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619 URGENCES 2010 co-fondateurs ANOMALIES DE LA COAGULATION ET TRAUMATISME GRAVE 1. Réanimation-Déchocage, Centre Hospitalier de la Région Annécienne, Annecy. 2. Service d’Anesthésie-Réanimation, Centre Hospitalier Général, Annemasse. 3. SAMU-SMUR 74, Centre Hospitalier de la Région Annécienne, Annecy. 4. Urgences-Déchocage, Département d’Anesthésie-Réanimation, Centre Hospitalier Lyon-Sud, Hospices Civils de Lyon, Pierre Bénite. Correspondance : D r A. Levrat, Service de Réanimation-Déchocage, CHRA, 1, avenue de l’Hôpital, BP 90074, 74374 Pringy. Tél. : 04 50 63 60 30. Fax : 04 50 63 65 60. E-mail : [email protected] Points essentiels 30 % des patients traumatisés sévères développent une coagulopathie. La coagulopathie est un élément majeur de la triade létale ; les mécanismes sont complexes et intriqués (dilution, consommation, hypothermie, acidose). La dysfonction hémostatique est responsable de saignements persistants, non contrôlables chirurgicalement, ayant des implications importantes quant aux besoins transfusionnels et au pronostic vital. Le diagnostic précoce de la coagulopathie reste essentiellement clinique, fondé sur le volume estimé des pertes hémorragiques, l’aspect du saignement apparent, la gravité du bilan et surtout l’expérience du clinicien. Le délai d’obtention des résultats des tests conventionnels de coagulation rend ceux-ci peu appropriés dans l’aide à la transfusion ciblée. Les conduites thérapeutiques transfusionnelles sont souvent empiriques et hétérogènes. Les moyens d’évaluation rapide de l’hémostase « délocalisée » permettent d’appréhender en salle de déchocage la capacité de constitution du caillot. Chapitre 54 Anomalies de la coagulation et traumatisme grave A. LEVRAT 1 , C. DEFOURNEL 2 , D. SAVARY 3 , J.S. DAVID 4

Points essentiels · ANOMALIES DE LA COAGULATION ET TRAUMATISME GRAVE 2.5. Au total La coagulopathie du polytraumatisé est un procédé complexe impliquant : la lésion tissulaire,

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ANOMALIES DE LA COAGULATION ET TRAUMATISME GRAVE

1. Réanimation-Déchocage, Centre Hospitalier de la Région Annécienne, Annecy.2. Service d’Anesthésie-Réanimation, Centre Hospitalier Général, Annemasse.3. SAMU-SMUR 74, Centre Hospitalier de la Région Annécienne, Annecy.4. Urgences-Déchocage, Département d’Anesthésie-Réanimation, Centre Hospitalier Lyon-Sud,Hospices Civils de Lyon, Pierre Bénite.Correspondance :

D

r

A. Levrat, Service de Réanimation-Déchocage, CHRA, 1, avenue de l’Hôpital,BP 90074, 74374 Pringy. Tél. : 04 50 63 60 30. Fax : 04 50 63 65 60. E-mail : [email protected]

Points essentiels

30 % des patients traumatisés sévères développent une coagulopathie.

La coagulopathie est un élément majeur de la triade létale ; les mécanismessont complexes et intriqués (dilution, consommation, hypothermie, acidose).

La dysfonction hémostatique est responsable de saignements persistants, noncontrôlables chirurgicalement, ayant des implications importantes quant auxbesoins transfusionnels et au pronostic vital.

Le diagnostic précoce de la coagulopathie reste essentiellement clinique, fondésur le volume estimé des pertes hémorragiques, l’aspect du saignementapparent, la gravité du bilan et surtout l’expérience du clinicien.

Le délai d’obtention des résultats des tests conventionnels de coagulation rendceux-ci peu appropriés dans l’aide à la transfusion ciblée.

Les conduites thérapeutiques transfusionnelles sont souvent empiriques ethétérogènes.

Les moyens d’évaluation rapide de l’hémostase « délocalisée » permettentd’appréhender en salle de déchocage la capacité de constitution du caillot.

Chapitre

54

Anomalies de la coagulationet traumatisme grave

A. L

EVRAT

1

, C. D

EFOURNEL

2

, D. S

AVARY

3

, J.S. D

AVID

4

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TRAUMATISMES ET COAGULATION

Le traitement passe, si possible, par le maintien d’une température corporellesupérieure à 34 °C, et un remplissage adapté.

La transfusion précoce comprend un ratio CGR/PFC proche de 1:1, avec dufibrinogène et des plaquettes en cas d’hémorragie massive.

La place du facteur VII activé est bien définie ; les indications des autresthérapeutiques hémostatiques restent à être précisées dans le futur.

1. Épidémiologie

L’hémorragie massive reste la seconde cause de mortalité précoce chez le trau-matisé après le traumatisme crânien, responsable d’environ 40 % des décès

(1)

.Si le saignement macrocirculatoire d’origine mécanique peut être contrôlé par lachirurgie et/ou la radiologie interventionnelle, la coagulopathie une fois initiée,reste difficile à traiter. Les désordres incontrôlés de l’hémostase vont ainsi êtreresponsables de la moitié des décès alors que l’hémostase mécanique est réali-sée. La fréquence de la coagulopathie chez les traumatisés sévères varie entre 24et 32 %

(2-3)

. La coagulopathie est un facteur indépendant de mortalité chezle traumatisé : Brohi retrouvait 46 % de mortalité chez les traumatisés sévèresprésentant une coagulopathie à leur admission contre 10,9 % pour ceux ayantune coagulation normale

(2)

.

2. La coagulopathie du traumatisé sévère : un élément de la triade létale

Les stigmates biologiques d’une activation importante de la coagulation et de lafibrinolyse sont détectés très précocement après le traumatisme

(4)

. L’activationde la coagulation passe par la voie extrinsèque comme en témoigne la détectionprécoce de facteur tissulaire dans le sang circulant des traumatisés graves

(5)

. Cefacteur peut être externalisé au niveau des vaisseaux lésés des zones traumati-ques et exprimé par certaines cellules monocytaires sous l’influence de cytokines.Aussi, l’atteinte parfois isolée de certains organes (poumon, foie crâne) peutgénérer une quantité importante de thromboplastine tissulaire, source d’activa-tion de la coagulation même en dehors d’une spoliation sanguine significative.En revanche, il ne semble pas exister de différence entre les bouleversementscoagulo-fibrinolytiques observés au cours d’un traumatisme crânien isolé de ceuxobservés pendant des traumatismes non crâniens

(6)

. La conséquence du trau-matisme est une activation importante de la coagulation avec consommation desfacteurs de coagulation, pouvant conduire à la coagulopathie. La combinaisond’une lésion tissulaire et d’un saignement actif initie la classique triade létale :acidose, hypothermie et coagulopathie

(7-9)

. Les polytraumatisés avec unISS > 25, un pH < 7,10, une température corporelle < 34 °C, et une PAS< 70 mmHg ont ainsi 98 % de risque de développer une coagulopathie poten-

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ANOMALIES DE LA COAGULATION ET TRAUMATISME GRAVE

tiellement létale

(10)

. Chaque facteur vient exacerber les autres, ce processusétant encore majoré par le remplissage vasculaire conséquent de solutés à tem-pérature ambiante, dépourvus de facteurs de coagulation.

2.1. L’hypothermie

Celle-ci est très fréquente lors d’un traumatisme. Deux tiers des patients trauma-tisés avaient une température inférieure à 36 °C à l’arrivée dans l’étude de Luna

(11)

; les patients avec un ISS > 25 avaient une mortalité de 7 % si la tempéra-ture était supérieure à 35 °C, contre 100 % si la température était inférieure à32 °C. Dans un autre travail l’hypothermie inférieure à 34 °C était présente chez80 % des non survivants et chez seulement 36 % des survivants

(12)

. L’hypo-thermie est liée à une diminution de la production de chaleur (inactivité motricedu patient) et à la déperdition thermique (conduction, convection et évapora-tion), exacerbée par les premiers soins à l’extérieur le plus souvent ; la lutte effi-cace implique la rapidité de la prise en charge préhospitalière, le réchauffementdu patient et des produits administrés. L’effet de l’hypothermie est difficile àidentifier sur les tests de coagulation, temps de prothrombine (TP) et temps decéphaline activée (TCA), ces tests étant réalisés à 37 °C. En effet, en hypo-thermie, les temps de coagulation sont significativement allongés

(13-15)

. PourWolberg,

in vitro

à 33 °C, l’activation, l’adhésion et l’agrégation plaquettairesont significativement diminuées ; en-dessous de 33 °C, l’activité enzymatique etla fonction plaquettaire sont aussi significativement altérées

(15)

. Watts retrouveces constatations chez des traumatisés avec ISS

9 mais pour un seuil d’hypo-thermie à 34 °C

(16)

; l’objectif pour le praticien est donc d’essayer de maintenirune température corporelle supérieure à 34 °C, grâce à l’utilisation précoce dedifférentes techniques (réchauffements interne et externe) et par la rapidité dela prise en charge. Il n’y a donc jamais de place pour l’hypothermie neuro-protectrice tant que le phénomène hémorragique n’est pas totalement contrôlé.

2.2. Les troubles métaboliques : l’acidose

L’altération du pH est très prédictive du risque de survenue d’une coagulopathie.La probabilité pour un traumatisé avec ISS > 25 et pH < 7,10 à l’arrivée de déve-lopper une coagulopathie est de 49 % dans la série de Cosgriff

(10)

. L’activitédu facteur VIIa, du complexe Xa/Va et du complexe VIIa/FT est réduite dès lorsque le pH approche de 7

(18)

. L’activité enzymatique des facteurs de coagula-tion est réduite de 90 % à ce niveau de pH

(19)

. Les causes les plus fréquentesd’acidose chez le traumatisé sont une accumulation de métabolites acides suiteà l’hypoperfusion tissulaire, une diminution de l’excrétion rénale des ions H+ etune perte excessive de bases. Il existe une prolongation des temps de coagula-tion dépendante de l’augmentation de l’hypoperfusion systémique

(20)

; 2 %des patients avec un déficit en bases inférieur à 6 mEq/l ont des temps de coa-gulation allongés contre 20 % des patients avec un déficit supérieur à 6 mEq/L.Il apparaît nécessaire de réaliser systématiquement un monitorage micro etmacrocirculatoire précoce : le dosage de l’acide lactique sanguin est recom-

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TRAUMATISMES ET COAGULATION

mandé chez le patient traumatisé, permettant d’estimer la gravité du saignementet du choc

(21)

. La lactacidémie initiale est un bon indicateur de morbimortalité

(22-23)

; Manikis trouvait que le niveau initial d’acide lactique était plus élevéchez les patients décédés et qu’une durée de normalisation de l’acide lactiquesupérieure à 24 heures était significativement associée au développement d’unedéfaillance multiviscérale ; dans la série d’Abramson, les patients qui avaient untaux de lactates supérieur à 2 mmol/l pendant plus de 48 heures avaient un tauxde survie de seulement 13 %. Le déficit en bases est un marqueur diagnosticsensible pour estimer le degré et la durée d’hypoperfusion tissulaire et un mar-queur pronostique de complications posttraumatiques et de décès

(24)

; dans letravail de Davis, il existe une corrélation significative entre le déficit en bases àl’admission et le besoin transfusionnel durant les 24 premières heures ; le déficiten bases était un meilleur marqueur pronostique de décès posttraumatique quele pH. Ainsi, c’est le déficit en bases qui est recommandé comme dosage

(21)

,et notamment en association avec le dosage de l’acide lactique

(25)

.

2.3. La coagulopathie de dilution

L’hémodilution commence avec la spoliation sanguine aiguë. Les facteurs decoagulation et les plaquettes sont directement perdus dans le saignement. Laperte sanguine conduit à une vasoconstriction, à une chute de pression artérielleet à des modifications de distribution du volume sanguin. L’eau du secteurinterstitiel va se déplacer dans le compartiment vasculaire du fait du changementde pression osmotique et diluer ainsi les éléments coagulants encore présentsdans les vaisseaux. Le remplissage vasculaire rapide et important de cristalloïdeset/ou colloïdes avant l’obtention de produits sanguins majore encore l’hémodi-lution. Les concentrés de globules rouges (CGR), les plasmas frais congelés (PFC)et les concentrés de plaquettes (CPA ou MCP) peuvent aussi aggraver l’hémodi-lution. Un CGR déleucocyté contient environ 195 ml de globules rouges et155 ml de liquide. Seulement 35 ml de ce liquide est du plasma

(26)

. Ainsi, letaux d’hématocrite des CGR est souvent inférieur à 30 %. Dans un PFC, les fac-teurs de coagulation dans la phase liquide sont dilués à 60 % de leur concen-tration habituelle. Les plaquettes sont aussi diluées et seulement 2/3 desplaquettes administrées sont viables.

2.4. Anomalies plaquettaires

Il existe des perturbations quantitatives par consommation : les plaquettes sontmobilisées pour contrecarrer l’hémorragie en participant à la formation ducaillot ; mais aussi il existe une baisse par séquestration hépatique et/ou splé-nique

(17)

. L’effet de cette consommation sur le nombre de plaquettes n’estobservable que tardivement et la thrombopénie devient généralement sévèrequ’après les 24 premières heures

(27)

. Les anomalies plaquettaires sont aussiqualitatives, notamment au cours de l’hypothermie (altération de l’expressiondes molécules de surface avec troubles de l’activation, de l’adhésion et de l’agré-gation plaquettaire).

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ANOMALIES DE LA COAGULATION ET TRAUMATISME GRAVE

2.5. Au total

La coagulopathie du polytraumatisé est un procédé complexe impliquant : lalésion tissulaire, le choc, l’hémodilution, l’hypothermie, l’acidose et l’inflamma-tion. Le choc est le fil conducteur de la coagulopathie aiguë, mais requiert lalésion tissulaire comme événement initiateur. Tandis que le choc progresse, leremplissage vasculaire est initié et l’hémodilution exacerbe les modificationshémostatiques déjà présentes. L’hypothermie et l’acidose aggravent encore cettecoagulopathie. L’importance clinique de l’inflammation dans la dysfonctionhémostatique chez le polytraumatisé n’est pas encore clairement élucidée

(28)

.La coagulopathie a comme conséquence un saignement microvasculaire diffusdès la phase initiale, responsable d’une partie de la mortalité précoce, et lacontribution aux défaillances systémiques, jusqu’au syndrome de défaillancemultiviscérale, source de morbi-mortalité secondaire.

3. Outils d’évaluation de la coagulopathie

3.1. Clinique

Le diagnostic de coagulopathie doit commencer rapidement avec l’examen (épis-taxis, issue de sang depuis la sonde d’intubation ou gastrique, un saignementallongé à l’insertion d’un cathéter, une hématurie...). Les paramètres cliniquesclassiques permettant d’estimer la spoliation peuvent être réunis en 4 classesdéfinies par l’American College of Surgeons, de la classe I représentant un sai-gnement modéré avec signes vitaux préservés à la classe IV déterminant unesituation hémorragique extrêmement sévère. Cette détermination clinique del’hémorragie traumatique est largement recommandée par les expertseuropéens

(21)

. La perte sanguine doit aussi être évaluée par l’évolution del’hématocrite ; l’évaluation rapide du taux d’hémoglobine par la technique del’HemoCue

®

(B-Haemoglobin System, Angelhom, Sweden) aide dans cettedémarche et doit être utilisée en préhospitalier et en salle d’accueil des urgencesvitales pour guider la transfusion de CGR. Cette simple mesure n’est pas recom-mandée seule

(21)

, car elle a une faible sensibilité à l’admission pour détecterles patients avec lésions traumatiques sévères ou hémorragie persistante. Lesantécédents et traitements (antiagrégants ou anticoagulants oraux) sont indis-pensables à recueillir. Les accidents hémorragiques viennent au premier rang desaccidents iatrogènes, avec environ 18 000 hospitalisations par an en France.Dans une métaanalyse portant sur plus de 4 000 patients, l’incidence annuelledes saignements majeurs sous AVK se situe entre 9 et 13 %, et celle des saigne-ments fatals est de 1 %

(29)

. Cette population traitée, âgée essentiellement deplus de 65 ans, soumise la plus aux chutes va augmenter dans le futur

(30)

.Aussi chez les traumatisés crâniens, le risque de décès est multiplié par 2 à 4comparés à ceux qui n’ont pas de traitement

(31)

. Dans une autre étude, un INRélevé est un facteur de risque indépendant de mortalité chez les polytraumatisésde plus de 50 ans après ajustement sur l’âge et l’ISS, avec une augmentation de

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TRAUMATISMES ET COAGULATION

35 % de l’

odd ratio

de décès pour chaque augmentation d’un point de l’INR

(32)

. Concernant les antiagrégants, Ohm retrouvait une mortalité significative-ment plus élevée chez les traumatisés crâniens prenant de l’aspirine ou du clo-pidogrel

(33)

. Ces éléments sont donc indispensables à recueillir dès la prise encharge, puisqu’il existe un risque net de saignement accru et de désordre del’hémostase. La réalisation de l’INR à l’admission est nécessaire, étant donné lepotentiel de réversibilité sous traitement adéquat en situation hémorragique.

Les scores de gravité : bien que bien corrélé au risque de coagulopathie, l’

InjurySeverity Score

calculé en urgence n’est pas aisé, ce qui n’en fait pas un bon outilde triage des patients

(34)

. Le

Trauma Associated Severe Hemorrhage Score

(TASH Score) a été développé à partir du registre allemand pour pouvoir êtreobtenu rapidement à l’aide de variables clinico-radiologiques et de la valeur del’hémoglobine à l’arrivée

(35)

. Il permet d’évaluer la probabilité de transfusionmassive dans les 15 minutes qui suivent l’admission du polytraumatisé. D’autresscores ont été développés pour prédire la gravité, la mortalité et les besoinstransfusionnels chez les polytraumatisés et récemment l

’Emergency TransfusionScore

(ETS)

(36-37)

. Ces scores permettent de prédire la survenue d’une coagu-lopathie et/ou le besoin transfusionnel, mais ne font pas de diagnostic précis dela coagulopathie et ne permettent pas de guider la thérapeutique. Leur usage enroutine reste peu approprié.

3.2. Monitorage paraclinique

Contrairement au saignement massif survenant au bloc opératoire, lors del’hémorragie traumatique, le monitorage de la coagulopathie survient « tard »,du fait de la prise en charge extrahospitalière avec souvent une coagulopathiequi est déjà installée, avec mise en route des éléments de la triade létale. Le cli-nicien dispose des tests d’hémostases standards de laboratoire et plus récem-ment d’appareils de monitorage délocalisés.

3.2.1. Les principaux tests de laboratoire

Dans l’urgence, l’exploration de l’hémostase est effectuée par la réalisationd’une numération plaquettaire, d’un Temps de Prothrombine (TP), d’un Tempsde Céphaline Activé (TCA) et d’un taux de fibrinogène. Les limites de ces testsen situation hémorragique sont multiples : la réalisation à une température stan-dardisée de 37 °C, qui vient minorer les effets

in vivo

de l’hypothermie sur lacoagulopathie ; de même pour les effets délétères de l’hypocalcémie et de l’aci-dose, le TP et le TCA sont réalisés à pH standardisé et après recalcification. Aussices tests sont réalisés sur un plasma dépourvu de plaquettes et des autres cellu-les sanguines. Ils réalisent donc une analyse « compartimentée » de la coagula-tion. Or, la réponse hémostatique au traumatisme est une interaction complexedes protéines plasmatiques, des plaquettes et de l’endothélium vasculaire qui nepeut donc pas être approchée de façon cohérente par le TP ou le TCA. Enfin, leproblème majeur de ces tests réside dans leur délai d’obtention. Ils sont aumieux disponibles au bout de 30 minutes. Ce délai incompressible (achemine-

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ment des tubes, centrifugation du plasma de 15 minutes, automate et rendu durésultat) est souvent incompatible avec la nécessité d’administration de produitssanguins en urgence ; la transfusion reste donc empirique, basée sur la proba-bilité clinique et les recommandations dogmatiques

(17)

. Enfin, chez le polytrau-matisé, il existe une cinétique rapide du statut hémostatique du fait dusaignement et des thérapeutiques instituées et les tests de laboratoire faits à uninstant t n’ont souvent que peu de sens lors du rendu à t + 1, pouvant mêmefausser le statut hémostatique du patient.

3.2.2. La biologie délocalisée

Le monitorage délocalisé de la coagulation au lit du patient par la thromboélasto-graphie (TEG®) et la thromboélastométrie rotative (ROTEM®) semble être une alter-native intéressante en réponse à certaines limitations de la biologie standard (38).Les tests sont réalisés sur sang total, s’approchant plus du développement physio-logique du caillot sanguin, le système plasmatique pouvant interagir avec les pla-quettes et les globules rouges. Le développement du caillot est visualisé en tempsréel et l’analyse de la coagulation peut se faire à la température réelle du patient.À partir d’un échantillon de sang total, l’analyse prend en compte l’interaction desplaquettes avec les protéines de la coagulation à travers l’agrégation plaquettaire,puis la cascade de la coagulation, la fibrinoformation et la polymérisation, et enfinla lyse du caillot. Les technologies ROTEM® et TEG® sont globalement comparableset donnent des résultats sous forme de tracé, seuls les noms des paramètres etleurs valeurs normales changent. Dans une étude prospective menée sur 270 pré-lèvements chez 88 polytraumatisés, évaluant l’intérêt du ROTEM®, nous avonsmontré que les tests du ROTEM®, réalisés à l’admission, permettaient une détec-tion rapide des troubles de l’hémostase (39). L’analyse montrait que le ROTEM®

était capable d’apprécier en 15 minutes le statut hémostatique du patient et per-mettait d’envisager de s’y référer pour l’administration de PFC et de fibrinogène.Dans ce travail, la mesure de l’amplitude du caillot à 15 minutes permettait de dis-tinguer les patients graves dont le TP était inférieur à 40 % nécessitant une trans-fusion de PFC, de ceux qui n’en n’avaient pas besoin. De même pour lefibrinogène, en fonction de l’amplitude du caillot à 10 minutes, la nécessitéd’administrer du fibrinogène était obtenue selon les valeurs seuils définies par lesinstitutions (fibrinogène < 1g.L-1). Dans un autre travail nous avons pu observerque le ROTEM® pouvait être discriminant pour le diagnostic d’hyperfibrinolyse (40).Le ROTEM® est actuellement le seul outil qui permet la détection précoce del’hyperfibrinolyse, pouvant ainsi rationaliser l’administration d’antifibrinolytiques(40-41). Les tests spécifiques de laboratoire pour détecter la part d’hyperfibrinolysedans la coagulopathie (temps de lyse des euglobulines entre autres) sont, en effet,trop difficilement réalisables en urgence.

L’utilisation en routine de ces techniques par le clinicien, chez le polytraumatisé,est en progression mais reste limitée. Hoyt a réalisé une étude de pratique enmatière de prise en charge de la coagulopathie chez les patients avec un ISS ≥ 16(42) ; l’utilisation du ROTEM® est très variable avec 13 % d’utilisation en Europe,

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626 ■ TRAUMATISMES ET COAGULATION

3 % en zone Amérique, et 0 % en zone Asie-Pacifique (6 % toutes zonesconfondues). Les contraintes de la technique sont liées aux manipulations avecrisque d’erreur (3 à 5 minutes) ; une alternative proposée serait de localiser leROTEM® au laboratoire d’hémostase, afin que les tests soient effectués par lesbiologistes, assurant ainsi l’aspect qualitatif ; l’analyse en temps réel sur un écrandéporté en salle de déchocage ou au bloc opératoire, sera ensuite évaluée parle clinicien.

4. Recommandations sur les pratiques transfusionnelles

Plusieurs recommandations d’experts existent : françaises (Agence Française deSécurité Sanitaire des Produits de Santé Afssaps) ; européennes Task Force forAdvanced Bleeding Care in Trauma (21) ou américaines (43).

4.1. Concentrés de globules rouges (CGR)

Les globules rouges contribuent à l’hémostase du fait de leur effet rhéologiquedans la margination plaquettaire mais aussi parce qu’ils supportent la formationde thrombine. Le seuil optimal théorique d’hématocrite à maintenir en casd’hémorragie sévère n’est pas connu. En effet, il a été montré qu’une baissemodérée de l’hématocrite n’augmentait pas la perte sanguine dans un modèleanimal de plaie splénique et qu’une diminution isolée de l’hématocrite in vitrone modifiait pas la coagulation (44). L’effet spécifique de l’hématocrite sur lacoagulation reste partiellement méconnu. Des recommandations de l’Afssapsont proposé un seuil en cas d’anémie aiguë : 7 g/dL chez les personnes sansantécédents particuliers, 8-9 g/dL en cas d’antécédents cardiovasculaires et10 g/dL en cas d’insuffisance coronaire aiguë ou d’insuffisance cardiaque avérée(45). En pratique, la transfusion de CGR a pour objectif le maintien autour de 7et 9 g/dL (grade 1C), et un taux de 10 g/dL en cas de traumatisme crânien (21).Contrairement aux recommandations françaises, les recommandations euro-péennes prennent en compte la profondeur du choc, la réponse hémodynami-que au remplissage et le débit de la perte sanguine pour guider la transfusionde CGR (21).

4.2. Plasma frais congelé (PFC)

Bien que le bénéfice du lien entre l’administration de PFC et le contrôle du sai-gnement avec amélioration du pronostic manque (46), les experts reconnaissentque les PFC sont bénéfiques chez les patients présentant une coagulopathietraumatique (21, 43, 47). Il est préconisé une dose initiale de 10 à 15 ml/kg encas de saignement massif ou de saignement associé à un TQ ou unTCA > 1,5 fois le témoin (grade 1C), soit un TP < 40 % et/ou un INR > 2 (21,43), ou chez les patients traités par des AVK si des concentrés de facteurs vit Kdépendants ne sont pas disponibles (43, 47). Enfin, les PFC contiennent ducitrate et sont dilués d’environ 20 % par rapport au plasma normal ; une unité

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ANOMALIES DE LA COAGULATION ET TRAUMATISME GRAVE

de PFC contient 0,5 g de fibrinogène et toutes les protéines pro et anticoagu-lantes. Pour réduire le risque viral lié à la transfusion de PFC en France, ceux-cisont actuellement « viro-atténués » par le bleu de méthylène (PFC-BM),technique qui remplace progressivement les PFC-s (PFC sécurisé par quarantaineet vérification du statut biologique du donneur à 120 jours) et les PFC-SD (traitéspar solvant-détergent).

4.3. Plaquettes

Le risque hémorragique existe dès lors que la numération plaquettaire esten-dessous de 50 G/L, à partir de ce seuil la fonction plaquettaire décroît expo-nentiellement (20). Dans l’hémorragie sévère, la chute des plaquettes survientplus tardivement que celle des facteurs de coagulation et du fibrinogène. Latransfusion plaquettaire s’effectue dans un deuxième temps (en général à partirde 8-10 CGR) et en fonction du résultat de la numération plaquettaire (délaid’obtention rapide de 20 minutes). Le seuil de prescription reste incertain du faitde l’étude de la fonction plaquettaire qui est difficile à appréhender en pratiquequotidienne. Il est recommandé la prescription de plaquettes en-dessous de50 G/L (grade 1C) (48). Les experts européens suggèrent de maintenir unnombre de plaquettes au-dessus de 100 G/L pour les patients polytraumatisésavec un saignement sévère ou un traumatisme crânien (grade 2C) (21). Cettedernière recommandation repose sur le fait qu’en cas d’augmentation des pro-duits de dégradation de la fibrine, de CIVD ou d’hyperfibrinolyse, il existe uneinterférence avec la fonction plaquettaire, raison pour laquelle il est proposé deviser un seuil plus élevé.

4.4. Fibrinogène

La diminution du fibrinogène est la plus précoce dans l’hémorragie sévère.L’administration de fibrinogène est recommandée en cas de saignement accom-pagné d’un taux de fibrinogène inférieur à 1g/L. La dose initiale est de 3 à 4 get la répétition des doses doit être guidée par le taux de fibrinogène (grade 1C)(21). Le fibrinogène est apporté dans les concentrés de fibrinogène (Clottagen®

remplacé par le Clottafact® depuis fin 2009 et Haemocomplettan® ). Le fibrino-gène issu du plasma humain est de reconstitution rapide, de faible volume, sansnécessité de décongélation. Depuis plusieurs années, il est utilisé en Europe dansle contexte des hypofibrinogénémies acquises lors de l’hémorragie contrairementà l’Amérique du Nord où est utilisé le cryoprécipité ; celui-ci contient du fibrino-gène et des facteurs de coagulation (facteur Von Willebrand, VIII et facteur sta-bilisant de fibrine/XIII). Une unité de cryoprécipité contient 0,25 g de fibrinogène(dans 4 % du volume d’un PFC : soit 10 ml de cryoprécipité versus 250 ml dePFC). La différence de composition de ces deux produits (cryoprécipité et fibri-nogène) rend l’analyse comparative transfusionnelle de la littérature difficile.

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5. Traitements pharmacologiques hémostatiques

5.1. Antifibrinolytiques

Par extension à la chirurgie majeure, les antifibrinolytiques sont recommandés enrecours lors d’une hémorragie sévère d’origine traumatique, bien que leurs effetsne soient pas démontrés dans cette indication (21). Aucune donnée ne permetd’affirmer que la réponse hémostatique au traumatisme est similaire à celleobservée en chirurgie. Classiquement, les fractures de bassin avec hématomerétropéritonéal, les contusions pulmonaires étendues ou les plaies cranio-céré-brales sont considérées à haut risque d’hyperfibrinolyse. Les recommandationseuropéennes en termes de posologies sont 10 à 15 mg/kg d’acide tranexamiqueou de 100 à 150 mg/kg d’acide ε-aminocaproïque. Du fait de l’absence d’étudescliniques faisant la preuve de l’efficacité des antifibrinolytiques dans le cadre deshémorragies sévères posttraumatiques, leurs indications restent restreintes etempiriques ce qui en fait un traitement dit « d’exception ». La thromboélasto-métrie peut être une aide dans le diagnostic d’hyperfibrinolyse et seule, peutguider l’administration d’antifibrinolytique (40).

5.2. Le facteur VII activé recombinant (rFVIIa)

La coagulation est normalement initiée par la liaison du facteur VII activé avecle facteur tissulaire (FT). Dans des conditions physiologiques normales, un trau-matisme est responsable d’une libération locale de FT, et des quantités infimesde facteur VII activé suffisent pour induire localement la coagulation. Administréaux doses thérapeutiques usuelles, le rFVIIa est présent dans la circulation à desdoses 100 fois supérieures à celles du facteur VII activé endogène. En cas detraumatisme avec libération de FT, les complexes rFVIIa-FT activent directementle facteur X au niveau de la surface plaquettaire produisant ainsi une synthèseimportante de thrombine, suppléant ainsi la thrombine non générée du fait dela coagulopathie. Le traitement par rFVIIa n’est recommandé qu’après échec dela première ligne de traitement bien conduite de la coagulopathie. L’utilisationdes produits sanguins doit avoir été optimale, avec un hématocrite autour de24 %, des plaquettes supérieures à 50 G/L, un fibrinogène supérieur à 0,5 g/L.L’acidose sévère, l’hypothermie et l’hypocalcémie doivent avoir été partiellementcorrigées. En l’absence du contrôle du saignement après toutes ces mesures ethémostase chirurgicale et/ou radiologique, le traitement par rFVIIa peut êtrerecommandé (21). Le rFVIIa est donc un traitement adjuvant qui ne doit ni retar-der, ni remplacer les méthodes thérapeutiques conventionnelles. Boffard et al.ont réalisé la seule étude randomisée évaluant l’efficacité du rFVIIa chez des vic-times d’un traumatisme fermé ou pénétrant ; dans le groupe rFVIIa, une réduc-tion significative de la quantité de CGR transfusés et de transfusion massive aété observée chez les patients victimes d’un traumatisme fermé et ayant survécuplus de 48 heures (49). Ainsi, lors des traumatismes fermés, la dose initialerecommandée est de 200 µg/kg, suivie de 2 doses de 100 µg/kg administrées 1et 3 heures après la première dose (21, 50). Au total, le rFVIIa (Novoseven® ) en

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traumatologie reste un traitement d’exception uniquement sur des recomman-dations d’experts. Tout comme les antifibrinolytiques, les accidents thromboem-boliques sont encore insuffisamment connus et doivent être systématiquementrecherchés en cas d’utilisation de rFVIIa.

6. Stratégies transfusionnelles

6.1. En préhospitalier

Le premier des traitements de la coagulopathie est de tout faire pour prévenirl’apparition de celle-ci et des 2 autres éléments de la triade létale que sont l’aci-dose métabolique et l’hypothermie. Il s’agit donc de prendre en charge très rapi-dement les traumatisés, la probabilité d’apparition de la coagulopathie étantd’autant plus forte que le temps écoulé depuis la survenue du traumatisme estimportant. La règle d’un temps de médicalisation inférieur à 30 minutes chez lepatient non incarcéré doit être de mise sur le terrain : l’hémostase sommaire deslésions accessibles doit être réalisée : plaie du scalp, sonde de tamponnementd’épistaxis, pansements compressifs et parfois garrot de membre ; mise en placed’une contention pelvienne systématique. Le traitement du choc passe par la res-tauration d’une volémie efficace afin de limiter la sévérité de l’acidose, en res-pectant un objectif de PAS à 90 mm Hg en l’absence de traumatisme crânien(sinon PAS de 120 mm Hg). Il s’agit de limiter la quantité de liquide perfuséepour éviter la dilution et le refroidissement, avec un recours précoce à la nora-drénaline. La prévention de l’hypothermie passe par la couverture du patient, lasoustraction du froid, le retrait des vêtements mouillés et le réchauffement duvecteur de transport. La transfusion préhospitalière en CGR est indiquée en casde notion de lésions hémorragiques au départ et/ou en cas de site d’interventionéloigné. En aucun cas cette transfusion ne doit faire retarder l’évacuation dutraumatisé vers un centre adapté. L’administration de thérapeutiques hémosta-tiques spécifiques peut avoir sa place dans certaines situations, mais doit êtreencore évaluée.

6.2. Prescription précoce de PFC

Le concept de « damage control surgery » est déjà ancien, mais jusqu’à présentla prise en charge de la coagulopathie passait au second plan. Plusieurs étudesrécentes ont montré l’importance de traiter rapidement les désordres hémosta-tiques. Ainsi s’est récemment développé le concept de « Damage ControlResuscitation » (156), pour la prise en charge dès l’admission de la triade létale(51-52). L’utilisation de ce concept est large chez les militaires, dans le cadre descombats en Irak et en Afghanistan, avec une prise en charge de la coagulopathiequi débute très tôt, permettant de réduire le remplissage par cristalloïdes, et dediminuer significativement les saignements coagulopathiques peropératoires.Cette notion récente entraîne donc la prescription de PFC dès la suspiciond’hémorragie à cinétique élevée. Les patients présentant une hémorragie sévère

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évidente semblent en pratique avoir moins besoin du bénéfice d’un dépistageprécoce de la coagulopathie. Ces hémorragies sont, en effet, visibles et rapide-ment prise en charge par le clinicien qui devant ces constatations cliniques,mettra rapidement en route une transfusion massive conjointe de CGR et PFC.

6.3. Transfusion conjointe PFC et CGR – ratios PFC/CGR

La tendance actuelle est un apport accru de facteurs de la coagulation.Ledgerwood trouvait que la coagulopathie était aggravée dans plusieurs étudesdans lesquelles moins de plasma était transfusé comparativement aux CGR (53).Aussi, Spinella a montré chez 708 patients transfusés en CGR sur les 24 pre-mières heures que, chaque unité de PFC transfusé était indépendamment asso-ciée avec une augmentation de la survie (OR = 1,17 ; 95 % IC :[1,06-1,29] ;p = 0,002) et ceci, même chez les patients non transfusés massivement (54).Actuellement la prise en charge du traumatisé grave comporte la prescriptionconjointe de PFC et CGR, avec un ratio qui reste controversé mais qui tendvers 1. Dans une cohorte de plus de 2 500 polytraumatisés, Duchesne a étudiéles ratios PFC/CGR reçus et regardé leur impact sur la mortalité. Pour les patientsayant reçu 10 CGR ou moins en 24 heures, il n’y avait pas de différence de mor-talité entre les patients ayant reçu un ratio PFC/CGR à 1:1 et ceux ayant reçu unratio de 1:4 (tendance non significative de réduction de mortalité). En revanche,chez les patients transfusés massivement, la mortalité était significativement plusbasse pour un ratio de 1:1 versus 1:4 (26 % versus 87,5 %, p = 0,0001).Borgman, dans un travail rétrospectif incluant 246 patients admis dans un hôpi-tal militaire en Irak, a défini 3 groupes en fonction du ratio PFC/CGR transfusé :ratio bas à 1:8, ratio moyen à 1:2,5 et élevé à 1:1,4 (55) ; dans chacun de cesgroupes la mortalité par hémorragie était de 92,5 %, 78 % et 37 % (p < 0,001).Le ratio PFC/CGR était indépendamment associé à la survie.

Au total, ces travaux apparaissent concordants : les patients polytransfusés ontun meilleur devenir quand le ratio transfusé PFC/CGR est proche de 1:1 (entre0,6 et 0,9) durant les 24 premières heures de leur prise en charge (54-58).

6.4. Fibrinogène

L’apport du ROTEM® a été considérable dans le diagnostic rapide de la baisseprécoce du fibrinogène. Classiquement, la prescription de fibrinogène étaitguidée par les examens de laboratoire, dont nous avons pu voir les limites.Depuis l’utilisation du ROTEM® en routine dans les pays anglo-saxons et la litté-rature émergente depuis 3 ans, il va nécessairement falloir prendre en compte àl’avenir la notion d’amplitude du caillot obtenue en fibTEM avec le ROTEM® .Cette technique permet, à l’heure actuelle, d’aborder la problématique des seuilsde fibrinogène classiquement définis par les recommandations. Les seuils dessociétés européennes reposent actuellement uniquement sur le dosage plasma-tique avec un niveau retenu de 1g/L (59) repris par les Guidelines européens de2007 (21). Le taux de fibrinogène diminue avec les pertes sanguines massives,la consommation et la dilution des facteurs ainsi qu’avec la fibrinolyse accrue

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dans les situations de spolation sanguine d’origine traumatique. Lors des hémor-ragies sévères, sur le plan de la cinétique, le fibrinogène s’abaisse en premier,suivi secondairement par les facteurs de la coagulation et plus tard par la dimi-nution des plaquettes (60). Or, le fibrinogène est le substrat matériel indispen-sable, permettant la constitution du caillot après la fibrinoformation, afin delimiter le saignement d’aval. Selon les données classiques de la littérature, laconcentration minimale de fibrinogène requise pour la constitution du caillotvarie entre 0,5 et 1g/L (41). Dans l’étude de Hiippala, la concentration critiqueinférieure à 1g/L était atteinte lorsque la perte sanguine dépassait 142 % duvolume sanguin calculé, malgré la substitution en PFC (61). Mais ce seuil optimalde fibrinogène reste difficile à définir et nécessite une réévaluation dans l’hémor-ragie grave : les circonstances cliniques diffèrent de façon importante, et le défi-cit concomitant des autres facteurs hémostatiques va aussi altérer la constitutiondu caillot. D’un point de vue expérimental, différentes études soutiennent l’uti-lisation précoce du fibrinogène lors d’une coagulopathie. Ainsi, il a été observéque l’ajout de fibrinogène permettait de restaurer les paramètres de la coagula-tion sur un modèle de choc hémorragique par traumatisme hépatique chez lecochon (62) ; des seuils élevés de fibrinogène supérieurs à la normale, permet-taient une réduction significative des pertes sanguines. Aussi, dans une étude invitro sur sérum humain dilué (modèle de coagulopathie de dilution), Fries mon-trait qu’après 60 % de dilution, le temps de coagulation augmentait, associé àune diminution significative de la fermeté du caillot et de la polymérisation dela fibrine (63). L’adjonction de doses croissantes de fibrinogène permettait unerestauration de ces paramètres avec une réponse variable suivant le soluté utilisépour générer la dilution. De Lorenzo confirmait également, en hémodilution, leseffets délétères sur la fibrinoformation des colloïdes comparés au sérum salé iso-tonique (64) ; l’adjonction de fibrinogène permettait la reconstitution du caillotavec les 2 groupes de solutés, mais de qualité significativement supérieure(meilleure amplitude du caillot en thromboélastographie) dans le modèle de dilu-tion aux cristalloïdes comparativement aux colloïdes. En chirurgie orthopédique,Mittermayr a étudié chez 66 patients les modifications hémostatiques induitespar l’administration de colloïdes et de cristalloïdes, ainsi que la capacité du fibri-nogène à s’opposer à ces modifications (65) ; les altérations les plus importantesde l’hémostase étaient induites par les hydroxyéthylamidons, suivies des gélati-nes puis des cristalloïdes dont les perturbations étaient les plus faibles. Selon lesdonnées fournies par le ROTEM® , du fibrinogène n’a du être prescrit que chezles patients qui recevaient des colloïdes, suggérant le rôle important des colloïdesdans les anomalies de la polymérisation de la fibrine dans les coagulopathies dedilution. Également en chirurgie à risque hémorragique, Fenger Eriksen a évaluéle bénéfice de l’administration de fibrinogène dans la coagulopathie induite parles HEA dans une population de patients subissant une cystectomie radicale(66) : 20 patients substitués par l’HES 130/0,4 à un niveau de dilution de 30 %ont été randomisés pour recevoir du placebo ou du fibrinogène : une réductionsignificative de l’amplitude du caillot était observée lors de la dilution, corrigée

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dans le groupe fibrinogène. Dans ce dernier groupe fibrinogène, 2 patients sur10 ont du être transfusés, contre 8 sur 10 dans le groupe placebo (p = 0,023).

Sur un modèle porcin de lacération hépatique, Velik-Salchner montre que l’uti-lisation de fibrinogène à forte dose (250 mg/kg) était plus efficace sur la restau-ration des paramètres hémostatiques que l’administration de plaquettes en casde thrombopénie inférieure à 30 G/L (67). En chirurgie cardiaque, Rahe-Meyera évalué l’apport de fibrinogène guidé par les résultats du ROTEM® sur la réduc-tion de la transfusion sanguine et sur la baisse du saignement par les drains dansles 24 heures postopératoire (68). Deux groupes ont été comparés : un groupede 42 patients (données rétrospectives) transfusés avant la mise en place d’unprotocole guidé par le ROTEM® ; le second groupe de 10 patients (prospectif)avec une stratégie d’administration de fibrinogène guidée par le ROTEM® (objec-tif d’amplitude de caillot prédéterminé à 22 mm, avec limite arbitraire de dosemaximale de 6 g administrée). Les résultats montraient dans le groupe ROTEM® ,que l’administration de fortes doses de fibrinogène (moyenne de 5,7 ± 0,7 g)permettait une réduction significative de la transfusion (en CGR, en PFC et enplaquettes). Il s’y associait une baisse significative du saignement postopératoire(moyenne de 366 ± 199 ml versus moyenne de 793 ± 560 ml, p < 0,05). L’admi-nistration ciblée et précoce de fibrinogène permettait une majoration de l’ampli-tude maximale du caillot de 11 à 20 mm (soit un passage de 2,2 à 3,6 g/L detaux sanguin de fibrinogène). Il est intéressant de noter qu’à J1 postopératoireles taux de fibrinogène redevenaient similaires dans les 2 groupes, du fait de laréaction inflammatoire secondaire à la circulation extracorporelle, qui vientmettre les taux en adéquation dans chaque groupe. Dans ce travail, il n’est pasrelevé de complications thrombotiques cardio-vasculaires ou neurologiquesprécoces.

En traumatologie militaire, Stinger sur une population de 252 patients trauma-tisés (ISS moyen 21 ± 10 ; mortalité 30 %) a observé que la mortalité dépendaitétroitement du ratio fibrinogène/CGR (69). Dans le groupe avec un ratio élevé(> 0,2), la mortalité était de 24 % versus 52 % si le ratio était inférieur à 0,2(p < 0,001). Ces données étaient confirmées par l’analyse multivariée qui mon-trait que le ratio fibrinogène/CGR était lié de manière indépendante avec la mor-talité (OR 0,37, IC (0,17-0,81), p = 0,013). Ce travail montrait aussi qu’il y avaitmoins de décès en relation avec un syndrome hémorragique dans le groupe avecratio élevé (44 % versus 85 %, p < 0,001). Le rôle majeur du fibrinogène sembledonc indéniable en traumatologie. Dernièrement dans ces circonstancesd’hémorragie massive, Fries insistait sur le rôle majeur de la dysfonction hémos-tatique liée à l’insuffisance de fibrinogène et recommandait fortement l’utilisa-tion précoce des paramètres de viscoélasticité du sang total fournis par leROTEM® (70).

L’utilisation de concentrés de fibrinogène en première ligne en transfusion com-mence donc à émerger en traumatologie. Le ROTEM® , grâce à un test spécifiqued’obtention rapide, a probablement aidé à la prise en compte de cette problé-matique spécifique du fibrinogène. Aussi, comparativement aux produits san-

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guins, l’administration de fibrinogène est plus simple, rapide, sans risque viral. Eneffet, l’administration de PFC, de plaquettes et de CGR, sont des facteurs derisque indépendants pour le développement de TRALI (Transfusion AssociatedLung Injury) (71) et de défaillance multiviscérale.

6.5. Mesures associées

L’hypocalcémie liée à la déperdition, la dilution et secondaire à la transfusiondoit être corrigée (ajout d’1 g de calcium tous les 4 CGR), le calcium restant unélément-clé dans l’activation de la coagulation.

Les complexes prothrombiniques concentrés semblent intéressants : immédiate-ment disponibles, ils vont permettent l’apport de facteurs de coagulation enfaible volume ; ceux-ci sont largement utilisés, en routine, en Allemagne souscouvert de la thromboélastographie dans le contexte de l’hémorragie traumati-que. Le niveau de preuve de leur efficacité n’est cependant pas encore établi etils ne peuvent être actuellement recommandés.

Le remplissage vasculaire associé : un objectif de 80 à 100 mm Hg de pressionartérielle systolique est recommandé (21). L’application du concept de la réani-mation à faibles volumes « hypotension permissive », permet de diminuer la dilu-tion des facteurs et aussi l’hypothermie, tout en maintenant un niveau deperfusion tissulaire adéquate. Une revue récente a conclu qu’il n’y avait pasd’évidence pour ou contre de larges volumes de remplissage en cas d’hémorra-gies incontrôlées (72). Néanmoins, l’élaboration d’un protocole transfusionnelpréétabli permet une réduction de 50 % de la perfusion en cristalloïdes sur lespremières 24 heures, avec une durée de ventilation qui se retrouve significative-ment réduite (51). La tendance est aussi à l’utilisation précoce à doses modéréesde catécholamines pour limiter le remplissage vasculaire. Les cristalloïdes restentindiqués en première ligne et les posologies des colloïdes de synthèse doiventêtre absolument respectées ; le débat entre cristalloïdes et colloïdes de synthèsen’est pas résolu.

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