient compétent, alors qu’il ne l’était pas auparavant, sera probablement obligé d’assumer les coûts. La situation pourrait être probléma-tique si le canton décide des mesures qui seraient ensuite à financer par l’aide sociale, puisque cette dernière est souvent organisée à l’échelon communal. Les conflits ne peuvent dès lors pas être exclus.

LA noUveLLe LoiLa nouvelle loi sur la protection de l’enfant et de l’adulte remplace le droit de la tutelle qui date de 1907. en décembre 2008, le Conseil national et le Conseil des etats ont approuvé une modification correspondante du Code civil suisse. Actuellement,  les cantons s’occupent de la mise en œuvre et élaborent les projets de lois y relatifs. La nouvelle loi entrera probablement en vigueur en 2013.

les principaux changement en bref :•   Curatelle : dorénavant, ce sera la seule catégorie de mesures de protection. Celle-

ci sera taillée sur mesure en fonction des besoins de la personne concernée.•  Mandat de prévoyance : toute personne peut établir un tel mandat pour désigner 

de manière précoce la personne qui devra se charger d’elle en cas d’incapacité de discernement.

•  Directives anticipées du patient : toute personne peut rédiger de telles directives pour  désigner  le  traitement  médical  qu’elle  souhaiterait  en  cas  d’incapacité  de discernement.

•  Autorité professionnelle : elle remplacera l’autorité de tutelle et sera composée de professionnels de différentes disciplines (droit travail social, psychologie, péda-gogie, médecins, domaine fiduciaire).

«De nombreuses communes ne seront pas en mesure de fournir l‘autorité pro-fessionnelle elles-mêmes. La régionali-

sation s‘impose de facto.»

Page 8: Pauvreté et exclusion «Je ne regrette rien» - skos.ch · PDF file«Je ne regrette rien ... doit renoncer à beaucoup de choses. « Je dois souvent di-re non, et ça fait mal »,

1/2010 ZeSo  17

i  Urs vogel, spécialiste de la nouvelle loi sur la protection de l’enfant et de l’adulte  i  interview

Quels sont les principaux partenaires de la nou-velle autorité professionnelle ?

Les liens seront multiples. Les partenaires principaux seront l’aide sociale, l’école et l’autorité de protection de la jeunesse. Mais c’est également avec les institutions sta-tionnaires en charge de patientes et patients incapables de discernement que la collaboration s’intensifiera.

La révision de la loi visait à harmoniser les prati-ques des cantons. Y parviendra-t-elle ?

La Confédération s’est prononcée contre un droit procédural fédéral et une organisation obligatoire des autorités. Les cantons sont alors libres de décider de la mise en œuvre. Ce qui signifie que – selon le canton – les choix ne seront pas les mêmes.

Et qu’en pensez-vous ?Je regrette que dans le cadre de la révision, on n’ait pas

créé un droit procédural uniforme. Mais fondamentale-ment, je pense que c’est une bonne chose de maintenir les structures fédéralistes, puisque dans notre système, la prise en charge sociale – bien qu’elle soit réglée sur le plan du droit fédéral – est une affaire cantonale. En revanche, j’aurais souhaité que le Conseil fédéral définisse des critè-res clairs en matière de composition de l’autorité profes-sionnelle. Malheureusement, les chambres fédérales ont dilué la lois au cours de leurs délibérations ce qui permet de prouver le professionnalisme rien que par l’expérience. C’est aux cantons d’assurer que la nouvelle autorité sera composée de professionnels réellement qualifiés.

JoUrnée nAtionALeLe  11  mars  2010,  la  CSiAS  organisera  une  journée  natio-nale sur « La collaboration entre l’aide sociale et la protec-tion de l’enfant et de l’adulte ». Avec cette manifestation, la  CSiAS  entend  attirer  à  temps  l’attention  sur  les  consé-quences liées à cette nouvelle protection de l’enfant et de l’adulte. Par ailleurs, elle  indiquera des pistes permettant d’ancrer les nouvelles structures de manière optimale.

Pour plus d’infos : www.skos.ch  Manifestations.

Est-ce une faiblesse de la loi ?Oui, si nous n’arrivons pas à instituer des autorités

professionnelles dont le métier est le sujet de la pro-tection de l’enfant et de l’adulte, la nouvelle loi est trop compliquée. Il est extrêmement difficile d’élaborer des mesures taillées sur mesure. L’autorité doit confier à toute personne chargée d’un mandat une mission indi-viduelle, clairement définie.

On peut donc s’attendre à ce que la nouvelle loi nous réserve encore pas mal de pain sur la planche pour la décennie qui vient de commencer.

Je ne vous le fais pas dire. Dans de nombreux cantons le système social doit être restructuré. Aujourd’hui, nous partons de l’idée que la loi entrera en vigueur en 2013 ou 2014. L’expérience nous dira si des améliorations ul-térieures vont être nécessaires. A l’heure actuelle, nous ne savons pas si les nouveaux instruments tels que le « mandat de prévoyance » ou les « directives anticipées du patient » seront demandées. Celles-ci veulent être un moyen pour décharger l’Etat. Si les gens prévoient à temps, les pouvoirs publics ont moins besoin d’interve-nir.

Quel est l’impact de la révision pour la société ?La loi répond à une évolution qui a eu lieu dans la

société il y a longtemps en conférant une certaine impor-tance à des valeurs telles que l’autodétermination et l’in-dividualité. Mais je ne pense pas que la nouvelle loir sur la protection de l’enfant et de l’adulte change quoi que ce soit dans notre société. Elle est et restera un droit à la protection auquel on a recours lorsque les engagements privées sont infructueux.

Propos recueillis parMonika Bachmann

«Je suppose que dorénavant, la tutelle ne pourra plus être rattachée à l‘aide sociale.»

Page 9: Pauvreté et exclusion «Je ne regrette rien» - skos.ch · PDF file«Je ne regrette rien ... doit renoncer à beaucoup de choses. « Je dois souvent di-re non, et ça fait mal »,

18  ZeSo 1/2010

Faut-il demander l’exercice d’une activité lucrative aux personnes ayant seules la charge d’enfants en bas âge ?

QueStionPeut et doit-on demander aux personnes ayant seules la charge d’enfants en bas âge de faire des efforts pour exer-cer une activité lucrative ?

BaSeSEst considérée comme ayant seule la charge d’enfants une personne qui vit effectivement seule avec son enfant ou ses enfants et non pas avec un ou une partenaire ou un membre de la famille. Les normes CSIAS (C.1.3 et C.2) considèrent que pour le bien des enfants, la présence régulière d’une personne de référence est importante pendant les premières années. En règle générale, la personne indiquée est la mère ou le père. Les parents d’enfants en bas âge doivent pouvoir mettre en balance eux-mêmes les exigences de la vie profes-sionnelle et l’éducation des enfants. Ceci vaut tout particu-lièrement pour les mères et pères ayant seuls la charge d’en-fants qui ne vivent pas en partenariat. Ainsi, pendant les premières années de vie de leur enfant ou de leurs enfants, les personnes qui en ont seules la charge ne doivent pas être poussées par l’aide sociale à exercer une activité lucrative. Or, différents faits contredisent ce principe : - l’entrée (ou la rentrée) dans la vie professionnelle

après une absence de plusieurs années est difficile, voire impossible selon la situation conjoncturelle ;

- le nombre de jeunes femmes (18 à 25 ans) sans for-mation professionnelle ou avec une formation inter-rompue qui deviennent mère ayant seule la charge d’un enfant est actuellement en progression ;

- dans notre société, la formation et le métier sont d’une importance cruciale pour l’intégration sociale ;

- le principe de l’individualisation est déjà fixé dans l’aide sociale, ce qui veut dire que la situation indivi-duelle de la cliente et du client doit toujours être prise en considération.

La situation personnelle et les ressources des personnes ayant seules la charge d’enfants sont très différentes. En

tenant compte de ces deux aspects, on peut attendre éga-lement de la part de personnes ayant seules la charge d’enfants qu’elles (re)prennent le plus rapidement possi-ble une activité lucrative ou une formation correspondan-te à leur situation. Ceci répond au principe de l’individua-lisation dans l’aide sociale.

RéponSeOn peut demander aux personnes ayant seule la charge d’enfants en bas âge qu’elles fassent des efforts en vue d’une activité lucrative en tenant compte des trois points suivants :

1. Insertion professionnelleDans notre société, l’exercice d’une activité lucrative est sy-nonyme de participation. A l’âge scolaire au plus tard, l’in-tégration sociale des parents peut devenir un aspect impor-tant pour l’enfant. Par ailleurs, l’expérience nous apprend qu’une entrée précoce dans la vie active offre de meilleures chances d’insertion professionnelle durable. Il est dès lors indiqué de motiver les clientes et clients et de les préparer ainsi à leur futur double rôle le plus tôt possible. A cet effet, il faut offrir une aide appropriée aux personnes concer-nées. Ainsi, on peut par exemple les soutenir dans la re-cherche de possibilités de garde extra-familiale, d’offres de formation ou d’emplois à temps partiel adéquats. Les orga-nes d’aide sociale ont pour tâche de financer les solutions adaptées à la situation, les offres de formation continue ou la garde extra-familiale des enfants en font partie.

2. Obligation d’exercer une activité lucrativeUne fois que l’enfant a atteint l’âge de trois ans révolus, on peut attendre de la part de la personne qui en a seule la charge d’exercer une activité lucrative dans le cadre de ses possibilités.

3. Obligation des organes d’aide socialePour faire aboutir l’exigence d’exercer une activité lucra-tive, il faut que la garde des enfants pendant l’absence pro-fessionnelle de la personne en ayant seule la charge soit as-surée. Le coût respectif doit être pris en compte dans le budget de soutien à hauteur des tarifs locaux habituels.

Katharina SchubigerMembre de Rete

(Groupe de travail de la commission normes de la CSiaS)

L’aide sociale peut soutenir les personnes ayant seules la charge d’enfants en bas âge dans la recherche d’une activité lucrative. plus l’insertion professionnelle réussit tôt, meilleures sont les perspectives.

pRatiQueLa rubrique «pratique» répond à des questions concernant la pratique de l’aide sociale. Les  membres  de  la  CSiaS  ont  la  possibilité  d’adresser  leurs  questions  concrètes  à  la SKoS-Line  (www.skos.ch,  connecter  à  l’intranet,  sélectionner  la  rubrique  « Conseil »). Leurs  questions  sont  traitées  par  des  spécialistes  et  quelques  exemples  choisis  sont publiés dans ZeSo.  

CSiaS l  pratique  l

Page 10: Pauvreté et exclusion «Je ne regrette rien» - skos.ch · PDF file«Je ne regrette rien ... doit renoncer à beaucoup de choses. « Je dois souvent di-re non, et ça fait mal »,

24  ZeSo 1/2010

accent  l  Jungfrau-Hotel, Wilderswil  l

Une destination de rêve pour les personnes handicapéesLe Jungfrau-Hotel de Wilderswil propose des vacances pour des hôtes conventionnels et handicapés. ces derniers sont encadrés par des spécialistes en pédagogie sociale – et par des auxiliaires qui y travaillent dans le cadre de mesures d’insertion professionnelle de l’aI.

Ce qui, à première vue, semble être un hôtel tout à fait ordinaire, se révèle être un lieu de rencontre pour des personnes avec et sans handicap.

Phot

os: B

éatr

ice 

Devè

nes

Page 11: Pauvreté et exclusion «Je ne regrette rien» - skos.ch · PDF file«Je ne regrette rien ... doit renoncer à beaucoup de choses. « Je dois souvent di-re non, et ça fait mal »,

1/2010 ZeSo  25

I  Jungfrau-Hotel, Wilderswil  I  accent

>

Quand on descend au Jungfrau-Hotel à Wilderswil, on bénéficie de tout ce à quoi un client d’hôtel dans l’Ober-land bernois peut s’attendre: une réceptionniste char-mante s’enquiert des préférences en matière de chambre, le buffet petit déjeuner est dressé avec beaucoup d’amour dès six heures pile du matin et le vacancier qui le soir, fa-tigué par une des nombreuses excursions dans la région touristique d’Interlaken, se laisse tomber dans le fauteuil en rotin sur la terrasse, peut savourer la vue imprenable sur l’imposante Jungfrau. Dans ce cas-ci, le nom de l’hô-tel n’est pas une tromperie sur la marchandise.

Et pourtant, quelque chose est différent. On ne le voit pas du premier ni d’ailleurs du deuxième coup d’œil. Le Jungfrau-Hotel est un hôtel intégratif qui accueille, en dehors des hôtes conventionnels, également des vacan-ciers qui souffrent d’une déficience psychique ou phy-sique. «Ensemble, profitons des vacances», c’est donc le slogan qui figure sur le dépliant de l’hôtel. En octobre 2009, le projet, qui a un caractère pionnier en Suisse, a démarré. Après une phase de mise en train, les 24 cham-bres avec leurs 40 lits accueilleront autant de vacanciers conventionnels que handicapés.

«LoIn DeS ragotS et DeS PotInS» Un lundi matin de février, nous rencontrons Gabriela Zimmermann dans le hall de l’hôtel. Cette aide-cuisiniè-re de 44 ans est arrivée la veille de Berne et elle se réjouit de passer une semaine « les orteils en éventail ». Dans le foyer où elle vit, on lui a proposé de choisir entre rester là-bas ou venir ici. La décision était vite prise : « Je voulais avoir un peu de distance », dit Mme Zimmermann, « m’éloigner des ragots et des potins du foyer ». A sa nais-sance, Gabriela Zimmermann a subi des complications avec le cordon ombilical, c’est la raison pour laquelle elle souffre d’un léger retard mental ou, comme elle le formu-le en souriant, elle est moins forte en calcul que d’autres. La femme de petite taille travaille depuis 26 ans dans un foyer de jour à Bümpliz où 16 enfants doivent être nour-

L’intégration pour tous – qu’ils soient hôte comme Gabriela

Zimmermann (en haut) ou employée comme Adelheid

Jährmann.

«Dans ce cas-ci, le nom de l’hôtel n’est vraiment  pas une tromperie sur la marchandise.»

Page 12: Pauvreté et exclusion «Je ne regrette rien» - skos.ch · PDF file«Je ne regrette rien ... doit renoncer à beaucoup de choses. « Je dois souvent di-re non, et ça fait mal »,

26  ZeSo 1/2010

accent  I  Jungfrau-Hotel, Wilderswil  I

> ris à midi. Elle est responsable des achats, des travaux de préparation et, de temps en temps, de la cuisine. Il y a des années, elle a cramé les épinards, et aujourd’hui, cela lui revient et la turlupine un bon moment pendant qu’elle laisse vagabonder son regard dans le blanc immaculé du paysage hivernal, enchanté par un ciel bleu et un magni-fique soleil.

Nous lui demandons si les enfants ne lui manquent pas. « Ce matin, j’ai reçu un SMS. Les enfants voulaient savoir quand je reviendrais. Dans une semaine, j’ai ré-pondu, parce maintenant, je suis en vacances! » Gabriela Zimmermann rit et la fierté d’être attendue avec impa-tience se lit sur son visage.

DéveLoPPer Le « marcHé DeS HanDIcaPéS » En plus de Gabriela Zimmermann et des hôtes conven-tionnels, quatre autres hôtes encadrés passent leurs va-cances au Jungfrau-Hotel. « Contrairement au marché des clients d’hôtel conventionnels, le marché pour les hô-tes avec un handicap est lent. Cela nous prendra un ou

deux ans pour atteindre un équilibre entre les deux caté-gories d’hôtes », nous confie Roland Eichenberger, direc-teur du Zentrum Seeburg (voir encadré) et initiateur du projet. Alors que l’hôtellerie habituelle, grâce à différen-tes plates-formes internet, est devenue depuis longtemps une affaire courante à la vitesse grand V, pour les offres destinées aux hôtes handicapés, il faut d’abord attirer l’attention d’organisations telles que Pro Infirmis, Pro Mente Sana ainsi que des foyers et des caisses maladie. « Quand tout sera mis en place, les hôtes handicapés auront la priorité lors de la réservation », explique M. Ei-chenberger.

LeS SPécIaLISteS Sont Sur PLacePour assurer un encadrement optimal, le Jungfrau-Hotel a besoin d’un personnel supplémentaire. La réception-niste, soignante diplômée et travailleuse sociale, sait po-ser les questions qu’il faut lors de demandes de cham-bres. En dehors d’elle, un éducateur et deux autres pro-fessionnels de l’encadrement travaillent pour le Jung-

Un lieu de travail tant pour des professionnels diplômés que pour des personnes qui souhaitent progresser sur le plan professi-

onnel dans le cadre d’une

L‘initiateur eichenberger (au milieu) offre une chance aux personnes qui souhaitent retrouver le chemin d‘une vie professionnelle normale: par exermple à robel erni (à droite).

Page 13: Pauvreté et exclusion «Je ne regrette rien» - skos.ch · PDF file«Je ne regrette rien ... doit renoncer à beaucoup de choses. « Je dois souvent di-re non, et ça fait mal »,

1/2010 ZeSo  27

I  Jungfrau-Hotel, Wilderswil  I  accent

un HÔteL IntégratIFen  octobre  2009,  le  Jungfrau-Hotel  à  Wilderswil  a  ouvert les portes de l’un des premiers hôtels intégratifs de Suisse. Il offre aux jeunes des places d’apprentissage et d’emploi dans le secteur hôtelier dans le cadre de mesures profes-sionnelles de l’aI. en plus de séjours hôteliers convention-nels,  il  propose  des  vacances  collectives  et  individuelles encadrées  pour  des  hôtes  souffrant  d’un  handicap  phy-sique ou mental. Le Jungfrau-Hotel fait partie du Zentrum Seeburg à Iseltwald qui comprend plusieurs foyers de rési-dence et centres de travail dans la région d’Interlaken.

Pour plus d’infos: www.jungfrau-hotel.ch / www.seeburg.ch

frau-Hotel. Les serveuses et les cuisiniers sont eux aussi de préférence des professionnels en hôtellerie avec une expérience de l’encadrement. Et puisque les spécialistes sont déjà sur place, il est tout naturel de proposer encore un autre service aux personnes handicapées: au Jung-frau-Hotel, plusieurs personnes travaillent dans le cadre d’une formation ou d’une mesure d’insertion profession-nelle de l’assurance invalidité.

«ServIr Le PetIt DéJeuner»L’un d’entre eux est Robel Erni, 23 ans. Depuis l’ouver-ture de l’hôtel M. Erni y suit une formation en économie domestique pour devenir employés spécialisé en hôtelle-rie. Tous les jours, il nettoie les chambres et les couloirs, aère les lits, époussette et lave les draps. « J’aime ce tra-vail, seul le nettoyage des toilettes ne me plaît pas trop », dit ce fils d’un Suisse et d’une Ethiopienne. Il y a dix ans, Robel Erni est venu directement d’Addis Abeba dans l’Oberland bernois et s’est mis à filer un mauvais coton : excès d’alcool et de drogue à la jeune adolescence, suivis

d’une psychose et d’un long séjour en clinique. Le travail dans l’exploitation hôtelière ramène Robel Erni progres-sivement dans une vie professionnelle normale. Quant à sa réintégration dans la vie sociale, il l’apprend pendant ses loisirs au foyer de résidence encadré. Il joue de la gui-tare et fait du rap. « J’adore le rap, puisqu’il permet de dé-noncer les injustices sociales au moyen de la poésie mo-derne », s’enthousiasme-t-il. « Mes idoles sont Ice-Tea et Greis ! » Ses propres textes parlent d’amour et de la quê-te de la vraie vie. Interrogé sur ses projets d’avenir, il ré-pond sans hésiter une seconde : « J’espère pouvoir bien-tôt servir le petit déjeuner. Cela me permettrait d’être en contact avec les hôtes.»

Les hôtes conventionnels en tout cas semblent appré-cier le concept. « Il y a peut-être des gens qui ne viennent même pas, parce qu’ils ne veulent pas être confrontés avec des personnes handicapées pendant leurs vacances », dit l’initiateur du projet Roland Eichenberger. «Mais ceux qui descendent chez nous, trouvent ça génial.»

Daniel Puntas Bernet

Page 14: Pauvreté et exclusion «Je ne regrette rien» - skos.ch · PDF file«Je ne regrette rien ... doit renoncer à beaucoup de choses. « Je dois souvent di-re non, et ça fait mal »,

32  ZeSo 1/2010

plate-forme  l  fédération suisse pour la formation continue fSea  l

Seules les personnes disposant de compétences de base peuvent compléter leur formation Selon des études, 28% des bénéficiaires de l’aide sociale ont des compétences de base insuffisantes et ne sont dès lors pas en mesure, par exemple, de comprendre des textes simples. Dans la pratique, on constate que les compétences de base ne sont développées que rarement au sein de l’aide sociale. la fédération suisse pour la formation continue demande des mesures. 

En Suisse, de nombreuses personnes ne disposent pas des compétences de base nécessaires pour participer pleinement à la vie sociale et s’affirmer dans le monde du travail. Les compétences de base comprennent les capa-cités de lire et de comprendre des textes simples (littéra-lité), de résoudre des problèmes mathématiques simples (mathématiques de tous les jours), d’utiliser les technolo-gies d’information et de communication (TIC) ainsi que de se débrouiller avec la langue officielle locale (compé-tences linguistiques). L’étude «Adult Literacy and Lifes-kills» (étude ALL), réalisée en 2005 par l’Office fédéral de la statistique, fait ressortir que quelque 800’000 adultes – ce qui correspond à 16% de la population adul-te résidant en Suisse – ne sont pas en mesure de com-prendre un texte simple. 430’000 adultes ont de gran-des difficultés à résoudre un problème mathématique simple. Et ce ne sont de loin pas les seules personnes d’origine migratoire qui en sont concernées. Les Suisses-ses et Suisses ayant de la peine avec les compétences de base sont nombreux.

D’autreS payS agiSSentLe problème du manque de compétences de base n’est pas nouveau. Depuis le milieu des années 1990, diffé-rentes études font état de ce déficit. La Commission suis-se de l’UNESCO a à son tour demandé des mesures. Dans d’autres pays européens, ainsi qu’en Grande-Breta-gne ou en Irlande, le problème a été reconnu sur le plan politique et des stratégies nationales ont été développées. En Suisse en revanche, les efforts entrepris jusqu’à tout récemment sont minimes, voire inexistants. Ce n’est qu’en vue d’une nouvelle loi nationale sur la formation continue qu’on s’intéresse sérieusement à la question, et depuis 2009, la Confédération soutient des projets à ce sujet.

l’illettriSme coûte cherLe manque de compétences de base a des conséquences négatives à différents niveaux : les personnes concernées ont des difficultés à gérer la vie quotidienne. Elle sont au chômage ou courent un risque aigu d’être expulsées du

monde du travail. Leur estime d’elles-mêmes en termes de capacité de travailler et d’apprendre est faible, leur santé est menacée et elles sont davantage touchées par la pauvreté que la moyenne. Sur le plan de l’économie na-tionale, la problématique se répercute entre autres sur les coûts sociaux. Selon une étude du bureau BASS de 2007, l’absence de compétences de lecture coûte un milliard de francs par an à l’assurance chômage. Selon cette étude, 18% des chômeurs le sont uniquement en raison de leur illettrisme.

la parallèle avec l’aiDe SocialeLes personnes aux compétences de base insuffisantes ont souvent connu des parcours scolaires lacunaires ou par-que par des échecs. Dès lors, la « faible qualification » est le principal facteur socio-économique de risque de com-pétences de base insuffisantes. Selon l’étude ALL, 30% des adultes qui n’ont fait qu’une scolarité obligatoire ont des compétences de lecture insuffisantes. Un autre fac-teur de risque réside dans l’origine migratoire : 44% des immigrants allophones ont de la peine à lire, parmi le même groupe de personnes, 31% ont des difficultés avec les mathématiques de tous les jours. Un âge avancé et une position professionnelle inférieure sont d’autres fac-teurs de risque.

L’étude ALL montre également que 28% des béné-ficiaires de l’aide sociale disposent de compétences de base insuffisantes. Ce constat ne surprend pas. Selon une étude du Secrétariat d’Etat à l’économie (seco) de 2009, les facteurs suivants font partie du risque de res-ter durablement dans l’aide sociale: âge avancé, absence de qualification au niveau secondaire II, maîtrise insuffi-sante de la langue officielle locale (origine migratoire) et

plate-formel revue ZeSo propose cette double page comme plate-for-me aux organisations partenaires : dans cette édition, à la fédération suisse pour la formation continue fSea.

Page 15: Pauvreté et exclusion «Je ne regrette rien» - skos.ch · PDF file«Je ne regrette rien ... doit renoncer à beaucoup de choses. « Je dois souvent di-re non, et ça fait mal »,

1/2010 ZeSo  33

  l  fédération suisse pour la formation continue fSea  l  plate-forme

appréciation négatives des propres perspectives d’avenir. Une comparaison avec les facteurs de risque de compé-tences de base insuffisants, permet de conclure que les personnes dépendant durablement de l’aide sociale dis-posent très probablement de compétences de base insuf-fisantes.

une approche erronéeDepuis longtemps, on rappelle que la faible formation est le risque de pauvreté numéro un, pour la dernière fois dans l’almanach social 2010 de Caritas ou dans un do-cument de travail de la CSIAS de janvier 2010. Dès lors, on demande des mesures qualifiantes pour les bénéfi-ciaires de l’aide sociale. Or, les compétences de base manquantes font que pour une grande partie des bénéfi-ciaires de l’aide sociale, il est difficile voir impossible de bénéficier de telles mesures. Par conséquent, une quali-fication durable doit commencer par la promotion des compétences de base. A cet égard, on distingue entre me-sures à court terme et mesures à long terme.

leS meSureSLes mesures à court terme sont judicieuses lorsqu’elles sont ciblées sur les participant-es et sur le marché de l’em-ploi. La promotion commence par la question des be-soins: quelles sont les compétences de base dont une per-sonne doit disposer pour exercer une activité donnée? L’étape suivante consiste un état des lieux axé sur les res-sources : où en est la personne par rapport à ces exigen-ces? Des mesures à court terme dans le cadre de 30 leçons doivent se baser de manière ciblée sur ces exigences du marché du travail. Ainsi, si un ou une bénéficiaire de l’aide sociale souhaite travailler dans la restauration, il faut promouvoir les compétences de base nécessaires pour un travail en cuisine : peser, mesurer et estimer dans le domaine des mathématiques de tous les jours, termes spécifiques de la cuisine dans le domaine de la langue, maniement des appareils électroménagers de plus en plus sophistiqués dans le domaine des technologies d’in-formation et de communication (TIC).

En dehors de ces mesures à court terme, il faudrait suivre le modèle des pays scandinaves en saisissant, dans le cadre de l’aide sociale, la chance de rattraper une for-mation à fond et durablement. Avec un budget-temps de deux ans, il est possible de rattraper un certificat d’étu-des secondaires. Comparé aux mesures de promotion décrites ci-dessus, le rattrapage d’une formation est une solution plus durable. Elle implique toutefois que la pra-tique de l’aide sociale accorde davantage d’importance à la qualification qu’à la réinsertion la plus rapide possible dans le monde du travail.

la miSe en œuvre DanS l’aiDe SocialeLa pratique montre que les bénéficiaires de l’aide sociale ne sont que rarement renforcés en termes de compéten-ces de base. Ceci d’une part en raison de l’offre de forma-tion insuffisante dans ce domaine. La plupart des presta-taires de formation continue ne disposent pas d’offres dans le domaine de la lecture et de l’écriture, des mathé-matiques de tous les jours et des TIC. D’autre part, il est difficile pour les travailleurs sociaux, dans le cadre du conseil, d’identifier un besoin de promotion des compé-tences de base et de prendre les mesures adéquates.

Pour remédier à cela, il faudrait dans un premier temps sensibiliser les acteurs. Les travailleurs sociaux doivent être conscients de l’importance des compéten-ces de base pour la réinsertion professionnelle. Dans un deuxième temps, ils devraient acquérir la capacité de conseiller de manière adéquate les bénéficiaires de l’aide sociale aux compétences de base insuffisantes. La capacité d’identifier les besoins et de développer, en col-laboration avec le partenaire de formation approprié, des stratégies de promotion spécifiques est déterminante. En même temps, les prestataires de formation continue devraient tenir davantage compte des besoins de l’aide sociale.

André Schläfli et Bernhard Grämigerfédération suisse pour la formation continue fSea 

l’importance  De la formation continuela fédération suisse pour la formation continue fSea est l’association faîtière de la formation continue générale et professionnelle.  elle  encourage  la  collaboration  entre  les institutions de formation continue, suscite la compréhen-sion publique de l’importance de la formation continue et soutient  ses  membres  dans  leurs  activités.  les  thèmes prioritaires sont le renforcement des adultes peu qualifiés, notamment  dans  le  domaine  des  compétences  de  base, ainsi que la formation dans les petites et moyennes entre-prises (pme.)