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PERCEPTIONS DE L’UNION EUROPEENNE ATTITUDES ET ATTENTES A SON EGARD ETUDE QUALITATIVE AUPRES DU PUBLIC DES 15 ETATS MEMBRES ET DE 9 PAYS CANDIDATS A LADHESION RAPPORT GENERAL Etude réalisée par OPTEM S.A.R.L pour la COMMISSION EUROPEENNE Juin 2001

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PERCEPTIONS DE L’UNION EUROPEENNE

ATTITUDES ET ATTENTES A SON EGARD

ETUDE QUALITATIVE AUPRES DU PUBLIC

DES 15 ETATS MEMBRES

ET DE 9 PAYS CANDIDATS A L’ADHESION

RAPPORT GENERAL

Etude réalisée par OPTEM S.A.R.L pour la

COMMISSION EUROPEENNE

Juin 2001

petereg
Le présent document ne représente pas le point de vue de la Commission européenne. Les interprétations et les opinions qu'il contient n'engagent que ses auteurs
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INTRODUCTION

Le Président PRODI avait exprimé le souhait, pour servir à la préparation du Livre Blanc gouvernance, de disposer d’unevision récente et approfondie de l’état de l’opinion et des attentes des Européens de l’Est et de l’Ouest.Une étude a donc étéentreprise conjointement par le Secrétariat Général (équipe Gouvernance et Cellule Dialogue sur l’Europe), et les DGEducation et culture et Elargissement. Elle était inscrite au Programme de travail pour le Livre Blanc sur la Gouvernanceapprouvé par le Collège le 11 octobre 2000.

Les études d’opinion sont quantitatives1 ou qualitatives. Dans le cas présent, c’est une approche qualitative qui a étéchoisie. Cette technique repose en effet sur des discussions de groupe approfondies d’une durée d’environ trois heures, ellepermet une compréhension fine des attitudes ,attentes et résistances mais aussi de ce qui les motive, en permettant d’enidentifier les fondements et d’analyser les processus par lesquels elles se forment. Comme toutes les méthodes, elle a seslimites. Nous sommes néanmoins frappés par certains résultats qui intéressent directement les enjeux du Livre Blanc.Ainsi ,par exemple, on en retient:

1. Un sentiment assez général d’inquiétude qui domine face à l’avenir. Et ce malgré les résultats économiques positifs àl’époque du sondage. Corrélativement, les attentes à l’égard de l’Europe expriment un besoin de sécurité, depréservation d’un modèle européen de société. Certainement on est loin d’attentes seulement économiques.

2. Une homogénéité des attentes entre l’Est et l’Ouest. Si l’on doit marquer quelque part un clivage, il est plutôt au seinde l’Union européenne actuelle. Il apparaît que la gouvernance doit regagner la confiance sur deux terrains: visibilité etparticipation pour les uns, mais aussi efficacité et controlabilité pour les autres.

3. La méconnaissance de la réalité du fonctionnement des institutions européennes et de leurs responsabilités estimpressionnante, c’est un motif permanent de distance entre l’Union et les citoyens. Cette méconnaissance génèrel’indifférence, elle est plus grande à l’Ouest qu’à l’Est.

4. Le travail d’explication de ce qu’est l’Union et de ce à quoi elle est destinée est donc essentiel. C’est un travail enprofondeur, il ne peut passer par des slogans ou une démarche « marketing ». Il exige une véritable pédagogie. LaCommission européenne lorsque son rôle est compris génère la confiance; on l’oppose aux Etats qui seraient politisés.Mais il faut se garder de cultiver cette méfiance à l’égard de la politique, non seulement parce que l’Uniond’aujourd’hui est politique mais parce que ce serait encore une fois opposer la Communauté et ses Etats membres . Oron n’accomplira pas l’une sans la pleine participation des autres. car les citoyens doivent comprendre que l’Unionaujourd’hui fait la politique.

Jérome VIGNON

1 L’Eurobaromètre et la plupart des sondages d’opinion appartiennent à la catégorie des études d’opinion quantitatives

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Ce rapport présente les résultats d’une étude qualitative réalisée, à la demande de la Commission Européenne,auprès de citoyens de 24 pays européens :

4 Les 15 Etats-membres actuels de l’Union Européenne : Allemagne, Autriche, Belgique, Danemark,Espagne, Finlande, France, Grèce, Irlande, Italie, Luxembourg, Pays Bas, Portugal, Royaume Uni, Suède.

4 9 pays candidats à l’adhésion à l’Union Européenne : Chypre, Estonie, Hongrie, Lettonie, Pologne,République Slovaque, République Tchèque, Roumanie, Slovénie, constituant un « échantillon » varié despays candidats en fonction de leurs situations géographiques, économiques, et culturelles1

Cette étude a été lancée à l’initiative :

4 De la Mission Gouvernance, soucieuse de prendre en compte dans ses réflexions les attitudes, attentes etpréoccupations des citoyens

4 De la Cellule Dialogue sur l’Europe, pour nourrir la réflexion lancée dans le cadre du débat sur l’avenirde l’Europe

4 De la Direction Générale Education et Culture, qui en a assuré pour une grande part la réalisationmatérielle, et à qui elle doit servir à orienter le contenu et les modalités de ses propres actionsd’information, notamment pour ses programmes de visite, en fonction des besoins et attentes qui semanifestent dans le public

4 De la DG Elargissement, à qui elle doit permettre de faire le point des attitudes, des motivations, craintesou interrogations relatives à l’adhésion, d’abord dans les pays candidats, mais aussi dans les Etats-membres.

Globalement, les objectifs en étaient d’identifier et d’expliciter les perceptions de l’Union Européenne, les attitudeset les attentes à son égard, et plus précisément d’éclairer les questions suivantes :

4 L’image et les perceptions de l’Europe et de l’Union Européenne : leur état existant et leurs fondements4 La compréhension des objectifs poursuivis par la construction communautaire4 Le degré et les facteurs d’adhésion à l’idée de l’Union Européenne4 Les craintes, réticences, oppositions et les facteurs qui les sous-tendent4 Les attentes explicites ou implicites d’action communautaire4 Le degré de connaissance et de compréhension des principaux volets de la politique communautaire, les

attitudes à leur égard, les propensions à y souscrire4 Les attitudes à l’égard de la candidature et de l’adhésion future à l’Union de nouveaux Etats-membres.4 Les besoins et attentes d’information sur ces sujets.

Elle a été réalisée sur le terrain dans la deuxième moitié du mois de janvier 2001, par la méthode des discussions degroupe : 86 discussions de groupe (d’une durée moyenne de 3 heures) ont été réalisées entre les différents pays, réunissantau total 694 personnes, femmes et hommes adultes, âgées de 25 à 60 ans, appartenant aux catégories moyennes de lapopulation : dans 1 groupe sur 2, catégories socio-économiques moyennes-hautes, dans 1 groupe sur 2, catégories socio-économiques moyennes-basses. Selon la taille du pays, on a procédé à 4 discussions (dans deux lieux d’enquête différents :une très grande ville et une ville moyenne) ou à 2 discussions (dans une ville importante hors de la capitale).

On trouvera en annexe l’ensemble des éléments techniques : guide d’animation des réunions, organisation de l’étude,définition précise de la population étudiée, composition des groupes.

La conception, l’analyse internationale et la synthèse de l’étude ont été assurées par OPTEM, titulaire du ContratCadre « Etudes Qualitatives » de la Commission, en collaboration avec et sous le contrôle technique de l’Unité chargée del’analyse de l’opinion publique (DG Education et Culture - Centre pour le Citoyen au moment de son lancement ; DirectionGénérale Presse et Communication depuis 2001). Les enquêtes sur le terrain et les analyses nationales ont été menées, dansles Etats-membres, par les partenaires d’OPTEM chargés de leur réalisation sous l’égide du Contrat Cadre et, dans les payscandidats, par des partenaires sélectionnés ad hoc : on trouvera également en annexe l’identité de ces différents instituts.

Ce rapport a été rédigé par Daniel Debomy, directeur d’OPTEM.

1 L’étude n’ayant pas pu, à ce stade, prendre en compte l’ensemble des pays candidats en raison de limites budgétaires

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SOMMAIRE

SYNTHÈSE DES RÉSULTATS DE L’ÉTUDE........................................................................................................................5

CHAPITRE I : LE CONTEXTE : SENTIMENTS SUR LA SITUATION DU PAYS ET SES PERSPECTIVESPOUR LES ANNÉES À VENIR..............................................................................................................22

I.1. SENTIMENTS SUR LA SITUATION ET LES PERSPECTIVES DU PAYS DANS LES ETATS MEMBRES ....................................23

I.2. SENTIMENTS SUR LA SITUATION ET LES PERSPECTIVES DU PAYS DANS LES PAYS CANDIDATS À L’ADHÉSION .............31

CHAPITRE II : EVOCATIONS SPONTANÉES DE L’EUROPE. SENTIMENT D’APPARTENANCE ......................37

II.1. PERCEPTIONS ET SENTIMENT D’APPARTENANCE DANS LES ETATS MEMBRES ............................................................38

II.2. PERCEPTIONS ET SENTIMENT D’APPARTENANCE DANS LES PAYS CANDIDATS À L’ADHÉSION .....................................48

CHAPITRE III : CONNAISSANCES ET PERCEPTIONS DE L’UNION EUROPÉENNE.............................................55

III.1. ETAT DES LIEUX DANS LES ETATS MEMBRES .............................................................................................................56

III.2. ETAT DES LIEUX DANS LES PAYS CANDIDATS À L’ADHÉSION ......................................................................................86

CHAPITRE IV : RÉACTIONS À DES ÉLÉMENTS DE PRÉSENTATION DE L’UNION EUROPÉENNE ...............102

IV.1. RÉACTIONS DANS LES ETATS MEMBRES ..................................................................................................................103

IV.2. RÉACTIONS DANS LES PAYS CANDIDATS À L’ADHÉSION ...........................................................................................122

CHAPITRE V : ATTENTES À L’ÉGARD DE L’UNION EUROPÉENNE...................................................................140

V.1. ATTENTES À L’ÉGARD DE L’UNION DANS LES ETATS MEMBRES...............................................................................141

V.2. ATTENTES À L’ÉGARD DE L’UNION DANS LES PAYS CANDIDATS À L’ADHÉSION........................................................149

CHAPITRE VI : ATTITUDES L’ÉGARD DE L’ÉLARGISSEMENT DE L’UNION EUROPÉENNE.........................155

VI.1. ATTITUDES À L’ÉGARD DE L’ÉLARGISSEMENT DANS LES ETATS MEMBRES..............................................................156

VI.2. ATTITUDES À L’ÉGARD DE LA PERSPECTIVE D’ADHÉSION DANS LES PAYS CANDIDATS .............................................160

CHAPITRE VII : ATTENTES D’INFORMATION EXPRIMEES ET REACTIONS A L’IDEE DE VISITESPHYSIQUES OU VIRTUELLES DE LA COMMISSION EUROPEENNE........................................164

VII.1. ATTENTES EXPRIMÉES ET RÉACTIONS DANS LES ETATS MEMBRES ..........................................................................165

VII.2. ATTENTES EXPRIMÉES ET RÉACTIONS DANS LES PAYS CANDIDATS À L’ADHÉSION ...................................................176

CHAPITRE VIII : RÉACTIONS FINALES SUR LA COMMISSION EUROPÉENNE ...................................................182

VIII.1. REACTIONS ENREGISTREES DANS LES ETATS MEMBRES .........................................................................................183

VIII.2. RÉACTIONS ENREGISTRÉES DANS LES PAYS CANDIDATS À L’ADHÉSION ..................................................................187

ANNEXE I : ORGANISATION DE L’ÉTUDE. DÉFINITION DE LA POPULATION ÉTUDIÉE ........................189

ANNEXE II : COMPOSITION SOCIO-DÉMOGRAPHIQUE DES GROUPES DE DISCUSSION.........................192

ANNEXE III : GUIDE D’ANIMATION DES DISCUSSIONS .....................................................................................194

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SYNTHESE DES RESULTATS DE L’ETUDE

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LE CONTEXTE : SENTIMENTS SUR LA SITUATION DU PAYS ET SES PERSPECTIVES POUR LESANNEES A VENIR

⇒ Les citoyens de l’Union Européenne sont, pour beaucoup d’entre eux, pessimistes sur la situation deleur pays et manifestent des inquiétudes pour l’avenir.

Les causes de ces inquiétudes sont principalement de trois ordres :

• La rapidité des mutations en cours, et les grandes incertitudes quant à leurs conséquences,qu’il s’agisse des évolutions technologiques ou économiques. Les nouvelles technologies del’information et de la communication ouvrent de larges perspectives à ceux qui les maîtrisent, mais« déboussolent » de nombreux autres ; on dispose de moins en moins de repères pour comprendreune économie de plus en plus virtuelle, volatile, et dont on ne perçoit plus les racines (avec lamultiplication des opérations de fusion et d’acquisition, les bouleversements permanents descontours et des champs d’activités d’entreprises naguère stables et familières) ; avec la maladie dela vache folle due à l’introduction d’une alimentation animale non naturelle, les organismesgénétiquement modifiés, ou les obus à l’uranium appauvri dont on vient d’apprendre l’utilisationdans l’ex-Yougoslavie, l’homme donne l’impression de jouer à l’apprenti sorcier, etc.

• Le sentiment fréquent d’une perte des valeurs et de la cohésion du tissu social : maintien oudéveloppement de larges poches de pauvreté dans des pays présumés avancés, dilution des valeursde solidarité et de la convivialité, isolement de jeunes dans une fréquentation assidue de l’universvirtuel, développement de l’usage des drogues, montée de la criminalité et de l’insécurité, craintede déstabilisation de la société par une immigration incontrôlable, en sont des signes évoqués parles uns ou les autres.

• Le constat d’excès ou de dérives du libéralisme économique ; certains le dénoncent en tant quetel, d’autres, sans s’exprimer sur un plan idéologique, s’émeuvent cependant tout autant de ladégradation de services publics essentiels (santé, éducation, transports publics), de l’accroissementde l’écart entre les nantis et les plus pauvres, ou plus généralement de l’influence croissante del’argent sur les mentalités.

A cet égard, on observe que l’amélioration récente, et pourtant notable, de la situationéconomique de beaucoup de pays, est très peu évoquée.

Font partiellement exception :° Des pays du « Sud » de l’Europe qui ont connu un développement économique et social

spectaculaire depuis 10 à 20 ans – et dans lesquels on reconnaît d’ailleurs généralementl’importance de la contribution communautaire à cette évolution – le Portugal, l’Espagne,l’Irlande, et à un moindre degré la Grèce (seulement dans les catégories socio-économiquesmoyennes-supérieures dans ce pays)

° La Finlande, qui a également connu une amélioration économique sensible ces dernièresannées

° Les Pays Bas et la Suède (dans les couches moyennes-supérieures de la population en cequi la concerne), dont les citoyens tendent à considérer les bases économiques et socialessur lesquelles leur pays s’est construit comme solides, et à regarder l’avenir avec confiance.

Il n’empêche que des inquiétudes n’y sont pas non plus absentes.

On observe également que les citoyens européens interrogés n’ont pratiquement pasconscience des effets positifs de la concurrence pour eux en tant que consommateurs ; saufexceptions, ils perçoivent les augmentations de prix, mais pas les diminutions.

En paraphrasant M Jacques Delors qui estimait, lorsqu’il était Président de la CommissionEuropéenne, « qu’on ne tombe pas amoureux d’un marché intérieur sans frontières », on peutconstater ici l’évidence qu’on ne se prend pas davantage de passion pour un taux decroissance, pour un indice de performance, ni pour l’annonce de valeurs ajoutées là où onattend que la vie collective soit organisée simplement autour de valeurs.

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⇒ Les mêmes observations s’appliquent, et beaucoup plus fortement, aux pays candidats à l’adhésion.

Dans la plupart d’entre eux, il règne l’impression générale – et vécue notamment douloureusementpar les personnes des catégories socioprofessionnelles moyennes-inférieures – non seulement d’uneinégale répartition des fruits économiques ou d’une sourde menace pour le futur, mais bien d’unevéritable dégradation au cours des 10 années écoulées : fossé entre un petit nombre de privilégiés et lamasse de la population, sans apparition d’une classe moyenne intermédiaire, services publics de basetombant en déshérence, disparition du filet protecteur de l’Etat, incertitude croissante pour le lendemain.

Les citoyens de ces pays font en outre le même constat de la dissolution des liens sociaux, de ladélitescence du tissu sociétal, de la montée de la criminalité – en y ajoutant, de manière beaucoup plusexplicite, la médiocrité du personnel et des dirigeants politiques, parfois même dénoncés comme étant aucœ ur d’une corruption qui gangrène le pays.

Le constat de l’écart avec les pays de l’Europe de l’Ouest, et l’idée que celui-ci ne s’est nullementréduit, concourent également au pessimisme.

Certes aucun, dans les pays de l’ancien bloc de l’Est, ne regrette la disparition du communisme ; la libertéacquise grâce à l’instauration d’un régime politique démocratique est partout saluée, mais au planéconomique les avantages concrets du libéralisme ne se manifestent guère que par la disponibilité dans lesmagasins d’une plus grande variété de produits de consommation – que tous ne peuvent pas se payer.

Si beaucoup tendent à reconnaître que la situation nouvelle est susceptible d’ouvrir des opportunités,précédemment inexistantes, aux plus jeunes, au plus dynamiques, aux mieux formés, la plupart nes’identifient pas à ce portrait.

Parmi les pays candidats, il convient toutefois de noter des différences entre ceux d’entre eux qui ontacquis un niveau de développement relativement élevé – Slovénie, Estonie, Chypre, République Tchèque,où la reconnaissance de progrès accomplis et un optimisme mesuré pour l’avenir se manifestent au moinsdans les catégories moyennes-supérieures – et les autres, parmi lesquels la Pologne et la Lettonieparaissent affectées d’un pessimisme particulièrement noir. (Dans ce panorama, les Roumains ont uneposition originale, considérant leur pays comme étant dans un état de délabrement et de chaos inégalé,mais affichant l’espoir ancré de jours meilleurs à terme).

⇒ Les analyses relatives aux perceptions de la situation et des perspectives d’avenir sont développées,pays par pays, dans le Chapitre I.

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EVOCATIONS SPONTANEES DE L’EUROPE ET SENTIMENT D’APPARTENANCE

⇒ L’Europe a une définition géographique, mais celle-ci est secondaire. Quand elle est évoquée – dansles pays candidats à l’adhésion surtout – c’est d’ailleurs pour tendre à en exclure des pays ou des zonesqui font pourtant objectivement partie du continent européen, par l’application d’autres critères que celuide la géographie : pour l’essentiel la Russie (à la seule exception éventuelle de sa frange extrêmeoccidentale admise par certains comme étant historiquement européenne), et par extension l’Ukraine et laBiélorussie. La Turquie est également souvent considérée spontanément comme étant non-européenne.

⇒ Ce qui fait l’Europe est en effet avant tout historique et culturel. L’analyse des perceptions de sonidentité et du sentiment d’européanité dessine à cet égard une ligne de clivage principale Sud-Nord,entre un très grand « Sud » et un Nord très restreint.

• Ce « Sud » inclut une très grande majorité des pays européens, Etats-membres ou payscandidats, géographiquement au Sud, au centre ou l’Est du continent, dont les citoyens,fortement conscients du l’existence d’un ciment culturel, voient d’abord dans l’Europe une entitéhistorique, une terre – voire la terre – de culture, un lieu de brassage et d’échanges constantsau fil des siècles entre des peuples divers mais ayant un fond commun.

Ces relations ont pu se distendre à certaines périodes de l’histoire, dégénérer en conflits, mais leurancienneté et leur réalité leur apparaissent indéniables.

Les citoyens de tous ces pays ressentent, plus ou moins spontanément, l’unicité d’un modèle quirepose fondamentalement sur des valeurs culturelles et humanistes. Ce modèle opposenotamment l’Europe aux Etats-Unis dont la mentalité collective est largement ressentie commetrès différente et qui, dans certains des pays étudiés, suscitent la critique caricaturale d'un peuplesans histoire, matérialiste, et dépourvu de ces valeurs, en même temps que l'expression d'un vifantagonisme ; c'est le cas en France (dont on connaît la tradition "gaullienne" de défiance à leurégard), en Allemagne (dont les citoyens paraissent avoir profondément évolué sur ce plan depuis10 ans), mais plus encore par exemple dans des Etats-membres comme l'Espagne ou la Grèce,ainsi que dans beaucoup des pays candidats à l'adhésion.

De façon plus ou moins spontanée s’y manifeste une forme d’empathie pour les autresEuropéens – même quand on les connaît mal, qu’on leur prête des défauts, ou des façons de voirsur certains points différentes des siennes.

La force du lien culturel est ressentie avec une particulière intensité dans les pays latins, enBelgique et au Luxembourg, et dans la plupart des pays d’Europe Centrale. Elle l’est un peu moinschez les Allemands (qui aspirent à l’européanité, mais qui sont plus sensibles en même temps auxdisparités), les Irlandais (un peu coupés des autres par l’insularité et par la faible connaissance parbeaucoup d'entre eux des langues des autres pays, mais qui se montrent ouverts aux échanges) etles Finlandais (un peu enclavés dans leur coin de l’extrême Nord-Est du continent, mais trèscurieux et très avides de contacts).

• A l’inverse, dans un petit nombre de pays situés dans la partie Nord de l’Europe, lesconcepts de racines et de proximité culturelles sont beaucoup moins valorisés, et l’existenced’un ciment historique et culturel commun est beaucoup moins présente dans les esprits.

Il s’agit, pour les Etats-membres, du Royaume Uni – dont beaucoup des citoyens interrogésrefusent net de se considérer comme européens – des Pays Bas, du Danemark et (quoique moinsvivement) de la Suède : il y règne une conviction ancrée de la supériorité ou de la spécificitédu modèle de société que le pays a développé avec ses valeurs propres, et une faiblepropension au partage avec d’autres qui tendent à être ressentis comme le menaçant.

L’empathie pour les autres Européens y est faible, notamment pour ceux du Sud aveclesquels la distance psychologique est grande, et envers qui s’affiche même assez ouvertement uneforme de mépris (pour leur absence de sérieux, de sens de l’effort, d’ordre, etc.)

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Dans les pays candidats, certains Estoniens s’en rapprochent, certains Tchèques également,en limitant l’Europe de leurs affinités aux pays les plus développés et les plus organisés du NordOuest du continent – même si par ailleurs ils affirment fortement leur conscience des valeurs del’histoire et de la culture, et de l’opposition sur ce plan entre l’Europe dans son ensemble et lesEtats-Unis. Les Lettons interrogés paraissent quant à eux très repliés sur eux-mêmes, mais peutêtre surtout pour des raisons qui tiennent à leur sentiment de grande fragilité.

On peut observer que les pays, de loin les plus nombreux, du premier groupe, sont en gros ceuxqui ont appartenu, au cours de leur histoire, à de grands ensembles, et qui y ont fréquenté autrui :l’Empire romain, ou byzantin, le Saint Empire romain germanique, celui des Habsbourg, voiremême l’Empire napoléonien en ce qu’il a laissé sa marque sur les structures du droit en dépit de sabrièveté et de son caractère dominateur.

En outre, on note que ceux du second sont des pays caractérisés par la prédominance des valeursd’un protestantisme rigoureux, contrairement à beaucoup des autres imprégnés au moins en partiepar une culture d’origine catholique (ou orthodoxe).

Autre schéma d’interprétation possible enfin, celui qui est proposé par le démographe françaisEmmanuel Todd dans son ouvrage « L’invention de l’Europe » qui distingue 4 types familiauxfondamentaux en Europe : parmi eux, la famille « nucléaire absolue », marquée par la prégnancedes valeurs de liberté et de non-égalité, est caractéristique des populations de l’Angleterre (sauf sapartie Ouest), des Pays Bas et du Danemark (ainsi que du Sud de la Norvège longtemps sousinfluence danoise) ; et c’est, pour lui aussi, la zone géographique de la plus grande réticence à unenotion communautaire forte de l’Europe

Ces hypothèses d’explication historique suggèrent que les distances ici constatées ne sont pasconjoncturelles, mais reposent sur des socles anciens et durables – même si, bien sur, lesentiment de proximité ou d’éloignement entre nations européennes peut varier selon lesmoments.

A cet égard, par rapport à des études similaires réalisées par le même consultant depuis 15ans (au moins parmi les pays européens de l’Ouest), ce fossé Nord-Sud paraît s’être creusé. Lesentiment d’européanité s’est dilué dans les pays du Nord précités ; et, dans des pays d’Europe duSud adhérents récents de l’Union Européenne à l’époque (où cette adhésion signifiait rejoindre lamodernité incarnée par des pays plus au Nord) l’attirance pour les valeurs septentrionales demodernité et d’organisation s’est affadie : sans que s’y exprime d’agressivité à l’égard des peuplesqui les symbolisent, on y note plus nettement qu’il y a 15 ans une distanciation par rapport à desmodes de vie et des façons d’être perçus comme austères, ternes, et manquant de sel et defantaisie.

⇒ Les analyses pays par pays des évocations de l’Europe et du sentiment d’appartenance sontdétaillées dans le Chapitre II.

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CONNAISSANCES ET PERCEPTIONS DE L’UNION EUROPEENNE

Les attitudes à l’égard de l’Union Européenne dans les divers pays étudiés reflètent d’abord les différencesd’intensité du sentiment d’appartenance et de « l’affectio societatis » européenne plus générale, mais il s’y mêled’autres facteurs.

IMAGE GENERALE DE L’UNION EUROPEENNE DANS LES ETATS-MEMBRES

⇒ Les citoyens des pays du Sud géographique se montrent généralement très favorables à l’idée d’uneUnion Européenne forte, ayant pour vocation de rassembler et de fédérer les nations et les Etatseuropéens sur tous les plans ou presque, bien au delà du seul domaine économique, avec l’objectifévident de s’affirmer comme puissance face à ses grands concurrents et adversaires mondiaux, aupremier chef les Etats-Unis.

Les Irlandais les rejoignent dans cette adhésion à une Europe fortement soudée, bien que lesentiment d’opposition aux Etats-Unis y soit moins présent.

Dans tous ces pays, on a clairement conscience des bienfaits qu’apporte l’appartenance à l’Union, et de sacontribution majeure au développement économique et aussi social, les Fonds Structurels étant lamanifestation tangible de la solidarité communautaire.

L’eurofaveur est très forte et pratiquement sans réserve au Portugal et en Irlande. Elle esttempérée dans les autres pays par une relative déception que l’Union ne soit pas assez dans les faitscette entité fusionnelle dans tous les domaines à laquelle on aspire ; en Italie, il y a en outre unetendance à garder des distances par rapport à toute forme d’institution (qui se manifeste d’ailleurs aumoins autant vis à vis des institutions nationales) ; en Espagne et en Grèce, de sourdes frustrations duesau constat du maintien d’un écart de niveau économique sensible avec les Etats plus développés, et aussiau sentiment que le pays compte peu au sein de cette Europe, qu’il n’y est pas reconnu à la hauteur de saréalité, voire que ses intérêts et ses avis y sont quelque peu négligés.

⇒ Ceux de la Belgique et du Luxembourg, traditionnellement pro-communautaires, ont égalementune vision assez fusionnelle et égalitaire de l’Union Européenne, et une conception large de seschamps d’action légitimes – outre qu’ils ont bien conscience que, pour de petits pays, l’appartenance à untel ensemble est une nécessité incontournable pour exister sur la scène internationale. L’Union, sielle est principalement aujourd’hui une construction économique, a et doit avoir un desseinpolitique plus vaste – y compris pour faire poids face aux Etats-Unis

⇒ Les Finlandais et les Autrichiens se révèlent également largement pro-communautaires pour desraisons affectives autant que rationnelles, et ouverts à une Union aux larges champs de compétenceau delà de l’économie. Les premiers, désenclavés par l’adhésion à l’Union , se montrent particulièrementavides d’échanges avec les autres, et cette adhésion est en outre porteuse de sécurité par rapport à ungrand voisin aux tendances naguère dangereusement protectrices ; les seconds , également sensibles à laprésence encore récente du Bloc de l’Est à leur porte, et ayant aussi la mémoire des déchirements de ladernière guerre mondiale, valorisent l’idéal de paix et de coopération, en même temps qu’ilsreconnaissent l’apport de l’Union au plan économique – même s’ils expriment aussi des inquiétudes surcertaines implications de l’adhésion pour leur pays, ou sur son faible poids dans les décisionscommunautaires. Dans l’un et l’autre cas, la conscience est forte en outre de l’impossibilité del’isolement pour des pays de cette taille.

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⇒ Les Français et les Allemands, conscients les uns et les autres du dessein politique originel de laconstruction communautaire (développer la coopération pour éviter le risque de nouvelles guerres)valorisent aussi clairement l’idéal d’une construction communautaire visant à avancer vers l’unitéde l’Europe et le rapprochement de ses pays dans tous les domaines. Les premiers évoquentd’emblée le but évident de renforcement mutuel pour « contrer » les Etats-Unis, ce qui ne constituepas une surprise ; mais on observe également la très forte prise de conscience par les Allemands,depuis 10 ans, du fait que les intérêts, les façons de voir, et les valeurs des Américains ne sontdécidément pas les mêmes que les nôtres.

Dans ces deux pays toutefois, il y a un grand décalage entre ce que l’Union devrait être et ce qu’elledonne à voir d’elle-même aujourd’hui : trop cantonnée dans le domaine de l’économie, fragile de parles désaccords entre (les gouvernements de) ses Etats-membres, dépourvue de vision, complexe et peulisible. Il y manque cruellement un dessein clairement formulé, une stratégie, un fil directeur quipermette de comprendre et d’adhérer pleinement.

En ce qui concerne les Français, ce fil directeur, qui était pour eux d’une clarté limpide à l’époque où laCommission était présidée par l’un des leurs (et des plus respectés dans le pays) qui leur proposait et leurexpliquait le dessein d’ensemble, a complètement disparu.

Chez les Allemands, le même sentiment s’exprime et, de surcroît, on observe de très fortes préventionsà l’égard d’une institution perçue comme lourde, bureaucratique, ne s’occupant que de détails ennégligeant les questions de fond, et coûteuse – avec ici l’idée toujours présente d’une Allemagne« vache à lait » : non opposée à la notion de solidarité, mais pensant payer plus que sa part. Il estmanifeste en outre que « l’affaire Cresson » y a aggravé les soupçons qui pèsent sur l’intégrité del’institution communautaire en général.

⇒ Dans les 4 pays dont les citoyens ont tendance à s’exclure de l’Europe, à ressentir peu d’empathiepour les autres Européens, à se centrer de façon exclusive sur leurs modèles et leurs valeurspropres, ces attitudes générales se traduisent par une forte défiance à l’égard de l’UnionEuropéenne et par une volonté exprimée de contenir son champ d’intervention.

On peut y reconnaître, rationnellement et pragmatiquement, l’appartenance à l’Union Européennecomme utile aux intérêts économiques du pays (de ses entreprises, de ses exportations), mais danstout autre domaine elle apparaît plutôt a priori comme une menace interventionniste, potentiellementporteuse d’atteintes aux valeurs et aux traditions nationales ou de dégradation du modèle de société : toute« harmonisation » tend à être perçue comme étant « par le bas », ou comme contraire aux intérêts du pays.

C’est dans ces pays que sont le plus répandues les caricatures d’une action communautaire qui nese préoccuperait que de mesures inutiles et ridicules, voire attentatoires à la liberté (courbure desbananes, forme des concombres, calibre des fraises, interdiction de la chique, imposition du systèmemétrique … ), la perception d’une bureaucratie tentaculaire, inefficace et dispendieuse, et le soupçongénéralisé de pratiques d’avantages illégitimes, de prébendes ou de corruption.

En ce qui concerne l’image de l’Union Européenne aussi bien que le sentiment général d’européanité, il ya dégradation depuis nos études précédentes (au moins dans les 3 pays déjà membres de l’Union, pourlesquels nous disposons d’évaluations comparatives).

Les Suédois paraissent un peu moins virulents dans leurs critiques.

NIVEAU DES CONNAISSANCES SUR L’UNION EUROPEENNE DANS LES ETATS-MEMBRES

⇒ Le degré de connaissance de ce dont s’occupe l’Union Européenne est très inégal.

Si on l’évalue par la diversité des domaines d’action cités, il apparaît généralement plus grand :

• Dans des pays eurofavorables « du Sud » (Irlande incluse), où même les personnes descatégories socio-économiques moyennes-inférieures mentionnent en fait une grande partie deschamps de l’action publique (sauf en Italie où le flou est plus grand, notamment dans la villemoyenne de province choisie comme second point d’enquête, et en Espagne également dans le lieud’enquête provincial).

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• Dans d’autres pays traditionnellement pro-communautaires, la Belgique et le Luxembourg –ainsi qu’en France mais à un moindre degré.

• Dans les pays les plus récents adhérents, enclins ou non à voir dans l’Union Européenne unebonne chose : Suède, Finlande, Autriche ; le caractère récent de l’adhésion et des débats qu’elle asuscités suffit à l’expliquer.

Il est, de manière générale, plus faible dans les grands pays de l’Union que dans les petits,l’Allemagne et surtout le Royaume Uni étant ceux où la méconnaissance apparaît la plus grande.

⇒ En outre, et surtout, on observe que même des interviewés qui connaissent beaucoup de choses surl’Union Européenne et ses domaines d’action expriment souvent le sentiment d’en savoir peu ou den’avoir que des éléments de connaissance épars – à l’évidence faute de l’expression claire d’une vision,d’un dessein, et d’une stratégie, en résumé du fil directeur évoqué plus haut.

⇒ La méconnaissance des institutions et du système institutionnel est impressionnante.

Elle est relativement moindre au Portugal, en Grèce, en Irlande, en Belgique, au Luxembourg, enFinlande et en Autriche – au moins dans les catégories socio-économiques moyennes-supérieures : enrésumé, dans les petits pays eurofavorables de l’Union ; assez nombreux sont les interviewés qui yidentifient au moins la Commission et le Parlement, qui ont une idée approximative de leurs compositionset de leurs rôles respectifs, et qui ont conscience (même si c’est sans beaucoup de précisions) del’existence de mécanismes institutionnels.

Elle est grande, parfois même abyssale, dans les autres pays, où l’ignorance , les confusions ou les trèsgrandes approximations sont un phénomène général. La Commission et le Parlement ne sont souventconnus que de nom ; ces deux institutions sont parfois confondues entre elles ; leurs rôles et leursresponsabilités sont très flous ; les mécanismes institutionnels sont souvent quasi-totalement ignorés ; toutcela apparaît extrêmement lointain. Cette ignorance et cette distance perçue sont d’autant plus frappantesqu’on les observe autant dans de grands pays comme la France, l’Allemagne ou l’Italie, fondateurs etmoteurs d’une construction communautaire dont le dessein y est valorisé, que dans des payspsychologiquement plus à l’écart.

Globalement, on observe que seuls la Commission et le Parlement – même quand on ne sait guère cedont il s’agit – sont reconnues comme institutions (avec parfois la Cour de Justice, en partie confonduetoutefois avec d’autres instances juridictionnelles européennes ou internationales). Le Conseil desMinistres et, plus encore, le Conseil Européen, sont très largement ignorés ou, quand ils sont connus,sont davantage perçus comme des lieux de rencontres, de palabres ou d’affrontement des intérêtsque comme des institutions participant de manière organisée au processus de décision.

⇒ Les sources de connaissance sur l’Union Européenne qu’évoquent les citoyens interrogés se limitentpour l’essentiel aux médias. Ils n’ont pas conscience d’informations qui leur parviennent desinstitutions communautaires elles-mêmes, ni de leurs autorités nationales, qui leur semblentlargement absentes du débat sur l’Europe dans leur propre pays.

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IMAGE GENERALE DE L’UNION EUROPEENNE DANS LES PAYS CANDIDATS

⇒ Les citoyens des pays candidats à l’adhésion ont généralement une vision large et assez claire de cequ’est l’Union Européenne et de ce à quoi elle tend.

Elle apparaît à la plupart comme une union au sens fort du terme, à la fois économique et politique (etmilitaire, dès aujourd’hui ou potentiellement), qui a pour but le renforcement mutuel dans lesdomaines les plus divers, par le développement de la coopération et l’instauration de règles communes,et l’affirmation de l’Europe en tant que puissance face aux Etats-Unis et aux autres grands pays ouensembles qui existent dans le monde. Cet objectif de mettre l’Europe en position de force face auxEtats-Unis est d’ailleurs souvent perçu comme étant celui qui avait présidé à sa création, avec celui, àl’époque, de faire front devant le Bloc de l’Est et le COMECON dominés par l’URSS.

Implicitement ou même parfois très explicitement (comme en Slovénie, où on est familier avec leconcept), on perçoit bien l’Union Européenne comme un ensemble fédéral ou à vocation fédérale.

⇒ Ceux de 4 des pays candidats étudiés tendent cependant à en avoir une vision plus restrictive, pluslimitée à l’économie, et moins empreinte d’idéal.

C’est le cas des Tchèques (qui n’ignorent pas l’ampleur plus grande du dessein général, mais qui croientobserver un décalage sensible avec la réalité, et qui formulent parfois des critiques de type allemand), desEstoniens (avec une sensibilité un peu scandinave à cet égard), des Lettons (très repliés sur leur crainteset concentrant leur attention sur les problèmes économiques que connaît leur pays), et des Polonais (quiaspirent à une Europe au large champ d’action, mais qui y voient d’abord un club de pays richescherchant à se renforcer mutuellement, parmi lesquels ils craignent d’être éternellement des parentspauvres ignorés ou dédaignés).

⇒ Les attitudes à l’égard de l’Union Européenne apparaissent les plus ouvertes en Slovénie (où on s’ensent déjà proche), en Roumanie (où l’adhésion apparaît à tous comme une nécessité historique, unechance et une ardente obligation), puis à Chypre, en Hongrie et en République Slovaque. LesTchèques n’y sont certes pas défavorables, mais avec un angle de vue plus pragmatique, de même que lesEstoniens d’ailleurs.

Généralement, les attitudes sont plus positives (ou moins assorties de questions et d’inquiétudes) dans lescatégories les plus dynamiques de la population (les couches sociales moyennes-supérieures, les plusjeunes, les plus éduqués, les mieux formés), mais cette règle générale connaît des exceptions.

NIVEAU DES CONNAISSANCES SUR L’UNION EUROPEENNE DANS LES PAYS CANDIDATS

⇒ Globalement, on peut constater que le degré de connaissance des domaines d’action de l’UnionEuropéenne n’est pas moins grand – et qu’il est même plutôt meilleur – que dans la moyenne desEtats-membres.

Il est évident que dans tous ces pays la question de l’adhésion est la question-clé pour l’avenir, et que lescitoyens y sont particulièrement attentifs.

Il est tout aussi clair que l’Europe est, pour leurs citoyens, toute entière incarnée dans une UnionEuropéenne qu’ils aspirent à rejoindre, qu’ils mythifient parfois, tout en ayant en même temps desappréhensions très réelles et même des angoisses profondes dans certains pays.

Les connaissances apparaissent particulièrement étendues chez les Slovènes, les Hongrois, les Tchèques,les Chypriotes, et les Roumains (avec une corrélation logique, mais pas systématique avec le niveausocio-économique et le niveau d’éducation) – mais elles ne sont pas médiocres dans les autres pays.

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⇒ La connaissance des institutions est généralement faible, encore qu’elle apparaisse dans certainspays plutôt meilleure que dans la moyenne des Etats-membres : c’est le cas en Slovénie (dont lescitoyens se montrent étonnement bien informés), en Roumanie (pour une partie seulement des citoyens,mais alors presque « experts » en la matière), des Hongrois de Budapest, de certains Estoniens,Chypriotes, Slovaques, et Polonais (dans les couches sociales supérieures surtout).

Elle semble en revanche très faible en Lettonie, et moyenne seulement en République Tchèque.

Naturellement, cette connaissance est rarement précise, comme d’ailleurs celles des mécanismesinstitutionnels ; mais souvent, on sait ou au moins on pressent, que ces mécanismes existent, et quel’Union Européenne est un ensemble organisé autour de règles et de processus de décision.

Le Parlement Européen est sans doute l’institution la plus connue – ne serait ce que par assimilationavec le Parlement national qui fait au moins supposer un rôle législatif. La Commission, quand elle est àpeu près clairement identifiée (ce qui n’est pas toujours le cas) apparaît logiquement comme unexécutif.

Les visions du Conseil des Ministres et du Conseil Européen et du rôle de ces institutions sont trèsfloues – comme dans les Etats-membres.

⇒ Les sources d’information sur l’Union Européenne qui sont citées par les interviewés, sont d’abord,et souvent uniquement, les médias, tout comme dans les Etats-membres – mais il s’y ajoute un « boucheà oreille » plus actif.

Généralement, les autorités communautaires ne sont pas perçues comme directement émettricesd’information atteignant le grand public – sauf exception remarquable de la Slovénie, où l’Eurobusqui sillonne le pays et la ligne téléphonique gratuite Europhone semblent avoir un réel succès.

Quant aux autorités nationales, ou plus généralement aux personnalités politiques, elles s’exprimentévidemment sur les questions relatives à l’Union Européenne, mais elles sont rarement perçues commesources d’information objectives (toutes disant la nécessité de l’adhésion sans l’expliciter et sans ouvrirle débat sur ses avantages et ses contraintes). Quelques cas ont toutefois cités où leur crédibilité est apriori meilleure (en Slovénie, et en République Tchèque en ce qui concerne la personnalité du négociateurde l’adhésion qui paraît assez bien connu et respecté).

⇒ Les analyses détaillées pays par pays des perceptions de l’Union Européenne et des connaissancesqu’on en a sont détaillées dans le Chapitre III.

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REACTIONS A DES ELEMENTS DE PRESENTATION DE L’UNION EUROPEENNE

⇒ Après discussion sur les thèmes objets des analyses ci-dessus, les participants des réunions organiséesdans les différents pays étaient invités à prendre connaissance successivement de deux documents :

• Le premier, présentant et explicitant en 3 à 4 pages l’historique de l’Union Européenne et lesprincipaux domaines de l’action communautaire

• Le second, décrivant synthétiquement, en 1 page, les 5 principales institutions et le fonctionnementinstitutionnel de l’Union

Les réactions qu’ils suscitent, ayant une grande homogénéité d’un pays à l’autre, sont exposées demanière synthétique (et non pays par pays) dans le Chapitre IV, et il est difficile de les résumerdavantage ; nous exposerons toutefois ici les principaux enseignements qui nous paraissent se dégager decet exercice.

⇒ Ces réactions montrent de manière très nette que lorsqu’on apporte aux citoyens une informationélémentaire, exprimée en langage simple (ce qui ne veut pas dire simpliste) et structurée, faisantsavoir que l’Union Européenne fait des choses qui les concernent, proposant un fil directeur etfaisant sentir l’articulation entre les différentes politiques communautaires, elle intéresse et elle estbeaucoup plus crédible qu’elle ne le croit elle-même.

Dans un grand nombre des groupes, les personnes réunies ont demandé à pouvoir conserver cesdocuments, en exprimant leur satisfaction d’avoir « enfin compris quelque chose de clair » sur l’UnionEuropéenne.

Dans plusieurs pays pourtant extrêmement réticents, la présentation de ces textes a partiellement« retourné » bon nombre des attitudes négatives à l’égard de l’Union, ou au moins amené à s’interrogersur les stéréotypes qu’on pouvait avoir à son sujet : c’est le cas en Allemagne, aux Pays Bas, et moinsnettement au Royaume Uni et chez quelques Danois et Suédois, pour ce qui concerne les Etats-membres.Dans les pays candidats, les europhiles tièdes ou euroneutres tendent à évoluer vers une adhésion mesuréeplus positive, et les europposants retiennent au moins un certain nombre de points positifs qu’ilsignoraient ou négligeaient. Dans les uns comme dans les autres, les eurofavorables en ressortent mieuxarmés pour exprimer et justifier leur position.

Mais il est manifeste qu’une telle information n’a jamais été portée à la connaissance de la trèsgrande majorité des citoyens, ni dans les pays candidats, ni dans les Etats-membres.

⇒ Entre autres aspects, cette analyse met en évidence :

• L’intérêt que suscitent dans la plupart des pays toutes les actions communautaires quicontribuent à bâtir une Europe plus soudée : monnaie unique, stimulation des coopérationsentre Etats-membres, politiques structurelles quasi-ignorées en dehors des pays « du Sud » (où leurexistence ne peut passer inaperçue), législation en matière de santé publique, d’environnement, deprotection du consommateur, de normes sociales, lutte en commun contre la criminalité,construction d’une défense commune, etc.

Dans les pays les plus eurosceptiques ou eurorésistants, les réticences demeurent naturellement,mais sensiblement atténuées.

A l’inverse, il est clairement plus difficile de faire adhérer à la politique de la concurrence (dontbeaucoup continuent à douter qu’elle puisse être rendue vraiment « loyale », ou simplement queles entreprises du pays puissent y résister), à son prolongement dans le cadre de la mondialisation,ou à une politique agricole complexe comprise de manière ambivalente : faire comprendre leurlogique et leur articulation avec les autres politiques s’avère plus ardu.

• La possibilité de faire assimiler au citoyen moyen des bases très simples de droitconstitutionnel communautaire.

La présentation qui était proposée de la Commission comme exécutif, à l’instar d’ungouvernement, et d’un législatif à deux branches formées du Parlement et du Conseil, clarifiedes choses jusque là très floues et ne suscite pratiquement aucune levée de boucliers.

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Parmi les informations qui étaient apportées, celle de la neutralité de la Commission et del’indépendance des Commissaires par rapport à leur pays d’origine est entièrement nouvellepour beaucoup, et très positive – ce qui amène à relativiser singulièrement la « critiquebureautique » du pouvoir d’un organisme non élu. Dans la période actuelle de défiance croissanteà l’égard de la politique traditionnelle, de suspicion à l’égard des élus, et de valorisation desinstances de type judiciaire, un tel statut apparaît plus rassurant que l’inverse ; et les réactionsunanimement positives sur le rôle de la Cour de Justice vont dans le même sens.

De fait, de toutes les institutions, la Commission est, après explication de son statut et de sonrôle, celle qui ressort de cet exercice comme la plus crédible. Le Parlement, quoique restantentaché du discrédit qui affecte aujourd'hui généralement les élus, voit également son imagerenforcée ; mais les informations apportées suffisent rarement à accréditer le Conseil desMinistres, et surtout le Conseil Européen, comme de vraies institutions qui font avancer larésolution des problèmes ou qui tracent des lignes directrices.

⇒ Un dernier texte (testé à l'initiative du consultant) était soumis aux participants des groupes enconclusion des réunions, présentant la Commission comme moteur de l’avenir de l’Europe, au nom,en résumé, des idées :

• Que beaucoup de problèmes nécessitent être traités à un niveau plus global que le niveau national

• Que sa composition plurinationale la fait bénéficier de la diversité des points de vue et desexpériences

• Que sa neutralité et son indépendance lui confèrent, a priori, objectivité et capacité à proposer desmesures parfois difficiles mais nécessaires.

L’analyse détaillée des réactions à ce texte est rapportée dans le Chapitre VIII.

Globalement, elle montre qu’un positionnement fort et ambitieux de la Commission, pour peu qu’ilsoit explicité, rencontre un agrément très large.

Dans les Etats-membres les réserves subsistent, mais pas systématiquement, en Allemagne, au RoyaumeUni et en Suède, mais même les Néerlandais et les Danois, pourtant fortement braqués au départ contrel’Union Européenne et la Commission qui l’incarne plus que toute autre institution, adhérentmajoritairement à cette présentation.

Dans les pays candidats, en dépit du maintien de certaines réserves également en République Tchèque, enPologne et en Lettonie, les réactions largement positives des interviewés montrent également lapossibilité d’un positionnement fort de la Commission comme éclaireur et coordinateur pour l’avenir del’Europe – pour autant qu’on évite de donner l’impression d’une « mise sous tutelle ».

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ATTENTES A L’EGARD DE L’UNION EUROPEENNE

⇒ Les attentes qui s’expriment apparaissent également assez homogènes d’un pays à l’autre ; elles sontprésentées sous la forme d’une synthèse générale dans le Chapitre V

⇒ Elles sont nombreuses et fortes, et pour certaines largement répandues dans les différents pays. Onpeut en gros les classifier comme suit :

• Attentes suscitées par la défaillance ou l’insuffisance des pouvoirs publics nationaux.

Elles s’expriment notamment dans les Etats-membres « du Sud » de l’Europe en matière sociale,dans les domaines de la protection des consommateurs, de la santé, du système éducatif, desservices publics de base – mais aussi au Royaume Uni dont les citoyens font le constat d’unedégradation inquiétante dans leur pays.

Elles sont encore plus fortes dans les pays candidats, sur les mêmes sujets comme sur celui dudéveloppement économique et du niveau de vie.

• Attentes de soutien au développement économique et social

Il s’agit des politiques de cohésion. Dans les Etats-membres qui en sont le plus bénéficiaires, onattend qu’elles se poursuivent, du moins tant que le « rattrapage » n’est pas effectué. Dans d’autresEtats-membres dont les citoyens découvrent leur existence, on en appelle à leur concours pourpallier des défaillances de l’Etat national (Royaume Uni). Dans les pays candidats, elles sontévidement extrêmement fortement attendues, avec toutefois des doutes sérieux dansplusieurs d’entre eux sur la volonté des Etats-membres actuels de leur accorder cettemanifestation de solidarité.

• Evidence de la nécessité du niveau communautaire pour traiter des problèmes qui sont paressence trans-frontières.

Il en va ainsi de la préservation de l’environnement, de la protection de la santé publique, et decelle du consommateur (domaine où la crédibilité de l’Union pâtit cependant sérieusement de lagestion de la crise de l’ESB), de la lutte contre la criminalité ou du contrôle de l’immigration –tous domaines qui apparaissent essentiels et prioritaires aux citoyens.

• Evidence de la nécessité de renforcement général de l’Europe sur la scène mondiale

C’est l’objet bien compris, dans la plupart des pays, membres actuels ou candidats, del’Union Européenne, dont on attend qu’elle sache s’opposer efficacement aux viséesantagonistes américaines (et secondairement à celles d’autres grands concurrents).

Il inclut tout autant les domaines économique, monétaire, et technologique, que la sphère culturelleet la construction d’une défense autonome par rapport aux Etats-Unis et à l’OTAN.

Pour le premier de ces domaines (l’économie), les citoyens des pays candidats sont dansl’immédiat cependant moins sensibles aux enjeux mondiaux qu’aux conséquences concrètes del’ouverture intra-européenne qui se dessine et qui suscite chez eux au moins autant de craintes qued’espoirs.

• Attentes de traitement économique équitable

Ce qui est en cause ici est l’instauration d’une véritable loyauté de la concurrence dont beaucoup,on l’a vu, doutent, et dans les pays candidats une demande de protection minimale de leurséconomies, qu’ils savent très fragiles.

• Attentes de mobilité et d’échanges

Il s’exprime à l’égard de l’Union des attentes manifestes dans ce domaine, qu’il s’agisse de réellemobilité des travailleurs, d’harmonisation et de reconnaissance mutuelle des niveaux des diplômeset des qualifications, d’échanges éducatifs et culturels, ou d’aide à la préservation du patrimoine.Elles apparaissent particulièrement fortes dans les pays candidats à l’adhésion.

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ATTITUDES A L’EGARD DE L’ELARGISSEMENT DE L’UNION EUROPEENNE ET DE LA PERSPECTIVED’ADHESION DE NOUVEAUX PAYS.

⇒ Dans les Etats-membres, les attitudes à l’égard de l’élargissement apparaissent directement liéesaux attitudes générales à l’égard de l’Europe et au sentiment d’européanité analysés dans le ChapitreII.

• Dans la plupart des pays – ceux qu’on a définis dans ce chapitre comme constituant un « Sud »au sens très large du terme, la légitimité de l’accueil des pays candidats n’est pas contestée, etelle est la plus fortement ressentie dans les pays du Sud géographique, les moins développéséconomiquement, qui démontrent une particulière empathie et une particulière solidaritéavec des pays dont on comprend d’autant mieux les difficultés qu’on les éprouve ou qu’on les aéprouvées soi-même.

Si, sans doute, les citoyens de ces pays ne seraient pas prêts à accepter une disparition ou uneréduction drastique des Fonds Structurels dont ils bénéficient, au moins se déclarent-ilsspontanément prêts à participer à l’effort commun au profit des nouveaux entrants.

Naturellement, l’arrivée de nouveaux Etats-membres suscite aussi de réelles inquiétudes, pour lepays ou collectivement pour l’Union (dont on craint parfois qu’elle ne devienne « ingérable ») –mais l’idée de bénéfices nationaux et communautaires est également présente.

• A l’inverse les citoyens du « Nord » étroit, au sens du Chapitre II, Néerlandais, Danois, etSuédois, se montrent particulièrement résistants à un élargissement auquel ils s’opposent ouqu’ils n’acceptent qu’à contre-cœ ur comme inévitable – en n’y voyant guère que des effetsnégatifs pour eux, et en se montrant, pour beaucoup d’entre eux, clairement inaccessiblesaux considérations de solidarité à l’extérieur de leurs propres frontières. Pas plus qu’eux, lesBritanniques ne se déclarent très disposés à « payer » pour de futurs nouveaux adhérents enverslesquels ils affichent plutôt leur indifférence.

⇒ Dans les pays candidats, se dégagent des traits communs mais aussi des différences sensibles d’unpays à l’autre et parfois d’une catégorie à l’autre de la population.

• Parmi les pays avec lesquels les négociations en vue de l’adhésion ont été engagées le plus tôt,les Slovènes s’y révèlent dans l’ensemble très favorables, malgré des réserves dans la partie lamoins jeune et la moins dynamique de la population ; il en va en gros de même à Chypre, et enRépublique Tchèque avec des considérations plus pragmatiques et moins affectives tout commeen Estonie ; les Hongrois voient bien l’adhésion comme une nécessité qui suscite d’ailleurs degrands espoirs, mais aussi de fortes craintes ; quant aux Polonais, les secondes dominentnettement chez eux sur des espérances que leur très grand pessimisme les retient en quelque sortede formuler.

• Parmi les pays avec lesquels l’ouverture de ces négociations est plus récente, le contraste estextrêmement grand entre des Roumains unanimes et ardents en tout à la perspective derejoindre « la famille » européenne (même s’ils pressentent de grandes difficultés étant donné ledélabrement et la désorganisation de leur pays), des Slovaques aux attitudes contrastées, maissans guère d’opposition radicale à l’adhésion, et des Lettons particulièrement angoissés, surses conséquences pour un pays économiquement très fragile, et plus encore pour le maintien de sacapacité de décision autonome : le mot d’Union va même jusqu’à y réveiller le spectre de« l’Union » soviétique – sans toutefois bien sur le risque de menace par la force : ce n’est qu’avecbeaucoup de réticences qu’une majorité paraît accepter le caractère inéluctable de l’appartenance àl’Union Européenne.

• Très généralement, les citoyens des pays candidats paraissent vivre sans impatience la duréedu processus conduisant à l’adhésion, et se montrent conscients de l’ampleur de la préparationqui reste à accomplir.

⇒ On trouvera dans le Chapitre VI l’analyse détaillée des attitudes relatives à l’élargissement et à laperspective d’adhésion.

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ATTENTES D’INFORMATION SUR L’UNION EUROPEENNE

⇒ Nous résumerons ici les résultats qui sont exposés plus en détail dans le Chapitre VII de ce rapport.

⇒ On peut faire le constat d’un besoin d’information fortement et spontanément exprimé par beaucoupdes citoyens des pays candidats, et d’attentes inégalement fortes chez ceux des Etats-membres,avant qu’on n’attire leur attention sur les domaines d’action d’une Union Européenne qu’ils perçoivent apriori comme abstraite et lointaine dans certains pays au moins, et qui y suscite moins une demandeactive d’en savoir plus : dans ces pays (en gros, les moins europhiles ou ceux dans lesquels l’image del’Union en tant que telle est la moins bonne), les attentes se développent cependant à partir du moment oùon a commencé à éveiller l’intérêt en faisant sentir que ce que fait l’Union les concerne.

⇒ En ce qui concerne le contenu de l’information attendue, il s’agit :

• De faire savoir et de faire sentir en quoi les actions communautaires concernent le pays et lecitoyen dans sa vie courante

Cette demande est formulée partout, et avec une force particulière par les citoyens des Etatscandidats, très soucieux de se faire une opinion eux-mêmes en sachant plus clairement quels sontles effets positifs attendus de l’adhésion (dont ils entendent parler) mais aussi leurs contreparties(que les responsables locaux ont peu tendance à expliciter). La clarification des uns et des autres,réduisant les incertitudes, pourrait aussi réduire des inquiétudes en partie irrationnelles.

• De donner les éléments d’une meilleure « culture générale » des choses de l’Union, de sesprojets, de ses actions, de ses décisions, de son fonctionnement.

Certes, tous ne montrent pas le même appétit « culturel » de connaissance de l’Union, notammentdans les pays les plus eurosceptiques ; mais globalement on constate l’existence d’une envie d’ensavoir plus et de mieux comprendre plus répandue qu’on ne l’aurait imaginé, et en même tempsd’un désir de discussion et de débat (totalement insatisfait aujourd’hui).

Dans l’un et l’autre cas, il faut naturellement fournir des illustrations concrètes et tangibles del’Union Européenne et de ses actions.

⇒ En ce qui concerne la forme et le ton de la communication, un consensus très large s’exprimelogiquement pour rejeter ce qui est austère, ennuyeux, tout jargon technocratique, toute « languede bois » politique, et pour réclamer des présentations vivantes qui font sentir autant que comprendre,touchant l’affectif autant que le rationnel.

Les réactions enregistrées, par exemple, à l’idée de visites physiques ou virtuelles de la Commissionconfirment bien le besoin ressenti de contacts directs avec des personnes « en chair et en os », et deformules de présentation qui mêlent apport d’information, communication d’impressions plus subjectives« qui donnent envie », et possibilité d’échanges et de dialogue.

⇒ Pour ce qui est des canaux et relais envisageables de l’information sur l’Union Européenne, onobserve que :

• Les personnes interviewées évoquent logiquement surtout les médias, tout en reconnaissantqu’ils pratiquent souvent le « zapping » réel ou mental lorsqu’ils « tombent » sur des informationscommunautaires évidemment moins séduisantes que des programmes de distraction – maisbeaucoup d’entre elles font alors un effort de précision et d’imagination pour suggérer des formesou des plages horaires qui forceraient leur attention

• Internet comme moyen d’accès à l’information est évoqué par une minorité substantielle(plus faible dans les pays candidats) – la limite principale de ce media étant que son utilisationprésuppose un intérêt suffisamment actif au départ pour la matière communautaire pour qu’on s’yconnecte.

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• Dans les Etats-membres actuels au moins, y compris dans les plus eurosceptiques, elles suggèrentsouvent d’elles-mêmes que les enfants soient « imprégnés » d’Europe et d’Union Européenneà l’école dès le jeune âge. C’est moins le cas dans les pays candidats dont les citoyens adultesinterrogés ressentent en priorité le besoin d’être informés eux-mêmes.

• Même si elles en parlent assez rarement spontanément faute d’imaginer que cela soit faisable, ellesseraient en fait très favorables à des débats locaux et ouverts auxquelles elles pourraientparticiper – les réunions auxquelles elles viennent de prendre part en étant l’illustration frappante.

• Parmi une série « d’acteurs » ou de « médiateurs » possibles de l’information communautaire quileur étaient proposés, le personnel politique national est très souvent discrédité a priori. L’idéed’information par un Commissaire européen, malgré des réserves qui demeurent, est reçuebeaucoup plus favorablement – ce qui confirme le potentiel de crédibilité de la Commission.

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REACTIONS A L’EGARD DE L’ETUDE COMMANDITEE PAR LA COMMISSION

⇒ Informés, tout à la fin des réunions, sur le fait que cette étude a été réalisée à la demande de laCommission Européenne, leurs participants, dans tous les pays, se révèlent quasi-unanimes à saluercette initiative.

Leurs réactions, explicitées dans le Chapitre VIII, montrent qu’ils ont conscience d’y avoir apprisbeaucoup, qu’ils interprètent cet exercice comme la matérialisation d’une volonté d’écoute et detransparence de la part de la Commission, voire comme l’expression d’un respect du citoyen, et qu’ilsvalorisent également fortement, au delà de l’apport d’information qui leur a été donné, le fait d’avoir pu« pour la première fois » discuter et échanger avec d’autres leur avis et leurs impressions.

Ainsi qu’il a été dit plus haut, on constate ici qu’il est possible, en quelques heures, de fairesensiblement évoluer les attitudes, même parfois très réservées au départ, vers une meilleurecompréhension et une plus grande adhésion aux vertus de l’Union Européenne, en montrant aucitoyen qu’on veut se rapprocher de lui ; ou, pour formuler autrement cette conclusion, que laCommission a beaucoup moins à craindre qu’à espérer du débat.

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CHAPITRE I : LE CONTEXTE :

SENTIMENTS SUR LA SITUATION DU PAYS ET

SES PERSPECTIVES POUR LES ANNEES A VENIR

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Avant d’amener les participants des groupes à discuter de l’Europe (sujet de l’étude dont ils n’étaient pas informés àl’avance), on les invitait à parler « de la situation de leur pays, de ce qui va bien, de ce qui va mal, de la façon dont il aévolué ces dernières années, et de la façon dont il pourrait évoluer à leur avis, des principaux défis et enjeux pour leur paysdans les 10 ou 20 ans qui viennent ».

L’objet de ce thème introductif était à la fois de connaître, et de prendre en compte pour la suite des investigations, leclimat général d’optimisme ou de pessimisme qui imprègne les perceptions des citoyens, et d’observer dans quelle mesurele thème de l’Europe est spontanément présent dans leurs discours à ce stade.

I.1. SENTIMENTS SUR LA SITUATION ET LES PERSPECTIVES DU PAYS DANS LES ETATS MEMBRES

I.1.1 PAYS « DU SUD » DE L’UNION EUROPEENNE, PRINCIPAUX BENEFICIAIRES DES POLITIQUES DE COHESION

⇒ Portugal

Le constat dominant dans tous les groupes portugais est celui d’une profonde et rapide évolution dupays depuis 10 à 20 ans, dont les effets positifs dans tous les domaines sont clairement ressentis parles citoyens : amélioration des infrastructures au sens large (routes, télécommunications modernisées etaccessibles au plus grand nombre, santé, éducation … ), du pouvoir d’achat et des conditions de vie,augmentation du niveau culturel et éducatif, amélioration des possibilités de formation professionnelle,des droits sociaux, de l’information …

L’adhésion à l’Union Européenne est spontanément reconnue comme ayant été la cause principaleet l’élément moteur de cette évolution (même si certains évoquent aussi le préalable nécessaire de laRévolution des Œ illets, pour ouvrir les esprits, les idées et la parole).

Cela ne veut pas dire que les Portugais soient béats lorsqu’ils comparent leur pays avec « les autrespays européens », ni qu’ils n’aient pas conscience de retards, d’insuffisances, ou de problèmesnouveaux : système de santé encore insuffisant, système éducatif mal adapté au marché du travail etayant subi trop de réformes mal coordonnées, justice trop lente, problèmes de sécurité liés (sans racisme)à la difficulté de l’intégration de communautés immigrées …

Lorsqu’ils se projettent dans l’avenir, ils se révèlent pour la plupart prudemment optimistes, avecl’espoir d’une poursuite du développement, de l’amélioration des conditions de vie, du rapprochementavec le niveau des autres pays européens.

La réalisation ou la non-réalisation de ces espoirs dépendra, dans leur esprit, des moyens de formation quiseront mis en œuvre, de la capacité du Portugal à être moins bureaucratique (domaine où on reconnaît desprogrès, encore insuffisants), de la capacité des Portugais eux-mêmes à s’ouvrir à la modernité : end’autres termes, ils ont conscience que le jeu est pour l’essentiel dans leurs propres mains.

⇒ Grèce

Contrairement aux Portugais, les Grecs interviewés font davantage état de problèmes qui lespréoccupent que d’avancées du pays ces dernières années.

Si ceux des groupes sociaux moyens-supérieurs reconnaissent une évolution positive du niveau de vieaccompagnant un développement des technologies et de leur usage, c’est nettement moins le cas desgroupes moyens-inférieurs qui évoquent surtout leur pessimisme devant la montée des prix, celle duchômage, l’importance croissante du problème de la drogue – tous s’entendant en outre pour dénoncer lesinsuffisances du système de santé et pour douter que l’augmentation du niveau économique entraînenécessairement l’amélioration de la qualité de vie.

Plus profondément, beaucoup apparaissent inquiets et déstabilisés à la perspective de lamondialisation de l’économie et plus généralement de l’internationalisation des choses : risque dedomination des grandes entreprises multinationales, développement craint de l’immigration enprovenance des pays de l’Est, implications du conflit yougoslave, avec la découverte toute récente del’utilisation d’armes à uranium appauvri, etc. – toutes évolutions qui sont hors de contrôle de la Grèceet qui s’imposent à elle.

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L’Union Européenne en tant que telle est peu évoquée à ce stade.

⇒ Espagne

Pour la plupart, les citoyens espagnols interrogés font spontanément mention de l’évolution positivequ’a connue leur pays depuis une vingtaine d’années. Ceux des groupes moyens-supérieurs tendent àle faire en termes conceptuels de modernisation, d’ouverture et de développement économique, ceux desgroupes moyens-inférieurs davantage en termes personnels concrets d’amélioration du niveau de vie, duniveau éducatif, etc.

Les uns et les autres, avec des tonalités ou des accents différents, s’entendent bien en fait sur l’idée d’unprogrès à la fois politique (depuis la rupture avec le franquisme) économique et social (avec parexemple la libération des femmes et leur intégration dans le monde du travail), comme sur celle del’influence internationale plus grande d’une Espagne naguère isolée et autarcique (avec l’entréedans l’Union Européenne et dans l’OTAN).

Ces constats positifs s’accompagnent toutefois d’une frustration quant au statut de l’Espagne auxyeux des pays européens situés plus au Nord et plus puissants, et au comportement toujours quelquepeu supérieur de ces pays à son égard.

Dans ce contexte, ils regardent l’avenir avec davantage de questions que de certitudes :

• Quant à l’évolution de la construction européenne et à la constitution d’une identité européenneencore à définir. L’Euro leur apparaît sur ce plan comme un développement majeur et hautementsymbolique, un « point de non-retour » de l’intégration communautaire – même si son arrivéeconcrète suscite des inquiétudes.

• Quant à la montée de l’immigration, phénomène nouveau qui entraîne des tensions, et que lesautorités nationales ou locales ne paraissent pas maîtriser.

• Quant au terrorisme de l’ETA, dont le retour au premier plan est source d’incompréhensionangoissée – et pour lutter contre lequel on en appelle d’ailleurs à la coopération avec les autrespays européens.

• Quant à la maîtrise de l’évolution technologique, l’homme donnant l’impression de jouer àl’apprenti sorcier avec les organismes génétiquement modifiés, le clonage d’animaux, laperspective d’applications à l’homme des découvertes génétiques…

Un peu à l’instar des Grecs, même si leurs propos se concentrent sur des objets en partie différents, lesEspagnols paraissent soucieux des conséquences des mutations extrêmement rapides etperturbantes du monde actuel, au delà des questions liées directement à l’Europe.

⇒ Italie

Les Italiens de Milan comme de la ville moyenne d’Alessandria dressent quant à eux un constat plutôtnégatif de la situation de leur pays, toujours affecté à leurs yeux d’une bureaucratie publiqueomniprésente, inefficace et sclérosée, et de la médiocre qualité du personnel politique dans son ensemble.

Comme les Espagnols, ils s’affligent de la faiblesse internationale de leur pays mais, à leur différence,ils l’attribuent aux défauts purement nationaux qu’ils dénoncent, en se montrant disposés d’ailleurs àune sorte de mea culpa collectif (l’insuffisance de rigueur et de sens civique de la mentalité italienne).

Parmi les problèmes concrets qui les préoccupent on trouve celui de l’immigration et de la gestion jugéetrop permissive de ce phénomène par les autorités publiques (en comparaison notamment de paysgermaniques estimés plus stricts).

La plupart ont une vision assez pessimiste de l’avenir en pensant à ces problèmes dont ils ne voientpas venir la solution, mais aussi à la même incertitude qu’en Espagne ou en Grèce sur la capacitédes hommes à maîtriser le progrès technologique (en référence ici à l’affaire des armes à l’uraniumappauvri de l’OTAN)

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⇒ Irlande

Les interviewés irlandais ont tous clairement conscience des progrès spectaculaires que le pays aaccomplis en matière de croissance économique, d’augmentation de la prospérité générale, dedéveloppement de l’emploi (particulièrement frappant et symbolique pour un pays qui a été longtempsune terre d’émigration massive faute de travail pour tous).

Ce constat est effectué sans réserves dans les groupes moyens-supérieurs, mais avec davantage dequestions dans les autres, où on évoque la contrepartie de cette modernisation à pas de géant entermes d’impact sur la qualité de vie, de pression au travail et à l’efficacité, etc.

Les uns et les autres envisagent l’avenir sans angoisse, mais les yeux ouverts : chez les premiers, enparlant du nécessaire maintien de la compétitivité irlandaise pour pouvoir lutter économiquement contreles pays à bas coût de main d’œ uvre et conserver dans le pays les entreprises américaines qui s’y sontimplantées ; chez les seconds en s’inquiétant plus concrètement de savoir si le miracle du « tigreceltique » va durer, et des conséquences qu’aurait sa fin pour chacun dans vie personnelle.

Le thème de l’Europe n’est guère spontanément présent dans le cours de cette première partie desdiscussions.

I.1.2 PAYS « DU NORD », MEMBRES ANCIENS DE L’UNION EUROPEENNE

⇒ France

Les jugements des citoyens français sur la situation de leur pays apparaissent mitigés.

Dans la ville de province comme à Paris, et dans les deux groupes socio-économiques, on prend acte dela reprise économique qui semble se confirmer et du recul du chômage qui s’ensuit, en même tempsqu’on valorise le maintien d’un niveau de protection sociale qu’on croit plus élevé « qu’à l’étranger »et d’une qualité d’éducation dans l’ensemble bonne.

En même temps, on dénonce volontiers les pesanteurs administratives d’un pays qui montre de l’inertie àse réformer, la lourdeur de la fiscalité, la lenteur de la justice – ainsi que « les affaires », causes d’undésenchantement à l’égard du monde politique et, plus souterrainement, signe peut-être d’une perte plusgénérale du sens des valeurs dans la société française.

Globalement, on voit la France comme un pays qui a de réels atouts, qui est économiquement fort, à lapointe même dans certains domaines, mais qui peine et renâcle quelque peu devant des mutations quis’annoncent. Les interviewés parisiens du niveau moyen-supérieur notent cependant plus positivementl’ouverture progressive du pays vers l’extérieur (et son ouverture à l’Europe).

Quant à l’avenir, si l’espoir s’exprime d’une poursuite de la reprise, d’une bonne santémacroéconomique, d’une croissance de l’emploi, et s’il y a bien conscience par ailleurs de l’impossibilitéde l’isolationnisme aujourd’hui, la mondialisation inquiète, l’évolution de l’Europe et la place qu’ytient la France sont objets d’incertitudes, l’Euro est source de confusion pour certains.

La crainte d’un retour de la récession économique existe. Surtout, l’internationalisation ou lamondialisation en cours – phénomène sur lequel on semble n’avoir pas de prise en tant qu’Etat national –laisse perplexe et inquiète quant à ses effets éventuels sur le tissu social et les acquis sociaux (notammentdans les groupes socio-économiques moyens-inférieurs).

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⇒ Belgique

On observe dans ce pays un net contraste entre les différents groupes.

L’optimisme est dominant chez les participants du groupe anversois de niveau socio-économiquemoyen-supérieur, pour ce qui concerne leur situation personnelle aussi bien que celle du pays. Lesproblèmes qui existent, et qu’ils ne nient pas, tendent à être considérés sur un plan général plutôtque comme susceptibles de les affecter personnellement : déséquilibre démographique et sociologiqued’un pays dont la population vieillit et dont la classe moyenne se réduit, avec un écart plus grand entre lesriches et les pauvres, diminution de la convivialité par manque de temps, dette de l’Etat et inquiétude surl’avenir des retraites, manque de personnel dans les hôpitaux, problèmes de la drogue, problème créé parles demandeurs d’asile…

Certains des mêmes problèmes sont également évoqués par leurs homologues bruxelloisfrancophones (montée de la pauvreté, problème des réfugiés « qu’on ne peut pas tous accueillir »… )ainsi que l’accroissement de la criminalité chez des jeunes « sans repères », les défaillances de la justicedans « l’affaire Dutroux », les succès de l’extrême droite en Flandre, ou encore la sécurité alimentaireavec la maladie de la vache folle. Dans l’ensemble, sans être non plus fortement inquiets pour eux-mêmes, ils sont nettement plus pessimistes pour le pays et son avenir.

Les deux groupes de niveau moyen-inférieur affichent un pessimisme plus ancré pour le pays commepour eux-mêmes.

Dans le groupe flamand, on retrouve les préoccupations sur la faiblesse de l’Etat, la dette publique et lesimpôts qui en découlent, l’avenir des retraites ou le problèmes des réfugiés – avec en outre une mise encause de la domination du capitalisme et de l’argent aussi bien que de la perte des valeurs et desrepères dans la société.

Dans le groupe francophone de Namur, les participants se montrent particulièrement sensibles auproblème de l’emploi, aux surqualifications exigées des jeunes, aux difficultés pour les femmes deretrouver un travail après avoir élevé les enfants – mais il y a là aussi une mise en cause de l’Etat(favoritisme dans l’attribution des postes) ainsi que de la domination des valeurs de l’argent dans lamentalité collective. On y reconnaît toutefois que la Belgique est loin d’avoir à ces égards la pire dessituations en Europe.

Certaines des questions qui sont évoquées ont clairement une dimension européenne, mais l’Europe estpeu évoquée spontanément comme un élément majeur du présent et de l’avenir du pays – peut être enpartie parce que cela relève de l’évidence pour les Belges.

⇒ Luxembourg

Les deux groupes interrogés sont assez homogènes dans leur appréciation de la situation du pays.

Dans l’ensemble, on y fait le constat d’une situation économique actuellement favorable (malgré desinquiétudes sur le montant de la dette publique) et d’une situation enviable du système de protectionsociale par rapport à d’autres pays – tout en pensant parfois que l’écart s’accroît entre les plus riches et lesplus pauvres.

Pour l’avenir, les craintes se concentrent sur :

• Le maintien ou non de la bonne santé économique ; dans le groupe moyen-supérieur plusparticulièrement, l’avenir de l’agriculture et du secteur bancaire, forme de « mono-industrie »

• L’éducation et la formation des jeunes

• Le maintien de la qualité de la vie

• La faiblesse des contrôles à l’entrée dans le pays (groupe moyen-inférieur)

• Parfois l’esprit des politiciens à la recherche avant tout de leur intérêt personnel (groupe moyen-inférieur)

En résumé, dans une situation présente peu alarmante, les Luxembourgeois interrogés ne semblentguère s’exprimer, dans leurs propos initiaux, qu’en termes d’espoirs de conservation de leursacquis.

L’Europe n’est pas un thème spontanément évoqué en tant que tel – peut être, comme en Belgique, parcequ’elle revêt pour eux un caractère évident.

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⇒ Allemagne

Les différences sensibles enregistrées respectivement dans les groupes des Allemands interrogés à l’Ouestà Cologne et à l’Est à Leipzig renvoient au fossé persistant entre les deux parties de l’Allemagne :optimisme majoritaire à l’Ouest où on se montre confiant dans la puissance économique allemandegénératrice de prospérité, angoisses existentielles à l’Est où domine le spectre du chômage, de l’absencede perspectives pour la génération montante.

La diminution de ce fossé apparaît comme le défi prioritaire qui est posé à la nation de façon lancinanteaux Allemands à l’Est, cette question étant également évoquée à l’Ouest mais de manière plus abstraite etplus secondaire. Les différents problèmes qui se présentent au pays sont souvent les mêmes vus deCologne ou de Leipzig, mais prennent dans la seconde ville une intensité généralement beaucoupplus forte :

• Montée de la criminalité, angoisse omniprésente à Leipzig, exprimée plus modérément à Cologneen termes de crainte de dégradation des valeurs morales (dans la vie publique ou privée)

• Problèmes de l’immigration, dans le contexte plus général de la mondialisation, des relations NordSud, et de la perspective de l’élargissement de l’Union Européenne avec la crainte associée d’une« déculturation » de l’Allemagne. A l’Est la peur d’invasion de réfugiés économiques ou de maind’œ uvre à bon marché est fortement présente.

• Craintes diffuses des effets de la mondialisation sur le système social allemand – et craintesspécifiques sur l’avenir du système de retraites dans un pays vieillissant.

• Crise de l’ESB , révélatrice des conflits entre décisions nationales et européennes et de l’incapacitéde l’Europe à régler efficacement un problème transversal à tous les pays.

La question de l’Europe est directement ou indirectement présente dans ces thèmes et dans la façondont les Allemands voient également d’autres défis de l’avenir pour leur pays : le passage à l’Euro (avecdes visions contrastées), la préservation de l’environnement (à Cologne), l’élargissement de l’UnionEuropéenne en tant que tel.

⇒ Pays Bas

Les Néerlandais de tous les groupes manifestent un optimisme général, eu égard d’abord au contextede bonne santé économique du pays, et aux réformes jugées dans l’ensemble positives des structureséconomiques avec la poursuite du mouvement de privatisations.

Certains éléments de leurs constats sont cependant négatifs : les problèmes du système de santé et dusystème éducatif, qui manquent de moyens budgétaires et humains ; et, plus généralement, le contre-coupnégatif d’une évolution économique et technologique très rapide pour les individus (pression croissante,pour rester au niveau, stress) et pour la société (individualisme).

Parmi les enjeux et les problèmes pour l’avenir, l’Euro est cité au premier chef, essentiellementcomme source de crainte : monnaie faible, par rapport au dollar (et au florin), monnaie entachée de laparticipation à la zone Euro de pays de l’Europe du Sud économiquement faibles, au détriment de lastabilité et de la force de l’économie néerlandaise. Ces stéréotypes, déjà observés dans des étudesspécifiques dans des catégories socio-économiquement moyennes et basses de la population, apparaissentici partagées même par des interviewés de niveaux supérieurs.

Plus généralement (sauf dans le groupe moyen-inférieur de Zwolle), l’Europe est spontanémentévoquée comme un élément important de contexte de l’avenir du pays – avec d’une part desfrustrations quant à la perte de souveraineté qu’elle entraîne et à l’influence plus grande qu’y exercentdes pays comme l’Allemagne ou la France mais, d’autre part, une confiance assez grande dans lacapacité des Pays Bas à faire entendre leur voix et à y exercer leur influence avec leur traditiond’échanges et leur avance économiques, et leur position présumée en pointe dans de nombreux domaines.

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⇒ Royaume Uni

Le climat chez les Britanniques est au contraire au pessimisme. Y contribuent :

• Le constat, fait par de nombreux participants, du mauvais état des services publics au RoyaumeUni : transports publics avec un service ferroviaire « du tiers monde », système de santé surchargé,sous-financé, et mal géré, détérioration de la qualité du système éducatif …

• Des inquiétudes relatives à l’évolution économique et à ses conséquences sociales : « emploismanuels peu qualifiés supprimés, précarisés, ou pris par des immigrants »

• Des incertitudes, avec le sentiment de n’être pas à l’abri d’évènements extérieurs ou de fatalités(augmentation du prix du pétrole, inondations récentes)

Ce pessimisme est particulièrement marqué dans les deux groupes socio-économiques moyens-inférieurs,mais il affecte aussi les participants des deux autres.

Quant à l’avenir, les interviewés évoquent très généralement les incertitudes qu’il recèle, même siles sujets de préoccupation des uns et des autres n’ont pas le même degré d’intensité :

• Fortes interrogations et inquiétudes dans les groupes socio-économiques moyens-inférieurs surl’immigration, son contrôle par les autorités perçu comme insuffisant, et parfois des frustrationsissues de l’impression que les immigrants bénéficient d’un traitement préférentiel.

• Questions posées dans les groupes moyens-supérieurs quant aux implications pour le RoyaumeUni de la dévolution des pouvoirs à l’Ecosse et au Pays de Galles

• Incertitudes exprimées par une partie des participants de tous les groupes vis à vis de l’Euro et dela perspective de son adoption éventuelle par le pays (seul thème relatif à l’Europe évoquéspontanément.)

De manière générale, les Britanniques donnent le sentiment de se trouver dans une période deflottement, avec un gouvernement dont les habits de la nouveauté et de la modernité ont pâli, et un faibleespoir de renouvellement politique de son côté comme dans celui de l’opposition.

⇒ Danemark

Dans leur appréciation de la situation de leur pays, les Danois interrogés valorisent fortement laréussite d’une société égalitaire et solidaire – qui se traduit dans les faits par un système de protectionsociale développé, une démocratie transparente et activement participative, une avance sur des questionstelles que les droits de l’homme et la préservation de l’environnement, etc.

Fiers de leur modèle, ils constatent cependant des ratés et expriment des inquiétudes :

• Quant à son coût pour le contribuable, avec toutefois des préconisations radicalement différentesselon les individus : privatisation d’entreprises et de services publics pour les uns, renforcement ducontrôle de l’Etat pour les autres

• Quant aux menaces sur le système : perception d’une diminution de la qualité du service de santé,crainte d’harmonisation par le bas des normes environnementales

• Quant à la question de l’immigration, à l’incapacité de leur société homogène à intégrer lesimmigrants de deuxième génération, causes à leurs yeux du développement de la criminalité.

En résumé, tout en revendiquant la supériorité d’un modèle auquel ils sont fortement attachés, lesDanois manifestent de sourdes craintes de le voir mis en cause de l’intérieur ou de l’extérieur – lesparticipants des groupes socio-économiques moyens-inférieurs ayant tendance à cet égard à mettrespontanément en cause l’harmonisation européenne comme porteuse de menaces.

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I.1.3 PAYS ADHERENTS RECENTS DE L’UNION EUROPEENNE

⇒ Suède

Les investigations menées en Suède révèlent une assez nette coupure entre les perceptions desinterviewés des groupes socio-économiques moyens-supérieurs et moyens-inférieurs.

Les premiers tendent à avoir une vision clairement optimiste de la situation du pays, et à le voir commedisposant d’atouts importants : une société organisée (y compris dans son système juridique), unetechnologie avancée, un niveau élevé d’éducation, de formation professionnelle, de connaissance deslangues étrangères, une avance sur les questions de protection de la nature et de l’environnement…

S’ils s’interrogent sur la place de la Suède dans l’Union Européenne, et sur les conséquences de lamondialisation (grandes entreprises suédoises rachetées par des groupes étrangers, risque dedélocalisation des centres de décision et de recherche, fuite des cerveaux … ), c’est malgré tout avec uneassez bonne confiance sur la capacité du pays à s’y adapter.

Les seconds, tout en notant eux aussi en positif les atouts et les acquis de la Suède, font un constat pluspessimiste et manifestent des inquiétudes plus nettes – particulièrement d’ailleurs dans le groupeprovincial de Jönköping.

Les interviewés de ces groupes identifient en effet des signes de dégradation et des menaces pour lesystème suédois : difficultés pour les entreprises moyennes, accroissement du fossé entre les plus richeset les plus pauvres, « démantèlement » du système public de santé – qu’il tendent à imputer àl’adhésion de la Suède à l’Union Européenne, à laquelle une majorité se montre nettement hostile.

⇒ Finlande

Le climat général qu’on observe en Finlande est celui d’une assez grande conscience d’aspects positifsdans la situation du pays et d’une assez grande sérénité, assorties toutefois de l’identification dedifficultés précises et de certaines interrogations pour l’avenir.

Les éléments positifs de la situation sont à la fois le développement et la bonne situation économique dupays (avec toutefois la crainte dans les groupes de niveau supérieur d’une dépendance trop grande de laFinlande par rapport à la « monoindustrie » Nokia, même si celle-ci est actuellement prospère) et laqualité d’ensemble d’un système social où la santé et l’éducation sont développés – ainsi que le cadrenaturel et la préservation de l’environnement.

Sans qu’il y ait de coupure entre les niveaux socio-économiques, les aspects négatifs sont davantagesoulignés par les participants des groupes moyens-inférieurs : maintien d’un taux élevé de chômage,inquiétude sur l’avenir des retraites, sentiment d’un écart qui se creuse entre les plus et les moins aisés,inquiétudes quant à l’avenir de jeunes désorientés par des familles éclatées, des difficultés à trouver unemploi, ou sujets à la tentation de la drogue.

L’Europe, quand elle est évoquée, l’est positivement, notamment comme facteur de stabilité et desécurité monétaires et financières permettant d’éviter le renouvellement des crises bancaires que le pays aconnues naguère.

⇒ Autriche

Les Autrichiens interrogés s’accordent sur la situation relativement privilégiée de leur pays en cequi concerne son niveau économique, celui du système de protection sociale, et le maintien de la cohésiond’un tissu social à laquelle ils attribuent un taux de criminalité jugé moins élevé qu’ailleurs.

En même temps qu’ils reconnaissent cet acquis, beaucoup sont sensibles à des signes multiples dedégradation (contraintes imposées par la réduction du déficit budgétaire, coupes dans le système social,perte du sens de la solidarité dans la société), pour lesquels ils mettent volontiers en cause laresponsabilité d’un gouvernement et d’un système politique dans lesquels les tensions croissent.

S’ils sont évoqués dans tous les groupes, ces signes négatifs sont vécus beaucoup plus concrètement etpersonnellement par les participants des catégories socio-économiques moyennes-inférieures.

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Quant à l’avenir, il suscite majoritairement des questions et des inquiétudes : futur économique d’unpetit pays dont les entreprises doivent « se vendre » à l’étranger ; capacité de l’Autriche à relever le défides technologies nouvelles ; évolutions sociétales marquées par la montée de l’isolement des gens et lesincertitudes pour les jeunes ; incertitudes sur l’avenir des retraites ; immigration et criminalité due auxétrangers ; menaces pour la santé publique illustrées par « le scandale » de l’ESB – et place à venir del’Autriche dans l’Union Européenne.

A cet égard, on observe que l’Europe est d’emblée un thème de la discussion : à propos de l’adaptationà l’Euro mentionnée par certains ; des sanctions communautaires « injustifiées » – mais maintenant levées– contre l’Autriche (mentionnées assez rarement cependant, et surtout par des personnes des catégoriesmoyennes-inférieures) ; ou plus généralement, de la manière dont l’Autriche pourra réussir à conserverson identité au lieu d’être « absorbée » dans ce grand ensemble.

A bien des égards, les Autrichiens perçoivent plus ou moins clairement leur pays comme étant à untournant dans un environnement extérieur aux mutations très rapides qui suscite des craintes.

Notons toutefois que l’optimisme paraît plus grand chez les plus jeunes des participants, qui évoquent enpositif par exemple les perspectives ouvertes par les technologies nouvelles – tout en critiquant le poidsexcessif de la bureaucratie qui nuit à l’émergence des initiatives.

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I.2. SENTIMENTS SUR LA SITUATION ET LES PERSPECTIVES DU PAYS DANS LES PAYS CANDIDATSA L’ADHESION

⇒ Pologne

L’état d’esprit des Polonais interrogés est marqué par un large pessimisme et un fréquent désarroidevant la situation de leur pays et l’évolution qu’il subit.

Ce qui est en cause en premier lieu est la situation économique et sociale de la Pologne : chômageélevé et qui continue à se développer, état de pauvreté « indigne » d’une grande partie de la population,abandon de pans entiers de l’économie nationale vendus à des racheteurs étrangers, dégradation desservices publics essentiels symbolisée par la grève récente des infirmières, etc.

Il s’y ajoute le sentiment d’un développement de la corruption (qui rend plus scandaleux l’écart entreles riches et les pauvres), d’une montée de la criminalité et de l’insécurité, et (à Varsovie surtout) celuide la confusion et de l’incertitude politiques.

Il règne sur ces plans un consensus très large bien que, pour ce qui concerne leur situation personnelle, lesinterviewés des catégories socio-économiques moyennes-supérieures reconnaissent pour la plupart êtreplus à l’aise et moins inquiets pour eux-mêmes pour l’avenir immédiat.

Tous ou presque manifestent pour l’avenir du pays anxiété et incertitudes, en même temps qu’unecertaine dose de fatalisme. Sans remettre en cause le passage à la démocratie pluraliste ni évidemment larupture avec le communisme, beaucoup se sentent en manque d’Etat protecteur et inquiets devant unfutur dans lequel il leur faut se lancer « sans filet ».

L’Europe et l’Union Européenne sont peu évoquées spontanément à ce stade – et alors comme undes éléments de l’incertitude plus générale.

⇒ Hongrie

Les Hongrois interrogés font preuve, à l’instar des Polonais, d’un pessimisme majoritaire sur lasituation de leur pays.

Sur le plan économique, leurs propos reflètent :

• Une conscience aiguë du retard de la Hongrie par rapport à des pays d’Europe occidentalesurvalorisés (où « on respecte le travail en donnant aux gens des salaires équitables »)

• Le sentiment d’une détérioration en cours : montée des prix non accompagnée d’uneaugmentation des salaires, existence d’une partie importante de la population qui n’a pas leminimum pour vivre décemment.

• Une frustration de ne pas voir les talents et les qualités reconnus : statut des médecins ou desprofesseurs qui doivent avoir un emploi d’appoint pour pouvoir faire vivre leurs familles,« exploitation » des Hongrois par des entreprises étrangères « qui ont colonisé le pays et qui leurfont faire des travaux d’esclaves »…

Sur le plan politique, les insatisfactions et les frustrations sont également grandes devant un systèmemarqué par l’instabilité, les changements de gouvernement provoqués à chaque élection par la désillusionà l’égard de l’équipe sortante, suivie rapidement d’une désillusion similaire à l’égard de celle qui laremplace, le sentiment que les partis et les hommes politiques recherchent avant tout leur propre intérêt aulieu de se consacrer aux problèmes-clés pour l’avenir du pays.

A la jonction des deux, le soupçon de corruption est généralisé, et celle-ci est perçue comme ayant sonorigine dans le monde politique.

Quand ils pensent à l’avenir, ils ne sont pas davantage optimistes, dans la mesure où ils ne voient pasde signe de changement des causes fondamentales de la situation ; et certains tendent même à penser àune aggravation sous l’effet « du capitalisme le plus sauvage », dans lequel les entrepreneurs nesongent qu’à la maximisation de leurs gains immédiats, plutôt qu’à la construction patiente de basessolides pour un développement à long terme.

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L’éventualité de l’entrée dans l’Union Européenne est un élément de cet avenir spontanémentévoqué dans tous les groupes, mais avec des angles de vision très différents : attentes et espoirs dansla ville moyenne de province, mais scepticisme à Budapest sur les effets positifs qu’elle pourra avoir. Demanière générale, on observe d’ailleurs que les interviewés des groupes socio-économiques moyens-supérieurs sont plus pessimistes que les autres à ce sujet.

⇒ République Tchèque

Les attitudes observées en République Tchèque sont plus balancées, et incluent à la fois des élémentsde pessimisme et d’optimisme chez la plupart des interviewés – même si l’optimisme tend à l’emporter àPrague, chez les plus aisés socio-économiquement, chez les plus jeunes, ainsi que chez les hommes plutôtque chez les femmes – et le pessimisme à être plus répandu dans la ville moyenne de Prérov et dans lesautres catégories sociodémographiques.

Les facteurs de pessimisme sont à la fois économiques, sociétaux et politiques :

• Economiques : c’est d’abord le chômage, reconnu comme un problème social sérieux dans lescatégories moyennes-hautes de la population (mais sans grandes craintes pour soi-même), vécubeaucoup plus personnellement comme une menace dans les catégories moyennes-basses –notamment à Prerov, et par les interviewées féminines.

C’est aussi, à Prague, le problème du logement avec l’augmentation des prix immobiliers.

• Sociétaux : montée de la criminalité, des trafics de drogue (surtout à Prague, et plusparticulièrement chez les femmes) et, partout, de la criminalité économique qui suscite uneindignation unanime

L’accroissement de l’individualisme est également dénoncé par certains interviewés (femmespraguoises notamment)

• Politiques : l’insatisfaction à l’égard du comportement des partis et des hommes politiquesest un leitmotiv dans tous les groupes, avec un sentiment d’incompétence et de « non-professionnalisme » de leur part lorsqu’on voit « des lois qui changent tout le temps, qu’il fautrefaire parce qu’elles sont mal conçues », etc.

Les facteurs d’optimisme tiennent à la reconnaissance des apports de la démocratie et de certainsbénéfices de l’économie libérale :

• Disponibilité de produits de consommation inconnue avant 1989

• Liberté de voyager à l’étranger, d’y faire des études : possibilités concrètes nouvelles dontbénéficient les personnes des milieux socio-économiques moyens-supérieurs, mais qui restent plusabstraites pour les autres, qui n’ont pas les moyens d’en tirer parti.

• Liberté plus générale de ses choix, de ses propres décisions – soulignée tout particulièrementdans les groupes moyens-supérieurs et par les plus jeunes des interviewés.

L’Europe n’est évoquée spontanément à ce stade que dans les groupes socio-économiques moyens-supérieurs, comme point de référence et de comparaison (avec les pays d’Europe occidentale).

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⇒ Estonie

Les propos des Estoniens interviewés (dans la ville provinciale de Tartu) mettent en évidence :

• Une conscience générale du développement économique que connaît le pays, mais uncontraste entre :

° Des personnes qui se comportent comme laissées de côté par cette évolution : il s’agitnotamment d’interviewés des catégories moyennes-inférieures de la population, et parmi lesmoins jeunes, qui ne constatent pas d’amélioration de leur condition personnelle. Ils tendentà considérer qu’il leur manque le niveau d’éducation et de formation qui permet à d’autresde saisir les opportunités ouvertes par les transformations du pays. Le thème de laconcentration des moyens au profit de la capitale Tallinn est également présent dans leursdiscours.

° D’autres, particulièrement dans les catégories moyennes-supérieures et parmi les plusjeunes, qui ne manifestent pas de telles frustrations au plan économique personnel –mais expriment de vives critiques vis à vis du gouvernement et de décisions récentes qu’il aprises au mépris du sentiment de l’opinion (privatisation de services ferroviaires). Pourinsatisfaites qu’elles soient, ces personnes se comportent en citoyens impliqués dansl’évolution du pays et dans le débat public.

• Un contraste entre l’expression d’insatisfactions relatives à la situation présente et celle d’unoptimisme dominant pour l’avenir

Même si l’Europe n’est pas spontanément évoquée à ce stade, il est clair qu’elle constitue laréférence vers laquelle l’Estonie tend, la question étant moins la réalité du rapprochementavec le niveau et les « normes » occidentales que sa rapidité et ses modalités : l’idée estprésente par exemple qu’un processus plus progressif aurait permis de « négocier » un passagemoins brutal à une économie capitaliste certes immensément préférable au système précédent,mais qui comporte ses duretés (protection sociale en diminution, relations au travail plus tendues… )

Le thème de l’éducation et de la formation revient fréquemment comme une clé de l’avenir.

⇒ Slovénie

En Slovénie, les regards portés sur la situation du pays sont contrastés :

• Une partie de la population, parmi les moins jeunes et surtout dans les catégories socio-économiques moyennes-inférieures, exprime l’impression d’une dégradation des conditions devie ces dernières années, et même une certaine nostalgie de l’époque de la Yougoslavie : lesprix des produits augmentent peu à peu, les salaires ne bougent pas, la Sécurité Sociale est moinsgénéreuse, les emplois sont plus précaires, les valeurs de solidarité déclinent, etc. – même si onreconnaît aussi les avantages d’une économie et d’un marché « libres ».

En même temps, et même si cela peut apparaître contradictoire, la liberté et l’indépendanceconquise par rapport à l’ancienne Yougoslavie sont considérées comme un événementfondamental et une source de fierté.

• Les autres, et notamment les plus jeunes, considèrent sans ambiguïté la situation actuellecomme bien meilleure que celle qui existait il y a quelques années (dont ils n’ont cependant pasde référence directe dans un monde du travail auquel ils n’appartenaient pas avant l’indépendance– indépendance qu’ils saluent d’ailleurs tout autant comme événement fondateur)

Les uns et les autres se rejoignent dans l’espoir d’amélioration de la situation de la Slovénie àl’avenir, en estimant d’ailleurs qu’ils en seront eux-mêmes les acteurs (plus que les responsablespolitiques dont, sans les vouer aux gémonies, il ne paraissent pas attendre grand chose).

L’Europe est spontanément évoquée dans le groupe moyen-supérieur (mais pas dans l’autre) commefacteur de cet avenir et point de référence dont la Slovénie se rapproche sans rupture avec son histoireet ses traditions « mi-occidentales et mi-balkaniques ».

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⇒ Chypre

L’analyse des discussions de groupe conduites à Pafos (ville située à l’écart du triangle Nicosie-Larnaca-Limassol, mais également fortement développée ces dernières années, notamment par le tourisme) montrelà aussi l’existence d’attitudes contrastées au sein d’une société en rapide mutation.

Dans leur majorité, les participants à ces discussions font part de soucis ou d’inquiétudes, qui portent surles mêmes sujets.

• La perte des valeurs et des repères de la structure sociale traditionnelle : déclin des valeursmorales, augmentation du nombre des divorces, abandon de leurs traditions par de nombreuxChypriotes au profit de modes de vie « occidentaux »

• La montée de la corruption et du favoritisme – encore qu’on reconnaisse parfois que c’est unecaractéristique qui n’est pas absolument nouvelle

• Celle de la criminalité et du trafic de drogue

• Une certaine perte des repères physiques traditionnels : urbanisation accélérée aux dépens d’unmilieu rural qui n’a pas été aidé (phénomène dénoncé par les interviewés du groupe socio-économique moyen-inférieur), omniprésence de très nombreux étrangers, touristes ou résidentspermanents.

• Une croissance économique indéniable mais dont les interviewés notent aussi des effetspervers : coût croissant des choses, voire même (dans le groupe moyen-inférieur) « déclin dessalaires ».

• Une faible confiance en les pouvoirs publics et en les responsables politiques, taxés d’absencede vision pour l’avenir du pays, et parfois de médiocre moralité publique.

Dans ce contexte général commun, une nette différence selon le niveau socio-économique apparaîtdans les angles de vision de la situation présente et dans les considérations pour l’avenir

• Les interviewés du groupe socio-économique moyen-inférieur s’expriment en faisant part de leursfrustrations et de leurs inquiétudes à titre personnel, en faisant référence à leur vie de tous les jourset à celle de leur entourage proche.

• Ceux du groupe socio-économique moyen-supérieur n’évoquent guère leur situation personnelle,mais situent leur réflexion au niveau du pays, en s’interrogeant sur un avenir dont la perspectivemajeure, évidente, est celle de l’adhésion à l’Union Européenne (sujet au contraire peu évoquéspontanément par les précédents)

Ambivalents sur ce plan, inquiets parfois des efforts à faire pour atteindre le niveau des Etatsmembres de l’Union Européenne, et des effets de la modernisation que cela implique, ils estimentcependant qu’il y a là une voie nécessaire et inéluctable pour leur pays.

⇒ République Slovaque

Le constat que dressent la plupart des Slovaques interrogés sur l’état de leur pays est largementnégatif, et empreint d’une assez grande désillusion par rapport aux espoirs qui étaient nés il y a 10ans.

Ce qui est en cause à leurs yeux est :

• Un fossé qui s’est élargi entre les plus riches et les moins aisés, une coupure d’autant plusmarquée qu’il ne s’est pratiquement pas développé de classe moyenne entre ces deux extrêmes

Pour la plupart de la population , on évoque une dégradation en termes économiques, mais aussisur les plans de l’éducation, de la culture, et sur celui du système de santé.

Les participants des groupes de niveau moyen-inférieur vivent tout particulièrement ladétérioration du niveau de vie, l’insécurité économique croissante (le chômage étant notammentévoqué dans la ville moyenne de province), et une dégradation de la protection sociale.

• Un déclin plus profond de la cohésion sociétale. Nombreux sont ceux qui observent la montéede l’individualisme, de l’indifférence au sort d’autrui, le souci dominant de la réussite personnellechez la jeune génération .

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En même temps, les interviewés des catégories socio-économiques moyennes-supérieures tendentà imputer la difficulté du pays à évoluer au maintien d’une mentalité d’assistanat, d’une tendance àen appeler à l’Etat pour la résolution des problèmes plutôt qu’à tenter de prendre en mains sonpropre destin.

• La médiocre qualité des politiques, jugés peu aptes à tracer des orientations pour le futur du payset à entreprendre les réformes en profondeur que la situation demande.

A coté de ces éléments négatifs, on reconnaît comme changements positifs :

• La liberté, et notamment celle d’aller et venir

• L’ouverture d’opportunités pour les plus entreprenants, les plus mentalement mobiles, les plusjeunes – qui n’existaient pas sous le régime précédent.

Quant aux visions qu’ont les Slovaques de l’avenir de leur pays, elles sont marquées par unscepticisme de fond qui n’empêche pas l’expression d’espoirs d’améliorations, mais on observe iciun contraste marqué entre :

• Un pessimisme ancré, particulièrement dans les groupes socio-économiques moyens-inférieurs, où certains ont l’impression d’un déclin quasi inexorable – à moins « que quelquechose se passe » (ce « quelque chose » étant attendu d’autres qu’eux-mêmes, d’une évolutionradicale, mais non explicitée, des politiques)

• Un optimisme mesuré, lié à la conviction « qu’il faudra bien que ça change », aux espoirsd’évolution mentale aussi bien que de changements économiques structurels, en pensantnotamment aux générations les plus jeunes, plus mobiles, plus éduquées.

Les interviewés qui professent cet optimisme tendent à voir dans la situation actuelle de confusionun état transitoire de « jungle » qu’ont connu d’autres pays (occidentaux) aux débuts de la sociétééconomique capitaliste, avant que le règne incontesté de la loi ne s’installe et que les mentalitésn’évoluent pour instaurer une nouvelle régulation sociale – ce qui prendra à leur avis plus quequelques années.

L’Europe – en l’occurrence l’Union Européenne et la perspective de l’adhésion – est évoquéespontanément dans tous les groupes comme un élément essentiel pour l’avenir. Comme on le verraplus loin, tous ont conscience qu’il y a là un défi à relever, qui ne sera pas facile, mais les attitudessont dans l’ensemble positives.

⇒ Lettonie

Les Lettons interrogés dans la ville provinciale de Liepaja s’expriment spontanément sur la situation deleur pays et son évolution depuis une dizaine d’années :

• En termes positifs pour ce qui est de l’instauration de la démocratie, de la liberté qu’elle aprocuré, du sentiment de liberté que chacun éprouve.

• Mais aussi en termes négatifs – et ceux-ci dominent dans leurs discours – en ce qui concernela situation économique et sociale.

Ils sont quasi-unanimes à constater une absence de développement économique, une situationpréoccupante pour l’agriculture, une montée du chômage (y compris parmi des personnesqualifiées jugées « trop vieilles »), une diminution du pouvoir d’achat, et une dégradation connexedes services sociaux ou de l’accès aux services de santé (les autorités publiques manquant desmoyens de finance-ment du logement, les particuliers n’ayant plus les ressources pour se soignercorrectement, etc.)

Les seuls aspects positifs mentionnés sur le plan économique sont la disponibilité plus grande desproduits de consommation et le développement des commerces qui contribuent à donner del’animation à la ville.

Dans ce contexte commun, les participants des groupes socio-économiques moyens-supérieurs semontrent relativement plus optimistes pour l’avenir, alors que ceux des groupes moyens-inférieursdoutent qu’une amélioration sensible se produise.

L’Europe (l’Union Européenne) et la perspective de l’adhésion sont spontanément évoquées dansles deux groupes à ce stade – mais avec beaucoup de réserves, et même des perceptions défavorables,qui seront explicitées plus loin.

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⇒ Roumanie

Dans tous les groupes, les Roumains interrogés font un constat négatif en tout, ou presque, de lasituation actuelle de leur pays :

• Sur le plan économique, ils évoquent pêle-mêle l’absence de développement (voire la baisse de laproduction nationale), l’état déplorable des infrastructures, l’inflation toujours galopante, desimpôts exagérés, le découragement des petites entreprises, le chômage de plus en plus structurel etde longue durée, la perte importante de pouvoir d’achat d’une grande partie de la population, etune sorte de « chaos » auquel concourent une inefficience et une indifférence généralisées, desprivatisations anarchiques à la légalité parfois douteuse, ou encore l’émergence « par le bas »d’une économie parallèle qui échappe aux lois et à la fiscalité.

• Sur le plan social, ils dénoncent à la fois l’accentuation d’une société à deux vitesses (danslaquelle l’écart croit entre un petit nombre de riches et une masse de la population paupérisée,pratiquement sans classe moyenne intermédiaire), et la diminution de la protection sociale d’unEtat impuissant : celle-ci est d’autant plus « déboussolante » qu’elle succède à un système oùl’individu largement déresponsabilisé était habitué à tout attendre de la puissance publique

• Sur le plan politique et institutionnel, ils sont sensibles à l’instabilité du système, auxdifficultés d’établissement et de respect d’un état de droit confronté à de multiples défis(corruption, pratiques mafieuses, indépendance non encore garantie du système judiciaire), àl’incompétence de la classe politique en général et des gouvernements qui se sont succédé,donnant une impression d’amateurisme et d’improvisation permanente dans les tentatives deréformes.

Cependant, et paradoxalement, en dépit de tous ces handicaps, ce n’est pas le pessimisme quidomine pour l’avenir ; on peut même parler d’optimisme mesuré, notamment dans les groupes de laville moyenne d’Alexandria.

Cet optimisme est fondé sur la conviction que la Roumanie a des ressources et un potentiel tantmatériel qu’humain (existence d’une population éduquée, désirant apprendre et travailler) – et parfois surla perception de signes positifs que les nouveaux gouvernants, ayant peut-être appris de leur erreurspassées, commencent à savoir « ce qu’ils ont à faire » (et à rassurer les investisseurs étrangers).

Certes, tous sont loin de le partager, mais même les sceptiques ou les pessimistes gardent un espoir queles choses s’améliorent à moyen ou long terme.

L’idée de l’entrée dans l’Union Européenne, évoquée dès ce stade des discussions dans tous lesgroupes, est un élément majeur de cet espoir. Bien entendu, on sait ou on pressent que tout ne sera pasrose, que les obstacles restent nombreux, qu’il faut s’attendre à des effets négatifs sur certains plans –mais cette perspective donne un objectif et une raison d’être aux efforts du pays pour sortir del’ornière.

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CHAPITRE II :

EVOCATIONS SPONTANEES DE L’EUROPE.

SENTIMENT D’APPARTENANCE

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II.1. PERCEPTIONS ET SENTIMENT D’APPARTENANCE DANS LES ETATS MEMBRES

II.1.1 PAYS « DU SUD » DE L’UNION EUROPEENNE, PRINCIPAUX BENEFICIAIRES DES POLITIQUES DE COHESION

⇒ Portugal

On a vu dans le chapitre précédent que les Portugais, invités à donner leur avis sur la situation et lesperspectives de leur pays, évoquaient spontanément et massivement l’Union Européenne commefacteur principal des évolutions positives qu’il a connues et comme cadre naturel dans lequels’inscrit son avenir.

Union Européenne et Europe sont ici quasi-synonymes. L’adhésion à l’Union a signifié entrée dans lamodernité européenne et reconnaissance d’un pays qui, bien qu’étant géographiquement dans l’Europe,en était de facto à l’écart sur tous les autres plans.

Pour les Portugais, l’Europe est loin de se réduire à un fait géographique : c’est aussi, et avant tout,un ensemble tout autant historique, culturel, politique et économique, fait de relations et d’échangesentre les pays qui la composent – et dont ce qu’ils ont en commun les distinguent clairement desautres pays ou continents – y compris les Etats-Unis.

Le sentiment d’appartenance est fort ; s’ils se sentent naturellement d’abord portugais, ils se sententaussi européens – et cela dans les catégories socio-économiques moyennes-inférieures comme dans lesgroupes moyens-supérieurs.

Certes, ils ont conscience des écarts qui existent entre le Portugal et des pays européens plus développéssur le plan économique au sens large (salaires, retraites, infrastructures, efficacité et productivitééconomique) mais ils les voient comme des écarts à rattraper et non comme des fossés infranchissables.

Certes, ils se sentent plus proches d’autres Européens du Sud (Espagnols, Italiens, Grecs, Françaisméditerranéens) que des Européens du Nord, de par leur culture et leur style de vie, mais là non plus ilsn’érigent pas de barrières.

Ils formulent sans réserves le voeu d’un rapprochement plus grand sur tous les plans, et ne voientnullement en l’Europe quelque chose qui viendrait s’opposer à leur pays ou mettre en péril leuridentité nationale – dans un contexte, on l’a vu, qui est d’optimisme raisonnable.

⇒ Grèce

Face au thème de l’Europe, les Grecs interrogés réagissent également en évoquant, explicitement ouimplicitement, l’Union Européenne, et d’abord les pays plus avancés, plus développés, plus organisés,ayant un niveau de vie plus élevé, qu’on essaie de rattraper.

Ces pays incluent d’abord des pays « du Nord » de l’Europe particulièrement développés (Allemagne,France, Royaume Uni, Belgique, Pays Bas … ) mais aussi l’Italie ou l’Espagne – signe que la Grèce estperçue comme le pays en retard sur ces plans.

Là aussi, mais plus confusément qu’au Portugal, ce qui fait l’Europe est l’histoire, la culture, lamentalité, autant ou plus que l’économie ou la géographie (économiquement, les pays de l’Europe del’Est n’en font pas ou pas encore partie ; géographiquement, les Balkans en sont la périphérie).

L’idée d’une différence de fond entre l’Europe et les autres pays ou ensembles de pays s’exprime moinsnettement qu’au Portugal. L’idée est cependant bien présente dans les groupes athéniens d’une union depays ayant pour leurs sociétés une vision commune humaniste dans laquelle la qualité de la vie a saplace, et devant se constituer en puissance pour défendre et promouvoir cette vision.

Pour autant, les Grecs, tournés historiquement vers l’Est autant, et peut-être plus que vers l’Ouest, etméditerranéens, ressentent une réelle distance avec les autres pays européens, et notamment avecceux « du Nord ».

• Les différences de niveau économique, de développement social, d’organisation administrative,sont grandes

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• La culture, la langue, les habitudes de vie, les tempéraments les mettent quelque peu à part ; lesEtats plus développés et plus organisés représentent d’une certaine manière un modèle, pour unpays où règne l’absence de discipline et de civisme, mais aussi en même temps une forme derepoussoir quand on leur associe froideur, manque de convivialité, incapacité à goûter les plaisirsde l’existence.

Le souhait de rapprochement est présent mais dominé par l’objectif de rattrapage économico-socialdes autres pays, et tempéré par le sentiment confus que ces autres pays chercheraient à imposerleurs vues à la Grèce.

⇒ Espagne

L’Europe, pour les Espagnols, est à la fois :

• L’Union Européenne, réalité institutionnelle qui résulte d’une volonté politique de ses Etatsmembres pour atteindre ensemble la puissance, d’abord économique, qui leur permette de fairepoids faire aux Etats-Unis (et secondairement au Japon)

• Une communauté plus profonde, pas seulement économique, mais aussi historique etculturelle qui, en toutes choses ou presque, se différencie des Etats-Unis et s’oppose à sonmodèle.

Cette vision n’est pas angélique : l’histoire commune a été faite aussi de conflits ; elle n’empêche pasqu’on puisse voir dans le modèle américain des aspects positifs (succès économique, dynamisme d’unesociété qui facilite la réussite individuelle) ; mais on se reconnaît dans un vieux continent qui est leberceau de la culture occidentale (et dont l’Amérique n’est qu’un rejeton), où l’éducation vise àl’ouverture culturelle contrairement à un système éducatif américain aux buts utilitaristes plus étroits, oùl’organisation de la vie sociale est plus protectrice et en quelque sorte plus aimable, etc.

Elle est particulièrement affirmée dans les propos des participants les plus éduqués et les plus âgés pource qui concerne la référence à l’unité culturelle de l’Europe – et, pour ce qui est de l’opposition aux Etats-Unis, plus dans la ville moyenne provinciale (où on est plus isolé du contexte international) qu’à Madrid.

L’Europe est à la fois communauté et diversité : c’est ce qui en fait l’originalité, mais aussi la difficultéà éprouver soi-même le sentiment de son appartenance

• En termes rationnels, l’appartenance à l’Europe est une évidence

• En termes de projet politique, les participants des groupes moyens-supérieurs se voient, en tant quecitoyens, comme parties prenantes à la construction d’un nouveau modèle à construire ensemble,en tant qu’Européens, à partir du socle historique et culturel commun

• Le sentiment d’être européen est plus diffus dans les milieux socio-économiques moyens-inférieurs, et surtout dans la ville moyenne de province où règne d’abord l’impression d’isolement,au plan national d’ailleurs autant qu’au plan européen

• Il se heurte, chez les interviewés de la ville moyenne, à la forte conscience des différences quiexistent dans les mentalités des différents pays, et à une impression diffuse de menace par unconcept d’identité européenne actuelle synonyme de modernité, mais de modernité née et conçue« au Nord » et qui s’impose à eux.

• De manière générale, les Espagnols se sentent naturellement plus proches des autres paysméditerranéens et latins, dont les traditions, le climat, les styles de vie, les loisirs, la cuisine ont despoints communs avec les leurs, au contraire des pays du Nord de l’Europe associés aux idées detristesse et d’austérité.

Le désir d’être, et de se sentir plus européen est répandu ; il apparaît comme logique et naturel dans lecadre d’une Union Européenne idéalement fusionnelle. Plus facile à matérialiser pour ceux qui ont eul’occasion de fréquenter d’autres Européens, de travailler avec eux (et de constater alors des similitudesde vues et d’approches des problèmes), chez ceux qui ont voyagé dans d’autres pays, et chez les plusjeunes généralement, il rencontre notamment chez les moins éduqués l’obstacle des différenceslinguistiques et de leur faible ou non-connaissance d’autres langues (obstacle qui amène d’ailleurscertains à rêver idéalement d’une langue européenne commune).

Tous s’accordent à penser que l’évolution du sentiment d’être européen se fera graduellement avecl’éducation, et avec les possibilités accrues de voyages maintenant permises par l’augmentation du niveaude vie, que soulignent notamment les interviewés des catégories socio-économiques moyennes-inférieures.

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⇒ Italie

Spontanément, les Italiens interrogés traduisent « Europe » en « Union Européenne », entitépolitico-économique d’aujourd’hui et projet fédérateur de demain –avec toutefois une grandedifférence dans les attitudes des Milanais et ceux de la ville moyenne d’Alessandria.

Pour la plupart des premiers, il s’agit d’une union dans laquelle les Etats membres mettent leurs intérêtscommuns : union d’abord économique, qui n’empêche pas qu’elle comporte également une dimensionsociale et culturelle. Pour les seconds, et pour une partie des Milanais de la catégorie socioéconomiquemoyenne-inférieure, cette entité économique apparaît de façon beaucoup plus extérieure, comme celle quiintroduit ou impose des règles, des normes, des éléments d’harmonisation qui viennent heurter lestraditions nationales, ce qui est particulièrement sensible en matière alimentaire (pâtes, chocolat, pizza… )

Dans les deux cas, l’identité européenne commune est un objectif à terme plus qu’une réalitéd’aujourd’hui – idéal fortement valorisé à Milan, utopie peu crédible à Alessandria.

Dans le climat actuel de morosité qui règne en Italie, tout se passe comme si le passé historique et lesproximités culturelles dont ils ont pourtant conscience étaient occultées par les préoccupations dumoment, par le constat désabusé que l’Italie ne se donne pas les moyens d’entrer pleinement etardemment dans le jeu.

Le sentiment d’appartenance est bien présent à Milan – on s’y sent italien d’abord et européen ensuite– même si on y ajoute parfois l’idée « d’européens de série B ». Il est en revanche faible à Alessandria.

Ce qui pourrait le renforcer, aux yeux des interviewés, est de se connaître, de se rencontrer, de travaillerensemble, de « sentir » la vie personnelle et professionnelle des autres, même si on est encore loin d’uneidentité européenne intégrée – l’obstacle de la langue étant cité assez fréquemment, et le mythe idéald’une langue commune évoqué comme en Espagne.

⇒ Irlande

Pour les Irlandais, « Europe » évoque immédiatement « Union Européenne » – avec la pleinereconnaissance de l’apport communautaire au développement spectaculaire du pays.

Dans les groupes socio-économiques moyens-supérieurs, les perceptions de l’Union Européenne incluentl’idée d’unité, ou de processus d’unification de l’Europe. Cette notion est en revanche peu présente dansles propos des interviewés de catégories moyennes inférieures, davantage sensibles au faible poids del’Irlande dans un ensemble communautaire beaucoup plus vaste, par rapport à des pays plus grands etplus puissants.

L’Euro est spontanément évoqué comme enjeu majeur, qui suscite une forte incertitude et des inquiétudesnotamment dans les catégories moyennes-inférieures.

Le sentiment d’appartenance à l’Europe est dans l’ensemble cependant assez modéré :

• Du fait de l’insularité du pays

• Du fait de l’obstacle de la langue, les Irlandais estimant être particulièrement peu nombreux àconnaître « des langues européennes » ; on observe à ce sujet que l’anglais n’est pas vu par euxcomme étant pleinement une langue européenne au même titre que le français ou l’allemand, etqu’il constitue plutôt un obstacle à l’échange qu’une facilité.

• Du fait de l’importance des relations avec les pays anglophones, Royaume Uni ou Etats-Unis, dontde nombreuses firmes sont implantées dans le pays.

• Surtout, peut-être, du fait de la force du sentiment national dans un pays dont l’indépendance estrelativement récente, qui a du lutter pour l’obtenir, qui n’entend pas voir « diluer » son identité –même si ces positions sont exemptes de toute agressivité envers les autres nations européennes.

Les interviewés des catégories moyennes supérieures se montrent ouverts à éprouver davantage lesentiment d’être européens, à voir favoriser l’apprentissage d’autres langues dès le jeune âge, à mieuxconnaître la culture des autres, par exemple par les voyages ; ceux des catégories moyennes inférieuresapparaissent plus autocentrés et plus en retrait.

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II.1.2 PAYS « DU NORD », MEMBRES ANCIENS DE L’UNION EUROPEENNE

⇒ France

Les évocations spontanées à propos de l’Europe sont d’abord relatives à l’Union Européenne, entitépolitico-économique rassemblant des pays de cultures diverses dans le but clairement compris de« contrer » les Etats-Unis et le Japon, comportant un ensemble d’aspects qui concernent plus ou moinsdirectement les citoyens, et qui sont en outre inégalement avancés dans leur réalisation (échangeséconomiques et financiers, monnaie commune, politique de défense, sécurisation par la fin des conflitsintra-européens, « abolition » des frontières et libre circulation des personnes, mélange des cultures … ).

Cette entité est complexe et lointaine, perçue qu’elle est comme principalement économique, etgénératrice en outre de réglementations uniformisantes et éventuellement attentatoires aux traditionsnationales. Les aspects pratiques positifs ne sont guère évoqués que dans les groupes parisiens :facilitation des échanges et des voyages (notamment grâce à la monnaie unique), possibilité de s’établirdans un autre pays pour y travailler.

Le sentiment d’être européen existe subsidiairement au sentiment national, avec la conscience deracines communes, et d’habitudes, de modes de vie et de modes de pensée dont certains ont puconstater à l’expérience qu’elles n’étaient finalement pas très différentes des leurs (dans les catégoriesmoyennes-supérieures surtout). Bien sur, comme dans d’autres pays, les Français se sentent plus prochesde certains Européens (latins, francophones) que d’autres.

Chez bon nombre, et notamment dans les milieux socio-économiques moyens-inférieurs, le sentimentd’appartenance est cependant timide : les mentalités leur apparaissent beaucoup plus différentes ; leslangues (et la faible connaissance qu’ils ont d’autres langues que le français, face à l’anglais dominant)constituent un obstacle sérieux à un véritable échange et à la compréhension mutuelle.

Les Français sont ouverts à la perspective de se sentir plus européens ; mais il y faudrait à la foisdes occasions de contact et des symboles

• Occasions de contacts personnels et directs dans le travail ou à titre privé, à l’école pour desenfants à qui on commence à « apprendre l’Europe » et qui sont plus adaptables, ou contactsindirects par les médias, la télévision (Arte étant citée).

• Symboles d’unité dont l’Euro peut devenir un exemple fort, dont le passeport européen est undébut, et qui pourraient inclure des signalétiques standardisées suggérant visuellement l’abolitiondes frontières.

⇒ Belgique

Les Belges interviewés pensent spontanément en termes d’Union Européenne quand on parled’Europe, avec toutefois des attitudes très contrastées d’un groupe à l’autre

• Positives dans les deux groupes socio-économiques moyens-supérieurs, dont les participantsévoquent l’effet économique de renforcement dans tous les secteurs face à d’autres pays (aupremier chef les Etats-Unis), accueillent l’Euro avec faveur, et sont conscients en outre que depetits pays comme le leur ne peuvent avoir voix au chapitre que par leur appartenance à cetensemble.

Sans remettre en cause l’adhésion à l’idée européenne, des critiques ou des inquiétudes se fontjour, quant à la difficulté à faire coexister les différents pays, et quant à la perspective del’élargissement.

Elles apparaissent plus vives dans le groupe flamand d’Anvers, plus enclin à raisonner en termesessentiellement rationnels et économiques ; l’idée d’un sentiment européen commun y est peuexprimée, alors que le groupe francophone tend davantage à voir comme une chose positive ladiversité culturelle du continent.

• Positives, sur un plan plus affectif, dans le groupe socio-économique moyen-inférieur wallonde Namur, qui évoque aussi les aspects économiques de la construction communautaire (dontl’Euro), mais qui est plus sensible à l’idée de rapprochement entre les différents pays et lesdifférents peuples, à l’ouverture que cela représente pour chacun d’entre eux, et aux mesuresconcrètes qui peuvent concerner les citoyens dans cette perspective (reconnaissance mutuelle desdiplômes par exemple).

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Le sentiment d’appartenance s’y exprime, même si c’est après l’identité nationale ou régionale,et si la proximité ressentie est plus grande avec certaines nations (latines, francophones) qu’avecd’autres.

• Négatives au contraire dans le groupe socioéconomique moyen-inférieur d’Anvers, trèscritique et désabusé à l’égard d’une construction économique qui se fait au profit des plusriches et qui suscite des craintes « d’envahissement » et de développement de la criminalité.

Le sentiment d’être européen, la curiosité à fréquenter les autres peuples et les autres cultures ysont particulièrement faibles.

Dans les trois premiers groupes, avec des nuances de l’un à l’autre, les interviewés ressentent dansl’ensemble la facilité qu’il y a à s’entendre et à se comprendre sur un plan personnel avec les autresEuropéens avec qui ils ont l’occasion d’être en contact au travail, dans des relations familiales ou devoisinage, ou pendant des vacances passées à l’étranger : les différences sont moins grandes qu’on atendance à le penser et, comme le disent certains d’entre eux, on se rend compte, par contraste, de cetteproximité de pensée lorsqu’on se trouve dans un autre continent, aux Etats-Unis par exemple.

Dans le quatrième groupe, bien que certains des participants aient l’occasion de rencontrer des collèguesd’autres nationalités dans leur travail, la curiosité envers autrui paraît bloquée par une centration sur leurspropres problèmes quotidiens, et ils n’expriment aucune envie de se sentir davantage européens.

Dans l’ensemble, les groupes francophones interviewés apparaissent plus ouverts à développer unsentiment européen plus ou moins fusionnel, en évoquant à la fois le renforcement de la connaissancepersonnelle de citoyens d’autres nationalités, les voyages à titre professionnel ou privé (que la diminutiondu prix des transports encouragerait), la lecture, la fréquentation de médias d’autres pays (notamment, latélévision des autres, que les Belges peuvent aisément recevoir), les nouveaux médias électroniques, ainsiqu’une meilleure connaissance des autres langues ; sur ce dernier point, on note dans le groupe de Namur(qui reconnaît ses insuffisances) la mention de l’idéal d’une langue européenne commune – même si on yreconnaît que le mythe de l’espéranto a échoué.

⇒ Luxembourg

Pour les Luxembourgeois aussi, l’Europe est spontanément perçue comme étant l’UnionEuropéenne – ensemble d’abord, mais pas seulement économique – qui permet à un petit payscomme le Grand Duché d’exister sur la scène internationale, mais dont on craint parfois lesconséquences du faible poids qu’il a dans les décisions communautaires (et qui est appelé à diminuerencore avec l’élargissement).

En même temps que certains s’inquiètent d’une Europe future qui ne serait qu’économique, avec desmesures d’harmonisation qui agiraient au détriment des intérêts du pays (mentions du secret bancaire), lesLuxembourgeois interrogés se sentent manifestement plus à l’aise que bien d’autres citoyens d’autrespays dans une Europe qu’ils fréquentent de facto dans la vie quotidienne : de par la présence de nombreuxautres Européens dans le pays, de l’origine mélangée et de la multiculture dans laquelle ils sont nés, de laproximité des « trois frontières », de la fréquentation des médias des pays voisins, et de leurmultilinguisme.

Luxembourgeois d’abord, ils sont aussi à l’évidence européens. L’envie de l’être davantage est unequestion qui les surprend – parce qu’ils le sont déjà beaucoup, et aussi sans doute du fait de la consciencegrandissante de l’identité luxembourgeoise – encore qu’ils voient dans l’Euro un facteur derapprochement supplémentaire.

⇒ Allemagne

Les Allemands interrogés s’expriment sur l’Europe, sans référence explicite spontanée à l’UnionEuropéenne d’ailleurs, en s’interrogeant surtout sur l’identité européenne et le sentimentd’appartenance.

L’appartenance à l’Europe est un fait, ne serait-ce que géographique, qui inclut un sentiment d’êtreeuropéen – loin toutefois derrière celui d’appartenir à sa ville, à sa région, et à son propre pays.

On a de prime abord du mal à définir une véritable entité culturelle dans une Europe faite d’unemosaïque de pays, de cultures, et de niveaux de vie très disparates – si ce n’est par défaut et parcontraste avec d’autres entités : les civilisations marquées par l’Islam, à l’évidence, mais aussi lesEtats-Unis : comme l’expriment plusieurs interviewés qui ont eu l’occasion de se rendre dans ce pays, leconstat de la différence fait qu’on s’y sent d’un coup européen autant qu’allemand.

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Pour quelques uns en outre (parmi les plus âgés), l’appartenance à l’Europe peut faire office d’uneidentité de remplacement à une identité nationale qui n’ose pas encore s’affirmer en raison de la tare dupassé de l’Allemagne nazie ( ce type d’attitude, observé comme assez courant encore dans les étudesmenées il y a 15 ans, apparaît cependant clairement en forte régression).

L’absence de langue commune est considérée comme un obstacle important à la communication avecautrui et au développement d’un sentiment identitaire commun.

Par ailleurs, on le verra plus en détail dans le chapitre suivant, les perceptions fréquentes de laconstruction communautaire institutionnelle comme venue « d’en haut », sans que les citoyens ysoient directement impliqués, ne concourent pas à encourager l’émergence d’une affectivité positive àl’égard de l’Europe.

Pourtant, le désir de mieux connaître les autres, la propension à penser qu’on a quelque chose decommun avec eux, ne sont pas absents. Lorsqu’on a l’occasion de rencontrer des citoyens d’autresnationalités, en vacances, dans le travail, ou dans les relations personnelles que certains ont établies avecd’autres Européens installés dans leur ville, la communication se fait sans problème, l’autre est considérécomme « quelqu’un comme vous et moi » – dès lors qu’il maîtrise suffisamment l’allemand ou qu’onconnaît soi-même sa langue.

Bien sur, les proximités psychologiques sont plus grandes avec d’autres germanophones (les Autrichiens)ou avec les habitants des pays proches (les Pays Bas par exemple à Cologne, les Polonais à Leipzig), maisl’idée confuse d’une certaine communauté de pensée va au delà : davantage à Cologne qu’à Leipzig, etdavantage chez les plus jeunes.

Tous s’entendent à penser que le développement de ce sentiment prendra du temps : à l’aune del’histoire, le rapprochement des nations européennes est encore tout récent. Ils y sont cependant plusouverts que leurs premières déclarations sur l’hétérogénéité de l’Europe ne le laisseraient entendre– mais il y faudra des occasions de fréquenter concrètement d’autres Européens et leurs cultures, ainsi quedes symboles forts ; l’Euro est considéré comme pouvant être l’un d’entre eux (quelles que soient lessourdes résistances et les inquiétudes que sa faiblesse présumée suscitent par ailleurs).

⇒ Pays Bas

Au premier abord, les Néerlandais réduisent l’Europe à un concept géographique (en pensantd’ailleurs presque exclusivement à sa partie occidentale) et à une union économique de raison, utileaux Pays Bas, petit pays économiquement très avancé, pour exploiter ses atouts sur la scèneinternationale.

Si certains reconnaissent qu’il peut ou qu’il pourrait leur arriver de se déclarer européens lorsqu’ils sontpar exemple aux Etats-Unis, c’est surtout parce que les Pays Bas y sont insuffisamment connus, l’identitéeuropéenne n’étant utilisée alors que comme une identité par défaut.

De manière générale, ils évoquent beaucoup plus les différences historiques et culturelles, aussi bienqu’économiques, entre les pays européens, que ce qu’ils pourraient avoir de commun, avec un refusaffirmé de se sentir européens – qui s’exprime particulièrement fortement dans la ville provinciale deZwolle, dont les habitants sont moins exposés que ceux d’Amsterdam au contact avec d’autresEuropéens. Même les voyages à l’étranger, à l’occasion des vacances, s’ils comportent une part de« charme exotique », ne donnent guère l’occasion ni l’envie réelle de se plonger réellement dans le modede vie et la culture des autres : on y garde un comportement de visiteur, avec peu d’aspirationsfusionnelles.

Certains – parmi les plus urbains et les plus éduqués – n’excluent pas que se dégage lentement une formed’identité européenne, et admettent même que l’Euro, en dépit des préventions néerlandaises généraliséesà son égard, pourrait en constituer un élément symbolique à terme, en même temps qu’un instrument utilepour affirmer la force de l’Europe face aux Etats-Unis, mais cela reste encore une perspective abstraite etassez peu crédible.

Là comme ailleurs une langue commune pourrait constituer en théorie un élément de rapprochement,mais cette langue n’existe pas – en dehors de l’anglais accepté comme langue des affaires, mais noncomme langue d’une identité commune.

En résumé, les attitudes des Néerlandais à l’idée d’une identité européenne commune et dudéveloppement d’un sentiment européen sont extrêmement réservées ; elles le sont d’ailleursd’autant plus qu’ils marquent délibérément une nette coupure entre des pays européens du Nord,aux sociétés économiquement développées, organisées et socialement avancées (même si les Pays Basdemeurent à leurs yeux l’exemple et le modèle) et des pays du Sud qu’ils ont manifestement peine àconsidérer comme pleinement européens.

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⇒ Royaume Uni

Pour la plupart des Britanniques, ni l’idée d’Europe en général, ni celle d’Union Européenne àlaquelle elle est souvent explicitement ou implicitement associée ne sont des concepts proches etvalorisés.

L’appartenance à l’Union Européenne (thème sur lequel on reviendra de façon plus approfondie dansle chapitre suivant) suscite pour l’essentiel des doutes et des oppositions à l’égard d’une constructionqui constitue une menace pour l’identité et les traditions britanniques, qui impose des lois (ainsi parexemple pour la décimalisation ou le passage au système métrique) que le Royaume Uni respected’ailleurs alors que d’autres pays en prennent à leur aise avec les mesures communautaires (comme laFrance ou l’Allemagne dans leurs positions sur l’ESB, ou la première au travers des blocus de camionspar ses transporteurs routiers). L’Europe reste clairement quelque chose d’extérieur.

Dans les groupes socio-économiques moyens-inférieurs, il s’y ajoute le thème récurent de l’effet del’ouverture des frontières sur l’immigration – objet de craintes et de frustrations comme on l’a vuprécédemment.

Si quelques uns des interviewés sont moins fermés a priori, mettant en avant par exemple lesavantages économiques et commerciaux de l’appartenance à l’Union, et même parfois des bénéficespersonnels plus tangibles pour le citoyen (actuels ou potentiels), ils sont clairement minoritaires : on neles trouve guère que parmi les groupes socio-économiques moyens-supérieurs, chez des individus plusjeunes que les autres et, symptomatiquement, chez des Britanniques non anglais (écossais, irlandais, ouasiatiques d’origine).

Au delà de leurs résistances à l’Union Européenne, les Britanniques manifestent plus généralementla faiblesse de leur sentiment européen, voire affirment avec force leur non-européanité. L’Europe(c’est à dire les pays continentaux) est étrangère, et ils ne se sentent guère d’affinités avec des nationseuropéennes dont ils se sentent séparés par l’insularité, la langue, la culture, le mode de vie. Ils enconnaissent peu et ils n’ont pas spontanément de désir d’en connaître davantage. Pour certains, il s’yajoute une méfiance à l’égard de pays qui ont été historiquement ennemis de la Grande Bretagne ou del’Angleterre, ou qui ont négligé de venir à son aide dans les guerres qu’elle a affrontées.

Beaucoup, surtout mais pas seulement dans les groupes socio-économiques moyens-inférieurs, déclarentressentir plus de proximité avec les Etats-Unis qu’avec d’autres pays européens.

Interrogés sur ce qui pourrait contribuer à développer un sentiment plus européen, beaucoup se déclarentnon concernés en évoquant à nouveau l’obstacle de la langue. Les plus ouverts font état de contacts qu’ilsont pu avoir avec des citoyens d’autres nationalités, de la facilité croissante des voyages avec desréalisations comme le tunnel sous la Manche (et même pour quelques uns avec l’Euro), ou d’un intérêtpour l’enrichissement apporté par la confrontation avec d’autres façons de voir.

Paradoxalement, plus nombreux sont ceux qui admettent l’idée d’apports bénéfiques pour l’apprentissaged’autres langues européennes, auquel les Britanniques se sentent particulièrement peu aptes : pour uneminorité, il y a là la manifestation d’un intérêt d’ordre culturel, pour les autres ce n’est guère que l’idéed’un outil qui leur manque et qui les place en situation d’infériorité.

⇒ Danemark

Les attitudes danoises majoritaires apparaissent à la fois braquées contre une Europeinstitutionnelle dont le mouvement d’harmonisation menace le modèle danois et les valeursdanoises idéalisées, et peu enclines à ressentir de la proximité avec les autres Européens – les autresScandinaves faisant sans doute exception.

Le sentiment dominant est celui d’une opposition radicale entre un Danemark homogène, cohérentet soudé, et une Europe éclatée, désordonnée et « chaotique » dont ils se sentent séparés par la langue,la culture, les traditions, le tempérament et les valeurs, autant que par l’organisation sociale et le systèmepolitique : dans leurs propos, le Danemark est la référence en termes de transparence démocratique, desolidarité, et de valeurs éthiques de sérieux et de respect des règles.

Pour certains la distance est particulièrement grande avec les pays de culture catholique (marquéspar le désordre, l’absence de sérieux professionnel, la corruption et la criminalité) aussi bien qu’avec lespays européens de l’Est (opposés par l’histoire, la mentalité et l’absence de tradition démocratique autantque par le faible niveau de développement économique).

Au premier abord, l’Europe se réduit pour la plupart à un concept purement géographique.

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Dans un second stade, bon nombre reconnaissent l’existence de traits communs ou de proximitésavec d’autres pays européens : valeurs chrétiennes, éléments d’histoire commune y compris par lesguerres du passé, sociétés démocratiques malgré leurs imperfections, références culturelles communes enmatière de musique, d’art, de cinéma, consommation croissante de produits venus d’autres pays, en plusd’une Union Européenne dont on admet qu’elle a contribué à la paix tout en s’affirmant à l’égard du restedu monde.

Pour la plupart, ces références restent cependant abstraites, la « culture européenne » reste difficileà définir (et même, pour certains, moins proche que la culture américaine qui se répand en Europe).

Ces réticences à l’Europe sont moins affirmées dans les milieux socio-économiques supérieurs et chezcertains des plus jeunes, mais elle sont un caractère très général.

L’absence de familiarité avec les autres peuples européens y joue un rôle important, les interviewésreconnaissant qu’on pourrait commencer à ressentir davantage un sentiment d’appartenance européenne àla faveur de voyages scolaires, d’une ouverture du marché du travail trans-frontières donnant l’occasionde fréquenter quotidiennement des collègues d’autres nationalités, ou d’un rapprochement des niveaux dedéveloppement social (qu’il reste aux autres pays à effectuer).

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II.1.3 PAYS ADHERENTS RECENTS A L’UNION EUROPEENNE

⇒ Suède

Les Suédois interrogés apparaissent, comme les Danois, clairement réservés à l’idée de l’Europe –ou de l’Union Européenne qui vient immédiatement à l’esprit d’une bonne partie d’entre eux à cepropos – mais avec en moyenne moins d’acuité dans les oppositions ou les défiances.

Peut être le fait que leur pays vienne d’assumer la Présidence de l’Union (fait mentionné spontanémentdans les divers groupes) leur donne-t’il le sentiment que la Suède y joue un rôle, que sa voix compte, etqu’elle est moins la « victime » potentielle des tentations présumées d’harmonisation forcenée.

Sans doute aussi le caractère plus internationalisé de l’économie du pays et de ses entreprises y concourt-il – d’assez nombreuses parmi les personnes réunies dans les groupes mentionnant leur fréquentationrégulière ou occasionnelle d’autre Européens ou leurs familiarités avec certaines mesurescommunautaires dans le cadre de leur activité professionnelle.

Globalement, les Suédois se situent moins que leurs voisins danois dans une psychologie de « campretranché ». Certains supposent d’ailleurs que l’information transmise par les médias tend à présenter laréalité communautaire comme plus sombre qu’elle n’est (sans avoir toutefois d’exemples concrets àprésenter à l’appui de cette hypothèse), et se montrent disposés à reconnaître dans l’Union Européennedes effets économiques positifs : c’est le cas notamment dans les milieux socio-économiques moyens-supérieurs.

Il n’empêche que la vision qu’ils ont de l’Union Européenne inclut des aspects essentiellementnégatifs, qu’il s’agisse de l’idée générale d’harmonisation qui vient heurter les habitudes et les traditionsnationales, du sentiment que l’action de l’Union s’attache principalement à des « broutilles » absurdes etexaspérantes, ou de l’impression générale d’une bureaucratie centralisée, lointaine, sans relation avec lesréalités concrètes.

Quant au sentiment d’européanité, il est variable. Pour certains, comme chez beaucoup de Danois,l’idée même de se sentir européen est rejetée, au nom des même arguments : différence de mentalités,absence d’empathie, volonté farouche de préserver son identité suédoise : ceux-là ressentent uneproximité avec les pays voisins scandinaves ou nordiques qui peut s’étendre aux Etats baltes, mais guèreavec les autres pays, et encore moins avec les pays du Sud dont les tares incluent à leurs yeux l’absencede rigueur, le laisser aller, la corruption, etc.

D’autres sont plus nuancés, et identifient dans l’histoire des éléments communs : proximitélinguistique avec les autres langues du Nord, anglais et allemand, et même présence de mots français dansla langue suédoise, famille royale d’origine française, développement des mines suédoises au départ avecle concours de Belges et de Néerlandais – et même les guerres que la Suède a menées au cours de sonhistoire et qui l’ont amenée à dominer, mais en même temps à fréquenter d’autres peuples.

Alors que les premiers répugnent à imaginer des moyens qui feraient qu’ils se sentent davantageeuropéens, les seconds évoquent les contacts personnels avec des gens d’autres nationalités, des médiasplus ouverts et moins univoques dans leurs contenus sur l’Europe, les voyages facilités par l’ouverturedes frontières.

⇒ Finlande

Les réactions spontanées des Finlandais à l’idée d’Europe – ou d’Union Européenne qui y estdirectement liée – sont dans l’ensemble extrêmement positives, et tranchent singulièrement sur cellesde leurs voisins scandinaves.

L’idée d’unité y est fortement valorisée, les bénéfices économiques de l’appartenance à l’Europe (età la zone Euro) sont incontestés, outre l’apport de l’adhésion à l’Union Européenne sur le plan de lasécurité, éloignant la menace que représenterait ou que pourrait représenter la présence à l’Est d’unimmense voisin aux tendances naguère dangereusement « protectrices », et encore très instableaujourd’hui.

Globalement très positive, l’opinion sur l’Union souffre cependant aux yeux d’une partie des participantsd’une image quelque peu bureaucratique, du fait que la voix d’un petit pays comme la Finlande y pèsepeu, ou d’une moindre préoccupation dans d’autres pays en matière d’environnement ou de santépublique (en référence à l’ESB).

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Surtout, les Finlandais apparaissent avides de contacts avec autrui (leur relatif enclavementgéographique y contribuant sans doute), curieux des autres cultures, dépourvus d’a priori sur telle ou telled’entre elles, et même tendant à valoriser celles des autres : ouverture d’esprit et convivialité plus grandesdans des pays situés plus au Sud, style et élégance italiens ou français admirés par les participantesféminines, etc.

Quoiqu’ayant une origine ethnique, une langue et une culture uniques ou presque en Europe, ils tendent àne pas voir en l’autre quelqu’un de fondamentalement différent d’eux.

Interrogés sur ce qui pourrait contribuer à développer encore le sentiment européen, ils évoquentvolontiers les voyages facilités par des frontières plus ouvertes et par la monnaie unique (malgré quelquesexpressions de nostalgies à la disparition du mark finlandais), les échanges universitaires ouprofessionnels, l’apprentissage aux enfants de l’Europe dès l’école, les lectures ou les documentaires surla vie dans d’autres pays européens, avec le développement de l’enseignement des langues – en bref unpanorama assez vaste et assez ouvert de types de contacts directs ou indirects.

⇒ Autriche

Dans les premières réactions des Autrichiens, l’idée d’Europe est monopolisée par le conceptd’Union Européenne – bien que l’appartenance géographique et historique du pays à l’Europe centrale,et la fin du rideau de fer, fassent aussi considérer l’Europe dans une dimension plus vaste.

Les attitudes sont contrastées ou ambivalentes. La nécessité pratique pour l’Autriche d’adhérer àl’Union Européenne pour éviter l’isolement n’est pas contestée, les bénéfices économiques qu’ellepeut en attendre sont évoqués, la contribution au maintien de la paix sur le continent également ; enmême temps, on voit se manifester de sourdes inquiétudes sur le poids de l’Autriche dans ce vasteensemble, sur l’influence dominante au contraire de l’Allemagne et de la France, et parfois des critiquessur la « bureaucratie » communautaire.

En ce qui concerne le sentiment européen, là aussi l’ambivalence règne : on se sent d’abord autrichiennaturellement (et ce sentiment est parfois renforcé par la crainte de perte de souveraineté qu’encourt unpetit pays), on a du mal à identifier ce qu’est l’identité européenne commune, au sein d’un continent faitde différences et de diversité, y compris linguistique (moins, bien entendu, avec l’Allemagne).

Pourtant, comme l’expriment plusieurs participants, le fait qu’on se ressente comme européenlorsqu’on est confronté, aux Etats-Unis, à une mentalité très différente, éveille à l’idée d’un fondsculturel commun. En outre, ceux qui ont l’occasion de contacts professionnels ou personnels avec descitoyens d’autres Etats communautaires, ou de voyages dans d’autres pays, ne serait-ce que pour lesvacances, en retirent des impressions et des émotions positives, tout en restant un peu psychologiquementà distance.

En tout état de causes, les Autrichiens ne semblent pas faire d’ostracisme a priori à l’égard de telle outelle nation européenne.

Interrogés sur ce qui pourrait faire qu’on se sente davantage européen, ils évoquent notamment ledéveloppement d’occasions de contacts personnels, le développement « de la tolérance », aussi bien quecelui de l’apprentissage mutuel des langues des autres.

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II.2. PERCEPTIONS ET SENTIMENT D’APPARTENANCE DANS LES PAYS CANDIDATS A L’ADHESION

⇒ Pologne

Pour les Polonais, l’Europe est à la fois :

• Une entité géographique objective qui va jusqu’à l’Oural, eux-même en étant au centre, « à l’Estde l’Ouest » ou « à l’Ouest de l’Est »

• Une entité historique et culturelle à laquelle leur pays appartient naturellement

• Mais aussi, et surtout, une Europe de l’Ouest à laquelle ils aspirent fortement tout enressentant les distances qui les en séparent, et comme en « se retenant » eux-mêmes dans cetteaspiration.

Cette Europe-là, embellie et mythifiée pendant toutes les années du régime communiste, inaccessiblealors (sauf, pour quelques-uns, à y émigrer), était et reste parée des vertus et des beautés de la prospérité,des chances données à ses habitants, du haut niveau d’éducation, de la liberté qu’on y a dans sonexistence.

L’Européen, dans ce sens-là, est une personne aisée économiquement, éduquée et cultivée, qui travaillebeaucoup mais qui peut aussi jouir d’une vie riche, sans souci majeur pour le lendemain, et de ses plaisirs

Depuis 10 ans, les Polonais – certains d’entre eux au moins – ont pu se rendre dans cette Europe,apparemment d’ailleurs sans observer de fossé entre leurs perceptions mythiques et sa réalité, et elle est àcet égard plus proche, mais ils constatent en même temps l’ampleur des écarts qui demeurent avec leurpropre situation ou celle de leur pays.

Ces écarts sont économiques, mais aussi psychologiques :

• Ils se ressentent en quelque sorte comme « les pauvres » pour qui il n’est pas totalement légitimeou possible de fréquenter « les riches »

• La faible connaissance de langues étrangères de beaucoup d’entre eux (d’abord de l’anglais,langue de communication de fait) les restreint dans leurs désirs de contact

• Plus profondément, il y a chez eux comme un complexe d’infériorité, lié à l’idée d’une imagenégative des Polonais en dehors de leur pays, qui est particulièrement présente chez les interviewésdes catégories socio-économiques moyennes-inférieures (Polonais tricheurs, voleurs, revendeurs àla sauvette de produits à bon marché … ).

Cette image est également présente à l’esprit de ceux des groupes socio-économiques moyens-supérieurs, qui ont toutefois, eux, le sentiment d’une évolution positive.

Elle engendre parfois l’impression qu’ils sont ou qu’ils seraient mal accueillis par les Européensde l’Ouest avec qui ils peuvent entrer en contact.

Il peut s’y ajouter la vivacité du sentiment national qui peut enfin s’exprimer après tant d’occupations etde partitions forcées du pays, faisant que l’intégration à un ensemble où celui-ci se diluerait entraîneparfois des réflexes de prise de distance – référence à la perspective de l’adhésion. Dans le contexteexposé ci-dessus, l’expression de la fierté nationale est d’abord défensive.

⇒ Hongrie

Pour les Hongrois, la notion d’Europe a également différentes significations possibles :

• L’Europe géographique inclut à la fois les pays d’Europe de l’Ouest et de l’Est, y compris àl’évidence les pays baltes, l’Ukraine, et la partie occidentale de la Russie – mais pas la Russie dansson ensemble. La Turquie est également en dehors de cet ensemble géographique.

• Cette Europe géographique correspond à une Europe historique et culturelle dont lesinterviewés soulignent à la fois l’ancienneté et une diversité source de richesse et de savoiraccumulés – qui la rendent unique et dont elle a en quelque sorte le monopole à travers lemonde : la culture, c’est fondamentalement la culture européenne.

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Les Hongrois tendent à se voir comme étant en plein cœ ur de cette Europe-là depuistoujours, associés qu’ils étaient à l’Empire austro-hongrois, et voyant dans la variété des origineset des types physiques de leur population l’incarnation de cette diversité valorisée.

Dans l’un des groupes seulement (de niveau socio-économique moyen-supérieur à Budapest), onévoque aussi les divergences intra-européennes qui ont amené aux conflits mondiaux, et lesnationalismes qui en ont été la cause

• Comme en Pologne, l’Europe est aussi l’Europe de l’Ouest, caractérisée par la prospéritééconomique, la stabilité politique, des pays organisés où les choses sont plus propres et plus belles,où l’environnement est respecté, où chacun n’a pas sur le plan matériel l’inquiétude du lendemain,et a l’entière liberté de voyager où bon lui semble, permise par le niveau de développementéconomique de la population.

Cependant, les Hongrois interviewés ne montrent pas le même sentiment d’infériorité que leurshomologues polonais – convaincus qu’ils sont à la fois que leur niveau éducatif et culturel est toutà fait à la hauteur de celui des pays de l’Ouest, et que les vicissitudes de l’histoire les ont rendusforts et résistants : la fierté nationale s’exprime chez eux sans agressivité mais sans complexes.

• L’Europe est aussi perçue comme une entité politique et économique – qui correspondgéographiquement à l’Europe de l’Ouest, mais qui est spécifiquement celle de l’UnionEuropéenne.

La Hongrie n’en est pas, mais elle est appelée à en faire partie – ce qui signifie à la fois espoirsde rattrapage et conscience des efforts à faire pour y parvenir, avec les incertitudes qui demeurentà ce sujet.

Tout en aspirant à ce rattrapage, perçu comme la condition impérative pour se rattacher à l’Europede l’Ouest valorisée et enviée, certains interviewés marquent alors une distance, due notamment àune interrogation sur le fait de savoir si leur pays est vraiment « bienvenu » dans cette Union –mais ce phénomène n’est pas général.

Dans l’ensemble, les Hongrois manifestent un profond sentiment d’appartenance et un fortsentiment européen, même si leurs affinités avec telle ou telle autre nation sont plus ou moins grandes :

• Grandes avec les Autrichiens en raison du passé commun, malgré l’impression d’un peuplegermanique moins chaleureux qu’eux-mêmes ; avec les Italiens qui savent comme eux savourer lesplaisirs de l’existence ; à certains égards avec les Allemands, comme eux-mêmes sérieux ettravailleurs, ou avec les Néerlandais dont ils pensent partager le goût des voyages ; ou encore avecles Tchèques et les Polonais proches en Europe Centrale.

• Faibles au contraire avec les Anglais perçus comme fermés sur eux-mêmes et sur leurs traditions –et, plus près, avec les Slovaques avec lesquels les conflits historiques ne paraissent pas éteints,ainsi qu’avec les Roumains peu capables d’évoluer et restant englués dans leurs structures passées.

⇒ République Tchèque

Chez les interviewés tchèques :

• La notion d’Europe géographique est présente mais au second plan seulement : il est clair quel’Europe « véritable » pour eux n’inclut pas la Russie, ni la Biélorussie et l’Ukraine, ni sans doutemême la Bulgarie.

• L’Europe comme notion historique et culturelle est extrêmement forte et valorisée. Elle estterre – la terre – d’échanges, d’éducation et de culture et ils en font partie depuis toujours ; ilsévoquent à cet égard les liens historiques de l’Empire des Habsbourg, l’ancienneté de l’UniversitéCharles de Prague, et expriment la fierté d’une culture tchèque au cœ ur même de l’Europe.

Cette identité de l’Europe l’oppose très clairement aux Etats-Unis, souvent caricaturéscomme pays sans éducation et sans culture.

• L’Europe est aussi l’Europe occidentale, totalement incarnée par l’Union Européenne,ensemble politique et puissance économique que les Tchèques ont vocation naturelle à rejoindre,se considérant eux-mêmes comme des Européens de l’Ouest dont seule la « parenthèse »historique du communisme imposé par la Russie, après le phénomène déclencheur del’envahissement par l’Allemagne nazie, les a tenus à l’écart provisoirement.

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Le sentiment d’appartenance est donc extrêmement fort, tourné vers l’Europe occidentale point deréférence. Ils manifestent également un sentiment de proximité avec des pays comme la Hongrie, laPologne, la Slovénie ou les Etats baltes – en gros ceux qu’ils perçoivent comme étant les plus développésavec eux en Europe centrale – et moins avec la Slovaquie ou la Roumanie moins avancées à leurs yeux.

⇒ Estonie

Pour les Estoniens interrogés à Tartu :

• L’Europe, au sens géographique du terme, n’est un ensemble que sur le papier. D’une part,tout en sachant que sur la carte elle s’étend jusqu’à l’Oural, ils veulent en exclure formellement laRussie ; d’autre part, ils affichent une grande distance avec les pays de l’Europe du Sud commel’Espagne, le Portugal ou les pays balkaniques (à l’exception relative de la Grèce).

Leur Europe est pour l’essentiel celle de leurs affinités ; elle inclut les pays nordiques(Danemark et Norvège notamment – la proximité avec la Finlande apparaissant moindre en dépitdes origines linguistiques communes, et étant sans doute plus caractéristique des habitants du Norddu pays), les pays « centraux » de l’Europe (en termes de latitude et non au sens de l’adjectif« central » dans PECO), le Royaume Uni, et dans une certaine mesure les autres Etats baltes.En ce qui concerne ces derniers, la proximité affective née du fait d’avoir partagé le même sort àl’époque de l’annexion par l’URSS existe chez les participants les plus âgés, mais peu chez lesplus jeunes.

• En définissant ainsi leur Europe privilégiée, les Estoniens manifestent leur tropisme pour sapartie développée, moderne, ordonnée, organisée, entité à laquelle ils s’assimilent ou point deréférence qu’ils aspirent à rejoindre – tout en ayant en même temps une impression de distance :distance soulignée particulièrement par les interviewés du groupe socio-économique moyen-inférieur en ce qui concerne le niveau économique et social, mais incluant également l’idée d’uneculture plus ancienne et plus policée dans les pays européens du Nord-Ouest qu’ils valorisentégalement pour cette raison.

• Le sentiment et le désir d’appartenance sont extrêmement forts, bien au-delà de laperspective de rejoindre un ensemble économiquement développé : l’Europe est terred’histoire ancienne, de mémoire, de culture et de valeurs, de beauté architecturale (cesconcepts s’étendant alors à l’Europe du Sud).

A l’inverse, les Etats-Unis constituent une contre-référence de par leur absence présuméed’éducation, de culture, et de pensée – même si leur niveau de vie est enviable.

Pour les personnes du groupe socio-économique moyen-supérieur notamment, seule l’occupationsoviétique a pu éloigner temporairement l’Estonie d’une Europe à laquelle elle se sent pleinementappartenir.

⇒ Slovénie

• En termes géographiques, les Slovènes interrogés ont une conception globale de l’Europe quiinclut les pays d’Europe Centrale autant que ceux d’Europe de l’Ouest, et naturellement lesBalkans dont ils se voient comme constituant la charnière avec ces derniers.

• L’Europe, pour eux, se définit aussi comme un ensemble historique et culturel, qui a été unifiédans le passé dans le cadre de grands empires – l’Empire romain ou plus récemment l’Empireaustro-hongrois – et caractérisé par des relations profondes et très anciennes entre des paysaux histoires, aux langues et aux cultures diverses mais procédant d’un fond commun – cettediversité en étant à la fois le sel et la richesse.

• Cette Europe est totalement incarnée aujourd’hui par l’Union Européenne, dont lesSlovènes, « mi balkaniques, mi occidentaux », se sentent cousins très proches avant derejoindre le centre de la famille – perspective évidente pour eux.

• La conscience d’écarts de développement est présente mais elle est généralisée aux différences quiexistent à cet égard entre le Nord et le Sud du continent : ils les évoquent en termes de degré, etnon comme un fossé qualitatif, et ils ne les considèrent pas comme une barrière qui les sépareraitde leurs voisins.

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Le sentiment d’appartenance et la volonté « d’en être » sont donc extrêmement forts.

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⇒ Chypre

A Chypre, les perceptions spontanées de ce qu’est l’Europe s’expriment initialement de façon assezdifférente d’un groupe à l’autre.

• Pour les participants du groupe socio-économique moyen-supérieur, l’Europe est d’abordune entité historique et culturelle, le berceau de la civilisation née à Athènes et à Rome etpoursuivie avec le christianisme, un ensemble de pays qui ont les mêmes références architecturaleset artistiques, en bref un ciment culturel commun.

L’Europe est diversité mais aussi échanges et brassage permanents, auxquels ces Chypriotes ont lesentiment de participer pleinement : par leur pratique d’autres langues, les contacts quotidiens avecles touristes, leur fréquentation personnelle plus approfondie d’autres Européens, leurs séjoursfréquents dans les universités d’autres pays, les nombreux mariages mixtes, etc.

La notion géographique de l’Europe n’est que secondaire, encore que ses limites soient très clairesdans leur esprit (ni la Russie, ni la Turquie).

L’Union Européenne, spontanément évoquée, est la matérialisation de cette communautéancienne de pays – qui ont compris l’inanité de leurs guerres intestines passées et l’évidencelogique de se rassembler, tout en gardant chacun son identité et son mode de vie, face auconcurrent-adversaire puissant que sont les Etats-Unis.

• Ceux du groupe socio-économique moyen-inférieur voient spontanément et immédiatementdans l’Europe l’Union Européenne, qui suscite à la fois des craintes devant le changementqu’implique l’adhésion et des espoirs (analysés plus loin).

Pour autant, la dimension historique et culturelle d’une Europe à laquelle ils se rattachent –quoiqu’avec des attitudes plus distantes – est loin d’être absente : références aux originescommunes des langues européennes, aux travaux archéologiques à Chypre auxquels participent denombreuses équipes d’autres pays d’Europe, aux proximités culturelles d’aujourd’hui commed’hier dans le théâtre ou l’opéra, et même à des modes de vie de plus en plus semblables.

L’Europe – c’est-à-dire pour l’essentiel l’Europe plus au Nord – constitue aussi une sorte deréférence dont on pourrait utilement s’inspirer, tant en ce qui concerne le développement desinfrastructures, du système de santé ou des espaces verts que des relations plus policées qu’onprête aux citoyens de ses pays.

• D’un groupe à l’autre, c’est la hiérarchie des perceptions qui diffère plutôt que le fond – lesChypriotes étant des Européens géographiquement distants du centre, mais culturellementet affectivement des Européens d’évidence, et depuis la nuit des temps.

⇒ République Slovaque

Chez les Slovaques interrogés, les évocations spontanées à propos de l’Europe sont de deux natures :

• Souvent en premier lieu, l’Europe est l’Union Européenne, ou plus généralement le processusd’unification qui s’y développe, sous l’impulsion principalement de l’Allemagne et de la France ;on y reviendra.

• L’Europe est par ailleurs perçue très fortement comme terre d’histoire commune etd’ancienne culture, de riche diversité culturelle procédant d’un fond commun d’ancienneté desrelations et des échanges.

Les uns ou les autres évoquent une origine ethnique celte commune, des valeurs communes issuesdu christianisme (dont celle de la famille), de même que l’existence de grands ensemblespolitiques dans le passé, dont celui de l’Empire austro-hongrois auquel ils ont appartenu.

L’unification de l’Europe apparaît comme un processus logique et naturel à partir de ce fondcommun entre des pays qui ont la sagesse des vieilles nations et la délicatesse des mœ urs (les interviewésoccultant d’ailleurs au passage les guerres qu’ils se sont livrées) – l’objectif économique derenforcement face aux Etats-Unis n’intervenant qu’en second lieu, n’étant possible que parce quel’Europe était déjà une communauté plus profonde, et coexistant d’ailleurs avec celui de lutter contrel’envahissement de la « culture de masse » américaine.

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Le cœ ur de cette Europe, ou de son mouvement, est à l’évidence à l’Ouest, dans les pays qui n’ont pasvécu la domination soviétique et qui constituent la référence de ce que le continent tout entier aurait duêtre sans elle.

La plupart des interviewés en excluent la Russie et même vraisemblablement l’Ukraine.

Le sentiment d’européanité est donc bien présent, même si, en même temps, les interviewés affirmentvivement leur identité slovaque. Pensant aux autres pays européens, beaucoup évoquent d’abordl’impression d’une proximité plus grande avec les autres peuples slaves d’Europe Centrale – mais ceuxqui ont eu l’occasion de voyager dans l’Union Européenne ont été particulièrement frappés aussi de ladisponibilité des gens à leur égard, de la prévenance et de la chaleur de leur accueil, du sentiment qu’ilsont donné « qu’ils n’étaient pas différents d’eux ».

⇒ Lettonie

Cette dimension culturelle de l’identité de l’Europe, observée dans les autres pays candidats à l’adhésion,est moins présente chez les Lettons interrogés, chez qui les perceptions de l’Europe se concentrentd’emblée sur le thème de l’Union Européenne.

S’il est manifeste qu’en pensant à l’Europe, les Lettons pensent spontanément aujourd’hui à sa partieOuest et à l’Union Européenne qui lui équivaut, celle-ci suscite, on le verra plus loin, des craintes et dessentiments de distance et de défiance.

• D’une part, dans l’état jugé très mauvais du pays, la tendance est à un pessimisme généralisé età un repli sur soi accentué par la perception de l’écart de niveau et de mode de vie

• D’autre part, l’Europe (occidentale) idéalisée pendant la période de l’occupation soviétiquepour ses valeurs familiales ou humanistes apparaît beaucoup plus aujourd’hui comme unprojet matérialiste, tourné vers le « business », dans lequel la protection des individus estsecondaire.

• Enfin chez certains, dans ce contexte négatif, l’Union Européenne réveille les souvenirsangoissants de "l’Union" Soviétique, c’est-à-dire de risque de dilution de la réalité et del’identité nationales dans un ensemble trop vaste et écrasant (même si on ne soupçonneévidemment pas une tentation de domination par la force).

⇒ Roumanie

Les toutes premières évocations des Roumains interviewés quand on aborde le sujet de l’Europe sontcelles de la prospérité, du niveau de vie élevé, d’une certaine égalité dans une société où existe uneimportante classe moyenne : cette Europe est celle d’une Union Européenne intégrée et qui réussit, lepoint de référence unique, le modèle auquel ils aspirent à se rattacher – et dont ils ont conscience queleur pays en est très loin sur le plan économique.

Plus profondément – et leurs discours sur ce thème se développent longuement – l’Europe est avanttout et fondamentalement une communauté historique et culturelle d’une très grande force et d’unetrès grande richesse, à laquelle ils revendiquent leur pleine appartenance avec une passion et une foiinépuisables.

A l’évidence, l’Europe est pour eux le continent de la civilisation, de l’éducation, de la valorisation dela culture générale, en même temps qu’une « grande famille » de peuples partageant les mêmesvaleurs, le sens de l’humain, des relations amènes entre les gens – tout cela l’opposant à une Amériqueplus individualiste, moins chaleureuse, plus matérialiste, n’ayant pas le goût de la culture et des idéespour elles-mêmes.

Ces peuples ont leurs racines dans l’Antiquité, et les Roumains (très conscients de leur identité latine)avec d’autres dans Rome ; ils ont été imprégnés des mêmes valeurs chrétiennes (les nuances entreorthodoxie et catholicisme apparaissant anecdotiques), ils ont interagi les uns avec les autres depuistoujours – même si cela a été parfois à l’occasion de conflits.

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L’Europe, pour les Roumains, c’est « chez eux », ils y sont depuis toujours, même s’ils en sont situésà la frontière orientale et s’ils ont reçu aussi des influences ottomanes : les lois sont pour beaucoupd’inspiration française, nombre de leurs ancêtres ont fait leurs études à Paris ou à Vienne, Bucarest étaitappelé « le petit Paris », ses rues, ses bâtiments sont tous d’inspiration occidentale ; on est resté en contactavec elle, même dans les périodes de repli communiste, par des livres ou des films, on a le sentimentparfois d’en savoir autant ou plus sur elle que les « Européens » (de l’Ouest) eux-mêmes, etc.

Depuis la chute du régime communiste, les contacts personnels qu’ils ont pu avoir, pour une partie d'entreeux, avec les autres Européens, les confortent dans l’idée qu’ils sont « de la même famille » : famillelatine d’abord, avec une particulière proximité avec les Français et les Italiens, mais famille qui s’étendplus largement à l’ensemble du continent.

Faisant état, à cet égard, de relations directes presque toujours courtoises, attentionnées et chaleureuses,ils dénoncent d’ailleurs un stéréotype proposé par les médias, qui tendrait à présenter les Roumainscomme méprisés ou « vus de travers » par les autres Européens, mais qu’ils ne retrouvent pas dans lescomportements personnels.

En résumé, rien ne les différencie fondamentalement des autres Européens en dehors du niveau dedéveloppement, de l’état désastreux du pays, du sens de l’organisation et de l’effort dont les décenniescommunistes les ont déshabitués, mais qu’ils estiment avoir également dans le fond d’eux-mêmes etqu’ils aspirent à retrouver.

Dans aucun autre des pays étudiés le sentiment européen ne s’exprime avec une telle force et unetelle passion.

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CHAPITRE III :

CONNAISSANCES ET PERCEPTIONS

DE L’UNION EUROPEENNE

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III.1. ETAT DES LIEUX DANS LES ETATS MEMBRES

III.1.1 PAYS « DU SUD » DE L’UNION EUROPEENNE, PRINCIPAUX BENEFICIAIRES DES POLITIQUES DE COHESION

⇒ Portugal

• Invités à s’exprimer plus spécifiquement sur l’Union Européenne, les Portugais – quil’avaient déjà évoquée très spontanément à propos de l’Europe en général, ou du passé récent etdes perspectives futures de leur pays – confirment leurs attitudes très largement positives.

• Ce qu’ils en savent est plus complet et plus précis dans les groupes socio-économiquesmoyens-supérieurs. Les connaissances sont plus partielles dans les autres groupes – maiselles y sont réelles et assez justes.

L’Union Européenne évoque d’abord, en résumé :

° Une construction d’abord économique, visant à réunir les forces des pays européenspour faire contre-poids à la puissance américaine (et secondairement asiatique) –construction qui se poursuit avec l’Union monétaire

° Une union qui va cependant bien au delà du domaine économique pour inclure aussibien les politiques de solidarité, dont ils savent à quel point le pays en a bénéficié, que desmesures législatives ou normatives concrètes au profit des travailleurs et desconsommateurs, des dispositions et des initiatives en matière de protection del’environnement, etc.

° Un ensemble institutionnel dont le détail est imparfaitement connu, mais dont ils saventou au moins pressentent qu’il est organisé, qu’il comporte des mécanismes décisionnels, etqu’il conduit à l’adoption de lois communes.

° Un ensemble qui est globalement très bénéfique pour le Portugal – même si une partiesubstantielle des interviewés formule des réserves : sur la lenteur de la réduction des écartsentre les pays riches et les pays pauvres ; sur l’adéquation de certaines directives avec lasituation concrète du pays ; ou encore sur le faible poids du Portugal, étant donné sa taille,dans les décisions communautaires.

• L’origine de la construction communautaire est assez floue dans les milieux socio-économiques moyens-inférieurs (encore qu’on y évoque les objectifs économiques précités,après la deuxième guerre mondiale), nettement meilleure dans les groupes moyens-supérieurs,dont les participants citent parfois des évènements très précis (Traité de Paris, CECA, Traité CEE,identité des pays fondateurs… )

• Lorsqu’on les relance sur les domaines d’action de l’Union Européenne, les Portugais de tousmilieux démontrent à nouveau leur bon niveau de connaissance. Sont ainsi mentionnés par lesuns ou par les autres :

° Le domaine économique et monétaire : la libre circulation des biens et des services, l’Euro,la politique des taux d’intérêt

° L’agriculture et la pêche – secteurs particulièrement importants au Portugal, pour lesquelsce qui domine dans les perceptions est l’instauration de quotas, et souvent leursconséquences perçues comme dommageables pour les paysans et les pêcheurs nationaux.

° La coopération scientifique (Agence Spatiale Européenne, recherche médicale… )° La réglementation et la normalisation – généralement comprises comme facteurs positifs

d’amélioration de la qualité et de la sécurité des produits.° La protection des consommateurs, par le biais de réglementations sur l’étiquetage

obligatoire, la mention obligatoire des dates de péremption, les directives sur les jouets …° La santé publique : embargos sur la viande liés à la crise de l’ESB, positions

communautaires sur les organismes génétiquement modifiés° Le domaine social : sécurité au travail, droits des travailleurs, travail des enfants, liberté de

circulation

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° L’éducation pour ce qui concerne la reconnaissance mutuelle des diplômes° Le sport (mentions confuses de l’arrêt Bosman)° L’aide humanitaire° L’action à proprement parler politique – ainsi pour les sanctions décidées contre l’Autriche

à la suite des dernières élections.

La légitimité de l’Union Européenne à intervenir dans ces domaines n’est mise en cause paraucun d’entre eux.

• La connaissance des institutions de l’Union et de leur fonctionnement est inégale. LaCommission, le Parlement Européen et la Cour de Justice sont des noms qui sont familiers à tousou presque ; mais la connaissance de leur composition et ou leurs attributions respectives va d’uneassez grande précision chez bon nombre de citoyens des catégories moyennes-supérieures à unniveau d’information plus flou, parfois nul, chez beaucoup de ceux des groupes moyens–inférieurs.

Quand on est (plus ou moins) informé, l’information est généralement assez exacte :° La Commission, formée de Commissaires responsables de divers secteurs, présente des

propositions et veille ultérieurement à l’application des décisions° Le Parlement Européen, formé de parlementaires élus au suffrage universel direct dans les

différents Etats membres, vote les lois communautaires, dans un rôle similaire à celui d’unParlement National

° La Cour de Justice est vue comme un tribunal chargé de trancher des cas que les tribunauxnationaux ne peuvent juger, et tout citoyen peut y faire appel à l’encontre de son propre Etatnational

° Le Conseil des Ministres n’est connu que d’une partie des interviewés des groupes moyens-supérieurs, comme étant la réunion des ministres européens compétents qui cherchent àaboutir à des décisions communes sur certaines politiques (mal spécifiées) – chaque Etatdisposant d’un poids de voix plus ou moins proportionnel à sa population. On sait que saprésidence est exercée pour 6 mois par rotation.

° Le Conseil Européen des Chefs d’Etat et de Gouvernement est un nom qui évoque quelquechose à tous les interviewés quand on leur présente – mais on n’en sait guère plus que lefait qu’il se réunit 2 fois par an et pose pour une « photo de famille » popularisée par lesmédias.

• Interrogés sur leurs sources de connaissance, les participants des groupes portugais seconsidèrent cependant comme peu informés – en ne citant guère comme sources que les médias(télévision, radio, journaux), des brochures ponctuellement diffusées par différents organismes (surl’Euro), ou le « bouche à oreille » avec des collègues de travail, avec des relations privées, ou enfamille.

Ils reconnaissent ne prêter qu’une attention inégale aux informations diffusées (notammentdans les catégories sociales moyennes-inférieures) qui présentent naturellement un caractère plusaride que des émissions de distraction.

En même temps, ils expriment presque un sentiment de culpabilité de ne pas en savoir pluset de ne pas s’y intéresser davantage, et manifestent de fortes attentes d’information (surlesquelles on reviendra dans un chapitre ultérieur). Ces attentes portent sur des questions variées,sont loin de se limiter à des sujets d’intérêt personnel immédiat, et reflètent au fond l’envie d’avoirune meilleure « culture générale » de l’Union Européenne, de ce qu’elle fait, de comment ellefonctionne, ou du rôle des représentants portugais au sein de ses institutions.

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⇒ Grèce

• Les Grecs interrogés apparaissent à la fois plus ambivalents et sensiblement moins bonsconnaisseurs de l’Union Européenne que leurs homologues portugais.

Le niveau de connaissance est plus faible dans les catégories socio-économiques moyennes-inférieures que dans les groupes moyens-supérieurs, chez les femmes que chez les hommes et(très nettement) dans la ville moyenne de province qu’à Athènes.

• Les connaissances qu’on a, ou qu’on croit avoir, sur l’Union Européenne, incluentprincipalement les notions :

° D’abord, d’un ensemble économique entre les différents pays européens : « abolition »des frontières, libre circulation des biens et des services, dispositions de régulation et decontrôle (citées par les interviewés du niveau socio-économique le plus haut, qui montrentainsi qu’ils ont conscience que le Marché Unique ne se réduit pas à une zone de libreéchange), union monétaire quasi-achevée avec l’entrée en vigueur prochaine de l’Euro.Ses implications pour le pays sont à la fois positives et négatives : effet indéniable demodernisation, mais crainte de la domination de grandes entreprises multinationalesétrangères au détriment du consommateur et de l’emploi ; et aussi crainte de détériorationde la qualité des produits, notamment alimentaires, du fait d’un mouvementd’harmonisation-banalisation présumé.

° D’une union qui doit également avoir des ambitions et des objectifs politiques (auxyeux surtout des interviewés athéniens, mais le thème est évoqué dans tous les groupes). Ils’agit notamment de pouvoir faire bloc pour s’opposer aux prétentions américaines,que ce soit dans le domaine économique ou dans d’autres, de s’apporter mutuellement unsoutien diplomatique, d’exercer son influence pour prévenir les conflits.Les jugements sur l’action communautaire dans ce domaine sont à dominantenégative : si on reconnaît qu’on a, certes, évité une troisième guerre mondiale, l’Europe estapparue largement impuissante (et restant dépendante des Etats-Unis) dans les conflitsrégionaux dans la zone voisine des Balkans très sensible pour les Grecs, et la timidité dusoutien des autres pays aux positions grecques dans certains différends régionaux a donné àpenser qu’ils étaient mus essentiellement par leurs propres intérêts.

° D’une dimension culturelle de l’Union Européenne, mentionnée surtout dans les groupesathéniens, mais demeurée mineure à leurs yeux au stade actuel

° D’une entité dominée par l’influence des grands pays (l’Allemagne, la France, leRoyaume Uni dans une moindre mesure puisqu’il tend à s’en tenir à l’écart et à privilégierles relations avec les Etats-Unis) et au fonctionnement globalement peu satisfaisant :incapacité ou difficulté à prendre des décisions (illustrée par exemple par l’affaire de lavache folle).

• L’origine de la construction communautaire et surtout ses objectifs initiaux sont assez flous.Seuls quelques interviewés masculins (à Athènes – et dans le groupe socio-économique moyen-supérieur de province) expriment l’idée d’une union économique créée après la deuxième guerremondiale comme instrument de prévention de nouveaux conflits. Pour la plupart, les buts étaientessentiellement voire purement économiques, au service d’abord des intérêts des pays les pluspuissants.

• Lorsqu’on propose aux participants de revenir plus en détail sur les différents domaines del’action communautaire qu’ils connaissent, on voit évoquer ou citer à nouveau :

° La politique économique, et l’interaction sur ce plan entre décisions communautaires etnationales, illustrée tout particulièrement par l’Euro. A cet égard, d’autres études récentesréalisées pour la Commission ont mis en évidence (en dépit d’incertitudes et d’inquiétudes)l’effet positif de la « qualification » pour la zone Euro pour réduire les frustrations vis à visdes pays européens plus riches et plus puissants, toujours soupçonnés de minorer la Grèce.

° La politique de l’emploi, dont on sait fort peu de choses, et à propos de laquelle courent desrumeurs inquiétantes (suppression des primes ou des allocations de fin d’année, relèvementde l’âge de la retraite )

° Les politiques de solidarité avec les pays moins développés de l’Union – dont on observequ’elles n’étaient presque pas évoquées spontanément, bien que tous aient conscience quela Grèce a reçu de l’Union des montants d’aide considérables.

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Ces politiques sont cependant objets de débats agités dans les différents groupes, oùcertains se demandent avec méfiance s’il s’agit réellement d’aides, ou s’il ne va pas« falloir les rembourser d’une manière ou d’une autre » et, surtout, beaucoup exprimentleurs doutes sur leur efficacité et sur la bonne gestion des organismes qui ont la charge deles mettre en œ uvre.

° Des allusions occasionnelles à la politique de l’environnement, à la défense des droits del’homme, à l’action humanitaire.

La vision des politiques communautaires est donc partielle, éclatée, et empreinte de fortesréserves chez certains.

• La connaissance institutionnelle de l’Union est plutôt meilleure. Spontanément, on évoque des« conseils » ou de « réunions » auxquels participent tous les Etats membres, pour prendre desdécisions dont chacun est ensuite responsable de l’application dans son propre pays – décisionsprises à la majorité (l’existence de cas où les décisions doivent être prises à l’unanimité n’estconnue que de peu de personnes, parmi les plus éduquées, et pas attribuée à une institutionspécifique).

Les institutions ne sont pas inconnues, les discussions révèlent cependant parfois uneconfusion sur leurs rôles respectifs et sur leur articulation :

° Le Parlement Européen, spontanément évoqué dans tous les groupes, et connu comme étantcomposé de députés élus dans chaque Etat-membre (avec un nombre de parlementaires lié àla taille de la population), vote les lois communautaires à la majorité, de même qu’unParlement national vote les lois nationales.

° La Commission est relativement bien connue dans les groupes socio-économiques moyens-supérieurs, un peu dans le groupe moyen-inférieur athénien, mais seulement de nom dansson équivalent provincial. Ceux qui la connaissent savent qu’elle est composée deCommissaires issus de chacun des Etats membres (1 par pays, sans certitude absolue,certains participants athéniens sachant nommer la Commissaire grecque actuelle ainsi quecertains de ses prédécesseurs), et peuvent définir son rôle comme étant de contrôler etd’exécuter les politiques et les décisions de l’Union Européenne

° Le Conseil des Ministres n’est guère connu sous ce nom en tant qu’institution ; maislorsqu’il est évoqué, il réfère aux réunions des Ministres compétents dans les différentsdomaines, qui déterminent les politiques communautaires.

° Le Conseil Européen des Chefs d’Etat et de Gouvernement n’est mentionné que dans legroupe moyen-supérieur athénien, mais reconnu beaucoup plus largement ensuite commeétant la réunion des Premiers Ministres qui prennent les décisions politiques les plusimportantes (entrée de nouveaux membres, guerres … )

° La Cour de Justice n’est pas évoquée spontanément, mais reconnue par les mieux informés,quand on en présente le nom, comme une Cour qui dit le droit communautaire, qui peutimposer des amendes aux Etats membres qui ne le respectent pas, et à laquelle tout citoyenpeut s’adresser.

• Leurs sources de connaissance sur l’Union, selon les réponses qu’ils formulent à cette question,sont principalement les médias, notamment télévision et journaux quotidiens, avec le « bouche àoreille » et les conversations qu’on peut avoir sur ce sujet.

Il s’y ajoute la mention d’informations sur l’Euro (brochures distribuées dans les banques, doubleétiquetage dans les magasins essentiellement) et – très rarement – de documents diffusés auxenfants dans les écoles.

Le sentiment général, sauf exception rarissime, est qu’aucune information ne parvientjamais des autorités communautaires, voire même des autorités nationales. En ce quiconcerne ces dernières, après discussion, beaucoup se rendent compte que les ministres grecss’expriment en fait fréquemment pour annoncer la position du gouvernement ou son succès sur telou tel sujet, mais leurs déclarations sont assez systématiquement suspectées d’être biaisées, de nemontrer que le coté positif des choses – et les responsables politiques de l’opposition ne paraissentpas davantage crédibles.

Des attentes se font jour d’informations en provenance directe des autoritéscommunautaires, pour mieux savoir en quoi les décisions prises vont affecter directement la viede chacun, mais aussi pour mieux connaître et comprendre les institutions, les mécanismes de voteet de décision – incluant le poids de chaque pays.

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⇒ Espagne

• Le thème de l’Union Européenne suscite de prime abord des réactions très positives en ce quiconcerne son objet idéal – le renforcement du pouvoir politique et économique des payseuropéens – mais parfois très réservées à la fois quant à la mise en œ uvre de l’harmonisationet à la distance perçue des institutions par rapport aux citoyens.

• Si l’on résume la vision moyenne qu’ont de l’Union Européenne les citoyens espagnolsinterrogés, on peut dire qu’ils la perçoivent comme :

° D’abord une construction économique entre les Etats membres, leur permettant de serenforcer sur ce plan pour rivaliser avec la puissance américaine. C’est uneconstruction permanente qui se fixe successivement des objectifs plus ambitieux – ainsipour l’Euro.

° Ensuite une entité qui vise, au delà de l’économie, à promouvoir des idéaux communs :il y a là une aspiration fusionnelle, mais le constat de progrès lents, imputés à une diversitéculturelle qui rend les choses complexes (en référence aux Etats-Unis), bien quepotentiellement porteuse de la richesse même de cette diversité.

° Un ensemble dans lequel l’Espagne n’est pas reconnue à la hauteur de sa réalité etn’est pas traitée de façon égalitaire (en référence aux agressions d’agriculteurs françaiscontre des camions espagnols, à la neutralité de Bruxelles dans l’affaire de Gibraltar, ou àl’absence de soutien dans ses négociations de droits de pêche avec le Maroc).

° Un ensemble confusément menaçant pour l’identité culturelle espagnole – même si cepropos apparaît contradictoire avec l’aspiration fusionnelle idéale évoquée plus haut.

° Une Union cependant nécessaire et porteuse de bénéfices pour l’Espagne, quereconnaissent tout particulièrement les citoyens des catégories socio-économiquesmoyennes-inférieures, très sensibles à l’amélioration des conditions de vie qu’ils viventdepuis l’adhésion de leur pays.

• L’origine de la construction communautaire est claire pour les personnes les plus éduquées,et aussi les plus âgées, qui évoquent le début du processus historique d’unification après ladeuxième guerre mondiale et les débuts de la CECA, sous l’impulsion essentiellement de laFrance, de l’Allemagne et du Benelux.

En revanche, pour les plus jeunes, c’est comme si les institutions européennes avaienttoujours existé, le caractère historique de la volonté de coopération des anciens ennemis leuréchappant largement, bien qu’ils situent la France et l’Allemagne comme constituant le noyauautour duquel l’Union s’étend et s’intègre progressivement.

• Après relance, la connaissance des domaines d’action de l’Union Européenne apparaît assezgénérale à Madrid (où on mentionne, mais sans guère de précision, outre l’économie,l’agriculture, le domaine social, le domaine militaire, la justice), mais très limitée dans la ville deprovince (où on évoque seulement l’agriculture et l’élevage).

Surtout, quelle que soit la variété ou le faible nombre des domaines évoqués, c’est en termesdominants de subventions qu’on parle de l’action communautaire – en étant conscient quel’Espagne en a été l’un des premiers bénéficiaires, et en citant pèle-mêle l’agriculture, letourisme rural, ou l’éducation et la formation professionnelle.

Les aides reçues par l’Espagne revêtent une signification concrète dans la ville provinciale,entourée d’un milieu rural ; c’est moins le cas à Madrid où elles ont une bien moins grandevisibilité.

En outre, des doutes s’expriment sur la bonne gestion et l’utilisation pertinente de ces fonds.

• La connaissance a priori des institutions et du fonctionnement communautaires estmédiocre. Les interviewés du niveau socio-économique moyen-supérieur, à ce propos, parlentd’eux-mêmes d’un poids dans les décisions qui reflète l’importance démographique de chaquepays, mais sans grande précision – alors que ceux du niveau moyen-inférieur confessent leurgrande ignorance.

Parmi les institutions, trois sont connues au moins de nom – la Commission, le ParlementEuropéen, et la Cour de Justice. Le Conseil des Ministres et le Conseil Européen des Chefs d’Etatet de Gouvernement sont reconnus seulement quand on les mentionne aux interviewés.

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Avec toutes, la distance paraît grande, l’articulation de leurs responsabilités n’est objet que deconjectures ou d’hypothèses logiques par référence aux institutions nationales (pour le Parlementpar exemple) – mais cela semble être le cas aussi des institutions nationales et régionales dansl’échantillon interrogé.

• Ce que les citoyens espagnols savent de l’Union Européenne parait provenir pour l’essentieldes médias (télévision, presse, et radio), qui font état des réunions européennes et des mesures quiconcernent plus particulièrement l’Espagne, mais on n’a pas le sentiment de recevoir del’information directe de l’Union.

Il s’y ajoute les campagnes d’information et les mesures de sensibilisation relatives à l’Euro,émanant des autorités publiques et relayées par les médias – mais c’est pratiquement le seul casdont on se souvienne d’informations qui ne passent pas entièrement par le truchement desjournalistes.

Comme ailleurs, le « bouche à oreille » fonctionne – selon les participants plutôt pour propager desrumeurs négatives et des doutes que l’inverse.

Dans ce contexte, les attentes d’information existent, centrées d’ailleurs sur des objets assezdifférents en fonction des critères de géographie et de niveau social

° Très concrètes dans la ville de province, sur les subventions, et ce qu’on en retire à titrepersonnel ou en tant que résident de la ville ou de la région ; plus générales à Madrid oùon s’interroge davantage sur les mécanismes des aides et leurs bénéfices pour le pays, ainsique sur les effets de l’adoption des différentes politiques communautaires (y compris, etfortement dans l’actualité du moment, pour l’Euro)

° Plus concrètes aussi dans la catégorie socio-économique moyenne-inférieure, qui ne selimite pas seulement à des demandes relatives aux implications personnelles des mesurescommunautaires (encore que celles-ci existent), mais manifeste également une ouverture etune curiosité à l’égard du fonctionnement des institutions, des candidats à l’adhésion, etc. –alors que la catégorie moyenne supérieure s’intéresse surtout à des questions économiqueset sociales et technologiques générales, et manifeste une moins grande implication.

⇒ Italie

• La sensible différence entre les plus urbains et les plus éduqués et les résidents de la villemoyenne, observée dans l’exploration des perceptions de l’Europe en général, se confirmelorsqu’on aborde plus précisément les attitudes concernant l’Union Européenne, à laquelleles seconds affichent une assez grande indifférence – tout en reconnaissant, comme les premiers,qu’elle constitue dans l’ensemble quelque chose de positif pour les Etats membres.

• Ce qu’en savent et en comprennent les Italiens (au moins les plus concernés d’entre eux) estqu’il s’agit :

° D’un ensemble économique né, avec le Marché Commun, de l’objectif decontrebalancer le poids des Etats-Unis (et de l’Asie).

° D’une construction qui, sur le plan économique, a contribué au développement del’Italie comme des autres Etats membres

° D’un processus dans lequel on cherche à instaurer des règles communes, avec lagrande difficulté à le faire due à la diversité européenne, et surtout à la prévalence desintérêts nationaux qui demeure.On l’a vu précédemment, la notion de règle commune, positive dans le principe, entraînedans son application de sérieuses réserves quand on la perçoit comme mettant en cause deshabitudes ou traditions nationales.

° D’un projet qui vise sans doute des buts idéaux qui débordent de l’économie pourenglober le champ social et culturel, mais qui reste trop largement en la matière austade d’expression de bonnes intentions

° D’une union dans laquelle la place perçue de l’Italie est faible, et qui entraîne de ce faitdes attitudes désabusées – même si on en impute la responsabilité première à la faiblesse dusystème italien ou à la médiocrité des responsables politiques du pays.

° D’une abstraction lointaine plutôt que de quelque chose qui vous concernepersonnellement.

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• L’origine de la construction communautaire est un sujet qui donne lieu à peu de débats et decommentaires dans les groupes italiens. Si certains citent explicitement les débuts dans lesannées 1950, ou le Traité de Rome fondateur du Marché Commun, on ne voit pratiquement pasmentionner spontanément la dimension politique initiale d’un projet dont le caractèreéconomique et abstrait domine dans les perceptions.

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• Poussés plus avant pour dire ce qu’ils connaissent de l’Union Européenne, et de ses domainesd’action, les uns ou les autres citent :

° (A nouveau) la construction économique progressive, qui débouche aujourd’hui sur l’Euro° L’agriculture° L’énergie° La politique de l’emploi° La lutte contre la criminalité

On observe que les aides communautaires aux pays ou régions les moins développés ne figurentpas (sinon, peut être, par la politique de l’emploi) dans les domaines d’action cités. Certes, lesgroupes ont été réunis dans la partie Nord de l’Italie, et les perceptions seraient sans doutedifférentes dans le Mezzogiorno ; ce fait nous apparaît toutefois frappant et symptomatique de ladifficulté qu’on les Italiens à « sentir » la réalité communautaire dans leur vie quotidienne, mêmesi beaucoup y sont sans doute idéologiquement favorables.

• En ce qui concerne les institutions et leur fonctionnement, la connaissance apparaît limitée :° Le Parlement Européen est connu de nom très généralement, mais son rôle et ses modalités

de fonctionnement le sont très mal ; on lui présume tout au plus un rôle législatif à l’instard’une assemblée parlementaire nationale.

° Les autres institutions sont plus ou moins connues de nom, avec parfois des erreursfactuelles notables (« La Commission de Strasbourg ») – mais on n’en sait guère plus, etleurs identités sont parfois confondues (débat, par exemple, dans un groupe, pour savoir sichaque pays dispose d’un représentant ou de plusieurs dizaines, mais où ?)

° Le fonctionnement de l’Union, les mécanismes décisionnels, les rôles respectifs desdifférentes institutions sont perçus dans une grande confusion – et comme reflétant l’idéevague de compromis confus entre les intérêts nationaux dans la prise de décision.

• Interrogés sur leurs sources de connaissance sur l’Union Européenne, les Italiens ne citent guèreque les médias : au premier chef la télévision et (surtout les hommes) les journaux

Les attentes d’information qui s’expriment à ce stade sont assez limitées, et se concentrent surle fait de savoir ce qu’y font « les représentants italiens » dans le climat général de défiance à leurégard.

⇒ Irlande

• Bien que les citoyens irlandais des catégories moyennes-supérieures de la population démontrentdes connaissances plus complètes et plus précises sur l’Union Européenne que les autres, lefond des perceptions est relativement homogène et globalement tout à fait positif.

• Ces perceptions incluent les idées :

° D’une entité qui concourt au développement économique des Etats membres et à laprospérité de leurs populations – les Irlandais de toutes catégories reconnaissantspontanément l’importance de l’apport communautaire dans les progrès que leurpays a accomplis.

° D’une entité économique qui comporte la libre circulation des produits et services (notionpositive) mais qui ne se réduit pas au libre échange : il s’y ajoute les politiques decohésion (même si on ne les désigne pas sous ce nom) ainsi que des législations et despolitiques communes dans les divers domaines de la vie économique, allant jusqu’à lamonnaie unique.

° D’un champ d’action qui déborde largement de l’économique et qui comporte desmesures en matière de protection des consommateurs, de qualité des produits, de progrèssocial ; en outre la libre circulation est aussi celle des hommes, pas seulement desmarchandises.

° De coopération et de compromis positif, chaque pays acceptant de renoncer à certainsprivilèges ou pouvoirs, mais bénéficiant en retour d’avancées substantielles.

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• Les raisons qui ont été à l’origine de la création de l’Union Européenne (ou de laCommunauté à l’époque) sont généralement bien connues et bien comprises par lesparticipants des groupes moyens-supérieurs : amener les pays européens à s’ouvrir et àcoopérer, après la deuxième guerre mondiale, pour contribuer à la paix et à la sécurité sur lecontinent, notamment entre la France, l’Allemagne et l’Italie. Elles le sont de manière plus floue,mais pas fausse, par les personnes des groupes sociaux moyens-inférieurs.

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• Des éléments de connaissance plus détaillés sur les champs d’action communautairesapparaissent dans le cours des discussions

° Domaine économique, incluant les activités de l’agriculture et de la pêche particulièrementimportantes pour l’Irlande : on parle ici (apparemment sans connotations négatives) de lafixation de quotas, et aussi de la crise de l’ESB et des mesures d’abattage des troupeaux

° Monnaie unique ; si son instauration suscite de sérieuses réserves et des inquiétudes dans lemilieux socio-économiques les moins élevés, les autres discernent bien la continuitélogique qui conduit à la mettre en place.

° Cohésion : peu de précisions sont apportées, mais il est clair que c’est un domaine perçucomme tout à fait essentiel, dans le cadre duquel les infrastructures irlandaises se sontdéveloppées et modernisées.

° Progrès social : les uns ou les autres citent les règles d’hygiène et de sécurité, l’égalitéprofessionnelle entre les hommes et les femmes, ou le salaire minimum.

° Protection des consommateurs, et amélioration de la qualité des produits par l’instaurationde normes communautaires, y compris en matière alimentaire

° Environnement : règles concernant les déchets et le recyclage° Droits de l’homme ; politique à l’égard des réfugiés (qui inclurait des quotas par pays

d’accueil)

La légitimité de l’intervention de l’Union Européenne dans ces divers domaines apparaîtnaturelle à la plupart.

• En ce qui concerne les institutions et les processus de fonctionnement de l’Union, lesperceptions sont nettement plus floues.

Il y a bien l’idée que chaque Etat-membre a son (ses ?) représentant(s) dans l’Union Européenne,qu’ils participent aux décisions prises en commun, et au suivi de leurs application ; celle aussid’une représentation dont la taille est lié au poids démographique des différents pays, mais sansqu’on sache précisément à quelles institutions ces dispositions s’appliquent.

Le Parlement Européen est connu, au moins de nom, de tous ; on sait ou on présume que s’yprennent les décisions d’adoption de législations, de directives, de politiques. La Commission,évoquée spontanément par une partie des interviewés, apparaît également connue de tous aprèsrelance ; les plus informés l’évoquent comme composée de « Ministres » désignés par lesdifférents Etats membres, mais il règne ici des confusions entre elle et le Parlement.

La Cour de Justice, parfois mentionnée spontanément, est vue comme une sorte de Cour d’Appel àlaquelle les citoyens peuvent s’adresser s’ils ne sont pas satisfaits d’une décision rendue par untribunal national.

Le Conseil des Ministres et le Conseil Européen des Chefs d’Etat et de Gouvernement ne sont quepeu connus, leur rôle est flou, on les confond parfois avec le Conseil de l’Europe.

• Les sources de connaissance sur l’Union Européenne dont font état les interviewés irlandais sontprincipalement les médias (télévision, journaux), auxquels s’ajoutent, sur le sujet spécifique del’Euro, des brochures dont ils ont été destinataires, mais dont ils n’identifient pas l’origine avecclarté, en dehors de leur banque ; le « bouche à oreille » est limité, les sujets communautairesn’étant guère l’objet de discussions quotidiennes (davantage toutefois, chez certaines personnesdes catégories moyennes- supérieures dans le cadre de leur activité professionnelle).

Les attentes d’information qui s’expriment à ce stade concernent, d’une part, les subventionscommunautaires, les critères d’éligibilité, et en quoi elles pourraient être d’un bénéfice direct etpersonnel, et, plus généralement, des éléments de connaissance de base, simples, sur lefonctionnement de l’Union, les mesures récemment décidées, leur impact sur l’Irlande, etc.

Sans se montrer avides d’information sur l’Union Européenne, les Irlandais y apparaissent apriori ouverts – et notent en même temps qu’ils ne sauraient guère où s’en procureraujourd’hui.

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III.1.2 PAYS « DU NORD », MEMBRES ANCIENS DE L’UNION EUROPEENNE

⇒ France

• Les attitudes des Français à l’égard de l’Union Européenne sont marquées par uneambivalence : adhésion assez générale au dessein noble d’union destinée à rapprocher lespays européens, et à les renforcer face aux Etats-Unis, mais sentiment de faiblesse desréalisations et de lenteur de l’avancement dans un contexte de désaccords récurrents entre lesEtats membres, amenant à douter fortement qu’il y ait vraiment « une politique européenne ».

• Ce qu’ils savent ou perçoivent dans une première étape de l’Union Européenne concerne :° L’idée d’entente, de coopération, de réglementation commune, recherchées peu ou prou

dans tous les domaines, mais très partiellement réalisées° Des domaines majeurs d’application dont celui de l’économie (dans lequel on reconnaît

bien des avancées, tout en dénonçant parfois la primauté des intérêts économiques), et celuide l’agriculture (avec des opinions controversées).

° L’existence d’institutions toutefois nébuleuses, dont on n’évoque guère spontanémentque le siège, lui-même incertain, mais pas les processus et les mécanismes selon lesquelselles fonctionnent

° L’impression d’un ensemble fragile, parce que divisé° Le vague sentiment d’une certaine pesanteur bureautique (sans grandes précisions

toutefois), et d’un risque de perte d’éléments d’identité nationale° L’impression de distance et d’abstraction.

• Les origines de l’Union Européenne apparaissent aussi dans les premiers propos desinterviewés et, en l’occurrence, les perceptions sont dépourvues d’ambiguïté. Au sortir de ladeuxième guerre mondiale, il s’agissait de créer une entente entre la France et l’Allemagne, dansun but politique au sens le plus noble du terme, en mettant en œ uvre les moyens économiquesaptes, en outre, à renforcer les pays européens à la fois pour se protéger du bloc soviétique enpleine période de guerre froide, et pour « contrer » les Etats-Unis.

Parmi ses promoteurs sont cités le Général de Gaulle (dans tous les groupes), Jean Monnet etRobert Schuman (seulement dans le groupe socio-économique moyen-supérieur parisien) ; parmises premières manifestations la politique du charbon et de l’acier (CECA) et l’Europe verte,conçues d’abord comme des politiques de reconstruction.

• Les champs d’action de l’Union Européenne cités après relance sont notamment :° Toute une série de domaines d’ordre économique : finances, échanges monétaires, monnaie

unique avec l’Euro, bourse, fiscalité, fusions et rapprochements d’entreprises, commerce,énergie …

° Spécifiquement le domaine agricole, avec des vues contradictoires d’un interviewé à l’autresur son caractère bénéfique ou destructeur pour la vie, ou la survie, des agriculteurs français– et des propos parfois confus sur deux de ses aspects qui marquent particulièrement : lessubventions et les quotas.

° Corrélativement, les produits agricoles et alimentaires. Sont évoqués ici notamment lamaladie de la vache folle – dont la gestion n’a pas laissé, pour le moins, l’impressiond’harmonie, et dont on considère volontiers que les intérêts économiques y ont étélongtemps prédominants – les OGM avec les mêmes doutes, et le stéréotype del’harmonisation synonyme d’uniformisation (avec l’exemple emblématique des fromages).

° L’environnement : domaine où l’action supra-nationale est parfaitement légitime – saufquand les traditions nationales de chasse et de pêche sont en cause – mais où l’efficacitéreste encore à prouver

° La justice : on s’entend à reconnaître le caractère souhaitable d’une coopération accruecontre la criminalité, tout en croyant reconnaître des signes de fonctionnement imparfaitdans des cas récents de difficultés d’extradition.

° Toute une série de sujets évoqués ça et là, sur lesquels les interviewés savent peu de chosesmais qui donnent le sentiment que l’action communautaire est susceptible de s’exercer danstous les domaines.

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• En ce qui concerne les institutions, on a vu qu’on soupçonnait leur existence plutôt qu’on neles connaissait. Les explorations complémentaires sur ce sujet confirment la grandeincertitude qui règne dans le plupart des esprits.

° Le Parlement Européen est la seule institution à être (parfois) citée spontanément, mais onn’en sait guère plus que le fait « qu’il doit voter » des lois ou d’autres dispositions

° La Commission, quand on évoque son nom, est reconnue comme quelque chose dont on aentendu parler, mais très rares sont ceux qui savent bien quel est son rôleLa confusion avec le Parlement est courante – due en partie d’ailleurs à son appellation quipeut faire penser à commission parlementaireQuelques uns la qualifient d’exécutif ou en parlent en des termes qui peuvent permettre delui attribuer ce statut – d’autres n’y voyant guère plus qu’une institution « qui débat etlégifère »

° Le Conseil des Ministres est très mal connu dans sa composition et ses attributions, ou alorsde manière très grossière, simpliste, ou erronée

° Le Conseil Européen des Chefs d’Etat et de Gouvernement, inconnu dans la ville deprovince, est un nom qui réveille à Paris des souvenirs relatifs au Sommet de Nice. De fait,on sait généralement que les responsables suprêmes de différents pays se réunissent plus oumoins régulièrement, mais personne ne songe en termes d’institution à des réunions quiconsistent en « des discussions de marchands de tapis » plus qu’en des instancesdécisionnelles organisées.

° La Cour de Justice, très peu connue en province, est davantage évoquée à Paris, mais avecune totale confusion avec le Tribunal Pénal International de La Haye

En résumé, la méconnaissance et la confusion sont impressionnantes à propos d’un systèmeinstitutionnel « sans tête » et donc désincarné.

• Les sources de connaissance de l’Union Européenne qui sont mentionnées par les participantsdes groupes français sont :

° Essentiellement les médias (télévision et presse notamment), avec le sentiment répanduqu’on en entend parler en permanence mais qu’on n’en retient rien.

° Très peu, l’école pour les enfants, ou les conversations personnelles ou privées° Chez quelques très rares interviewés, une visite « très pédagogique » du Parlement

Européen, ou celle du « Centre Européen de la Défense »

L’information diffusée apparaît dans l’ensemble rébarbative et inefficace, faute de lignedirectrice qui permettrait d’en comprendre le sens et la portée.

Cependant des attentes réelles s’expriment à l’égard d’une information européennedifférente, de vulgarisation, transparente et accessible : sur le fonctionnement institutionnel ; surles règles communes et les règles spécifiques à chaque pays ; ou sur les bénéfices de laconstruction européenne pour le citoyen.

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⇒ Belgique

• L’Union Européenne, déjà spontanément évoquée dans les premières phases des discussions,est l’objet d’attitudes générales favorables – sauf dans le groupe socio-économique moyen-inférieur flamand, très crispé sur ses propres craintes par rapport à l’avenir, défiant à l’égardde toute institution, et ne voyant guère dans l’entité communautaire qu’un lieu d’exercice dupouvoir économique des « gros » aux dépens des « petits ».

• En dehors du cas de ce groupe, l’Union Européenne apparaît d’abord comme :° Une construction économique positive, dont les Etats membres tirent avantage pour se

renforcer face à d’autres pays (Etats-Unis notamment). L’Euro en est le dernieraboutissement, accueilli dans l’ensemble avec faveur.

° Une ambition qui dépasse le champ économique pour inclure un rapprochement plusgénéral entre les pays européens, jusqu’aux plans culturel et éducatif

° Un mouvement général d’harmonisation dans de très nombreux domaines, qui nesuscite pas de réticences de fond même si certaines mesures peuvent ponctuellemententraîner des inquiétudes ou des interrogations

° Un processus graduel et continu, bien compris et accepté comme tel par certains, maistaxé par beaucoup d’une lenteur et d’une lourdeur dont ils craignent qu’elles ne soientencore accentuées par la complexité supplémentaire que causera l’adhésion de nouveauxEtats membres

° Un processus dont beaucoup ont conscience qu’il est organisé autour d’un ensemblede règles et d’institutions ayant chacune leur rôle (dans les groupes moyens-supérieurssurtout)

• La connaissance des origines de l’Union Européenne est bonne (sauf dans le groupe flamandmoyen-inférieur) : on y évoque notamment le Benelux comme point de départ, le projet deconstruire un ensemble qui évite le renouvellement des conflits à l’issue de la deuxième guerremondiale, avec d’abord la CECA (puis Euratom, cité une fois), ou encore les noms depersonnalités comme Adenauer, Schuman, et Spaak.

• Les domaines d’action communautaire cités, quoiqu’incomplets et hétérogènes dans tous lesgroupes, montrent que beaucoup de Belges ont conscience de la vocation de l’UnionEuropéenne à intervenir dans des champs très larges.

A coté de l’économie (échanges commerciaux, fiscalité, monnaie unique, etc.), les uns ou lesautres évoquent l’agriculture, la pêche, l’énergie, les transports, la coopération scientifique,l’éducation, la culture, l’égalité sociale ou la justice.

Le domaine économique est certes le plus développé, mais la légitimité de l’UnionEuropéenne à agir dans les autres n’est pas mise en cause.

• Les institutions et l’existence de mécanismes institutionnels sont bien connus dans lescatégories socio-économiques moyennes-supérieures, mais de manière nettement plusconfuse dans les autres.

Chez les mieux informés :° La Commission est un nom familier. On sait qu’elle est composée de Commissaires

responsables chacun d’un secteur (les noms de Busquin et de Van Miert naguère sontoccasionnellement cités). On voit son rôle comme étant à la fois de préparer les projets etde contrôler ensuite leur bonne mise en œ uvre, y compris en ce qui concerne les« irrégularités » éventuellement commises par les Etats membres.Elle est celle qui gère l’Union Européenne au quotidien ; la comparaison avec ungouvernement national est parfois faite.

° Le Parlement Européen, également familier, composé de députés européens élus danschaque Etat-membre, vote les lois, et peut en proposer, dans les domaines qui ne peuventpas être décidés au niveau national. Il est vu comme ayant son siège à Strasbourg.

° Le Conseil des Ministres est peu identifié spontanément en tant qu’institution ; mais on saitou on suppose que les Ministres des différents pays se réunissent régulièrement. A l’inversedes deux instances précédentes, dont le caractère fondamentalement communautaire estévident, le Conseil apparaît plutôt comme un lieu où les différents Etats membres viennentavant tout défendre leurs intérêts, avant la recherche de compromis.

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° Le Conseil Européen des Chefs d’Etat et de Gouvernement n’est pas bien connu, et maldistingué du Conseil des Ministres. On devine, plutôt qu’on ne sait, qu’il se réunit pourdiscuter des décisions les plus importantes.

° La Cour de Justice, située à Luxembourg, sert en quelque sorte de « Cour d’Appel » ultimequand les moyens judiciaires au plan national ont été épuisés. On évoque des décisions desa part dans le domaine des droits des consommateurs, et sa mission plus générale de faireappliquer le droit communautaire là où il n’est pas respecté.

Chez les autres, la connaissance n’est pas inexistante, mais elle est plus floue. Par exemple, on sedemande parfois s’il y a une Commission ou plusieurs commissions, selon les domaines ; onconfond parfois les règles de prise de décision au Conseil (majorité ou unanimité) avec lesprocédures de vote au Parlement, ou le nombre de voix dont disposent les différents Etatsmembres et leur nombre de parlementaires européens ; ou bien on parle de décisions qui sontprises par le Parlement sur proposition de la Commission, et qui doivent être « ratifiées » par lesEtats membres, etc. Le Conseil des Ministres et le Conseil Européen y sont souvent nébuleux.

Outre les institutions précitées (sur lesquelles on faisait réagir les interviewés après exploration deleurs connaissances spontanées) quelques-uns en citent d’autres : la Banque Centrale, le FondsSocial Européen, l’Eurocorps ou encore un Conseil spécial pour l’Agriculture.

• Les sources de connaissances de l’Union Européenne qui sont citées incluent, dans tous lesgroupes, d’abord les médias : télévision, radio, presse écrite.

Il s’y ajoute – surtout dans les groupes moyens-supérieurs – d’autres sources : discussions dans uncadre privé ou professionnel ; enfants qui entendent parler de l’Europe à l’école où à l’université ;rumeurs (à Bruxelles) émanant de personnes qui travaillent dans les institutions communautaires ;information sur l’Euro reçue des banques ; Internet ; et dans quelques cas mention spécifiqued’Euronews et même du site Internet de l’Union Européenne.

En dépit de cette relative diversité, beaucoup des interviewés s’accordent à penser qu’ils nereçoivent qu’une information partielle, filtrée par les thèmes d’intérêt propre des journalistes,les limites de leurs connaissances, ou la tendance des médias à s’intéresser à la difficulté desprocessus de négociation plutôt qu’aux décisions qui en résultent.

On sait que l’on voit ou entend beaucoup de choses sur l’Union Européenne, mais sans filconducteur, sans explications simplifiées qui permettraient de mieux comprendre unematière à l’évidence complexe.

En dehors du groupe le plus crispé en Flandre, les citoyens belges interrogés apparaissentouverts à une information qui ne se limite pas à l’impact direct de l’action communautaire surleur existence, mais qui leur donne une meilleure « culture générale » de l’Union Européenne

⇒ Luxembourg

• Les attitudes des Luxembourgeois, globalement positives de la part de citoyens d’un trèspetit pays qui ont conscience que celui-ci ne pourrait plus « exister » en dehors de l’UnionEuropéenne, et qui sont manifestement europhiles sur un plan plus large, sont cependantassorties d’inquiétudes pour l’avenir, qui s’expriment particulièrement dans les catégoriessocio-économiques moyennes-inférieures.

• Leurs propos initiaux mettent en évidence les principales dimensions de perception suivantes :

° Une construction politico-économique qui avait pour objectif premier de maintenir lapaix sur le continent (et qui y a réussi)

° Un vaste espace économique qui a indéniablement fortement contribué à la croissanceet à la prospérité

° Un projet qui n’est pas seulement d’efficacité économique, mais qui s’étend à denombreux domaines, en visant le noble but d’une égalité croissante entre ses pays-membres.

° Un processus qui implique logiquement ouverture et harmonisation croissantes entoutes choses, mais qui inquiète quand celles-ci touchent à des domaines où sont encause des caractères originaux du pays, dont certains sont à la source de sondéveloppement et de son bien-être.

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Plusieurs évoquent ici le secret bancaire et la fiscalité, mais aussi la concurrence faite auxartisans luxembourgeois par des entreprises d’autres pays proches, les difficultés des petitscommerçants devant le développement de magasins à grande surface d’origine étrangère, lerachat de grandes entreprises luxembourgeoises ou encore l’imposition de quotas deproduction à l’industrie sidérurgique (avec une confusion manifeste entre l’effet desmesures communautaires d’assainissement des marchés sidérurgiques et les réorientationsstratégiques d’ARBED)

° Un processus qui peut amener le pays à voir son identité se diluer et son influence, déjàfaible par rapport à celle de ses grands voisins, s’amenuiser encore à la suite de l’ouverturede l’Union Européenne à de nouveaux Etats membres.

° Un processus – dans ses aspects positifs comme négatifs – en tous cas lent, difficile,marqué par les affrontements d’intérêt des différents pays, et peu aisé à suivre et àcomprendre.

• L’historique de l’Union Européenne est bien connu des participants du groupe socio-économique moyen-supérieur : le Luxembourg pays fondateur et même précurseur avec l’UEBLet le Benelux, la CECA, Le Marché Commun, Euratom, pour aboutir à l’Union d’aujourd’hui et àla monnaie unique. Spaak, Schuman, Werner sont parmi les personnalités citées comme ayantinitié le mouvement ou contribué à sa poursuite.

En revanche, les participants du groupe moyen-inférieur, s’ils ont bien conscience des buts initiauxde paix et d’accroissement de la prospérité, évoquent peu d’évènements précis de l’histoire de laconstruction communautaire.

• Interrogés plus avant sur ce qu’ils savent des domaines d’action de l’Union Européenne, lesinterviewés des deux groupes confirment leur connaissance de leur diversité en citant :

° La sphère économique, incluant les aspects déjà mentionnés, mais aussi le contrôle del’inflation et l’orthodoxie budgétaire des Etats membres

° La coopération en matière de recherche° Une politique visant à développer l’emploi et diminuer le chômage° L’environnement° L’éducation, avec les échanges Erasmus fortement valorisés° La justice, sans guère de précision.

• Les institutions communautaires sont clairement identifiées par les citoyens des catégoriesmoyennes-supérieures, mais avec des lacunes d’information sur le statut et le rôle decertaines, et surtout une impression de flou quant aux processus décisionnels.

° La Commission « donne les directives » (quelques uns évoquant précisément son droitd’initiative), veille à l’application des décisions, administre l’Union

° Le Parlement Européen est, comme un Parlement national, l’organe législatif « représentantdu peuple », mais certains ne lui reconnaissent qu’un rôle consultatif

° Le Conseil des Ministres est une instance plus confuse, non pas par sa composition maisdans son fonctionnement : le lieu où se confrontent, ou se heurtent, les intérêts nationaux, etoù il est difficile de parvenir à des décisions

° Le Conseil Européen des Chefs d’Etat et de Gouvernement n’est jamais évoquéspontanément, même si on sait que les responsables politiques suprêmes des Etats membresse réunissent avec un rôle qu’on pense « décisionnel » sans précision.

° La Cour de Justice est une institution familière, à qui on attribue le contrôle de l’applicationdu droit communautaire et dont on pense qu’elle sert d’instance d’appel de dernier recours,une fois épuisés les moyens nationaux.

Ces interviewés mentionnent en outre le rôle des institutions nationales de la Chambre et duConseil d’Etat pour l’adaptation des directives communautaires à la situation luxembourgeoise

En revanche, les connaissances sont très floues dans le groupe socio-économique moyen-inférieur, dont les participants avouent leur ignorance sur des processus décisionnels dans lesquelsils remarquent surtout les « disputes » entre les Etats membres (avec quelques mentions du droit deveto dont dispose le Luxembourg comme les autres Etats membres).

Le Conseil des Ministres et le Conseil Européen des Chefs d’Etat et de Gouvernement y sontquasi-inconnus (on n’évoque pour eux qu’un rôle de « collecte de l’information » et de porte-parole) ; la Commission est connue de nom mais on la croit parfois composée de Ministres. LeParlement Européen se voit plus précisément attribuer des fonctions de contrôle.

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Seule la Cour de Justice est plus clairement perçue dans sa mission de faire respecter le droiteuropéen et dans sa fonction de recours de dernière instance.

• Les sources de connaissance des citoyens luxembourgeois sur l’Union Européenne sont d’abord,comme partout, les médias – mais des médias qui sont ici de plusieurs pays : leur multilinguismeleur permet aisément de regarder les télévisions de pays voisins (ainsi qu’Euronews parfois cité),ou de lire leurs journaux.

Les participants du groupe le plus éduqué y ajoutent les universités d’autres pays, que les étudiantsluxembourgeois fréquentent nécessairement du fait de l’absence d’établissement d’enseignementsupérieur dans leur pays.

En dépit de cette ouverture potentielle sur l’extérieur, et du fait que les sources (les médias)parlent sans doute beaucoup des affaires européennes, ils déclarent prêter peu d’attention à uneinformation peu attractive sur des notions trop abstraites et trop lointaines, ou même (pour legroupe moyen-inférieur) trop compliquée et formulée dans un vocabulaire « incompréhensiblepour les petites gens ».

Les attentes d’information apparaissent dans l’ensemble assez faibles, malgré une ouverturede principe à en savoir plus chez les plus éduqués – les autres se bornant à des questions de typepoujadiste sur l’absentéisme des parlementaires ou le train de vie des ministres.

⇒ Allemagne

• Alors que l’idée européenne est une idée positive, l’Union Européenne suscite de primeabord des associations presque exclusivement négatives.

• Les discours initiaux des participants des discussions de groupe se concentrentprincipalement sur les thèmes suivants :

° L’impression d’une bureaucratie tentaculaire et inefficace – impression dominante danstous les groupes

° La critique du coût du fonctionnement communautaire – avec l’idée que l’Allemagneen est « la vache à lait »

° L’idée d’une Union Européenne qui consacre des efforts considérables à traiter dedétails plus que de questions de fond, pour aboutir parfois à des mesures ridicules voirecontraires aux intérêts des consommateurs (« la courbure de la banane »)

° L’idée de pagaie, de confusion° Celle d’absence de dessein, de fil directeur, de leadership

On tend à voir dans les acteurs actuels (inconnus) de la construction communautaire des hommespolitiques de second rang, en fort contraste avec les personnalités qui ont été à son origine ou quil’ont poursuivie.

• La plupart ont des idées assez claires, à l’inverse, sur les origines et l’histoire de l’UnionEuropéenne.

Pour tous, l’objectif en était d’abord politique : assurer la paix en Europe à la suite de ladeuxième guerre mondiale, en « neutralisant » l’Allemagne ou en « l’inscrivant dans un projeteuropéen » – certains la voyant aussi comme un enfant de la guerre froide pour contrebalancer lebloc de l’Est.

Sur cet objectif politique s’est greffé un objectif économique (qu’on tend à voir comme ultérieur)

De nombreux acteurs moteurs de la construction européenne sont cités :° Schuman, et surtout Adenauer et de Gaulle, visionnaires de l’avenir après la catastrophe de

la guerre (ces personnalités étant cependant moins présentes à l’esprit des plus jeunes)° Kohl et Mitterrand, précédés par Schmidt et Giscard d’Estaing (Brandt est également cité,

mais plus rarement)° Le couple franco-allemand plus généralement, considéré comme initiateur et moteur

permanent.

Si on mentionne parfois des personnalités et des événements plus récents (comme le Sommetde Nice), le sentiment très général est celui d’une panne de moteur, d’une absence de visionaujourd’hui, d’une absence de leaders et d’une absence de charisme.

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• La connaissance de l’existence de politiques communautaires est très faible ; elles ne sontévoquées que par bribes, et le plus souvent de manière négative :

° La gestion de la crise de l’ESB, prise comme exemple de l’inefficacité européenne – sansqu’il soit clair finalement si la responsabilité en incombe à l’Europe en tant que telle, quiaurait refusé d’adopter des propositions faites par la France et l’Allemagne, ou aux autrespays qui auraient refusé d’appliquer des décisions européennes.

° La fixation des quotas de production agricole et, de manière contradictoire, les subventionsqui s’y attachent, menant à une montagne de beurre et à un lac de lait.

° Des directives sur « la courbure des bananes » ou la « taille des pommes »° Les aides aux pays économiquement les moins développés, citées par quelques uns dans

chaque groupe, mais dénoncées parfois avec virulence comme symboliques de«l’exploitation » de l’Allemagne

° Les sanctions contre l’Autriche, décriées par une partie des participants (de niveau socio-économique moyen-supérieur) comme injustes et anormales

° Les positions politiques adoptées dans la guerre du Kosovo – seul exemple d’actionreconnue comme positive dans ces discours spontanés.

• Les institutions communautaires sont globalement connues de nom, mais leur rôles et leurfonctionnement sont nébuleux :

° La Commission est identifiée par tous, ou du moins les Commissaires, personnagespolitiques perçus comme mineurs (et envoyés « à Bruxelles » pour cette raison), et parfoistaxés de corruption.Dans la réalité, on sait rarement qui ils sont : quelques-uns seulement citent les noms deProdi, de Verheugen, ou évoquent « cette Française corrompue ».Le rôle de la Commission est très mal connu.

° Le Parlement Européen est également connu de tous ; par analogie avec le Bundestag onsuppose qu’il « examine des lois » ou « fait des propositions de lois », ou encore qu’il« représente la voix des pays à Bruxelles » – mais avec une grande incertitude sur son statutet son rôleCertains se demandent d’ailleurs de quelles lois il peut s’agir, « puisqu’il existe des loisnationales »En outre, l’image générale du Parlement Européen est également très médiocre : faibleintérêt des citoyens pour les élections européennes, scandale de l’absentéisme en séance,coût aberrant des déplacements entre Bruxelles et Strasbourg …

° Le Conseil des Ministres et le Conseil Européen des Chefs d’Etat et de Gouvernement sont,en tant qu’institutions, inconnus, bien qu’on connaisse l’existence de réunions desdirigeants européens qui « cherchent à trouver des compromis » – ce qui amène parfois à sedemander si « ce ne sont pas eux qui décident après tout sans que le Parlement ait rien àdire ».

° La Cour de Justice, citée assez spontanément dans l’ensemble des groupes,est pratiquementla seule des institutions à avoir une image positive : organe supranational d’ultime recours :organe de « contrôle » de l’utilisation des fonds européens (référence à des décisionscontraignant des entreprises à rendre des subventions européennes dont elles auraientbénéficié à tort).Elle est cependant partiellement confondue avec d’autres Cours de Justice internationales(citation des procès des criminels de guerre yougoslaves)

Quant à la Banque Centrale Européenne, mentionnée spontanément, ainsi que son président, parplusieurs interviewés, et connue comme ayant son siège à Francfort, on sait qu’elle est responsablede la politique monétaire et de la fixation des taux d’intérêt.

Dans l’ensemble, les processus de décision communautaires sont inconnus, et ne sont guèreobjets que de conjectures. Par analogie avec le système politique national on imagine que laCommission (à moins que ce ne soit le Parlement) dépose des projets de lois qui sont discutés et« ratifiés » par le Parlement (ou par le Conseil des Ministres ?) mais personne n’en est absolumentsur. L’existence d’un organe véritablement exécutif est inconnue (les institutions n’ayant alorsqu’un rôle de recommandation non suivie d’application obligatoire et contrôlée)

• Les sources de connaissance et d’information sur l’Europe ne sont guère que les médias, enpremier lieu la télévision – dont les émissions sont perçues comme essentiellement critiques.

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Il ne s’y ajoute guère que quelques mentions, chez les plus jeunes, d’un peu d’information reçuependant leurs études, ou de brochures parfois citées comme disponibles dans les lieux publics,mais indigestes, difficiles à lire, nécessitant un effort auquel on a renoncé.

Cependant, après discussion, les citoyens allemands interrogés s’avouent quelque peucoupables d’en savoir si peu sur l’Union Européenne, et admettent un besoin d’informationpour mieux comprendre comment fonctionnent les autorités européennes et ce dont l’UnionEuropéenne s’occupe concrètement.

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⇒ Pays Bas

• Les attitudes néerlandaises à l’égard de l’Union Européenne, très largement négatives, sontmarquées par une grande défiance et par un désintérêt affiché.

• Les discours spontanés sur l’Union se limitent aux idées :° D’une entité purement économique, non remise en cause en tant que telle, mais par

laquelle les citoyens ne se sentent pas directement concernés – sauf à propos de l’Eurodont ils pensent qu’il va lui, les affecter, mais dont ils ont une vision catastrophiste :monnaie faible, structurellement instable, tirée vers le bas par la participation de pays duSud moins développés, au détriment de la santé économique des Pays Bas et du pouvoird’achat de sa population ; monnaie qu’ils vivent comme imposée.

° D’une organisation bureaucratique, inefficace, incapable d’atteindre ses objectifs, etdépensière : dépenses présumées somptuaires des personnalités qui sont à sa tête, aussibien que subventions destinées aux pays du Sud, et dont les Néerlandais sont les payeurs.

° D’objectifs théoriques, auxquels on déclare adhérer, de construire une Europe avecdes politiques communes, mais dont on met fortement en doute la réalisation.

• L’origine de l’Union Européenne apparaît très mal connue. En dehors de la certitude que lesPays Bas en étaient, les participants ont des difficultés à identifier les pays fondateurs.

Quant aux raisons de sa création, on n’évoque qu’exceptionnellement l’objectif politique deréconcilier les anciens ennemis de la deuxième guerre mondiale et de maintenir la paix. Lesseuls objectifs initiaux fortement présents à l’esprit sont d’ordre économique : le libreéchange, le renforcement de l’économie européenne face aux Etats-Unis.

Certains, rares, parlent de création d’une Europe avec des politiques communes (en mentionnantpar exemple le domaine de l’environnement comme objet d’une politique actuelle) – mais poursouligner à nouveau leur échec.

• Lorsqu’on les pousse à réfléchir aux domaines d’action de l’Union Européenne – sur lesquels ilsestiment a priori ne savoir rien ou presque – les uns ou les autres citent cependant :

° La politique économique et commerciale – en reconnaissant que l’action au niveaucommunautaire est nécessaire, et d’ailleurs qu’elle a dans l’ensemble atteint ses objectifsdans ce domaine

° L’agriculture et la pêche, connues comme étant gérées au niveau de l’Union, et importantespour le pays – ainsi que l’élevage, dans l’actualité avec la crise de l’ESB (et son absence degestion véritable, en raison des intérêts divergents d’Etats membres qui ont interditcertaines viandes chez eux tout en continuant à les exporter vers les pays voisins).

° La protection des consommateurs (domaine où une action communautaire seraitsouhaitable)

° La santé publique (en référence à « l’expatriation » des survivants de l’incendie deVolendam)

° L’environnement (domaine reconnu comme débordant des frontières nationales)° Les transports° La lutte contre la criminalité et le trafic de drogue.

C’est donc un panorama relativement varié qu’ils dressent en réalité de domainesd’intervention de l’Union Européenne (tout en doutant de l’efficacité de son action dans laplupart d’entre eux), avec un accent tout particulier sur ceux qui sont considérés commeconcernant le plus directement leur pays, ou qui ont été récemment dans l’actualité nationale

• La connaissance des institutions est sommaire :

Les noms de la Commission et du Parlement Européen sont connus, leurs rôles respectifs le sonttrès mal. Dans les groupes socio-économiques supérieurs, on présume simplement qu’ils doiventêtre plus ou moins analogues à ceux des deux Chambres du Parlement national ; dans les autres onavoue son ignorance ; on imagine qu’ils sont à l’origine des directives et des règlements quidoivent être appliqués dans les Etats membres

Le Conseil des Ministres et le Conseil Européen des Chefs d’Etat et de Gouvernement sontlargement inconnus sous ces noms ; on sait que les chefs de gouvernement (ou d’Etat ?) seréunissent parfois (avec une fréquence cependant inconnue) et « redélèguent » des responsabilités(comme à l’issue du récent Sommet de Nice).

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La Cour de Justice est en apparence une institution connue, mais en fait il s’agit d’une confusionavec la Cour de Justice Internationale de la Haye.

De manière générale, il y a ignorance quasi-absolue de l’existence de mécanismes de décision,et le processus décisionnel est considéré comme ne fonctionnant pas, bloqué qu’il est par desintérêts nationaux divergents.

• Les sources de connaissance évoquées à propos de l’Union Européenne sont les médias(télévision et presse écrite), le service d’information du gouvernement néerlandais (PO 51), avecdes brochures sur l’Euro et l’école pour les enfants. L’idée d’information émanant des sourcescommunautaires elles-mêmes est très rare.

On reconnaît ne prêter quelque attention aux nouvelles communautaires que quand ellesconcernent directement les Pays Bas, et les attentes spontanées d’être mieux informé sontfaibles.

Lorsqu’un intérêt s’exprime, il porte le plus souvent sur le résultat des décisions prises et leursimplications pour le pays et pour soi-même. Seuls des participants des groupes de niveau socio-économique moyen-supérieur, observant alors que les informations qu’ils reçoivent sont« filtrées » par des relais ou des rediffuseurs nationaux qui tendent à ne traiter que des aspectsnégatifs, manifestent une certaine curiosité à entendre parler de succès, qui leur donneraient unemeilleure image de l’Union Européenne.

⇒ Royaume Uni

• Les Britanniques ont dans l’ensemble une vision très défavorable, souvent caricaturale,d’une Union Européenne sur laquelle ils savent très peu, qui leur apparaît lointaine etétrangère, et dont ils soupçonnent en même temps qu’elle influe de manière importante sur leRoyaume Uni et sur leur propre vie.

• Les propos initiaux à son sujet ne portent guère que sur de traits d’image négatifs :

° De bureaucratie° De lieu d’affrontement et de discussions stériles sans résultat° De lenteur et d’inefficacité° De cas de corruption, ou de dépenses gonflées ou injustifiées des personnalités (non

déterminées) qui la composent.

Si quelques uns font état positivement de dispositions dans le domaine social (salaire minimum,horaires de travail) ou dans celui des droits de l’homme, d’autres évoquent comme typiques del’inefficacité communautaire « les montagnes de beurre » de la Politique Agricole Commune dansles années 1970-1980. La plupart, à ce stade, ne mentionnent aucun autre domaine connu del’action de l’Union Européenne.

• L’origine de l’Union Européenne est quasi-inconnue. Seuls certains des plus âgés et des pluséduqués savent en situer les débuts dans les années d’après-guerre ; la plupart n’ont aucune notionpréexistante à l’adhésion du Royaume Uni dans les années 1970, et ignorent d’ailleurs largementaussi le nombre actuel des Etats membres.

Les buts ayant présidé à sa fondation sont supposés être le développement des échangescommerciaux entre les Etats membres ; rares sont ceux qui sont conscients de l’objectif de créerune sorte « d’Etats-Unis d’Europe » aptes à avoir ensemble une puissance politique etcommerciale plus forte que la somme de ses parties et pouvant rivaliser avec les superpuissances ;personne n’évoque l’objectif de paix

• Amenés à s’interroger davantage sur les domaines d’action de l’Union Européenne, laplupart des citoyens britanniques interrogés peinent à en identifier, ou ne citent que des« scandales », des mesures « ridicules », ou des prétentions d’imposer à leur pays desdispositions qui sont à son désavantage et dont ils ne veulent pas :

° Scandale de l’ESB, dans lequel « les Cours » européennes ont décrété un embargo sur laviande bovine britannique, avant qu’on ne découvre la présence de la maladie dans lescheptels français et allemands.

° Réglementations sur les bananes « droites »° Non-reconnaissance du chocolat et des saucisses britanniques comme tels° Imposition du système métrique …

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Seuls les mieux informés évoquent le domaine social, la Charte Sociale ou les droits de l’homme,ou dans quelques cas les aides régionales connues pour avoir été mises en œ uvre dans des zonesdéshéritées du pays.

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• La connaissance du fonctionnement institutionnel de l’Union est tout aussi médiocre, bienque certaines institutions soient bien connues de nom et aient une image (négative) :

° La Commission, quoique objet de confusion avec l’Union dans son ensemble, est vue soitcomme étant le principal organe de décision, soit comme une sorte de forum de discussionOn sait souvent qu’elle est formée de Commissaires (désignés ou élus ?) par les différentspays ; les noms de Kinnock et Patten sont connus de quelques uns. Cette institutionconcentre sur elle les soupçons de bureaucratie, d’inefficience, et de corruption.

° Le Parlement Européen est également connu au moins de nom par tous ou presque ; c’estun organe élu (même si on déclare souvent ne pas s’intéresser aux élections européennes),les plus informés pensant que son rôle est de « superviser » le travail de la Commission,d’accepter ou de refuser ses propositions de législation (d’autres estimant qu’il ne fait que« couvrir ses erreurs »).Il concentre également les critiques de salaires élevés, de dépenses injustifiées desparlementaires, de faux frais de déplacement, etc.

° La Cour de Justice est un nom qui évoque quelque chose ; son rôle connu ou présumé est deveiller à l’application des lois communautaires, en ayant aussi la fonction de « Courd’Appel » quand on a épuisé les moyens de droit nationaux ; elle est partiellementconfondue avec la Cour Européenne des Droits de l’Homme.

° Le Conseil Européen des Chefs d’Etat et de Gouvernement est peu connu, ses perceptionssont confuses. On sait plus ou moins que les dirigeants des pays européens se réunissent,mais on ignore largement si leur discussions se traduisent par des décisions.

° Le Conseil des Ministres est quasi-totalement inconnu.

Les perceptions du processus décisionnel sont extrêmement floues (dans les groupes les moinséduqués, on reconnaît d’ailleurs qu’on n’en sait guère plus du processus équivalent au plannational). On le croit lent, complexe, empêtré dans la difficulté à trouver des compromis entre lesintérêts divergents des Etats membres ; on ignore largement l’existence de mécanismes dedécisions (en dehors de vagues réminiscences d’une influence plus grande des grands pays – avecune confusion entre le nombre de parlementaires de chacun et le nombre de voix dont il dispose auConseil).

• Les sources de connaissance dont les interviewés font état à propos de l’Union Européenne sontprincipalement les journaux, secondairement la télévision.

Tout en reconnaissant le caractère vraisemblablement biaisé des premiers, qui privilégient lesensationnel et la dénonciation des « scandales », ils sont manifestement fortement influencés pareux, en l’absence de sources contradictoires. La plupart déclarent prêter peu d’attention auxnouvelles télévisées, bien qu’a priori plus neutres, en invoquant leur intérêt insuffisant pour cesquestions.

Une relative ouverture se fait jour pour une information de base sur ce qu’est l’UnionEuropéenne, ce qu’elle fait, comment elle fonctionne, et surtout en quoi elle influe sur le RoyaumeUni et sur la vie de chacun.

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⇒ Danemark

• Les attitudes danoises sont clairement à dominante négative – quoique moins fortement dansles catégories moyennes-supérieures de la population que dans les autres.

Elles apparaissent de prime abord plus réfléchies que dans d’autres pays majoritairement hostiles,chacun tentant plus ou moins de prendre en compte le pour et le contre ; mais les arguments« pour » essentiellement rationnels s’inclinent le plus souvent devant le poids d’éléments plusaffectifs.

• Du coté positif, on trouve parfois l’idée d’une Union Européenne utile pour le maintien de lapaix et de la liberté sur le continent, et pouvant parler d’une voix plus forte que chacun deses Etats membres sur la scène mondiale, mais ce sont surtout des raisons matérielles quis’expriment : nécessité d’un marché commun pour le bien de l’économie danoise, utilité d’être àl’intérieur plutôt qu’à l’extérieur pour tenter d’influer sur le cours des choses …

En dehors de ces considérations pragmatiques, l’Union Européenne éveille :° Des craintes, fortement ancrées, de dilution du Danemark et de son identité dans un

ensemble trop vaste, trop complexe, et trop hétérogène° La hantise de mise en cause du modèle de société danois idéalisé, par des mesures

d’harmonisation qui sont perçues systématiquement comme étant forcément vers le basdans tous les domaines : qu’il s’agisse de normes alimentaires, de protection duconsommateur, de l’environnement, des droits sociaux ou des conditions de travail, lesDanois sont convaincus que leurs standards sont les plus élevésIl est intéressant de noter cependant la demande, formulée par nombre des interviewés, devoir l’Union Européenne fixer des normes minimales, tout en laissant à chaque Etat-membre le droit de renforcer celles-ci.

° Des défiances et des rancœ urs à l’égard d’un système perçu comme non-démocratique, opaque et bureautique.S’y mêlent l’idée d’une entité trop vaste et trop lointaine (à l’opposé de la démocratie« quasi-directe » du Danemark), celle qu’on ne sait pas ce qui s’y passe et ce qui s’yprépare (avec même la notion d’agenda caché), celle d’un système dont les principauxacteurs des décisions ne sont pas élus – ou, chez les mieux informés, l’affirmation que lasubsidiarité ne fonctionne pas en pratique.En outre, règne fortement le soupçon que les politiciens danois (du gouvernement commede l’opposition), pour la plupart favorables à l’Europe, ne manipulent l’opinion en luicachant quels sont les véritables objectifs de l’Union Européenne.

• De l’origine de l’Union Européenne, les participants des discussions danoises savent assezsouvent qu’elle remonte à l’après-guerre, évoquent parfois la CECA, et l’objectif de maintenirla paix en imbriquant les économies des premiers Etats membres tout en favorisant leurrenforcement

Pour beaucoup, il ne s’agit là toutefois que d’une référence historique, l’Union d’aujourd’huiétant essentiellement et matériellement économique et commerciale, et les raisons del’adhésion du Danemark d’ailleurs purement pragmatiques (mieux exporter ses produitsagricoles) sans vision de coopération plus poussée.

• Interrogés sur les domaines d’action communautaire qu’ils connaissent, ils citent cependant :° La libre circulation des biens et services, et l’instauration de conditions de concurrence

loyales entre les Etats membres° Celle des travailleurs° Le soutien aux agriculteurs° Les quotas de pêche° La monnaie unique, rejetée par le Danemark° Les dispositions législatives concernant le respect de l’environnement° L’aide aux régions les moins développées de l’Union, ainsi qu’aux pays d’Europe de l’Est° Les mesures d’harmonisation, décriées, dans tous les domaines.

Mais la considération de cette liste est dépourvue de visions politiques d’ensemble.

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• Les perceptions des institutions peuvent être résumées comme suit :° La Commission. Elle est connue de nom ; on sait qu’elle n’est pas composée de membres

élus, mais nommés par les Etats membresElles est vue comme un élément important du dispositif institutionnel, mais sans qu’onsache clairement quelles sont ses responsabilités.Il règne largement à son propos les idées à la fois d’opacité, de gigantisme administratif, etde fraude et de corruption.

° Le Parlement Européen. Naturellement connu de nom, comme une assemblée élue, il estcependant lointain et anonyme.On croit savoir plus ou moins qu’il dispose de pouvoirs de veto sur les décisionscommunautaires, et qu’il peut démettre la Commission (comme à la suite d’un scandalerécent) ; mais dans l’ensemble on ne croit guère qu’il ait une réelle importance ouinfluence. Comme la Commission, il est suspecté de corruption et de prébendes (référenceaux parlementaires européens qui votent le montant de leur propre traitement) ; et on metparfois en cause en outre l’absurdité coûteuse des navettes entre Bruxelles et Strasbourg.

° Le Conseil des Ministres. Il est très mal connu ; on sait généralement qu’il est composé deministres des différents Etats membres, mais on ne connaît guère son rôle dans le processusdécisionnel. L’idée la plus répandue est celle d’une autre superstructure bureaucratique

° Le Conseil Européen des Chefs d’Etat et de Gouvernement est inconnu en tantqu’institution – même quand on a entendu parler des réunions « au sommet »

° La Cour de Justice. Les interviewés paraissent en avoir entendu parler et en avoir uneimage a priori positive (sans guère en savoir davantage que le rôle suggéré par son nom).

Les mécanismes de décision sont largement ignorés.

• Les sources de connaissance sur l’Union Européenne cités par les Danois interrogés sontprincipalement les médias, d’abord la télévision et les journaux, dans lesquels on entend surtoutparler de scandales, de corruption, de mesures absurdes et incompréhensibles (telles quel’imposition « de concombres courbes »). On y voit ou entend également s’exprimer les politiciensdanois mais leurs propos sont, comme on l’a vu, peu crédibles a priori.

Le « bouche à oreille », les conversations privées ou professionnelles représentent une autresource, active surtout en périodes électorales, ils aident à se former une opinion « plus objective ».

Aucune information émanant directement des autorités communautaires n’est jamaismentionnée.

Globalement, les Danois sont peu avides d’information sur une Union Européenne enverslaquelle ils cultivent un désintérêt actif, ou qui leur apparaît trop complexe – tout enreconnaissant après réflexion qu’ils en savent fort peu, et que ce qu’ils en apprennent estsans doute déformé par la tendance au sensationnalisme des médias.

Avec cette réserve, l’information qu’ils souhaiteraient sur l’Union Européenne serait de typefactuel : agenda des institutions, décisions en préparation, impact des mesures décidées ou à venirsur le Danemark et sur leur propre vie – notamment pour ce qui concerne le domaine social etcelui de l’environnement par lesquels ils se sentent plus directement concernés.

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III.1.3 PAYS ADHERENTS RECENTS A L’UNION EUROPEENNE

⇒ Suède

• Les attitudes suédoises, majoritairement négatives, sont assez proches de celles qu’onobserve au Danemark, avec toutefois moins de virulence et moins d’homogénéité dans lesappréciations sur l’Union Européenne.

• Spontanément, les Suédois interrogés évoquent d’abord :° Une bureaucratie lointaine anonyme et opaque, dont la pratique est à l’inverse de celle

de transparence des documents publics en Suède, et plus ouverte aux lobbies qu’auxcitoyens.

° Une dérive par rapport à des buts initiaux non contestés (qu’il s’agisse de l’ouvertureéconomique réciproque des Etats membres après la deuxième guerre mondiale ou del’instauration des « 4 libertés » du Marché Unique) : centralisation, réglementations de plusen plus tatillonnes s’attachant à des détails plutôt qu’à l’essentiel (calibre des fraises, formedes concombres, tabac à priser… )

° Une harmonisation qui peut s’opposer à un modèle suédois présumé en avance sur denombreux plans (mesures sociales, protection du consommateur, environnement … ) enimposant des normes moins élevées que celles qui prévalent actuellement dans le pays –voire mettre en cause sa souveraineté.En outre, l’idée règne parfois d’un traitement inégal dans l’application des règles – la Suèdeles respecte avec discipline alors que les pays du Sud ou la France en prendraient à leur aisesans en être sanctionnés pour autant.

° Une efficacité douteuse (ainsi pour les excédents de la Politique Agricole Commune) etdes coûts élevés.

• Leur connaissance des origines de l’Union Européenne est généralement assez claire :l’immédiat après-guerre, avec l’objectif de faire en sorte que les anciens ennemis aientsuffisamment d’intérêts économiques communs pour éloigner le risque de nouveau conflit ;Adenauer est parfois cité comme un des premiers « moteurs » de l’Europe communautaire.

• Leur connaissance des domaines d’action de l’Union Européenne inclut :° L’économie en général : les échanges commerciaux, la libre circulation, l’Euro (peu évoqué

toutefois)° L’agriculture : avec une vive critique des coûts de la Politique Agricole Commune à

Stockholm, qu’on ne retrouve pas au même point à Jönköping° L’environnement, avec des visions controversées : parfois, on estimerait souhaitable que ce

domaine soit traité dans le champ communautaire (mais à condition d’instaurer des normesqui ne soient pas inférieures aux normes suédoises) ; parfois, on pense qu’il l’est, mais avecune évaluation négativeA propos d’un domaine proche, les participants des groupes de Stockholm s’indignent parexemple du traitement « scandaleux » réservé aux animaux d’élevage dans (les autres paysde) l’Union Européenne

° Le champ social, avec là aussi des doutes sur le fait qu’il appartienne à la sphèrecommunautaire, ou que son traitement entraîne des résultats positifs

° Les politiques structurelles évoquées à Jönköping où on a entendu parler des « Objectifs 3et 4 » ou de la politique de formation des travailleurs

° Occasionnellement, le passeport européen, une politique de défense non spécifiée,l’élargissement futur

° De manière générale, l’idée d’unification-harmonisation dans bien des domaines.

• En ce qui concerne le système institutionnel de l’Union, ses perceptions sont très confuses,même si les noms de certaines institutions sont plus ou moins spontanément connus :

° La Commission, dont on ignore largement les attributions° Le Parlement Européen, chambre élue ; mais on se demande si les parlementaires y

représentent les intérêts de leur pays ou défendent l’intérêt commun de l’Union° Le Conseil des Ministres, parfois évoqué spontanément comme le Conseil Européen des

Chefs d’Etat et de Gouvernement

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° La Cour de Justice, confondue en fait avec la Cour Européenne des Droits de l’Homme

Les mécanismes de décision restent très flous, notamment dans les milieux les moins éduqués ;tout au plus suppose-t’on, par assimilation avec le Riksdag, qu’il doit y avoir « des commissionsqui débattent et préparent les décisions ».

• Les sources de connaissance citées sont principalement les médias (presse, radio, télévision) dontles interviewés admettent qu’ils se concentrent sur l’exposition des scandales et des ridicules del’Union Européenne plutôt qu’ils n’informent en profondeur (et qu’eux-mêmes, suivant leurpropre penchant eurosceptique, tendent à y prêter l’oreille).

Des amis ou relations familiers des questions communautaires sont parfois cités comme sourcesd’information jugées plus fiables, l’école pour les enfants à quelques reprises également – aucunsentiment ne se faisant jour de recevoir une quelconque information directe des sourcescommunautaires.

Dans l’ensemble, tout en gardant un scepticisme de fond, les interviewés des différentsgroupes se déclarent ouverts à entendre parler d’aspects plus positifs (et positifs pour laSuède). Dans les groupes les moins éduqués toutefois, ou bien on se limite à l’envie « de savoir ceque font les fonctionnaires en réalité et pas sur le papier » – ou bien on avoue son désintérêt pourquelque chose de trop complexe.

⇒ Finlande

• La vision qu’ont les Finlandais interrogés de l’Union Européenne inclut des aspects trèsclairement positifs, en même temps que certains doutes et certaines réserves.

• De leurs propos spontanés initiaux, il ressort notamment :° L’idée de désenclavement de la Finlande : l’adhésion à l’Union lui a permis « de devenir

plus européenne », de rejoindre pleinement un continent dont elle était un peu à l’écart.Pour les citoyens, cela veut dire concrètement facilitation des voyages (encore accentuéeprochainement par l’Euro), échanges avec les autres pays.

° L’idée de sécurité et de stabilité : l’appartenance au bloc européen éloigne la menacepotentielle rémanente de la Russie, après l’URSS ; et, par ailleurs, on reconnaît la stabilitéapportée sur les plan économique et financier.

° Celle d’égalité entre les pays membres, dans le cadre du Marché Unique où les mêmesrègles s’appliquent à tous (même si certaines critiques s’expriment à l’égard des pays duSud moins disciplinés qui renâcleraient à respecter ces règles).

° Mais aussi la notion d’une entité abstraite et lointaine et une impression de bureaucratielourde trop préoccupée de décisions de détail (comme la forme des concombres… )

° Enfin, des incertitudes quant aux orientations d’avenir de l’Union si elle cherchait àdevenir une fédération plus soudée (perçue comme centralisée) – qui s’expriment chez unepartie seulement des interviewés.

• L’origine de l’Union Européenne n’est connue de façon relativement précise que par uneminorité des citoyens – parmi les plus éduqués surtout : la création d’une Communauté ducharbon et de l’acier après la deuxième guerre mondiale.

La perception de l’identité des pays fondateurs est incertaine. La plupart citent la France et lespays du Benelux, parfois l’Italie, mais aussi le Royaume Uni – et pas toujours l’Allemagne (aunom de l’idée qu’elle n’était sans doute pas réintégrée dans le concert des nations européennes peude temps après la fin du conflit).

Plus généralement, les buts visés par l’Union Européenne sont vus comme économiquesd’abord, ce qui n’empêche pas en même temps la poursuite d’un rapprochement plusgénéral entre les Etats membres. Pour certains toutefois (en particulier dans les groupes socio-économiques moyens-inférieurs), le caractère à leurs yeux purement économique du dessein, et lesentiment qu’il profite essentiellement « aux gros » empêche de s’en sentir partie prenante.

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• La connaissance des domaines d’action communautaire est également partielle, maismeilleure dans les groupes moyens-supérieurs.

On trouve cités :° Les différentes composantes du champ économique et monétaire : marché unique,

développement des échanges commerciaux, Euro, taux d’intérêt, fiscalité…° L’agriculture, dans les groupes moyens-supérieurs, avec une vision plutôt favorable du

traitement du problème de l’ESB° La défense, avec des débats entre les participants sur l’opportunité pour la Finlande d’être

intégrée à l’OTAN ou pas (mais sans référence explicite à une composante européenne dedéfense).

° L’élargissement à de nouveaux Etats membres, thème relativement bien connu dans tous lesgroupes (et dont on craint parfois le coût)

° L’idée générale d’un impact direct ou indirect de affaires communautaires dans beaucoupde domaines.

• La connaissance des institutions est très inégale :° L’existence de la Commission, et des Commissaires, est un fait connu ; son rôle l’est bien

d’une partie des citoyens les plus éduqués (Commission comparée à un Gouvernementnational), peu des autres. Plusieurs font état des discussions récentes sur le nombre deCommissaires de chaque pays.

° Celle du Parlement Européen l’est également, mais on doute souvent de la réalité de soninfluence et de son rôle décisionnel.

° Le Conseil des Ministres est une notion souvent floue : on présume ou on sait que lesMinistres des différents Etats membres s’y réunissent, mais on en connaît rarement lacomposition et les prérogatives.

° Le Conseil Européen des Chefs d’Etat et de Gouvernement est également mal connu en tantqu’institution, mais son évocation rappelle les débats du Sommet de Nice (au moins auxparticipants des groupes moyens-supérieurs)

° La Cour de Justice est peu connue, mais son nom est familier et permet de présumer d’unrôle positif de veiller à la bonne et égale application du droit.

Quant aux mécanismes décisionnels et à l’articulation des rôles des différentes institutions,ils ne sont connus et discutés que par une partie des participants du segment supérieur.

Il règne l’idée confuse que les grands pays accaparent l’essentiel de l’influence dans les décisions.

• Les sources de connaissance citées sur l’Union Européenne incluent les médias de grandediffusion (journaux, magazines, télévision) ainsi qu’Internet, mentionné en Finlande nettementplus qu’ailleurs – mais aussi les parlementaires européens finlandais, ou un Euro-bus qui a sillonnéle pays à l’époque de l’adhésion.

Elles ne conduisent cependant pas la plupart à avoir une vision claire.

Les attentes d’information existent modérément dans les groupes moyens-inférieurs (pourune connaissance basique exprimée « en langage clair »), plus activement dans les groupesmoyens-supérieurs et sur des sujets plus variés et plus approfondis (dont : l’avenir de l’Union, etles critères d’éligibilité aux aides communautaires).

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⇒ Autriche

• L’Autriche est un des pays dans lesquels les questions relatives à l’Union Européenne, et àl’appartenance à cette Union, apparaissent le plus présentes à l’esprit de beaucoup decitoyens.

L’adhésion y semble assez large aux concepts sous-jacents à la construction et audéveloppement de l’Union Européenne, mais des critiques assez fréquentes y sont formuléessur son fonctionnement et sur l’influence que peut y avoir un pays de taille modeste.

• Dans leur propos initiaux spontanés, les personnes interrogées s’expriment notamment surles aspects suivants :

° La contribution de l’Union Européenne à la paix et à la sécurité – sujet particulièrementsensible pour un pays acteur malheureux de la deuxième guerre mondiale, et situé à lalimite de l’ancien bloc de l’Est.

° L’idée d’unir les forces des pays européens pour des objectifs politiques autantqu’économiques

° Mais le regret de n’y voir qu’une construction économique sans implications directespositives pour les citoyens, ou même génératrice de faux espoirs (dans les groupes moyens-inférieurs)

° Et aussi la notion d’un ensemble dominé surtout par les grands pays (au premier rangdesquels la France et l’Allemagne), et dont on s’interroge souvent avec pessimisme sur lepoids et l’influence que peut y avoir l’Autriche

° Enfin, une certaine vision bureaucratique de l’Union – qui est loin d’atteindre toutefoisles niveaux de stéréotype observés dans de nombreux pays de la partie Nord de l’Europe.

• L’histoire des origines de l’Union Européenne est très bien connue dans l’ensemble dans lesgroupes socio-économiques moyens-supérieurs, et relativement bien en moyenne dans lesautres.

Le but originel de réconciliation et de maintien de la paix entre les anciens belligérants estclairement compris ; et on juge d’ailleurs positif le rôle de bouclier sécuritaire de l’Union (avecdes réserves quant à la zone des Balkans).

Certains des plus éduqués et des plus jeunes s’avèrent même capables de « réciter » l’histoire desdébuts de la Communauté, avec la CECA, puis la CEE, la réconciliation franco-allemande sousl’impulsion de de Gaulle et d’Adenauer.

En même temps, l’Union vise à promouvoir le développement et la coopération économique. LeMarché Commun, ou le Marché Unique, la suppression des droits de douane, la libre circulationdes marchandises et la construction d’un ensemble économique et monétaire sont évoqués demême que la personne de Delors (et aussi celles de Kohl et Mitterrand).

• Les domaines connus de l’action communautaire sont nombreux° La sphère économique déjà citée, avec ses composantes monétaires, fiscales, etc.° Le domaine agricole, avec des critiques des subventions de la PAC, mais aussi des

jugements positifs° Le développement des infrastructures° L’énergie (malgré des remarques critiques sur la neutralité déclarée de l’Union dans

l’affaire de Temelin)° La santé publique et la protection des consommateurs : avec des jugements réservés (mais

pas unilatéralement négatifs) sur la gestion de la crise de l’ESB – mais surtout uneinquiétude assez générale d’un abaissement des standards par rapport au niveau élevé dontles Autrichiens estiment bénéficier.

° L’environnement° Le domaine social (quelques-uns évoquent la Charte des Droits Sociaux Fondamentaux)° L’action commune en matière de politique extérieure° La sécurité° L’élargissement à venir, a priori salué comme logique mais parfois inquiétant° L’idée générale que l’Union produit des directives sur toutes choses, qui ont force de loi

dans chaque pays.

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On voit là que les Autrichiens ont une représentation assez large du champ des compétencescommunautaires, qu’ils acceptent dans l’ensemble sur le principe ; naturellement, lesconnaissances sont plus complètes et plus précises dans les groupes les plus éduqués.

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• La connaissance des institutions et des mécanismes institutionnels est hétérogène, maisglobalement plutôt meilleure que dans de nombreux autres pays :

° La Commission est manifestement l’institution considérée comme centrale et majeure. Onconnaît généralement son statut de représentation de l’intérêt européen commun, et son rôleexécutif pour la préparation, la prise et/ou l’application des décisions.Le niveau de connaissance de son rôle est remarquablement élevé dans les groupes moyens-supérieurs

° Le Parlement Européen : son rôle est plus flou ; on suppose qu’il vote les lois, à moins qu’ilne les propose à la Commission, ou on déclare clairement ignorer ses compétences

° Le Conseil des Ministres, mal connu des personnes de niveau moyen-inférieur (sauf parfoispour sa présidence tournante de 6 mois), l’est mieux dans les autres groupes : réunion desministres qui cherchent à aboutir à des décisions par la concertation, prise en compte desproblèmes spécifiques de certains pays – quelques-uns n’y voyant en revanche que « desréunions d’agrément » (au sens de loisirs).

° Le Conseil Européen des Chefs d’Etat et de Gouvernement est inégalement connu, certainsy voyant avec une relative justesse des réunions qui donnent l’occasion de faire le point des6 mois écoulés et de tracer des orientations pour la suite – d’autres l’ignorant largement

° La Cour de Justice est déclarée connue, son nom évoque logiquement son rôle de fairerespecter l’application du droit communautaire.

• Interrogés sur leurs sources de connaissance sur l’Union Européenne, les Autrichiens interviewéscitent :

° Les médias, télévision et journaux notamment° Les conversations privées ou professionnelles, très actives à les entendre à l’époque de

l’adhésion° L’école, l’université, citées par quelques-uns parmi les plus jeunes° Des informations perçues comme en provenance des autorités communautaires : peu

nombreuses aujourd’hui, mais remarquées par plusieurs (brochures, site Internet) commeabondantes pendant la période de l’adhésion – via les pouvoirs publics ou d’autresorganismes intermédiaires nationaux.Quoiqu’ayant « inévitablement » un biais pro-communautaire, ces informations sontperçues dans l’ensemble comme assez crédibles – et plutôt plus que les expressionspubliques des leaders politiques nationaux.

Les réactions des interviewés démontrent une assez grande ouverture a priori à en savoirplus, à mieux comprendre « comment le système fonctionne », en quoi telle ou telle directiveinflue sur leur vie quotidienne – ainsi que l’usage qui est fait des subventions et en quoi ellesservent à l’Autriche, ou certains aspects de politiques (l’environnement) qui sont objets d’une forteattention publique aujourd’hui – soit un champ d’intérêt relativement large.

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III.2. ETAT DES LIEUX DANS LES PAYS CANDIDATS A L’ADHESION

⇒ Pologne

On a vu dans le chapitre précédent que les Polonais, invités à parler de l’Europe en général, évoquaientspontanément et de manière dominante l’Europe de l’Ouest, qu’ils aspirent à rejoindre sans trop osercroire à cette possibilité tellement l’écart leur apparaît grand entre ce qu’ils en perçoivent et la situation deleur propre pays ; explicitement ou implicitement, cette Europe de l’Ouest est évidemment l’UnionEuropéenne.

• Lorsqu’on aborde précisément le thème de l’Union Européenne, leurs réflexions se portentlogiquement, et d’emblée, sur la perspective de l’adhésion, qui suscite chez beaucoup plus decraintes que d’espoirs et que, favorables ou défavorables, ils tendent à considérer avec fatalismecomme quelque chose d’inéluctable sur laquelle ils n’ont pas de prise.

On reviendra ultérieurement, dans les développements consacrés spécifiquement aux attitudes àl’égard de l’adhésion, sur ces craintes et ces espoirs. Pour ce qui concerne l’objet du présentchapitre, ce qu’ils révèlent est la perception dominante d’une Union économique qui regroupedes pays riches dans le but de renforcer leurs économies – et dont ils ont parfois du mal àcomprendre ce qui peut les amener à souhaiter s’élargir et « se charger » d’un pays dans un étataussi piteux que celui de la Pologne : interrogation à laquelle ils ne trouvent guère de réponse etqui renforce les inquiétudes.

• L’origine de l’Union Européenne est rarement bien connue ; les buts qui ont présidé à sacréation sont appréciés avec plus de précision.

En dehors de l’objectif purement économique évoqué spontanément, on sait ou on présume qu’elles’est formée dans un but de sécurité au sens large, pour constituer un contre-poids face à la foisaux Etats-Unis et au « Bloc de l’Est » dominé par la Russie (ou l’URSS à l’époque).

• Ses domaines d’action n’apparaissent guère connus dans le détail, mais sont perçus commetendant à couvrir a priori un champ très large sur le plan économique ou autour del’économie.

Cela inclut par exemple la création d’un grand marché à l’échelle continentale, une politiqueagricole dont ils connaissent peu mais dont ils savent qu’elle existe et qu’elle est importante,l’entrée en vigueur de la monnaie unique, l’Euro. Sur d’autres sujets, ils font état de bribes deconnaissance, mais en tendant à tout ramener ou presque à la sphère économique.

La notion de politiques communes affleure parfois, mais sans grandes précisions : idée d’unesupervision, d’un contrôle, d’un encadrement des politiques des Etats membres dans certainsdomaines par un niveau communautaire supérieur ou jouant le rôle de coordinateur (notionévoquée par exemple à propos de la crise de la vache folle, ou des organismes génétiquementmodifiés – certains y voyant un dispositif d’alerte mutuelle et de recherche de solutions encommun, d’autres n’ayant au contraire que l’impression de désaccords et d’absence de solution).

• En ce qui concerne les institutions et le fonctionnement institutionnel de l’Union :° La Commission Européenne et le Parlement Européen ont une relative notoriété mais

la connaissance de ce que sont et de ce que font ces deux institutions est entachéed’erreurs (changement de présidence tous les 6 mois évoqué à leurs propos par exemple).On comprend cependant que la Commission joue le rôle d’un exécutif, quand son nom estprésenté par les animateurs des réunions, à l’instar d’un gouvernement, le Parlement étantquant à lui son pendant législatif.

° Les autres institutions paraissent totalement ignorées dans les perceptions spontanées.Ni le Conseil des Ministres, ni le Conseil Européen ne sont cités spontanément. Le premierest l’objet de suppositions quant à sa composition et son rôle : regroupant des représentantsdes Etats membres sans doute, mais avec quelles responsabilités ? (un débat s’instaurantdans certains groupes sur son caractère exécutif, et alors sur son rôle par rapport à celui dela Commission). Le second est inconnu ; on suppose des réunions des responsables dont ilest fait état dans son appellation complète, mais sans aucune précision – ou une sorte de« Musée Grévin » de « figures de cire ».

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La Cour de Justice, non présente immédiatement dans les esprits non plus, est présumée,quand on en parle, arbitrer les différends entre Etats membres, ou être une sorte« d’ombudsman ».

° Les mécanismes institutionnels, si on dépasse le plan des généralités, ne donnent lieuqu’à des supputations, à l’idée « qu’il y a des échanges et des discussions », ou à celle de« bureaucratie ».

• Les sources d’information citées sur l’Union Européenne ne sont guère que les médias : lesprincipaux journaux et magazines d’information générale, la télévision (nouvelles télévisées etprogrammes d’information, mais sans guère de souvenirs d’exemples concrets), la radio.

Seuls quelques-uns uns disent avoir eu en mains des brochures d’information ; une personne parmiles interviewés a rendu visite au Centre d’information de l’Union Européenne à Varsovie, uneautre a participé à un programme de formation soutenu par l’Union Européenne.

• Les attentes d’information qui s’expriment à ce stade portent essentiellement, sinonexclusivement, sur les implications de l’adhésion : quel en sera le coût pour la Pologne, quelschangements cela apportera-t-il pour « l’homme de la rue », ou pour les diplômés.

Secondairement, on voudrait comprendre ce que l’Union Européenne recherche avec l’adhésion dela Pologne, ou ce que les Etats membres pensent d’elle et de ses citoyens.

Ces attentes sont fortes, elles correspondent à un besoin de réassurance ; on attend quel’information parvienne par les médias – et non par des politiques décriés.

Faute de satisfaction de ce besoin de base, les Polonais paraissent peu ouverts a priori à uneinformation plus générale sur l’Union Européenne.

⇒ Hongrie

• Les Hongrois, interrogés sur leurs perceptions de l’Union Européenne, évoquent naturellement euxaussi la perspective de l’adhésion de leur pays, avec les craintes et les espoirs qu’elle peut susciter(et sur lesquels on reviendra), mais de façon moins exclusive et obsessionnelle que les Polonais.

• Leurs visions a priori de l’Union Européenne ne se limitent pas au champ de l’économie –même si celui-ci est bien entendu fondamental, avec toutes les questions qui s’y rattachent :espoirs de développement, de meilleure qualité de vie, craintes pour l’avenir de secteurs del’économie nationale, incertitudes sur les coûts et les bénéfices pour le pays, etc.

Nombre d’entre eux comprennent l’Union Européenne comme une union à la fois économique etpolitique, visant à la réalisation d’objectifs communs et au rapprochement général des Etatsmembres sur tous les plans, en établissant des règles qui s’imposent à tous dans les mêmesconditions.

Cette compréhension globale n’est pas idyllique : beaucoup s’interrogent avec scepticisme ou biensur la possibilité réelle d’établir et de faire respecter des règles communes dans un ensemble aussivaste et aussi divers (avec parfois l’idée de « chaos »), ou sur les discordes permanentes entre lesEtats membres dont ils entendent parler, ou bien sur le caractère bureaucratique de l’entité quitente de réguler tout cela, ou bien encore sur les implications de l’adhésion pour la Hongrie, sasouveraineté et son identité, susceptibles de s’y diluer.

Il n’empêche que, sur le fond, les perceptions de ce qu’est et de ce que vise l’UnionEuropéenne ne sont guère inférieures à ce qu’on observe dans certains Etats membres.

• Les origines de l’Union Européenne sont mal connues. On les situe dans les années 1950, avecprobablement comme initiateurs les pays les plus puissants de l’Europe occidentale, la France, leRoyaume-Uni, l’Allemagne, rejoints plus tard par les pays du Benelux. Son développement s’estfait en plusieurs étapes (mal identifiées) jusqu’à la situation actuelle dans laquelle beaucoup saventqu’il y a 15 Etats membres. Naturellement ceux-ci, pas plus que chez les citoyens communautairesactuels, ne sont pas parfaitement identifiés : on tend à douter que la Finlande ou la Grèce enfassent partie, mais aussi, plus curieusement, l’Autriche.

Les buts d’origine sont partiellement connus, l’idée dominante étant de créer un ensemblequi contribue au développement économique – avec parfois celle de contrebalancer leCOMECON et le Pacte de Varsovie, ainsi que les Etats Unis sur un plan différent.

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Sur l’ensemble des 4 groupes réunis en Hongrie, un seul participant (parmi les plus âgés et les pluséduqués) démontre une connaissance précise et exacte, en évoquant l’objectif politique deréconcilier et d’amener à coopérer les anciens ennemis de la deuxième guerre mondiale pour éviterle renouvellement de tels conflits. Un autre sait que la construction européenne a commencé avecla CECA, les autres parlant de « Marché Commun » comme étant son appellation initiale.

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• Les domaines connus de l’action communautaire apparaissent assez larges. Sontspontanément cités, en vrac :

° Le développement économique – domaine où elle est reconnue comme ayant pleinementréussi, car servant des intérêts convergents (ce qui sera moins le cas avec les payscandidats).

° La Politique Agricole Commune – mais avec une fréquente erreur chronologique :beaucoup pensent qu’elle a été instaurée à l’époque où se sont développés des surplusagricoles « invendables », pour parvenir à limiter et à réguler ceux-ci.

° La politique financière et monétaire, avec l’Euro qui suscite un réel intérêt, même sicertains « demandent à voir » ce qu’il en sera après son introduction effective.

° Le domaine de l’emploi – considéré comme une réussite à l’intérieur des Etats membres,avec toutefois certaines réserves sur la réalité de la libre installation.

° La libre circulation des personnes – connue comme étant une réalité.° Une politique commune de protection de l’environnement – on y reconnaît des progrès

réels mais encore à poursuivre dans ce domaine essentiel.° Sur le plan plus horizontal, « l’harmonisation des lois » – domaine difficile du fait des

différences entre les systèmes juridiques et les traditions de chaque pays – ou « lastandardisation » – dont on retient surtout des échecs (comme celle, avortée, des prises decourant).

° La poursuite d’objectifs politiques communs – pour lesquels les jugements sur la réussitede l’Union ne sont pas négatifs.

° L’aide au Tiers Monde.° Etc.

On voit, à l’examen de cette liste de domaines connus, avant toute relance, par tel ou tel desinterviewés, que leur connaissance n’est pas moindre que dans maints Etats membres, et quela compréhension de la globalité de la politique communautaire est réelle.

• En ce qui concerne les institutions et le fonctionnement institutionnel, leur connaissance estmoyenne, meilleure à Budapest que dans la ville moyenne de province.

S’ils situent rarement clairement leurs rôles respectifs, les interviewés de la capitale connaissentles noms de la Commission Européenne, du Parlement Européen, du « Conseil Européen » (peut-être confondu toutefois avec le Conseil de l’Europe) – ceux du groupe socio-économique moyen-supérieur y ajoutant parfois la Cour de Justice, le Conseil des Ministres des Affaires Etrangères, oula « Banque Commune ».

Dans les groupes provinciaux, les notions sont beaucoup plus floues : « un siège à Bruxelles »,« une institution judiciaire à Strasbourg », « une Commission agricole », « différentescommissions », « une institution pour l’éducation », « une institution militaire », un ConseilEuropéen mal défini, l’UNESCO peut être …

Certains, minoritaires, et surtout à Budapest, croient savoir, mais sans précisions, que lesinstitutions qu’ils ont citées sont composées de « Commissaires » des différents Etats membres,qui « font différentes propositions » et votent selon une procédure dans laquelle chaque Etatmembre dispose d’un nombre de voix en rapport avec sa taille.

Pour confuses qu’elles soient, ces déclarations montrent au moins chez ceux-là la perception del’existence de processus décisionnels organisés.

• Les sources d’information citées par les interviewés sont essentiellement les médias :télévision en premier lieu, presse en second – avec parfois la mention de programmes ou dejournalistes précis. En même temps, beaucoup admettent qu’ils ne « tombent » sur cesinformations communautaires qu’accidentellement, que les programmes concernés sont souventennuyeux ou incompréhensibles quand il s’agit de « talk shows » politiques, ou qu’ils ne lesconsidèrent pas nécessairement comme neutres.

Autres sources assez souvent évoquées, des membres de sa famille, des amis ou des relations quiont visité ou qui ont vécu dans les pays de l’Union Européenne, et qui en rapportent desinformations et des impressions « crédibles » sur ces pays et sur la façon dont y vivent les gens –mais guère sur l’Union en tant que telle.

Les autorités politiques nationales ne sont pas considérées comme émettant de l’information surl’Union Européenne, pas plus que les institutions communautaires elles-mêmes.

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• Les attentes d’informations qui émergent à ce stade apparaissent fortes et variées. Ellesportent sur :

° Un besoin ressenti de clarification et d’explication générales sur l’Union, son histoire, sonfonctionnement.

° Des domaines d’intérêt particulier : comment l’harmonisation législative joue pour un Etatcandidat ; le rôle des syndicats au plan européen ; la politique commune de l’emploi ; celledes bourses universitaires ; la législation sur la protection des animaux ; les mesurescommunes contre la criminalité.

° Des questions directement relatives à l’adhésion et à ses conséquences : quels en seront lesbénéfices, mais aussi les coûts et les « sacrifices » à consentir (mieux le savoir seraitrassurant) – ou qu’arrivera-t-il aux pays qui resteront à l’écart de l’Union Européenne.

⇒ République Tchèque

Comme dans les Etats candidats examinés plus haut, les citoyens interrogés en République Tchèqueévoquent l’Union Européenne dans la perspective de son adhésion – avec un débat nourri sur sesavantages et ses inconvénients – mais ils entrent aussi dans une discussion plus générale à son sujet.

• Ce qui ressort en premier lieu de leurs propos est l’idée d’une entité créée entre ses Etatsmembres, dans un but d’abord économique, mais qui dépasse ce seul aspect, avec à la fois desrègles communes et un ensemble de coopérations entre eux – mais entité dont le fonctionnementréel peut être en sensible décalage par rapport à cette définition idéale.

Ce décalage est notamment perceptible dans les opinions des interviewés des groupes moyens-supérieurs, dont certains reprennent au fond des critiques « de type allemand » quant auxdésaccords permanents entre les Etats membres, aux réglementations de détail qui leur sontimposées, ou à l’importance d’une bureaucratie aux salaires et aux avantages élevés, lourde etcoûteuse. Il s’y ajoute chez certains l’idée d’une Union défensive cherchant à se protéger à la foisde la concurrence des Etats Unis et d’autres pays, de l’Ouest ou de l’Est, plus ou moins empêchésd’y vendre leurs produits aux prix moins élevés.

Dans les groupes moyens-inférieurs en revanche, l’image est plus positive, le décalage entre l’idéalet la réalité moins grand.

• Dans l’ensemble, les Tchèques apparaissent assez au fait des évènements qui affectent l’UnionEuropéenne, quelle que soit par ailleurs la manière dont ils les interprètent.

• Leur connaissance de l’origine de l’Union Européenne est assez bonne dans l’ensemble :beaucoup citent la création de la Communauté Economique Européenne, point de départ del’Union, dans la deuxième moitié des années 1950, par un groupe de pays fondateurs incluant ceuxdu Benelux, la France et l’Allemagne.

Bien qu’ils évoquent parfois « l’après deuxième guerre mondiale » comme origine, l’objectifpolitique de paix n’est pas spontanément présent à leur esprit, le but initial étant selon eux« pragmatique » et essentiellement économique – entre des pays qui ont pris conscience « quepersonne ne pouvait rester indépendant ».

• Celle des domaines d’action communautaire – clairement meilleure dans les milieux sociaux lesplus élevés et chez les plus jeunes – inclut des éléments relativement nombreux :

° Politique économique, avec le Marché Unique, la libre circulation des biens et des capitaux,la suppression des droits de douane …

° Politique Agricole Commune.° Politique monétaire avec l’Euro – rejeté par référendum par les Danois et objet de

réticences du Royaume Uni.° Législations communes et mesures d’harmonisation dans ces domaines ou dans d’autres.° Libre circulation des personnes.° Coopération industrielle et scientifique.° Coopération en matière de défense et de sécurité, etc.

On peut observer ici que peu de domaines cités touchent directement à la vie de citoyens.

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Cependant, même au courant d’assez nombreux aspects des politiques de l’Union, beaucoupont le sentiment de n’en connaître que des éléments épars.

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• En ce qui concerne les institutions de l’Union Européenne, ce qu’ils en savent est flou.

On connaît l’existence du Parlement Européen, de la Banque Centrale qui intervient sur l’Euro,d’une Cour de Justice et de « commissions » – mais la Commission est mal identifiée, et les autresinstitutions sont quasi-inconnues.

Les processus décisionnels sont pratiquement ignorés. Seule règne l’idée d’un poids plus oumoins grand selon les pays, en fonction de leur puissance économique (plutôt que de leurpopulation), et aussi celle de complexité.

Les institutions semblent peu perçues comme ayant un rôle fortement décisionnel et laresponsabilité réellement exécutive y est mal située.

• Les sources d’information mentionnées se limitent largement aux médias : télévision(journaux télévisés, interviews) et presse (quotidiens et magazines dont un a publié une séried’articles).

Internet est évoqué, occasionnellement, mais sur un plan théorique, rarement des brochuresdistribuées aux citoyens, ou encore des éléments fournis à l’occasion de sessions de formationprofessionnelle.

Ni les sources officielles communautaires ni le gouvernement national ne sont cités directementcomme pourvoyeurs d’informations – mais on observe que la personnalité du négociateur tchèqueM. Telicka paraît assez bien connue.

• Les attentes d’information qui s’expriment spontanément à ce stade concernent essentiellementles implications de l’appartenance à l’Union Européenne sur la vie quotidienne (coût de la vie,loyers, prix immobiliers, fiscalité, emploi, retraites, politique sociale, conséquences spécifiquespour telle ou telle profession … )

Au-delà de ces aspects pratiques qui vont les concerner directement, on discerne cependant uneouverture à une information plus générale, simple et « prédigérée » sur l’Union.

⇒ Estonie

Autant les Estoniens interrogés, s’exprimant sur l’Europe en général, déclaraient en être partie intégrante,manifestaient leur proximité, sinon avec sa totalité, au moins avec sa moitié septentrionale, et leurattirance pour cette Europe développée qu’ils comptaient rejoindre, autant leurs attitudes a priori àl’égard de l’Union Européenne sont plus contrastées, avec parfois de sérieuses réserves.

• Leur vision d’ensemble de l’Union Européenne est celle d’une association de pays regroupéspour poursuivre et favoriser un développement économique en commun –visionpragmatique dans laquelle il n’apparaît pas beaucoup d’idéal.

Chez beaucoup, il s’y ajoute la critique « scandinave » de bureaucratie, de normes plus ou moinsimposées, et une assez grande défiance dans la perspective d’une adhésion pourtant vécue commeinévitable ; cette conception apparaît particulièrement répandue chez les participants du groupesocio-économique moyen-supérieur.

Les idées de « maison européenne commune », de volonté de paix et de sécurité, de soutien mutuelsont présentes, mais beaucoup moins fortement.

Sans doute l’image de l’Union Européenne est-elle plus positive à Tallinn que dans la ville deTartu choisie comme lieu des discussions, et où on se ressent un peu comme à l’écart dudéveloppement que connaît le pays – mais on sait en tout état de cause que les Estoniens sont loind’être unanimes dans une vision favorable de l’Union.

• L’origine et l’histoire de l’Union Européenne sont mal connues : on situe la première dansl’après guerre, mais rarement avec la mention de l’objectif politique de paix qui a été à la sourcede sa création, le but présumé n’étant guère qu’économique, sous l’impulsion, pense-t-on, des payseuropéens les plus importants.

• Les domaines connus de l’action communautaire sont pourtant relativement divers, les unsou les autres évoquant :

° La politique économique et le Marché Unique° La politique monétaire, avec un Euro qui « avait décliné » tout au long de l’année 2000,

mais qui montre des signes de stabilisation ces derniers mois.

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° La politique sociale° La santé° L’éducation, les programmes d’échanges universitaires° La coopération politique° La défense avec ici beaucoup d’ambiguités sur la nature et les modalités de la coopération

intra européenne, et les différences avec l’OTAN

• Ce qu’on sait des institutions est notablement différent selon le niveau socio-économique, aumoins en ce qui concerne la notoriété des premières.

° La Commission Européenne et le Parlement Européen sont connus de nom d’une grandemajorité des personnes de niveau socio-économique moyen-supérieur, mais seulement de 1sur 2 ou 1 sur 3 de celles de niveau socio-économique moyen-inférieur.

° D’autres institutions ne sont mentionnées qu’occasionnellement : Conseil Européen,Comité des Régions, « Comité social » (ces deux dernières dans le groupe moyen-supérieur).

Quant à leur rôle et au fonctionnement institutionnel, il est très largement ignoré dans les deuxgroupes.

• Interrogés sur leurs sources de connaissance de l’Union Européenne, les participants du groupemoyen-inférieur ne citent guère que les informations et des programmes télévisés auxquels ilsdéclarent prêter peu attention (et qui peuvent être «biaisés »). Ceux du groupe moyen-supérieurcitent plus la presse écrite dont ils sont davantage lecteurs, ainsi que des contacts personnels qu’ilspeuvent avoir avec des ressortissants de pays de l’Union.

• Leurs attentes d’information, telles qu’elles s’expriment à ce stade, concernent :° Dans le groupe socio-économique moyen-inférieur, principalement les implications de

l’adhésion pour l’Estonie et les Estoniens : avantages et inconvénients, conséquences pourl’économie, pour l’emploi, pour la défense, et implications fiscales.

° Dans le groupe socio-économique moyen-supérieur, également quelles peuvent être cesimplications (avec là aussi, une interrogation sur la fiscalité reflétant une inquiétude sur lecoût de l’adhésion et le montant « des cotisations ») – mais aussi des questions plusgénérales sur les domaines d’action et les structures de l’Union – ainsi, parfois, que lesraisons pour lesquelles « tant de pays » apparaissent opposés à l’Union Européenne(quelques-uns croyant même que le Danemark l’a quittée récemment), ou le souhait« d’avoir le point de vue de ceux qui y sont depuis longtemps comme les Français ».

⇒ Slovénie

Les Slovènes, qui se révèlent largement favorables à l’adhésion de leur pays à l’Union Européenne, fontpreuve en même temps d’une bonne connaissance de ce qu’elle est et d’une conception trèsfédéraliste de sa structure.

• Ils y voient, en bref, une sorte de république fédérale, formée à la base pour défendre oupromouvoir les intérêts économiques et commerciaux de ses Etats membres face auxpuissances que sont les Etat Unis et le Japon, mais dont la sphère de compétences s’étendaujourd’hui à tous les domaines ou presque.

• Pour une moitié d’entre eux environ (et indépendamment, semble-t-il, des critères de niveausocial ou d’âge), ils ont une idée assez précise et exacte de son histoire (les autres n’ayant quedes notions sommaires).

Ils en situent l’origine dans les années 1950 (parfois 1960), par un Traité conclu à l’initiative despays les plus développés d’Europe occidentale, principalement la France et l’Allemagne (maisaussi les Pays-Bas), et évoquent des élargissements successifs.

Les raisons leur en apparaissent d’abord économiques, on l’a vu, mais dans un contexted’après-guerre où ce rapprochement avait également une signification politique – supprimerles risques de renouvellement de tels conflits – et avait déjà vocation à concerner d’autresdomaines que l’économie.

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• Ce qu’ils savent des domaines de compétence de l’Union européenne inclut, de fait,pratiquement tous les champs de l’action politique.

° Politique économique, visant au développement des Etats membres et à l’accroissement duniveau de vie de leurs populations – incluant la libre circulation des marchandises et lasuppression des droits de douane.

° Politique monétaire qui la prolonge aujourd’hui avec l’Euro – dont l’affaissement parrapport au dollar leur laisse d’ailleurs l’impression confuse que « ça ne marche pas aussibien » qu’il était prévu.

° Politique Agricole Commune, très connue, souvent considérée comme la plus avancée detoutes les politiques de l’Union et concernant tous les secteurs de production agricole ainsique les contrôles vétérinaires et d’autres règles relatives à ces secteurs – et connue aussicomme étant objet de controverses.A cet égard, la crise de la vache folle est jugée comme exemple de dysfonctionnement,mais aussi comme exemple d’un début de coopération effectif.

° Santé publique° Emploi° Politique sociale avec une dimension de solidarité matérialisée par des « Fonds » qui

concourent au développement des régions les moins avancées.° Libre circulation des personnes° Droits de l’homme° Echanges culturels° Sécurité – avec ici le sentiment qu’elle n’a pas joué le rôle décisif qui devait être le sien

dans les conflits récents des Balkans (où ce sont finalement les Etats-Unis qui apparaissentcomme ayant pris l’initiative).

° Etc.

La légitimité de l’Union Européenne à agir dans tous les domaines – avec les seules réservesde l’éducation et de la culture, en ce qu’elles touchent profondément à l’identité nationale – leurapparaît naturelle. Cela va jusqu'à l’idée d’arbitrage communautaire sur les frontières contestées– par exemple sur les conflits entre les ex-républiques yougoslaves, et même sur l’Istrie, diviséeentre la Slovénie, la Croatie et l’Italie, qui les concerne directement.

• En ce qui concerne les institutions de l’Union Européenne, tous n’en ont naturellement pas denotions très précises, mais le niveau de connaissance moyen apparaît étonnement élevé – et àcoup sur supérieur à celui que l’on observe dans de nombreux Etats membres.

Les institutions bien ou relativement connues sont la Commission – dont on sait parfois avecprécision que chaque Etat membre y envoie un ou deux Commissaires, et qui apparaît commel’exécutif de l’Union – et le Parlement Européen, législatif composé d’élus dont le nombre dépendde la taille du pays.

La « Cour de Justice Européenne » est également souvent mentionnée mais, là comme ailleurs, lesconfusions sont fréquentes avec la Cour Européenne des Droits de l’Homme ou avec celle de laHaye.

Les autres institutions sont peu identifiées en tant que telles, même si certains évoquent lesréunions des ministres, et celle des « chefs d’Etat » dont ils retiennent notamment les « photos defamille ».

Le fonctionnement de l’Union et le jeu institutionnel sont rarement connus de manièreprécise, mais dans les grandes lignes il est clair pour les Slovènes qu’il y a une forme degouvernement fédéral – notion constitutionnelle familière dans cette ancienne républiqueyougoslave et jugée naturelle.

• Leurs sources d’information sur l’Union Européenne apparaissent étonnement riches etvariées ; elles incluent :

° Les médias : journaux, magazines, télévision y compris les chaînes télévisées de paysvoisins.

° Internet pour quelques-uns.° Le « bouche à oreille » entre membres de la famille, amis ou relations professionnelles.° Mais aussi l’Eurobus qui sillonne le pays pour diffuser l’information et l’Europhone,

service téléphonique gratuit que l’on peut appeler pour poser des questions.

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Dans l’ensemble, on peut observer :° Que ces informations sont considérées comme crédibles ; ils n’ont pas l’impression qu’elles

soient biaisées dans un sens ou dans l’autre.° Que, quels que soient leurs émetteurs (journalistes notamment), ils ont conscience qu’elles

proviennent originellement de sources officielles communautaires ou nationales.° Que parmi elles, les dirigeants de la Slovénie, et notamment le Ministre des Affaires

Etrangères et le négociateur de l’adhésion, jouissent d’un bon degré de confiance.

• Les attentes d’information manifestées à ce stade des discussions portent dans l’ensemble sur lesimplications concrètes de l’adhésion pour la Slovénie – sans défiances ou d’a priori négatif – etune meilleure connaissance générale des choses de l’Union.

⇒ Chypre

Dans une perspective d’adhésion que tous ont présente à l’esprit – les citoyens des catégories socio-économiques moyennes supérieures y paraissant quasi-unanimement favorables, alors que les autres ontnettement plus de réserves – les Chypriotes font preuve en moyenne d’une compréhension assez largede ce qu’est l’Union Européenne.

• Elle apparaît – explicitement aux premiers, plus confusément aux seconds – comme une Union àla fois économique, politique et militaire visant à exercer de façon croissante son influencedans le monde et à s’ériger en puissance apte à contrebalancer celles des autres grandsensembles, à commencer par les Etats-Unis.

• Son origine est connue dans le groupe moyen-supérieur avec plus ou moins de détails et avecparfois des confusions qui ne mettent pas en cause la compréhension du fond : initiative de laFrance, de l’Allemagne et de l’Italie, au sortir de la deuxième guerre mondiale, de créer laCommunauté Economique Européenne (« par le Traité de Rome, en 1951 ») pour aider àreconstituer leurs économies dévastées.

De 3 Etats membres, la Communauté serait passée à 6 pays puis, à la faveur d’élargissementssuccessifs, à l’ensemble des Etats membres actuels, l’adhésion de la Grèce en 1981 étant un faitconnu de tous.

Elle l’est beaucoup moins dans le groupe moyen-inférieur, dont les participants ne s’exprimentguère à ce sujet – des thèmes ultérieurs de discussion montrant cependant que certains d’entre euxont au moins une vague intuition de cette origine et de cette histoire.

• Les domaines d’action de l’Union Européenne sont perçus a priori comme très larges, mêmesi, là aussi, on formule plutôt des suppositions qu’on affirme des certitudes, et si les connaissancessont corrélées au niveau social. Sont mentionnés notamment :

° L’économie° Le commerce° La monnaie – on sait que l’Euro est la monnaie unique, prochainement mise en vigueur

sous la forme de billets et de pièces° L’agriculture° La santé° L’environnement° La protection sociale et les droits sociaux° Le respect des droits de l’homme (et de la femme)° L’éducation° La défense° La coopération politique

On sait ou on présume que dans ces différents domaines il existe des règles communes dont lerespect s’impose.

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Pour aucun d’entre eux, la légitimité de leur inclusion dans la sphère communautaire n’estcontestée – même si les uns ou les autres peuvent avoir des idées différentes sur la bonneréalisation des objectifs poursuivis, ou des inquiétudes quant à l’application de certains d’entre euxà leur propre pays dans un avenir proche.

• Les institutions de l’Union Européenne sont très imparfaitement connues, les processusdécisionnels sont également assez flous, mais l’essentiel est sans doute qu’on sait ou qu’onsoupçonne qu’ils existent et que les différentes institutions y jouent chacune leur rôle.

Spontanément, seule la Commission Européenne et le Parlement Européen jouissent d’une relativenotoriété. Quand son nom est présenté aux interviewés, ils identifient la première commel’exécutif de l’Union, comme un gouvernement dans un pays (mais, selon certains, sans les mêmesresponsabilités en matière de politique étrangère). Le Parlement apparaît logiquement comme labranche législative, assimilable dans son rôle à un Parlement national.

Le Conseil des Ministres et le Conseil Européen sont des notions plus lointaines, mais pastotalement inconnues, après relance, dans le groupe le plus éduqué – certains évoquent pour lepremier un rôle en politique étrangère, pour le second celui de tracer les grandes orientationsstratégiques – avec cependant des confusions.

• Interrogés sur leurs sources d’information à l’égard de l’Union Européenne, les Chypriotesexpriment d’abord leur impression d’être exposés, de manière occasionnelle, incomplète etdisparate, à des informations transmises ou relayées par les médias : la télévision dans sesprogrammes d’information ou quand y sont interviewés des responsables politiques ou desmembres du Parlement national, les quotidiens. Il s’y ajoute le « bouche à oreille » et lesdiscussions (qui portent sur l’opportunité de l’adhésion).

Alors que les participants du groupe socio-économique moyen-inférieur semblent considérercomme crédibles les canaux médiatiques et les informations qu’ils diffusent, c’est beaucoup moinsle cas dans le groupe moyen-supérieur, où on tend à mettre en cause ou bien l’insuffisantecompétence de leurs émetteurs, ou bien des biais possibles liées aux positions politiques a priori ouaux intérêts particuliers de tel ou tel.

• En ce qui concerne les attentes d’informations – beaucoup reconnaissant que, spontanément, ilsne sont pas allés activement à la recherche de celles-ci – elles sont assez fortes.

° Plus explicitées dans le groupe moyen-supérieur, où on déplore que le gouvernementchypriote ne soit pas plus dynamique en la matière : on y évoque à la fois le souhait dedisposer de connaissances générales qui fassent mieux comprendre l’Union, son histoire,ses actions, et son fonctionnement, et celui d’être informé sur le processus d’adhésion et sesconséquences pratiques pour le pays et pour son activité professionnelle propre.

° Moins nettes dans l’autre groupe, où on discerne toutefois une réelle ouverture à en savoirplus sur les mêmes sujets.

⇒ République Slovaque

Dans un contexte dans lequel la perspective de l’adhésion suscite de fortes attentes, en même temps quede vives inquiétudes, l’Union Européenne soit considérée de manière ambivalente, mais avec unedominante positive.

• Elle apparaît spontanément comme une entité économique forte visant à concurrencerefficacement les Etats-Unis ou les autres puissances du monde.

Même s’ils savent, ou ont l’intuition, que d’autres questions se greffent sur lui, c’est bien ledomaine du développement économique qui est au cœ ur de l’identité perçue de l’Union.

• Interrogés sur l’histoire de l’Union Européenne, ils paraissent avoir une vision originale danslaquelle ils distinguent les débuts de l’Union elle-même, relativement récents, et des épisodesprécédents moins connus et considérés comme appartenant à une autre époque.

Dans leur esprit, la naissance de l’Union remonte à la fin des années 1980 ou au début des années1990, coïncidant avec l’éclatement du bloc soviétique et du COMECOM.

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La conscience d’étapes antérieures n’est pas absente, et pas fausse, mais elle est loin d’êtregénérale et elle est souvent plus floue. Chez ceux qui les évoquent, on trouve l’idée d’unensemble (la Communauté Economique Européenne nommée comme telle par un petit nombre)créé dans les années 1950, soit déjà pour contrebalancer l’influence des Etats-Unis, soitcomme réponse au COMECOM (l’OTAN étant la réponse au Pacte de Varsovie sur le planmilitaire).

Dans cette période initiale certains, minoritaires, identifient des événements précis (créationinitiale de la CECA) ou des personnalités fondatrices (Adenauer, de Gaulle) – toutefois beaucoupmoins citées que Kohl (ou plus rarement Mitterrand, voire Chirac) pour la période récente – laFrance et l’Allemagne étant en tout état de cause perçus comme les pays moteurs.

Avec l’Union Européenne, la construction communautaire aurait en quelque sorte changé desens en même temps qu’on changeait d’ère, et aussi changé de nature : de coopération onserait passé à l’intégration en cours ; d’une opposition entre deux parties de l’Europe on serait entrain de passer à un rassemblement.

• En ce qui concerne les domaines d’actions connus de l’Union Européenne, sont cités par les unsou les autres :

° Tout ce qui concerne la sphère économique, objet central, tous ou presque mentionnant le« Marché commun » ou le « Marché unique » (générateur d’espoirs et de craintes dans laperspective de l’adhésion), ainsi que la monnaie unique l’Euro – symbole de l’intégrationévoquée plus haut.

° L’agriculture, domaine connu comme important et comme difficile, au vu de conflits entreles Etats membres ou de l’expression d’insatisfactions de la part d’agriculteurs qu’il fautsubventionner pour qu’ils puissent assurer l’autosuffisance alimentaire de l’Union.

° La protection des consommateurs – domaine où la réussite est très contestée, notamment àla suite de la crise de l’ESB, mais aussi sous l’effet d’autres souvenirs occasionnels descandales (l’huile alimentaire espagnole).

° L’éducation° L’environnement° L’aide aux pays moins avancés – avec des doutes exprimés sur sa réalité et ses motivations

– même quand on sait (pour certains) que les pays candidats bénéficient déjà de certainesmesures (Programme Phare cité ici ou là).

° Le domaine à proprement parler politique incluant la protection des minorités, le respectdes droits de l’homme – la possibilité « d’ingérence » que cela donne à l’Union dans lesaffaires nationales étant objet de vives controverses. On fait référence aux sanctions contrel’Autriche qu’on tend à décrier, même quand on se déclare en même temps anti-Haider.

• En ce qui concerne les institutions de l’Union Européenne, elles sont très inégalementconnues.

° Seuls des participants du groupe le plus élevé socio-économiquement et le plus éduquédémontrent une connaissance assez précise et assez exacte des institutions, que quelquesuns nomment de façon presque exhaustive. Ceux là situent clairement la nature et le rôle dela Commission, comme exécutif de l’Union ; ils manifestent également l’étendue de leursconnaissances en citant la Banque Centrale, la BERD, la Cour de Justice, … etc.

° En dehors d’eux, le Parlement Européen est la seule institution qui apparaît généralementconnue, ne serait-ce que parce qu’il est plus facile de lui prêter un rôle législatif parréférence à une assemblée parlementaire nationale – ou parce qu’on a entendu parler desrécentes délibérations sur le nombre de députés qu’y a et qu’y aura chaque Etat membre.

° La notion de présidence tournante est assez fréquemment évoquée aussi (et sa durée de 6mois), mais le cadre institutionnel dans lequel elle s’applique l’est beaucoup moins. LeConseil des Ministres – quoique très peu cité spontanément – est souvent compriscorrectement comme étant la réunion des Ministres compétents dans tel ou tel domaine,mais les confusions sont fréquentes à la fois avec le Conseil Européen (qui « pose pour laphoto ») ou avec des commissions (plutôt que la Commission) spécialisées selon lesdomaines.

° La Cour de Justice, quand son nom est prononcé devant les interviewés, évoque dessouvenirs, mais avec de fréquentes confusions avec la Cour Internationale de La Haye.

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° Quant au fonctionnement institutionnel, les interviewés en ont pour beaucoupconfusément conscience, en parlant à nouveau du poids des différents Etats membres dansles décisions, de celui, spécifiquement, des petits pays discuté dans un récent Sommet – et,chez quelques-uns, du problème de « l’intégration » de la législation communautaire dansle droit national, objet d’incertitudes.

• Les sources d’information sur l’Union Européenne des Slovaques interrogés incluent :° Les médias : davantage la télévision dans les milieux socio- économiques moyens-

inférieurs, la presse dans les groupes moyens-supérieurs, puis la radio.° On parle à ce sujet des informations télévisées ou écrites, mais aussi de programmes ou de

sections spécifiques sous la direction de journalistes spécialisés.° Internet, assez souvent cité par les plus jeunes° La connaissance de pays de l’Union qu’ont directement certains, ou la fréquentation dans

leur travail soit de ressortissants d’autres pays, soit de sujets qui touchent aux questionscommunautaires.

Les journalistes qui sont souvent les sources ou les relais de cette information sont plutôtconsidérés comme crédibles, au contraire en général des politiques.

On ne fait pas allusion à des informations en provenance directe des autorités communautaires.

• Les attentes d’information, à ce stade, apparaissent corrélées à l’intérêt qu’on porte àl’Union et aux attitudes a priori positives à son égard.

En dehors des questions relatives à l’impact de l’adhésion sur le pays, dont beaucoup fontétat, les plus ouverts manifestent une réelle curiosité à en savoir plus et mieux de façongénérale. Un des thèmes qui revient est notamment de savoir comment l’Union « traite » d’autrespays qui sont dans la même situation que la Slovaquie, ou quelles sont les positions à l’égard del’adhésion dans ces pays.

⇒ Lettonie

L’image de l’Union Européenne qui se dégage en Lettonie des propos des participants est sans doutecelle qui est la plus négative parmi tous les pays candidats inclus dans la présente étude, avec desattitudes très défensives.

• L’objet principal perçu de l’Union Européenne est de nature économique ; cela ne différenciepas a priori fondamentalement la vision des Lettons de celle de citoyens d’autres pays, mais il s’yajoute une dimension négative très présente, de buts purement matérialistes de « business » quisemblent laisser à l’écart les citoyens.

En outre, comme a l’a déjà suggéré plus haut, l’idée, pour un très petit pays, d’être englobé dansun ensemble aussi vaste et dans une Union vaguement soupçonnée d’interventionnisme dans lesaffaires nationales rappelle, même si c’est évidemment à un moindre degré, l’allégeance forcée àun autre « Union », dont le pays n’est sorti que depuis peu.

• Son origine est très vaguement située, par les uns dans les années 1950, ou « au moment dudébut de la guerre froide », ou dans les années 1960, ou 1970, très peu ayant des notions plusprécises de son histoire et des raisons qui ont présidé à sa fondation – sinon les objectifséconomiques généraux qui apparaissent aujourd’hui encore comme sa principale raison d’être.

• Ses domaines d’action identifiés incluent ceux :° De l’économie en général – avec de fortes craintes pour les productions nationales

dépourvues de protection dans un marché ouvert.° De la monnaie : l’Euro, dont on note les fluctuations vers le bas et, surtout, qui apparaît

comme un symbole d’une intégration « englobante » redoutée.° De l’agriculture – là aussi les craintes s’expriment sur l’avenir des exploitants nationaux.° De l’aide au développement : on en sait généralement peu ; seuls les participants du groupe

socio-économique moyen-supérieur évoquent en positif les aides structurelles.° De la libre circulation des personnes – perspective qui reste purement théorique pour la

plupart des Lettons.° De l’imposition générale de règles « dictées » aux Etats membres.

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• La connaissance des institutions communautaires est extrêmement faible ; spontanément, lesinterviewés déclarent plutôt leur ignorance qu’ils n’avancent des éléments de connaissance.Quelques-uns évoquent soit « des sortes de commissions et de commissaires », « une sorte deconseil inconnu », un Euro parlement « dont on n’a pas d’idée de comment il fonctionne », deréunions des Ministres des Affaires Etrangères, ou « d’une rotation de la présidence » – sans qu’onsache à quelle instance elle s’applique.

Lorsqu’on suggère les noms des principales institutions, ils reconnaissent pour la plupart qu’ils enont entendu parler, mais ce qu’elles sont et leurs attributions relèvent le plus souvent de puresconjectures.

On présume parfois, par exemple, que la Commission doit s’occuper « de législation », « decontrôler les nouveaux Etats membres », à moins que ça ne soit « des droits de l’homme ».

En ce qui concerne le Conseil des Ministres, son nom donne à penser qu’il doit s’agir de réunionsdes Ministres des différents pays – mais on confond avec le Conseil de l’Europe (dont la Lettonieassure pourtant la présidence actuellement) ; le Conseil Européen est nébuleux, ainsi que leParlement ; la Cour de Justice reste inconnue.

• Interrogés sur leurs sources de connaissance sur l’Union Européenne, les Lettons évoquent :° Les médias (presse, télévision, radio), qui constituent la source principale : informations

télévisées, programmes spécifiques dans ce média.° Les politiques : les déclarations du Président, du Ministre des Affaires Etrangères, les

positions des partis : elles manquent de crédibilité, la plupart affirmant sans explications lanécessité de l’adhésion (les journalistes, quoiqu’allant pour la plupart dans le même sens,étant relativement plus crédibles).

° Exceptionnellement, du matériel d’information de type brochures sur l’Union Européenne.° Les contacts avec des personnes venant de pays de l’Union Européenne – contacts valorisés

et recherchés (avec le souhait, notamment, d’en rencontrer qui proviennent de pays récentsadhérents).

• Les attentes d’information se concentrent presque exclusivement sur les conséquencesprévues de l’adhésion pour la Lettonie ou sur tout élément comparatif permettant de s’en faireune idée : les inconvénients autant que les avantages dont parlent les politiques, le développementde l’importation de produits, la stabilité de l’Euro, les implications sociales, la prévention del’immigration – et, plus généralement, un éclairage précis sur les processus et les conséquencesdes décisions communautaires : dans quelle mesure et dans quels domaines la Lettonie pourraconserver son indépendance.

⇒ Roumanie

Le contexte psychologique dans lequel les Roumains expriment leur vision de l’Union Européenne estradicalement différent : dans aucun des 4 groupes réunis à Bucarest et à Alexandria n’apparaît aucunecontestation de « l’évidence » que l’adhésion à l’Union est une nécessité historique, une ardenteobligation, la seule chance et le seul espoir pour la Roumanie.

• La connaissance de ce qu’est l’Union Européenne dépend du niveau socio- économique etéducatif, et aussi du critère du sexe (les femmes en sachant moins que les hommes dansl’ensemble) ; dans les groupes moyens-inférieurs notamment, une bonne partie des interviewés nepeuvent initialement, ou n’osent pas, dire ce qu’ils en savent et pensent, mais beaucoup ont aumoins une perception intuitive.

Chez ceux qui s’expriment d’emblée – et qui ne sont à aucun moment démentis par les autres –l’Union Européenne apparaît comme une famille, une union au sens fort et très affectif duterme, une entité existante qui incarne et représente l’intérêt européen général en mêmetemps qu’un mouvement vers une intégration toujours plus grande.

Son objet est de constituer une force, en tant que telle, face aux autres puissances (les Etats-Unis, la Russie, l’Asie) tout en contribuant au renforcement de chacun de ses membres par lacollaboration et l’aide réciproque, et cela pratiquement dans tous les domaines, économique,commercial, politique, militaire ou culturel.

Cette vision traduit bien une aspiration fusionnelle et une remarquable propension à envisagerl’Union comme fédération intimement soudée.

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• Les mêmes différences dans le niveau de connaissance se manifestent pour ce qui est de l’origineet de l’histoire de l’Union Européenne, et des raisons de sa création.

Ceux qui s’expriment spontanément en ont toutefois une vision juste : ils évoquent :° Une origine après la deuxième guerre mondiale, parfois une Communauté du charbon et de

l’acier, d’abord à l’initiative de la France, de l’Allemagne et de l’Italie (et parfois des paysdu Benelux), la suppression ensuite des barrières douanières avec le Marché Commun, puisl’extension progressive à d’autres domaines devant le constat que « ça marchait », etl’augmentation progressive du nombre des Etats membres.

° Un objectif de renforcer et d’affirmer l’Europe sur tous les plans, à l’origine en partiecomme contre-pouvoir « à Moscou avec ses pays satellites », mais aussi face auxpuissances concurrentes, dont d’abord aujourd’hui les Etats Unis.

° Des dirigeants parfois cités, qui ont œ uvré à ces fins, et parmi eux des personnalitésfrançaises : de Gaulle, Delors, Mitterrand, plus récemment Chirac.

• Les domaines connus (de ceux qui « savent ») ou présumés (par ceux qui s’expriment peu) del’action communautaire sont très complets et très variés – les mieux informés des interviewéss’étendant très largement et en donnant de nombreux détails.

Avec un levier principalement économique et commercial la coopération et l’intégration se sontdéveloppés et continuent à se développer, selon les Roumains, dans ceux :

° De l’agriculture° De la monnaie : l’Euro° De la libre circulation des personnes aussi bien que des marchandises° De la recherche° De l’éducation : programmes d’échanges universitaires° De la culture° Des droits de l’homme° De l’environnement et de la sécurité alimentaire° De la protection sociale° De la solidarité : aides aux pays les moins développés (avec des références au Programme

Phare pour les pays candidats à l’adhésion)° Du contrôle des trafics et de la criminalité° De la défense° De stratégies politiques communes° Etc.

Dans tous ces domaines la légitimité de l’action communautaire est une évidence noncontestée – avec seulement quelques réserves sur la culture qui n’a pas vocation a êtreuniformisée.

Surtout, les interviewés ont conscience qu’il s’agit d’un ensemble organisé avec ses politiquescommunes et sa législation qui s’applique à tous.

• La connaissance des institutions est en revanche assez faible, bien qu’ils sachent que l’UnionEuropéenne est une construction institutionnelle élaborée.

Spontanément, ce n’est que par très peu que sont citées parfois telles ou telles des institutions :° Le Parlement est sans doute celle qui est relativement la mieux connue° La Commission est parfois connue de nom, son rôle est flou° Le Conseil des Ministres est parfois bien compris, quand on l’évoque, comme la réunion

des Ministres compétents dans un domaine donné, mais les confusions sont fréquentes avecle Conseil Européen ou « le Conseil de l’Europe »

° Les lieux de leurs sièges sont souvent confondus (Bruxelles, Strasbourg)° La Cour de Justice est peu évoquée.

En ce qui concerne les mécanismes institutionnels, dont on a vu qu’ils avaient bien consciencede leur existence même s’ils ne les connaissent que rarement en réalité, les discussions sur cesujet s’orientent parfois, en outre, d’une part sur le poids des différents pays, et d’autre part sur lesconditions d’application de la législation communautaire aux Etats membres.

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• Interrogés sur leurs sources d’information sur l’Union Européenne, les Roumains citentd’abord la télévision (informations télévisées et débats) puis la presse écrite et la radio, ainsiparfois que les institutions spécialisées de l’Etat.

Pour la télévision, il s’agit du média le plus « facile » et le plus accessible, ce qui ne veut pas direque ce qu’on y voit soit nécessairement considéré comme une information de qualité, fiable et nondéformée.

• Les attentes d’être informé s’expriment très vivement. Elles portent, comme dans les autrespays candidats, sur les implications prévisibles de l’adhésion pour la Roumanie, mais tout autantsur ce que l’Union attend d’elle et des Roumains – qui manifestent ici comme une « envie de bienfaire » pour être reconnus par ceux qu’ils veulent rejoindre.

En même temps, la curiosité générale pour les projets, les actions et le fonctionnement del’Union apparaît très réelle.

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CHAPITRE IV :

REACTIONS A DES ELEMENTS DE PRESENTATION

DE L’UNION EUROPEENNE

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IV.1. REACTIONS DANS LES ETATS MEMBRES

IV.1.1 REACTIONS A UN DOCUMENT DE PRESENTATION DES DOMAINES D’ACTION DE L’UNION EUROPEENNE

Les participants des discussions de groupe se voyaient présenter un document (établi par le consultant enconcertation avec les responsables concernés de la Commission) présentant et explicitant de façon trèssynthétique (et donc nécessairement incomplète et imparfaite) les principaux domaines de l’actioncommunautaire.

L’objet de cet exercice était d’apprécier dans quelle mesure l’apport d’une telle information pouvait éveillerou stimuler l’intérêt pour l’Union Européenne et contribuer à améliorer l’image qu’en ont les citoyens.

Dans les développements qui suivent, on examinera successivement les réactions suscitées par la lecture dechacune des parties du document, avant de dégager quelques observations de portée générale.

⇒ L’origine de l’Union Européenne : des moyens économiques au service d’un dessein politique

L’Union Européenne s’est formée progressivement à partir des années 1950, avec la création de la CommunautéEuropéenne du Charbon et de l’Acier (CECA), puis de la Communauté Economique Européenne (CEE). Créée àl’origine entre 6 pays, elle s’est graduellement élargie aux 15 Etats membres actuels, en attendant un nouvelélargissement à de nouveaux pays candidats.Cette création visait un objectif politique, en s’appuyant sur des moyens économiques : à l’issue de la deuxièmeguerre mondiale, il s’agissait de réconcilier les anciens ennemis et d’éviter le renouvellement des conflits, en faisanten sorte que leurs intérêts économiques soient de plus en plus imbriqués.Cela a donné naissance au Marché commun (avec, entre autres, la suppression des droits de douane entre les paysmembres) qui a entraîné un développement très rapide des échanges et une forte croissance économique.

Ce premier paragraphe ne donne pas lieu à grand débat : on y voit pour l’essentiel le rappelhistorique de faits déjà plus ou moins connus (ou, en tous cas, non contradictoires avec la perceptionparfois floue qu’on avait des origines de l’Union).

Pour certains, il précise ou clarifie des connaissances qui restaient partielles dans leur propreesprit ; d’autres estiment qu’un tel rappel peut être utile pour les jeunes qui ignoreraient les débuts de laconstruction européenne ; chez très peu, c’est une information presque entièrement nouvelle.

Un seul élément constitue parfois une surprise – l’affirmation de la primauté du dessein politiqued’origine – chez des interviewés qui avaient spontanément tendance à ne voir dans la constructioncommunautaire que quelque chose d’économique (et donc de matérialiste et d’abstrait pour le citoyenmoyen). C’est le cas notamment chez des interviewés espagnols ou britanniques plutôt eurosceptiques. Enoutre, des participants de groupes d’autres pays, bien au fait des objectifs de départ, soulignent lanécessité de rappeler le projet politique fondamental qui aurait tendance à être oublié.

On peut noter, en outre, l’étonnement de quelques-uns à l’évocation de la suppression des droits dedouane entre Etats membres, avec une confusion manifeste avec la perception de TVA dont ils ont dus’acquitter au passage d’une frontière interne de l’Union.

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La Politique Agricole Commune s’est ajoutée au Marché commun industriel.A l’époque, l’Europe souffrait d’un grave déficit en produits alimentaires. Elle a apporté des aides à son agriculture(comme l’ont fait d’ailleurs également les Etats-Unis et d’autres pays), lui permettant de se moderniser et de comblerce déficit.Les résultats acquis permettent aujourd’hui de diminuer ces aides, tout en conservant un soutien aux agriculteurs,qui reconnaît leur rôle pour le maintien en vie d’un tissu de villages, d’un environnement, et d’un paysage rural quifont partie de l’identité européenne, dans le cadre d’une politique plus générale de développement rural.

Ce paragraphe très schématique sur la Politique Agricole Commune suscite de vives contestationschez une partie des personnes interrogées dans certains pays, pour des motifs d’ailleurs différents :

• Critiques de la légitimité de l’aide à l’agriculture, ou tout au moins de son importance.

On les trouve émises notamment par certains interviewés français, belges, allemands, autrichiens,finlandais, et plus encore suédois et britanniques (ces derniers s’étonnant parfois par exemple qu’ilait pu y avoir un déficit agroalimentaire européen, ou estimant en tous cas que leur propre paysn’en était pas touché).

• Critiques de la gestion de cette aide, qu’on entend peu ou prou dans les mêmes pays :inconséquence d’une gestion qui avait conduit à d’énormes surplus (mais il est à noter qu’on enparle au passé plutôt qu’au présent) et parfois soupçons de malversations ; ou mise en cause,explicite ou implicite, d’un modèle d’agriculture productiviste à outrance ayant conduit auxdérives actuellement constatées (la crise de l’ESB étant notamment évoquée)

• Critiques des orientations même de la PAC, l’Union Européenne étant assez largement perçue enGrèce et en Espagne comme imposant des diktats aux agriculteurs de ces pays (sur la culture del’olive notamment), et parfois aussi en France comme « bridant » les paysans.

• Crédibilité insuffisante de l’argumentation relative à la réorientation de la PAC dans le cadre d’unepolitique de développement rural et de préservation de l’environnement.

Si, assez largement, ces objectifs sont salués comme positifs, et si on s’inquiète a contrario de ladifficulté à survivre des petits exploitants, on croit pouvoir constater en même temps les progrès dela désertification rurale (tout particulièrement, dans notre échantillon, en Grèce, en Irlande, et enFrance).

Ces contestations ne mettent pas généralement en cause le bien fondé d’une politique européenne del’agriculture, mais elles indiquent ou confirment que c’est là un des domaines où la communicationde l’Union est particulièrement difficile.

⇒ La relance de la construction européenne : le marché unique, la monnaie unique

La construction européenne s’est ralentie dans les années 1970 et au début des années 1980. Elle a été relancée avecle projet du Marché unique, qui est entré en vigueur en 1993.Il a visé à supprimer tous les obstacles aux échanges qui subsistaient, et à instaurer la libre circulation des produits,des services, et des capitaux – mais aussi des personnes, qui peuvent voyager et s’installer librement pour vivre ettravailler dans le pays de leur choix dans l’Union Européenne

En dehors d’interrogations exprimées par des interviewés dans quelques pays (Benelux, Autriche) sur lesraisons du ralentissement de la construction européenne dans les années 1970, ce texte sur le MarchéUnique et la libre circulation – concepts familiers à la plupart – est facilement compris et accepté.

Le caractère positif de la libre circulation au plan économique n’est, sauf exception, pas contesté, saréalité guère non plus (seules quelques remarques sont faites sur le non-achèvement du Marché Uniquedans certains secteurs de services).

Les commentaires et parfois les interrogations des participants se concentrent davantage sur lalibre circulation des personnes.

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Celle-ci ne suscite pas de contestation sur le plan des principes, et elle même parfois très valorisée,mais avec des réserves qui tiennent à deux types de facteurs :

• Le sentiment qu’on n’est pas vraiment concerné, que cette disposition n’a pas de réelle portéepratique pour soi-même.

C’est le cas notamment dans des pays où la pratique des voyages est moins répandue qu’ailleurs :ainsi pour des remarques formulées par des Espagnols (avantage principalement pour lesEuropéens du Nord, qui viendront acheter des maisons en Espagne) ou par des Grecs (crainte dedevenir les « OS de l’Europe »).

• La crainte des conséquences de la perméabilité des frontières sur l’immigration illégale d’extracommunautaires, ou sur les trafics et le développement de la criminalité – qu’on trouve expriméepar exemple au Royaume Uni, en Autriche (vis à vis des Européens de l’Est) ou en Suède.

En outre, certains interviewés estiment que cette libre circulation n’est pas encore pleinement réalisée(obligation maintenue de montrer son passeport pour entrer dans certains pays, liberté d’installation plusfacile en théorie qu’en pratique).

En même temps qu’on instaurait le Marché Unique, on commençait à préparer la monnaie unique européenne :l’Euro, dont les billets et les pièces remplaceront les monnaies nationales le 01-01-2002, dans les 12 pays qui ontdéjà décidé de l’adopter.L’Euro doit faciliter encore les échanges entre les Etats membres, et les conduire à adopter des politiqueséconomiques qui convergent au lieu de s’opposer (par exemple, il n’est plus possible pour un Etat-membre de la zoneEuro de dévaluer sa monnaie par rapport aux autres).Il doit permettre à l’Europe de constituer un pôle de stabilité monétaire face aux autres monnaies mondiales –sachant qu’il y aura toujours des fluctuations avec le dollar et le yen, vers le haut ou vers le bas selon les périodes,comme il y en avait entre chaque monnaie européenne et ces monnaies précédemment.Pour les citoyens, l’Euro facilitera les voyages et les achats dans d’autres pays européens, et leur fera économiserles frais de change.

Cette présentation de l’Euro, sujet d’actualité avec lequel les citoyens sont familiarisés, apparaîtfacilement compréhensible.

Elle apparaît en outre crédible à une grande majorité, sauf dans 4 pays :

• Les 3 Etats membres de l’Union qui n’ont pas décidé d’adopter l’Euro : Suède (où sa capacitéd’être une monnaie stable est l’objet de fortes réserves, voire de risées), Danemark (où elle est trèscontroversée) et Royaume Uni.

Dans ce dernier pays, on observe cependant des attitudes attentistes plutôt que des condamnationsdéfinitives de son aptitude à être une monnaie forte et stable face au dollar, certains eurofavorables(minoritaires) y voyant même positivement un facteur possible de facilitation des échangescommerciaux, en même temps que le mythe ressurgit chez d’autres d’une Europe monétairedominée par, et « à la botte » de l’Allemagne.

• Les Pays Bas, où la baisse de l’Euro par rapport au dollar au cours de ses deux premières annéesd’existence officielle renforce les perceptions négatives préexistentes de monnaie structurellementfaible, tarée au départ par la participation des pays « faibles » du Sud de l’Europe, et susceptibled’entraîner pour les Néerlandais une baisse de leur niveau de vie (du fait de sa « dévaluation »,mais aussi de l’idée que la monnaie unique va conduire à un rapprochement des prix en Europe, enn’y pensant d’ailleurs que dans un sens défavorable).

Ces attitudes néerlandaises confirment pleinement les observations qui ont pu être faites dansd’autres études récentes pour la Commission auprès de catégories moyennes-inférieures etparticulièrement fragiles de la population. Tout au plus les personnes des couches socialesmoyennes-supérieures semblent-elles moins profondément affectées par ce syndrome de l’Euro.

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On peut, en outre, constater :

• La bonne compréhension de l’intérêt de la monnaie unique, au plan macroéconomique, pourla facilitation des transactions commerciales et pour la croissance

• La pleine conscience de son apport à la stabilité monétaire dans des pays du Sud de l’Europequi en ont manqué (thème évoqué avec une force particulière en Grèce, dernier venu dans la zoneEuro)

Dans les autres pays, cet apport n’est pas évoqué de la même manière mais au moins on constateque l’argumentation du texte sur les fluctuations relatives de l’Euro et du dollar est peu contestéepar les participants des discussions.

• L’intérêt de l’Euro pour le citoyen pour ses voyages dans d’autres pays européens (facilitation,gain des coûts du change) – avantage évoqué particulièrement dans les pays de la moitié Nordde l’Europe, où la pratique des vacances à l’étranger est plus répandue

• L’existence de confusions, parfois, entre instauration d’une monnaie unique et perspectives deprix ou de revenus harmonisés entre les différents pays européens : confusion notée chez certainsinterviewés par exemple aux Pays Bas, mais aussi en Allemagne, en Belgique, en Espagne.

• La conscience de difficultés d’adaptation à venir, indépendante des questions relatives au fond

• Dans l’ensemble, en dehors des quelques pays nettement eurorésistants, une dominance desperceptions positives de l’Euro et aussi l’idée que celui-ci, une fois entré dans les mœ urs,pourra représenter un symbole fort et un élément du sentiment européen.

On observe d’ailleurs que les Allemands interrogés dans cette étude se démarquent asseznettement de ceux des catégories sociales les plus basses, récemment interviewés dans d’autres, etqui sont nettement plus réservés et inquiets.

⇒ La nécessité de faire appliquer des règles de concurrence loyale : en Europe et, avec lamondialisation, au delà

Pour fonctionner, un marché européen unique a besoin de règles du jeu pour garantir que chaque pays applique desconditions de concurrence égales et loyales, et ne favorise pas ses propres entreprises au détriment des autresentreprises européennes.Par ailleurs, la politique de la concurrence empêche qu’une entreprise quelconque n’acquière dans l’UnionEuropéenne une position dominante qui serait défavorable aux consommateurs.

Les réactions à cette présentation de la politique de la concurrence sont partagées, mais souventempreintes de scepticisme ou d’inquiétudes.

Il n’y a guère qu’en Irlande que l’idée de règles communautaires de concurrence loyale est acceptée sansétats d’âme, comme à la fois positive et crédible.

Dans quelques autres pays, on souscrit dans l’ensemble à la proposition, tout en émettant des réserves surla réelle application des règles : ainsi aux Pays Bas, au Royaume Uni, au Danemark ou en Suède.

Les réserves sont plus fortes dans d’autres quant à la crédibilité de l’affirmation :

• Parce qu’on doute du pouvoir des autorités communautaires en la matière dans un marché oùrègne l’absence d’harmonisation (en Espagne, en France, en Finlande), ou que l’existence connued’un organisme national chargé de veiller à la concurrence fait supposer que la politiquecommunautaire ne suffit pas (comme en Allemagne avec l’Office des Cartels).

• Parce qu’on a en mémoire des cas où on estime qu’une entreprise nationale a été défavorisée,et qu’on en impute la responsabilité au niveau communautaire (en Belgique, où tous ont présent àl’esprit Interbrew ; au Portugal, où en appelle cependant à un pouvoir communautaire accru).

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• Parce que, sans nécessairement mettre en cause la réalité de la concurrence et sa stricteapplication, on en craint l’effet sur des entreprises nationales qu’on pense trop faibles pourrésister, ou de façon plus limitative, sur les petites et moyennes entreprises.

En Italie, en France, en Belgique, au Luxembourg, en Allemagne, en Autriche, le sort des PMEvouées à être « avalées » par les groupes plus puissants est particulièrement évoqué, et plusgénéralement celui des entreprises nationales dans des pays du Sud nourrissant des complexes surla compétitivité de leurs entreprises de toutes tailles : ainsi tout particulièrement en Espagne àpropos de Telefonica ou de Carrefour envahisseur du commerce de détail, ou en Grèce où onévoque (à Athènes) de nombreuses sociétés récemment rachetées par des firmes étrangères.

Les doutes existent dans ces cas sur le maintien de conditions de concurrence au bénéfice duconsommateur quand on voit s’installer ou se développer de grandes entreprises« monopolistiques ».

Ils reflètent plus largement les inquiétudes qui se manifestent à l’égard de la mondialisationou de l’internationalisation de la vie économique, dont l’ouverture des frontières en Europeapparaît alors comme un des éléments les plus visibles.

La diminution des obstacles aux échanges se développe maintenant également dans le monde entier. L’UnionEuropéenne y est favorable, car elle considère que c’est un facteur de prospérité accrue pour tous, à condition làaussi qu’il y ait des règles et qu’elles soient respectées.Elle conduit les négociations commerciales internationales pour le compte de l’ensemble de ses Etats membres, enpesant beaucoup plus que ne pourrait le faire chacun d’entre eux isolément face à des adversaires puissants.

Les réactions enregistrées à ce paragraphe révèlent à nouveau les sourdes craintes que lamondialisation suscite : particulièrement présentes dans les pays du Sud, on l’a vu, elles sont égalementfortes chez les interviewés de la partie orientale de l’Allemagne, dont certains montrent une véritablehantise de la délocalisation à l’Est.

Le texte proposé suscite également parfois des doutes quant à la volonté d’ouverture aux échanges del’Union Européenne (référence à l’ouverture incertaine aux pays du Tiers Monde par exemple enBelgique, en Suède ou en Autriche, dans les groupes socio-économiques moyens-supérieurs).

Quant au statut de négociateur unique de l’Union Européenne dans les négociations internationalessur le commerce (généralement inconnu avant l’apport de cette information), on reconnaîtgénéralement son bien fondé : c’est une évidence pour les citoyens de petits pays comme leLuxembourg, l’Irlande, la Finlande, l’Autriche (avec des réserves), la Grèce (mais toujours avec la crainteque les grands pays européens ne dominent le jeu), ou le Portugal ; mais c’est aussi reconnu par exempledans des pays particulièrement eurosceptiques comme les Pays Bas ou le Royaume Uni.

Des doutes s’expriment parfois cependant sur la réelle capacité de l’Union Européenne, mêmeréunie sous une même bannière, à faire valoir avec succès ses intérêts (en Italie, en Espagne, enFrance, en Belgique, en Allemagne… )

⇒ Des politiques de coopération dans une Union Européenne qui ne se réduit pas à une zone de libreéchange

L’Europe du Marché Unique ne se réduit pas à une zone de libre échange économique. C’est aussi tout un ensemblede politiques concertées : pour développer des capacités de recherche scientifique et technologique communes, pourpréparer les infrastructures de télécommunications qui sont nécessaires à l’échelle du continent, pour développer desréseaux de transport efficaces et inter-reliés, etc.

L’information communiquée dans cette partie du texte rencontre un consensus très large à la foissur le plan des principes et en ce qui concerne sa crédibilité.

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Sur le plan des principes, il y a en même temps :

• La nécessité bien comprise de mettre en commun les ressources dont on dispose pour aboutirà une meilleure efficacité et/ou à un moindre coût des efforts de recherche – et l’on a conscienceque celle-ci est indispensable dans le monde en rapide évolution technologique d’aujourd’hui (lapuissance en la matière du grand concurrent américain étant explicitement ou implicitementévoquée).

• L’idée positive de projet porteur, plus motivante que la gestion quotidienne ou l’élaborationde réglementations, et d’enrichissement mutuel

• Le sentiment que la coopération européenne dans de tels domaines débouche à plus ou moinscourt ou long terme sur des résultats tangibles pour le citoyen (les exemples destélécommunications et des transports étant particulièrement concrets).

En ce qui concerne la crédibilité de la proposition, même dans l’ignorance a priori des dispositifscommunautaires de coopération, elle est au moins supposée, au vu d’exemples de réalisations qu’on a entête (on cite par exemple en Espagne l’Agence Spatiale Européenne « qui n’aurait jamais existé sanscela », Thalys en France, Eurotunnel au Royaume Uni, le développement des réseaux de transport et detélécommunications en Grèce, etc.)

Des réserves s’expriment en Allemagne, en Autriche ou en Belgique sur la bonne orientation et la bonneefficacité des budgets mis en œ uvre, et chez une partie des Finlandais sur la disposition des grandesentreprises à travailler dans le sens des orientations communes. Au Danemark le sentiment généralisé dedéfiance à l’égard de l’Europe se combine avec une grande méconnaissance de réalisations quiconcernent pourtant le pays au premier chef (pont de l’Öresund dont le financement communautaireparaît totalement ignoré).

Ces réserves sont toutefois minoritaires dans l’ensemble, et ne mettent pas en cause le bien fondéd’une coopération européenne poussée.

⇒ Au delà de l’économie : une politique de solidarité de grande ampleur

A l’origine, la construction européenne était essentiellement économique, mais ce n’est plus le cas aujourd’hui. Enparticulier, l’instauration du Marché unique a été accompagnée d’un très fort développement des politiques desolidarité, qui représentent un tiers du budget total de l’Union Européenne : environ 150 milliards d’Euros parpériode de 5 ans.Il s’agit notamment :

D’aides aux régions en retard ou en difficultés économiques par un Fonds Régional ; elles vont principalementaux pays les moins riches de l’Union, pour les aider à rattraper leur retard, mais dans tous les pays il y a desrégions qui en bénéficient.D’aides à l’emploi, à la formation, à la reconversion des chômeurs, etc., par le Fonds Social Européen

Certaines de ces actions s’appliquent déjà aux nouveaux pays candidats à l’entrée dans l’Union Européenne.

L’Union Européenne manifeste aussi sa solidarité en étant, de très loin, le premier pourvoyeur d’aide au TiersMonde et aux pays victimes de guerres ou de catastrophes naturelles.

L’existence et l’importance des politiques de cohésion sont bien connues dans les 5 pays d’Europe« du Sud » qui en ont été les principaux bénéficiaires :

• Leur rôle essentiel dans le développement du pays (et notamment celui de la politique régionale)est très largement reconnu en Irlande, au Portugal, et en Espagne (malgré des questions dans cedernier pays sur la complexité du système et des observations sur la nécessité d’un plus grandcontrôle de l’utilisation des aides)

• Il l’est également en Grèce, mais en même temps on y doute de la motivation de solidarité qui ypréside, en faisant observer que la nouvelle aérogare d’Athènes « a été construite par uneentreprise allemande » et que l’exploitation du métro sera au bénéfice d’un groupe européen (nongrec).

• C’est moins net en Italie (où, rappelons-le, les discussions de groupe avaient lieu dans le Nord dupays)

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• Des critiques se font jour aussi parfois chez des interviewés (grecs et italiens) qui ont bénéficiéd’actions de formation-reconversion mais qui en contestent le contenu, les modalités, ou le résultat(ce n’est pas ça qui redonne du travail « quand il n’y en a pas »).

Ces politiques paraissent avoir une assez grande notoriété également en Allemagne et en Finlande,où la conscience que le pays en a bénéficié se mêle du sentiment en même temps d’être contributeurnet, et parfois de critiques sur leur fonctionnement. La notion de l’Allemagne payeuse revient parexemple ici dans les propos des participants, quoique sous la forme édulcorée de « trop payeuse »,laissant entendre qu’ils ont conscience qu’elle peut être aussi du coté receveur : on y évoque les aides à lareconstruction des Länder de l’Est. Les interviewés de Leipzig connaissent des projets concrets qui ontété financés, plusieurs d’entre eux ont suivi des stages de formation-recyclage ; et on évoque aussi leTGV vers Bruxelles et Paris à Cologne.

Dans quelques Etats membres, une partie au moins des interviewés ont conscience que des aidescommunautaires peuvent concerner certaines régions ou certaines actions dans leur pays, de façonnettement plus ponctuelle cependant : ainsi en Autriche, en Suède (références occasionnelles auxObjectifs 3 et 4) et au Royaume Uni (connaissance par quelques interviewés de la contribution à laréhabilitation de zones déshéritées).

Dans les autres, ou bien les politiques de cohésion sont inconnues ou très peu connues, ou bien(comme en France et au Luxembourg) leur mention réveille des souvenirs d’en avoir vu desmanifestations dans d’autres Etats membres, mais pas à domicile.

En dehors des pays principaux bénéficiaires précités, l’agrément de principe, assez fréquent, àl’idée de tels soutiens est contrebalancé, ou bien par le sentiment plus ou moins aigu d’en être lespayeurs (aux Pays Bas notamment), ou bien par des interrogations sur leur bonne utilisation et leurbonne gestion.

De manière générale toutefois, l’idée d’aides permettant aux pays ou aux régions en retard ou endifficultés de rattraper le niveau général paraît reçue positivement, pour autant que celan’apparaisse pas comme une subvention « à vie » : il conviendrait sans doute de renforcer le conceptde mesures structurantes dans la communication et de faire valoir les bénéfices à terme pour tous, et passeulement pour les pays directement destinataires, tout en mettant en exergue des exemples de réalisationsconcrètes (même modestes) dans les pays a priori « payeurs ».

Les réactions des interviewés dans plusieurs d’entre eux montrent en tous cas qu’ils n’avaient pasconscience de l’importance de cette dimension de l’action communautaire : ainsi notamment enBelgique, et au Royaume Uni, où l’information présentée amène même bon nombre à se demander tout àcoup « si on (leurs médias) ne leur cacherait pas de bonnes nouvelles ».

⇒ La protection des consommateurs : une législation en grande partie communautaire

La politique des consommateurs est un autre aspect important de l’action de l’Union Européenne. Dans ce domaine,la plupart des règles et des normes de sécurité des produits que nous consommons ont une origine communautaire.Par cette politique, mais aussi par ses positions dans les négociations internationales, sur des sujets comme la viandeaux hormones ou les organismes génétiquement modifiés, elle agit pour faire reconnaître le principe de précaution etaboutir à des règles précises de protection des consommateurs.

Il s’agit là d’un thème essentiel, sur lequel la demande des citoyens est très grande dans l’absolu, etl’attente potentielle à l’égard de l’Union Européenne très élevée dans la plupart des pays – sansdoute parce que les citoyens ressentent plus ou moins confusément le caractère insuffisant demesures nationales à l’heure de l’ouverture des frontières et de la mondialisation.

Il n’y a guère qu’au Danemark et en Suède que la certitude profondément ancrée de disposer desnormes de sécurité et de protection les plus élevées qui soient amène une grande partie despersonnes interrogées à une confiance quasi-exclusive en les autorités de leur pays et en les règlesqui y prévalent. Dans d’autres, comme les Pays Bas, la Finlande ou l’Autriche, où on pense avoirégalement un niveau national de protection élevé, on ne récuse pas pour autant la légitimité et l’utilitéd’une action communautaire dans ce domaine.

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Dans les autres Etats membres, la croyance en la qualité de la protection nationale est inégale, et lesdoutes sont même assez profonds dans certains pays « du Sud ». Dans un cas, au Luxembourg, l’absenced’institut de recherche national est évoquée en outre comme raison nécessaire de se reposer sur le niveaude l’Union Européenne.

Cela dit, la crise de l’ESB – sur laquelle se concentrent très souvent spontanément les propos desparticipants des discussions – vient très sérieusement nuire à la crédibilité de l’Union sur ce point.

Ou bien on lui impute directement la responsabilité du fléau, ou bien (plus souvent d’ailleurs) on croitconstater que l’Union s’est montrée incapable d’imposer aux Etats membres, sensibles aux intérêtséconomiques en jeu autant qu’aux considérations de santé publique, des mesures rapides, efficaces ethomogènes.

Les critiques apparaissent particulièrement virulentes en France et en Allemagne, ainsi qu’en Grèce.

Cette situation vient, dans la période actuelle, nuire fortement à l’Union Européenne pourrevendiquer une politique active de protection des consommateurs, en occultant les autres mesures detoutes natures qui ont pu être prises dans d’autres domaines, et en faisant peser les mêmes doutes sur sacapacité à « défendre l’Europe » contre les OGM.

Il n’y a guère qu’au Portugal et en Irlande, et peut être en Italie, que la confiance demeure intacte,solidement établie antérieurement par la bonne connaissance de son bilan positif sur ces sujets, et desprogrès accomplis par rapport à une législation et une pratique nationales jugées très défaillantes.

⇒ Des progrès encore modestes vers une Europe sociale et une Europe des citoyens respectueuse de sadiversité culturelle

Dans le domaine de la protection sociale proprement dite, l’intervention de l’Union Européenne est limitée, car c’estun domaine qui relève essentiellement des législations nationalesIl y a quelques lois européennes importantes qui apportent des protections aux travailleurs : règles d’hygiène et desécurité que doivent respecter les employeurs, généralisation du principe d’un salaire minimum qui n’existait pasdans tous les pays, égalité entre les hommes et les femmes, systèmes d’information et de représentation des salariés,etc.De même, même si on n’en est qu’aux débuts, on commence à voir se dessiner une Europe politique pour les citoyens,avec une citoyenneté européenne qui donne le droit de vote aux élections locales et aux élections européennes, mêmesi on réside dans un autre pays de l’Union que le sien ; et qui offre la protection de l’ambassade de tout Etat del’Union en cas de problèmes dans un pays tiers, etc.Un pas vient d’être franchi avec l’adoption toute récente d’une Charte des Droits Fondamentaux, qui constituera unpoint de référence pour les évolutions futures (comme, par exemple, la Déclaration Universelle des Droits del’Homme).

L’argumentation sur les débuts de l’Europe sociale est reçue tout à fait positivement :

• Dans les pays « du Sud » de l’Europe, Portugal, Grèce, Espagne, et Irlande, où les citoyens ontclairement conscience du retard initial (et du retard qui demeure encore) de leur pays dans cedomaine – ainsi qu’en Italie : dans les quatre premiers de ces pays, le titre donné à ce paragrapheapparaît même trop modeste, les personnes interrogées sachant ou sentant concrètement que lesprogrès accomplis ces dernières années l’ont été en grande partie sous l’impulsion de l’UnionEuropéenne et de sa législation.

• Au Royaume Uni où, on l’a vu tout au début de ce rapport, de sérieuses inquiétudes commencentà se manifester sur la désagrégation du système social (et des services publics en général).

Dans ces pays il y a une attente forte et générale d’intervention accrue du niveau communautaire (enmême temps que des frustrations sur la lenteur du changement ou sur la non-application systématique desrègles par les employeurs, respectivement en Espagne et en Grèce).

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A l’inverse, on a dans les autres pays le sentiment d’avoir un niveau de protection sociale supérieurau niveau moyen communautaire : on ne voit guère ce qu’on a à y gagner (tout en reconnaissant lesbénéfices pour les pays moins avancés) ; ou on craint même d’y perdre sous l’effet d’une harmonisationprésumée par le bas : cas des pays ancrés dans leur conviction de supériorité de leur modèle social (PaysBas, Danemark, Suède), mais aussi de la France, de l’Allemagne et dans une moindre mesure de laBelgique et du Luxembourg (dans des groupes socio-économiques moyens-inférieurs), où on évoque lesdélocalisations, la concurrence de pays à moindre coût de main d’œ uvre, les fermetures d’usines(Vilvoorde) : dans une économie ouverte, on craint que l’économique ne s’oppose au social.

Quant à la Charte des droits sociaux fondamentaux, la rareté des réactions (non négatives) à son sujetmontre surtout que les citoyens qui en ont entendu parler sont peu nombreux.

L’idée de citoyenneté européenne n’est pas toujours bien comprise. Quand il est discuté, le vote desrésidents étrangers aux élections locales ou aux élections européennes à l’endroit où ils vivent ne susciteguère de contestation, mais reste assez abstrait pour la plupart. Quant à la protection diplomatique dans unpays tiers, elle n’éveille spontanément l’intérêt que de peu de citoyens dans de petits pays (Irlande,Autriche) ; elle est sans doute également abstraite pour beaucoup même si l’idée est positive.

La citoyenneté européenne s’ajoute à la citoyenneté nationale, elle ne la remplace évidemment pas. Il n’a jamais étéquestion de standardiser les identités européennes, dont la richesse tient à leur diversité.L’Union Européenne a des actions, relativement modestes en termes financiers, mais précises, en faveur de ladiversité culturelle et des échanges culturels.

Bourses Erasmus ou Leonardo accordées aux étudiants qui passent un an dans une université d’un autre pays,soutien aux échanges d’enseignants ou de chercheurs, etc.Soutien financier à la préservation du patrimoine historique et culturel de chaque pays

Directives communautaires sur l’audiovisuel, qui empêchent que les œuvres de création soient considéréescomme de simples marchandises

Pour banale et évidente qu’elle soit, l’affirmation que l’Union Européenne ne vise pas àstandardiser les cultures des différents pays, et que la citoyenneté européenne ne vise pas àremplacer les citoyennetés nationales, joue un certain rôle de réassurance dans les pays où on est leplus inquiet d’empiétements communautaires (Royaume Uni, Danemark, Suède, Irlande, Grèce … ) etn’est donc pas inutile. Des doutes subsistent, notamment chez certains interviewés de niveausocioéconomique moyen-inférieur en Autriche (et plus rarement en Irlande, en Grèce, en Flandre belge),comme dans les premiers pays cités.

L’idée d’échanges d’étudiants, d’enseignants, ou de chercheurs est partout appréciée positivementet la réalité jugée crédible. Erasmus ou Leonardo parait particulièrement fortement valorisé dans lapartie Sud de l’Europe, où les bourses de ces programmes semblent avoir une forte notoriété – et où, plusgénéralement, la notion de culture comme ciment de l’identité européenne est plus profondémentressentie. Partout, on est favorable à un développement important de telles initiatives.

La contribution communautaire à la préservation du patrimoine est considérée comme positive,mais peu connue – sauf en Grèce où on évoque toutefois avec rancœ ur le conflit qui oppose le pays auRoyaume Uni sur la restitution des statues des temples de l’Acropole. Il n’y a que les Néerlandais (malgréun sentiment de principe favorable) qui évoquent à nouveau à ce propos le statut vraisemblable de« payeur » des Pays Bas (ou le doute que d’autres pays (l’Allemagne en l’occurrence) acceptent de payerpour la restauration des moulins hollandais).

Le thème de la politique audiovisuelle n’a guère été discuté dans un passage en revue trop succinct(signe peut-être que beaucoup ne comprennent pas d’emblée ce dont il s’agit).

⇒ Les débuts d’une Europe de la sécurité et de la défense au service de valeurs humanistes etdémocratiques

Dans ses relations avec les autres pays, l’Union Européenne entend appliquer ses principes et ses valeurs humanisteset démocratiques

Cela s’applique à sa politique vis à vis de régimes politiques autoritaires qui existent dans le monde

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En Europe même, le respect des règles démocratiques et des droits de l’homme est par exemple une conditionmise à l’adhésion de nouveaux Etats membres, comme elle l’a été pour certains des membres actuels ; et l’UnionEuropéenne leur apporte dans ce domaine une aide technique à l’adaptation de leurs législations.

L’affirmation par l’Union Européenne des droits de l’homme et du respect des règlesdémocratiques ne peut évidemment que rencontrer l’adhésion générale.

Elle est soulignée comme essentielle avec plus ou moins de force (particulièrement fortement dans lespays scandinaves, en Allemagne, aux Pays Bas, au Luxembourg) et jugée généralement crédible.

Quelques réserves s’expriment, soit sur les limites de l’effet pratique de l’affirmation de principes,soit quant au caractère encore partiel des positions communes dans ce domaine (référence parexemple en Belgique aux règles « non harmonisées » concernant l’obtention de visas), soit encore parcequ’on constate des écarts entre la théorie et la réalité (certains Allemands observant par exemple que leurpropre pays ne répugne pas à livrer des chars à la Turquie, certains Autrichiens évoquant l’inactioneuropéenne vis à vis des Kurdes, certains Suédois dénonçant l’attitude de l’Europe vis à vis du TiersMonde … ).

Les objections sont nettement plus vives dans un pays, la Grèce, où on évoque pèle-mêle « l’asile »accordé par le Royaume Uni à Pinochet, l’action contestée de pays de l’Union dans l’ex-Yougoslavie, laquestion de Chypre, et celle de la Turquie (une partie des interviewés reconnaissant toutefois que desconditions précises ont été mises à l’adhésion éventuelle de ce pays).

Sur un plan pratique, les propos des citoyens interrogés se concentrent sur les conditions mises àl’adhésion de nouveaux Etats membres (principalement de la Turquie) – pour approuver l’exigence deplein respect de ces principes de leur part.

Les références à l’application de ces idéaux à l’intérieur même de l’Union sont rares : en dehors dequelques références historiques dans des Etats naguère sortis de la dictature en Grèce ou en Espagne, ellene sont guère présentes qu’en Autriche, où certains évoquent avec amertume les sanctions récentes contreleur pays (mais pas de manière généralisée).

Pour affirmer ses valeurs et être une force d’équilibre dans le monde, l’Europe doit être forte, et pas seulementéconomiquement et culturellement ; elle doit être en mesure d’assurer sa sécurité intérieure et extérieure.La justice et la sécurité intérieure font partie, depuis le Traité de Maastricht, des nouveaux domaines de coopérationeuropéenne, pour lutter notamment contre la criminalité, le trafic de drogue, l’argent sale, etc.Il en va de même de la défense : dans ce domaine, des progrès importants sont actuellement faits pour constituer unedéfense européenne commune qui lui permette de mener des actions de défense sans dépendre des Etats-Unis quandceux-ci ne veulent pas s’engager, tout en restant attachée à l’OTAN.

L’annonce d’un développement de la coopération européenne pour lutter contre la criminalité estconsidérée partout d’un œ il favorable, et ce domaine est même souvent considéré comme l’un deceux qui doivent être prioritaires ; le caractère transnational du problème ne fait de doute pourpersonne. Dans plusieurs pays, certains interviewés s’insurgent même spontanément contre les limitesqui sont mises au droit de poursuite sur leur territoire par des policiers d’autres Etats communautaires(sous réserve que cela reste encadré).

La sensibilité à ces questions apparaît encore plus forte :

• En Espagne et en Irlande, pays confrontés à un terrorisme intérieur récurrent

• Dans des pays actuellement confrontés à de grandes difficultés de contrôle de l’immigrationclandestine (Royaume Uni) ou qui, adossés à des frontières extérieures de l’Union, craignentdes déferlements des pays voisins (Allemagne, surtout dans la partie orientale du pays, Autriche).

• Dans les pays nordiques où l’idée est assez fortement présente que l’ouverture des frontièresinternes (récente pour les derniers pays adhérents) a en fait contribué au développement des traficset de la criminalité chez eux.

Seule réserve nettement exprimée au renforcement de l’action commune : la crainte chez des Françaisqu’une harmonisation éventuelle n’amène « à légaliser la drogue (et l’euthanasie) comme aux Pays-Bas »– alors que bon nombre des citoyens néerlandais interrogés verraient plutôt avec faveur des mesurescommunautaires qui conduiraient leur pays à être moins laxiste à cet égard.

En ce qui concerne la perspective d’une défense européenne :

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• Bien que les débuts de sa réalisation en soient encore très modestes, elle est saluée commeune nécessité évidence et impérative pour que l’Europe acquière l’indépendanceindispensable vis à vis des Etats-Unis dans d’assez nombreux pays : la France (qui reste à coupsur imprégnée de la pensée gaullienne), la Grèce (dont on sait quelles résistances y existent aussi àl’égard de la puissance américaine et d’une OTAN qui inclut la Turquie), le Portugal, l’Espagne –mais aussi l’Allemagne : on sait que la mentalité collective y a profondément évolué sur ce sujetau cours de la dernière période, et que la prise de conscience s’y est faite que « les Etats-Unisinterviennent seulement quand leurs intérêts sont en jeu » ; les évènements les plus récents ycontribuent encore (découverte de l’utilisation d’armes américaines « au plutonium » dans l’ex-Yougoslavie ; annonce de la reprise du projet de guerre des étoiles par le nouveau président).

• Elle est également vue positivement, avec un consensus très large, par les Italiens(traditionnellement moins sensibles aux questions de défense, mais favorables à l’idée), lesLuxembourgeois (très « fusionnels » sur ce plan), les Belges (avec seulement des observations surles zones d’influence traditionnelles de différents pays européens dans le monde, et le souhait deces pays de conserver une marge d’initiative individuelle), et les Irlandais (avec peu de référencesau statut de neutralité du pays, et la conscience là aussi « qu’on en peut pas s’en remettre auxEtats-Unis » en toutes choses).

• Elle paraît accueillie favorablement par une majorité en Finlande et en Autriche, malgré desréserves quant à la neutralité ; un débat actif s’instaure à ce sujet dans les différents groupes, et unecontroverse sur le fait de savoir si cela va permettre de diminuer les dépenses militaires ou aucontraire les augmenter.

• Les réserves sont plus grandes aux Pays Bas, où on insiste fortement sur la nécessité deconserver « un contrôle national » et un lien fort avec l’OTAN, mais il n’y a pas d’oppositionrésolue à des actions européennes communes au cas par cas.

• Elles sont nettement plus accentuées dans un autre pays traditionnellement atlantiste, leRoyaume Uni, avec le même souci de conserver une armée britannique « indépendante » enmême temps que le lien avec l’OTAN – mais tous les esprits n’y sont pas fermés.

• Au Danemark et en Suède, cette perspective suscite une inquiétude assez large de se voirimpliquer dans une entité de défense intégrée : dans le premier de ces pays, on considère lebouclier de l’OTAN ou les actions sous l’égide de l’ONU comme suffisants ; dans le second, onmet en avant sa neutralité.

Cependant la participation à des opérations de maintien de la paix ne suscite pas d’objections, elleest même parfois considérée comme devant être développée.

⇒ Un rôle de laboratoire d’idées et d’architecte pour l’avenir de l’Europe

Selon les domaines, l’Union Européenne est chargée de gérer des politiques communes, ou de stimuler les échangeset la coopération entre les Etats membres. Mais elle a aussi pour mission de préparer notre avenir à long terme, entirant parti de la diversité des idées qui peuvent exister dans les différents pays.

C’est un rôle qu’elle joue dans des domaines très variés : par exemple celui de la recherche ; celui del’environnement (il y a une législation communautaire abondante dans ce domaine, mais aussi des positions depointe défendues par l’Europe au plan mondial, pour lutter contre l’effet de serre et le réchauffement du climat) ;celui de l’énergie (comment éviter à long terme la dépendance énergétique vis à vis de pays extérieursinstables) ; etc.

Le but visé en présentant ce paragraphe de conclusion – à savoir suggérer le rôle pilote nécessairede l’Union Européenne au plan le plus large – n’a pas été pleinement atteint. Dans le très court tempsqui pouvait être consacré à sa lecture et à sa discussion, les participants des groupes n’ont manifestementpas saisi l’idée générale qui était impliquée ; pour y parvenir, il faudrait sans doute pouvoir s’y pencher defaçon beaucoup plus approfondie.

Pour la plupart, leur attention s’est surtout concentrée sur la référence au domaine del’environnement (et parfois à celui de l’énergie, qui lui est en partie lié à leurs yeux), pour souligner à lafois :

• Le caractère très souhaitable d’une action intensifiée dans ce domaine

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• La perception que beaucoup reste à faire, et parfois un réel scepticisme, étant donné la complexitédu problème ou la puissance des intérêts en jeu, ou les différences importantes entre les payseuropéens (en matière de production d’énergie), ou bien encore le constat d’échecs récents dans lestentatives de faire progresser le débat.

• Les doutes sur la capacité européenne à s’imposer face aux Etats-Unis, connus très généralementcomme étant rétifs à s’y engager.

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IV.1.2 REACTIONS A UN DOCUMENT DE PRESENTATION DES INSTITUTIONS COMMUNAUTAIRES ET DUFONCTIONNEMENT INSTITUTIONNEL

De la même manière, on invitait les participants des discussions à prendre connaissance d’un document(également établi par le consultant en concertation avec les responsables concernés de la Commission)décrivant synthétiquement les cinq principales institutions et le fonctionnement institutionnel de l’UnionEuropéenne

⇒ Les institutions de l’Union Européenne

La Commission Européenne est un organe neutre vis à vis des Etats membres. Les Commissaires sont des hommes etdes femmes politiques proposés par les gouvernements des différents pays mais, une fois nommés, ils sont totalementindépendants de ces gouvernements, qui ne peuvent pas les révoquer.Comme un Ministre dans un gouvernement national, chaque Commissaire a son domaine de responsabilité, sousl’autorité du Président de la Commission.

Cette rapide présentation de la Commission, compréhensible pour tous, vient selon les cas« rafraîchir les souvenirs », « confirmer », « préciser », « clarifier » des éléments de connaissancequ’on avait plus ou moins, ou apporter une information claire sur quelque chose dont on ignoraittout (cf. à ce sujet l’exposé au Chapitre III des perceptions spontanées des institutions dans chaque pays,sur lesquelles nous ne reviendrons pas ici).

L’aspect le plus frappant et le plus nouveau – que la plupart ignoraient, même en ayant une certaineconnaissance de base de la Commission – est sa neutralité, l’indépendance des Commissaires àl’égard de leurs Etats membres d’origine, et l’impossibilité pour ceux-ci de les révoquer.

Un relatif scepticisme se fait seulement jour sur ce point en Belgique, aux Pays-Bas, au Royaume Uni,ainsi que dans les pays nordiques, dès lors que les Commissaires sont proposés par leur gouvernement(ou, idée inverse exprimée en Suède, dès lors qu’ils sont « européens »). Au contraire, des remarques sontoccasionnellement formulées spontanément pour reconnaître comme positif le fait que ces personnalitésne soient pas élues, qui accrédite l’idée de leur neutralité.

Dans quelques pays, on observe une incapacité d’une partie des participants à comprendre et admettrel’idée même de neutralité : pays comme le Royaume Uni ou les Pays Bas, où règne une forte suspicion apriori à l’égard de l’institution communautaire dans son ensemble, et où ces personnes tendent à attendrede leur(s) Commissaire(s) qu’il(s) exerce(nt) avant tout leur vigilance pour éviter l’adoption depropositions vues comme contraire à l’intérêt national.

Dans l’ensemble toutefois, l’indépendance de la Commission et des Commissaires est saluée commequelque chose de positif.

Autre observation que certains font : le texte ne précise pas les attributions des différents Commissaires etles facteurs de répartition de leurs domaines de compétence. Elle est parfois formulée dans des pays où,sans être eurohostiles, les citoyens sont particulièrement inquiets de connaître leur influence réelle.

L’analyse des discours en réaction à ce texte confirme en outre que les noms des Commissairessont, sauf cas rares, inconnus, même dans leurs pays d’origine.

Le Conseil des Ministres européen est la réunion des Ministres des différents Etats membres compétents dans undomaine donné : par exemple le Conseil Affaires Economiques et Financières réunit régulièrement les Ministres desFinances, le Conseil Environnement ceux de l’environnement, etc.Certaines décisions doivent être prises à l’unanimité, d’autres le sont par un vote dans lequel chaque pays disposed’un nombre de voix plus ou moins grand selon la taille de sa population (vote à la majorité qualifiée)Les Parlements nationaux sont associés par leurs gouvernements à la préparation des décisions et à leur adaptationà leurs situations nationales.

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On a vu précédemment que le Conseil des Ministres était, en tant qu’institution, très largementignoré d’un grand nombre de citoyens dans tous les pays : l’information apportée est entièrementnouvelle pour beaucoup.

Considérée comme essentiellement factuelle, elle est acceptée comme telle, même s’il demeure desconfusions dans les esprits d’une partie des citoyens des pays très peu familiarisés avec les affairescommunautaires (Royaume Uni ou Suède par exemple).

Outre ces constats, l’analyse permet de dégager :

• Une question posée dans certains pays sur les champs d’application respectifs des décisions àla majorité qualifiée ou à l’unanimité, ou sur le nombre de voix dont dispose chaque Etat-membre.

Elle est formulée notamment dans de petits pays inquiets de leur faible influence.

En général toutefois le principe de la majorité qualifiée ne choque pas – il est même reconnuparfois spontanément comme une nécessité évidente pour qu’on puisse aboutir à des décisions.

Bien entendu, ces quelques observations ne permettent pas d’explorer de façon plus approfondieles attitudes qui se manifesteraient si les interviewés étaient exposés aux cas spécifiquesconsidérées comme « sensibles » pour leur propre pays.

• Le maintien (quoiqu’atténué) de doutes sur l’efficacité du Conseil, au vu des controverses etdes divisions incessantes qui semblent l’agiter (doutes exprimés particulièrement notamment enFrance et en Allemagne).

Le Conseil Européen des Chefs d’Etat et de Gouvernements se réunit normalement 2 fois par an : pour tracer degrandes orientations ; pour décider d’apporter des révisions au Traité qui fondent l’Union Européenne, comme àMaastricht en 1992, à Amsterdam en 1997, ou à Nice le mois dernier ; et aussi pour tenter de trouver des solutionssur des sujets sur lesquels les Ministres n’ont pas réussi à trouver un accord.Chaque pays assure, par rotation, la Présidence de l’Union Européenne pour 6 mois, entre 2 Conseils Européens.

Ce texte est également reçu comme constituant un apport d’information factuelle sur uneinstitution généralement très mal connue, dont on se rappelle peu de choses à part les « photos defamille ».

En dehors du fait qu’à sa lecture les interviewés comprennent mieux que sa fonction doit être de tracer degrandes orientations et de prendre des décisions sur des sujets majeurs, il ne suffit cependant pas àclarifier le rôle et surtout à accréditer entièrement l’efficacité du Conseil Européen.

Les idées de « batailles de chiffonniers », d’incapacité à prendre des décisions, restent fréquentes –d’autant plus qu’on déclare presque unanimement n’être informé en rien sur les décisions qui enrésultent ; et la confusion du Sommet de Nice, évoquée explicitement par certains dans divers pays, necontribue pas à redresser la situation.

Le Parlement Européen est composé de parlementaires élus au suffrage universel dans chaque pays.Comme une Assemblée parlementaire nationale, le Parlement Européen approuve le budget. Il vote sur lespropositions de la Commission. Ces propositions, une fois approuvées par le Parlement Européen et le Conseil desMinistres, deviennent des lois européennes (qu’on appelle directives ou règlements).Ces lois européennes, tout comme les lois nationales, sont appliquées par les tribunaux nationaux dans chaque pays.

Le Parlement Européen a le pouvoir de refuser la nomination de la Commission, et de la révoquer – tout comme unParlement national peut censurer son gouvernement.

Spontanément, beaucoup savaient – ou plus souvent devinaient par assimilation – que le ParlementEuropéen a dans le système institutionnel un rôle législatif à l’instar d’une assemblée parlementairenationale dans son pays.

Le texte présenté vient généralement confirmer et clarifier cette connaissance ou cette intuition, etparfois rassurer sur le fait qu’il existe une assemblée élue, et donc représentante des citoyens, qui a unrôle important à jouer dans le processus de décision. Cela paraît notable en particulier dans des pays oùrègne un large euroscepticisme (Pays Bas, Royaume Uni, pays scandinaves).

L’image du Parlement reste cependant affectée d’éléments négatifs ou incertains :

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• Le fait qu’on ne connaisse pas qui sont les députés européens de son propre pays ; seuleexception notable observée sur ce sujet, celle de la France où la dernière élection a vu s’opposerdes personnalités politiques connues à la tête des listes (dont certaines mettaient en avant, pour lapremière fois peut-être, des positions claires et réellement relatives à l’Europe)

De ce fait, les élections européennes restent souvent considérées comme des élections secondaires.

• Le fait qu’on ne connaisse pas ce qu’il fait, qu’on n’entende jamais parler des textes qui ysont votés.

• Des doutes parfois exprimés sur ses réels pouvoirs : ils proviennent de l’ignorance des résultatsdes débats du Parlement.

Quelques rares interviewés, de niveau d’éducation élevé, vont plus loin dans leurs réflexions sur cesujet, en observant que ces pouvoirs sont inférieurs à ceux d’un Parlement national, en raison de lanécessité de l’approbation des propositions par le Conseil.

Quelques autres manifestent leur incompréhension générale des mécanismes institutionnels enarguant du fait que l’initiative des propositions vient de l’exécutif (la Commission), pour enconclure au rôle subsidiaire du Parlement.

La mention du pouvoir du Parlement de censurer ou de démettre la Commission ne suscite quequelques rares remarques (souvenir de la démission forcée de la Commission Santer) ; il auraitnaturellement fallu davantage de temps pour amener les interviewés à réagir en détail à chaquepoint du texte.

La Cour de Justice des Communautés Européennes est une sorte de Cour Suprême qui juge de tous les cas de non–respect du droit communautaire, à la demande d’un tribunal national, d’un Etat-membre, ou de la Commission.

Le court paragraphe sur la Cour de Justice est considéré comme clair ; il renforce lesprédispositions positives existantes à l’idée d’une instance judiciaire suprême neutre et impartiale.

Quelques réserves s’expriment parfois sur l’application des arrêts de la Cour, ou sur le délai (présumélong) dans lequel ils sont rendus.

Ce texte ne suffit cependant pas à lever toutes les confusions qui existent avec d’autres tribunauxinternationaux, à commencer par la Cour Européenne des Droits de l’Homme (sauf chez quelquesinterviewés de niveau d’éducation élevé).

⇒ Le fonctionnement de l’Union : le processus de décision

On ne peut évidemment pas comparer strictement le système institutionnel de l’Union Européenne avec celui d’unpays. Mais on peut dire, en simplifiant, que :

La Commission est l’organe exécutif, comme le gouvernement dans un Etat national – même si elle n’a pas tousles pouvoirs d’un gouvernementLe Parlement Européen et le Conseil des Ministres sont comme les deux assemblées législatives d’un pays, qui seprononcent sur les propositions de l’exécutif : le premier avec le rôle classique d’une assemblée parlementaire,le second comme une sorte de Sénat des Etats.

L’objectif de la discussion sur ce paragraphe était à la fois d’apporter une explication de base sur lefonctionnement institutionnel de l’Union, par comparaison avec celui d’un Etat national, et de recueilliren outre d’éventuelles réactions à la présentation de la Commission dans le rôle majeur d’exécutif ,assimilé à celui d’un gouvernement.

Ce texte, très concentré, n’était pas toujours facile à assimiler, notamment par les personnes de niveaud’instruction peu élevé, et dont beaucoup n’ont sans doute guère de lumières non plus sur lefonctionnement politique de leur propre pays.

Dans l’ensemble, il apparaît cependant compréhensible et éclairant pour la majorité des interviewésdans la plupart des pays.

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Quant à la mise en avant du rôle majeur de la Commission, il entraine peu de commentaires ; maison note toutefois avec intérêt que sa comparaison à un gouvernement ne suscite nulle part de levéede boucliers – même dans les pays dans lesquels les visions a priori de l’Union Européenne et l’imageperçue de la Commission apparaissaient particulièrement négatives.

Dans plusieurs des propos enregistrés, il semble même que les informations précédemment lues sursa neutralité et son indépendance la rendent plus crédible – et c’est notamment le cas en Allemagne,alors que les autres institutions (à l’exception de la Cour de Justice) y restent largement décriées.

Certains considèrent que les Etats membres abandonnent une partie de leur souveraineté au profit de l’UnionEuropéenne.Pour d’autres, le système de l’Union Européenne est un système où les Etats membres décident de mettre en communleurs souverainetés dans certains domaines, et s’unissent pour adopter des décisions communes. Naturellement, ilsn’ont pas toujours les mêmes points de vue au départ, et les décisions adoptées sont le résultat d’un compromis.Mais, comme dans tout système démocratique, une fois adoptée, la législation s’applique à tous. On ne peut donc pasopposer la loi nationale avec la législation européenne puisque celle-ci est en fait une loi commune que les différentspays ont décidé d’adopter ensemble.

L’idée de partage, plutôt que d’abandon de souveraineté, et celle de compromis positif sontinégalement acceptées selon les pays :

• Tout à fait favorablement au Portugal, en Grèce, en Italie, en Irlande, aussi bien qu’en Belgique, auLuxembourg et en Finlande

• De façon plus controversée en Espagne, en France, en Allemagne, et aux Pays Bas

• Avec nettement plus de défiance au Danemark, et en Suède ainsi qu’en Autriche.

• De manière ambivalente au Royaume Uni : certains des interviewés, au premier degré, enregistrentl’intention affichée de ne pas faire abandonner leur souveraineté aux Etats membres ; mais il règneen même temps le sentiment que l’Union Européenne a déjà contraint le pays à renoncer à deséléments de législation qui faisaient profondément partie de son identité (décimalisation, systèmemétrique, réglementation sur les produits alimentaires … )

Les réserves qui s’expriment dans les uns ou dans les autres sont particulièrement sensibles quandl’harmonisation communautaire donne l’impression d’attaquer des thèmes où sont en cause laculture ou l’identité du pays – plus que le domaine de l’économie, où on accepte davantage l’idée decompromis nécessaire : ainsi (en dehors des exemples britanniques ci-dessus), la chasse ou les fromagesen France, des habitudes alimentaires en Allemagne également, le transit des camions en Autriche, ou –bien que le problème soit de nature différente – Gibraltar pour les Espagnols.

Il convient cependant à notre sens de continuer à œ uvrer pour faire comprendre et sentir la notionde souveraineté partagée qui, au moins, est moins négative que celle d’abandon et qui, en outre,pourrait stimuler un débat moins superficiel à l’intérieur des Etats membres eux-mêmes, enparticulier dans les pays les plus réticents.

Pour leur préparation comme pour leur application, les décisions communautaires entraînent une coopération entrele niveau de l’Union Européenne, où on définit en commun les grandes lignes, et les administrations nationales ourégionales qui ont à les mettre en œuvre sur le terrain.La préparation de ces décisions inclut en fait un vaste processus de consultation : avec les Etats membres, avec desinstitutions consultatives comme le Comité Economique et Social et le Comité des Régions de l’Union Européenne,avec les secteurs économiques concernés, des associations de consommateurs, des organisations nongouvernementales, etc.Du fait de ces consultations multiples, le processus de décision communautaire est complexe, il a inévitablement unecertaine lourdeur, et l’Europe donne parfois l’impression d’avancer lentement.Mais le processus est nettement plus transparent qu’on ne le dit souvent.

Ce propos suscite des réactions initiales contrastées :

• Parfois, une meilleure compréhension de la complexité inévitable de la prise de décision –réactions, en gros, plutôt répandues dans les pays dont les citoyens sont a priori les plus europhiles

• Mais parfois, à l’inverse, confirmation de la lourdeur d’un système qui aboutit tropdifficilement à des décisions.

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On peut noter d’ailleurs qu’un facteur de cette lourdeur, qui ne figure pas explicitement dans letexte, est en outre spontanément évoqué à ce stade par les interviewés :la tendance des Etatsmembres à défendre d’abord leurs intérêts propres avant de rechercher le compromis.

En outre, à propos de l’affirmation d’une transparence plus grande qu’on ne le croit généralement,les réactions tendent à rester d’un net scepticisme. Beaucoup confondent en fait transparence etsimplicité, et la reconnaissance de la complexité des processus n’encourage pas à les percevoircomme transparents.

Il convient donc de manier avec une particulière prudence des explications de ce type, qui risquentd’embrouiller à l’excès les esprits, voire de passer pour un aveu de culpabilité.

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IV.1.3 OBSERVATIONS GENERALES SUR LES REACTIONS AUX DEUX DOCUMENTS PRESENTES.

⇒ Les deux documents apparaissent à la grande majorité des personnes interrogées clairs, structurés,aisés à comprendre – un peu moins toutefois pour le second qui porte sur les institutions.

• Le premier ne pose absolument aucun problème de compréhension, même aux groupes de niveausocio-économique et éducatif moyen-inférieur, dans 9 des 15 pays de l’Union Européenne.

Il en pose un peu – tout en restant clair dans l’ensemble – à une minorité des interviewés (de lacatégorie sociale moyenne-inférieure) aux Pays Bas, au Royaume Uni, au Danemark, en Suède,ainsi qu’en Finlande et en Autriche : pays de la partie Nord de l’Europe, au niveau moyend’éducation pourtant présumé plus élevé, mais pays réticents à l’Union Européenne et/ou récentsadhérents : cela suggère que c’est moins le niveau éducatif qui gène la compréhension, que la non-familiarité ou une forme de désintérêt volontaire pour la matière communautaire.

• Le second est également aisément et rapidement assimilé par tous ou presque dans 9 pays sur 15 –pas exactement les mêmes toutefois.

Ceux où on observe des problèmes de compréhension, ou au moins la nécessité d’une assez grandeconcentration pour la lecture chez une partie des interviewés, sont l’Italie, la France, la Belgique,les Pays Bas et la Suède (notamment aussi dans les catégories sociales moyennes-inférieures).

⇒ Même si tel ou tel point particulier peut être débattu ou contesté, le premier document :

• Jouit d’une forte crédibilité d’ensemble chez la quasi-totalité des Portugais, des Irlandais, desBelges (sauf dans une partie du groupe flamand de niveau moyen-inférieur), des Finlandais, maisaussi des personnes des groupes socio-économiques moyens-inférieurs aux Pays Bas et enAutriche.

• Est crédible dans l’ensemble, malgré des contestations plus nombreuses, en Espagne, auLuxembourg, en Allemagne et au Royaume Uni.

• Apparaît « séduisant », mais présentant une situation quelque peu embellie par rapport à la réalitéen Grèce, en Italie, en France, et dans les groupes moyens-supérieurs aux Pays Bas

Dans les mêmes groupes en Autriche, il est beaucoup plus vivement critiqué pour son caractère« d’autopromotion ».

• Reçoit un accueil très variable au Danemark et en Suède : accepté comme tout à fait crédible oupresque par une moitié en gros des participants, fortement rejeté par une autre moitié comme étanttrès biaisé (ou même , minoritairement mais significativement, taxé de « propagande »)

Ce document est généralement apprécié :

• Parce que, selon le niveau d’information initial, il « rafraîchit des souvenirs », apporte desprécisions, des compléments, des éclaircissements, des éléments nouveaux qu’on ignorait –voire fournit de manière ramassée et concise une connaissance élémentaire qui manquait quasi-totalement à certaines personnes.

• Parce qu’il parle de projets ou de réalisations concrètes, faisant sentir aux interviewés quel’Union Européenne les concerne dans leur vie de citoyen.

• Plus encore peut-être parce que, structuré et « pédagogique », il fournit un fil conducteurjusque là totalement manquant à la plupart – même parmi les mieux informés et les mieuxdisposés – pour faire le lien entre des éléments de connaissance jusque là épars.

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⇒ Le second document quant à lui :

• Apparaît pratiquement entièrement crédible à tous dans 9 Etats membres sur 15, ainsi quedans les catégories moyennes-inférieures dans 1 autre (l’Irlande).

• Est partiellement, mais pas majoritairement contesté, ou apparaît un peu « biaisé » vers le positif,dans les autres catégories irlandaises, en Espagne, en France, en Allemagne,

• Pose des problèmes plus sérieux de crédibilité chez une partie notable des Danois et desSuédois, où la contestation se cristallise sur des points tels que la volonté de diversité culturelle oula transparence – les autres personnes interrogées dans ces deux pays rejoignant dans leurapprobation globale celles des autres Etats.

Il apparaît essentiellement :

• Factuel – et suscitant donc moins de contestations que le premier.

• Informatif : beaucoup des interviewés reconnaissent qu’ils y ont appris beaucoup de chosesqu’ils ignoraient totalement

• Moins « séduisant » et plus austère, car plus technique que le premier document.

• Mais fournissant tout autant un fil conducteur à la compréhension qui manquait encore plussur ces sujets.

⇒ Dans de nombreux groupes, les interviewés ont demandé à pouvoir conserver ces documents pourles relire chez eux, ou en faire part à leurs proches

Dans certains, les appréciations de ces textes font presque montre « d’enthousiasme », ou au moinsd’une grande satisfaction personnelle d’avoir « enfin compris quelque chose de clair » sur l’UnionEuropéenne.

Dans plusieurs pays pourtant extrêmement réticents, il est manifeste que la présentation de cestextes a au moins partiellement « retourné » les attitudes négatives à l’égard de l’Union : c’est le casen Allemagne, aux Pays-Bas, et moins nettement au Royaume Uni et chez quelques Danois ou Suédois.

⇒ Dans l’interprétation à donner aux résultats de cet exercice, il convient naturellement d’êtreprudent : il se déroulait dans le cadre de discussions, et non « à froid », et dans des conditions où onpouvait « imposer » la lecture de ces textes aux participants des groupes ; il est évident que peu seraientaller chercher d’eux-mêmes ces informations.

Il n’empêche qu’il démontre de façon très nette :

• Que l’Union Européenne a des choses à dire qui sont susceptibles d’attirer l’attention descitoyens et de les intéresser

• Qu’elle peut être beaucoup plus crédible en le faisant qu’on ne le croit généralement.

• Qu’elle a moins à craindre qu’à espérer du débat pour peu qu’elle sache présenter sonargumentation – débat dont elle est absente en tant que telle aujourd’hui

• Que la capacité à intéresser, séduire, ou convaincre demande qu’un fil conducteur soit établipour permettre aux récepteurs de l’information de comprendre et d’assimiler.

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IV.2. REACTIONS DANS LES PAYS CANDIDATS A L’ADHESION

IV.2.1 REACTIONS A UN DOCUMENT DE PRESENTATION DES DOMAINES D’ACTION DE L’UNION EUROPENNEE

Les participants des discussions de groupe organisées dans les pays candidats à l’adhésion étaient invités àréagir au même document de présentation des principaux domaines d’action communautaires que leurshomologues des Etats membres de l’Union Européenne.

⇒ L’origine de l’Union Européenne : des moyens économiques au service d’un dessein politique

L’Union Européenne s’est formée progressivement à partir des années 1950, avec la création de la CommunautéEuropéenne du Charbon et de l’Acier (CECA), puis de la Communauté Economique Européenne (CEE). Créée àl’origine entre 6 pays, elle s’est graduellement élargie aux 15 Etats membres actuels, en attendant un nouvelélargissement à de nouveaux pays candidats.Cette création visait un objectif politique, en s’appuyant sur des moyens économiques : à l’issue de la deuxièmeguerre mondiale, il s’agissait de réconcilier les anciens ennemis et d’éviter le renouvellement des conflits, en faisanten sorte que leurs intérêts économiques soient de plus en plus imbriqués.Cela a donné naissance au Marché commun (avec, entre autres, la suppression des droits de douane entre les paysmembres) qui a entraîné un développement très rapide des échanges et une forte croissance économique.

Comme dans les Etats membres, ce paragraphe historique introductif ne donne pas lieu à de longuesdiscussions : il est compris comme un apport informatif ou comme un rappel de quelque chose quecertains savaient déjà, ou devinaient plus ou moins – et il ne peut guère donner lieu à contestation.

Tout au plus des interviewés dans certains pays notent-ils, comme information nouvelle pour eux,l’affirmation du but politique d’origine : c’est le cas par exemple en Hongrie, en Lettonie, enRépublique Slovaque ou à Chypre – avec, dans les deux derniers, l’expression de quelques doutes à cesujet.

La Politique Agricole Commune s’est ajoutée au Marché commun industriel.A l’époque, l’Europe souffrait d’un grave déficit en produits alimentaires. Elle a apporté des aides à son agriculture(comme l’ont fait d’ailleurs également les Etats-Unis et d’autres pays), lui permettant de se moderniser et de comblerce déficit.Les résultats acquis permettent aujourd’hui de diminuer ces aides, tout en conservant un soutien aux agriculteurs,qui reconnaît leur rôle pour le maintien en vie d’un tissu de villages, d’un environnement, et d’un paysage rural quifont partie de l’identité européenne, dans le cadre d’une politique plus générale de développement rural.

Les réactions des interviewés à ce texte confirment d’abord la forte sensibilité d’une grande partiedes citoyens des Etats candidats à la situation et à l’avenir de l’agriculture dans leur pays – lesTchèques interrogés y étant peut être moins attentifs que les autres, au contraire des Polonais et desLettons dont l’anxiété est particulièrement exacerbée.

Cette sensibilité paraît largement partagée par les personnes rencontrées dans les capitales de certains despays étudiés aussi bien que dans les villes moyennes (rappelons ici que le milieu rural n’était pas inclusdans le champ de nos investigations).

En ce qui concerne les informations contenues dans ce texte, sur l’historique et l’évolution de la PolitiqueAgricole Commune, on peut présenter les observations suivantes :

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• Le rappel du contexte de départ et des raisons qui ont présidé à sa mise en place (assurerl’auto suffisance alimentaire) n’est nulle part contesté. Mais, sauf exception, tous savent bienque la situation d’aujourd’hui n’est plus celle-là, savent plus ou moins que le problème est plusde surplus que de déficits, ce qui tend à renforcer ou au moins à confirmer les craintes pré-existantes.

• En dehors de quelques rares interviewés (des catégories socio-économiques moyennes-supérieures) ici ou là, qui critiquent ouvertement le principe des subventions au nom de « la libertédu marché », le soutien à l’agriculture apparaît comme normal et légitime : sur le planéconomique mais aussi pour des raisons qui touchent à l’identité dont le monde rural est unecomposante.

• Les inquiétudes liées à la perspective de l’entrée dans l’Union Européenne sont ici dediverses natures, en partie contradictoires d’ailleurs, mais pas moins fortes pour autant :

° Le sentiment que les Etats membres actuels, ayant déjà leurs problèmes agricoles, ne vontpas accepter de « se charger » en plus de ceux des Etats candidats, ou qu’ils ne vont pasaccepter d’ouvrir pleinement leurs marchés à des productions de prix moins élevé qui« tueraient » leur propre agriculture.

° Le sentiment inverse d’une compétitivité plus grande des pays d’Europe occidentale, quienvahiraient les marchés des pays candidats et feraient disparaître leur agriculture.

° L’idée, d’ailleurs suggérée dans le texte, que l’importance des subventions est appelée à seréduire, et que cela va affecter tout particulièrement les futurs adhérents dont l’agriculturereste un secteur-clé en termes économiques et sociaux.

° Celle que la Politique Agricole Commune va « dicter » aux pays et à ses exploitants cequ’ils doivent produire : on la trouve exprimée par exemple en Lettonie, où elle fait ànouveau surgir le spectre d’un diktat général imposé par une « Union » dont l’appellationréveille des souvenirs douloureux.

° Les informations qui parviennent fréquemment sur les désaccords permanents entre lesEtats membres actuels sur la politique agricole, les manifestations d’agriculteursmécontents, etc.

• Le texte présenté n’est reçu de manière clairement positive qu’en Slovénie, où les personnesinterrogées paraissent voir dans la Politique Agricole Commune une politique organisée et efficacequi a permis de construire une agriculture puissante ; même la crise de l’ESB, évoquée à ce sujet,est parfois vue comme un exemple de gestion des crises affectant ce secteur, avec un systèmed’avertissement mutuel entre Etats membres et le développement de la traçabilité.

Il est perçu de manière ambivalente en Hongrie et en Roumanie : on y enregistre l’affirmationde l’importance accordée à l’agriculture mais cela ne suffit pas, loin de là, à résorber toutes lescraintes.

Il est l’objet de réactions de doutes dominantes en République Tchèque et en Estonie par desinterviewés qui apparaissent cependant moins sensibles à l’importance cruciale de l’agriculturepour leur pays.

Il maintient ou renforce les angoisses polonaises et lettonnes.

• Dans certains pays, le passage qui mentionne l’évolution vers un soutien plus général audéveloppement rural, et à une diminution des aides à la production agricole en tant que telle, estparticulièrement remarqué, et son bien fondé contesté : c’est le cas notamment en Pologne, oùon évoque l’image d’agriculteurs protégés « comme dans une réserve d’Indiens », et enRoumanie, où il se heurte à la notion ancrée d’un pays « grenier » de l’Europe depuis l’Empireromain.

⇒ La relance de la construction européenne : le marché unique, la monnaie unique

La construction européenne s’est ralentie dans les années 1970 et au début des années 1980. Elle a été relancée avecle projet du Marché unique, qui est entré en vigueur en 1993.

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Il a visé à supprimer tous les obstacles aux échanges qui subsistaient, et à instaurer la libre circulation des produits,des services, et des capitaux – mais aussi des personnes, qui peuvent voyager et s’installer librement pour vivre ettravailler dans le pays de leur choix dans l’Union Européenne

Ce texte n’apporte guère d’informations nouvelles sur un Marché Unique dont les citoyens desEtats candidats savent, au moins en gros, qu’il repose sur le principe de la libre circulation – encorequ’en pensant à celle-ci, ils aient spontanément présente à l’esprit celle des biens plus que des services oudes capitaux.

Tout au plus certains déclarent-ils y trouver une précision qu’ils n’avaient pas sur l’origine du MarchéUnique, par rapport au Marché Commun, quelques-uns uns étant intrigués au contraire par les raisons(non explicitées dans le texte) pour lesquelles la construction européenne s’était ralentie dans les annéesprécédentes – la plupart ayant spontanément tendance à voir tout cela comme une évolution continue versle Marché Unique d’aujourd’hui, dont ils savent que c’est une réalité.

Sur le plan des principes, le Marché Unique est très généralement considéré comme une bonnechose, les réserves et les doutes s’exprimant toutefois sur deux plans quant à son entrée en vigueurconcrète dans les pays candidats à l’adhésion :

• Parfois des doutes sur le fait que les Etats membres actuels n’ouvrent réellement leurmarché.

On les trouve exprimés notamment par des interviewés polonais (qui pensent que ces payssubventionnent leurs produits pour les vendre dans le leur) ou Tchèques (qui évoquent denombreuses « exclusions » que l’Union Européenne maintiendrait à l’égard des productionsnationales).

• Plus fréquemment, la crainte des effets d’une telle ouverture sur l’économie et les entreprisesde leur pays.

Ces craintes sont particulièrement fortes en Pologne et en Lettonie (deux pays où, on l’a vu, lespeurs pour l’avenir sont très vives de manière générale) et à Chypre dans les catégories socio-économiques moyennes-inférieures.

Elles sont formulées moins vivement dans les autres pays, où on les met en balance avec lesavantages attendus de l’ouverture : ainsi par exemple en Slovénie (avec l’exemple de l’extensionconsidérable de son marché que peut en espérer une société de services informatiques, mais lacrainte des effets de la concurrence sur la production nationale d’électricité), en RépubliqueSlovaque.

Elles paraissent le moins ancrées en République Tchèque, en Estonie, à Chypre dans les catégoriessocio-économiques moyennes-supérieures (déjà habituées aux transactions trans-frontières), et enRoumanie. Dans ce dernier pays, l’attente de redressement par les entreprises étrangères sembleprédominer sur la peur de voir mettre à mal une économie déjà considérée comme totalementdélabrée.

En ce qui concerne l’aspect relatif à la libre circulation des personnes, il est, lui, objet d’un consensuspositif sur les principes – dans des pays où la possibilité de voyager librement à l’étranger était nulle ou trèslimitée il y a peu d’années encore.

Son évocation entraîne cependant l’expression de doutes et parfois de craintes :

• Doutes que les pays de l’Union Européenne n’ouvrent réellement totalement leurs frontières,notamment à ceux qui souhaiteraient aller y travailler : on les trouve formulés dans des pays trèsproches géographiquement de ceux de l’Union, la Hongrie, la République Tchèque et laRépublique Slovaque, où les récentes demandes allemandes d’un délai de 7 ans choquent.

• Craintes d’effets négatifs de la libre installation pour le pays et sa population active, qui serévèlent fortement notamment en Lettonie, chez certains Estoniens, et dans les catégories socio-économiques moyennes-inférieures de Chypre: en l’occurrence de très petits pays, où l’on ressentla perspective d’une immigration de cadres ou de travailleurs étrangers comme potentiellementdéstabilisante pour la société.

On observe, en revanche, que cette crainte là n’est pas présente en Slovénie, où c’est l’opportunitépour les Slovènes de travailler ailleurs qui retient plutôt l’attention.

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Il s’y ajoute parfois l’idée (déjà évoquée plus haut dans ce rapport) du caractère abstrait de la librecirculation, même dans un sens « touristique », pour des personnes qui n’ont pas les moyens de voyager, enparticulier dans les couches moyennes-inférieures de la population.

En même temps qu’on instaurait le Marché Unique, on commençait à préparer la monnaie unique européenne :l’Euro, dont les billets et les pièces remplaceront les monnaies nationales le 01-01-2002, dans les 12 pays qui ontdéjà décidé de l’adopter.L’Euro doit faciliter encore les échanges entre les Etats membres, et les conduire à adopter des politiqueséconomiques qui convergent au lieu de s’opposer (par exemple, il n’est plus possible pour un Etat-membre de la zoneEuro de dévaluer sa monnaie par rapport aux autres).Il doit permettre à l’Europe de constituer un pôle de stabilité monétaire face aux autres monnaies mondiales –sachant qu’il y aura toujours des fluctuations avec le dollar et le yen, vers le haut ou vers le bas selon les périodes,comme il y en avait entre chaque monnaie européenne et ces monnaies précédemment.Pour les citoyens, l’Euro facilitera les voyages et les achats dans d’autres pays européens, et leur fera économiserles frais de change.

Le texte sur l’Euro apparaît dans l’ensemble clair et compréhensible dans tous les pays, mais lesattitudes à l’égard de la monnaie unique sont variables :

• Très majoritairement favorables dans trois des plus petits pays candidats à l’adhésion.

En Estonie – pays qui a déjà « accroché » sa monnaie au mark allemand – aucune crainte notablene se manifeste. Les interviewés du groupe socio-économique moyen-supérieur sont unanimesdans leur adhésion à l’Euro, ceux du groupe moyen-inférieur sont plus divisés pour des raisonsessentiellement affectives, mais n’opposent pas de barrage à cette idée.

Les Chypriotes et les Slovènes, qui ont déjà un flux de relations économiques substantiel avecdes pays de l’Union Européenne, considèrent également la monnaie unique avec faveur – à la foiscomme élément et comme symbole du renforcement d’une Europe dont ils se voient déjà commepartie prenante, et comme changement susceptible de leur apporter des bénéfices concrets(facilitation des voyages, fin des frais de change, accélération des circuits de paiementtransfrontières pour leurs entreprises). Ce n’est que chez certains des seconds que s’expriment desdoutes sur une stabilité de l’Euro non encore assurée ; quant à la non-participation à la zone Eurode 3 Etats membres sur 15, elle est plutôt portée à leur débit, ces pays étant vus comme « ne jouantpas le jeu » ou « cherchant à se protéger de la concurrence ».

• Plutôt favorables, malgré des controverses, en République Slovaque et en Roumanie : làaussi, on y voit un symbole et une matérialisation de l’Union, un élément de son renforcement surla scène internationale, ainsi que des avantages concrets pour les voyages que l’on pourraiteffectuer en Europe, et parfois une source de meilleure gestion des affaires monétaires que cellequi a cours dans son propre pays.

Les résistances qu’on observe sont d’ordre affectif dans un des groupes roumains de Bucarest(perte du symbole de l’identité nationale) ; elles concernent la crédibilité de l’Euro en RépubliqueSlovaque – où beaucoup ne pensent pas que les pays les plus puissants, la France et l’Allemagne,vont accepter d’abandonner leur monnaie nationale.

• Ambivalentes en République Tchèque, où on reconnaît « qu’il est difficile » d’en évaluer toutesles implications, et où des doutes s’expriment sur la stabilité de l’Euro, ou sur les raisons de lanon-participation de certains Etats membres.

Il s’y ajoute une perception malaisée « de prix qui seraient différents pour le même produit » dansdeux pays voisins.

• Méfiantes en Pologne, en Hongrie et en Lettonie, mais avec des résistances dominantes denature différente.

En Pologne, c’est surtout une résistance psychologique à l’idée d’apparaître encore plus comme« les parents pauvres » de l’Europe avec des salaires traduits en Euro.

Cette idée est également présente en Hongrie, avec en outre les mêmes doutes et les mêmesconfusions que celles qui s’observent chez les Tchèques – et plus encore l’opinion que latransparence entraînée par l’adoption de la monnaie unique ferait monter les prix hongrois auniveau de ceux de l’Ouest, sans que les salaires augmentent pour autant.

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En Lettonie, c’est essentiellement une résistance affective à la disparition éventuelle d’unemonnaie nationale qui n’existe que depuis 10 ans et qui est un fort symbole de l’indépendanceconquise de l’ancien oppresseur (les arguments rationnels en faveur de l’Euro étant en revanchepeu ou prou les mêmes qu’en Estonie).

Dans ces trois pays, en outre, la non-participation de certains Etats membres est évoquée commequelque chose qui trouble.

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⇒ La nécessité de faire appliquer des règles de concurrence loyale : en Europe, et, avec lamondialisation, au-delà

Pour fonctionner, un marché européen unique a besoin de règles du jeu pour garantir que chaque pays applique desconditions de concurrence égales et loyales, et ne favorise pas ses propres entreprises au détriment des autresentreprises européennes.Par ailleurs, la politique de la concurrence empêche qu’une entreprise quelconque n’acquière dans l’UnionEuropéenne une position dominante qui serait défavorable aux consommateurs.

Ce point est, comme dans certains Etats membres, fortement controversé dans 5 des pays candidatsétudiés.

• En Hongrie, en République Tchèque, en Estonie et en Lettonie, il apparaît comme « unslogan » ou comme une pétition de principe « très bien sur le papier », mais il règne un fortscepticisme sur la réalité de la situation décrite de loyauté de la concurrence, et même sur lapossibilité d’instaurer une telle situation.

Les interviewés de ces pays évoquent très largement ou bien le refus des Etats de se plier auxrègles théoriquement acceptées lorsque leurs intérêts ou ceux de leurs entreprises sont en jeu (encitant par exemple en République Tchèque des mesures anti-dumping appliquées par l’UnionEuropéenne), ou bien la capacité des multinationales, fortes de leur domination, à échapper à leurapplication.

• En Pologne, ce thème est moins évoqué, mais les craintes s’expriment partout avec force surl’incapacité des entreprises polonaises à survivre à la concurrence avant de longues années.

Dans les 4 autres Etats candidats, les réactions sont plus nuancées, et penchent plutôt du côtépositif.

Les mêmes idées que dans les 5 autres pays sont bien présentes d’inventivité des Etats pour se soustraire àla règle commune, de tendance des plus gros à dominer les plus petits, ou de la faiblesse des entreprisesnationales face à la perspective d’une concurrence accrue, mais en même temps :

• La crédibilité d’instances communautaires de régulation est plus forte – dans des pays qui tendentsans doute plus que les autres à valoriser l’Union et son mouvement d’harmonisation.

• On y admet davantage l’éventualité de bénéfices concrets pour le consommateur par une baisse decertains prix stimulée par la concurrence.

La diminution des obstacles aux échanges se développe maintenant également dans le monde entier. L’UnionEuropéenne y est favorable, car elle considère que c’est un facteur de prospérité accrue pour tous, à condition làaussi qu’il y ait des règles et qu’elles soient respectées.Elle conduit les négociations commerciales internationales pour le compte de l’ensemble de ses Etats membres, enpesant beaucoup plus que ne pourrait le faire chacun d’entre eux isolément face à des adversaires puissants.

Les réactions à ce texte sont en partie similaires à celles qu’on enregistrait sur le précédent dans despays a priori sceptiques sur la possibilité d’instauration d’une réelle « égalité » des chances devantla concurrence, ou sur la capacité de leurs entreprises à y résister.

En outre, un réel scepticisme se manifeste à l’égard du statut de négociateur unique d’une CommissionEuropéenne souvent mal identifiée, mal connue, dont ne connaît pas la qualité d’indépendance par rapportaux Etats membres, et notamment par rapport aux plus puissants d’entre eux.

• Ce n’est qu’en Hongrie – où on a d’ailleurs noté dans le chapitre précédent que le niveau deconnaissance était plutôt meilleur – qu’on valorise au contraire ce rôle et l’idée d’unité des payseuropéens pour s’opposer efficacement à leur concurrent américain.

Dans les pays où les réactions étaient moins négatives à l’égard des règles internes de concurrenceau sein de l’Union, on observe :

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• En République Slovaque, des attitudes positives à l’instar de celles des Hongrois

• En Slovénie, une relative indifférence à des questions qui apparaissent abstraites et lointaines(les relations économiques internationales au-delà de l’Europe)

• En Roumanie, une acceptation du principe mais des doutes sur son applicabilité

• A Chypre, de grandes confusions, une difficulté à accepter l’idée d’un négociateur uniquecompte tenu des grandes différences des productions et des intérêts des divers pays

⇒ Des politiques de coopération dans une Union Européenne qui ne se réduit pas à une zone de libreéchange

L’Europe du Marché Unique ne se réduit pas à une zone de libre échange économique. C’est aussi tout un ensemblede politiques concertées : pour développer des capacités de recherche scientifique et technologique communes, pourpréparer les infrastructures de télécommunications qui sont nécessaires à l’échelle du continent, pour développer desréseaux de transport efficaces et inter-reliés, etc.

L’information présentée sur les politiques de coopération communautaires est reçue dans tous lespays de manière largement, voire unanimement favorable.

D’une part la légitimité d’actions de cette nature, et leur nécessité pour que l’Europe s’affirme commepuissance, sont évidentes ; d’autre part, les interviewés ne paraissent pas douter que ces politiques aientune réalité et sont vraiment mises en œ uvre aujourd’hui.

Tout au plus des réserves s’expriment-elles chez certains Hongrois, Estoniens, Slovaques et Roumains surles conditions et les modalités de participation aux projets concernés « de façon équitable ».

On note en revanche une forte adhésion dans des pays dont les citoyens se montraient sceptiques àl’égard d’aspects précédemment analysés de l’action communautaire – la Pologne, la Lettonie et laRépublique Tchèque – aussi bien que dans les autres.

Outre la notion générale de renforcement de l’Europe, on trouve les idées :

• D’accès à des technologies dont le pays n’aurait pas les moyens (en Pologne, en Roumanie parexemple)

• De désenclavement par la coopération (en Lettonie notamment, avec l’exemple destélécommunications)

• De possibilité ouverte à un petit pays de participer à de grands projets, tout en bénéficiantd’échanges d’expériences (en Slovénie par exemple).

⇒ Au-delà de l’économie : une politique de solidarité de grande ampleur

A l’origine, la construction européenne était essentiellement économique, mais ce n’est plus le cas aujourd’hui. Enparticulier, l’instauration du Marché unique a été accompagnée d’un très fort développement des politiques desolidarité, qui représentent un tiers du budget total de l’Union Européenne : environ 150 milliards d’Euros parpériode de 5 ans.Il s’agit notamment :

D’aides aux régions en retard ou en difficultés économiques par un Fonds Régional ; elles vont principalementaux pays les moins riches de l’Union, pour les aider à rattraper leur retard, mais dans tous les pays il y a desrégions qui en bénéficient.D’aides à l’emploi, à la formation, à la reconversion des chômeurs, etc., par le Fonds Social Européen

Certaines de ces actions s’appliquent déjà aux nouveaux pays candidats à l’entrée dans l’Union Européenne.

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L’Union Européenne manifeste aussi sa solidarité en étant, de très loin, le premier pourvoyeur d’aide au TiersMonde et aux pays victimes de guerres ou de catastrophes naturelles.

L’existence de politiques de solidarité importantes de l’Union Européenne est naturellementpartout considérée très positivement.

Ces politiques n’étaient d’ailleurs pas ignorées de certains interviewés qui, soit, évoquent des Etatsmembres actuels dont ils savent qu’ils en ont bénéficié et que cela a profité réellement à leurdéveloppement (l’Irlande), soit savent que certaines aides s’appliquent déjà à leur propre pays (mentiondu Programme Phare ou d’actions spécifiques au bénéfice de telle ou telle région en Hongrie, enRépublique Tchèque, en République Slovaque notamment).

Les réactions apparaissent particulièrement favorables en Pologne, en Hongrie, en Slovénie, àChypre, en République Slovaque, et en Roumanie.

• On y considère comme essentielles et indispensables pour le pays des aides qui lui permettentde se reconstruire, de se renforcer, de rattraper progressivement son retard (ces différentsverbes reflétant les tonalités des propos tenus respectivement dans ces différents pays).

Les aides à l’emploi sont soulignées comme particulièrement importantes par des personnes descatégories socio-économiques moyennes-inférieures dans plusieurs de ces pays.

• L’idée plus générale de solidarité communautaire (pouvant d’ailleurs s’étendre au-delà del’Europe) est une notion valorisée.

• Des réserves s’y expriment cependant parfois :° Sur la « solidarité intéressée » que cette politique traduit (le pays se voit attribuer des aides,

mais celles-ci profitent à des entreprises de pays occidentaux qui vendent leurs technologieset leur know how)

° Sur l’utilisation de ces fonds par les autorités chargées, dans le pays, de leur attribution.

Elles sont dans l’ensemble favorables en République Tchèque, où ces réserves apparaissentcependant plus fortes et le scepticisme plus grand.

Elles sont beaucoup plus sceptiques dans les deux Etats baltes étudiés, notamment dans lescatégories socio-économiques moyennes-inférieures, où la connaissance préalable de leur existenceparaît faible, et où règne une assez grande incrédulité sur l’idée que les pays les plus riches viendraientà leur aide.

⇒ La protection des consommateurs : une législation en grande partie communautaire

La politique des consommateurs est un autre aspect important de l’action de l’Union Européenne. Dans ce domaine,la plupart des règles et des normes de sécurité des produits que nous consommons ont une origine communautaire.Par cette politique, mais aussi par ses positions dans les négociations internationales, sur des sujets comme la viandeaux hormones ou les organismes génétiquement modifiés, elle agit pour faire reconnaître le principe de précaution etaboutir à des règles précises de protection des consommateurs.

L’intervention du niveau communautaire dans la politique de protection des consommateurs est,partout ou presque, accueillie positivement dans le principe.

Elle l’est sans aucune réserve dans 3 pays : la Slovénie, Chypre, et la Roumanie, où le niveausupérieur des normes européennes par rapport aux normes nationales est incontesté, de même que la forcedes mouvements consuméristes dans les pays de l’Union par rapport à celle des organisations seulementnaissantes localement.

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Les réactions sont dans l’ensemble favorables au principe en Estonie (avec seulement quelquescraintes sur la capacité des entreprises locales à atteindre le niveau nécessaire), en Lettonie (où règnel’idée, là aussi, de normes nationales inférieures, mais où les interviewés des milieux les plus éduquéscraignent beaucoup plus massivement l’incapacité des entreprises nationales à financer lesinvestissements nécessaires), et en Pologne (où se développe également une controverse à ce sujet).

Elles sont plus critiques en République Tchèque, en Hongrie, et plus encore en RépubliqueSlovaque, où l’exemple de la crise de l’ESB s’inscrit en faux contre la notion de protectioncommunautaire du consommateur.

Certains interviewés font valoir que c’est précisément l’existence d’une politique communautaire qui apermis d’identifier l’étendue de la maladie en mettant en place des dispositifs de contrôle, mais il est clairque la crédibilité de l’efficacité communautaire en la matière a fortement pâti de ces évènements.

⇒ Des progrès encore modestes vers une Europe sociale et une Europe des citoyens respectueuse de sadiversité culturelle

Dans le domaine de la protection sociale proprement dite, l’intervention de l’Union Européenne est limitée, car c’estun domaine qui relève essentiellement des législations nationalesIl y a quelques lois européennes importantes qui apportent des protections aux travailleurs : règles d’hygiène et desécurité que doivent respecter les employeurs, généralisation du principe d’un salaire minimum qui n’existait pasdans tous les pays, égalité entre les hommes et les femmes, systèmes d’information et de représentation des salariés,etc.De même, même si on n’en est qu’aux débuts, on commence à voir se dessiner une Europe politique pour les citoyens,avec une citoyenneté européenne qui donne le droit de vote aux élections locales et aux élections européennes, mêmesi on réside dans un autre pays de l’Union que le sien ; et qui offre la protection de l’ambassade de tout Etat del’Union en cas de problèmes dans un pays tiers, etc.Un pas vient d’être franchi avec l’adoption toute récente d’une Charte des Droits Fondamentaux, qui constituera unpoint de référence pour les évolutions futures (comme, par exemple, la Déclaration Universelle des Droits del’Homme).

L’information apportée par ce texte sur l’existence de dispositions communautaires en matièresociale suscite des réactions très positives en Hongrie, en République Tchèque, à Chypre et enRoumanie, ainsi qu’en Pologne dans les catégories socio-économiques moyennes-inférieures ; demanière générale d’ailleurs, c’est dans celles-là que les attentes de relèvement des normes sociales sontles plus grandes, et que l’influence que pourrait y avoir l’Union Européenne est la mieux venue ; laRépublique Slovaque est également un pays où l’accueil réservé à cette information est favorable,même si les doutes y sont plus présents – notamment dans la catégorie moyenne-supérieure où on tend às’interroger sur la réalité de l’égalité sociale dans les pays occidentaux, comme d’ailleurs en Pologne dansles mêmes milieux.

En Estonie et en Lettonie, les interviewés apparaissent pour beaucoup dubitatifs sur ce sujet – maisles propos des Lettons des catégories moyennes-inférieures révèlent en fait de fortes attentes que l’Europene soit pas qu’économique (même si, actuellement, ils n’y croient guère).

Les Slovènes font exception en pensant que la protection sociale dont ils bénéficient, héritée de laFédération de Yougoslavie, est supérieure à celle des pays d’Europe occidentale – même si elle a diminuéà leurs yeux au cours des dernières années.

Les phrases relatives aux quelques dispositions concrètes qui relèvent de la citoyenneté européenneattirent moins l’attention des participants des discussions dans les différents pays candidats. Le droit devote dans les élections locales et européennes est pour eux, au stade actuel, mineur et largement abstrait.Il en va de même de la protection diplomatique en cas de problèmes dans un pays tiers (que quelques-unsuns, en Hongrie et en Slovénie, notent cependant en positif).

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La citoyenneté européenne s’ajoute à la citoyenneté nationale, elle ne la remplace évidemment pas. Il n’a jamais étéquestion de standardiser les identités européennes, dont la richesse tient à leur diversité.L’Union Européenne a des actions, relativement modestes en termes financiers, mais précises, en faveur de ladiversité culturelle et des échanges culturels.

Bourses Erasmus ou Leonardo accordées aux étudiants qui passent un an dans une université d’un autre pays,soutien aux échanges d’enseignants ou de chercheurs, etc.Soutien financier à la préservation du patrimoine historique et culturel de chaque pays

Directives communautaires sur l’audiovisuel, qui empêchent que les œuvres de création soient considéréescomme de simples marchandises

Le court développement consacré à la citoyenneté européenne s’ajoutant à la citoyenneté nationaleest bien compris de la majorité des interviewés dans la plupart des pays – où il n’y a d’ailleurs pas depeur profonde de perte de l’identité nationale par l’accession à l’Union Européenne. Dans l’un d’entreeux, l’Estonie, les personnes interrogées estiment même que la référence au souci de maintenir ladiversité des cultures peut contribuer à apaiser des inquiétudes qui existent à leur avis dans certainssegments de la population.

Il y a cependant des cas inverses où la mention même de la notion de citoyenneté européenneréveille des craintes préexistantes : en Lettonie, dans le groupe chypriote moyen-inférieur (oùs’exprime vivement la peur de se voir privé d’une religion officielle qui est au cœ ur de l’identité), et dansplusieurs groupes polonais (où la cause en est sans doute toutefois dans une formulation qui peut laisserentendre une citoyenneté européenne « au-dessus » de la nationalité polonaise plutôt que s’y ajoutant).

En ce qui concerne les échanges universitaires et culturels, aussi bien que la préservation dupatrimoine, les réactions sont toutes positives, et la réalité des initiatives européennes dans cesdomaines n’est pas contestée. L’existence de bourses d’échanges est connue d’un certain nombre desinterviewés même dans des pays a priori très défiants envers l’Union Européenne (la Lettonie parexemple). Quant au soutien à la préservation du patrimoine, s’il n’a pas la visibilité de celui del’UNESCO, il est parfois reconnu (exemples cités en Slovénie de la réhabilitation de plusieurs villages, enRépublique Slovaque de celle du centre historique de la ville minière de Banska Stiavnica … ).

Il est manifeste que des actions concrètes de cette nature sont à même de crédibiliser les intentionsaffichées de l’Union dans ce domaine, en s’appuyant sur l’idée répandue dans les esprits que la culture etle patrimoine historique et culturel font partie de l’identité européenne commune.

⇒ Les débuts d’une Europe de la sécurité et de la défense au service de valeurs humanistes etdémocratiques

Dans ses relations avec les autres pays, l’Union Européenne entend appliquer ses principes et ses valeurs humanisteset démocratiques

Cela s’applique à sa politique vis à vis de régimes politiques autoritaires qui existent dans le mondeEn Europe même, le respect des règles démocratiques et des droits de l’homme est par exemple une conditionmise à l’adhésion de nouveaux Etats membres, comme elle l’a été pour certains des membres actuels ; et l’UnionEuropéenne leur apporte dans ce domaine une aide technique à l’adaptation de leurs législations.

L’affirmation des valeurs humanistes et démocratiques de l’Union Européenne ne suscite pas decontestation (sauf chez de nombreux Slovaques parmi ceux qui étaient réunis et qui mettent en cause« ses hésitations » à s’engager dans la crise des Balkans, son engagement tardif « inféodé » à l’OTAN, oul’incohérence d’une politique offrant de reconstruire l’ex-Yougoslavie après l’avoir détruite – et aussi, cequi est sans doute plus révélateur, l’attitude de l’Union Européenne condamnant leur pays pour sontraitement des minorités tziganes).

Elle paraît particulièrement bien reçue en Hongrie, à Chypre, et en Roumanie – les Slovènes quant à euxayant tendance à penser que leur pays est plutôt en avance sur ce point sur certains pays de l’Union (enréférence au sort de la minorité slovène en Autriche et aux tentations de ce pays de retarder l’adhésion duleur).

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Elle est considérée comme positive pour ce qui est des principes dans les autres pays, avec toutefoiscertaines remarques en République Tchèque sur la souplesse nécessaire à rechercher pour l’adaptation deslois communautaires, avec des réserves plus fortes chez les Lettons toujours très inquiets du risqued’imposition de règles par les pays plus grands et plus puissants – et en Pologne, sur la faiblesse del’Union Européenne pour imposer ces principes, par exemple à la Russie.

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Pour affirmer ses valeurs et être une force d’équilibre dans le monde, l’Europe doit être forte, et pas seulementéconomiquement et culturellement ; elle doit être en mesure d’assurer sa sécurité intérieure et extérieure.La justice et la sécurité intérieure font partie, depuis le Traité de Maastricht, des nouveaux domaines de coopérationeuropéenne, pour lutter notamment contre la criminalité, le trafic de drogue, l’argent sale, etc.Il en va de même de la défense : dans ce domaine, des progrès importants sont actuellement faits pour constituer unedéfense européenne commune qui lui permette de mener des actions de défense sans dépendre des Etats-Unis quandceux-ci ne veulent pas s’engager, tout en restant attachée à l’OTAN.

Le principe de coopération européenne dans la lutte contre la criminalité est partout considéré d’unœ il favorable. Explicitement ou implicitement, les discours des interviewés montrent qu’ils ont bienconscience de la nature internationale du mal, et donc de la nécessité d’actions coordonnées.

Ceux qui y paraissent le plus sensibles sont les Polonais, les Hongrois et les Roumains, ainsi que lesSlovaques et les Chypriotes – chez lesquels s’expriment toutefois des doutes sur le succès des paysd’Europe occidentale, ou au moins de certains d’entre eux, dans ce domaine.

En ce qui concerne l’idée de défense européenne commune :

• Elle apparaît soutenue fortement et sans réserves par les interviewés hongrois et roumains,par une partie des Slovaques, et des membres du groupe socio-économique moyen-inférieurd’Estonie.

Pour ceux-là, le point central est l’autonomie par rapport à des Etats-Unis dont ils tendent àse défier ; et l’affirmation de la position communautaire n’est pas jugée incrédible.

• Elle est également soutenue, mais avec des doutes sur la capacité européenne à s’imposer àl’OTAN et aux Etats-Unis par une partie des Polonais et des Tchèques, par les Slovènes etcertains Slovaques « échaudés » par le cas yougoslave, par beaucoup de Chypriotes, et par lesEstoniens du groupe moyen-inférieur.

Les quelques lignes qui y étaient consacrées dans le texte ne suffisent évidemment pas à expliciter quellepourrait être l’articulation des relations futures entre cette défense européenne commune et l’OTAN.C’est le cas notamment chez une partie des Polonais, des Tchèques et des Slovaques, chez beaucoup desLettons, et dans le groupe socio-économique moyen-supérieur estonien : sans doute les nations le plussensibilisées au risque potentiel que continue à représenter la Russie, et qui ressentent le besoin d’uneprotection efficace contre ce risque, incarnée aujourd’hui d’abord par l’OTAN.

⇒ Un rôle de laboratoire d’idées et d’architecture pour l’avenir de l’Europe

Selon les domaines, l’Union Européenne est chargée de gérer des politiques communes, ou de stimuler les échangeset la coopération entre les Etats membres. Mais elle a aussi pour mission de préparer notre avenir à long terme, entirant parti de la diversité des idées qui peuvent exister dans les différents pays.

C’est un rôle qu’elle joue dans des domaines très variés : par exemple celui de la recherche ; celui del’environnement (il y a une législation communautaire abondante dans ce domaine, mais aussi des positions depointe défendues par l’Europe au plan mondial, pour lutter contre l’effet de serre et le réchauffement du climat) ;celui de l’énergie (comment éviter à long terme la dépendance énergétique vis à vis de pays extérieursinstables) ; etc.

Comme dans les Etats membres, l’intention sous-jacente à ce texte n’est pas toujours comprise danssa globalité (le rôle précurseur et moteur indispensable de l’Union pour l’avenir de l’Europe), lesparticipants des groupes réunis dans les différents pays ayant tendance à se concentrer sur la questionde l’environnement – pour reconnaître à la fois qu’il s’agit d’un problème crucial, et que sontraitement ne peut être sérieusement envisagé au seul niveau national.

Dans certains groupes, des réflexions similaires s’appliquent au domaine de l’énergie, ou à celui de larecherche en général.

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IV.2.2 REACTIONS A UN DOCUMENT DE PRESENTATION DES INSTITUTIONS COMMUNAUTAIRES ET DUFONCTIONNEMENT INSTITUTIONNEL

Comme dans les Etats membres, on soumettait aux participants des discussions le document présentantsynthétiquement les cinq principales institutions communautaires et le fonctionnement institutionnel del’Union Européenne.

⇒ Les institutions de l’Union Européenne

La Commission Européenne est un organe neutre vis à vis des Etats membres. Les Commissaires sont des hommes etdes femmes politiques proposés par les gouvernements des différents pays mais, une fois nommés, ils sont totalementindépendants de ces gouvernements, qui ne peuvent pas les révoquer.Comme un Ministre dans un gouvernement national, chaque Commissaire a son domaine de responsabilité, sousl’autorité du Président de la Commission.

Ce texte sur la Commission apporte à la plupart une information qu’ils ignoraient très largement etqui clarifie beaucoup la vision imprécise qu’ils avaient d’elle – quand ils la connaissaient.

Il est très généralement jugé clair et compréhensible – un peu moins toutefois, semble-t-il, dans lescatégories socio-économiques moyennes-inférieures des deux Etats baltes (où il reste assez « abstrait »)ainsi que chez une partie des Polonais.

Outre les informations générales apportées (aux groupes les plus ignorants a priori) ou précisées (danscertains autres, identifiés dans le chapitre précédent), il frappe surtout par ce qui y est dit surl’indépendance des Commissaires et la neutralité de l’institution.

C’est un point qui est accueilli de manière particulièrement positive par la plus grande partie desinterviewés hongrois (qui l’évoquent même comme étant « la base de la démocratie »), tchèques,slovaques, roumains et slovènes – avec seulement quelques doutes relativement mineurs surl’indépendance réelle des Commissaires. Il en va de même du groupe moyen-supérieur chypriote, etd’une partie minoritaire des Polonais.

L’accueil à cette information est également assez positif, mais plus distancié, en Estonie et chez unepartie des Lettons et des Chypriotes.

Ce n’est qu’en Pologne que chez beaucoup, y compris les catégories moyennes-supérieures de lapopulation, s’exprime une forte incompréhension et une contestation de la notion d’indépendance desCommissaires, dont on admet mal qu’ils puissent être amenés à prendre des initiatives qui soient « contreles intérêts de leur pays ».

Le Conseil des Ministres européen est la réunion des Ministres des différents Etats membres compétents dans undomaine donné : par exemple le Conseil Affaires Economiques et Financières réunit régulièrement les Ministres desFinances, le Conseil Environnement ceux de l’environnement, etc.Certaines décisions doivent être prises à l’unanimité, d’autres le sont par un vote dans lequel chaque pays disposed’un nombre de voix plus ou moins grand selon la taille de sa population (vote à la majorité qualifiée)Les Parlements nationaux sont associés par leurs gouvernements à la préparation des décisions et à leur adaptationà leurs situations nationales.

La présentation qui est faite du Conseil des Ministres apporte, peut-être plus encore pour uneinstitution très mal connue, une information jugée très claire (un peu moins toutefois en Estonie et enRoumanie).

Le fonctionnement du Conseil est parfois spontanément qualifié de démocratique à sa lecture – y comprischez les Lettons très soucieux de ne pas être « absorbés » par une entité communautaire leur « dictant »ses décisions.

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Seuls, sur ce plan, les interviewés du groupe socio-économique moyen-inférieur de Chypre expriment unevive inquiétude du poids limité de leur petit pays dans les votes à la majorité qualifiée.

On voit par ailleurs formuler dans plusieurs pays des demandes de précisions sur les domainesd’application respectifs de la majorité qualifiée et de l’unanimité – à titre informatif et sans préventionnotable.

Le Conseil Européen des Chefs d’Etat et de Gouvernements se réunit normalement 2 fois par an : pour tracer degrandes orientations ; pour décider d’apporter des révisions au Traité qui fondent l’Union Européenne, comme àMaastricht en 1992, à Amsterdam en 1997, ou à Nice le mois dernier ; et aussi pour tenter de trouver des solutionssur des sujets sur lesquels les Ministres n’ont pas réussi à trouver un accord.Chaque pays assure, par rotation, la Présidence de l’Union Européenne pour 6 mois, entre 2 Conseils Européens.

Cette partie du document est considérée de manière variable par les interviewés des différentsgroupes.

Dans quelques pays – Républiques Tchèque et Slovaque, Chypre, Roumanie – elle paraît apporter àbeaucoup une information claire et nouvelle sur une institution au départ très méconnue en tantque telle.

Dans les autres, elle ne suffit pas à clarifier le rôle spécifique du Conseil Européen ou à dissiper lesdoutes qui existent sur le caractère « purement formel » ou « touristique » de ses réunions – en dépit de laréférence pourtant au Sommet de Nice dont certains avaient entendu parler. Peut-être y a t-il là le reflet dela désaffection par rapport aux politiques en général, qui apparaît par comparaison beaucoup moins àpropos du Conseil des Ministres, présumé s’attaquer à des questions plus concrètes, dans le cadre demécanismes de décisions qui sont absents ici.

Le Parlement Européen est composé de parlementaires élus au suffrage universel dans chaque pays.Comme une Assemblée parlementaire nationale, le Parlement Européen approuve le budget. Il vote sur lespropositions de la Commission. Ces propositions, une fois approuvées par le Parlement Européen et le Conseil desMinistres, deviennent des lois européennes (qu’on appelle directives ou règlements).Ces lois européennes, tout comme les lois nationales, sont appliquées par les tribunaux nationaux dans chaque pays.Le Parlement Européen a le pouvoir de refuser la nomination

On a vu précédemment que le Parlement Européen était souvent l’institution la mieux connue, au moinsde nom, et que ce nom suggérait assez logiquement une assimilation avec le rôle législatif d’un Parlementnational.

L’information contenue dans le texte confirme les connaissances ou les intuitions existantes, sansapporter de surprises – tout en renforçant l’idée que le Parlement est une institution tout à faitcentrale dans le dispositif institutionnel communautaire.

Les questions qui demeurent portent :

• Sur le poids des différents pays, en nombre de députés (on retrouve là, dans le groupe moyen-inférieur chypriote, les frustrations précédemment exprimées sur la faible influence du pays)

• Sur le mode d’élection et de désignation des candidats. Dans plusieurs pays, il semble régner defortes réticences à l’égard des partis politiques ou de la qualité des candidats qu’ils pourraientdésigner (ainsi notamment en Pologne, en Estonie et en Lettonie)

• Plus rarement, sur les définitions respectives de directive et de règlement.

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La Cour de Justice des Communautés Européennes est une sorte de Cour Suprême qui juge de tous les cas de non–respect du droit communautaire, à la demande d’un tribunal national, d’un Etat membre, ou de la Commission

La brève définition donnée ici de la Cour de Justice éclaire son rôle – sans dissiper sans doute, endeux lignes, toutes les confusions qui peuvent exister avec d’autres instances judiciairesinternationales.

Elle est partout jugée crédible, renforce la notion parfois antérieurement floue de « l’état de droit »communautaire.

La Cour de Justice y apparaît à l’unanimité comme une institution essentielle et rassurante, et notammentdans les pays où les attitudes a priori à l’égard de l’Union Européenne étaient le plus réticentes.

⇒ Le fonctionnement de l’Union : le processus de décision

On ne peut évidemment pas comparer strictement le système institutionnel de l’Union Européenne avec celui d’unpays. Mais on peut dire, en simplifiant, que :

La Commission est l’organe exécutif, comme le gouvernement dans un Etat national – même si elle n’a pas tousles pouvoirs d’un gouvernementLe Parlement Européen et le Conseil des Ministres sont comme les deux assemblées législatives d’un pays, qui seprononcent sur les propositions de l’exécutif : le premier avec le rôle classique d’une assemblée parlementaire,le second comme une sorte de Sénat des Etats.

Ce texte apparaît clair à la plupart des personnes interrogées (sauf à beaucoup des Lettonsparticulièrement peu familiarisés avec la matière communautaire, et aux Chypriotes du groupe socio-économique moyen-inférieur) : il rassemble et synthétise les éléments précédents, en fournissant uneclé d’interprétation de l’articulation des rôles respectifs des différentes institutions.

La présentation de la Commission comme étant l’exécutif de l’Union Européenne ne suscite pas decontestation.

En revanche, dans plusieurs pays, celle du Conseil des Ministres comme seconde branche du législatifsurprend quand on lui prêtait a priori un rôle exécutif. C’est le cas notamment dans les RépubliquesTchèque et Slovaque, à Chypre, et en Roumanie,d’autant que le terme « Sénat » des Etats utilisé pourillustrer le propos fait plutôt penser à une assemblée plus ou moins secondaire et « honorifique ».

Dans ces mêmes pays, on évoque également à ce propos la complexité des prises de décision qui doitrésulter d’une telle construction institutionnelle.

Certains considèrent que les Etats membres abandonnent une partie de leur souveraineté au profit de l’UnionEuropéenne.Pour d’autres, le système de l’Union Européenne est un système où les Etats membres décident de mettre en communleurs souverainetés dans certains domaines, et s’unissent pour adopter des décisions communes. Naturellement, ilsn’ont pas toujours les mêmes points de vue au départ, et les décisions adoptées sont le résultat d’un compromis.Mais, comme dans tout système démocratique, une fois adoptée, la législation s’applique à tous. On ne peut donc pasopposer la loi nationale avec la législation européenne puisque celle-ci est en fait une loi commune que les différentspays ont décidé d’adopter ensemble.

Les très rapides investigations conduites sur ce thème du partage ou de l’abandon de souveraineté nepermettent naturellement pas d’aller au fond d’un sujet qui pourrait mériter de nombreuses études à luiseul.

Tout au plus l’analyse des réactions des interviewés donne-t-elle un premier éclairage de la propensionspontanée à accepter le principe de compromis pour aboutir à des décisions communes.

Cette propension apparaît :

• Relativement élevée en Slovénie, à Chypre, en République Slovaque et en Roumanie

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• Soumise à la condition d’un examen plus approfondi, selon les domaines, en Hongrie, enRépublique Tchèque et en Estonie

• Faible en Pologne

• Très faible en Lettonie, où ressurgissent les évocations de l’Union Soviétique, avec un centre trèspuissant imposant de facto sa volonté aux petites Républiques théoriquement autonomes.

Partout, ce n’est pas une surprise, se manifeste le besoin d’exemples concrets pour pouvoir mieuxapprécier quels « abandons » de souveraineté il serait légitime d’accepter : l’idée de partage desouveraineté a du mal à être intégrée.

Pour leur préparation comme pour leur application, les décisions communautaires entraînent une coopération entrele niveau de l’Union Européenne, où on définit en commun les grandes lignes, et les administrations nationales ourégionales qui ont à les mettre en œuvre sur le terrain.

La préparation de ces décisions inclut en fait un vaste processus de consultation : avec les Etats membres, avec desinstitutions consultatives comme le Comité Economique et Social et le Comité des Régions de l’Union Européenne,avec les secteurs économiques concernés, des associations de consommateurs, des organisations nongouvernementales, etc.Du fait de ces consultations multiples, le processus de décision communautaire est complexe, il a inévitablement unecertaine lourdeur, et l’Europe donne parfois l’impression d’avancer lentement.Mais le processus est nettement plus transparent qu’on ne le dit souvent.

Les réactions enregistrées à cette présentation finale du processus de décision ne sont pasdifférentes de celles qu’on observe dans les Etats membres :

• Parfois, une meilleure compréhension de la complexité des prises de décision, et même unaspect rassurant dans l’existence de multiples consultations, qui réduisent le risque que le point devue d’un pays ne soit pas pris en compte :c’est la tendance plutôt dominante en Hongrie, dans lesRépubliques Tchèque et Slovaque, en Slovénie, à Chypre (dans le groupe socio-économiquesupérieur, l’autre s’étant « déconnecté » à ce stade d’un sujet trop complexe), et en Roumanie.

• Chez d’autres interviewés, et parfois aussi chez les mêmes qui manifestent ainsi leur ambivalence,la confirmation au contraire d’une impression préexistante de lourdeur et de« bureaucratie ».

• Dans quelques cas, l’idée que la lenteur des décisions tient surtout à l’acharnement des Etatsmembres à défendre chacun leurs intérêts jusqu’au bout avant de se résoudre à uncompromis.

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IV.2.3 OBSERVATIONS GENERALES SUR LES REACTIONS AUX DEUX DOCUMENTS PRESENTES

⇒ Les réactions des personnes interrogées dans les pays candidats à l’adhésion aux deux documentsprésentés ne sont pas de nature très différente de celles qu’on enregistre chez leurs homologues desEtats membres : les deux apparaissent dans l’ensemble clairs et compréhensibles.

• Le premier est, sauf exceptions relatives à des points particuliers parfois, accessible à tous, ycompris dans les catégories socio-économiques moyennes-inférieures.

• Le second est également aisément compris par la plupart, quoique qu’il soit parfois jugé plusabstrait et concernant des questions plus arides.

La lecture en est plus difficile pour les personnes des catégories socio-économiques moyennes-inférieures moins éduquées en République Tchèque, en Estonie, en Slovénie, à Chypre, et enLettonie – mais ce n’est pas le cas dans les autres pays.

⇒ Le premier document est accueilli globalement :

• Très positivement en Hongrie, en Slovénie et en Roumanie (dans tous les milieux), ainsi qu’enEstonie, à Chypre et en République Slovaque (avec toutefois dans ces trois pays une évaluationmoins systématiquement favorable dans les catégories moyennes-inférieures de la population).

Les idées centrales sont celles d’un apport d’informations parfois nouvelles, d’une confirmationd’impressions plus ou moins vagues qu’on avait sur certains sujets, et surtout de panoramagénéral concis qui donne une vue d’ensemble de l’action communautaire – que la plupart,même relativement bien informés, n’avaient pas.

Pour les plus enthousiastes, il y a même là « pour la première fois » un texte qui donne àcomprendre l’Union Européenne ou qui montre qu’elle a « une vision » ou « une stratégie ».

Certains interviewés observent qu’il comporte à la fois des éléments qui sont des réalitésd’aujourd’hui et d’autres qui sont davantage des objectifs déclarés, ou parfois qu’il présente leschoses « sous un angle plutôt favorable » – mais cela ne met pas en cause la crédibilité d’ensembledu document.

• Avec plus de scepticisme en République Tchèque, et plus encore en Pologne et en Lettonie.

Les citoyens interrogés dans ces pays reconnaissent le caractère positif d’informations etd’éclaircissements qui leur manquaient, mais tendent à y voir une présentation fortement« embellie », voire « publicitaire » de l’Union Européenne ; non pas qu’ils critiquent, sur le fond,les desseins communautaires qui y sont exposés, mais ils doutent de sa correspondance avec laréalité.

⇒ Le second document est considéré :

• Très favorablement, comme le premier, par une grande partie des Hongrois, des Slovaques,des Roumains, et des Chypriotes des catégories moyennes supérieures.

• Positivement aussi, mais avec plus de distance et une curiosité personnelle moins grande enEstonie et en Slovénie.

• Plus favorablement que le premier document en Pologne et en Lettonie, par un apportd’information considérée assez volontiers comme objectif.

• De façon assez neutre en République Tchèque.

Il est considéré comme essentiellement informatif, sur des sujets avec lesquels on est généralement peufamiliarisé – surtout dans les milieux socio-économiques moyens-inférieurs ; mais il aide à comprendredes mécanismes communautaires complexes.

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⇒ Dans l’ensemble, ces deux documents contribuent à renforcer et à améliorer l’image de l’UnionEuropéenne et à crédibiliser ses institutions et leur fonctionnement. Comme dans les pays del’Union, nombreux sont ceux qui ont demandé de pouvoir les conserver , notamment en Roumanie,en Hongrie, en République Slovaque, à Chypre, et en Lettonie.

En résumé : les eurofavorables en ressortent mieux armés pour exprimer et justifier leur position ;les europhiles tièdes ou euroneutres tendent à évoluer vers une adhésion mesurée plus positive ; leseuroopposants retiennent au moins un certain nombre de points positifs qu’ils ignoraient ounégligeaient –mais on assiste moins que dans les Etats membres à des renversements d’a priori négatifsvers des positions d’un coup beaucoup plus ouvertes.

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CHAPITRE V :

ATTENTES A L’EGARD DE L’UNION EUROPEENNE

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V.1. ATTENTES A L’EGARD DE L’UNION DANS LES ETATS MEMBRES

V.1.1 EXPRESSION DES ATTENTES

La prise d’information par les participants des discussions sur les domaines d’action de l’Union Européenne(commentée dans le chapitre qui précède) suscite, on l’a vu, l’éveil et l’expression d’un certain nombred’attentes.

Le thème suivant des discussions avait pour objet d’approfondir celles-ci : « ce qu’on pourrait attendre etsouhaiter de l’Union Européenne ; quelles décisions, quelles initiatives, dans quels domaines et sur quelssujets qui vous concernent personnellement en tant que citoyens ; en d’autres termes, quelles sont lesquestions et les problèmes qu’il faut traiter de façon prioritaire pour les citoyens européens ? ».

Les attentes sont nombreuses, et pour certaines largement répandues dans les différents Etatsmembres.

⇒ Trois domaines sont évoqués très spontanément par un grand nombre des citoyens interrogés dansla plupart des pays.

4 Celui de l’environnement

Tous comprennent que c’est un problème qui dépasse le niveau national et qu’il exige une actioncommune résolue (la pollution ne s’arrête pas aux frontières).

C’est aussi un domaine sur lequel la sensibilité des citoyens a profondément évolué dans tous les pays aucours des dernières années : la prise de conscience de la réalité du changement climatique y a fortementcontribué ainsi que, sur les questions connexes de santé publique, la crise de l’ESB, le débat montant surles OGM, etc.

Des réserves sérieuses apparaissent seulement dans deux pays :

• La Grèce, très sensibilisée à l’affaire des armes à l’uranium appauvri (dont la responsabilité estimputée d’abord aux Etats-Unis, mais aussi secondairement à leurs partenaires de l’UnionEuropéenne dont la crédibilité en est affectée).

• Le Danemark, au nom du niveau présumé plus élevé des standards nationaux ; on y acceptetoutefois comme une mesure (insuffisante mais évidemment utile), l’instauration de normesminimales qui laisserait à l’Etat danois la latitude de garder les siennes.

La demande qui s’exprime est essentiellement :

• De législation unifiée,

• D’imposition de contrôles stricts,

• D’action commune dans le débat mondial sur le sujet.

4 Celui de la santé et de la protection du consommateur

Cela peut apparaître paradoxal au vu des fréquentes dénonciations des défaillances dans la crise del’ESB. Mais, en réalité, celles-ci apparaissent dues au moins autant à une insuffisance d’Union qu’àson contraire – même si l’Europe dans son ensemble doit aujourd’hui rétablir sa crédibilité.

La demande d’action est en tous cas extrêmement forte, tout particulièrement en matière de produitsagroalimentaires.

Elle s’exprime dans tous les pays, comme pour l’environnement, sous la forme d’exigence deréglementation protectrice et de contrôles stricts et fiables.

Dans ce domaine plus généralement, au-delà des problèmes de l’ESB ou des OGM, la confiance enl’Union est cependant particulièrement faible :

• En Grèce (armes à l’uranium appauvri dans les Balkans tout proches)

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• Au Danemark et en Suède, où une grande partie des interviewés craignent une harmonisation parle bas par rapport à leurs standards existants de protection des consommateurs.

Les préoccupations relatives à la santé amènent par ailleurs les citoyens de certains pays – très soucieuxde l’organisation et du fonctionnement dégradés du système de santé national – à souhaiter uneintervention de l’Union à cet égard.

C’est le cas en Grèce, moins fortement au Portugal, en Irlande, mais aussi au Royaume Uni : attented’aide financière communautaire en même temps que de mesures d’organisation.

Ce sujet est également évoqué dans d’autres pays, mais dans une optique différente : demandesd’assurances contre l’hypothèse de privatisation du service public de la santé (en France, enAllemagne… ).

La coopération en matière de recherche médicale est également spontanément évoquée ici ou là.

4 Celui de la lutte contre la criminalité et les trafics

Les attentes sont là unanimes dans tous les pays ; elles s’expriment sur le ton de l’évidence pourréclamer harmonisation ou coopération active pour aboutir à des règles communes, mais surtout pourrenforcer et coordonner les contrôles.

Les citoyens des pays touchés par le terrorisme (Espagne, Irlande) y sont encore plus fortementdemandeurs de mesures à l’échelon européen.

En revanche, on observe un scepticisme à cet égard dans les pays plus récents adhérents de l’UnionEuropéenne, dans lesquels on pense souvent que l’ouverture des frontières a favorisé la mobilité etl’efficacité de la criminalité par rapport à la situation antérieure.

⇒ D’autres domaines sont cités fréquemment

4 Celui du contrôle de l’immigration

Une coordination européenne est particulièrement souhaitée en Espagne, aux Pays-Bas, au RoyaumeUni et en Autriche pour fournir une réponse plus efficace aux problèmes de l’immigration clandestine, dustatut et du traitement des réfugiés.

Seuls d’assez nombreux Danois font exception ici comme en matière de lutte contre la criminalité.

4 Le domaine social

Les attitudes manifestées sont de nature différente selon les pays.

• Dans les pays « du Sud » de l’Europe, les progrès dans ce domaine sont largement reconnuscomme ayant été accélérés par l’Union Européenne :

° Résultat des politiques de cohésion, dont on souhaite naturellement la poursuite° Mesures législatives (hygiène et sécurité, égalité des hommes et des femmes, etc.) dont le

développement est également attendu° Mesures en faveur de l’emploi.

• Au Royaume Uni, le sentiment de dégradation du système social et des services publics en généralamène une partie des citoyens interrogés à souhaiter des interventions financières communautairespour y apporter des remèdes qu’ils n’attendent plus des autorités nationales.

• En France, en Belgique et en Allemagne, les attentes sont également fortes d’action en matièresociale, mais d’abord par le biais de mesures d’ordre législatif qui tempèrent les excès dulibéralisme économique : craintes diffuses de dégradation du système de protection sociale,inquiétudes devant une évolution économique où les salariés paraissent en position de faiblesse,dénonciation des délocalisations, de l’utilisation de main d’œ uvre à bas prix, ou de lois nonharmonisées sur les temps de travail (par exemple, en Allemagne, relativement aux horaires deconduite autorisés des chauffeurs routiers néerlandais).La question de l’emploi est sous-jacente à ces attitudes, qu’on retrouve également dans les pays duSud, ainsi qu’au Luxembourg, en Finlande et en Autriche. Dans ces trois derniers pays toutefois,comme en Grèce et en Espagne, l’attachement aux spécificités nationales « culturelles » dusystème de protection sociale entraîne des positions plus hésitantes ou plus divisées surl’opportunité de voir traiter des questions concernées au niveau communautaire.La question de l’avenir du système de retraites est également évoquée par les citoyens de plusieurspays.

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• Aux Pays-Bas, au Danemark et en Suède, l’opposition est clairement majoritaire à une interventioncommunautaire, vue comme signifiant nécessairement harmonisation par le bas, et attentatoire aumodèle national fortement valorisé.

4 L’éducation

Dans ce domaine, les attentes s’expriment moins spontanément, sauf dans quelques pays où lescitoyens évoquent, comme pour le domaine social, la mauvaise situation du système éducatif national.

C’est le cas d’une grande partie des Grecs et de certains Britanniques, qui en parlent en termes dedégradation. Les Portugais, quant à eux, sans avoir le même sentiment de pessimisme, soulignentcependant le caractère fondamental de tout progrès dans un secteur dont la qualité et l’efficacitéconditionnent l’avenir.

L’attente y est grande à l’égard d’actions communautaires qui contribuent à cet objectif, incluant dessoutiens financiers relevant de politiques de cohésion.

En revanche, elle ne se manifeste guère dans les autres pays « du Sud » ; les Irlandais ont une image assezpositive de leur système, les Espagnols évoquent les spécificités culturelles du système éducatif, etc. –sans pour autant être fermés à l’idée de coopération.

Ce lien entre éducation et culture est également un facteur qui fait que, dans les autres pays, ce n’est pasun des domaines où on appelle ouvertement de ses vœ ux une action communautaire. Dans certains, lespectre de l’harmonisation entraîne même des rejets déterminés (cas du Danemark, où l’évocation dusujet fait imaginer à certains un système uniformisé, avec des écoliers, précisément, en uniformes).

Cependant, on constate, lorsqu’on amène les interviewés à se pencher davantage sur ces questions :

• Un souhait très général de mesures visant à l’équivalence des diplômes ou des qualificationsprofessionnelles – la plupart paraissant d’ailleurs totalement ignorer ce qui a été fait en matière dereconnaissance mutuelle.

Derrière ce souhait se trouve le souci de faciliter la mobilité professionnelle – quelques uns ysongeant éventuellement pour eux mêmes, d’autres y étant favorables sur un plan plus général, enpensant à leurs enfants ou aux générations futures.

Parfois, s’y ajoute aussi une idée d’égalité nécessaire, avec par exemple des Suédois qui mettent encause le moindre niveau de formation des médecins danois, ou des Belges qui évoquent « l’appeld’air » de leurs établissements d’enseignement supérieur dans certaines disciplines pour desétudiants étrangers bridés par l’existence d’un numerus clausus dans leur propre pays. Lareconnaissance mutuelle doit alors être accompagnée d’un minimum d’harmonisation.

• Une grande ouverture, partout, aux échanges :° Programmes du type Erasmus-Leonardo pour les étudiants. Ceux qui en connaissent

l’existence en ont unanimement une image extrêmement positive, et souhaitent vivementleur renforcement ; ceux qui ne les connaissent pas ou guère formulent des suggestions demême nature.

° Echanges d’enseignants, qu’on évoque notamment spontanément dans plusieurs pays àpropos du développement nécessaire de l’apprentissage des langues, mais qui vont au-delàde cette seule discipline.

° Moins souvent exprimés, échanges d’expériences sur les programmes ou les méthodeséducatives, afin de s’enrichir des « meilleures pratiques » d’autres pays – sans, bien sûr, lamoindre mesure d’harmonisation « forcée » sur ce plan.

4 Les échanges culturels

Peu évoqués spontanément comme domaine prioritaire, ils sont cependant l’objet d’un accordgénéral, et tout particulièrement dans des pays d’un Sud de l’Europe considérablement élargi (incluant laFrance, la Belgique, le Luxembourg, l’Allemagne, l’Autriche, … ).

La culture étant un sujet multiforme et complexe à définir, les interviewés qui s’expriment sur ce sujet ontnaturellement du mal à définir le contenu précis de tels échanges.

4 La recherche scientifique et technologique

Ce sujet n’est spontanément évoqué que dans un groupe sur deux environ ; il est évidemment moinsproche des préoccupations les plus directes des citoyens.

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Les observations qui sont faites alors, ou celles qui avaient pu être effectuées par certains interviewés enréponse à des thèmes antérieurs de discussion, montrent cependant l’existence d’un quasi-consensussur le caractère souhaitable du développement de la coopération dans un secteur crucial pour l’avenir,et où l’Europe a à affronter des concurrents redoutables, américains ou asiatiques.

Les investigations ont été limitées sur ce thème (qui n’était pas de ceux sur lesquels on effectuait desrelances spécifiques).

Dans quelques cas toutefois, on observe que les citoyens qui en parlent l’évoquent, au-delà desconsidérations générales sur le développement nécessaire de la coopération, comme un sujet susceptiblede toucher plus directement le grand public : recherche médicale, progrès technologiques dans lestransports par exemple.

La notion d’économies de coûts de recherche par les échanges, la coopération, les investissements encommun est également présente.

Sans qu’on puisse dire si ce fait a une signification générale, on constate que c’est en Espagne, en France,en Belgique, en Allemagne, au Luxembourg, au Danemark et en Autriche que les interviewés se sont leplus exprimés sur ces sujets.

4 Les transports

C’est un domaine assez souvent évoqué spontanément, et sur lequel on relançait ensuite lesinterviewés pour constater une grande ouverture à des actions au niveau communautaire.

Celles-ci se déclinent comme suit :° Développement des infrastructures, actions conjointes ou coordonnées pour les réseaux et

les transports trans-frontières, recherche commune en la matière, etc.C’est un des sujets les plus cités : dans tous les pays « du Sud » de l’Europe (qui saventl’importance des concours de la politique régionale pour eux) ; au Royaume Uni (où ladégradation des transports publics amène à souhaiter des concours financierscommunautaires), en France, en Belgique, en Allemagne (importance de transportsefficaces pour le développement économique, mais aussi mobilité facilitée pour lescitoyens) ; au Luxembourg, au Danemark et en Autriche (avec une sensibilité particulièresur les questions de trafic trans-frontières et de transit).

° Elaboration de législations ou de normes communes conduisant à une plus grandestandardisation technique (gabarits, matériels, interopérabilité, … ) ou, sujet souventsoulevé d’emblée par les participants des groupes, à une sécurité accrue des transports.

° Définition en commun de grandes orientations – sujet très lié à la perception de l’impactdes transports sur l’environnement.

° Souci d’une harmonisation et d’un respect de règles qui mettent en cause l’égalité de laconcurrence. Ce thème n’est pas souvent objet de discussions dans les groupes ; c’est le cascependant en Belgique ou en Allemagne (concurrence déloyale de transporteurs néerlandaisdu fait d’une réglementation laxiste sur les heures de conduite dans ce pays), ainsi qu’enSuède (pour le même type de raison).

⇒ Dans le domaine de la politique économique, qui était également soumis à la réflexion des interviewés,on constate d’abord partout l’expression de la vérité d’évidence que c’est un domaine essentield’action de l’Union Européenne, celui dans lequel elle a le plus œ uvré.

On ne cherchait pas là à explorer de manière approfondie les attentes sur des sujets qui restent abstraitspour la plupart des citoyens, et qui demanderaient pour être traités sérieusement une, voire plusieursétudes spécifiques.

L’objectif était, beaucoup plus modestement, d’avoir une première appréciation de la disposition descitoyens à envisager ou accepter un degré élevé d’initiative et d’encadrement communautaire dans cedomaine, ou au contraire à s’en défier.

De manière générale, on retrouve ici les réserves des interviewés du Royaume Uni, du Danemark et de laSuède, à l’égard de l’Euro (qui monopolise actuellement leurs perceptions spontanées du champéconomique communautaire). Dans le premier de ces pays, on décèle toutefois l’émergence d’une crainted’isolement s’il restait à l’écart d’une monnaie unique qui rencontrerait le succès.

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⇒ Celui de la défense est très rarement évoqué spontanément à ce stade – ce n’est pas l’une despremières préoccupations quotidiennes, contrairement à d’autres sujets traités dans cette partie des thèmesde discussion dans les groupes.

On a cependant vu, dans les premiers chapitres de ce rapport (notamment le chapitre III) qu’il étaitprésent antérieurement dans les échanges de vues entre les participants quand on parlait des butsde l’Union Européenne.

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Lorsqu’on revient ici sur ce thème, on peut constater :

• Une prédisposition favorable très générale à l’idée d’une défense européenne commune (dontles modalités sont naturellement discutées ; il ne s’agit pas de voir disparaître les forces arméesnationales) au Portugal, en Grèce, en Espagne, en Italie, en France, en Belgique, au Luxembourg,en Allemagne et en Autriche.

La notion d’indépendance ou de forte autonomie nécessaire par rapport aux Etats-Unis y estune quasi-évidence.

Les interviewés grecs y ajoutent celle de sécurisation de leurs frontières, particulièrement exposésqu’ils sont à l’instabilité de leur région, et au voisinage de la Turquie ; les Autrichiens y voient uneoption préférable à celle d’une appartenance à l’OTAN.

• Des opinions contrastées en Irlande : une partie des citoyens interrogés manifeste de sérieusesréserves au nom de la neutralité du pays ; mais d’autres considèrent que l’appartenance à l’Unionest un tout, et qu’il ne serait pas légitime de n’en prendre que les bénéfices évidents en refusant departiciper à l’action commune dans d’autres domaines, dont celui de la sécurité et de la défense(étant entendu que l’armée irlandaise resterait sous l’autorité du gouvernement national).

• Des résistances fréquentes aux Pays-Bas (les citoyens y comprennent bien la nécessitéd’intégration dans un bloc militaire plus puissant pour un petit pays, mais insistent sur le lien avecl’OTAN) et plus encore au Royaume Uni (armée symbole très fort de l’identité nationale,proximité psychologique avec les Etats-Unis, et parfois illusion de sécurité apportée parl’insularité du pays).

• Une ouverture conditionnelle dans les pays nordiques, et limitée à l’hypothèse de participation(sans mécanismes obligatoires) à des actions de sécurité dans des zones de conflit sur le continenteuropéen, du type interventions de maintien de la paix.

Des interviewés danois s’interrogent sur l’utilité d’un niveau européen de défense alors qu’il y al’OTAN, et l’ONU dans le domaine du maintien de la paix ; les Suédois et les Finlandais arguentde leur neutralité et n’envisagent pas d’un bon œ il la perspective de se battre pour d’autres.

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V.1.2 OBSERVATIONS GENERALES SUR LES ATTENTES A L’EGARD DE L’UNION EUROPEENNE

Si l’on examine les différents types d’attentes qui s’expriment à l’égard de l’Union Européenne, on peutsommairement classer celles-ci comme suit :

⇒ Attentes suscitées par la défaillance ou l’insuffisance des autorités nationales.

On les a constatées par exemple dans des pays « du Sud » de l’Europe – selon les pays dans le domainesocial, celui de la protection des consommateurs, de la santé, du système éducatif – mais aussi auRoyaume Uni dans des ordres d’idées voisins.

La disposition à des interventions communautaires fortes est alors très grande : actions de cohésion,législation, contrôle.

⇒ Attentes plus générales de poursuite du concours des politiques de cohésion pour le développementéconomique et social du pays.

Elles se manifestent logiquement dans les pays « du Sud » de l’Europe qui en ont été les principauxbénéficiaires, notamment au Portugal, en Grèce et en Espagne.

⇒ Evidence de la nécessité du niveau communautaire pour traiter de problèmes qui sont par essencetrans-frontières au sein de l’Europe, ou même mondiaux.

C’est typiquement le cas de la santé et de la protection du consommateur, de l’environnement, de la luttecontre la criminalité ou du contrôle de l’immigration.

Les citoyens en appellent, explicitement ou implicitement, à la fois à des mesures législatives assorties decontrôles stricts, à des coopérations renforcées (en matière de police et de justice), et (en matière de santéet d’environnement) à l’organisation d’un front commun face aux Etats-Unis perçus comme la premièresource de « menace » ou au moins de non-progrès.

Y sont les plus réticents, selon les domaines, notamment les Néerlandais, les Danois et les Suédois quandils craignent que leurs propres standards ne subissent une harmonisation par le bas.

⇒ Evidence de la nécessité de renforcement général de l’Europe dans le contexte de la concurrencemondiale.

C’est l’objet même bien compris de la construction européenne dans son objet économique premier, faceavant tout aux Etats-Unis, secondairement au Japon ou à d’autres pays asiatiques performants.

L’économique s’entend ici au sens large, incluant la recherche et la technologie.

Etant données la diversité et la complexité de ce sujet, il est plus difficile de discerner chez lesinterviewés des notions précises de types d’actions (législation, coopérations stimulées par l’Union … ).

L’Euro est l’exemple évidemment le plus avancé de politique unifiée ; dans les pays de la zone Euro entous cas, il ne s’exprime pas d’attentes nouvelles d’action en la matière : c’est une réalité achevée oupresque.

La même logique s’applique aux questions de défense qu’aux questions économiques en général.

Dans ces deux domaines, le consensus est large dans la plupart des Etats membres, les réticences pouvantvenir soit d’une moins grande conscience des termes de l’affrontement avec le partenaire - adversaireaméricain dans des pays particulièrement atlantistes (Pays-Bas, Danemark, Royaume Uni), soit d’unstatut de neutralité (en matière de défense).

On note, incidemment, l’idée parfois exprimée d’économies de coûts permises par l’action commune(investissements coordonnés, réduction des doubles emplois, … ).

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⇒ Souci d’une politique économique et d’une politique de la concurrence qui suppriment lessituations de concurrence déloyale et s’opposent aux excès du libéralisme.

On a vu les inquiétudes relatives à la dégradation du poids des salariés face à leurs employeurs, àl’abaissement de la protection sociale, à l’emploi de main d’œ uvre à bas prix, aux délocalisations – quiappelleraient des mesures législatives et des contrôles.

⇒ Echanges et mobilité

Selon les domaines qu’on peut ranger sous cette appellation (éducation, culture, emploi) il peut s’agir demesures législatives (harmonisation des niveaux de formation, reconnaissance mutuelle, actions contre lesbarrières restantes à la mobilité des travailleurs), de mesures d’aide et de stimulation (échangesuniversitaires et culturels), de coopérations renforcées.

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V.2. ATTENTES A L’EGARD DE L’UNION DANS LES PAYS CANDIDATS A L’ADHESION

V.2.1 EXPRESSION DES ATTENTES

Comme dans les Etats membres, les participants des discussions organisées dans les pays candidatsétaient invités à expliciter les attentes qu’ils peuvent avoir à l’égard de l’Union Européenne – au-delà dece qu’ils avaient naturellement déjà commencé à évoquer dans les phases précédentes du débat.

⇒ Les attentes spontanément exprimées portent sur les domaines suivants :

4 En tout premier lieu, le développement économique et ses corollaires pour la vie des citoyens

Selon les pays, et selon les individus, cela se traduit par des termes parfois différents, qui reflètent lespréoccupations dominantes des uns et des autres.

Les Polonais et les Lettons évoquent ainsi comme une priorité absolue et lancinante le relèvementnécessaire de leur niveau de vie. Ce désir existe naturellement dans tous les pays, mais chez eux ilsemble correspondre en même temps à une revendication de dignité particulièrement affirmée (lesPolonais des groupes socio-économiques moyens-supérieurs réclamant par exemple une entière « égalitéde traitement » et des salaires égaux à ceux des cadres de même niveau de formation à l’Ouest).

Le développement de l’emploi, ou la réduction du chômage est évoqué par beaucoup, et toutparticulièrement dans les catégories socio-économiques moyennes-inférieures dans beaucoup de pays : enPologne et en Lettonie, mais aussi en Estonie, dans les Républiques Tchèque et Slovaque, ainsi qu’enSlovénie.

L’amélioration de la situation de l’agriculture et le sort des agriculteurs sont particulièrementmentionnés en Pologne et en Lettonie, mais aussi en Hongrie avec d’ailleurs un angle de vue différent :dans les deux premiers de ces pays, il s’agit de remédier à une situation considérée commecatastrophique ; dans la troisième, c’est plutôt de préserver une agriculture très valorisée par la qualité deses produits et qu’on craint de voir décliner devant une concurrence future trop vive.

Le développement des infrastructures, de transport ou autres, est spontanément évoqué en tant que telpar exemple en République Tchèque, en Lettonie ou à Chypre ; la coopération économique (et/ouscientifique et technique) l’est notamment dans des pays candidats relativement plus avancéséconomiquement et technologiquement : République Tchèque, Estonie, Slovénie.

Les Roumains, quant à eux, se révèlent demandeurs de toute forme d’appui et de coopération susceptiblede mettre leur pays sur le chemin du redressement.

4 Des aspects liés au domaine social au sens large

L’amélioration d’un système de santé vu comme délabré ou retardé est une demande notamment dans lespropos des Polonais, des Chypriotes et des Slovaques ; celle du logement dans ceux de ces derniers ; lerelèvement du niveau de protection sociale dans plusieurs pays, dont particulièrement l’Estonie, aveccelui de la protection du consommateur.

4 La protection de l’environnement

Partout on a bien conscience que c’est là un domaine qu’il serait illusoire de vouloir traiter auniveau national, qui est de plus en plus important, et pour lequel les contraintes plus strictes qui ontcours dans les pays de l’Union Européenne peuvent utilement servir de référence et de stimulant àl’action – voire même de facteur d’évolution de mentalités locales encore insuffisamment sensibilisées.

Il est évoqué notamment en Hongrie, dans les deux Etats baltes étudiés, en Slovénie et à Chypre.

4 La sécurité

Il peut s’agir de lutter contre la criminalité, les trafics de drogue, les phénomènes de type mafieux, dontpar exemple des Tchèques, des Estoniens et des Roumains parlent d’eux-mêmes.

Il peut s’agir également de défense : l’évoquent spontanément des Tchèques, des Estoniens et desChypriotes.

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4 L’éducation et la culture

Les attitudes, ici, sont relativement ambivalentes. D’une part, on revendique l’éducation et la culturecomme étant intimement liées à l’identité nationale et donc comme susceptibles « d’harmonisation » enaucun cas ; en même temps l’harmonisation et la reconnaissance des niveaux des diplômes et leséchanges éducatifs et culturels sont des questions pour lesquelles s’exprime une attente à l’égard del’Union, ainsi d’ailleurs que l’aide à la préservation du patrimoine.

On trouve ces différents sujets mentionnés d’eux-mêmes par des interviewés hongrois, tchèques,slovaques, estoniens, slovènes ou chypriotes.

⇒ On explorait ensuite les réactions des citoyens interrogés à une série de domaines d’attentesidentiques à celle qui était présentée à leurs homologues des Etats membres.

4 Les transports

Dans tous les pays on s’accorde à penser que c’est là un domaine utile et nécessaire d’actioncommunautaire.

Ce qui vient à l’esprit en premier lieu est la nécessité d’investissements et d’aides au développementdes infrastructures majeures – qui sont à la fois un des facteurs du développement économiqueindispensable et une commodité pour les déplacements personnels des citoyens.

Quelques-uns uns y ajoutent spontanément (mais rarement) l’idée d’harmonisation des règles, notammenten matière de sécurité (en Slovénie, en Roumanie).

Les seules réserves qui s’expriment à des interventions communautaires s’observent en Slovénie(distinction d’évidence à faire entre le niveau global et le niveau local) et en Estonie : dans ce secondpays, la privatisation décriée de réseaux ferroviaires est présente à l’esprit de citoyens qui craignent plusou moins confusément que les règles de concurrence communautaires ne concourent à de tellesévolutions.

4 La santé et la protection des consommateurs

Des attentes existent dans ces domaines à l’égard de l’Union Européenne.

• D’abord en matière de santé publique et de prévention – la crise de l’ESB étant par exempletout aussi présente à l’esprit des citoyens de ces pays que de ceux des Etats membres (et, moinssouvent, le débat sur les OGM).

Comme les questions d’environnement (auxquelles elles sont liées), celles-ci requièrent untraitement à un niveau supranational : alerte mutuelle, recherche commune des causes du mal,élaboration de règles communes, contrôle de leur application.

Il est à noter d’ailleurs que la manière dont a été traité le problème de l’ESB au niveaucommunautaire n’est pas systématiquement considérée défavorablement : on y reconnaît la miseen œ uvre de mesures de cette nature.

Les questions de santé publique sont citées notamment en Pologne, en Hongrie, en RépubliqueSlovaque, en Slovénie, et avec plus de réserves en Estonie et en Lettonie (se considérant comme« protégé » par des pratiques agricoles saines, on y craint l’effet économique de contraintesnouvelles imposées à un secteur agroalimentaire fragile).

• Egalement dans le domaine plus large de la protection des consommateurs – cependant plusrarement cité comme une priorité.

• Enfin, pour ce qui concerne l’amélioration d’un système de soins de santé jugé défaillantnotamment en Pologne, à Chypre, en Slovénie et en Roumanie.

4 La politique économique

C’est un domaine évident pour tous de l’action communautaire, celui qu’ils ont pour la plupartprésent à l’esprit en premier lieu, celui qui a été et qui est le moteur de la construction communautaire.

En ce qui les concerne en tant que citoyens de pays candidats à l’Union Européenne au niveauéconomique nettement inférieur, les attentes se concentrent sur l’aide qu’elle pourra apporter à leurdéveloppement, à leur rattrapage et à l’amélioration progressive de leur niveau et de leurs conditions devie.

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4 L’éducation

On a vu que c’était un des domaines spontanément évoqués par certains interviewés. Pour rappel :

• C’est l’un de ceux qui mettent en cause l’identité nationale et sa transmission aux générationssuivantes. Pas plus d’ailleurs que dans les pays de l’Union Européenne, on n’entend le voir« régenter » par une quelconque harmonisation centralisatrice (mais il n’y a pas de réelle craintequ’une telle chose soit dans les intentions communautaires).

En outre, dans beaucoup des pays candidats concernés, on estime n’avoir rien à envier aux paysoccidentaux pour ce qui est du niveau intellectuel de formation.

• C’est en même temps un de ceux où on se déclare le plus demandeur d’échanges et de facilitationdes échanges : d’étudiants, d’enseignants, d’expériences.

• Dans quelques pays, en outre, où on s’inquiète de la faiblesse des moyens du système éducatif, onattend de l’Union Européenne qu’elle y contribue par des aides matérielles : ainsi en Pologne, enLettonie, en Roumanie.

4 L’environnement

C’est, on a vu, un des domaines pour lesquels il est évident, pour tous, qu’un traitementsupranational des problèmes s’y impose : on ne répétera pas ici les considérations déjà exposées parailleurs.

4 Les droits sociaux et la protection sociale

Bien que cette question ait été relativement peu citée spontanément par les citoyens des pays candidats àl’adhésion, elle suscite une adhésion assez consensuelle quand on les amène à en parler.

Partout, quoiqu’à des degrés divers (les Slovaques déclarant par exemple tenir à conserver un âge dedépart en retraite plus favorable que la pratique de nombreux pays de l’Union Européenne, les Slovènesévoquant des avantages hérités de l’ancien système socialiste yougoslave protecteur à cet égard), onressent les pays occidentaux comme plus avancés sur ce point.

Tout en revendiquant le maintien de spécificités nationales ou locales dans un domaine où celles-cipeuvent relever de traditions ancrées et partagées, la plupart souhaitent que s’appliquent à leur payscomme aux autres des normes minimales : en matière de salaire minimum, d’horaires de travail, deconditions de travail, de droits salariés.

L’influence ou même la pression de l’Union Européenne est bienvenue à cet égard.

Tout au plus les Tchèques paraissent-ils moins considérer cela comme quelque chose de prioritaire ; et lesLettons, tout à fait demandeurs dans l’absolu, craignent que seul le développement économique ne rendeune telle évolution possible dans les faits.

4 La lutte contre la criminalité et le trafic de drogue

Sur ce point règne une unanimité dans le souhait de traitement au niveau communautaire de fléauxqui sont clairement perçus comme (de plus en plus) internationaux : par l’échange d’informations, deméthodes, par des collaborations actives, par une coordination générale des actions.

Y paraissent particulièrement sensibles les Polonais, les Tchèques, les Slovaques, les Hongrois, lesRoumains et les Chypriotes : citoyens de pays typiques de transit, de pays où une criminalité organisées’est fortement développée, ou bien (pour les Chypriotes) où elle est un phénomène relativement nouveaumais qui inquiète fortement.

4 La défense

L’idée que l’Union Européenne doit être dotée d’une défense commune apparaît parfaitementnaturelle à la quasi-totalité des Hongrois, des Slovaques, des Roumains, à une grande partie desTchèques, ainsi qu’aux Chypriotes et aux Slovènes.

Dans tous ces pays règne, on l’a vu, une défiance ou au moins un sentiment marqué de distance avec lesEtats-Unis, la question fondamentale étant de se doter des moyens de l’autonomie par rapport à eux.

Ce sentiment est également partagé par beaucoup d’Estoniens, mais certains d’entre eux, sans doute plusexposés comme les Lettons à la proximité immédiate d’un grand voisin, colonisateur de leur pays il y peuencore, s’interrogent davantage sur l’articulation à rechercher entre cette défense européenne et l’OTAN– ainsi d’ailleurs que nombre de Polonais qui semblent moins voir que d’autres l’Union Européennecomme ayant une vocation militaire.

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Globalement, on constate le fort degré d’adhésion au concept de défense européenne commune – lescitoyens des plus petits pays ressentant de manière encore plus évidente sans doute la nécessité d’êtreintégrés dans un ensemble coordonné.

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V.2.2 OBSERVATIONS GENERALES SUR LES ATTENTES A L’EGAD DE L’UNION EUROPEENNE

On constate, à l’analyse des attentes exprimées dans les pays candidats, que celles-ci ne diffèrent guère parleur nature de celles qui se manifestent dans les Etats membres actuels, mais que les priorités sont en partiedifférentes.

⇒ Les attentes prioritaires sont relatives au développement économique et social, problème crucial deces pays, et même angoissant dans certains.

Il s’agit en tout premier lieu d’y étendre et d’y développer les politiques de cohésion, à une échelle sansdoute bien plus grande encore que ce qui a été fait au sein de l’Union actuelle.

⇒ Elles convergent largement avec celles qui sont relatives au constat d’une défaillance, ou d’uneincapacité des seules autorités nationales.

En dehors du développement économique, et des concours communautaires matériels qu’on y attend, celapeut concerner aussi des actions d’ordre législatif, en matière de protection sociale minimale (ou, moinsnettement, de protection des consommateurs) ainsi que des initiatives d’apport ou d’échangesd’expérience et de know how.

⇒ Les citoyens des Etats candidats ressentent avec la même évidence que ceux des Etats membres lanécessité du niveau communautaire pour traiter des problèmes qui sont par essence trans-frontières.

Y figurent ceux de l’environnement et de la santé publique, et de la lutte contre la criminalité.

Pour le premier, on en appelle à des mesures législatives fixant des normes minimales, à une coopérationgénéralisée, ou encore à des mesures de soutien pour aider les entreprises à résister économiquement auxcontraintes économiques plus grandes qui en résulteraient.

Pour les seconds, il relève davantage du domaine de la coopération, mais on ressent dans ces pays unsouhait de coordination centrale plus grande des efforts.

⇒ Le renforcement général de l’Europe sur la scène mondiale est une nécessité également ressentie.

C’est, là aussi, l’objet même bien compris de la construction européenne.

Sur le plan économique, sans doute la nécessité première de renforcement de la compétitivité face auxpays européens plus développés fait-elle passer, dans le concret, un peu au second plan l’affrontementavec les pays tiers – mais celui-ci n’est pas absent des esprits au niveau du dessein général.

Sur d’autres plans « d’affrontement » entre l’Europe et ses grands concurrents – c’est-à-dire d’abord et àl’évidence les Etats-Unis – les citoyens des pays candidats apparaissent au moins aussi fermes que ceuxdes Etats membres à appeler de leurs vœ ux un renforcement de l’Europe et sa constitution en puissance –tant en ce qui concerne ses valeurs et son rayonnement culturel que le domaine de la défense.

⇒ Le développement des échanges et de la mobilité est objet de fortes attentes.

Comme dans les Etats membres, il s’agit de l’éducation (harmonisation des niveaux et reconnaissancemutuelle des diplômes, bourses d’échanges), de la culture (échanges culturels, aide à la préservation d’unpatrimoine pour laquelle les moyens manquent), de l’emploi (libre installation) – appelant en l’occurrencenon seulement des mesures d’ordre législatif, mais aussi le développement de coopérations assorties desoutiens financiers.

⇒ Pour ce qui concerne enfin l’ouverture économique des marchés, des attentes spécifiques et fortes semanifestent logiquement de protection minimale des économies nationales par rapport à un choc dela concurrence auxquelles elles ne sont pas encore en mesure de résister.

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Le souci d’adaptation législative très progressive s’exprime tout particulièrement dans les pays dont lasituation économique est perçue comme la plus faible (Pologne, Lettonie, Roumanie ...), mais il estégalement présent dans les autres.

C’est sans doute en République Tchèque (ou l’inquiétude existe à l’inverse, quant à la réelle volonté despays d’Europe de l’Ouest d’ouvrir leurs marchés), en Estonie et en Slovénie qu’il est au contraire lemoins aigu.

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CHAPITRE VI :

ATTITUDES L’EGARD DE L’ELARGISSEMENT

DE L’UNION EUROPEENNE

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VI.1. ATTITUDES A L’EGARD DE L’ELARGISSEMENT DANS LES ETATS MEMBRES

VI.1.1 NIVEAU DE CONNAISSANCE SUR L’ELARGISSEMENT ET LES PAYS CANDIDATS A L’ADHESION

⇒ A de très rares exceptions près, les citoyens de l’Union Européenne ont entendu parlé de laperspective d’élargissement et d’ouverture à de nouveaux pays.

En outre – sans être nécessairement informés avec précision – ils savent ou ils ont au moins plus ou moinsconfusément conscience que cette perspective n’est pas qu’une lointaine hypothèse, mais une décisionacquise dans le principe. Quelques uns – rares – dans différents pays mentionnent le fait que c’était unedes questions principales traitées au récent sommet de Nice.

⇒ Les connaissance de l’identité des pays candidats est cependant incomplète et inégale d’un Etatmembre à l’autre – mais nous rappellerons à cet égard que nombre des citoyens communautairesne seraient pas en mesure non plus de citer la liste complète des Etats membres actuels.

• Les « pays de l’Est » sont naturellement connus partout comme étant candidats à l’adhésion– au point qu’on parle parfois « d’élargissement à l’Est ».

Sauf exception, on comprend bien qu’il s’agit des Etats de l’ancien bloc soviétique (ou annexéspar l’Union Soviétique pour les Etats baltes parfois cités), et que l’élargissement ne concerne pasla Russie (ni, sans doute, l’Ukraine ou la Biélorussie, même si ces pays ne sont pas mentionnésexplicitement comme non-candidats).

Le degré de connaissance de la liste des Etats d’Europe Centrale candidats apparaît :° Relativement bon en Grèce, en France, en Belgique, en Allemagne, en Finlande et en

Autriche.° Moyen au Portugal, en Espagne, en Italie, en Irlande, au Luxembourg, au Danemark et en

Suède.° Faible aux Pays-Bas et au Royaume Uni.

La Pologne est globalement le pays le plus cité ou qui vient le plus spontanément à l’esprit avec laRépublique Tchèque, puis la Hongrie, la Roumanie et la Bulgarie ; la République Slovaque l’estpeu spontanément (mais elle est peut être confondue avec la République Tchèque dans les espritsde certains).

Les Etats Baltes sont, logiquement, particulièrement mentionnés dans les pays nordiques.

La Slovénie ne l’est qu’en Grèce, en Italie et en Autriche.

En dehors des pays réellement candidats, sont parfois (mais rarement) cités, sans précisionsupplémentaire, des pays « des Balkans » (en Grèce notamment).

• La présence de la Turquie dans la liste des Etats candidats est très largement connue.

• Celle de Chypre et de Malte l’est peu – sauf en Grèce.

Les citoyens interrogés ont rarement une notion précise du degré de préparation à l’adhésion desdifférents candidats.

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VI.1.2 ATTITUDES A L’EGARD DE L’ELARGISSEMENT DANS LES DIFFERENTS ETATS MEMBRES

Les attitudes à l’égard de l’élargissement sont sensiblement différentes d’un Etat membre à l’autre.

⇒ Dans les pays « du Sud » de l’Europe, elles sont globalement positives (bien que cela soit moins vraidans les niveaux socio-économiques moyens-inférieurs).

• Ce qui s’y exprime d’abord est une forme d’empathie et de solidarité avec des pays dont oncomprend les difficultés d’autant mieux qu’on les éprouve ou qu’on les a éprouvées soi-même(même si ce n’est pas à la même échelle). Parfois s’y ajoute (en Espagne) l’idée que, comme eux,on a souffert d’un régime politique dictatorial.

En même temps, dans ces pays pour la plupart méditerranéens où le thème de la culture commeciment de l’identité européenne est plus répandu, il y a une logique à simplement reconnaîtrecomme Européennes des nations qui l’ont toujours été, par delà les vicissitudes d’une histoirerécente qui les a provisoirement isolées.

• Naturellement, la perspective de leur adhésion suscite comme ailleurs des inquiétudes :° Crainte de réduction des concours communautaires à leurs pays au titre des politiques

structurelles.Elle est bien présente, mais souvent assortie de l’idée qu’il y a, ou qu’il y aura là un justeretour des choses, que ce sera « leur tour » – dans un esprit de solidarité bien compris.

° Crainte de concurrence de la part de ces pays, qui s’exprime notamment au Portugal, enGrèce, et en Irlande : concurrence de pays à très bas coûts de main d’œ uvre dont lesproduits sont très similaires aux produits nationaux (Grèce), ou risque de délocalisationd’entreprises implantées dans le pays depuis son adhésion à l’Union (Portugal, Irlande).

° Crainte d’un afflux d’immigrés, qui ne s’exprime toutefois fortement qu’en Italie et enIrlande.A l’inverse, on entend en Grèce l’idée que le développement économique graduel de cespays pourra contribuer à limiter la propension à l’émigration de leur population.

° Risque de dissolution de l’Union dans un ensemble devenu trop vaste, trop hétérogèneéconomiquement et socioculturellement, et à la gestion de plus en plus difficile.

• En même temps, on constate – et c’est tout à fait frappant – que les citoyens de ces Etatsmembres évoquent aussi spontanément des bénéfices que l’Union, ou leur propre pays,pourra retirer de l’arrivée de nouveaux adhérents.

° Ouverture et développement de nouveaux marchés pour les entreprises.° Sécurisation des frontières pour les Grecs, qui songent en l’occurrence d’abord à la

Turquie, mais peut être aussi à l’hypothèse plus lointaine d’adhésion de leurs voisinsbalkaniques « stabilisés » à l’avenir.De manière remarquable, la majorité des Grecs interrogés se révèlent favorables à l’entrée àterme de la Turquie dans l’Union Européenne, sur laquelle ils comptent en quelque sortepour amener ce grand voisin, avec qui ils ont un passé historique et un présent chargés, à seréformer. Logiquement, ces opinions sont assorties de l’exigence de multiples garde-fous.

° Rehaussement du statut relatif de son propre pays au sein de l’Union Européenne : idéeformulée explicitement en Espagne, dont on a vu qu’il y règne des frustrations de n’être pasreconnu pleinement par les Etats membres plus puissants et plus développés.

° Renforcement sur un plan général d’une Union Européenne qui gagnera en puissance enenglobant désormais tout le continent ou presque.

• On constate, globalement, la capacité des personnes interrogées dans ces pays à se situerrationnellement et affectivement en tant que citoyens communautaires en même temps quenationaux.

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⇒ Les attitudes observées en France, en Belgique, au Luxembourg, en Allemagne et en Autricheprésentent des traits relativement semblables.

• Comme dans les pays du Sud, l’idée est présente d’une sorte de devoir moral d’accueillir despays qui font historiquement et culturellement partie intégrante de la Grande Europe, aveclesquels les relations ont parfois été aussi fortes dans le passé qu’avec certains des Etats membresactuels.

Chez certains Autrichiens s’y ajoute une forme d’empathie, de la part de citoyens d’un pays quiétait lui-même il y a peu dans un statut de candidature.

La candidature de la Turquie est toutefois beaucoup plus problématique à cet égard, et suscitemême parfois des oppositions absolues.

• Les inquiétudes et les craintes s’expriment chez la plupart des interviewés.° En dehors du cas de la Turquie qui pose en outre un problème d’ordre culturel, elles sont

d’abord d’ordre économique et social.° On a conscience de l’ampleur de l’écart de développement économique, qui nécessitera

forcément une aide considérable – qui réveille en Allemagne le spectre de « l’Allemagnepayeuse », même si on y est résigné (et des attitudes similaires s’observent aussi enAutriche).En France, en Belgique et au Luxembourg, c’est moins la perspective d’avoir à aider cespays qui gouverne les craintes qu’une inquiétude plus confuse (mais réelle) des risques deperte des acquis.

° On observe aussi la crainte de concurrence d’une main d’œ uvre à bon marché, fortementancrée à la fois chez les Allemands interrogés à Leipzig et chez nombre d’Autrichiensexposés directement à la proximité géographique des pays candidats.

° La peur d’une augmentation de la criminalité n’est que peu évoquée ; quelques-uns unsavancent même l’idée qu’une coopération plus efficace pourra s’établir avec les nouveauxEtats membres.

° Comme dans les pays du Sud, il y a également, en raisonnant en citoyens communautairesautant que nationaux, de sérieuses inquiétudes quant à la complexification de la gestion,déjà difficile, d’une Union Européenne élargie et plus hétérogène – et un appel à uneconsolidation préalable.

• Les bénéfices directs possibles de l’élargissement sont moins évoqués que dans les pays duSud ; ils le sont davantage dans les groupes socio-économiques moyens-supérieurs en France, enBelgique et en Allemagne : marchés qui se développeront à terme et sur lesquels il faut êtreprésent « avant que d’autres continents ne nous les prennent ».

• L’idée du renforcement à terme du poids de l’Union Européenne sur la scène mondiale estbien présente dans les esprits.

• Globalement, la nécessité inéluctable de l’élargissement n’est pas contestée, mais tousinsistent sur la grande prudence qu’il faut avoir dans la définition des étapes successives etdans le respect des critères économiques, sociaux, démocratiques ou de respect des droits del’homme.

Les Allemands, tout particulièrement ceux de Leipzig, instruits par l’expérience de laréunification, insistent aussi sur la nécessité de progressivité en pensant au choc qu’ils ont eux-mêmes connu récemment, et sur le risque de déstabilisation brutale des industries et des économiesdes pays d’Europe Centrale voisins (idée qu’on trouve également exprimée en Autriche).

⇒ Les attitudes finlandaises présentent des similitudes avec celles qui viennent d’être analysées, avec :

• Une empathie plus restreinte géographiquement (aux Etats baltes surtout) et moins grandegénéralement.

• Une coupure nettement plus marquée entre les niveaux socio-économiques dans la balance desbénéfices perçus et des craintes.

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⇒ Aux Pays-Bas et au Danemark, la majorité des personnes interrogées reconnaissent à contre-cœ url’inéluctabilité de l’intégration des pays candidats.

• Les craintes sont dans l’ensemble de même nature que celles qui ont été décrites pour les paysprécédents, mais plus accentuées.

° Crainte d’avoir à « payer » et répugnance plus grande à le faire.Des Néerlandais se décrivent par exemple comme des « chats échaudés » qui ont déjà aidécertains de ces pays sans en obtenir le retour d’ascenseur escompté ; certains Danoisimaginent que l’effort d’aide financière n’oblige le Danemark à abandonner « son » soutienà l’agriculture – et refusent catégoriquement une telle perspective.

° Crainte de concurrence de produits à bas prix.° Crainte d’envahissement par une main d’œ uvre à bon marché, et de dégradation du modèle

social.

• Les bénéfices qui pourraient résulter de l’élargissement ne sont perçus qu’en termesd’avantages éventuels pour les entreprises du pays (élargissement du marché, exportations) –sans raisonnements formulés pour les avantages à terme pour l’Union Européenne plusglobalement.

• Dans l’ensemble, tout en se résignant pragmatiquement à un élargissement inévitable, lesNéerlandais et les Danois le font sans grande empathie avec les peuples concernés, et sansguère de considérations géostratégiques pour l’Union Européenne en tant que telle.

⇒ En Suède, la plupart des personnes interrogées apparaissent particulièrement peu ouvertes à l’idéede l’élargissement, et particulièrement méfiantes à l’égard de pays candidats dont elles ont unevision très noire.

• De pays qui ne respectent pas les droits de l’homme, persécutent les dissidents, pratiquent la peinede mort

• De pays où prospèrent la criminalité, le trafic de drogue, la contrebande, etc.

Les craintes qu’elles manifestent sont surtout relatives à ces aspects – et moins qu’au Danemark ou auxPays Bas aux conséquences économiques de l’arrivée dans l’Union de nouveaux membres.

Enfin, comme ailleurs, on trouve l’idée d’une gestion encore plus difficile d’une Union devenue encore« plus lente et plus bureaucratique »

⇒ Au Royaume Uni, enfin, ce sujet paraît au contraire moins présent qu’ailleurs dans la consciencepublique – un peu comme si c’était une affaire continentale qui concerne les Britanniques moinsdirectement.

• L’expression des craintes et des bénéfices possibles n’a pas un contenu très différent de celui quia été mis en évidence dans des pays tels que la France ou l’Allemagne – sans toutefois la mêmenotion de devoir moral de la famille européenne d’accueillir ses derniers enfants.

• Les attitudes vont d’un refus net de toute « subvention » de la part du Royaume Uni à l’idée deles aider pour les encourager « à respecter les règles et à donner la priorité aux droits del’homme », en passant par une indifférence affichée pour autant que sa situation personnellen’en soit pas affectée.

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VI.2. ATTITUDES A L’EGARD DE LA PERSPECTIVE D’ADHESION DANS LES PAYS CANDIDATS

La perspective de l’adhésion est naturellement sous-jacente à toutes les perceptions, attitudes et opinions sur lesdifférents thèmes analysés dans les précédents chapitres ; on y a vu quelles attentes, quelles craintes, ou quellesincertitudes existent à l’égard de l’Union Européenne. A ce stade des discussions, on amenait les participants desgroupes à prendre plus nettement position sur la candidature de leur pays et sur le processus d’adhésion.

De l’analyse de leurs propos se dégagent des traits communs mais aussi des différences très sensibles d’un paysà l’autre, et parfois d’une catégorie à une autre de la population.

Les différences sont très marquées d’un pays à l’autre.

⇒ La Slovénie est le pays candidat dans lequel, globalement, la perspective de l’adhésion est envisagéele plus favorablement et avec le plus de sérénité.

Ceux qui constituent la partie la plus dynamique de la population (en gros, les moins de 40 ans,généralement plus éduqués et mieux formés) envisagent avec une grande confiance une appartenanceprochaine à l’Union Européenne porteuse de développement économique et social et d’ouvertured’opportunités stimulée par la libre circulation et les échanges : elle signifiera la reconnaissance d’uneeuropéanité à part entière qu’ils ressentent déjà pleinement.

Les autres sont plus ambivalents ; ils évoquent les mêmes espoirs mais aussi des craintes réelles :l’ouverture économique et la concurrence pourraient conduire à des restructurations génératrices dechômage, de baisse du niveau de vie au moins pour une partie de la population, d’écarts croissants entreles riches et les pauvres, de dégradation des valeurs d’égalité et de solidarité ; ils sont plus sensibles aussià la notion de dilution identitaire au sein du vaste ensemble communautaire. Cependant, rares sont ceuxqui se déclarent opposés à l’adhésion, car ils ont généralement bien conscience de l’impossibilité pourun petit pays comme la Slovénie de rester « comme un îlot isolé ».

Tous considèrent leur pays comme ayant vocation à adhérer parmi les premiers, sont exposés à uneabondance d’informations sur le processus de préparation à l’entrée dans l’Union, et en voient des signesconcrets (introduction de la TVA, implantation de grandes entreprises étrangères ...). Sans exprimerd’impatience manifeste ou de frustrations devant la durée du processus, ils la voient comme proche.

⇒ L’état des esprits à Chypre est relativement comparable, avec une différence entre les catégoriessocio-économiques moyennes-supérieures et moyennes-inférieures.

Les citoyens qui font partie des premières manifestent presque unanimement des attitudesfavorables à l’adhésion de leur pays, qui rejoindra ainsi une Europe à laquelle il appartient de fait, dontils se sentent proches à bien des égards, et qui est pour eux porteuse de développement et de modernité.

Ceux qui appartiennent aux secondes sont plus réservés. Ils ont bien conscience des mêmes bénéficespotentiels – et d’ailleurs du fait que leur pays est déjà plus proche que les autres pays candidats du niveaucommunautaire en termes économiques – mais c’est peut-être précisément cette évolution vers lamodernité à laquelle ils sont par ailleurs réticents, et à ses implications sociétales sur le mode de vietraditionnel, les structures sociales, la convivialité des relations interpersonnelles, etc.

Globalement, on ne discerne pas de fortes contestations de la nécessité d’appartenance demain àl’Union Européenne pour un pays qui, en outre, peut y trouver des réassurances concrètes pour sasécurité.

Aux yeux des Chypriotes des différents milieux sociaux, le processus de préparation a clairementcommencé, et il comporte d’ailleurs des aspects reconnus comme positifs (clarification et simplificationde règles dans l’évolution législative en cours ...).

Si les eurofavorables expriment parfois de l’impatience devant la longueur du processus, la plupartreconnaissent qu’il est prudent et sage de laisser au pays le temps de s’adapter et de ne pas précipiter lemouvement.

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⇒ Les Tchèques interrogés se révèlent également majoritairement favorables à l’adhésion – sans qu’onobserve d’ailleurs chez eux le même décalage entre les différentes composantes de la population entermes de niveau social et éducatif ou d’âge.

Leur attitude moyenne est plus pragmatique : moins d’enthousiasme fusionnel chez les plus positifs, etune prise en compte plus rationnelle des contreparties négatives de l’adhésion.

L’adhésion à l’Union Européenne est logique et nécessaire pour rejoindre le concert des nationsdéveloppées ; on en attend comme ailleurs une source de développement économique, et aussi desconséquences positives en termes d’organisation du pays, de stabilité législative, d’instauration de règlesde conduite économiques et politiques.

Inversement, on a conscience du fait que les conditions mises à l’adhésion sont strictes (parfois même,qu’elles vont le devenir encore plus), qu’elle aura des « coûts » (mal évalués, et donc générateursd’inquiétudes), que l’ouverture qu’elle implique mettra davantage en évidence l’écart qui existe avec lespays ouest-européens, que celui-ci risque d’inciter à une émigration des élites intellectuelles vers eux, etc.

Les Tchèques savent clairement que le processus d’adhésion est bien lancé, qu’ils font partie des toutpremiers pays de la liste (avec, dans leur esprit, la Hongrie et la Pologne), et ils font preuve d’une assezgrande confiance en leurs négociateurs. Assez réalistement, et sans manifester de désir d’accélération, ilsévaluent sa durée entre 3 et 5 ans.

⇒ Les Estoniens interviewés, bien qu’aspirant clairement à rejoindre l’Europe occidentaledéveloppée, et conscients de la rapidité de l’évolution économique globale de l’Estonie ces dernièresannées, se montrent en moyenne nettement plus sceptiques en ce qui concerne l’adhésion à l’UnionEuropéenne de leur pays et le fait qu’il y soit prêt.

D’une part, la modernité qu’elle incarne est porteuse de développement et d’opportunités particulièrementreconnues par les plus jeunes et les plus éduqués, mais aussi de ruptures dans le tissu économique etsocial ; d’autre part l’Union en tant que telle est parfois considérée avec des suspicions et des visionscritiques de type « scandinave ». Sans doute ces réserves et cette défiance sont-elles plus marquées dansdes villes provinciales comme celle où nos investigations ont été menées qu’à Tallinn où l’eurofaveur estplus grande ; mais il semble bien qu’elles imprègnent à des degrés divers la société estonienne dans sonensemble.

L’adhésion à l’Union Européenne n’en est pas moins considérée comme inéluctable (et déjàengagée) par des citoyens dont les plus réservés paraissent plus enclins à l’abstention réticente qu’àune opposition de front.

⇒ Les attitudes observées en Hongrie et les lignes de clivage qui s’y dessinent, apparaissent assezdifférentes.

C’est dans la ville moyenne provinciale de Salgótarjan plutôt qu’à Budapest, et dans les couchessociales moyennes-inférieures plutôt que moyennes-supérieures, que la perspective d’appartenance àl’Union Européenne suscite les plus grands espoirs et le plus fort degré d’adhésion : l’idée y estrépandue que la situation du pays est très mauvaise, qu’il n’y a pas de signes d’amélioration, seulel’entrée dans l’Union Européenne étant susceptible de « faire bouger les choses » vers une améliorationdu niveau de vie, une augmentation graduelle des salaires, une diminution de la précarité, la possibilité devivre décemment.

Ces espoirs ne sont pas absents dans les catégories plus urbaines et plus aisées, où ils sont formuléstout comme ceux qui sont relatifs à l’accès aux technologies nouvelles ou à un environnement mieuxrespecté, avec des règles plus strictes, mais ils n’ont pas le même caractère de credo, et ils sontassortis de considérations plus réticentes sur la perte d’autonomie du pays (voire une forme de« subordination ») qu’entraînera l’adhésion, ainsi que de craintes de « dépropriation » (achats massifs demaisons ou d’immeubles urbains par des étrangers beaucoup plus riches, générateurs de spéculationimmobilière conduisant à une augmentation des prix et des loyers rendus inaccessibles au Hongroismoyen ...).

Dans l’ensemble, les Hongrois de l’un et de l’autre type voient bien comme une nécessité l’adhésionà l’Union Européenne, et c’est un sujet de débat très présent dans leurs esprits, mais ils ont fortementconscience aussi des difficultés, du fait que leur pays n’y est pas prêt, que de nombreuses mesures sontencore à prendre dans cette perspective – et ils acceptent tout à fait un processus d’adhésion lent etgraduel.

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⇒ Celles des Polonais de tous les milieux étudiés sont marquées par la coexistence d’espoirs et decraintes, où les secondes dominent nettement sur les premières.

Dans ce contexte, quand on les amène à prendre position sur l’adhésion de leur pays à l’UnionEuropéenne, ils s’y déclarent dans leur majorité favorables, mais c’est un choix souvent à la foisobligé et angoissé.

De cette adhésion, ils attendent, comme leurs homologues ailleurs, un développement de l’économie quise traduise par une amélioration concrète de leurs conditions de vie ; mais c’est en quelque sorte sans osery croire, tellement celle-là et celles-ci leur semblent délabrées, avec la crainte ancrée d’êtreéternellement les parents pauvres d’une Europe dont l’ouverture les fera apparaître encore pluscrûment comme tels, et une interrogation lancinante sur les motifs pour lesquelles les pays développésde l’Union Européenne voudraient les avoir parmi eux.

Rationnellement, ils identifient bien de tels motifs, et ils déduisent des implications positives (l’Union abesoin de réunir tout le continent pour assurer sa puissance et son prestige ; elle ne pourra donc pas laissersubsister en son sein des zones massives de pauvreté ...), mais ces considérations passent au second planderrière l’expression d’une affectivité douloureusement exacerbée : tous leurs propos reflètent en réalitéune revendication fondamentale de dignité et de reconnaissance de cette dignité.

Quant au processus de préparation à l’adhésion, ils semblent en savoir beaucoup moins que les citoyensdes pays précédemment analysés, et sans manifester évidemment de souhait d’accélération –mais toutsigne de réduction des incertitudes est bienvenu.

⇒ Les Roumains sont ceux qui manifestent le soutien le plus fort et le plus unanime à l’adhésion deleur pays à l’Union Européenne.

Il règne chez eux un credo quasi absolu que c’est la chance – l’unique chance – pour leur pays desortir de son état catastrophique. Mais, nécessité et obligation bien comprises, la perspective del’adhésion est en même temps vécue avec ferveur et enthousiasme par la plupart : il ne s’agit passeulement de rejoindre un ensemble économique, mais beaucoup plus profondément, et plus simplement,de « retrouver la famille ».

On ne détaillera pas ici à nouveau les attentes à l’égard de l’Union, dont il suffit de dire qu’elles portentsur toutes choses ou presque.

Des inquiétudes ou des interrogations s’expriment naturellement là comme ailleurs sur les conséquencesde l’appartenance à l’Union, mais elles sont très mineures. Dans l’état actuel des esprits, les Roumainspeuvent être décrits comme se montrant prêts à tout accepter, dans leur conviction qu’il ne peut enressortir à terme que du meilleur, ouverts à savoir ce qu’on attend d’eux, avides d’apprendre des autres.

En dépit de la dominante de ce rêve quelque peu mythique (dont il est vraisemblablement qu’il deviendramoins idéal à mesure que la date de l’adhésion se rapprochera et que des implications concrèteséventuellement douloureuses apparaîtront plus nettement), la plupart ne montrent pas d’impatience et sedéclarent favorables au maintien d’un processus lent, d’un rythme sage, qui permette au pays de procéderà toutes les nombreuses adaptations qu’il a à faire, et d’éviter le risque d’avoir à « rebrousser chemin ».

⇒ En République Slovaque, les attitudes sont très contrastées.

Elles vont de rares attentes euphoriques à des attitudes de réelle suspicion à l’égard d’une UnionEuropéenne dont on craint que sa seule motivation soit une motivation de « contrôle » économique, voirepolitique sur le pays, en passant par des attitudes majoritaires réalistes et pragmatiques.

De nettes différences y sont visibles entre les citoyens des catégories socio-économiques moyennes-supérieures plus optimistes sur les perspectives de développement économique et social, sur l’ouverturegénérale qu’apportera l’appartenance à l’Union, et ceux des catégories moyennes-inférieures chez quiles craintes sont fortes des conséquences de ce changement pour leur vie quotidienne (augmentation desprix « au niveau européen » alors que les salaires resteraient sans changement « au niveau slovaque »,privatisations, effets négatifs d’une société soumise aux lois de la concurrence ...).

Globalement les oppositions radicales à l’adhésion paraissent minoritaires, car tous y voient bien laperspective d’une amélioration à terme, mais c’est sans illusions excessives que la plupart s’ydéclarent favorables : le rattrapage avec les pays d’Europe de l’Ouest est envisagé « à 20 ou 30 ans », etnon très rapidement.

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En ce qui concerne le processus d’adhésion, la plupart ne manifestent pas d’impatience irréaliste, ontconscience des adaptations à effectuer, et situent la date d’entrée de la République Slovaque à 5 ou 10ans.

⇒ Pour les Lettons, on a vu précédemment les réticences et les craintes de beaucoup d’entre eux : deconséquences de l’ouverture sur une économie jugée très fragile, d’implications sociales et sociétalesnégatives et, surtout peut-être, de perte de souveraineté par l’inclusion d’un très petit pays mal armé dansun ensemble puissant qui lui dicterait de facto sa conduite.

En même temps, rationnellement, ils ont conscience que le développement futur du pays passe sansdoute inéluctablement par l’appartenance à l’Union Européenne – outre les réassurances qu’elle peutimpliquer sur le plan de la sécurité.

Lorsqu’on les amène à trancher, en dépit de leurs fortes réserves, la majorité paraît se résoudre à uneposition timidement favorable à l’adhésion.

Quant au processus d’adhésion – dont ils ont bien conscience qu’il est en cours par les changementslégislatifs continuels dont ils entendent parler – et à sa durée, ils apparaissent assez ambivalents : chezbeaucoup, il semble se mêler le souhait d’aller lentement vers une Union qui ne suscite pasd’enthousiasme, et la frustration de n’être considéré qu’en deuxième ligne derrière des pays dont l’entréesera plus proche, ou même l’impression que l’Union Européenne donne parfois de retarder les choseselle-même, ce qui ne renforce évidemment pas la confiance.

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CHAPITRE VII :

ATTENTES D’INFORMATION EXPRIMEES

ET REACTIONS A L’IDEE DE VISITES PHYSIQUES

OU VIRTUELLES DE LA COMMISSION EUROPEENNE

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VII.1. ATTENTES EXPRIMEES ET REACTIONS DANS LES ETATS MEMBRES

VII.1.1 ATTENTES D’INFORMATION : CONTENU, FORME, ET MOYENS ENVISAGEABLES

⇒ Des premières réactions spontanées des interviewés lorsqu’on leur demandait de s’exprimer surl’Union Européenne (cf. Chapitre III), il ressortait, à l’issue des discussions sur ce thème :

• La prise de conscience, par beaucoup, de leur grande ignorance des affaires communautaires– avec même parfois une sorte de sentiment de culpabilité d’en savoir aussi peu, au moins danscertains pays.

• L’impression généralisée qu’on n’est pratiquement récepteur d’aucune information enprovenance directe des sources communautaires, non filtrée par des réémetteurs intermédiaires.

• Une appétence plus ou moins grande pour une meilleure connaissance de ces sujets, corréléede manière générale à la vivacité du sentiment européen ou aux dispositions favorables apriori à l’Union Européenne

• Des attentes de contenu qui s’orientent principalement selon trois grandes directions :° Savoir en quoi l’action de l’Union Européenne influe sur sa vie en tant que citoyen du

pays ou en tant que consommateurDans les pays dont on sait qu’ils sont bénéficiaires des politiques de cohésion, cela inclutune information précise à leur propos, allant jusqu’aux impacts locaux dans sa ville ou danssa région, et aux critères d’éligibilité.Cela inclut également, et de façon plus générale, l’impact des mesures législativescommunautaires pour soi-même (ou la catégorie de population dont on fait partie) – avecles aspects négatifs éventuels aussi bien que les aspects positifs.

° Mieux connaître, de manière plus large, et concrètement, les décisionscommunautaires et leurs résultats : voir les réalisations permettrait de mieux se rendrecompte des éléments positifs, et de modifier éventuellement des attitudes réservées àl’égard de l’Union si l’on « sent » ainsi qu’elle sert à quelque chose (alors que les médiasou les autres rediffuseurs intermédiaires tendent à ne présenter que les négociations et leursdifficultés, mais non leur aboutissement).

° Disposer d’une meilleure « culture générale » de l’Union Européenne, mieux encomprendre le fonctionnement et les mécanismes.Cette attente est moins présente, il est vrai, dans les pays les moins eurofavorables, où l’onprofesse souvent a priori une indifférence à l’égard des choses qui touchent à l’Union –sauf, dans les cas de petits pays (ou de ceux où on se sent plus ou moins « mineur »), pource qui est de leur influence dans les décisions et de la façon dont ils l’exercent.Mais, qu’il soit explicite ou non, le besoin se révèle partout d’un fil conducteur quipermettait de relier entre eux des éléments de connaissance incomplets et disparates,qui ne permettent pas de comprendre suffisamment les finalités.

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⇒ Après apport des informations sur l’Union Européenne discutées au Chapitre IV, et discussionsultérieures sur des domaines possibles d’action communautaire (Chapitre V, et accessoirement ChapitreVI sur les perspectives de l’élargissement), les citoyens interrogés étaient invités à parler de la façondont on pourrait « mieux faire savoir, mieux faire comprendre, ou mieux faire sentir ce que faitl’Union Européenne et en quoi cela nous concerne »

Pour ce qui est du contenu on peut faire les observations suivantes :

• L’attente essentielle, exprimée plus ou moins fortement dans tous les Etats membres, estd’obtenir, à travers des exemples de réalisations concrètes ou de conséquences affectantdirectement le citoyen ou le consommateur dans sa vie quotidienne, une illustration tangible desimplications de l’action de l’Union Européenne et de ses décisions.

Il apparaît primordial d’ancrer la réalité de l’Union Européenne dans l’expérience quotidienne,d’en faire percevoir les bénéfices concrets pour le citoyen, et même peut-être les implicationsmoins positives le cas échéant – dont l’existence reconnue peut aider à crédibiliser les élémentsfavorables.

Lorsque cette demande n’est pas explicitement formulée (dans les pays ou les catégories les plussceptiques), c’est qu’il existe plus largement un désintérêt à l’égard de toute informationconcernant l’Union Européenne, attribué à la complexité du sujet, à son caractère inintelligible,austère et rébarbatif. Seuls des éléments concrets, inscrits dans le vécu proche, semblent donc afortiori susceptibles d’éveiller l’intérêt.

Inversement, les attentes apparaissent particulièrement fortes et diversifiées dans les pays où lesattitudes globalement favorables au projet européen prédominent. C’est le cas notamment dans lespays « du Sud » de l’Europe en général, ainsi qu’en France ou en Belgique.

• Le souci d’un approfondissement plus général des connaissances de base sur l’UnionEuropéenne se confirme également dans les pays où on est le mieux disposé a priori au projet ouà la construction communautaire – mais il est éveillé aussi dans des pays plus ambivalents, voirefranchement sceptiques ou hostiles au départ : ainsi, notamment pour l’Allemagne et même leRoyaume Uni

Cela peut comporter des informations « de vulgarisation » sur les institutions, leurfonctionnement, les règles de base des mécanismes décisionnels – sans entrer dans un détailtrop technique : il s’agit évidemment rarement d’un intérêt pour le droit constitutionnelcommunautaire per se, mais du besoin ressenti de disposer d’un outil de connaissanceélémentaire qui permette de comprendre le reste, c’est à dire l’essentiel.

⇒ Pour ce qui est des moyens ou des relais de cette information vers le grand public, les participantsdes réunions en évoquent spontanément de différentes natures.

• Les médias, naturellement, et ceux d’entre eux qui sont les plus faciles d’accès, susceptibles detoucher le public le plus vaste avec le maximum d’impact : la télévision et la presse écrite sontcitées de façon dominante, la radio plus rarement.

En même temps, les interviewés ont bien conscience, pour la plupart, du « zapping » réel oumental qu’ils ont, comme d’autres, tendance à pratiquer lorsqu’ils « tombent » sur desinformations relatives à l’Union Européenne.

A cet égard, il est intéressant de constater que (même eurosceptiques) il font un effort sincère pourréfléchir à des moyens qui pourraient réduire cet effet d’occultation, en proposant parexemple :

° Le recours à la télévision à des heures de grande écoute° L’inclusion systématique dans les journaux télévisés d’un chapitre (même bref) consacré à

l’Europe et à l’actualité communautaire – ou l’adjonction à ces journaux de plagesspécifiques européennes (comme pour la plage réservée à la météo).

° Le rassemblement dans les suppléments hebdomadaires des journaux, dans une rubriquebien identifiée, des principales informations concernant l’Europe parues au cours de lasemaine, ou une partie de supplément consacrée à l’Europe

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° Des émissions régulières, présentées dans un cadre de divertissement ou sur un tonhumoristique, sur l’Europe, ou des documentaires attractifs sur des aspects particuliers de lavie des gens dans d’autres pays européens.

° Quelques Grecs et Italiens vont jusqu’à proposer la retransmission en direct à la télévisiondes débats du Parlement Européen, avec traduction simultanée.

• Les nouveaux médias : Internet est suggéré spontanément dans des pays où le taux d’équipementen accès et la familiarité avec son usage sont les plus grands (pays nordiques), mais aussi parexemple, en Italie, en Espagne ou en France chez des interviewés jeunes et assez éduqués – avec ladouble réserve du non-équipement de la majorité de la population et, plus importante encore, dufait que l’obtention d’informations par ce moyen nécessite une démarche volontaire de recherche.

• Parfois, mais rarement, des services d’information téléphonique sur l’Europe (il faut déjà avoir unequestion précise en tête pour y faire appel)

• Dans quelques cas, des relais de proximité : centre ou « kiosque » d’information sur l’Europe, ouservice similaire installé dans les collectivités locales ou autres lieux publics de proximité. EnBelgique, au Luxembourg, et en Autriche, l’idée va même chez certaines des personnesinterrogées jusqu’à l’invitation à des discussions ou des débats sur l’Europe dans de tels lieux,permettant l’interactivité des questions et réponses au delà de la simple prise d’information.

• Des brochures d’information : ce moyen est signalé dans divers pays, mais avec un champd’utilisation restreint en fait à des cas bien spécifiques, où les citoyens ont besoin d’être informésmassivement sur des évènements essentiels (ainsi pour l’Euro)

• L’école : elle est évoquée dans tous les pays, comme un lieu privilégié et nécessaire pour que lesgénérations futures soient « formées » à l’Europe et sachent s’y repérer.

On y ajoute parfois l’idée de moyens ou de médias particuliers pour les enfants (bandes dessinées,dessins animés, journaux pour la jeunesse, jeux … )

Naturellement, ce consensus sur l’introduction dans les programmes scolaires (et dès le niveauprimaire) d’une présentation de l’Union Européenne peut être aussi une manière de se« défausser » de la question sur les générations qui suivent. Il témoigne au moins d’une absenced’opposition (même dans les pays les plus sceptiques) à voir ses enfants ainsi « imprégnés » d’uneEurope qu’on a soi-même du mal à appréhender.

⇒ Pour ce qui concerne la forme et le ton, le consensus est également très large pour rejeter tout cequi est austère, ennuyeux, pédagogique au sens triste du terme, toute « langue de bois » politico-administrative, et pour réclamer des présentations vivantes, attrayantes, humoristiques,éventuellement ludiques, touchant l’affectif et pas seulement le rationnel du citoyen.

⇒ Pour ce qui est de « médiateurs » possibles de l’information sur l’Union Européenne, plusieurshypothèses étaient soumises aux participants des discussions de groupe :

• Un Ministre de notre gouvernement

• Le Ministre des Affaires Européennes d’un autre pays

• Un des Commissaires européens

• Votre maire ou votre député, localement

• Un député du Parlement Européen

• Un journaliste spécialiste des affaires européennes

• Un citoyen d’une autre nationalité européenne qui vit et travaille dans notre pays

• Un étudiant qui revient d’un an d’études dans un autre pays européen.

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Spontanément, le personnel politique national, jugé partial et reflétant la position des partis, estsouvent écarté du rôle de médiateur. Ce rejet s’avère quasi-unanime, quel que soit le type d’acteurpolitique considéré.

• Un Ministre du gouvernement national, outre les réserves déjà exprimées, est enclin à valoriser sapropre action au détriment de celle de l’Union Européenne et donc à en faire une présentationtendancieuse (sauf pour les Néerlandais et les Luxembourgeois).

• Un Ministre d’un autre pays présente le même risque de partialité qu’un ministre national, etmanque en outre de notoriété et donc de crédibilité, ainsi que de connaissance du contexte et desenjeux pour le pays considéré ; tout au plus reconnaît-on parfois (rarement) un élément possible« d’exotisme » (avoir le point de vue des autres)

• Un maire et un député, malgré une certaine proximité, ne sont guère crédibles en ce qui concerneun sujet éloigné de leur champ d’intervention habituel, pour lequel on ne leur prête pas unecompétence suffisante.

Les journalistes, considérés comme objectifs et compétents, sont les mieux placés pour tenir lafonction de médiateurs. Il s’établit un quasi-consensus en leur faveur – à condition qu’il s’agisse deprofessionnels, crédibles, respectés, reconnus pour leur objectivité (à l’inverse d’ailleurs « desmédias » décriés pour le sensationnalisme dans certains pays à presse populaire) – et dotés à la fois ducharisme et de la « proximité humaine » nécessaires.

L’idée d’un Commissaire européen comme « médiateur » suscite des réactions différenciées, maismajoritairement favorables.

Sa compétence sur le sujet, et sa (plus grande) neutralité par rapport à la fois aux intérêts nationaux et auxintérêts « politiciens » en font un des types de médiateur les plus crédibles au Portugal, en Grèce, enEspagne, en Irlande, au Luxembourg, dans une moindre mesure en Autriche, et aussi dans les groupessocio-économiques moyens-supérieurs néerlandais et finlandais.

Les réactions sont plus ambivalentes en Italie, en France (où on craint « qu’il ne parle énarque » – sansréférence d’ailleurs à la personnalité de tel ou tel des Commissaires français actuels), en Belgique où lesplus informés évoquent par exemple Van Miert en positif, mais Madame Cresson tout à fait à l’opposé),eten Suède (où Madame Wallström est citée par quelques-uns).

Le rejet n’est fort et systématique qu’en Allemagne, au Royaume Uni et au Danemark.

Celle d’un parlementaire européen suscite de l’intérêt chez une partie des interviewés, et pour lesmêmes raisons, mais avec un degré de crédibilité moins grand, tant pour ce qui concerne sacompétence moins large des affaires communautaires que pour son caractère d’homme politique élu, etdonc parfois taxé des tares inhérentes à l’envie prédominante de réélection. Le rejet est particulièrementnet par exemple en Grèce, en Italie, aussi bien qu’en Allemagne, au Royaume Uni et en Autriche

Enfin, un citoyen ou un étudiant confronté à l’expérience de la vie dans un autre pays européen nebénéficie d’aucune crédibilité particulière, et n’apparaît donc pas qualifié pour le rôle de « médiateur ».Sans doute le serait-il s’il s’agissait d’apprendre quelque chose sur ce pays et la façon dont on y vit (cf.par exemple la forte valorisation des échanges Erasmus-Leonardo pour ceux qui les connaissent) – maisle sujet est ici l’Union Européenne en tant qu’ensemble.

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VII.1.2 REACTIONS A L’IDEE DE VISITES DE LA COMMISSION EUROPEENNE

⇒ L’idée d’une visite de la Commission Européenne surprend d’abord beaucoup des interviewés

• La très grande majorité ignorait que de telles visites se pratiquaient (seules exceptions dans notreéchantillon, un Allemand de Leipzig qui a eu l’occasion de se rendre à la Commission, unFinlandais qui a visité le Parlement, et quelques rares autres personnes qui disent en avoir entenduparler).

• Pour beaucoup, cette perspective apparaît abstraite : on imagine difficilement se rendre à Bruxellesdans ce but ; et, si on était amené à s’y trouver, ce n’est évidemment pas le site touristique qu’onavait à l’esprit en premier lieu.

Abstraction faite de la probabilité d’être réellement un jour face à cette perspective, le degré d’intérêt apriori varie d’un pays à l’autre reflétant en gros le degré d’intérêt existant pour l’Europe et l’UnionEuropéenne, ou le degré de curiosité à en savoir plus.

Globalement, l’intérêt apparaît :

• Plus élevé au Portugal, en Grèce, en Irlande, en France, en Allemagne, en Finlande et en Autriche.

• Particulièrement peu élevé aux Pays-Bas, au Royaume-Uni, au Danemark et en Suède.

• Moyen dans les autres pays – avec, pour la Belgique et le Luxembourg la caractéristiqueparticulière de la présence dans sa ville ou de la proximité géographique avec les implantations dela Commission qui fait que la proposition y est davantage reçue, en sortant du plan du principe,comme une perspective concrète, qui est en l’occurrence dépourvue de la touche « d’exotisme »qui peut parfois exister ailleurs.

⇒ Les attentes qui s’expriment chez les personnes qui manifestent leur intérêt portent à la fois sur lecontenu et sur la forme.

En ce qui concerne le contenu, elles se concentrent sur les principaux aspects suivants :

• En savoir plus sur les actions et les initiatives de la Commission (ou plus généralement del’Union Européenne), sur les domaines qu’elles recouvrent, sur leurs résultats – avec une fortedemande d’explication par des exemples concrets.

• Savoir en quoi ces actions ont un impact sur sa propre vie personnelle ou professionnelle.

Les thèmes précis qui sont évoqués sont ceux qui ont été analysés dans le chapitre V relatif auxattentes à l’égard de l’Union Européenne (en premier lieu santé et protection du consommateur,environnement, développement social en général incluant l’éducation, contrôle de la criminalité,contribution au développement économique et au niveau de vie … )

• Savoir en quoi elles ont un impact sur son propre pays : demande formulée notamment par descitoyens de pays eurosceptiques comme les Pays-Bas ou le Royaume-Uni, mais aussi parfois pard’autres.

• Savoir comment son pays est représenté – question formulée surtout par des interviewés quis’interrogent sur l’influence qu’il peut avoir.

• Mieux comprendre, et surtout « sentir » comment fonctionnent la Commission, ou lesinstitutions en général, comment se prennent les décisions, à quels débats elle donnent lieu,comment les différents responsables interagissent les uns avec les autres, etc.

On est ici à la fois sur les plans du fond et de la forme ; on y reviendra plus loin.

• Parfois (de la part des eurohostiles les plus ancrés), savoir « où passe notre argent » : ce quefinance l’Union, mais aussi « ce que gagnent les Commissaires » (ou les hauts fonctionnaires, oules députés européens) « leurs notes de frais », la présence ou l’absentéisme en séance (avec ici desconfusions entre la Commission et l’assemblée parlementaire, etc.).

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En ce qui concerne la forme, les demandes qui s’expriment révèlent à la fois un très haut niveaud’attente et une certaine naïveté, avec par exemple le souhait:

• De rencontrer les Commissaires (de préférence de sa propre nationalité) et de pouvoir leur poserdes questions.

• D’assister à une réunion de la Commission « depuis la galerie du public » (confusion là aussi sur lanature de l’institution).

• De suivre pendant une journée un fonctionnaire (originaire de son pays), de voir ce qu’il fait,comment il travaille concrètement,

• Plus modestement, de « faire un tour des bâtiments », « de voir les gens au travail », « d’entendreles différentes langues », en résumé de « sentir l’ambiance »

Pour irréalistes qu’elles soient, ces demandes montrent bien le besoin ressenti de proximité, derapprochement des citoyens avec l’institution et d’incarnation de celle-ci par des personnes enchair et en os.

⇒ Plus réalistement, on proposait aux personnes interrogées de réagir à 4 hypothèses de style de visite.

a) « Une série d’exposés par différents responsables de la Commission qui vous donnent un panoramad’ensemble des politiques communautaires ».

Cette proposition manque d’attractivité pour une grande partie des interviewés, les principalesraisons en étant :

• La crainte de discours généraux ennuyeux, trop longs, trop techniques, trop spécialisés.

• (En dépit de la caractéristique positive du contact avec des personnes physiques), l’absence« d’interactivité » avec les orateurs – à moins qu’on ait la réelle faculté de poser ensuite desquestions et d’entrer dans un « débat ».

Elle ne retient l’attention que d’un petit nombre, de niveau socio-économique et éducatif élevé, ayant déjàune connaissance de base des affaires communautaires, qui y voient l’occasion d’un approfondissement(d’autres acceptant l’idée, sinon pour eux-mêmes, au moins pour « des étudiants qui voudraient creuser lesujet »).

b) « Une réunion en petits groupes avec des responsables de la Commission à qui vous pourriez posertoutes les questions que vous souhaitez ».

Cette proposition rencontre un consensus très large dans tous les pays : elle répond précisément auxdemandes qui s’exprimaient spontanément de contact physique direct, de rencontre, d’interactivité.Certains font une comparaison d’ailleurs avec l’expérience de débat et d’échange avec d’autres, sur lessujets communautaires qu’ils viennent de vivre dans le cadre des discussions de groupe.

Des réserves ou des doutes d’expriment parfois :

• Chez des personnes de moindre niveau d’éducation, et peu informées au départ sur l’UnionEuropéenne, l’idée qu’il faut déjà savoir des choses pour pouvoir, ou oser, poser des questions.

• Plus généralement des doutes sur la réalisation de la promesse contenue dans la formulation de laproposition, à savoir vraie occasion de débat, et groupes réellement de petite taille – faute de quoi« le responsable fera un petit discours, demandera si quelqu’un a des questions, que personnen’osera formuler, et s’en ira »

c) « Un centre de visites équipé de nombreuses bornes informatiques interactives, d’utilisation trèssimple, qui vous permettent de vous informer en choisissant les questions qui vous intéressent »

Cette proposition suscite de prime abord des réactions majoritairement négatives chez desinterviewés qui y voient « un outil froid», « manquant de chaleur », « où le contact personnel disparaît »,où on perd la richesse de la communication personnelle, etc.

Ce type de réaction est quasi-général chez les interviewés portugais, grecs, français, allemands,néerlandais, britanniques et finlandais (donc à la fois dans des pays eurofavorables et eurosceptiques)

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Il est également répandu dans les autres pays, où une partie des personnes interrogées y voient cependantun intérêt possible : outil permettant « d’avoir davantage de détails sur un sujet », ou présentant un certaincaractère ludique notamment pour des personnes accompagnées d’enfants

d) « Un centre de visites équipé de bornes du même type, mais où on accède à l’information sousforme de jeux interactifs ».

Comme la précédente, cette proposition est majoritairement rejetée et fondamentalement pour lesmêmes raisons (absence de contact direct), avec toutefois une différenciation plus nette entre :

• Un rejet quasi-absolu dans tous les pays si l’on pense aux visiteurs adultes : le caractère fortementludique qui est suggéré ici est perçu comme non cohérent avec une matière « qui n’est pas un jeu »(apprendre sur l’Union Européenne), voire même comme dévalorisant pour ces visiteurs.

• Une acceptation du principe lorsqu’on pense aux enfants, ou à des visiteurs adultes accompagnésd’enfants.

⇒ Bien entendu, cet exercice était en partie artificiel, chacune des propositions étant présentée commeunivoque d’une manière quelque peu forcée, mais il confirme au moins très nettement le besoin essentielque s’établisse un contact personnel direct avec des êtres humains, qui incarnent l’institution etcommencent à lui donner un visage, et avec qui un dialogue pourrait s’engager.

⇒ Au vu de ces réponses, mais aussi des enseignements des chapitres précédents sur ce que les citoyenssavent et pensent de l’Union Européenne, et de ce qu’ils en attendraient, on peut mettre en évidence uncertain nombre de lignes directrices ou éléments de « squelette » d’une organisation des visites quitienne compte aussi des réalités pratiques (on imagine mal les Commissaires disponibles enpermanence pour répondre aux questions des visiteurs).

• La nécessité du contact personnel direct et, autant que possible, de dialogue, est incontournable.

• La Commission, et l’Union Européenne plus généralement, ne sont connues pour l’essentiel quecomme des entités abstraites et désincarnées.

• La connaissance des domaines d’action communautaire est variable ; mais, même chez descitoyens qui en savent au fond pas mal, les éléments connus apparaissent comme épars, il marquele fil directeur qui ferait comprendre le lien entre les différentes actions.

• Les attentes à l’égard de l’Union sont fortes, et les attentes d’information sur elle également, unefois qu’elles sont éveillées.

• Au-delà d’éléments de base de « culture générale de l’Union Européenne et de sonfonctionnement, les citoyens sont avides de concret sur ce que fait l’Union, ce que fait laCommission, quels sont les projets et surtout les réalisations.

• La crainte de trop grande complexité, de trop grande technicité, d’ennui des visites se manifestedans les réactions à certaines des propositions ci-dessus ; il convient donc de rechercher uneorganisation et un style de visite qui soient vivants et rythmés et qui évitent les comportementspassifs face à l’information donnée.

⇒ Idéalement, l'organisation des visites devrait viser :

• A faire ressentir que l'Union Européenne "sert à quelque chose" et a à son actif desréalisations très diverses qui ont un impact sur la vie des citoyens, tout en donnant desréférences de base.

Peuvent y être inclus des illustrations de projets cofinancés par les concours communautaires dansles différents Etats-membres, les résultats de législations européennes touchant à la santé et à laprotection du consommateur, la référence à des événements marquants de l'histoire de l'UnionEuropéenne qui ont étendu son champ d'intervention dans de tels domaines, etc.

• A fournir le fil directeur qui donne un sens aux éléments de connaissance éclatés et quifournisse le lien nécessaire – par exemple par des exposés concis de politique générale de l'Unioncomplétés par des schémas synthétiques de son fonctionnement institutionnel.

• A donner une occasion de contact physique et de débat avec des hommes ou des femmes quiincarnent la Commission

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• A permettre un approfondissement individuel sur des questions d'intérêt particulier pour telou tel

Le recours en libre service à des bornes informatiques interactives pourrait être un moyentechnique efficace dans cet objectif – et il prend alors un sens différent dès lors qu'il est envisagéen complémentarité avec les éléments précédents (l'objection d'outil froid tombe).

⇒ En ce qui concerne les langues des visites, la grande majorité des interviews affirment dans tous lespays la nécessité de visites conduites dans leur propre langue, au nom de deux raisons :

• Le respect de l’identité nationale de chacun

• Le souci « technique » de bien comprendre les informations et les explications fournies sur unematière a priori complexe et difficile.

Seuls des interviews flamands du groupe socio-économique moyen-supérieur se déclarent disposés à uneinformation partiellement dispensée en français ou en anglais – à condition qu’ils puissent formuler leursquestions dans leur propre langue – et quelques participants du même niveau aux Pays-Bas, en Suède eten Finlande accepteraient l’anglais, mais avec réticence.

A l’inverse, on note le souhait (pas l’exigence) de Luxembourgeois que les visites puissent égalementavoir lieu dans la langue luxembourgeoise, et d’Espagnols qu’il en existe en version catalane.

La traduction simultanée est spontanément envisagée pour pouvoir comprendre un interlocuteur qui neparle pas sa propre langue.

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VII.1.3 REACTIONS A L’IDEE DE VISITES VIRTUELLES DE LA COMMISSION EUROPEENNE

Les participants des réunions se voyaient enfin proposer l’idée « qu’on peut également, avec des moyensmodernes de communication comme Internet, imaginer qu’on mette en place des « visites virtuelles » de laCommission Européenne, qu’on pourrait effectuer à partir de chez soi, ou de son lieu de travail ou d’études ».

⇒ L’idée de telles visites rencontre globalement un bon niveau d’intérêt de principe – sur lequel nouseffectuerons cependant deux observations qui le tempèrent en partie.

• Cette proposition, venant à la suite de celle de visites physiques, a eu « son terrain » préparé par ladiscussion sur la première ; il est vraisemblable qu’elle aurait comme elle déconcerté et suscité unecertaine surprise si l’ordre de présentation en avait été inversé.

• Il y a sans doute une partie de stéréotypes dans les accords à l’idée d’un moyen de communicationmoderne et « à la mode » que tous ceux qui l’approuvent n’utiliseront sans doute pas (certainsspécifiant d’ailleurs qu’ils y songent plutôt pour plus jeunes ou plus familiers qu’eux-mêmes avecles outils informatiques).

Il reste cependant que, même si certains s’excluent de son usage ou ne se commettent pas vraiment àtitre personnel, l’idée de l’utilisation d’Internet apparaît aujourd’hui normale et légitime.

Quelques uns y ajoutent l’idée d’un contenu stocké sur CD ROM.

⇒ L’intérêt déclaré varie d’un pays à l’autre, selon une hiérarchie dans laquelle se mêlent en réalitédeux facteurs, celui de l’intérêt pour toute forme de visite de la Commission, et celui de l’ouvertureau moyen de communication utilisé.

Ainsi, c’est à la fois en Irlande et en Finlande que les réactions paraissent les plus favorables ; ensuiteviennent les Français, les Belges, les Allemands et les Autrichiens – les plus réticents restant lesBritanniques.

Cet intérêt est également, logiquement, plus grand dans les groupes de niveau socio-économique moyensupérieur, plus éduqués, plus familiarisés avec les outils informatiques et avec Internet, ainsi que chez lesplus jeunes des interviewés.

⇒ Les attentes de contenu quant aux thèmes d’information traités ne diffèrent pas sur le fond de cequ’on a vu précédemment.

Il s’agit toujours des thèmes d’intérêt premier pour les citoyens :

• Que font concrètement la Commission ou plus généralement l’Union Européenne, en quoi etcomment cela influe-t’il sur sa propre vie et sur celle de son propre pays – avec toujours uneconcentration des demandes sur les domaines objets des plus fortes attentes d’information descitoyens.

• Comment fonctionnent la Commission (et les autres institutions), avec là aussi l’envie de « sentir »autant que de savoir.

⇒ On observe que le caractère « froid » du moyen d’information électronique, s’il est évoqué comme ill’était précédemment à propos des bornes interactives dans le cadre de visites physiques, n’est pasici opposé d’emblée comme rédhibitoire. Certes, le contact physique direct manque, mais c’est unecontrainte acceptée comme inévitable pour une visite à distance.

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⇒ En ce qui concerne la forme et les modalités de présentation des systèmes, les réactions ou lessuggestions des interviewés montrent cependant leur besoin de réduire cette « froideur » autant quefaire se peut, en demandant un style de site réellement interactif et vivant, comportant par exemple :

• La possibilité de suivre des débats en direct

• Celle d’assister à des réunions ou de suivre la journée d’un responsable de la Commission « filmépar une web caméra ».

• Celle de « faire un tour des bâtiments » par le même moyen virtuel.

• L’inclusion dans le site d’interviews « d’hommes politiques » (Commissaires ou autresresponsables).

• Celle d’une revue de presse sur les sujets communautaires d’actualité, avec traduction dans lesdifférentes langues.

• Celle d’un système de questions-réponses, qu’on imagine soit en direct (pouvoir entretenir un« chat » avec un Commissaire) soit sous forme d’une « boite à questions » avec promesse deréponse rapide.

En outre, la même demande d’exprime que pour les visites physiques, de voir et de sentir concrètementles réalisations communautaires en les illustrant par des schémas explicatifs, des images, desséquences en vidéo.

On attend par ailleurs du site proposé :

• Que son contenu soit exprimé dans un langage simple, vivant, clair, technique et dépourvu dela « langue de bois » politico-administrative qui ferait « décrocher ».

• Que son utilisation soit très conviviale, avec une grande accessibilité et une grande facilité denavigation une fois qu’on y a pénétré.

• Qu’il soit actualisé régulièrement.

⇒ Ces conditions étant supposées réunies, les avantages qu’y voient les citoyens (au moins pour ceuxd’entre eux qui manifestent un réel intérêt) peuvent être résumés comme suit :

• La commodité et le confort de l’accès à distance, depuis chez soi, « sans avoir besoin de serendre à Bruxelles »

• Le caractère supposé exhaustif et « encyclopédique » des connaissances qu’on peut y trouver.

• La facilité qu’il y a à choisir ses propres sujets d’intérêt

• La mise à profit des caractéristiques interactives d’Internet pour poser ses propres questions et yobtenir des réponses.

⇒ En conclusion sur ce sujet, on voit donc que le site attendu n’est pas simplement un site d’information(comme l’est pour l’essentiel le site actuel de la Commission) mais un site qui doit remplir pluslargement une fonction de communication, stimuler l’intérêt, faire sentir les choses autant que les dire,et contribuer à augmenter le sentiment de proximité avec l’institution.

En outre, même doté de cette qualité, comme tout site Internet, l’une de ses limites fondamentales estque sa consultation dépendra toujours d’une démarche volontaire de la part du citoyen pour s’yconnecter ; même idéal dans son contenu et dans sa structure, il ne pourra évidemment constituer qu’unélément d’un dispositif de communication plus global vers le citoyen – élément qui devra d’ailleurs êtrepromu (par d’autres moyens qu’électroniques) pour développer sa notoriété et inciter à son utilisation.

⇒ En ce qui concerne enfin la question de la langue :

• Le souhait de pouvoir utiliser sa langue nationale est général, comme pour les visitesphysiques.

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• Tout au plus constate-t-on une meilleure acceptation de l’anglais chez les plus jeunes, les pluséduqués, les plus linguistes et surtout les plus habitués à un Internet « qui parle beaucoupanglais ».

• L’exigence de la langue nationale est un peu moins forte, mais elle demeure globalement

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VII.2. ATTENTES EXPRIMEES ET REACTIONS DANS LES PAYS CANDIDATS A L’ADHESION

VII.2.1 ATTENTES D’INFORMATION : CONTENU ET MOYENS ENVISAGEABLES

⇒ Les discours spontanés des interviewés et leur réactions sur le thème général de l’UnionEuropéenne (dans le chapitre III) ou sur celui de la perspective de l’adhésion (dans le chapitre VII)mettaient en évidence :

• Un besoin fortement ressenti, dans tous les pays et dans toutes les catégories de population, d’ensavoir plus et d’être mieux éclairé sur les conséquences de l’adhésion pour le pays, et pour sapropre vie à l’avenir : quels en seront les « coûts » et les conditions.

• L’expression inégale d’un intérêt plus large pour l’Union Européenne, ses actions, ses projets,ses objectifs, son fonctionnement, etc.

Cet intérêt, cette curiosité intellectuelle, sont particulièrement visibles en Roumanie (avec unvéritable appétit de savoir), en Hongrie, en Slovénie, à Chypre, et en République Slovaque chez lescitoyens les plus ouverts à l’Union.

On les décèle également, mais moins fortement chez les Tchèques et chez les Estoniens du niveausocio-économique moyen-supérieur.

Ils sont en revanche peu présents en Pologne (encore qu’ils puissent être éveillés comme lemontrent les réactions aux documents d’information présentés) et en Lettonie, où le caractèredominant des peurs fait qu’on s’y concentre presque exclusivement sur les implications directes del’adhésion, avec un très fort besoin de réassurance.

⇒ Lorsqu’on les amène à revenir spécifiquement sur ce qu’on pourrait faire pour « mieux fairesavoir, mieux faire comprendre, ou mieux faire sentir ce que fait l’Union Européenne et en quoicela nous concerne », on peut observer en outre (et peu ou prou dans tous les pays) :

• Un besoin de transparence qui s’exprime par exemple par le souhait d’entendre parler à la foisdes aspects positifs et négatifs, des bénéfices et des contraintes ou des efforts à faire, et parfoisaussi par la demande que les responsables du pays rendent compte de l’évolution du processusd’adhésion.

Le fait d’en savoir assez peu dans ces domaines, de n’entendre parler que du positif dans lesdéclarations publiques (ou a contrario, que du négatif pour certains Roumains), nuit à la crédibilitédes informations communiquées et est potentiellement anxiogène.

• Un besoin de débat qui lui est corrélé : ne pas être seulement destinataire d’une informationvenue « d’en haut » et unilatérale, mais entendre différents points de vue, prendre connaissancedes divers arguments favorables et défavorables, et être ainsi mieux à même de se former uneopinion et de moins ressentir le processus comme inéluctable, inexorable, et s’imposant au citoyensans explication et sans qu’il en soit fait partie prenante.

Ce besoin s’exprime tout particulièrement bien sur dans les pays les plus eurosceptiques.

• Un besoin aussi de « sentir » l’Union Européenne – qui paraît plus caractéristique des personnesde niveau socio-économique moyen-inférieur dans certains pays, exprimant par exemple le souhaitd’entendre des citoyens d’autres pays, membres de l’Union Européenne, et notamment adhérentsrécents, dire quelles en ont été les implications sur leur vie quotidienne.

⇒ En ce qui concerne les moyens ou relais de cette information vers le grand public :

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• On évoque partout évidemment les médias, télévision d’abord, radio et presse ensuite, mais enqualifiant et en précisant ce qu’on en attend : programmes spécifiques, interviews ou dossiersréalisés par des journalistes réputés, compétents et objectifs, émissions de débats, témoignages de« leaders d’opinion » qui vivent déjà l’Europe de par leur spécialité ou leur activitéprofessionnelle, etc.

Il n’y a pas là de différence fondamentale avec ce qui s’exprime dans les Etats membres. On peuttoutefois noter la référence spontanée, dans plusieurs pays (Pologne, République Tchèque,Hongrie notamment), aux « experts », universitaires ou intellectuels, valorisés et respectés pourleur hauteur de vue.

• Internet n’est cité que très occasionnellement – la faiblesse du taux d’accès à ce nouveau médiadans la plupart de pays candidats suffisant à l’expliquer.

• Dans quelques pays est émise l’idée de relais de proximité dans les collectivités locales : c’est lecas à Chypre (élus locaux) ou en Roumanie.

• Quelques uns suggèrent des documents écrits concis et explicatifs (certains Polonais, certainsSlovaques), mais plus nombreux sont ceux qui évoquent cette hypothèse pour la rejeter, au nom del’idée que « personne ne les lira ».

• L’école, comme moyen de sensibiliser dès le plus jeune âge à ce qu’est l’Union Européenne n’estque très rarement mentionnée, contrairement à ce qu’on observe dans les Etats membres ; il estvrai que, dans les pays candidats, le besoin d’informer d’abord les adultes consiste une prioritéévidente.

⇒ Pour ce qui concerne la forme et le ton de la communication, les citoyens des pays candidats ne cemontrent pas différents de ceux des Etats membres pour demander clarté, absence de langagetechnocratique et de « langue de bois » politique, et vocabulaire accessible au public le plus large.

⇒ Comme dans les Etats membres, on testait les réactions des participants des discussions à diverseshypothèses de « médiateurs » de l’information sur l’Union Européenne :

• Un Ministre de notre gouvernement

• Le ministre des Affaires Européennes d’un autre pays

• Un des Commissaires européens

• Votre maire ou votre député, localement

• Un député du Parlement Européen

• Un journaliste spécialiste des affaires européennes

• Un citoyen d’une autre nationalité européenne qui vit et travaille dans notre pays

• Un étudiant qui revient d’un an d’études dans un autre pays européen

Spontanément, et comme dans les Etats membres d’ailleurs, le personnel politique national est l’objetd’une réaction très générale de rejet.

• Un Ministre du gouvernement national est un type de médiateur très souvent a priori discréditéà la fois pour son absence d’objectivité (parce qu’il exprime un point de vue partisan, parfois parcequ’il est soupçonné de rechercher son intérêt personnel), ou parce que sa compétence est fortementmise en doute.

Quelques exceptions se font jour à l’égard de personnalités reconnues pour leur compétence et leurintégrité : ainsi pour le négociateur tchèque de l’adhésion, déjà évoqué plus haut, pour l’ancienPrésident de la République de Hongrie, respecté et maintenant « libéré » de ses affiliationspolitiques, ou pour « l’équipe de négociation » de l’adhésion de Chypre (d’ailleurs dirigée parl’ancien Président de la République M. Vassiliou).

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• Un Ministre des Affaires Européennes d’un autre pays européen présenterait le même défautd’être un homme politique, donc non « objectif », outre sa non connaissance présumée du pays ; ils’y s’ajoute l’obstacle de la langue – et le fait qu’on ne le connaît pas.

Certains Hongrois, Chypriotes, Slovaques et Roumains manifestent toutefois un intérêt relatif.

• Un élu du pays, maire ou député, ne constitue que rarement une proposition jugée commeintéressante : il s’agit aussi d’un politique, et on ne lui prête pas a priori de compétence sur lesaffaires communautaires.

Seuls certains Chypriotes, Slovaques et Roumains sont sensibles à la notion de proximité, maisavec des limites (relais plutôt que source d’information, ou « médiateur » pour les implications trèslocales de l’adhésion).

Les journalistes, on l’a vu dans les réactions spontanées, apparaissent souvent comme les« médiateurs » les plus crédibles et les plus naturels – avec les conditions déjà évoquées denotoriété, d’objectivité et de compétence qui signifient qu’il ne s’agit pas dans l’esprit desinterviewés de tout journaliste, loin de là.

L’idée d’un Commissaire Européen pour informer sur l’Union Européenne est perçue dansl’ensemble positivement, quoique de manières diverses : plutôt favorablement en Slovénie, àChypre, en Slovaquie et en Roumanie (avec dans ces deux derniers pays un désir de « dialogue »avec lui), ainsi que chez certains Polonais et Hongrois ; avec un rejet total en Lettonie (son biaisprocommunautaire évident le disqualifie d’emblée), de façon assez neutre ailleurs.

En positif, il y a l’idée de compétence sur les questions communautaires, de neutralité plus grandeque celle des « politiques » ; en négatif, l’idée que ce n’est pas de lui qu’on entendra les argumentsopposés à l’adhésion qu’on a besoin d’entendre aussi, et la distance perçue avec un personnagegénéralement totalement inconnu.

Celle d’un député au Parlement Européen est moins retenue. En gros, on lui prête les mêmesqualités qu’au Commissaire, mais affadies, et par ailleurs les « tares » inhérentes aux politiques.

L’hypothèse d’un citoyen d’un Etat communautaire vivant dans le pays, quand elle estsuggérée, suscite des réactions plus positives que dans les Etats membres où elle étaitlargement rejetée. Elle retient l’attention de Polonais, de Hongrois, de Tchèques, de Slovaques,d’Estoniens et de Lettons (particulièrement dans les catégories socio-économiques moyennes-inférieures), qui y voient à la fois la possibilité de « sentir » l’Union Européenne plusphysiquement et de pouvoir s’informer des conséquences concrètes positives ou négatives qu’apour lui l’appartenance de son pays à l’Union.

Bien entendu, le point de vue d’un seul citoyen communautaire ne suffirait pas ; on souhaiteraitalors en rencontrer ou en entendre plusieurs.

Celle d’un étudiant du pays rentrant d’un séjour dans un Etat de l’Union suscite en gros lemême type de réaction, avec des réserves plus grandes sur la subjectivité de la jeunesse, sacapacité d’enthousiasme sans doute trop grande, et les limites de sa compétence en la matière ;cela peut constituer une source d’éclairage modeste et ponctuelle parmi d’autres.

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VII.2.2 REACTIONS A L’IDEE DE VISITES DE LA COMMISSION EUROPEENNE

⇒ L’idée d’une visite de la Commission Européenne attire en moyenne davantage que dans les Etatsmembres, quoique de façon inégale d’un pays à l’autre.

Abstraction faite de la probabilité et de la possibilité matérielle de se trouver un jour à Bruxelles, lescitoyens des pays candidats voient de manière plus nette les institutions communautaires comme des lieuxoù se préparent des décisions d’une grande importance pour l’avenir de leur pays.

L’intérêt de principe apparaît particulièrement grand dans des pays caractérisés par un sentimenteurofavorable ou par de fortes attentes à l’égard de l’Union Européenne (Roumanie, Hongrie, Slovénie,Chypre, République Slovaque), mais aussi dans le cas inverse de la Lettonie, où c’est la force des craintesqui entraîne la réaction de saisir une telle occasion d’en apprendre davantage.

⇒ En ce qui concerne les attentes sur le contenu de telles visites, on retrouve ici logiquement celles quis’expriment plus généralement à propos de l’information sur l’Union Européenne.

• En premier lieu, en savoir plus sur les conséquences de l’adhésion pour son pays – et pour sapropre vie personnelle ou professionnelle future – ou sur les conditions de l’adhésion et ledéroulement du processus

• En second lieu, et surtout chez les plus ouverts a priori à l’Europe, acquérir une meilleureconnaissance de « culture générale » de l’Union : ses actions, ses projets, son fonctionnement,etc.

On n’y reviendra pas ici en détail. On peut observer que ces attentes ne sont pas fondamentalementdifférentes de celles qu’on observe chez les citoyens des Etats membres interrogés sur le mêmesujet ; mais leur hiérarchie n’est pas identique.

En ce qui concerne la forme

• On retrouve, comme chez les citoyens des Etats membres, le souhait de « sentir » l’institutionet le désir de dialogue et d’échange : visiter les lieux, assister à une réunion de la Commission,s’entretenir avec un Commissaire ou plus réalistement avec des fonctionnaires qui y travaillent, demanière informelle, etc.

• En même temps, le sentiment qu’ont les interviewés d’une faible connaissance des questionscommunautaires (même quand celle-ci n’est pas si médiocre qu’ils ne le croient) les amène sansdoute davantage à vouloir « apprendre » des faits de base sur l’Union, son histoire et sa réalitéd’aujourd’hui et se les faire expliquer.

Selon les individus, cela peut passer – en dehors du contact physique nécessaire avec despersonnes – par des films ou des présentations vidéo assez structurées et formalisées, ou par desmoyens permettant de constituer « son propre menu ».

⇒ Les réactions aux 4 hypothèses de styles de visite sont les suivantes :

a) « Une série d’exposés par différents responsables de la Commission qui vous donnent unpanorama d’ensemble des politiques communautaires »

Cette proposition, si elle n’est pas la plus choisie, n’est pas l’objet de la même désaffectionque chez les citoyens des Etats membres.

Même si certains redoutent le caractère trop formel et « ennuyeux » que risque d’avoir une tellevisite, d’autres y voient en positif d’une part le contact direct avec des responsablescommunautaires en chair et en os, et d’autre part l’occasion de se faire présenter un panoramacomplet (notamment personnes de catégories socio-économiques moyennes-supérieures dans lespays où la faveur et la curiosité envers l’Union sont les plus grandes).

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b) « Une réunion en petits groupes avec des responsables de la Commission à qui vous pourriezposer toutes les questions que vous souhaitez »

Comme dans les Etats membres, cette proposition est celle qui est de loin la mieux accueillie.

Elle répond presque idéalement au besoin ressenti de contact direct, de dialogue, d’interactivitépersonnelle, qui s’exprimait déjà spontanément.

Seuls quelques-uns tendent à écarter cette hypothèse, pensant qu’ils en savent trop peu pour être enmesure de poser des questions pertinentes – d’autres soulignant qu’ils s’y prépareraient à l’avancepour pouvoir le faire.

c) « Un centre de visites équipé de nombreuses bornes informatiques interactives, d’utilisationtrès simple, qui vous permettent de vous informer en choisissant les questions qui vousintéressent »

Cette proposition paraît plutôt mieux reçue que dans les Etats membres, au moins danscertains pays – et davantage, semble-t-il, dans les catégories sociales moyennes-supérieures etchez les habitants des grandes villes.

Des Polonais, Des Hongrois, des Tchèques, des Estoniens, des Slovènes et des Roumainsmanifestent par exemple leur intérêt pour une forme de prise de connaissance qui leur permette apriori d’accéder à tout type d’information en leur laissant la liberté de choix – bien qu’il y manquele contact physique direct.

En fait, ils la voient comme un outil complémentaire du contact personnel, un élément du« menu » de la visite de la Commission.

Les réactions paraissent en revanche particulièrement peu enthousiastes à Chypre et en RépubliqueSlovaque, dans l’échantillon des personnes interrogées, qui insistent très fortement sur le caractèrepersonnel nécessaire de la relation.

d) « Un centre de visites équipé de bornes du même type, mais où on accède à l’information sousforme de jeux interactifs »

Comme dans les Etats membres, cette proposition est l’objet d’un rejet très général : lesérieux et l’importance des questions communautaires apparaissent à la très grande majorité, danstous les pays, comme incompatibles avec des formes trop ludiques, qui ne pourraient convenirqu’aux jeunes et aux enfants.

⇒ "L'examen de ces réactions n'amène pas à modifier fondamentalement les réflexions présentées, àpartir de l'analyse des attitudes des citoyens communautaires, sur les lignes directrices souhaitables del'organisation des visites"

⇒ En ce qui concerne les langues des visites, l’usage de la langue nationale des visiteurs est partoutsouhaitée, au nom des mêmes raisons que pour les citoyens des Etats membres : respect de l’égalité detraitement (très fréquemment exigé par exemple par les Polonais), et clarté de la compréhension.

Les citoyens des plus petits pays, au moins pour une partie d’entre eux, conscients de la faiblediffusion de leur langue nationale, font preuve toutefois d’une plus grande souplesse sur ce point :ainsi pour les Estoniens (dans les catégories moyennes-supérieures), les Slovènes, une partie desChypriotes – qui accepteraient l’usage de l’anglais – et des Lettons – disposés à accepter l’anglais oul’allemand.

Il en va de même de citoyens slovaques et roumains – peut-être parce que la perspective d’adhésion deleur pays est à plus long terme que pour ceux de la « première vague » et, pour les seconds, parce quebeaucoup sont familiers de la langue française (l’anglais étant cité par eux en deuxième lieu).

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VII.2.3 REACTIONS A L’IDEE DE VISITES VIRTUELLES DE LA COMMISSION EUROPEENNE

⇒ Par rapport aux citoyens des Etats membres, ceux des pays candidats manifestent un intérêtnettement plus sélectif pour l’idée de visite virtuelle à distance de la Commission, utilisant le moyend’Internet.

La faiblesse de l’équipement de la population en ordinateurs et en accès à Internet, le coût parfois« prohibitif » de ces accès, ou encore la non familiarisation de beaucoup avec ces outils apparaissentd’emblée comme limitant le champ possible de son utilisation.

L’absence de contact personnel est également évoqué comme élément qui limite l’intérêt, encore qu’onadmette cette limite – mais en estimant par exemple qu’on ne pourra guère trouver par un tel moyen quedes informations « de base » sur l’Union Européenne, sans la possibilité de « creuser » pour biencomprendre comme dans un dialogue interpersonnel.

D’autres soulignent qu’il s’agit là d’un moyen de communication « passif », au sens où il faut déjà avoirun intérêt et une curiosité personnelle pour l’Union Européenne pour envisager de se connecter à son site– propos tenus notamment dans des pays eurosceptiques comme les Etats baltes étudiés.

Les plus intéressés par ce moyen, parmi les pays objets de l’étude, sont sans doute les Tchèques de lacapitale, les Slovènes et les Chypriotes des catégories socio-économiques moyennes-supérieures ainsi queles Estoniens des mêmes milieux (en dépit de leur assez faible appétence pour l’Union, mais grâce auniveau moyen d’équipement assez élevé qu’a atteint le pays) – ainsi que certains Slovaques et Roumainsqui expriment ainsi leur soif d’informations de toute nature.

⇒ Les attentes de contenu ne diffèrent pas de celles qui s’expriment à propos des visites directes.

Quant à la forme, peu des interviewés, par manque de familiarité avec ces outils, s’aventurent à formulerdes suggestions précises ; rien en tout cas n’apparaît en contradiction avec les observationsprésentées sur le même sujet dans l’analyse similaire relative aux Etats-membres.

⇒ En ce qui concerne enfin l’aspect linguistique, la souplesse à laquelle étaient prêts des citoyens decertains pays, à propos de visites physiques qui ne soient pas nécessairement conduites dans leur langue,est nettement moins grande.

Cela résulte de la considération pratique qu’il doit être beaucoup plus facile de traduire en différenteslangues le contenu d’un site Internet que de trouver au sein de la Commission des personnes ayant lapratique de langues minoritaires et peu répandues.

Les citoyens de ces pays expriment au moins la demande que les informations qui concernentdirectement leur pays et son adhésion soient disponibles dans la langue nationale.

Seuls, peut-être, font exception les Chypriotes qui réagissent un peu comme les interviewés des Etatsmembres actuels, en évoquent comme langue usuelle d’Internet l’anglais – qui est d’ailleurs largementpratiqué dans leur pays – même si leur préférence va naturellement à la langue grecque.

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CHAPITRE VIII :

REACTIONS FINALES SUR LA COMMISSION EUROPEENNE

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VIII.1. REACTIONS ENREGISTREES DANS LES ETATS MEMBRES

VIII.1.1 REACTION SUR L’IDENTITE DU COMMANDITAIRE DE L’ETUDE

⇒ Les participants des groupes étaient informés, en fin de discussion, du fait que cette étude étaitréalisée à la demande de la Commission Européenne.

• Les réactions à cette initiative de la Commission, et plus généralement à la discussion à laquelleils venaient de participer, sont dans la quasi-totalité des groupes (58 au total dans l’ensemble des15 Etats membres) soit très majoritairement, soit unanimement positives.

Ce n’est que dans 2 groupes suédois (sur les 4) que, sans être négatifs, une partie des interviewésexpriment des réserves (en se demandant si la Commission « veut vraiment savoir ce qu’ilspensent » ou « donner sa version »).

⇒ Les commentaires qui accompagnent ces réactions sont souvent extrêmement forts ; ils peuvent êtrerésumés comme suit :

• On a appris des choses qu’on ignorait souvent très largement.

• Il est utile que la Commission sache à quel point nous ne savons rien.

• La Commission veut savoir ce que pensent les citoyens et c’est la première fois que quelqu’unnous demande ce qu’on pense de l’Union Européenne.

• La Commission se montre à l’écoute, disposée à se remettre en question, à accepter la critique, elleveut la transparence.

• La Commission « va vers les gens », se rapproche d’eux.

• C’est la première fois qu’on a l’occasion de débattre avec d’autres (que ses proches, ses relationshabituelles), d’échanger des points de vue sur ce sujet.

Ce dernier type de commentaire nous paraît très important : les participants des discussions se sontsentis acteurs du débat sur l’Europe, et non seulement récepteurs passifs d’informations.

Les seules réserves (en dehors de celles d’une partie des interviewés suédois mentionnées plushaut) consistent à savoir comment les propos qui se sont exprimés vont être pris en compte, surquels résultats ils vont déboucher : interrogations, mais jamais doutes systématiques a priori qu’onn’en fasse rien.

⇒ Le processus de discussion auquel les interviewés ont participé, et ce qu’ils y ont appris, amène unepartie d’entre eux, dans des pays fortement ou partiellement eurosceptiques :

• A reconnaître qu’ils pouvaient avoir des vues biaisées sur l’Union Européenne, qu’ils sontmaintenant disposés à réviser au moins en partie leur point de vue.

• Ou au moins à déclarer leur intention de prêter davantage d’attention à l’avenir aux sujetscommunautaires.

• Parfois, explicitement, à sentir l’Union Européenne plus proche.

Citons à cet égard quelques réactions caractéristiques enregistrées dans différents pays :° Dans un groupe grec, l’idée, certes, que la Commission est loin, mais qu’on n’en sait au

fond pas plus sur son propre gouvernement, et que celui-ci n’en sait pas plus « sur ce quenous pensons et sur la manière dont nous vivons ».

° Dans les groupes allemands, la disposition affichée par une moitié des participants àchanger leur point de vue.

° Dans les groupes néerlandais, un phénomène similaire et des déclarations fréquentes quecela a augmenté leur intérêt pour l’Union Européenne.

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° Au Royaume Uni, l’idée assez répandue que les discussions ont donné l’occasiond’entendre une information impartiale sur l’Union Européenne, à l’inverse de ce quepublient les tabloïds, et l’aveu d’un plus grand intérêt désormais pour elle.Certains ajoutent même qu’avoir pour la première fois une telle information leur sera utile,dans la perspective d’un référendum sur l’Euro, pour voter de façon plus éclairée.

° Dans les groupes danois, des déclarations « qu’on sort de la discussion avec uneperspective différente ».

° Dans un groupe suédois, le regret qu’on ne trouve pas commentée de façon adéquatel’Union Européenne dans la presse du pays.

° Dans les groupes autrichiens, l’idée que l’Union Européenne « est un peu plus proche » ; etnotamment dans les groupes de niveau socio-économique moyen-inférieur où laconnaissance de l’Union Européenne était plus faible au départ, l’intention déclarée « d’yêtre plus attentifs ».

Bien sûr, il convient de relativiser ces déclarations d’intention proférées « à chaud », immédiatement àl’issue des réunions ; il n’en est pas moins évident qu’il est possible d’amener, en quelques heures, bonnombre de citoyens (parfois fortement) sceptiques à envisager de réviser des positions qu’ilscommencent à ressentir comme stéréotypées.

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VIII.1.2 CREDIBILITE D’UNE PROPOSITION DE POSITIONNEMENT DE LA COMMISSION COMME FER DE LANCE DEL’AVENIR DE L’EUROPE

⇒ Dans un ultime thème de discussion, on proposait aux interviewés un texte présentant laCommission comme le principal moteur de l’avenir de l’Europe : thème introduit et texte établi àl'initiative du consultant coordinateur de l’étude, qui souhaitait tester les réactions à une présentationradicalement à l'inverse des stéréotypes souvent diffusés sur cette institution.

L’un des rôles de la Commission Européenne est de réfléchir aux problèmes qui se posent pour l’avenir des payseuropéens, et de faire des propositions qui sont ensuite discutées avec les Etats membres. Certains considèrent que laCommission est mieux placée pour cela que les Etats membres eux-mêmes :

a) D’abord parce que beaucoup de problèmes nécessitent aujourd’hui d’être traités à un niveau plus global quele niveau nationalb) Ensuite parce que la Commission est composée de personnes de toutes les nationalités, et qu’elle bénéficieainsi d’une plus grande diversité de points de vue et d’expériencesc) Enfin parce que, étant neutre et indépendante, elle peut plus facilement faire une analyse objective desproblèmes pour proposer des mesures qui ne sont pas toujours populaires, et que les gouvernements de chaquepays n’osent pas prendre eux-mêmes, même s’ils pensent aussi qu’elles sont nécessaires.

D’autres, naturellement, ne sont pas d’accord avec cette idée, et ne veulent pas d’un tel rôle pour un organe qu’ilsconsidèrent comme trop loin des réalités locales et qui, n’étant pas élu, n’est pas directement responsable devant lescitoyens.

Le panorama des réactions typiques à cette présentation dans les différents pays est le suivant – avec uncertain nombre de surprises spectaculaires :

• Agrément très général ou quasi-unanime avec les trois arguments au Portugal, en Irlande, enBelgique, en Finlande, mais aussi aux Pays-Bas et au Danemark pourtant fortementeurosceptiques.

Citons parmi les commentaires les plus frappants :° Au Portugal, l’idée qu’une Commission neutre « ne subit pas les pressions », alors que « les

gouvernements parfois n’osent pas s’attaquer aux sujets sensibles ».° En Irlande, l’opinion que « la moitié du problème irlandais est que notre gouvernement a

peur de prendre des décisions qui ne marchent pas et de perdre le soutien de l’opinion ».° En Belgique, la reconnaissance du fait que la Commission sert commodément de « bouc

émissaire », que sa distance plus grande avec « le terrain » par rapport aux gouvernementsnationaux a la contrepartie positive de lui donner « un regard plus large » et, dans un desgroupes, le fait qu’elle ne soit pas un organe élu « qui n’est pas forcément une mauvaisechose ».

° Au Danemark, l’opinion que la neutralité de son statut (qu’on ignorait) lui permet de jouerle rôle de « broker entre les Etats membres » et d’être la garantie de l’intérêt commun –certains ajoutant même que ce doit être « la base de l’Union Européenne ».

• Agrément assez général avec les deux premiers arguments, partiel avec le troisième, enGrèce, en Italie, au Luxembourg et en Autriche.

° En Grèce, ces réserves sont en fait modérées, les termes du débat portant surtout sur larépartition entre domaines qui devraient être de la responsabilité exclusive de l’Union etdomaines importants où l’Etat national doit rester en première ligne.Pour les premiers (l’environnement par exemple), l’idée s’exprime par exemple que laCommission doit imposer des mesures « qui font mal aux gouvernements et auxindustries ».

° Au Luxembourg, si la sphère de compétence communautaire est vue a priori comme trèslarge, les avis sont plus partagés sur la neutralité d’un organisme non élu comme laCommission – certains exprimant d’ailleurs des doutes à ce sujet. Pour une partie desinterviewés, le pouvoir d’un tel organisme « peut être dangereux » ; pour une autre onretrouve au contraire l’idée positive qu’il peut « se permettre plus ».

° En Autriche (où certains doutes se font alors jour également sur sa neutralité), un débats’engage de même sur la définition des domaines de compétence exclusive souhaitable del’Union Européenne (l’environnement en étant à nouveau un exemple) – mais dans ceux-là,on estime généralement que la Commission doit « affirmer sa neutralité » et exercerpleinement son autorité.

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• Agrément général en Espagne et en France sur les deux premiers arguments, maiscontestation du troisième qui reflète en fait une attente de plus grande autorité de laCommission.

° En Espagne, la crédibilité de la neutralité reste entachée de la conviction que les Etatsmembres les plus puissants (la France et l’Allemagne) mènent le jeu, avec les frustrationsque l’on sait à cet égard.

° En France, il y a un assez grand scepticisme sur le troisième argument du fait « du faiblepouvoir de la Commission si un Etat membre veut bloquer » le processus.

• Agrément en Allemagne sur les deux premiers arguments, mais maintien de fréquentesattitudes de distance et de suspicion par rapport à la Commission.

° Une partie des interviewés souscrit à ce troisième argument, d’autres maintenant despréventions qui ont pour principale origine « les scandales » qui s’y sont produits et quirenforcent la critique démocratique de non-responsabilité devant les citoyens.

• Attitudes partagées au Royaume Uni° Certains admettent dans l’ensemble le bien fondé des trois arguments, en reconnaissant à

nouveau que le Royaume Uni est « conditionné par les tabloïds ».° D’autres, assez nombreux, continuent à penser que la Commission est trop éloignée de

leurs réalités pour pouvoir jouer le rôle revendiqué dans ce texte – ou ne comprennent pasla notion de sa neutralité « puisque les Commissaires sont nommés par les Etats membres ».

• Acceptation dans l’ensemble du premier argument en Suède, mais large indifférence audeuxième, et doutes majoritaires sérieux sur la neutralité et l’intégrité de la Commission.

° On y doute généralement que quiconque puisse être neutre, chacun étant influencé par saculture d’origine et par le climat de l’opinion ; les mêmes soupçonnant en outre lesCommissaires d’avoir leurs positions « colorées » par « la promesse d’une autre fonction »à la Commission ou dans leur propre pays d’origine.

⇒ Globalement, ces réactions montrent qu’un positionnement fort et ambitieux de la Commission,pour peu qu’il soit explicité, peut rencontrer un assentiment très large.

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VIII.2. REACTIONS ENREGISTREES DANS LES PAYS CANDIDATS A L’ADHESION

VIII.2.1 REACTIONS SUR L’IDENTITE DU COMMANDITAIRE DE L’ETUDE

⇒ De la même manière que dans les Etats membres, les interviewés étaient informés, en fin de discussion,de l’identité de la Commission Européenne commanditaire de l’étude.

Les réactions à cette annonce sont quasi-unanimement positives – et souvent très fortement.

Il n’y a guère que 2 des groupes – sur un total de 28 – qui restent un peu réservés, tout en manifestantcependant leur approbation (1 en Pologne et 1 en Estonie).

⇒ Les commentaires qui accompagnent ces réactions sont dans l’ensemble de même nature que ceux quisont formulés dans les groupes des Etats membres.

• On y a appris beaucoup de choses qu’on ne savait pas ; on a maintenant une vue claire de ce qu’estet fait l’Union Européenne

• La Commission veut savoir ce que nous savons et ce que nous ignorons, pour préparer desmesures d’information

• Elle saura ce que nous pensons, ce que nous souhaitons, ce que nous craignons, dans les payscandidats

• Elle manifeste à notre égard, ce faisant, intérêt et respect

• Il est rare qu’on ait l’occasion de s’exprimer et d’échanger ses opinions sur l’avenir du pays.

Plus encore que dans les Etats membres, les participants se sentent fortement valorisés par ladémarche.

⇒ Le processus de discussion auquel ils ont participé les amène :

• Pour beaucoup d’entre eux, à déclarer leur intention de regarder avec plus d’attention et plusd’intérêt à l’avenir les informations sur les questions communautaires

• Parfois, à reconnaître – dans des pays quelque peu eurosceptiques – que l’éclairage qui leur aété donné peut les amener à considérer l’Union Européenne d’un œ il plus favorable

• Parfois aussi, à se sentir plus rassurés, dès lors qu’on prend la peine de consulter les citoyens

• Parfois également à souhaiter poursuivre ce type de débat plus en profondeur, armés d’unemeilleure connaissance de base qu’ils compléteraient par la recherche personnelle d’autresinformations.

Il conduit indéniablement à des attitudes plus favorables envers une Union Européenne perçuecomme plus proche, ou au moins moins lointaine.

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VIII.2.2 CREDIBILITE D’UNE PROPOSTION DE POSITIONNEMENT DE LA COMMISSION COMME FER DE LANCE DEL’AVENIR DE L’EUROPE

⇒ Les interviewés des pays candidats étaient invités à réagir, comme ceux des Etats membres, au texteprésentant la Commission comme moteur de l’avenir de l’Europe.

L’un des rôles de la Commission Européenne est de réfléchir aux problèmes qui se posent pour l’avenir des payseuropéens, et de faire des propositions qui sont ensuite discutées avec les Etats membres. Certains considèrent que laCommission est mieux placée pour cela que les Etats membres eux-mêmes :

a) D’abord parce que beaucoup de problèmes nécessitent aujourd’hui d’être traités à un niveau plus global quele niveau nationalb) Ensuite parce que la Commission est composée de personnes de toutes les nationalités, et qu’elle bénéficieainsi d’une plus grande diversité de points de vue et d’expériencesc) Enfin parce que, étant neutre et indépendante, elle peut plus facilement faire une analyse objective desproblèmes pour proposer des mesures qui ne sont pas toujours populaires, et que les gouvernements de chaquepays n’osent pas prendre eux-mêmes, même s’ils pensent aussi qu’elles sont nécessaires.

Ces réactions sont globalement les suivantes :

• Agrément très majoritaire avec les trois arguments en Roumanie et en Hongrie – où lesinterviewés se révèlent, entre autres, très sensibles au troisième sur la neutralité et l’indépendanceporteuses de courage politique dont les gouvernements risquent de manquer.

• Agrément assez large avec l’ensemble de l’argumentation également en Slovénie, à Chypre eten République Slovaque – avec davantage de discussion sur la nécessaire prise en compte desréalités locales.

• Bonne acceptation de l’argument de globalité des problèmes en République Tchèque, et d’unrôle pour la Commission d’éclairage de l’avenir et d’élaboration de grandes orientations – maissouci nettement plus grand d’une pratique de subsidiarité qui laisse un pouvoir de décisionimportant aux autorités nationales.

• Réactions similaires, mais plus réservées en Pologne et en Lettonie – où règnent des craintesprofondes sur la dilution de la capacité de décision nationale.

• Réactions moins positives sur la globalité des problèmes en Estonie (les questions locales étantfondamentales), mais bonne acceptation du troisième argument sur la neutralité etl’indépendance.

⇒ Globalement, ces réactions montrent la possibilité, à l’égard des citoyens des pays candidatségalement, d’un positionnement fort de la Commission comme éclaireur et coordinateur pourl’avenir de l’Europe – mais à condition d’éviter des formulations qui conduiraient à l’impressiond’une tutelle.

Il convient de mettre en avant l’expérience (reconnue très généralement) et de montrer comment celle-ci se renforce et s’enrichit avec la collaboration avec le niveau national.

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ANNEXE I :

ORGANISATION DE L’ETUDE.

DEFINITION DE LA POPULATION ETUDIEE

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⇒ La conception, l’analyse internationale et la synthèse de l’étude ont été assurées par OPTEM, titulairedu Contrat Cadre « Etudes Qualitatives » mis en place et géré par l’Unité chargée de l’analyse del’opinion publique

Les enquêtes sur le terrain et les analyses nationales ont été menées :

• Dans les 15 Etats-membres, par les différents instituts partenaires chargés de leur réalisation sousl’égide du Contrat Cadre : Echanges Marktforschung pour l’Allemagne, IFM pour l’Autriche,Yellow Window pour la Belgique, Vilstrup Research pour le Danemark, Escario y Asociados pourl’Espagne, Marketing Radar pour la Finlande, OPTEM, avec BVA pour la France, et pour leGrand Duché du Luxembourg, Focus pour la Grèce, MRBI pour l’Irlande, Market DynamicsInternational pour l’Italie, PQR pour les Pays Bas, Euroteste pour le Portugal, Andrew IrvingAssociates pour le Royaume Uni, et Valuescope pour la Suède.

• Dans les 9 pays candidats inclus dans leur champ, par des partenaires sélectionnés ad hoc :MEMRB pour Chypre, EMOR pour l’Estonie, Ad Hoc Plus pour la Hongrie, Baltic Data Housepour la Lettonie, BSM pour la Pologne, Markant pour la République Slovaque, Mareco pour laRépublique Tchèque, Data Media pour la Roumanie, et RM Plus pour la Slovénie.

⇒ L’enquête sur le terrain a comporté 86 discussions de groupe, d’une duré moyenne de trois heures

• 4 discussions de groupe ont été menées dans chacun des 15 Etats-membres (à l’exception duLuxembourg : 2 discussions) ainsi qu’en Hongrie, en Pologne, en République Slovaque, enRépublique Tchèque, et en Roumanie

• 2 discussions de groupe ont été menées à Chypre, en Estonie, en Lettonie et en Slovénie, ainsiqu’au Luxembourg.

Dans tous les cas, la population étudiée était celle des hommes et des femmes ( groupes mixtes)adultes de 25 à 60 ans (répartition équilibrée entre 25 à 39 ans et 40 à 60 ans), appartenant auxcatégories moyennes de la population :

• Dans 1 groupe sur 2 dans chaque pays, personnes membres d’un ménage appartenant auxcatégories socioprofessionnelles moyennes-supérieures des cadres supérieurs, professionslibérales ou chefs de petites et moyennes entreprises, et des professions intermédiaires (cadresmoyens, et techniciens supérieurs) – les cadres supérieurs et dirigeants de grandes entreprises oud’organisations publiques en étant exclus.

En outre, tous les participants de ces groupes devaient avoir achevé leurs études secondaires et aumoins entamé des études universitaires ou post-secondaires.

• Dans 1 groupe sur 2 dans chaque pays, personnes membres d’un ménage appartenant auxcatégories socioprofessionnelles moyennes-inférieures des petits artisans et commerçants, desemployés, de la maîtrise et des ouvriers ou personnels de service – les personnes en situation deprécarité socio-économique en étant exclues.

En outre, les participants de ces groupes ne devaient pas avoir amorcé d’études universitaires oupost-secondaires.

On excluait, par ailleurs, du champ du recrutement, des personnes :

• Encore en cours d’étude

• Travaillant ou ayant un membre de leur famille proche qui travaille dans les domaines :° Des études de marketing et d’opinion, du marketing, de la publicité, de la communication,

du journalisme° De l’agriculture (afin d’éviter le risque de monopolisation de la discussion par le thème de

la Politique Agricole Commune)° D’action publique ou privée directement liée aux affaires européennes.

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Dans les pays objets de 4 discussions de groupe, celles-ci étaient réparties entre 2 lieux (1 de chaqueniveau socioprofessionnel et éducatif dans chaque lieu) :

• Une très grande agglomération urbaine, le plus souvent la capitale du pays° Dans les Etats-membres : Cologne en Allemagne, Vienne en Autriche, Copenhague au

Danemark, Madrid en Espagne, Helsinki en Finlande, Paris en France, Athènes en Grèce,Dublin en Irlande, Milan en Italie, Amsterdam aux Pays Bas, Lisbonne au Portugal,Londres au Royaume Uni, Stockholm en Suède.En Belgique, la nécessité de représenter aussi la diversité linguistique du pays a amené àréaliser les deux discussions de groupe de la catégorie moyenne-supérieure respectivementà Bruxelles et à Anvers.

° Dans les pays candidats : Budapest en Hongrie, Varsovie en Pologne, Bratislava enRépublique Slovaque, Prague en République Tchèque, Bucarest en Roumanie.

• Une ville moyenne, au sein d’une région conservant un caractère rural, et a priori moinsdéveloppée

° Dans les Etats-membres : Leipzig en Allemagne (ville choisie en outre pour son caractèreex-est allemand), Amstetten en Autriche, Kolding au Danemark, Ciudad Real en Espagne,Hämeenlinna en Finlande, Dieppe en France, Kavala en Grèce, Kilkenny en Irlande,Alessandria en Italie, Zwolle aux Pays Bas, Santarém au Portugal, Ipswich au RoyaumeUni, Jönköping en Suède.En Belgique, les deux groupes de la catégorie moyenne-inférieure ont été réunisrespectivement à Namur et dans l’agglomération anversoise.

° Dans les pays candidats : Salgótarjan en Hongrie, Inowroclaw en Pologne, Martin enRépublique Slovaque, Prerov en République Tchèque, Alexandria en Roumanie.

Dans les pays objets de 2 discussions de groupe, celles-ci étaient organisées dans une des villesimportantes du pays en dehors de la capitale (sauf au Grand Duché du Luxembourg ou l’inexistenced’autre ville importante a conduit à les organiser à Luxembourg-ville, en prenant soin toutefois derecruter à la fois des habitants de cette ville et des résidents de communes plus éloignées de sa région) :

° Pafos à Chypre, Tartu en Estonie, Liep?ja en Lettonie, Maribor en Slovénie

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ANNEXE II :

COMPOSITION SOCIO-DEMOGRAPHIQUE

DES GROUPES DE DISCUSSION

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COMPOSITION SOCIODEMOGRAPHIQUE DES GROUPES DE DISCUSSIONS

Pays Nombrede groupes

Groupes socio-économiques moyens-supérieurs Groupes socio-économiques moyens-inférieurs

Femmes Hommes 25-40 ans 41-60 ans Femmes Hommes 25-40 ans 41-60 ans

Allemagne

Autriche

Belgique

Danemark

Espagne

Finlande

France

Grèce

Irlande

Italie

Luxembourg

Pays Bas

Portugal

Royaume Uni

Suède

Chypre

Estonie

Hongrie

Lettonie

Pologne

République Slovaque

République Tchèque

Roumanie

Slovénie

4

4

4

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4

4

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ANNEXE III :

GUIDE D’ANIMATION DES DISCUSSIONS

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THEME I.

Tout d’abord, j’aimerais que nous parlions de la situation de (notre pays), de ce qui va bien, de ce qui va mal, de lafaçon dont il a évolué ces dernières années, et de la façon dont il pourrait ou devrait évoluer à votre avis, desprincipaux défis et enjeux pour (notre pays) dans les 10 ou 20 ans qui viennent.Ø Réactions spontanéesØ Puis explorer :

û Attitudes d’espoir ou de crainteû Optimisme ou pessimisme personnel / optimisme ou pessimisme pour le paysû Nature des défis / enjeux perçusû Manière dont on imagine que le pays aborde ces défis / enjeux (comment, en bonne position ou non, etc.)û Evocations spontanées ou non de l’Europe à ce stade

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⇒ JE VOUDRAIS MAINTENANT QUE NOUS PARLIONS DE L’EUROPE. QUAND ON PARLE DE L’EUROPE, A QUOICELA VOUS FAIT-IL PENSER, QUELLES SONT LES CHOSES QUI VOUS VIENNENT D’ABORD A L’ESPRIT ?

Ø Réactions spontanéesØ Puis explorer :

û Comment on appréhende l’Europe : comme entité géographique (avec quelles limites), politique,historique, culturelle, etc.

û Attitudes spontanées positives ou négatives : sur quoi et pourquoiû Sentiment d’appartenanceû Liens entre l’Europe et l’avenir du pays.

⇒ NOUS SOMMES (NATIONALITE) MAIS NOUS SOMMES AUSSI EUROPEENS. DANS NOTRE VIE PERSONNELLE OUPROFESSIONNELLE, ON PEUT AVOIR L’OCCASION D’ETRE EN CONTACT AVEC D’AUTRES EUROPEENS, AVECD’AUTRES PAYS EUROPEENS, D’EN ENTENDRE PARLER, DE VOIR DES CHOSES SUR EUX, ETC. POUVEZ-VOUSM’EN PARLER, ME DONNER DES EXEMPLES, ET ME DIRE AUSSI QUELLES IMPRESSIONS CELA VOUS A LAISSE,CE QUE VOUS EN RETIREZ : QU’EST-CE QUI FAIT QU’ON SENT, OU NON, QUE NOUS AVONS QUELQUE CHOSEEN COMMUN AVEC LES AUTRES EUROPEENS ?

Ø Réactions spontanéesØ Puis explorer :

û Ce qui fait qu’on ressent concrètement l’Europe / les autres Européensû Sentiment et facteurs de proximité / de distance avec l’Europe / les autres Européensû De quelles sources, par quels canaux / relais / médiateurs

⇒ ET QU’EST-CE QUI POURRAIT FAIRE QUE NOUS NOUS SENTIONS DAVANTAGE EUROPEENS ?

Ø Réactions spontanéesØ Puis explorer :

û Facteurs possibles de plus grande proximitéû Propension, ou non, à une plus grande proximité.

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I.2.

⇒ SI NOUS ABORDONS MAINTENANT LE SUJET DE L’UNION EUROPEENNE, QU’EST-CE QUE C’EST, QU’EST-CEQUE ÇA REPRESENTE A VOS YEUX, QUE PEUT-ON EN DIRE ?

Ø Réactions spontanéesØ Puis explorer :

û Clarté ou flou des perceptionsû Contenu des perceptionsû Attitudes positives ou négatives : sur quoi et pourquoi ?û Lien entre l’Union Européenne et l’avenir du pays

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⇒ CEUX QUI ONT CONÇU ET DEVELOPPE CE PROJET D’UNION EUROPEENNE, ÇA REMONTE A QUAND, C’ETAITQUI, ET POUR QUOI FAIRE, DANS QUELS BUTS ? ET DANS QUELLE MESURE CES BUTS ONT-ILS ETEATTEINTS ?

Ø Réactions spontanéesØ Puis explorer :

û Connaissance des grandes étapes de l’histoire de l’Union Européenneû Acteurs du projet, à l’origine ou depuisû Perception et compréhension des objectifs poursuivisû Les buts atteints, encore à atteindre, ou ratés : quels sont-ils respectivement ?

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199

I.3.

⇒ IL Y A DES CHOSES QU’ON SAIT, ET D’AUTRES QU’ON SAIT MOINS BIEN SUR L’UNION EUROPEENNE. EN CEQUI VOUS CONCERNE, QU’EST-CE QUE VOUS EN SAVEZ, ET QU’EST CE QUE VOUS EN PENSEZ ?

Ø Réactions spontanéesØ Puis explorer :

û Perceptions plus détaillés des objectifs poursuivisû Ce dont s’occupe l’Union Européenne ; perception de l’existence de politiques communautairesû Evénements récents importantsû Comment fonctionne l’Union Européenne ; perception de l’existence d’institutions et de mécanismes de

décisionû Sentiment d’une opposition ou d’une intégration avec la politique nationaleû Eléments positifs, négatifs, ou incertains de perception : en quoi et pourquoi ?

⇒ CE QUE VOUS SAVEZ DE L’UNION EUROPEENNE, ÇA VIENT D’OU, DE QUELLES SOURCES, PAR QUELSCANAUX – EN PRENANT CES MOTS AU SENS LARGE : ÇA PEUT ETRE LA RUMEUR PUBLIQUE, LE BOUCHE AOREILLE, LES DISCUSSIONS QU’ON PEUT AVOIR DANS NOTRE VIE COURANTE, AUSSI BIEN QUE DES SOURCESD’INFORMATIONS A PROPREMENT PARLER

Ø Réactions spontanéesØ Puis explorer en détail :

û Sources : ce qui parvient des autorités communautaires / des autorités nationales / des autorités régionalesou locales / des acteurs de la vie économique et sociale / des acteurs de la société civile / d’autres citoyens

û Canaux : documents officiels / media (lesquels) / intermédiaires (lesquels) / bouche à oreille (par qui)û Opinions sur l’intérêt, la pertinence, la crédibilité des différentes sources et des différents canaux

⇒ IL Y A AUSSI CE QU’ON NE SAIT PAS OU CE QU’ON SAIT MAL. QUELLES SONT LES CHOSES SUR LESQUELLESVOUS AURIEZ LE BESOIN OU L’ENVIE D’EN SAVOIR PLUS, DE MIEUX COMPRENDRE A PROPOS DE L’UNIONEUROPEENNE

Ø Réactions spontanéesØ Puis explorer :

û Nature des attentes d’informationû Intensité des attentes

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I.4.

⇒ NOUS AVONS COMMENCE TOUT A L’HEURE A EVOQUER CE DONT S’OCCUPE L’UNION EUROPEENNE : IL Y ADES DOMAINES D’ACTION, DES MESURES, DES POLITIQUES, QUI SONT DEFINIS AU NIVEAU EUROPEEN.QU’EN SAVEZ-VOUS, ET QU’EN PENSEZ-VOUS ?

Ø Réactions spontanéesØ Recenser les domaines d’action / mesures / politiques communautaires (plus ou moins) connusØ Puis explorer pour chacun :

û Degré de connaissanceû Sources de connaissanceû Opinions sur la pertinence et la légitimité du niveau communautaire pour traiter de ce domaineû Opinions sur la manière dont l’Union Européenne s’occupe de ce domaine et l’efficacité de l’action

⇒ JE VAIS VOUS PRESENTER UN DOCUMENT SUR LES ACTIONS ET LES POLITIQUES QUI SONT DEFINIES ETCONDUITES AU NIVEAU COMMUNAUTAIRE, TELLES QU’ON PEUT LES DECRIRE DE MANIERE SYNTHETIQUE(DISTRIBUER FICHE A). VOUS ALLEZ PRENDRE LE TEMPS DE LE LIRE EN DETAIL, ET PUIS NOUS ENDISCUTERONS

Ø Réactions spontanées sur l’ensemble de la Fiche AØ Puis explorer : réactions à chacune de ses parties 1 à 14, sur les plans :

û De la compréhensionû De la crédibilité du contenuû Des attitudes : notamment ouverture à une intervention (accrue) de l’Union Européenne dans chacun des

domaines.

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I.5.

⇒ NOUS ALLONS REVENIR MAINTENANT SUR LE FONCTIONNEMENT DE L’UNION EUROPEENNE, SUR LAFAÇON DONT S’Y PRENNENT LES DECISIONS. COMMENT CELA SE PASSE-T’IL A VOTRE AVIS, QUI PARTICIPEAUX DECISIONS, COMMENT SONT-ELLES PRISES ET MISES EN Œ UVRE ?

Ø Réactions spontanéesØ Puis explorer :

û Degré de conscience de l’existence d’institutions communautaires : lesquelles, comment, en quels termesû Degré de conscience de mécanismes de décisionû Degré de conscience du rôle des Etats-membres dans la prise et l’application des décisionsû Sentiment de clarté / de complexitéû Comparaison avec les décisions politiques nationales : sont-elles beaucoup plus familières, beaucoup plus

claires, beaucoup plus faciles à comprendre ?

⇒ IL Y A, DANS LES TRAITES QUI ONT CREE L’UNION EUROPEENNE, DES INSTITUTIONS QUI, CHACUNE, ONTLEUR ROLE DANS LES PROCESSUS DE DECISION. JE VAIS VOUS DEMANDER CE QUE VOUS SAVEZ DECHACUNE D’ENTRE ELLES, DE SON ROLE, ET DE CE QUE VOUS EN PENSEZ.

Ø Explorer successivement les perceptions et les raisons des perceptions :û De la Commission Européenneû Du Conseil des Ministres de l’Union Européenneû Du Conseil des Chefs d’Etat et de Gouvernementû Du Parlement Européenû De la Cour de Justice de l’Union Européenne

⇒ JE VAIS VOUS PRESENTER UN DEUXIEME DOCUMENT, SUR LES INSTITUTIONS EUROPEENNES, LESMECANISMES DE DECISION, ET LA FAÇON DONT ÇA FONCTIONNE (DISTRIBUER FICHE B). VOUS ALLEZPRENDRE LE TEMPS DE LE LIRE EN DETAIL, ET PUIS NOUS EN DISCUTERONS.

Ø Réactions spontanées sur l’ensemble de la Fiche BØ Puis explorer : réactions à chacune de ses parties 1 à 8, sur les plans :

û De la compréhensionû De la crédibilité du contenuû Des attitudes

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202

I.6.

⇒ MAINTENANT QUE NOUS AVONS MIEUX VU DE QUOI S’OCCUPE L’UNION EUROPEENNE ET COMMENT ELLEFONCTIONNE, J’AIMERAIS QUE NOUS PARLIONS DE CE QUE CHACUN DE VOUS POURRAIT EN ATTENDRE ETSOUHAITER : QUELLES DECISIONS, QUELLES INITIATIVES, DANS QUELS DOMAINES ET SUR QUELS SUJETSQUI VOUS CONCERNENT PERSONNELLEMENT EN TANT QUE CITOYENS. EN D’AUTRES TERMES, QUELS SONTLES QUESTIONS ET LES PROBLEMES QU’IL FAUT TRAITER DE FAÇON PRIORITAIRE POUR LES CITOYENSEUROPEENS ?

Ø Réactions spontanéesØ Puis explorer :

û Domaines d’attente ; problèmes et questions à traiterû Intensité des attentesû Spécificité des attentes à l’égard de l’Union Européenne par rapport aux attentes à l’égard de l’Etat

national

⇒ IL Y A DES DECISIONS QU’IL EST PREFERABLE DE PRENDRE AU NIVEAU NATIONAL, D’AUTRES AU NIVEAUREGIONAL, ET D’AUTRES AU NIVEAU DE L’UNION EUROPEENNE. NOUS ALLONS PASSER EN REVUERAPIDEMENT DIVERS DOMAINES. POUR CHACUN, J’AIMERAIS QUE NOUS REFLECHISSIONS ENSEMBLE A CEQUE ÇA PEUT APPORTER DE PLUS QU’ON EN DISCUTE ET QU’ON LES TRAITE EN COMMUN AU NIVEAU DEL’UNION EUROPEENNE, PLUTOT QUE SEULEMENT DANS CHAQUE PAYS ISOLEMENT.

Ø Pour chaque domaine successivement : Réactions spontanéesØ Puis explorer :

û Ouverture ou fermeture à l’intervention du niveau communautaireû Les « plus » qu’un traitement au niveau communautaire peut apporterû Raison de ces attitudes

I.6.1 Les transports

I.6.2 La santé et la protection des consommateurs

I.6.3 La politique économique

I.6.4 L’éducation

I.6.5 L’environnement

I.6.6 Les droits sociaux et la protection sociale

I.6.7 La lutte contre la criminalité et le trafic de drogue

I.6.8 La défense

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204

I.7.

(Etats-membres) Comme vous le savez sans doute, l’Union Européenne doit s’élargir dans les années qui viennent à denouveaux pays : pays d’Europe centrale qui sont devenus candidats à l’adhésion à la suite de la chute du mur de Berlin, etpays d’Europe méditerranéenne qui ne sont pas encore membres. Qu’en savez-vous plus précisément, et qu’en pensez-vous ?

Ø Réactions spontanéesØ Puis explorer :

û Degré de connaissanceû Attitudes de principeû Attentes et craintes, et leurs raisonsû Attentes et craintes spécifiques à l’égard de certains pays

(Pays candidats) Comme vous le savez sans doute, l’Union Européenne doit s’élargir dans les années qui viennent à denouveaux pays, dont le nôtre : pays d’Europe centrale qui sont devenus candidats à l’adhésion à la suite de la chute du murde Berlin, et pays d’Europe méditerranéenne qui ne sont pas encore membres. Qu’en savez-vous plus précisément, et qu’enpensez-vous ?

Ø Réactions spontanéesØ Puis explorer :

û Degré de connaissanceû Attitudes de principeû Attentes pour le pays et pour soi-mêmeû Craintes pour le pays et pour soi-mêmeû Attitudes à l’égard de la durée et des modalités du processus d’adhésion.û Perceptions de changements en cours dans le pays pour se préparer à l’adhésion, et de leurs

conséquences.

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I.8.

⇒ POUR FINIR, J’AIMERAIS QUE NOUS PARLIONS DE LA FAÇON DONT ON POURRAIT MIEUX FAIRE SAVOIR,MIEUX FAIRE COMPRENDRE, OU MIEUX FAIRE SENTIR CE QUE FAIT L’UNION EUROPEENNE ET EN QUOICELA NOUS CONCERNE. DE QUOI FAUDRAIT-IL PARLER, QUE FAUDRAIT-IL MONTRER, ET COMMENT, PARQUELS GENRES DE MOYENS ? ESSAYONS SI VOUS VOULEZ D’ETRE UN PEU CREATIFS ET D’IMAGINERCOMMENT ON POURRAIT MIEUX NOUS FAIRE COMPRENDRE TOUT CELA.

Ø Réactions spontanéesØ Puis explorer :

û Thèmes et contenus évoquésû Moyens imaginésû Types de médiateurs spontanément évoqués

⇒ JE VOUDRAIS QU’ON CREUSE LA QUESTION DE QUI POURRAIT NOUS PARLER DE L’UNION EUROPEENNE ETDE CE QU’ELLE FAIT, QUI PUISSE NOUS INTERESSER ET EN QUI ON PUISSE AVOIR CONFIANCE DANS CEQU’ILS NOUS DISENT. DE QUI POURRAIT-IL S’AGIR, COMMENT CELA POURRAIT-IL SE PASSER ?

Ø Réactions spontanéesØ Puis explorer successivement l’intérêt à entendre parler de l’Europe par les types de « médiateurs » suivants (et

les raisons de l’intérêt / de la confiance en ces « médiateurs ») :

I.8.9 Un Ministre de notre gouvernement

I.8.10 Le Ministre des Affaires Européennes d’un autre pays

I.8.11 Un des Commissaires européens

I.8.12 Votre maire ou votre député, localement

I.8.13 Un député du Parlement européen

I.8.14 Un journaliste spécialiste des affaires européennes

I.8.15 Un citoyen d’une autre nationalité européenne qui vit et travaille dans notre pays

I.8.16 Un étudiant qui revient d’un an d’études dans un autre pays européen

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⇒ LA COMMISSION EUROPEENNE REÇOIT DES DIZAINES DE MILLIERS DE VISITEURS PAR AN, QUI VONT DEPERSONNES DE TOUS TYPES DE PROFESSIONS A DES ETUDIANTS ET A DES ELEVES DES ECOLES. IMAGINONSQUE VOUS SOYEZ UN DE CES VISITEURS ET PARLONS DE CE QUE VOUS AURIEZ ENVIE QU’ON VOUS MONTREOU QU’ON VOUS EXPLIQUE, DES QUESTIONS QUE VOUS AURIEZ ENVIE DE POSER, DES PERSONNES QUE VOUSAURIEZ ENVIE DE RENCONTRER, DE LA FAÇON DONT ÇA SE PASSERAIT.

Ø Réactions spontanéesØ Puis explorer :

û Domaines d’intérêtû Intensité de l’intérêtû Modalités concrètes des visitesû Langues des visites (nécessairement toujours notre langue, ou d’autres langues sont-elles acceptables,

lesquelles ?)

⇒ ON PEUT IMAGINER DIFFERENTS STYLES DE VISITES. JE VAIS VOUS SOUMETTRE QUELQUES IDEES, ENVOUS DEMANDANT COMMENT VOUS REAGISSEZ A CHACUNE D’ENTRE ELLES :

a) Une série d’exposés par différents responsables de la Commission qui vous donnent un panorama d’ensembledes politiques communautaires.

b) Une réunion en petits groupes avec des responsables de la Commission à qui vous pourriez poser toutes lesquestions que vous souhaitez

c) Un Centre de visites équipé de nombreuses bornes informatiques interactives, d’utilisation très simple, qui vouspermettent de vous informer en choisissant les questions qui vous intéressent

d) Un centre de visites équipé de bornes du même type, mais où on accède à l’information sous forme de jeuxinteractifs.

⇒ ON PEUT EGALEMENT, AVEC DES MOYENS MODERNES DE COMMUNICATION, COMME INTERNET,IMAGINER QU’ON METTE EN PLACE DES « VISITES VIRTUELLES » DE LA COMMISSION EUROPEENNE,QU’ON POURRAIT EFFECTUER A PARTIR DE CHEZ SOI, OU DE SON LIEU DE TRAVAIL OU D’ETUDE. QU’ENPENSEZ-VOUS, QU’EST-CE QU’IL FAUDRAIT Y METTRE, COMMENT L’IMAGINEZ-VOUS ?

Ø Réactions spontanéesØ Puis explorer :

û Domaines d’intérêtû Intensité de l’intérêtû Contenu et modalités concrètes des visites virtuellesû Langues du site (nécessairement toujours notre langue, ou d’autres langues sont-elles acceptables,

lesquelles ?)

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I.9.

⇒ NOUS REALISONS CETTE ETUDE, DANS TOUS LES PAYS EUROPEENS, A LA DEMANDE DE LA COMMISSIONEUROPEENNE. QU’EN PENSEZ-VOUS, ET QUE PENSEZ-VOUS DE TOUT CE DONT NOUS VENONS DE DISCUTERDEPUIS QUELQUES HEURES ?

Ø Réactions spontanéesØ Puis explorer :

û Attitudes à l’égard d’une étude sur ce sujet pour la Commissionû Evolutions des attitudes / ouverture éventuelle de l’intérêt à l’issue de la discussion

⇒ L’UN DES ROLES DE LA COMMISSION EUROPEENNE EST DE REFLECHIR AUX PROBLEMES QUI SE POSENTPOUR L’AVENIR DES PAYS EUROPEENS, ET DE FAIRE DES PROPOSITIONS QUI SONT ENSUITE DISCUTEESAVEC LES ETATS-MEMBRES. CERTAINS CONSIDERENT QUE LA COMMISSION EST MIEUX PLACEE POURCELA QUE LES ETATS-MEMBRES EUX-MEMES :

I.9.17 D’abord parce que beaucoup de problèmes nécessitent aujourd’hui d’être traités à un niveau plusglobal que le niveau national

I.9.18 Ensuite parce que la Commission est composée de personnes de toutes les nationalités, et qu’ellebénéficie ainsi d’une plus grande diversité de points de vue et d’expériences.

I.9.19 Enfin parce que, étant neutre et indépendante, elle peut plus facilement faire une analyse objective desproblèmes pour proposer des mesures qui ne sont pas toujours populaires, et que les gouvernements dechaque pays n’osent pas prendre eux-mêmes, même s’ils pensent aussi qu’elles sont nécessaires.

D’autres, naturellement, ne sont pas d’accord avec cette idée, et ne veulent pas d’un tel rôle pour un organe qu’ilsconsidèrent comme trop loin des réalités locales et qui, n’étant pas élu, n’est pas directement responsable devant lescitoyens.

Qu’en pensez-vous ?Ø Réactions spontanéesØ Puis explorer :

û Réactions aux différents arguments (positifs a, b, et c, et négatifs)

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FICHE A

L’origine de l’Union Européenne : des moyens économiques au service d’un dessein politique

1. L’Union Européenne s’est formée progressivement à partir des années 1950, avec la création de la CommunautéEuropéenne du Charbon et de l’Acier (CECA), puis de la Communauté Economique Européenne (CEE). Créée àl’origine entre 6 pays, elle s’est graduellement élargie aux 15 Etats-membres actuels, en attendant un nouvelélargissement à de nouveaux pays candidats.Cette création visait un objectif politique, en s’appuyant sur des moyens économiques : à l’issue de la deuxième guerremondiale, il s’agissait de réconcilier les anciens ennemis et d’éviter le renouvellement des conflits, en faisant en sorteque leurs intérêts économiques soient de plus en plus imbriqués.Cela a donné naissance au Marché commun (avec, entre autres, la suppression des droits de douane entre les paysmembres) qui a entraîné un développement très rapide des échanges et une forte croissance économique.

2. La Politique Agricole Commune s’est ajoutée au Marché commun industriel.A l’époque, l’Europe souffrait d’un grave déficit en produits alimentaires. Elle a apporté des aides à son agriculture(comme l’ont fait d’ailleurs également les Etats-Unis et d’autres pays), lui permettant de se moderniser et de comblerce déficit.Les résultats acquis permettent aujourd’hui de diminuer ces aides, tout en conservant un soutien aux agriculteurs, quireconnaît leur rôle pour le maintien en vie d’un tissu de villages, d’un environnement, et d’un paysage rural qui fontpartie de l’identité européenne, dans le cadre d’une politique plus générale de développement rural.

La relance de la construction européenne : le marché unique, la monnaie unique

3. La construction européenne s’est ralentie dans les années 1970 et au début des années 1980. Elle a été relancée avec leprojet du Marché unique, qui est entré en vigueur en 1993.Il a visé à supprimer tous les obstacles aux échanges qui subsistaient, et à instaurer la libre circulation des produits, desservices, et des capitaux – mais aussi des personnes, qui peuvent voyager et s’installer librement pour vivre et travaillerdans le pays de leur choix dans l’Union Européenne

4. En même temps qu’on instaurait le Marché Unique, on commençait à préparer la monnaie unique européenne : l’Euro,dont les billets et les pièces remplaceront les monnaies nationales le 01-01-2002, dans les 12 pays qui ont déjà décidéde l’adopter.L’Euro doit faciliter encore les échanges entre les Etats-membres, et les conduire à adopter des politiques économiquesqui convergent au lieu de s’opposer (par exemple, il n’est plus possible pour un Etat-membre de la zone Euro dedévaluer sa monnaie par rapport aux autres).Il doit permettre à l’Europe de constituer un pôle de stabilité monétaire face aux autres monnaies mondiales – sachantqu’il y aura toujours des fluctuations avec le dollar et le yen, vers le haut ou vers le bas selon les périodes, comme il yen avait entre chaque monnaie européenne et ces monnaies précédemment.Pour les citoyens, l’Euro facilitera les voyages et les achats dans d’autres pays européens, et leur fera économiser lesfrais de change.

La nécessité de faire appliquer des règles de concurrence loyale : en Europe et, avec la mondialisation, au delà

5. Pour fonctionner, un marché européen unique a besoin de règles du jeu pour garantir que chaque pays applique desconditions de concurrence égales et loyales, et ne favorise pas ses propres entreprises au détriment des autresentreprises européennes.Par ailleurs, la politique de la concurrence empêche qu’une entreprise quelconque n’acquière dans l’Union Européenneune position dominante qui serait défavorable aux consommateurs.

6. La diminution des obstacles aux échanges se développe maintenant également dans le monde entier. L’UnionEuropéenne y est favorable, car elle considère que c’est un facteur de prospérité accrue pour tous, à condition là aussiqu’il y ait des règles et qu’elles soient respectées.Elle conduit les négociations commerciales internationales pour le compte de l’ensemble de ses Etats-membres, enpesant beaucoup plus que ne pourrait le faire chacun d’entre eux isolément face à des adversaires puissants.

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Des politiques de coopération dans une Union Européenne qui ne se réduit pas à une zone de libre échange

7. L’Europe du Marché Unique ne se réduit pas à une zone de libre échange économique. C’est aussi tout un ensemble depolitiques concertées : pour développer des capacités de recherche scientifique et technologique communes, pourpréparer les infrastructures de télécommunications qui sont nécessaires à l’échelle du continent, pour développer desréseaux de transport efficaces et inter-reliés, etc.

Au delà de l’économie : une politique de solidarité de grande ampleur

8. A l’origine, la construction européenne était essentiellement économique, mais ce n’est plus le cas aujourd’hui. Enparticulier, l’instauration du Marché unique a été accompagnée d’un très fort développement des politiques desolidarité, qui représentent un tiers du budget total de l’Union Européenne : environ 150 milliards d’Euros par périodede 5 ans.Il s’agit notamment :ü D’aides aux régions en retard ou en difficultés économiques par un Fonds Régional ; elles vont principalement

aux pays les moins riches de l’Union, pour les aider à rattraper leur retard, mais dans tous les pays il y a desrégions qui en bénéficient.

ü D’aides à l’emploi, à la formation, à la reconversion des chômeurs, etc., par le Fonds Social EuropéenCertaines de ces actions s’appliquent déjà aux nouveaux pays candidats à l’entrée dans l’Union Européenne.L’Union Européenne manifeste aussi sa solidarité en étant, de très loin, le premier pourvoyeur d’aide au Tiers Mondeet aux pays victimes de guerres ou de catastrophes naturelles.

La protection des consommateurs : une législation en grande partie communautaire

9. La politique des consommateurs est un autre aspect important de l’action de l’Union Européenne. Dans ce domaine, laplupart des règles et des normes de sécurité des produits que nous consommons ont une origine communautaire.Par cette politique, mais aussi par ses positions dans les négociations internationales, sur des sujets comme la viandeaux hormones ou les organismes génétiquement modifiés, elle agit pour faire reconnaître le principe de précaution etaboutir à des règles précises de protection des consommateurs.

Des progrès encore modestes vers une Europe sociale et une Europe des citoyens respectueuse de sa diversitéculturelle

10. Dans le domaine de la protection sociale proprement dite, l’intervention de l’Union Européenne est limitée, car c’estun domaine qui relève essentiellement des législations nationalesIl y a quelques lois européennes importantes qui apportent des protections aux travailleurs : règles d’hygiène et desécurité que doivent respecter les employeurs, généralisation du principe d’un salaire minimum qui n’existait pas danstous les pays, égalité entre les hommes et les femmes, systèmes d’information et de représentation des salariés, etc.De même, même si on n’en est qu’aux débuts, on commence à voir se dessiner une Europe politique pour les citoyens,avec une citoyenneté européenne qui donne le droit de vote aux élections locales et aux élections européennes, mêmesi on réside dans un autre pays de l’Union que le sien ; et qui offre la protection de l’ambassade de tout Etat de l’Unionen cas de problèmes dans un pays tiers, etc.Un pas vient d’être franchi avec l’adoption toute récente d’une Charte des Droits Fondamentaux, qui constituera unpoint de référence pour les évolutions futures (comme, par exemple, la Déclaration Universelle des Droits del’Homme).

11. La citoyenneté européenne s’ajoute à la citoyenneté nationale, elle ne la remplace évidemment pas. Il n’a jamais étéquestion de standardiser les identités européennes, dont la richesse tient à leur diversité.L’Union Européenne a des actions, relativement modestes en termes financiers, mais précises, en faveur de la diversitéculturelle et des échanges culturels.ü Bourses Erasmus ou Leonardo accordées aux étudiants qui passent un an dans une université d’un autre pays,

soutien aux échanges d’enseignants ou de chercheurs, etc.ü Soutien financier à la préservation du patrimoine historique et culturel de chaque paysü Directives communautaires sur l’audiovisuel, qui empêchent que les œ uvres de création soient considérées

comme de simples marchandises

Les débuts d’une Europe de la sécurité et de la défense au service de valeurs humanistes et démocratiques

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12. Dans ses relations avec les autres pays, l’Union Européenne entend appliquer ses principes et ses valeurs humanistes etdémocratiquesü Cela s’applique à sa politique vis à vis de régimes politiques autoritaires qui existent dans le mondeü En Europe même, le respect des règles démocratiques et des droits de l’homme est par exemple une condition

mise à l’adhésion de nouveaux Etats-membres, comme elle l’a été pour certains des membres actuels ; et l’UnionEuropéenne leur apporte dans ce domaine une aide technique à l’adaptation de leurs législations.

13. Pour affirmer ses valeurs et être une force d’équilibre dans le monde, l’Europe doit être forte, et pas seulementéconomiquement et culturellement ; elle doit être en mesure d’assurer sa sécurité intérieure et extérieure.La justice et la sécurité intérieure font partie, depuis le Traité de Maastricht, des nouveaux domaines de coopérationeuropéenne, pour lutter notamment contre la criminalité, le trafic de drogue, l’argent sale, etc.Il en va de même de la défense : dans ce domaine, des progrès importants sont actuellement faits pour constituer unedéfense européenne commune qui lui permette de mener des actions de défense sans dépendre des Etats-Unis quandceux-ci ne veulent pas s’engager, tout en restant attachée à l’OTAN.

Un rôle de laboratoire d’idées et d’architecte pour l’avenir de l’Europe

14. Selon les domaines, l’Union Européenne est chargée de gérer des politiques communes, ou de stimuler les échanges etla coopération entre les Etats-membres. Mais elle a aussi pour mission de préparer notre avenir à long terme, en tirantparti de la diversité des idées qui peuvent exister dans les différents pays.ü C’est un rôle qu’elle joue dans des domaines très variés : par exemple celui de la recherche ; celui de

l’environnement (il y a une législation communautaire abondante dans ce domaine, mais aussi des positions depointe défendues par l’Europe au plan mondial, pour lutter contre l’effet de serre et le réchauffement du climat) ;celui de l’énergie (comment éviter à long terme la dépendance énergétique vis à vis de pays extérieursinstables) ; etc.

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FICHE B

Les institutions de l’Union Européenne

Les décisions prises au niveau de l’Union Européenne impliquent cinq principales institutions.

15. La Commission Européenne est un organe neutre vis à vis des Etats-membres. Les Commissaires sont des hommes etdes femmes politiques proposés par les gouvernements des différents pays mais, une fois nommés, ils sont totalementindépendants de ces gouvernements, qui ne peuvent pas les révoquer.Comme un Ministre dans un gouvernement national, chaque Commissaire a son domaine de responsabilité, sousl’autorité du Président de la Commission.

16. Le Conseil des Ministres européen est la réunion des Ministres des différents Etats-membres compétents dans undomaine donné : par exemple le Conseil Affaires Economiques et Financières réunit régulièrement les Ministres desFinances, le Conseil Environnement ceux de l’environnement, etc.Certaines décisions doivent être prises à l’unanimité, d’autres le sont par un vote dans lequel chaque pays dispose d’unnombre de voix plus ou moins grand selon la taille de sa population (vote à la majorité qualifiée)Les Parlements nationaux sont associés par leurs gouvernements à la préparation des décisions et à leur adaptation àleurs situations nationales.

17. Le Conseil Européen des Chefs d’Etat et de Gouvernements se réunit normalement 2 fois par an : pour tracer degrandes orientations ; pour décider d’apporter des révisions au Traité qui fondent l’Union Européenne, comme àMaastricht en 1992, à Amsterdam en 1997, ou à Nice le mois dernier ; et aussi pour tenter de trouver des solutions surdes sujets sur lesquels les Ministres n’ont pas réussi à trouver un accord.Chaque pays assure, par rotation, la Présidence de l’Union Européenne pour 6 mois, entre 2 Conseils Européens.

18. Le Parlement Européen est composé de parlementaires élus au suffrage universel dans chaque pays.Comme une Assemblée parlementaire nationale, le Parlement Européen approuve le budget. Il vote sur les propositionsde la Commission. Ces propositions, une fois approuvées par le Parlement Européen et le Conseil des Ministres,deviennent des lois européennes (qu’on appelle directives ou règlements).Ces lois européennes, tout comme les lois nationales, sont appliquées par les tribunaux nationaux dans chaque pays.Le Parlement Européen a le pouvoir de refuser la nomination de la Commission, et de la révoquer – tout comme unParlement national peut censurer son gouvernement.

19. La Cour de Justice des Communautés Européennes est une sorte de Cour Suprême qui juge de tous les cas non–respectdu droit communautaire, à la demande d’un tribunal national, d’un Etat-membre, ou de la Commission.

Le fonctionnement de l’Union : le processus de décision

20. On ne peut évidemment pas comparer strictement le système institutionnel de l’Union Européenne avec celui d’unpays. Mais on peut dire, en simplifiant, que :ü La Commission est l’organe exécutif, comme le gouvernement dans un Etat national – même si elle n’a pas tous

les pouvoirs d’un gouvernementü Le Parlement Européen et le Conseil des Ministres sont comme les deux assemblées législatives d’un pays, qui

se prononcent sur les propositions de l’exécutif : le premier avec le rôle classique d’une assembléeparlementaire, le second comme une sorte de Sénat des Etats.

21. Certains considèrent que les Etats-membres abandonnent une partie de leur souveraineté au profit de l’UnionEuropéenne.Pour d’autres, le système de l’Union Européenne est un système où les Etats-membres décident de mettre en communleurs souverainetés dans certains domaines, et s’unissent pour adopter des décisions communes. Naturellement, ilsn’ont pas toujours les mêmes points de vue au départ, et les décisions adoptées sont le résultat d’un compromis. Mais,comme dans tout système démocratique, une fois adoptée, la législation s’applique à tous. On ne peut donc pas opposerla loi nationale avec la législation européenne puisque celle-ci est en fait une loi commune que les différents pays ontdécidé d’adopter ensemble.

Page 212: PERCEPTIONS DE L’UNION EUROPEENNE …ec.europa.eu/commfrontoffice/publicopinion/archives/quali/ql... · ... elle est plus grande à l’Ouest qu’ à l’Est. 4. Le travail d’explication

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22. Pour leur préparation comme pour leur application, les décisions communautaires entraînent une coopération entre leniveau de l’Union Européenne, où on définit en commun les grandes lignes, et les administrations nationales ourégionales qui ont à les mettre en œ uvre sur le terrain.La préparation de ces décisions inclut en fait un vaste processus de consultation : avec les Etats-membres, avec desinstitutions consultatives comme le Comité Economique et Social et le Comité des Régions de l’Union Européenne,avec les secteurs économiques concernés, des associations de consommateurs, des organisations nongouvernementales, etc.Du fait de ces consultations multiples, le processus de décision communautaire est complexe, il a inévitablement unecertaine lourdeur, et l’Europe donne parfois l’impression d’avancer lentement.Mais le processus est nettement plus transparent qu’on ne le dit souvent.