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Prévenir la délinquance Guide du coordonnateur CLSPD/CISPD Patricia Boudou Serge Colombié dEXPERTS dEXPERTS

Prevenir la delinquance guide du coordonnateur clspd cispd

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L'objectif premier de cet ouvrage est de rappeler le rôle et les missions du coordonnateur CLSPD, acteur aujourd'hui incontournable de la prévention de la délinquance.

Au cœur d'une actualité sécuritaire omniprésente, son expertise reste de mise. Pour autant, sa légitimité fonctionnelle reste à construire.

Cet ouvrage n'a pas pour objet de défendre le statut des coordonnateurs CLSPD, mais de présenter une fonction et les qualités requises pour l'exercer : elle impose aux coordonnateurs de maîtriser des domaines aussi divers que le droit et la réglementation, l'administratif et la criminologie, tout en possédant une forte expertise technique en communication, animation, coordination et évaluation. Les auteurs appréhendent cette expertise à travers l'évolution de la prévention de la délinquance, la présentation des outils tech-niques et l'établissement d'une méthodologie avec la stratégie territoriale de sécurité et de prévention de la délinquance.

Ce guide peut être vu comme un outil technique d'aide à l'expertise pour la mise en œuvre de la coordi-nation de prévention de la délinquance et son évaluation, mais également pour l'intégration d'un poste essentiel à cette mission : le coordonnateur CLSPD.

Prévenir la délinquance Guide du coordonnateur CLSPD/CISPD

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Prévenir la délinquance Guide du coordonnateur CLSPD/CISPD

Patricia BoudouSerge Colombié

978-2-8186-1026-8

Après une expérience de 8 années de chargé de mission prévention/sécurité en Seine-Saint-Denis (Aulnay-sous-Bois, Drancy), Serge Colombié a intégré en février 2011 le cabinet SûretéGlobale.org en tant que responsable du département Études/conseils.

Après une expérience significative de formatrice/enseignante et de chargée de mission en politique de la ville, sécurité et prévention de la délinquance, notamment auprès du centre interdisciplinaire sur les risques urbains (CIRU), Patricia Boudou a créé en 2009 le cabinet Independant Social Risk Consulting (ISRC) d'audit et de formation en politique de la ville et sécurité urbaine.

[Dessin Une : Patrick Lestienne]www.territorial-editions.frISSN : 1623-8869 – ISBN :

d’EXPERTS d’EXPERTSd’EXPERTS

Prévenir la délinquance Guide du coordonnateur CLSPD/CISPD

Patricia BoudouGérante du cabinet Independant Social Risk Consulting,

spécialisé en politique de la ville et sécurité urbaine

Serge ColombiéConsultant senior au sein d’un cabinet spécialisé

en sécurité urbaine, dont il est un des cofondateurs

Groupe TerritorialCS 40215 - 38516 Voiron Cedex Tél. : 04 76 65 87 17 - Fax : 04 76 05 01 63Retrouvez tous nos ouvrages sur www.territorial-editions.fr

d’EXPERTS668

Février 2016Référence DE

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de recourir à un professionnel du droit.

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ISBN version numérique :ISBN : © Groupe Territorial, Voiron

978-2-8186-1026-8978-2-8186-1027-5

Imprimé par Reprotechnic, à Bourgoin Jallieu (38) - Mars 2016Dépôt légal à parution

Ce pictogramme mérite une explication. Son objet est d’alerter le lecteur sur la menace que représente pour l’au-teur de l’écrit, particuliè-rement dans le domaine de l’édition technique, le développement massif du photocopillage.

Nous rappelons donc que toute reproduction, partielle ou totale, de la présente publication est interdite sans autorisa-tion du Centre français d’exploitation du droit de copie (CFC, 20 rue des Grands-Augustins, 75006 Paris).

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Remerciements . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . p.6

Préface . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . p.7

Préambule . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . p.9

A - Pourquoi une nouvelle version du guide ? . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . p.9

B - Les objectifs de ce guide . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . p.9

C - Le plan de cet ouvrage . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . p.9

Préliminaires La prévention de la délinquance : notions et concepts. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . p.10

A - La prévention de la délinquance, une notion difficile à qualifier . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . p.11

B - Modèles préventifs et typologie de prévention . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . p.12

Partie 1

La doctrine de la prévention de la délinquance aujourd’hui

Chapitre I Rappel des grands principes issus de la loi relative à la prévention de la délinquance . . p.21

A - La légalisation de la « coproduction » des politiques de sécurité et de prévention de la délinquance à travers la loi du 5 mars 2007 . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . p.21

1. Le rôle du maire en tant que principale autorité de police . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . p.222. Le maire, pilote et coordonnateur de la prévention de la délinquance . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . p.23

B - La légitimité des instances de coordination : le conseil local (intercommunal) de sécurité et de prévention de la délinquance . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . p.28

1. La création des conseils locaux de sécurité et de prévention de la délinquance . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . p.282. Le rôle du conseil local de sécurité et de prévention de la délinquance . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . p.293. La composition et présidence du conseil local de sécurité et de prévention de la délinquance . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . p.294. Le fonctionnement du conseil local de sécurité et de prévention de la délinquance . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . p.30

C - Le partenariat au centre de la politique de sécurité et de prévention de la délinquance . . p.33

1. Le partenariat : un enjeu primordial de la politique de prévention de la délinquance . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . p.332. Le partenariat, un atout essentiel à l’efficacité de la politique de prévention de la délinquance . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . p.36

Chapitre II La stratégie nationale de prévention de la délinquance et sa déclinaison locale . . . . . . . . . . p.37

A - Présentation d’une nouvelle démarche en matière de sécurité et de prévention de la délinquance : la stratégie de sécurité et de prévention de la délinquance . . . . . . . . . . . . . p.37

1. Les programmes d’actions de la stratégie nationale de prévention de la délinquance 2013-2017 . . . . . . . . . . . . . . . . . . . p.382. Les chantiers nationaux. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . p.42

B - La déclinaison des orientations nationales à travers le plan départemental de prévention de la délinquance et la stratégie territoriale . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . p.43

1. Le plan départemental de prévention de la délinquance . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . p.432. La stratégie territoriale de sécurité et de prévention de la délinquance . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . p.44

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Chapitre III Les ZSP et la prévention de la délinquance . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . p.47

A - La genèse des ZSP . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . p.47

B - Les principes de fonctionnement des zones de sécurité prioritaires . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . p.49

1. Une méthodologie fondée sur une réponse au plus près du terrain . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . p.492. Un pilotage du dispositif à deux niveaux . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . p.503. L’articulation des ZSP avec les autres dispositifs territoriaux de sécurité . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . p.514. L’évaluation des zones de sécurité prioritaires . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . p.52

Chapitre IV L’articulation politique de prévention de la délinquance/politique de la ville . . . . . . . . . . . . . . . . p.55

A - Quelques généralités sur la nouvelle géographie prioritaire . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . p.55

1. Origines et objectifs . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . p.552. Quelques généralités sur la nouvelle géographie prioritaire . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . p.56

B - Sécurité et tranquillité dans les contrats de ville . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . p.57

1. Convention triennale d’objectifs 2013-2015 entre le ministre de l’Intérieur et le ministre délégué à la Ville, 27 septembre 2013 . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . p.57

2. Convention triennale d’objectifs 2013-2015 entre le ministre de la Justice, garde des Sceaux et le ministre délégué à la Ville, 11 juillet 2013 . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . p.59

C - La géographie prioritaire, une priorité de la politique nationale de prévention de la délinquance . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . p.60

Partie 2

Le coordonnateur, acteur incontournable de la sécurité et de la prévention de la délinquance

Chapitre I Le coordonnateur CLSPD : une fonction clé dans la mise en œuvre de la politique locale de sécurité et de prévention de la délinquance . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . p.65

A - Le coordonnateur CLSPD, technicien de la prévention de la délinquance . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . p.65

1. Un soutien opérationnel de la politique de sécurité et de prévention de la délinquance . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . p.662. La connaissance du terrain . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . p.69

B - Une nouvelle fonction, l’évaluation des actions de prévention de la délinquance . . . . . . . . . . . . p.99

Chapitre II Le coordonnateur CLSPD, un profil spécifique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . p.102

A - Le coordonnateur CLSPD, un professionnel des politiques publiques de sécurité et de prévention de la délinquance à légitimer . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . p.102

1. Un besoin de reconnaissance de son statut . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . p.1022. Une harmonisation nationale de ses fonctions et missions . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . p.103

B - Le coordonnateur CLSPD : une fonction polyvalente . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . p.103

1. Les rôles et missions du coordonnateur CLSPD . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . p.1032. Ses obligations professionnelles : la question du secret professionnel . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . p.1053. Les qualités professionnelles du coordonnateur CLSPD/CISPD . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . p.106

C - Le coordonnateur CLSPD/CISPD, un « profil qui reste à construire » . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . p.106

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Annexes

Annexe I Liste des abréviations . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . p.111

Annexe II Bibliographie . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . p.112

Annexe III Fiche métier du coordonnateur sécurité et prévention de la délinquance . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . p.118

Remerciements 

Nous souhaitons tout d’abord adresser nos remerciements à ceux qui ont participé activement à la rédaction de cet ouvrage. Leur collaboration a été particulièrement appréciée.Nous profitons également de cette occasion pour remercier l’en-semble des professionnels (coordonnateurs CLSPD/CISPD ou non) qui nous ont encouragés à poursuivre ce projet, malgré l’ampleur de la tâche.Enfin, nos remerciements ne seraient pas complets sans ceux adressés aux éditions Territorial qui nous ont renouvelé leur confiance pour la rédaction de cette nouvelle version. 

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La délinquance est un phénomène social complexe, mouvant et plurifactoriel. L’État, bien conscient de ses effets néfastes sur les jeunes générations, a fait de la loi n° 2007-297 du 5 mars 2007 sur la prévention de la délin-quance un texte législatif fondamental, qui consacre cette prévention comme une politique publique territorialisée permanente, plaçant le maire comme pivot et cœur du dispositif, dans son rôle d’animateur et de coordonnateur.

D’une manière générale, la prévention de la délinquance est devenue une préoccupation majeure pour les ins-titutions publiques, les dirigeants des collectivités territoriales et les concitoyens, directement concernés par le phénomène. Aujourd’hui, le terme même de prévention fait l’objet d’un véritable questionnement, tant les enjeux politiques, économiques, sociaux, humains sont importants pour la France de demain. En général, la prévention de la délinquance peut être entendue comme l’ensemble des mesures non coercitives destinées à empêcher la réalisation d’infractions. Or malgré l’abondance des travaux et l’engouement pour le sujet, on ne dispose toujours pas de définition légale et reconnue par tous de la prévention de la délinquance.

Dans cet esprit, Patricia Boudou et Serge Colombié, experts et professionnels reconnus par leurs pairs, ont estimé que ce sujet devait faire l’objet d’une réflexion plus approfondie incluant toute la partie doctrinale de la problématique, et ainsi répondu à la demande, notamment, des coordonnateurs des CLSPD ou des CISPD. Cette doctrine appelle des réponses opérationnelles structurées. En effet, la prévention de la délinquance s’inscrit dans une politique publique territorialisée évolutive, dans la mesure où la nature des faits de délinquance tend à se multiplier dans l’espace et le temps, inspirant des réformes d’importance tant législative que réglementaire.

Aujourd’hui, l’enjeu est d’être en mesure de suivre ces évolutions avec plus de précision, d’en rechercher les causes et d’y apporter des réponses appropriées. Cela signifie qu’un dispositif de prévention de la délinquance ne doit pas être figé mais, au contraire, suffisamment souple et réactif pour rester en phase avec la réalité territoriale. Une telle politique s’enrichit de bonnes pratiques du terrain, déclinant localement un programme d’actions innovantes, dans un premier temps expérimentales, ensuite diffusées sur les plans départemental, régional et national et, si nécessaire, réajustées au plus près des réalités des territoires tant urbains que ruraux.

J’ai la conviction, en tant que coordinatrice du CLSPD de la commune de Vedène et présidente de l’Association des coordonnateurs CLSPD du Vaucluse, que cet ouvrage représente pour chacun d’entre nous un véritable outil de travail, faisant prévaloir la dimension partenariale essentielle pour les institutions publiques, les élus et les coor-donnateurs, par exemple dans la zone de sécurité prioritaire.

Cette nouvelle édition croise différentes réflexions juridiques et pratiques, dans un souci d’efficacité mais également d’optimisation des dispositifs, en privilégiant une démarche pragmatique structurée reposant sur des valeurs com-munes aux institutions, aux élus et à nous, coordonnateurs ou professionnels concernés. À sa lecture, j’ai trouvé des mots-clés qui vont élargir le périmètre professionnel, comme les missions d’insertion combinées avec la politique de la ville. L’intérêt est de voir notre expérience professionnelle s’enrichir des bonnes pratiques de terrain et, en retour, de mieux les soutenir auprès de nos élus et des institutions publiques afin de les pérenniser et mieux les diffuser.

C’est l’occasion, en tant que coordinatrice, de revenir sur la lisibilité de notre métier. Nous vivons un paradoxe : la mission de coordination de prévention est reconnue alors que le métier de coordonnateur ne l’est pas encore. D’où, parfois, la difficulté, pour certains d’entre nous, de légitimer l’instance du CLSPD au sein même de son administration. Or, combien d’entre nous ont su démontrer aux élus et aux institutions publiques notre adaptation à ce « nouveau métier », la véritable valeur ajoutée apportée aux collectivités territoriales par une redynamisation des politiques de sécurité et de prévention de la délinquance ?

Outre cette interrogation sur le métier, qui reste sans réponse dans ce document, il est important de préciser que chacun d’entre nous est un professionnel qui doit se rendre le plus efficient possible, malgré une mission très exigeante, complexe et difficile à mener, pour contribuer, soutenir, accompagner, stimuler et participer à un travail collectif pour mettre en place une politique de prévention de la délinquance la plus opérationnelle possible dans un environnement local et national fragilisé.

Dans un contexte en constante accélération, cette nouvelle édition représente un outil indispensable pour mieux comprendre et appréhender une culture de prévention de la délinquance, avec toutes ses composantes et dans

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un minimum de temps. Grâce à son interprétation, les professionnels seront à même de faire des propositions plus claires, fortes, déterminées et pertinentes, s’inscrivant dans un cadre méthodologique prédéterminé, dans une stra-tégie territoriale de sécurité et de prévention de la délinquance.

Françoise ASTIERChargée de mission à la direction générale des services de la ville de Vedène

Préambule

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Préambule 

A - Pourquoi une nouvelle version du guide ? 

Cinq années se sont écoulées depuis la parution de la précédente version de ce guide1. Durant cette période, la prévention de la délinquance s’est largement structurée depuis la parution de sa « loi fondatrice », il y a maintenant presque une décennie2.En parallèle, la prévention de la délinquance est devenue un domaine plus technique avec son corpus de règles, sa méthodologie ou encore ses financements. Cette technicité accrue rend incontournable le rôle de techniciens « experts » en la matière auprès des élus.Pour autant, aucun statut de coordonnateur n’est à ce jour créé, malgré les recommandations de rapports parus au cours de la période 2011-20163. Plus que l’inscription au sein d’une filière de la fonction publique territoriale que ces rapports appellent de leurs vœux, la légitimité du coordonnateur CLSPD/CISPD passe avant tout par une professionnalisation accrue des agents en poste ou se destinant à cette fonction.Cet ouvrage souhaite contribuer modestement à cette professionnalisation. 

B - Les objectifs de ce guide 

Le présent guide est plus qu’une mise à jour des versions antérieures4, même si le lecteur y retrouve un certain nombre de sujets traités antérieurement et qui méritaient, selon nous, d’être à nouveau abordés. D’autres ont disparu et d’autres thèmes encore auraient certainement mérité une place de choix au sein de cet ouvrage. Toutefois, ce dernier ne saurait prétendre aborder de manière exhaustive un champ devenu vaste et complexe au fil des années. Les auteurs renvoient donc le lecteur aux versions précédentes pour un panorama plus complet.Cette nouvelle version du guide du coordonnateur CLSPD/CISPD privilégie une approche plus « théorique » de la matière avec d’importants développements sur un certain nombre de concepts et de notions, de méthodologies ou encore de dispositifs dont la connaissance est primordiale pour l’exercice de la fonction. Ce choix résulte d’attentes de professionnels recueillies au cours de formations assurées par les auteurs de ce guide au Centre national de la fonction publique territoriale (CNFPT).Enfin, la version précédente de cet ouvrage développait une partie consacrée à « la boîte à outils » du coordonnateur CLSPD/CISPD pour l’accompagner dans ses missions. Une « boîte à outils » plus complète et « officialisée » par l’entremise du secrétariat général du Comité interministériel de prévention de la délinquance est aujourd’hui à disposition des pro-fessionnels de la coordination. Nous ne pouvons que nous réjouir de l’introduction du « Benchmarking5 » dans la doctrine française de la prévention de la délinquance. Il sera largement fait référence à cette « boîte à outils » au sein de ce guide. 

C - Le plan de cet ouvrage 

La prévention de la délinquance n’est pas une notion « gravée dans le marbre ». Elle évolue au gré du temps et des conceptions. Actuellement, le champ de la prévention de la délinquance repose sur plusieurs approches et modèles, dont certains ont grandement influencé la doctrine actuelle. Ce sera l’objet d’une partie introductive.La première partie sera consacrée à un large développement sur les caractéristiques et les fondements de la doc-trine française de la prévention de la délinquance. Elle abordera notamment les derniers dispositifs créés telles les zones de sécurité prioritaires, et présentera de manière détaillée ce qui constitue aujourd’hui le cadre de référence de cette matière, à savoir la stratégie nationale de prévention de la délinquance.La seconde partie sera exclusivement consacrée à la fonction de coordination du CLSPD/CISPD. Elle rappellera le rôle incontournable de ce professionnel dans la mise en œuvre de la politique locale de prévention de la délinquance, tout en abordant la spécificité de ce « métier » et de ses exigences. 

1.  Prévention de la délinquance : guide du coordonnateur, Serge Colombié, Patricia Boudou, Territorial Éditions, coll. Dossiers d’Experts, janvier 2011.2.  Loi n° 2007-297 du 5 mars 2007 relative à la prévention de la délinquance.3.  Rapport d’information sur la lutte contre l’insécurité sur tout le territoire n° 2311, présenté par Jean-Pierre Blazy, député, enregistré à la présidence

de l’Assemblée nationale le 22 octobre 2014, La coordination des politiques locales de prévention et de sécurité : le rôle des coordonnateurs, Mission permanente d’évaluation de la politique de prévention de la délinquance, janvier 2013.

4.  Une version du guide avait également été publiée en mars 2009 : Prévention de la délinquance : guide du coordonnateur, Serge Colombié, avec la participation de Stéphane Jolly, sous la coordination de Jean-Luc Besson, Territorial Éditions, coll. Dossiers d’Experts, mars 2009.

5.  On pourrait traduire cette expression par « pratiques ou expériences qui ont fait leurs preuves ».

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Préliminaires La prévention de la délinquance : notions et concepts

 La définition de la notion de prévention de la délinquance avait déjà été abordée lors de la précédente version de ce guide, mais en favorisant le champ de la prévention de la délinquance comme une figure des programmes gouvernementaux.Sur le plan des objectifs gouvernementaux, on évoquait deux définitions claires mais non opératoires :- la première définition recouvrait les moyens directement destinés à empêcher les actes délictueux (notamment

par la protection, la dissuasion ou la répression) ;- l’autre recouvrait l’ensemble des actions qui, par une amélioration globale de la vie urbaine, réduisent la proba-

bilité d’apparition de ces actes.Or, ce que l’on désigne habituellement par prévention de la délinquance ne correspond ni à l’une, ni à l’autre de ces définitions. À l’origine, l’expression « prévention de la délinquance » désignait un objectif à atteindre, c’est-à-dire : tout ce qui peut concourir à réduire la fréquence des actes délictueux et les nuisances associées (notamment le sentiment d’insécurité).Mais depuis environ 30 ans, cette expression désigne aussi bien des domaines d’action très concrets tels que des instances (CLSPD), des services et des personnels (coordonnateurs CLSPD et leurs services de rattachement dans les communes ou agglomérations), les services de l’État qui sont leurs interlocuteurs, des budgets et des règles d’attribution et d’utilisation de ceux-ci. On peut décliner ce système de prévention selon le schéma suivant : 

Prévention « étroite » 

Dissuasion, répression, protection

Prévention « globale » 

Accompagnement du judiciaire, problèmes sensibles

Prévention « intermédiaire » 

Toutes actions de remédiation sociale

Prévention étroite : Sera réservé le terme de prévention aux actions qui interviennent directement pour empêcher le passage à l’acte délictueux. Plutôt que de prévention, on parlerait alors de répression, de protection ou de dissuasion, et l’essentiel du travail à fournir serait du ressort de la police et de la justice, et secondairement d’autres instances de contrôle social.

Prévention globale : si l’on considère que les actes délictueux sont d’autant plus fréquents qu’existent un certain nombre de dysfonctionnements, toute action susceptible de réduire ces dysfonctionnements ou d’en atténuer les effets a une utilité préventive et peut donc être intégrée dans la prévention de la délinquance (animation, formation, éducation, emploi, etc.).

Prévention intermédiaire : On peut aussi faire de la prévention de la délinquance un secteur opérationnel à part entière, qui viendrait compléter la prévention étroite et la prévention globale. Ce secteur pourrait être défini de la manière suivante :- il s’intéresserait à des phénomènes ou des actions

directement et explicitement liés à la délinquance ou aux autres comportements générateurs d’insécurité ;

- il aborderait ce champ avec un triple objectif : * limiter les effets secondaires négatifs, pour la société

et pour les individus, des problèmes eux-mêmes ou des réponses répressives qu’ils appellent ;

* viser une efficacité à plus long terme ; * compléter des actions répressives ou curatives par

d’autres, plus réparatrices ou prenant mieux en compte la dimension collective.

On y trouverait notamment toutes les formes de médiation autour des actes générateurs d’insécurité, la recherche de réponse judiciaire alternative à l’emprisonnement, l’aide à la réinsertion des prisonniers en fin de peine et l’aide aux victimes.

Approche politique de l’insécurité urbaine

 

Source : Patricia Boudou, schéma inspiré de Prévention de la délinquance – Politique et pratiques, L. Barbé, C. Coquelle, V. Persuy, ESF éditeur, 1998

 Cependant, la stratégie nationale de prévention de la délinquance applicable sur la période 2013-2017 s’inscrit plus dans une approche globale de la prévention de la délinquance combinant plusieurs approches pour davantage d’opérationnalité. Au vu de ces nouvelles perspectives, il est essentiel de définir le concept de la prévention de la délinquance pour mieux comprendre les objectifs de la démarche stratégique. Au sein de cette nouvelle version du guide, nous avons souhaité aborder la notion de prévention de la délinquance à travers quelques références criminologiques, dans le but de mieux cerner la complexité des phénomènes de délinquance pour mieux adapter

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les réponses à ces phénomènes. En effet, la connaissance criminologique des phénomènes de délinquance nous paraît aujourd’hui indispensable aux professionnels souhaitant exercer la fonction de coordonnateur CLSPD/CISPD.Après avoir brièvement exposé les différentes approches de prévention de la délinquance, nous nous attarderons sur les différents concepts et modèles existants tout en les replaçant dans la politique nationale de prévention de la délinquance en œuvre aujourd’hui. 

A - La prévention de la délinquance, une notion difficile à qualifier Le terme « prévention », dans une acception large, est complexe. En effet, cette notion se laisse mal appréhender dans le cadre d’une formulation stricte, unique et définitive. C’est la raison pour laquelle parler de prévention de la délinquance reste un exercice délicat tant cette notion recouvre une multitude d’approches. En effet, il n’existe pas, à ce jour, de définition « universelle » de la prévention de la délinquance. Nous ne pouvons que nous référer à différentes notions et à différents concepts. « L’absence d’une définition concise et claire aurait pour fondement trois raisons essentielles, selon certains auteurs :- d’une part, la prévention de la délinquance est le reflet de conceptions différentes sur la thématique « criminalité ».

En effet, la notion de crime6 est une notion qui diffère dans le temps et l’espace, rendant sa définition difficile à appréhender. Également, la prévention de la criminalité est façonnée par les caractéristiques spatio-temporelles du contexte dans lequel elle se déploie ;

- d’autre part, la mise en œuvre de la prévention de la criminalité est trop floue. En effet, certains acteurs, politiques et pratiques, revendiquent de « faire de la prévention » sans forcément que cela soit réellement le cas. On peut également noter qu’à l’inverse, certaines actions n’en portent pas spécifiquement le nom et pour autant parti-cipent à cet effort ;

- en dernier lieu, l’apport abondant de productions scientifiques sur le sujet instaure une certaine difficulté à saisir cette notion. En effet, les différences d’approches entre les auteurs ne facilitent pas une compréhension globale de cette notion et ne font ressortir parfois qu’une simple tendance. »7

 Si nous ne pouvons pas nous appuyer sur la sociologie pour définir la prévention de la criminalité, il en est de même du droit. En effet, il n’existe pas de définition « légale » de la prévention de la délinquance. Même la loi n° 2007-297 du 5 mars 2007 relative à la prévention de la délinquance, pourtant texte « fondateur » de la politique publique de prévention de la délinquance, n’en définit pas non plus les contours. Tout au plus pouvons-nous nous référer à l’exposé des motifs du projet de loi qui expose que : « La politique de prévention de la délinquance contribue à l’amélioration durable de la sécurité dans tous les domaines de la vie au quotidien (transports, logements, loisirs…) et au renfor-cement de la responsabilité civique. Dans le respect des libertés individuelles dont l’autorité judiciaire est garante, elle s’exerce en direction des victimes et des auteurs d’infractions, par des mesures actives et dissuasives visant à réduire les facteurs de passage à l’acte et la récidive, soit par la certitude d’une réponse judiciaire adaptée, soit en intervenant sur les processus de commission de l’infraction, ou encore en favorisant une moindre vulnérabilité de la victime potentielle. À cet effet, elle met en œuvre des mesures portant sur les personnes et sur l’environnement social. »Cette approche globale de la délinquance n’est pas facilement appréhendable pour tous les professionnels intervenant dans le champ de la délinquance et impose à ces derniers l’adoption d’une méthode consistant à :- mieux comprendre les phénomènes de délinquance au niveau de ses territoires d’intervention ;- poser des objectifs précis et réalisables ;- coordonner les actions et dispositifs de lutte contre la délinquance ;- savoir s’adapter et remettre en question ses pratiques professionnelles.Même si une définition de la prévention de la délinquance reste difficile à avancer, nous vous proposons de rete-nir celle énoncée par Maurice Cusson, criminologue québécois8 : « La prévention de la délinquance consiste en l’ensemble des actions non coercitives sur les causes, les raisons et les préliminaires des délits dans le but d’en

6.  La notion de « crime » est ici évoquée dans son acception la plus large et peut être assimilée à « infraction ».7.  Prévenir la criminalité : oui…, mais comment ?, Manon Jendly, coll. « La Question », Éditions de l’Hèbe, mars 2013, http://www.lhebe.ch.8.  Spécialiste de la sociologie criminelle ainsi que de la question de la délinquance juvénile, Maurice Cusson a enseigné à l’école de criminologie

de l’université de Montréal. Il est l’auteur de plusieurs ouvrages, dont La délinquance, une vie choisie (2005), et le directeur de l’ouvrage Traité de sécurité intérieure (2007) réunissant les contributions de 37 collaborateurs. Son dernier ouvrage porte sur Les homicides (2015), http://www.editionshurtubise.com/auteur/378.html.

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réduire la probabilité ou la gravité. »9 Il convient de noter que cette définition se restreint à la prévention des infrac-tions stricto sensu et n’englobe pas la prévention de l’insécurité.Pour toutes ces raisons, nous avons choisi de privilégier la définition suivante : « La prévention de la criminalité englobe des stratégies et mesures qui visent à réduire les risques d’infractions et les effets préjudiciables que ces dernières peuvent avoir sur les personnes et la société, y compris la peur du crime, et ce en s’attaquant à leurs multiples causes. » Cette définition s’appuie sur les principes directeurs des Nations unies applicables à la prévention du crime10. 

B - Modèles préventifs et typologie de prévention L’hétérogénéité des définitions de la prévention de la délinquance génère une diversité de conceptions de la pré-vention de la délinquance.On oppose classiquement le « modèle français » de prévention de la délinquance qui combine la prévention sociale et la prévention situationnelle au « modèle anglo-saxon » de la prévention de la délinquance11.En réalité, les approches sociales et situationnelles de la prévention de la délinquance se déclinent elles-mêmes en d’autres formes de préventions selon l’objectif visé. On peut aujourd’hui distinguer cinq « modèles » préventifs. La prévention sociale : dans le modèle de « prévention sociale », qui s’est imposé en France comme le modèle dominant, il ne s’agit pas de rechercher la collaboration du voisinage, de la communauté (c’est-à-dire, en somme, des victimes effectives ou potentielles) pour dissuader, identifier et endiguer les comportements déviants, mais d’engager des actions en direction des auteurs (potentiels) d’actes délinquants et d’incivilités. Pour les tenants de cette prévention en effet, le délinquant est souvent considéré comme la victime d’une société qui n’a pas su assurer son intégration et sur lequel pèsent des facteurs d’inadaptation liés à son vécu, à ses conditions de vie…Cette forme de prévention met donc en avant la promotion du bien-être et de la cohésion sociale en privilégiant des actions dans les domaines de la santé, de l’éducation, du développement économique et social.Sous cette terminologie, elle promeut des actions sociales entendues au sens large en mettant l’accent autant sur les facteurs de risque12 et sur les facteurs de protection13 associés à la criminalité et à la victimisation, que sur les causes structurelles susceptibles de se développer14.La prévention sociale appréhende donc la criminalité comme étant la résultante d’un déficit de socialisation lié à une vulnérabilité sociale, affective, éducative, culturelle et/ou économique et conduit à intervenir tant sur les capa-cités individuelles de chacun que sur l’environnement immédiat, les conditions de vie et les éléments structurels qui nous entourent15.La prévention sociale a constitué le socle du modèle préventif français jusqu’à la loi n° 95-73 d’orientation et de programmation pour la sécurité du 21 janvier 1995 qui a introduit la prévention situationnelle, notamment par l’entremise de la vidéoprotection. Le rapport Bonnemaison16 a largement contribué à la renommée internationale de l’approche française. La prévention développementale : elle porte sur l’individu, plus précisément sur l’enfant. Elle vise l’amélioration de la compétence sociale et cognitive d’enfants qui risquent de dériver vers la délinquance. L’intervention est précoce ;

9.  Traité de sécurité intérieure, sous la direction de Maurice Cusson, Benoît Dupont, Frédéric Lemieux, Cahiers du Québec, coll. « Droit et criminologie », Éditions Hurtubise, 2007.

10.  Prévention de la criminalité et sécurité quotidienne, tendances et perspectives, Centre international pour la prévention de la criminalité, avril 2010, téléchargeable à l’adresse suivante : http://www.crime-prevention-intl.org/fileadmin/user_upload/Publications/prevention_de_la_criminalite_et_la_securite_quotidienne_FR.pdf.

11.  La prévention de la délinquance, Richard Bousquet, Éric Lenoir, coll. « Questions judiciaires », Éditions PUF, 2009.12.  Les facteurs de risque regroupent les facteurs qui augmentent la possibilité qu’une infraction soit commise ou réitérée. Ils peuvent se référer à des

caractères individuels (caractère d’opposition), familiaux (habiletés parentales) ou « déficients » liés à l’environnement social (présence d’efficacité sociale) ou de services disponibles (peu ou absence de tels services), Prévention de la criminalité et sécurité quotidienne, tendances et perspectives, Centre international pour la prévention de la criminalité, avril 2010.

13.  Les facteurs de protection regroupent les facteurs qui 1) réduisent l’impact d’un événement négatif impossible à éviter, 2) aident les individus à éviter ou résister à la tentation d’enfreindre la loi, 3) réduisent les risques d’un individu d’emprunter une voie susceptible de le mener à la commission d’une infraction et/ou, 4) favorisent une possibilité alternative, Prévention de la criminalité et sécurité quotidienne, tendances et perspectives, Centre international pour la prévention de la criminalité, avril 2010.

14.  Prévenir la criminalité : oui…, mais comment ?, Manon Jendly, coll. « La Question », Éditions de l’Hèbe, mars 2013, http://www.lhebe.ch.15.  Prévenir la criminalité : oui…, mais comment ?, Manon Jendly, coll. « La Question », Éditions de l’Hèbe, mars 2013, http://www.lhebe.ch.16.  Face à la délinquance : prévention, répression et solidarité, Commission des maires sur la sécurité, La Documentation française, 1982.

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elle se réalise dans le contexte de la famille et de l’école et l’action est de nature éducative17. L’efficacité de cette prévention est avérée par des résultats probants. On parle plus communément de « prévention précoce ».Elle s’inscrit dans une approche globale des problématiques individuelles18. La prévention précoce se situe dans le registre de la prévention primaire. Elle aurait également des implications budgétaires19.L’auteur de référence de cette approche est le criminologue québécois Richard E. Tremblay20, dont les recherches portent principalement sur le développement des problèmes de comportement d’enfants et d’adolescents et leur lien avec les compétences éducatives de leurs parents. Ce dernier considère que les conduites agressives d’un enfant constituent un précurseur de la criminalité lié à l’adolescence et estime que la non-violence s’apprend au cours des premières années de la vie21. Il a construit sa théorie à partir de plusieurs échantillons montréalais, qué-bécois et canadiens d’études longitudinales22 couplées à l’utilisation de statistiques permettant de regrouper les trajectoires individuelles sur une longue période de temps23.Le débat sur la prévention précoce en France a cristallisé les passions, notamment lors de la parution controversée24 de l’expertise collective de l’Institut national de la santé et de la recherche médicale (Inserm) sur le trouble des conduites chez l’enfant et l’adolescent25 en 2005. Ce rapport avait établi le bilan des actions visant à prévenir de façon précoce les risques de vulnérabilité sociale et psychologique. Depuis la parution de cette étude, « le dévelop-pement de la prévention précoce en France est limité par le débat lié à la philosophie attribuée à la politique26 ».Jean-Marie Bockel, sénateur-maire de Mulhouse, dans un rapport publié en 201127, avait tenté de relancer le débat autour du concept de prévention précoce, en s’interrogeant de la manière suivante : « Une prise en charge précoce des difficultés des enfants ne serait-elle pas préférable à l’attitude qui consiste à attendre le passage à l’acte ? » Prévention communautaire : elle se réfère à toutes les stratégies et mesures qui ont pour objectif de modifier les conditions locales qui influent sur la criminalité, la victimisation, l’insécurité et de façon plus générale le bien vivre ensemble. Pour ce faire, elle promeut des actions qui reposent sur les initiatives, les ressources et l’engagement des membres d’une communauté et qui sont destinées à améliorer leur cadre de vie, leurs interactions sociales et leur sentiment d’appartenance. L’idée qui prévaut à l’origine de la prévention communautaire est qu’un délitement de la vie sociale d’un quartier et du contrôle social informel conduit inévitablement à des problèmes de mésentente, voire de criminalité et d’insécurité28. Prévention par l’aménagement du milieu (PCAM) : elle est la traduction de Crime Prevention Throught Envi-ronmental Design (CPTED) de Ray. C. Jeffery reconnu comme l’ouvrage fondateur de ce mouvement29. Le CPTED est composé de deux dimensions qui s’associent : la dimension technique de l’aménagement de l’espace pour réduire la malveillance afin d’agir sur les conditions physiques d’opportunité au délit d’une part et la dimension comportementale. Cette dimension comportementale soutient que la forme urbaine peut agir sur le comportement

17.  Traité de sécurité intérieure, sous la direction de Maurice Cusson, Benoît Dupont, Frédéric Lemieux, Cahiers du Québec, coll. « Droit et criminologie », Éditions Hurtubise, 2007.

18.  La prévention précoce : entre acquis et controverses, quelles pistes pour l’action publique ?, Note d’analyse n° 205, Questions sociales, Centre d’analyse stratégique, 22 janvier 2010, note téléchargeable sur le site http://www.strategie.gouv.fr.

19.  La note du Centre d’analyse stratégique cite une étude menée par un universitaire canadien, Richard Tremblay, qui affirme qu’« un dollar investi dès le plus jeune âge en matière de prévention permet d’économiser 7 dollars qui auraient sinon été consacrés à des actions répressives et curatives ».

20.  Richard E. Tremblay est professeur émérite de pédiatrie, psychiatrie et psychologie à l’université de Montréal, et professeur de développement de l’enfant à l’University College Dublin (UCD). Depuis le début des années 80, il dirige un programme d’études longitudinales et expérimentales axé sur le développement physique, cognitif, émotionnel et social des enfants de la conception à l’âge adulte. À ce titre, il étudie l’évolution des problèmes psychosociaux d’ajustement et leur prévention. Il est directeur du Centre d’excellence pour le développement des jeunes enfants, coordinateur du réseau international Marie Curie pour la promotion de la santé dans la petite enfance et membre de l’Académie des sciences du Canada. Le professeur Tremblay a publié plus de 400 articles scientifiques, http://www.ncbi.nlm.nih.gov/pmc/articles/PMC3085676/.

21.  Prévenir la criminalité : oui…, mais comment ?, Manon Jendly, coll. « La Question », Éditions de l’Hèbe, mars 2013, http://www.lhebe.ch.22.  L’étude de cas longitudinale est un type particulier d’étude de cas. Elle peut être définie par trois éléments : les données sont recueillies au cours de

deux périodes distinctes au moins, les sujets sont comparables d’une période à l’autre et l’analyse consiste généralement à comparer les données entre deux périodes ou retracer l’évolution observée. Comme toute étude de cas, l’étude longitudinale peut porter sur un cas unique ou plusieurs cas ; Musca Geneviève, « Une stratégie de recherche processuelle : l’étude longitudinale de cas enchâssés », M@n@gement 3/2006 (Vol. 9), pp. 153-176, visible sur l’URL : http://www.cairn.info/revue-management-2006-3-page-153.htm.

23.  Les trajectoires de conduites agressives de l’enfance à l’âge adulte, Éric Lacourse, Traité des violences criminelles, Les questions posées par la violence, les réponses de la science, sous la direction de Maurice Cusson, Stéphane Guay, Jean Proulx et Francesca Cortoni, Éditions Hurtubise, 2013.

24.  Constitution d’un collectif « Pas de zéro de conduite pour les enfants de 3 ans », http://www.pasde0deconduite.org/appel/.25.  Troubles des conduites chez l’enfant et l’adolescent, Expertise collective, Inserm, 2005.26.  Voir Sécutopics/Thématique Éducation/École/Activités des partenaires sur le site http://www.ffsu.org.27.  Prévention de la délinquance : agir ensemble, Rapport à monsieur le Premier ministre sur la politique de prévention de la délinquance,

Jean-Marie Bockel, sénateur du Haut-Rhin, juillet 2011.28.  Prévenir la criminalité : oui…, mais comment ?, Manon Jendly, coll. « La Question », Éditions de l’Hèbe, mars 2013, http://www.lhebe.ch.29.  Crime Prevention Throught Environmental Design, Ray. C. Jeffery, Sage Publications, Beverly Hills, 1971.

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de ses usagers, et partant, sur le comportement d’un délinquant potentiel. Elle soutient également que l’espace peut développer un sentiment de sécurité ou d’insécurité, de repli sur soi ou de cohésion sociale. La publication de l’ouvrage de Timothy Crowe intitulé CPTED en 1991 redonne un second souffle à ce concept. Il développe plusieurs principes forts tels la surveillance naturelle, le contrôle des accès et la territorialité30. Depuis les années 2000, une nouvelle génération du CPTED voit le jour. Elle est caractérisée par l’émergence d’un nouveau modèle qui prend davantage en compte la prévention sociale afin de construire un lien social entre les habitants et d’impliquer les habitants pour prévenir la malveillance. Elle développe le principe d’une prise en compte de l’urbanisme à petite échelle, l’échelle humaine31. Prévention situationnelle : le modèle de « prévention situationnelle », qui consiste à entourer de précautions une éventuelle victime, est apparu, quant à lui, tardivement en criminologie. Dans les années 70, un certain nombre d’observations ont interpellé les chercheurs ; ainsi, après avoir muni les voitures d’équipements antivols, les vols de voitures ont diminué dans des proportions significatives.Ce modèle de prévention porte donc sur les circonstances dans lesquelles les délits pourraient être commis. Cette pré-vention consiste à modifier les situations rencontrées par les délinquants pour que les délits projetés leur paraissent plus difficiles, risqués ou inintéressants32. Les tenants de cette forme de prévention se fondent pour construire leur modèle sur les théories du choix rationnel, qui appréhendent le délinquant comme un être doté d’une rationalité propre, évaluant le rapport coût/profit pour commettre une infraction. Ils s’éloignent en cela des partisans de la prévention sociale qui valorisent, on l’a vu, les déterminants sociaux, notamment les conditions socio-économiques.En réalité, ils se préoccupent peu du délinquant en lui-même, de son parcours de vie, de son éventuelle réintégra-tion dans la société. D’un point de vue opérationnel, les tenants de ce modèle préconisent des solutions locales, ciblées par rapport à des situations déterminées. L’important n’est pas d’agir sur le délinquant, mais sur la situation délinquante, en opérant sur une situation faisant intervenir le triptyque délinquant-cible-dispositif défensif. En ce sens, la prévention situationnelle relève plutôt de la prévention primaire et entend, en agissant sur des situations localisées, limiter l’occurrence d’un acte délinquant. Pour les tenants de cette approche, si la délinquance s’expli-quait uniquement par des prédispositions individuelles, les protections ne feraient que déplacer la délinquance. Mais les délinquants sont des êtres humains, doués comme chacun d’une rationalité. Ils adaptent leur action aux circonstances ; si le jeu est trop dangereux, ils ne commettront pas d’infractions. En raison d’une mesure de protec-tion, le délinquant pourra commettre le même crime ailleurs ou en commettre un plus grave, commettre un autre délit, mais moins grave, ou renoncer à son projet et opter pour une solution non criminelle. La théorie de la prévention situationnelle33 repose donc sur cinq propositions34 :- le choix rationnel : les délits sont les résultats de choix en situation qui visent à être rationnels ;- les situations précriminelles influencent les choix de commettre ou non un délit, parce qu’elles présentent des

perspectives variables de profits, de difficultés et de risques. Les variables contribuant à rendre une situation pro-pice sont les caractéristiques des victimes (négligence, provocation, vulnérabilité), des cibles (objets intéressants, accessibles, vulnérables et transportables), des éléments stimulants (armes, alcool, drogue) et de l’environnement physique (obscurité) ;

- les facteurs macroscopiques : sur un territoire donné, le nombre d’occasions de délits offertes est fonction du nombre de cibles intéressantes (automobiles, argent comptant), des habitudes de vie des gens et des précautions qu’ils prennent (l’habitude des adultes et des jeunes de quitter la maison tous les jours pour aller au travail ou à l’école laisse nombre de logements exposés au cambriolage), de l’espace, du temps et du milieu physique, et enfin de la disponibilité des éléments stimulants ;

- la perpétration d’un crime présuppose la convergence dans l’espace et le temps d’un délinquant motivé et d’une cible intéressante et vulnérable. Un point chaud de la criminalité se forme dans un lieu facilement acces-sible à de nombreux délinquants potentiels et dans lequel ils trouvent une abondance d’occasions ;

30.  Ces principes seront développés dans le paragraphe consacré à la prise en compte de l’aménagement comme élément de sûreté et de sécurité.31.  L’intégration de la prévention de la malveillance aux démarches de qualité environnementale de l’espace public, par Héloïse Pagnac-Baudry,

pour obtenir le grade de docteur, spécialité : Mécanique, sciences physiques de l’ingénieur, Thèse présentée à l’université Bordeaux 1, École doctorale des sciences physiques de l’ingénieur, soutenue le 3 octobre 2013.

32.  Traité de sécurité intérieure, sous la direction de Maurice Cusson, Benoît Dupont, Frédéric Lemieux, Cahiers du Québec, coll. « Droit et criminologie », Éditions Hurtubise, 2007.

33.  Clarke, R. V. (dir.), Situational Crime Prevention. Successful Case Studies, New York : Harrow and Heston, 1992. Clarke, R. V. (dir.), Situational Crime Prevention. Successful Case Studies, 2nd edition. Guilderland, New York : Harrow and Heston, 1997.

34.  La prévention de la délinquance : définitions, politiques, évaluation, François Dieu, Bruno Domingo, MODAT Études n° 2, GIPCVAT/ MODAT, Décembre 2003 – Janvier 2004.

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- les crimes graves sont fréquemment commis dans la continuité des délits mineurs. L’individu qui commet régulièrement des vols simples risque de glisser inévitablement vers des vols aggravés pouvant aller jusqu’au vol qualifié. La prévention des crimes graves commence par celle des délits mineurs.

 

 De tout temps, les hommes ont cherché à se prémunir contre les dangers. Aujourd’hui, chacun a pris l’habitude de verrouiller sa porte, d’éviter les lieux malfamés ou d’installer des systèmes d’alarme. Ces précautions sont des autoprotections ; elles relèvent de la prévention situationnelle, mais s’en distinguent par leur caractère individuel. Aujourd’hui, la prévention situationnelle est une mission prise en charge par des « spécialistes », le plus souvent issus du secteur privé, qui revendiquent le savoir-faire nécessaire pour assurer la sécurité d’une collectivité ou d’une entreprise. Ainsi, les employés de sécurité privée, les vigiles, les policiers et gendarmes lorsqu’ils patrouillent s’inscrivent dans un schéma de prévention situationnelle. À partir de ces propositions, six catégories de mesures peuvent être mises en œuvre35 : 

 Les surveillances et vérifications concernent les situations où des infractions sont probables et qui, de ce fait, doivent faire l’objet d’observations et de contrôles plus attentifs, soit par du personnel préposé à la surveillance (gar-diens de sécurité, patrouilleurs de la police, concierges, préposés au stationnement, chauffeurs d’autobus, portiers, vendeurs dans les magasins, voisins organisés), soit à l’aide d’équipements électroniques spécifiques (caméras, vidéo, TV en circuit fermé, contrôle radar, rayons X, centres de télésurveillance, miroirs) et de mesures de détection (systèmes d’alarme, détecteurs de métaux, détecteurs électromagnétiques, étiquettes électroniques, chiens de garde, alarmes portatives), soit par l’amélioration de la visibilité des cibles potentielles et des accès (éclairage, suppression des haies dissimulant les entrées de la vue des voisins, élimination des recoins et des cachettes…), soit par des mesures de vérification et de contrôle (inventaire, comptabilité), soit par l’adoption de réglementations (code de conduite dans les entreprises sur le vol, le harcèlement…). Les protections physiques sont des dispositifs matériels conçus pour faire obstacle aux malfaiteurs et mettre les personnes et les biens à l’abri des attaques ou des vols (obstacles à la pénétration : portes renforcées, clôtures, barrières, serrures, vitres antiballes ; immobilisation des cibles : antivol, neutralisation des démarreurs, coffres-forts, attaches, fixations pour les ordinateurs ; ralentissement du délinquant lors de sa fuite : doubles portes à la sortie des banques fonctionnant avec un sas, absence de porte arrière dans les résidences ; amélioration systématique des protections physiques résidentielles suite à des inspections de sécurité). Les contrôles d’accès et de sortie font en sorte que les personnes qui entrent ou sortent d’un site le fassent en conformité avec les règles et procédures en vigueur (postes de gardes à l’entrée des sites : gardiens, barrières, clôtures ; contrôles d’entrée dans les blocs appartements : téléphones à l’entrée, portier ou concierge, système d’entrée par carte magnétique ; codes d’accès : numéro personnel d’identification dans les guichets automatiques des banques, mots de passe pour les ordinateurs ; fouilles : examen des bagages, fouilles aux frontières et dans les aéroports ; marquages : étiquettes électroniques sur des vêtements, détecteurs dans les livres).

35.  Cusson, M., Dupont, B., Lemieux, F. (dir.), Traité de sécurité intérieure. Montréal : Hurtubise HMH (réédition aux Presses de polytechniques et universitaires romandes, 2008), 2007. Cusson, M., Chapitre 28, « Comment prévenir ? Les techniques et la méthode de la prévention situationnelle », in Cusson, M., Dupont, B. et Lemieux, F. (dir.), Traité de sécurité intérieure, Montréal : Hurtubise HMH, pp. 413-428, 2007. Cusson, M., Chapitre 29, « La surveillance et la contre-surveillance », in Cusson, M., Dupont, B. et Lemieux, F. (dir.), Traité de sécurité intérieure, Montréal : Hurtubise HMH, 2007, pp. 429-436. Cusson, M., Chapitre 31, « La télésurveillance », in Cusson, M., Dupont, B. et Lemieux, F. (dir.), Traité de sécurité intérieure, Montréal : Hurtubise HMH, 2007, pp. 452-460.

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Les contrôles de facilitateurs recouvrent les mesures tendant à limiter l’accessibilité aux armes, substances et outils facilitant l’exécution du délit ou le passage à l’acte (par exemple, remplacer les bouteilles en verre par des contenants en plastique dans les bars, parcs et stades pour éliminer les objets pouvant servir d’arme, rendre plus difficile la fraude par cartes de crédit ou cartes d’assurance maladie en y incorporant la photographie du détenteur légitime, réglementer la vente d’instruments pouvant servir au vandalisme comme les bombes de peinture munies d’un vaporisateur). Les détournements visent à empêcher les délinquants potentiels d’entrer en contact avec des victimes ou des cibles (par exemple, éviter de placer les écoles à proximité des centres commerciaux, installer des cloisons dans les stades pour séparer les supporteurs de clubs adverses, ordonner aux conjoints violents de quitter le domicile conjugal et prévoir l’hébergement des femmes battues en lieu sûr, éviter les périodes d’attente à l’arrêt d’autobus, ajuster les horaires d’autobus à ceux de fermeture des débits de boissons). Les désintéressements constituent les mesures destinées à réduire ou annuler les gains espérés par les contre-venants (moyens de paiement sans argent comptant dans les bus, les téléphones publics et au moyen de la carte de crédit ; réduction des sommes d’argent conservées dans les caisses des magasins et des banques ; nettoyage rapide des graffitis et réparation de la propriété détruite ; marquage des pièces d’automobile et des objets de valeur ; arrestation des receleurs ; radios dans les automobiles rendues inutilisables en cas de vol ; systèmes électroniques permettant la localisation des voitures volées). Le principal théoricien de la prévention situationnelle est Ronald C. Clarke36 (Situationnal Crime Prevention. Success-ful Case Studies, Harrow and Heston, 1997). Il a établi la liste des technologies susceptibles d’être mises en œuvre, sur la base des trois lois. Selon ce dernier, la prévention situationnelle vise trois objectifs : 1/ Augmenter l’effort pour le délinquant potentiel : la première loi, « du moindre effort » Il s’agit de jouer sur les critères de difficulté de commission du délit, donc sur l’effort que doit fournir le délinquant potentiel pour réaliser un acte délictueux. Il peut ainsi s’agir de protéger les cibles elles-mêmes (ex. : mise en place de verrous pour volants sur les véhicules), de rendre leur accès plus difficile (ex. : parkings clôturés pour éviter les vols de voiture) ou bien de limiter l’accès à des outils pouvant permettre leur perpétuation (ex. : interdiction de vendre des bombes de peinture pour limiter les tags). 2/ Accroître les risques pour le délinquant potentiel : la seconde loi, « du moindre risque » L’objectif est de rendre le délit plus risqué pour le délinquant, ce qui peut être mis en œuvre par l’instauration de contrôles des entrées/sorties (ex. : portes automatiques avec tickets), mais aussi par divers types de surveillances. Clarke identifie la « surveillance formelle » qu’il associe aux activités de surveillance de personnels spécialisés (patrouilles préventives de police, gardes de sécurité, alarmes antivols), la « surveillance par les employés » (vendeur, concierge) et la « surveillance naturelle » relative aux activités de surveillance exercées informellement par chaque citoyen et qui s’appuient sur des dispositifs rendant plus transparent l’espace public (ex. : éclairage des rues). 3/ Réduire les gains issus de l’infraction commise : la troisième loi, « du plus grand bénéfice à court terme » Elle entend diminuer l’attrait du délit en réduisant les gains potentiels. On cherche alors à rendre dérisoire le bénéfice escompté par le délinquant de manière à affaiblir sa motivation de passer à l’acte (ex. : nettoyage systématique des tags et généralisation des cabines téléphoniques à carte).À partir de ces objectifs, Ronald C. Clarke a élaboré un tableau qui classifie les différentes techniques de prévention situationnelle en fonction de l’objectif visé. 

36.  La prévention de la délinquance, Richard Bousquet, Éric Lenoir, coll. « Questions judiciaires », Éditions PUF, 2009.