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Urgences (1995) XIV, 99-100 © Elsevier, Paris Editorial Restructuration des urgences et transports h liportes* P Huguenard Le regroupement des urgences dans de grands centres de haute technicite, les SAU, est rationnel, au moins pour ce qui concerne les urgences ab- solues. Cela suppose que ces urgences absolues sont distinguees des urgences relatives, avant d'etre amenees au SAU. Ce constat entrafne deux consequences : - la necessite de laisser subsister dans les h6pi- taux de proximit#, non qualifies comme centres d'urgence, des postes de secours avances (ANA- COR) assurant le tri entre urgences absolues et urgences relatives ; - decoulant de la pr6cedente, la necessite de devoir assurer le transport des urgences absolues de I'ANACOR vers le SAU. Mais ce transport doit repondre a. certaines conditions strictes : ne pas aggraver I'etat du patient ; - 6tre bref ; - repondre & un horaire precis, de fa£on que I'accueil soit exactement programme. Le probleme est simple si le poste de secours est proche du SAU, cas le moins probable. Dans tousles autres cas I'helicoptere sanitaire est le moyen le plus satisfaisant : il est rapide et affranchi des difficultes de la circulation ; - il respecte la physiologie des malades transpor- tes, car il ne provoque des vibrations qu'& des frequences non nocives (superieures & 12 Hz) et n'entrafne ni accelerations ni decelerations en pilotage normal. Ses inconvenients sont connus, repertories et le plus souvent aisement minimises. Les appareils a usage sanitaire ne volent pas de nuitcar il s'agit d'helicopteres legers non adap- tes au vol sans visibilit& Les cas urgents admis au poste de secours le soir devraient donc y attendre le jour suivant ou ~tre transportes en ambulance. La deuxieme solution est simple. Les *Accueil des urgences : I'egalite par la qualite - Forum du 19 juin 1992 - Assemblee nationale. ambulances ont la voie libre de nuit. Les UMH des centres d'urgences sont aptes & realiser ces trans- ports nocturnes. Cela est vrai egalement en cas de conditions meteo defavorables. Les helicopteres I#gers ne peuvent se poser que dans un espace d#gage et sur une surface plane de 20 m de diametre. Naturellement les centres d'urgence disposeront tous d'une helisur- face, voire d'une helistation. Les postes de se- cours devront aussi prevoir une helisurface. C'est un inconvenient mineur et relativement peu coa- teux On considere trop souvent que le transport he- liporte est d'un prix eleve. Une mise au point s'impose : I'heure de vol d'un helicoptere leger monomoteur comme celui que subventionne le conseil regional d'/le-de-France revient & 4 360 F , & raison d'une utilisation annuelle de 500 heures. L'appareil parcourt environ 200 km en 1 heure, quand I'ambulance met 3 heures pour couvrir la m6me distance, avec un coQt equivalent. En ou- tre, les frais fixes de I'helicoptere representent une proportion importante du coQt (70 A 80%), de sorte qu'il n'est pas beaucoup plus dispendieux de le faire voler que de le laisser au hangar. Enfin, il a ete demontre que le transport par helicoptere fait economiser des journees d'hospitalisation en soins intensifs, sans m~me qu'il soit necessaire de prendre en compte I'augmentation des chan- ces de survie, d'ailleurs difficile & chiffrer. Malheu- reusement, I'obligation recente et mal motivee de n'utiliser que des bimoteurs rend ce calcul cadu- que. Certains craignent le risque d'accident. Si I'on doit admettre qu'il augmenterait avec les temps de vol, il faut toutefois considerer les taux d'accident actuellement reconnus et contr61es : 0,47 pour 10 000 heures selon I'Aerospatiale, 33 pour 10 000 heures selon la Flight Safety Foundation, mais tous travaux aeriens confondus, un pour 120 000 km selon I'Heliport de Paris. Ce risque non nul n'est cependant pas plus eleve que celui observe par les assureurs avec les

Restructuration des urgences et transports héliportés

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Page 1: Restructuration des urgences et transports héliportés

Urgences (1995) XIV, 99-100 © Elsevier, Paris

Editorial

Restructuration des urgences et transports h liportes*

P Huguenard

Le regroupement des urgences dans de grands centres de haute technicite, les SAU, est rationnel, au moins pour ce qui concerne les urgences ab- solues. Cela suppose que ces urgences absolues sont distinguees des urgences relatives, avant d'etre amenees au SAU.

Ce constat entrafne deux consequences : - la necessite de laisser subsister dans les h6pi- taux de proximit#, non qualifies comme centres d'urgence, des postes de secours avances (ANA- COR) assurant le tri entre urgences absolues et urgences relatives ; - decoulant de la pr6cedente, la necessite de devoir assurer le transport des urgences absolues de I'ANACOR vers le SAU.

Mais ce transport doit repondre a. certaines conditions strictes :

- ne pas aggraver I'etat du patient ; - 6tre bref ; - repondre & un horaire precis, de fa£on que I'accueil soit exactement programme.

Le probleme est simple si le poste de secours est proche du SAU, cas le moins probable.

Dans tousles autres cas I'helicoptere sanitaire est le moyen le plus satisfaisant :

- il est rapide et affranchi des difficultes de la circulation ; - il respecte la physiologie des malades transpor- tes, car il ne provoque des vibrations qu'& des frequences non nocives (superieures & 12 Hz) et n'entrafne ni accelerations ni decelerations en pilotage normal.

Ses inconvenients sont connus, repertories et le plus souvent aisement minimises.

Les appareils a usage sanitaire ne volent pas de nuitcar il s'agit d'helicopteres legers non adap- tes au vol sans visibilit& Les cas urgents admis au poste de secours le soir devraient donc y attendre le jour suivant ou ~tre transportes en ambulance. La deuxieme solution est simple. Les

*Accueil des urgences : I'egalite par la qualite - Forum du 19 juin 1992 - Assemblee nationale.

ambulances ont la voie libre de nuit. Les UMH des centres d'urgences sont aptes & realiser ces trans- ports nocturnes. Cela est vrai egalement en cas de conditions meteo defavorables.

Les helicopteres I#gers ne peuvent se poser que dans un espace d#gage et sur une surface plane de 20 m de diametre. Naturellement les centres d'urgence disposeront tous d'une helisur- face, voire d'une helistation. Les postes de se- cours devront aussi prevoir une helisurface. C'est un inconvenient mineur et relativement peu coa- teux

On considere trop souvent que le transport he- liporte est d'un prix eleve. Une mise au point s'impose : I'heure de vol d'un helicoptere leger monomoteur comme celui que subventionne le conseil regional d'/le-de-France revient & 4 360 F , & raison d'une utilisation annuelle de 500 heures. L'appareil parcourt environ 200 km en 1 heure, quand I'ambulance met 3 heures pour couvrir la m6me distance, avec un coQt equivalent. En ou- tre, les frais fixes de I'helicoptere representent une proportion importante du coQt (70 A 80%), de sorte qu'il n'est pas beaucoup plus dispendieux de le faire voler que de le laisser au hangar. Enfin, il a ete demontre que le transport par helicoptere fait economiser des journees d'hospitalisation en soins intensifs, sans m~me qu'il soit necessaire de prendre en compte I'augmentation des chan- ces de survie, d'ailleurs difficile & chiffrer. Malheu- reusement, I'obligation recente et mal motivee de n'utiliser que des bimoteurs rend ce calcul cadu- que.

Certains craignent le risque d'accident. Si I'on doit admettre qu'il augmenterait avec les temps de vol, il faut toutefois considerer les taux d'accident actuellement reconnus et contr61es : 0,47 pour 10 000 heures selon I'Aerospatiale, 33 pour 10 000 heures selon la Flight Safety Foundation, mais tous travaux aeriens confondus, un pour 120 000 km selon I'Heliport de Paris.

Ce risque non nul n'est cependant pas plus eleve que celui observe par les assureurs avec les

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ambulances. II doit ~tre encore reduit par un choix judicieux des appareils, d'apres un cahier des charges severe, et surtout par la formation encore plus poussee des pilotes.

Les 20 helicopteres hospitaliers frangais ont realise 17 487 missions en 1990.

Nous approchons enfin de I'activite qui rut, par exemple, developpee dans I'ex-Republique alla- mande, laquelle faisait etat de 400 000 missions sanitaires pendant 20 ans. L'Autriche, la Suisse, plus recemment I'ltalie et I'Espagne, alignent, tou- tes proportions gardees, des resultats du m~me ordre.

La France dispose d'une industrie nationale (maintenant franco-allemande avec Eurocopter) qui produit des appareils excellents (et leurs pie- ces detachees) ; elle beneficie de centres de re-

ception et de regulation des appels urgents (CRRA) capables d'en gerer I'emploi, et aussi d'equipes medicales specialisees en urgence dont beaucoup, mais pas assez, sont dej& entraf- nees au vol sanitaire. II ne lui manque que la volonte de completer son systeme de secours par ce moyen performant.

Le regroupement des urgences lui fournit une justification de plus pour multiplier les helicop- teres sanitaires. Contribuer a sauver des vies humaines avec des helicopteres apporterait un mieux, d'autant qu'ainsi seraient reduites les inegalites des citoyens devant I'urgence, pour peu que la Direction generale de I'Aeronautique civile (DGAC) ne viennent pas entraver cette evolution avec une reglementation non ration- nellement justifiee.