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1/36
Revue internationale de droitcompar
La protection des consommateurs en droit franais .Robert Savy
Citer ce document Cite this document :
Savy Robert. La protection des consommateurs en droit franais .. In: Revue internationale de droit compar. Vol. 26
N3, Juillet-septembre 1974. pp. 591-625.
doi : 10.3406/ridc.1974.15568
http://www.persee.fr/doc/ridc_0035-3337_1974_num_26_3_15568
Document gnr le 14/10/2015
http://www.persee.fr/collection/ridchttp://www.persee.fr/collection/ridchttp://www.persee.fr/doc/ridc_0035-3337_1974_num_26_3_15568http://www.persee.fr/author/auteur_ridc_1044http://dx.doi.org/10.3406/ridc.1974.15568http://www.persee.fr/doc/ridc_0035-3337_1974_num_26_3_15568http://www.persee.fr/doc/ridc_0035-3337_1974_num_26_3_15568http://dx.doi.org/10.3406/ridc.1974.15568http://www.persee.fr/author/auteur_ridc_1044http://www.persee.fr/doc/ridc_0035-3337_1974_num_26_3_15568http://www.persee.fr/collection/ridchttp://www.persee.fr/collection/ridchttp://www.persee.fr/7/25/2019 ridc_0035-3337_1974_num_26_3_15568
2/36
LA
PROTECT ION DES CONSOMMATEURS
EN FRANCE
par
Robert
SAVY
Doyen de la Facult de droit
et
des
sciences
conomiques
de
Limoges
Introduction.
I.
On parle beaucoup plus
volontiers
de la consommation que
des consommateurs, et c'est dj un signe. Ce qui importe, en effet,
dans
une
socit
qui
tend vers un niveau croissant de
consommation,
c'est beaucoup plus la progression globale de
la
consommation que
la satisfaction individuelle du
plus
grand
nombre
de consommateurs.
La
notion
de
consommation,
telle
que
les
comptables
nationaux
essaient
de
la
dfinir,
n'est
pas
indiffrente
notre
propos
sur
la
protection
des
consommateurs.
C'est ce
qu'ils appellent la
consomm
ation es mnages
qui
est en cause ici, et
de
faon
plus
prcise
les
biens
et services
qu'ils se
procurent. A partir
des analyses cono
miques sur la
consommation
deux observations doivent,
notre sens,
tre
soulignes.
En
premier lieu, les consommations
non
alimentaires comportent
un certain nombre
de
services que
le march ne fournit pas
toujours,
ou
qu'il n'est
pas
seul
fournir
:
hygine
et soins, transports et
comm
unications culture,
loisirs et distractions.
Le problme de
la
prot
ection
des consommateurs
ne
se pose donc pas
exclusivement dans
le
cadre
du
march.
D'autre part, la
consommation
volue
sous l effet de facteurs
extra-conomiques (1). Elle est un
phnomne social,
et la
consomm
ation 'un
individu est
influence par celle du groupe dont il
est
membre. Par ailleurs,
nombre
de besoins nouveaux sont artificiell
ement
velopps
par la publicit
l'initiative
des
producteurs.
L'accroissement de l'activit conomique
rsulte
pour une bonne
part
de la
satisfaction
de ces besoins par
les
mcanismes du march, au
moment mme o des besoins collectifs
plus
fondamentaux (duca-
(1) G. Rottier, Article Consommation
,
Encyclopaedia
Unioersalis,
vol. 4.
7/25/2019 ridc_0035-3337_1974_num_26_3_15568
3/36
;~92
LA PROTECTION DES CONSOMMATEURS EN FRANCE
tion, urbanisme...) sont imparfaitement satisfaits faute de
mcanismes
conomiques permettant d'y
affecter
une part
convenable
des
ressources nationales. La question se
pose
ds
lors de
savoir
si la
protection
du
consommateur
peut
ou
non ngliger
ces facteurs.
II.
A partir de
ces remarques sur
la consommation, on peut
mieux
dfinir
la
notion
de
consommateur.
Deux
conceptions
ont
t
prsentes.
La conception troite du consommateur-acheteur est cer
tainement la
plus
facile cerner
;
c'est
elle que
se sont rallis les
organisateurs
des Journes
sur
la protection
du consommateur
de
l'Association
Henri-Capitant,
tenues pendant
l't 1973
Montral (2).
Elle suffit
rendre
compte
de l'essentiel du droit positif de la pro
tection du consommateur : elle
a
cependant
l'inconvnient
de crer
un
hiatus
entre le
concept
conomique de consommation et la
notion
juridique de
consommateur.
Or,
le droit
qui s'applique
des relations conomiques doit
s'efforcer de s'adapter aux
concepts
conomiques, et
une
autre
conception
du
consommateur est possible.
C'est
celle qu'exprime
M.
Jean Meynaud(3)
lorsqu'il
crit qu'une
politique
de la consom
mation doit
se proccuper
de
...
l'utilisation
optimale des ressources
collectives , sans se limiter la
protection
du consommateur sur le
march des produits
et services.
Le
consommateur
est
alors la
fois
un acheteur sur le march, et un usager des services mis
sa dispo
sition par la collectivit : c'est dans cette double fonction qu'il
convient
de le protger.
III.
Le
prsent rapport s'attache dcrire
dans
cette pers
pective le
droit public
interne de
la protection des
consommateurs
en
France.
Il nglige
les
mesures prises en la
matire
dans
le
cadre
de
la C.E.E.
: relatives essentiellement l'emploi de certains
additifs
et
l'harmonisation de certaines
normes
(en
matire
de fruits et
lgumes notamment), elles sont trop limites
pour
avoir chang la
physionomie de la rglementation nationale.
Comme
dans
la plupart
des
autres
pays
capitalistes industrialiss,
la
protection
des consommateurs est surtout en France le fait des
pouvoirs
publics. Ds
lors
que
le mythe du
client-roi
n'a
plus
correspondu aux
conditions
de production et de distribution des
biens
et
services,
une
rglementation protectrice a
t
mise
en
place.
On avait procd de la
sorte,
quelques annes
plus
tt, pour protger
les
salaris contre des conditions de
travail
trop rigoureuses : la
rfrence
au droit du travail
s'imposera
souvent dans ce rapport.
Mais, depuis quelques
annes, les
consommateurs s'aperoivent
que
le
modle
de
consommation
auquel
ils
participent leur
a
t
impos, plus
qu'ils
ne l'ont choisi. Ils s'organisent comme les
salaris l'avaient fait
avant
eux, et
souvent
avec
les
mmes diffi-
(2) Andr de Laubadre, La Protection du consommateur,
rapport
l'Asso
ciation
Henri-Capitant,
1973 (dactyl ographi).
(3) Jean Meynaud,
Les
consommateurs
et
le
pouvoir,
Lausanne, 1964, p.
10.
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4/36
LA
PROTECTION
DES
CONSOMMATEURS
EN FRANCE
593
cultes
et
s'efforcent de prendre en
main leur
propre protection.
C'est
un mouvement qui ne fait
que s'amorcer,
mais dont il fallait
noter
les
prmices.
C'est pourquoi
l'on
tudiera successivement :
1.
La protection des consommateurs par
les
pouvoirs
publics ;
2. La prise en
main
par
les
consommateurs de
leur
propre protection.
1. La protection
des consommateurs
par
les
pouvoirs
publics.
Dans le contexte d'un Etat
libral,
l'ide d'une protection
des
consommateurs par
les
pouvoirs publics
ne
va
pas
de
soi.
Elle
ne
s'accorde ni avec la libert contractuelle, ni avec
l'galit
juridique
qui fondent l'ordre
libral.
Mais on sait aujourd'hui
que
l'galit formelle des partenaires
d'un contrat peut dissimuler
la
domination de l'un sur l'autre. Au
nom d'un ordre public de protection, on
admet que les
pouvoirs
publics
prennent des mesures
pour sauvegarder
les intrts essentiels
des contractants conomiquement
plus
faibles. Au
fil
des annes,
des salaris,
des locataires, des
agriculteurs, des consommateurs ont
bnfici de
cette
protection.
On
ne
conteste
plus actuellement que
l'Etat ou les autorits
administratives
locales
prennent
des mesures
tendant
protger
le
consommateur.
Non pas
qu'il
existe
un droit du
consommateur
tre protg.
Il est seulement
l'un des
acteurs d'un jeu
conomique
dont
la
rgle
reste
librale.
L'Etat moderne,
gardien
des
grands
quilibres cono
miques et
sociaux,
ne
peut rserver au seul consommateur sa
sollici
tude.On l'a vu venir en aide aux producteurs agricoles, aux chefs
d'entreprises ou
salaris
de certains secteurs en difficult (charbonn
ages,idrurgie, construction navale,
etc.),
aux commerants et
artisans... Parfois
mme
des mesures de politique conjoncturelle
tendant
rduire la consommation des mnages (restriction
ou ren
chrissement du crdit,
modration des
hausses
de
salaires, accen
tuation
du prlvement
fiscal)
portent
l'vidence atteinte
aux
intrts
des
consommateurs.
Il reste
que le souci
de protger individuellement
chaque
consom
mateur
ontre
les
risques auxquels le systme moderne de distribution
des produits et services l'expose,
a
conduit
les
pouvoirs publics
intervenir
par les
divers moyens dont l'action
administrative
use
habituellement. Des
lois
et rglements impratifs constituent une
vritable police de la consommation ( 1 1
);
des
services publics visant
la protection
du
consommateur
ont
t progressivement mis
en
place
(12),
cependant qu' ct d'eux un
nombre
croissant
d'initiatives
prives
visant aux mmes fins bnficient
de
l'appui des
pouvoirs
publics
(13).
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5/36
594
LA PROTECTION DES CONSOMMATEURS EN FRANCE
1.1.
LA
POLICE DE
LA CONSOMMATION.
Certains
intrts
des consommateurs sont
sans
nul
doute
intgrs
aujourd'hui
dans
cet
ordre public
conomique
que
les
diverses
polices
conomiques
ont
pour
mission
de protger. Ds lors,
les
diverses mesures
qui
restreignent
la
libert du
commerce et
de
l'industrie constituent bien
une
police de la consommation.
Mais
cette police de la
consommation ne
peut,
au
risque de perdre
toute
prcision, comprendre l'ensemble
des mesures
touchant
de prs
ou
de loin la
protection
du consommateur. La police spciale des
prix
institue
par les
ordonnances du 30 juin 1945
tait
certes
l'origine un moyen de protger le
consommateur dans
une
conomie
de pnurie
guette
par le
march noir
:
elle est
aujourd'hui l'un des
instruments dont le gouvernement dispose
pour
rgler la conjoncture,
et
ne
concerne
le
consommateur
que
trs
indirectement
(4).
De
mme,
la rglementation
des
ententes et positions dominantes
est utilise
davantage pour agir sur
les
structures de
l'appareil
de production
et
de distribution, dans le cadre d'une politique industrielle ou commerc
iale
moyen
ou
long
terme,
que
pour servir
les
intrts
du
consom
mateur. Et la rglementation de certaines professions (dbits de
boissons,
officines pharmaceutiques,
etc.), si elle
n'est
pas toujours
indiffrente aux intrts
des
consommateurs,
ne
les prend pas
pour
fin exclusive ou principale.
Plus rigoureusement dfinie,
la
police
de la
consommation est
faite de l'ensemble des dispositions lgislatives ou rglementaires qui
restreignent
la
libert
des
producteurs
et
distributeurs
de
biens
ou
services dans le but principal de protger les intrts de
chaque
consommateur. On
ne se
dissimule
pas ce que ce critre
finaliste
comporte
d'imprcision.
Il permet cependant de dfinir avec
une
suffisante clart
le
contenu
de
cette
police et,
partir de cet
invent
aire,
d'avancer
quelques rflexions sur la manire dont elle
est
applique.
1.11. Le
contenu
de la police de la consommation.
La plupart des rgles constituant la police
de
la
consommation
ont
t prises
en
application de la loi du 1er
aot
1905,
qui punit
les tromperies
et
falsifications commises
au
dtriment des
consom
mateurs
et
dispose
dans
son
article
11 :
II sera statu par
des
rglements
d'administration
publique sur
les
mesures prendre
pour
assurer l'excution de
la prsente
loi.
Comme
la loi
du 1er
aot
1905
numre ensuite de faon non limitative
les
domaines ainsi ouverts
l'intervention du
pouvoir rglementaire,
les
pouvoirs
publics
dispo
sent
de
possibilits
d'action
considrables.
Des
lois
particulires et,
parfois,
des rglements autonomes
sont
venus les
largir
encore. Les
mesures
prises tendent
rglementer
soit
les produits ou services
(4) Par exemple par les rgles de publicit des prix qu elle institue.
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6/36
LA
PROTECTION DES CONSOMMATEURS EN FRANCE
595
mis
la disposition des consommateurs, soit les pratiques commerc
iales
tilises pour les leur proposer.
1.111.
La rglementation des produits et services rpond essentie
llement
u souci de protger la
sant des
consommateurs. C'est une
proccupation trs ancienne des autorits administratives. La pro
tection de la sant est
l'une
des
composantes
de
l'ordre
public
traditionnel, tel que le
dfinit l'article
97 du
Code d'administration
communale.
C'est
pourquoi les autorits qui dtiennent un pouvoir
de police gnrale peuvent
dicter
des rglements
de
police apportant
la libert du commerce et de l'industrie
les
limitations rendues
ncessaires par la
sauvegarde
de la sant des
consommateurs.
Seront
ds
lors lgaux, par
exemple,
les arrts municipaux ou prfecto
rauxglementant l'utilisation des appareils dits
attendrisseurs
de
viande
.
Mais
l'essentiel
de
la rglementation est
issu de
la
loi du
1er aot 1905, et
porte
sur
les
produits alimentaires
et leur
condition
nement. arfois, le
rglement
se borne indiquer
les
pratiques ou
les
produits interdits. Dans ce cas,
le
fabricant peut utiliser tout
produit
ou technique qui ne fait
pas l'objet d'une interdiction : il
doit
apprcier
sous sa seule responsabilit si le
produit
qu'il fabrique
met ou non en danger la sant du
consommateur. Ce
procd
est
aujourd'hui progressivement abandonn : chaque jour des produits
nouveaux apparaissent, et
un
dlai beaucoup
trop long risque
de
s'couler entre
le moment o
un produit
nouveau
aura
t
mis sur
le
march
et
celui
o,
ses
dangers
ayant t constats,
un
rglement
sera pris
pour
l'interdire. On
a
recours de
plus
en plus au procd
de la liste ferme selon lequel,
pour
certaines
catgories
d'agents,
tout ce qui n'est pas expressment autoris est
interdit. Ainsi, pour
les agents
conservateurs et
les colorants, dont un
arrt du 28
juin
1912
tablit limitativement la liste (5), pour la fabrication
des
conserves
de
poissons, crustacs et animaux
marins
(6),
ou pour
les
produits
dittiques et de rgime (7). Les
derniers
venus
des rglements d'admin
istration
publique pris
en application
de l'article 11 de la loi du
1er
aot
1905
sont
des dcrets
du
12
fvrier
1973
relatifs aux produits
chimiques utiliss
dans
l'alimentation humaine
ou dans
les
matriaux
au
contact des
aliments,
et
aux graisses
et
huiles comestibles.
Les
infractions
ces
rglements
sont punies
comme
des
contra
ventions
de
police.
Ce
sont
des
infractions
matrielles, constitues
ds
lors
que
le rglement
a
t viol, et sans
qu'une
intention de fraude
soit
ncessaire : caractristique
du
nouveau droit pnal conomique,
ce
trait
s'observe
pour
la plupart des infractions aux rgles de police
conomique.
(5)
Un arrt du 13 fvrier
1970,
par
exemple, inscrit de nouveaux colorants
sur
cette
liste
et supprime
un
produit, prcdemment autoris, dont les
dangers ont
t
mis en vidence.
(6) Dcret
60-1524 du 30 dcembre
1960, J.O.
7 janvier 1961, 316.
(7)
Dcret
66-180
du
25 mars
1966 J.O.
30 mars
1966, p.
2583.
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7/36
590
LA
PROTECTION
DES
CONSOMMATEURS
EN
FRANCE
1.112. La
rglementation
des
pratiques commerciales est
devenue
ncessaire
dans la mesure
o
certaines
d'entre elles taient
de
nature
soit
altrer la
concurrence
(et
les
intrts des professionnels taient
ici
en
cause),
soit
empcher le consommateur
de
prendre en
toute
connaissance de
cause
sa
dcision
d'achat. Les
mesures
prises en la
matire sont trs diverses, et encore
partielles. Elles
visent informer
le
consommateur sur
les prix,
garantir
la loyaut
des
informations
mises sa disposition, et
le protger contre les
pressions
trop
insistantes de certains
professionnels.
Un
arrt
du 16 septembre 1971, pris en application de l ordon
nance 1483 du 30
juin
1945 selon laquelle ... la publicit
des
prix
est assure
l'gard
du
consommateur prescrit que le prix de
tout
produit destin
la vente au dtail et expos
la vue du
public
doit
faire
l'objet
de publicit
selon
un procd tel que le client puisse
en
prendre
facilement
connaissance.
Les sanctions
sont
celles prvues
pour
les
infractions
la rglementation des
prix. Mais
le
but de cette
mesure
n'est
pas principalement
conomique
: le fait
que
cette
publicit ne soit pas
requise
quand
les
produits sont proposs
la
vente
des utilisateurs
professionnels montre
bien
qu'il s'agit l
surtout
d'un lment
de la
police de la consommation.
Le
souci
de garantir la loyaut
des informations
destines
aux
consommateurs est galement,
d'aprs
la loi du 1er aot 1905, un but
licite de cette police spciale de la consommation.
Elle autorise,
en
effet, le
titulaire
du pouvoir rglementaire, dans
son article II,
fixer
les
inscriptions
et marques sur la
composition
et l'origine des mar
chandises
que
...
dans
l'intrt
des
acheteurs il
y
a lieu d'exiger
sur
les factures, les
emballages, ou sur
les
marchandises
elles-mmes
.
D'o
le dcret
n 72.937 du
12 octobre
1972
sur les rgles d'tiquetage
des
denres
alimentaires premballes
en vue de leur vente au dtail,
qui vient d'entrer
en
vigueur.
La
loi du 2
juillet
1963, dont les arti
cles
5
et
6
rpriment la
publicit mensongre, obit
des
proccupat
ionsssez voisines, de
mme
que la
loi
du 3 janvier 1972 sur la
publicit
pour les
thrapeutiques
miraculeuses...
Enfin, on
a
voulu protger le
consommateur
contre
des
techni
ques de vente trop agressives. La vente avec primes
introduit
la
confusion
dans
son
esprit
parce qu'il risque
de ne plus fonder son
choix
sur
les
qualits
du
bien
qu'il
souhaite acqurir.
Elle
a
fait
l'objet de diverses restrictions
:
la loi
du
20
mars
1951 posait
le
principe de sa prohibition, sous peine
des
sanctions prvues en
matire de police
des
prix
;
plus
rcemment, la loi du 29 dcembre 1972
a tendu
la
prohibition aux prestations de services
avec
primes, qui
jusqu'alors y
chappaient (8).
Le dmarchage
et la vente domicile
avaient l'inconvnient de
placer les
consommateurs, et
notamment
les plus
vulnrables
d'entre eux,
en position
d'infriorit face
un
(8) Cf. galement les articles 37 et
s.
de la loi d orientation du
commerce
et de l artisanat, du 27
dcembre
1973 J.O. 30
dcembre
1973, p.
14.139.
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8/36
LA
PROTECTION DES CONSOMMATEURS EN FRANCE
597
vendeur leur proposant
l'improviste des articles dont ils n'avaient
pas
un
rel
besoin,
ou
dont
l'utilisation
leur
tait
impossible,
ou
dont le prix
excdait
leurs ressources, et dont ils ne pouvaient de
toute
manire comparer
la qualit ou le prix avec ceux de produits
concurrents. C'est pourquoi
une
loi n 72.1137 du 22 dcembre 1972,
sans interdire la vente
domicile,
a
tent de
protger
le consommat
urans porter trop
gravement
atteinte
la
libert
des
transactionts
commerciales.
Dsormais
le
vendeur doit
obligatoirement remettre
au client un contrat crit prcis, auquel ce dernier
a
la facult de
renoncer dans
les sept
jours
suivant sa
conclusion, aucun
versement
de fonds n'tant licite avant l'expiration de ce
dlai.
Des sanctions
assez
graves
peuvent
frapper
les
contrevenants. Dans le
mme
esprit,
une
loi
n
72-6 du
3
janvier 1972 rglemente le
dmarchage
financier
pour
protger
les pargnants.
1.12.
L'application des
mesures
de
protection
des consommateurs.
On
s'accorde
considrer
que
ces mesures
ne sont
pas
rigou
reusement appliques. L'exprience quotidienne permet de s'en
convaincre.
Sans doute ne
faut-il
pas
s'en
tonner. Le
souci de
prot
ger
e
consommateur est
assez rcent. Or l'exprience
enseigne qu'une
rglementation applique
des
comportements conomiques
s'impose
trs lentement.
Le
droit du travail
n'est
devenu progressivement
effectif
qu'au
moment
o, les rgles
tant labores, l'Inspection du
travail a
contrl son application et les
syndicats
ouvriers
exig
son
respect
:
encore
son
effeotivit
laisse-t-elle
souvent
dsirer.
Les
organisations
de
consommateurs
sont trop
faibles
on le verra
pour
exiger
l'application
des
mesures de protection des
consommate
urs.a rglementation elle-mme prsente
souvent des
imperfect
ions
ui n'en facilitent pas la
mise
en uvre. Et l'administration
n'a parfois ni
les
moyens
ni le
dsir
de
veiller
son application.
1.121.
Les
imperfections
de la rglementation
tiennent
la fois
son
contenu, et
la
manire
dont son inobservation
est
sanctionne.
Il peut
arriver
d'abord
que
des pressions soient exerces par les
groupes ou intrts
concerns,
au
moment
o s'labore la rglement
ation.a procdure lgislative, parce
qu'elle
est
publique,
permet
de
dceler ces
interventions
:
de
nombreux amendements
restrei
gnant
a
porte de la
loi
sur la
publicit
mensongre ont t prsent
s
ar
des parlementaires et
adopts. Plus discrte,
l'laboration
d'un
rglement
ne permet
pas
l'observateur extrieur
l'administ
ratione percevoir clairement ces pressions. Elles
n'en existent
pas
moins,
se
traduisant par
des retards dans
la publication
des
textes
d'application, des
assouplissements,
des
drogations.
On peut
l'envi
multiplier
les exemples du retard
avec lequel
les
textes
d'application ncessits par les lois et rglements
protgeant
le
consommateur
sont publis. Un
quart
de
sicle s'coule entre
le
moment o
le
lgislateur,
le
30
juin
1945, prescrit la publicit
des
prix
et
celui o le
ministre
de l'Economie
et des Finances,
le
16
sep-
39
7/25/2019 ridc_0035-3337_1974_num_26_3_15568
9/36
598 LA
PROTECTION
DES CONSOMMATEURS EN FRANCE
tembre 1971,
arrte
la manire de la raliser. Il faut prs de 70 ans
pour que le principe de l'tiquetage
informatif
pos par la
loi
du
1er aot 1905 soit
concrtis
par
le dcret du 10 octobre 1972
pour
certains
produits
alimentaires.
Les
premiers arrts
prcisant
la
teneur
maximale
admissible en rsidus
chimiques
divers
pour
cer
tains produits alimentaires
ont
t publis au
Journal
Officiel du
4 octobre 1973, alors
que le
texte
appliquer est
un dcret du
30 juillet
1971
: encore
ces
arrts visent-ils,
apparemment,
les
rsidus
chimiques
les
moins
utiliss
en France... Les dispositions de la loi du
2
juillet
1963
sur
les
labels
industriels ne peuvent
pas
s'appliquer,
faute d'un dcret dont
on
ne sait
pourquoi
il
n'a pas t pris.
Pourtant
la jurisprudence
administrative
est
claire
:
l'administration
est tenue de prendre
les mesures
rglementaires
que
ncessite
l ex
cution des lois
et rglements ; elle doit le
faire
dans
un dlai
raison
nable,
faute
de
quoi
son abstention
constituerait
une
illgalit
de
nature
engager
sa responsabilit (9). On
pourrait imaginer
qu'une
organisation de consommateurs dfre au
juge
administratif le refus
de
l'administration
de prendre
un
rglement. Son intrt agir
serait sans nul doute
admis
par le
juge (10).
Mais l'efficacit du
moyen reste douteuse.
Il faut bien voir
enfin que
les sanctions
encourues par les
entreprises
ne se
conformant pas cette rglementation
sont dri-
soirement faibles
:
le rapprochement avec le
droit
du travail
s'impose
ici
encore.
Les
peines prvues par
la
loi du
1er aot
1905
sont un
emprisonnement de
trois
mois
un
an,
et des
amendes de 547
27
000
francs.
Or,
en
matire
de
publicit
mensongre,
o
les
mmes
peines s'appliquent, on constate qu'en 1968 plus des deux tiers
des
102 condamnations prononces ont
t des
amendes infrieures
500 francs. L'Institut national de la consommation remarque
que
l'amende
inflige
pour publicit
mensongre
aux dirigeants d'un
cours par correspondance dpassait peine le montant du prix d'un
cours. Le mince risque pris en violant la loi est sans commune mesure
avec le profit
que sa
violation
peut
procurer. Une meilleure adapta
tion
es
sanctions
l'infraction
est indispensable. La
loi d'orientation
du
commerce et de l'artisanat du 27
dcembre
1973 va
dans ce
sens :
elle prvoit (art. 44),
pour
la publicit mensongre, la
publicit des
jugements
et la
possibilit d'annonces rectificatives
( 1 1
). L'intrt
port depuis peu
la
criminalit d'affaires peut
laisser
esprer
que
le juge pnal se montrera
plus
attentif la rpression de
ces
comport
ements.
1.122.
Les
responsabilits
de l'administration ne sont
pas
contes
tables
dans ce relatif chec. Les hommes ne sont pas en cause. Mais
(9) CE.
27
novembre 1964, Dame Veuve Renard, concl. Galmot, Rec. 590.
(10).
CE.
6 fvrier 1959, Comit national de dfense contre
l alcoolisme,
Rec. 95.
(11) Jean Calais-Auloy, La loi Royer et les consommateurs, D. Chr.,
1974, p. 91.
7/25/2019 ridc_0035-3337_1974_num_26_3_15568
10/36
LA
PROTECTION DES CONSOMMATEURS EN FRANCE
599
l'appareil
administratif cohrent
sans
lequel la
protection
du consom
mateur
ne
sera
pas
effective
n'existe
pas
;
et
surtout
fait
dfaut
la
ferme volont d'appliquer la rglementation labore.
Il
n'existe
en France
aucune
autorit administrative
responsable
de
la police
de
la consommation. On sait que la police
gnrale
est
l'affaire
du maire
ou
du prfet, la police de la
chasse l'affaire
du
ministre de l'Agriculture, la police
des
prix celle du
ministre
de
l'Economie
et
des Finances.
En
matire de consommation,
il y a
comptence concurrente
d'une multitude
d'autorits administratives.
Le
ministre de la
Sant
Publique
se proccupera des produits
phar
maceutiques
et celui de l'Equipement de
la
protection
des
acqureurs
de
logements.
Le ministre de l'Economie et des Finances,
notamment
par
la Direction
gnrale
du
commerce
intrieur
et
des prix, veillera
la
protection
juridique
du
consommateur
:
publicit
des
prix, public
itrompeuse, concurrence, vente avec primes,
etc.
Mais il s atta
chera sans doute davantage au contrle du niveau des prix
comme
lment de la politique conjoncturelle, dont il se sait responsable,
que de l'application
rigoureuse
des dispositions
protectrices
du
consommateur. Le
ministre
de l'Agriculture, en particulier par le
Service
de la rpression
des
fraudes, va assurer la protection
scien
tifique
et
technique
du consommateur
; mais il
est
avant
tout
le
ministre de la production agricole. Par ailleurs l'extension, ncessaire,
de
la comptence du Service
des fraudes
des produits non agricoles
cre
une
situation favorable
la dilution des
responsabilits.
Cette
dispersion
organique s'explique certes par le fait que la police de la
consommation ne constitue pas un
corps
de
rgles ressenti
comme
homogne et
cohrent
:
c'est
le cas aussi, par exemple,
pour
la police
de
l'environnement. Mais la
diffrence de ce
qui
s'est
pass
pour
l'environnement, o la cration d'un dpartement
ministriel plus
ou
moins spcialis
est
de nature provoquer les
impulsions ncess
aires,
aucune
autorit
responsable
n'est
en mesure
de
mettre
fin aux
tolrances administratives qui
privent
souvent de toute
porte
les mesures prises.
Car, au mpris
du
principe de lgalit, l'administration se
rserve
le
droit d'appliquer ou
non,
voire de modifier
les
lois et
rglements qui s'imposent
elle. La tolrance la
plus
redoutable
est
la
tolrance
de
fait,
c'est--dire
...
l'inaction
des
autorits
administratives
charges
de
constater
les
infractions
la rgle
mentation...
ou de
prendre l'initiative
de poursuites pnales
(12).
Un
exemple rcent
: malgr
une
prohibition datant de 1965, le
traitement
des
veaux aux
hormones
en
vue d'acclrer leur
crois
sance
tait
voici
peu pratiqu
au vu et su de tout le monde, et une
circulaire du 28 mai 1971 rappelant aux
inspecteurs sanitaires
la
rglementation
appliquer avait
soulev les
protestations
des profes
sionnels
(13).
Cette
inertie de l'administration
suffit
paralyser
le
(12)
Denise Nguyen-Thanh,
Les
techniques
juridiques
de
protection
du
consommateur,
Paris,
INC,
1970,
p.
53.
(13)
Que
choisir
?
avril
1972,
p.
20.
7/25/2019 ridc_0035-3337_1974_num_26_3_15568
11/36
600 LA PROTECTION DES CONSOMMATEURS EN FRANCE
mcanisme d'une rpression pnale dj
bien
timide, et
enlever
la
rglementation
toute effectivit.
Souvent
mme la tolrance
est
officialise par l'administration.
Elle
dcide
par
circulaire, note intrieure, voire
mme
par
une
simple lettre
un syndicat professionnel, que dans certaines hypo
thses la
rglementation ne
s'appliquera pas. Parfois, une drogation
est
lgalement possible, parce
que prvue
dans un acte
porte
gnrale rgulirement pris par
l'autorit comptente
: ainsi,
par
exemple, pour
les
drogations
l'interdiction de fixer un prix
min
imum institue
par
l'article 37
de
l'ordonnance du 30
juin 1945 (14).
Mais le plus souvent
la lgalit
de
ces
tolrances doit appeler
les
plus
expresses rserves. Elles
rsultent, en
gnral,
de circulaires
dispensant certains professionnels de respecter
les prescriptions
lgales
ou rglementaires
(15)
ou diffrant leurs obligations
pour
une
priode
indtermine (16).
Il
arrive
mme que
la
tolrance
rsulte
d'actes
plus discrets
encore que les
circulaires : ne dit-on
pas que parfois, au moment
mme
o une mesure
est
prise,
une
lettre
adresse aux professionnels
concerns
les avise
de
n'avoir
pas
s'en inquiter?
Mme
Nguyen-Thanh cite (17) une
lettre
adresse en
1956
la Fdration
nationale
de
l'industrie de
la
salaison, qui
fixait un
taux
d'humidit
maximum des pts suprieur
au
taux
prvu
par
les
textes.
Aux
yeux
du juge
pnal,
la tolrance administrative
est
jur
idiquement inoprante. Il
estime
que
... ft-elle dmontre,
elle
ne pouvait avoir
pour
effet de soustraire
la rpression pnale des
agissements qualifis
dlits
par
un
texte
pnal
(18).
Mais
cause
d'elle
il
a
peu de chances d'tre saisi. La lgalit de ces tolrances
pose
quelques-uns
des problmes
les
plus actuels
du
droit administ
ratif,t
notamment
celui du pouvoir rglementaire des ministres.
Dans
l'analyse
classique, le ministre est
en
principe incomptent
pour
prendre par
circulaire
des mesures
caractre
rglementaire
:
si
donc
les
circulaires instituant ces tolrances ont un caractre
rglementaire, elles sont
illgales pour maner
d'une autorit incom
ptente
pour
les
prendre. Or, leur caractre
rglementaire
ne parat
pas faire de doute car il s'agit bien,
pour
leur
auteur, de modifier
l'ordre
juridique en
gnral
au profit des
professionnels et
au
dtriment
des
consommateurs :
mais
on peut
redouter
que
le juge
administratif,
dont
la
jurisprudence
est
sur
ce
point
d'interprtation
(14) V. par
exemple un arrt
n
25.741
du 18
fvrier 1970 (Socit Arthur-
Martin).
(15) Cf.
circulaire
du 1er
septembre 1971
du
ministre de
l Agriculture
assouplissant les dispositions d un
arrt
du 20 janvier
1970
relatif aux
condi
tions
d abattage des
volailles, Que
choisir
?
avril 1972, p. 20.
(16)
Cf.
circulaire
du 2 juin
1930 suspendant pour six
mois l excution
de
la loi du 26 mars 1930
sur
les fausses indications de provenance des marchand
ises.
(17)
Op. cit., p. 54.
(18)
Cass.
crim.
9 avril 1932, S.
1933,
I, 275.
7/25/2019 ridc_0035-3337_1974_num_26_3_15568
12/36
LA
PROTECTION
DES
CONSOMMATEURS
EN FRANCE 601
difficile, refuse
de
reconnatre ce
caractre rglementaire, les
faisant
du
mme
coup chapper
toute
censure.
Dans
ce
domaine
aussi la
sagesse
serait d'admettre
que
les
ministres ont un pouvoir
rglementaire
(19).
Ces circulaires n'en seraient pas
lgales pour
autant,
car
elles violent des normes juridiques (lois, dcrets, arrts)
qui
leur sont
hirarchiquement
suprieures.
Mais leur
qualit
de
rglement
obligerait l'administration
leur donner une
publicit,
et
la recevabilit
d'un
recours
pour
excs
de pouvoir dirig
contre
elles ne pourrait
faire
de doute.
La
cause
aujourd'hui
mal engage
dans
bien
des domaines de la soumission de l'administration
la
lgalit y
gagnerait.
1.2. LES SERVICES PUBLICS DE
PROTECTION
DES
CONSOM
MATEURS
Comme
complment de la police de la
consommation
ainsi
institue, divers services publics concourant
la protection
des
consommateurs
se sont
progressivement
mis
en place. Une
double
volution est ici
dcelable.
Les plus anciens d'entre
eux
(Rpression
des
fraudes, I.N.A.O.) ont une
vocation trs spcialise, et
sont
troitement
dpendants
de
l'Etat
ou de
la profession.
Le
plus
rcent,
l'Institut
national
de la
consommation,
se veut
plus
indpendant de
l'Etat et des producteurs et revendique le
droit
de
s'occuper
de
tout
ce
qui, des titres divers, touche la
protection
du
consomm
ateur.
1.21. Les services
publics spcialiss.
Ils
sont
nombreux et
divers.
Sans prtendre
tre
exhaustif,
on pourrait
citer l'Inspection
sanitaire des
viandes
(art.
258
et s.
Code rural), l'Institut scientifique et technique
des
pches marit
imes,
le Service de la
protection des
vgtaux... On s'en tiendra
deux
exemples, sans
doute
les plus significatifs : le Service de
la
Rpression des fraudes (1907) et l'Institut
national des
appellations
d'origine
(1935). Ils
constituent la
premire gnration
de services
publics vous
la
protection, parfois indirecte, du consommateur :
mais
le souci de garantir
une
loyale
concurrence entre agents
conomiques, essentielle en rgime
libral, n'a
pas
t tranger
leur
cration.
1.211.
Le Service de la
rpression
des
-fraudes
a
t
cr
en
appli
cation de l'article 11
de
la loi du 1er aot 1905
qui chargeait
l'excutif de
dsigner
par
dcret les ... autorits qualifies pour
rechercher et
constater
les infractions
. Un service
spcialis
tait
en effet
nces
saire
car les officiers de police judiciaire n'avaient
ni les
compt
ences
techniques
ni
les
moyens
d'investigation
ncessaires, et les
plaintes
individuelles des
consommateurs lss devaient tre fort
(19) Cline
Wiener, Recherches sur le
pouvoir rglementaire des
minist
res, aris, LGDJ,
1970.
7/25/2019 ridc_0035-3337_1974_num_26_3_15568
13/36
602
LA PROTECTION DES
CONSOMMATEURS
EN FRANCE
rares.
Plac sous
l'autorit
du ministre de
l'Agriculture,
il
est
devenu
en
1963 le Service de la
rpression
des fraudes et du
contrle de la
qualit
.
Le
Service
de
la
rpression
des fraudes
n'a
pas
de personnalit
juridique distincte de
celle
de l'Etat : il est un
service
intgr dans
l'administration de l'Etat. Il
est prsent
sur l'ensemble du territoire
par un service d'inspection de moins d'un millier d'inspecteurs et
contrleurs rpartis en vingt-quatre
circonscriptions
rgionales
groupant chacune plusieurs services dpartementaux. Il dispose de
brigades
spcialises dans
le
contrle
de marchandises dtermines,
et collabore avec
des
fonctionnaires d'autres services
(commissaires
aux prix notamment). Il utilise les services de quatre laboratoires
d'Etat
et d'une trentaine de laboratoires agrs
(en gnral dpar
tementaux
ou communaux)
qui analysent les
chantillons, tudient
les produits nouveaux,
font
des recherches,
etc.
Son rattachement
au
ministre de
l'Agriculture
s'explique par
la nature
de la mission
qui lui tait
confie
lors de sa cration. Aujourd'hui ses attributions
dpassent largement le
secteur des produits
agricoles : mais cette
situation
ne
pourrait
tre remise en
cause
que si l'on
crait,
un jour,
un ministre des Consommateurs.
Les
agents du
service
sont chargs de la recherche et de la
constatation des infractions en matire de tromperies
ou falsif
ications.
Us
peuvent librement
procder
des
prlvements, mme
en
l'absence
de tout indice
de
fraude,
dans
divers locaux
profes
sionnels
publics
et privs
numrs
par un dcret du 22 janvier
1919
(art.
5)
ainsi
que dans les
gares, ports,
foires,
halles
et
marchs. Le
prlvement est une mesure caractre administratif, dont
la
pro
cdure
est minutieusement rgle, notamment
pour
permettre aux
droits de
la
dfense de
s'exercer.
En cas de flagrant dlit
de
falsi
fication ou si l'tat de corruption ou la toxicit d'un
produit
sont
reconnus, les articles
3,
7 et
9
de la loi du 1er
aot
1905 autorisent
les
agents
des
fraudes procder
la saisie ou la
destruction
de
ces
produits.
Le frein essentiel l'efficacit du Service de
la rpression des
fraudes est l'insuffisance
des moyens dont il dispose. Son
budget
est
de
l'ordre
de trente-cinq millions, soit environ 1/200 des
dpenses
publicitaires...
1.212.
L'Institut national des appellations
d'origine
(I.N.A.O.) a
t cr par
un
dcret
du
30 juillet 1935
relatif
la dfense du
march des vins (20). Il s'agit d un organisme
cr
pour tre
l instr
ument
'une collaboration entre
l'administration,
les
producteurs
et
les
ngociants. La discipline de
la profession
qu'implique la garantie
des
qualits d'origine d'un produit
ne peut
se
faire
sans les profes
sionnels ; mais la prsence
des pouvoirs publics
s'impose
dans
la
mesure o
l'intrt
gnral est en cause, et o le
recours
d'ven-
(20) D. 1935, IV, 249.
7/25/2019 ridc_0035-3337_1974_num_26_3_15568
14/36
LA
PROTECTION DES CONSOMMATEURS EN FRANCE 603
ruelles
sanctions suppose l'exercice
de
prrogatives de puissance
publique.
La nature juridique de l'I.N.A.O.
ne fait plus
de
doute aujourd
h ui .
l
s'agit
d'un organisme cr par l'Etat, dot
de
la
personnalit
civile, charg de grer un service public administratif et disposant
de
prrogatives exorbitantes
du droit
commun.
Le Conseil d'Etat,
en se
reconnaissant comptent pour connatre d'un
litige concer
nant n agent de
l'I.N.A.O.,
a implicitement admis sa
nature
d'organisme public (21), et le Commissaire du Gouvernement,
M. Heumann
avait
dans la mme affaire conclu qu'il s'agissait d'un
tablissement public : cette qualification
semble
parfaitement rendre
compte
de la
ralit
de l'institution,
L'I.N.A.O. intervient
la
fois
dans la procdure de reconnais
sancees appellations d'origine et, avec l'aide du
Service de
la
rpression des
fraudes,
dans la
protection
des
appellations
reconnues.
Il utilise
les
services d'un personnel
qui lui est propre
mais
dispose
galement
d'inspecteurs
des fraudes nomms directement
auprs
de
l'Institut
:
c'est un premier signe de son troite collaboration
avec
l'Etat.
Mais
cette collaboration est
plus
vidente
encore dans la
pro
cdure
d'laboration
des
normes auxquelles est soumis le
bnfice
de
l'appellation
d'origine. L'I.N.A.O. dtermine les conditions aux
quelles
le
produit
doit satisfaire : aire de production, cpages utiliser,
rendement maximum
l'hectare,
degr alcoolique minimum, procds
de vinification utiliser, etc. Aprs
quoi,
indique
l'article 21
du dcret
du 30 juillet 1935
Les
dcisions prises par l'Institut dans la limite des
attributions
qui
lui sont
reconnues
par
le
prsent article
feront
l'objet,
sur
l'initiative du ministre
de l'Agriculture, de
dcrets
qui seront
publis au Journal officiel .
C'est
un
bel
exemple de ce qu'on appell
erait aujourd'hui
l'laboration
conjointe, ou concerte, d'un acte
rglementaire.
1.22. Un
service public
vocation
gnrale
:
l'Institut
national
de
la consommation.
Le principe de la cration de l'Institut national de la consom
mation (I.N.C.)
a
t
pos par
l'article 22
de
la loi
de Finances
recti
ficative du 22
dcembre
1966, conformment
l'article
34 de la
Constitution
:
l'I.N.C.
constitue
en
effet
une catgorie nouvelle
d'tablissement public.
Un dcret du 14 dcembre 1967 a
prcis ses
rgles
d'organisation et
de fonctionnement : aprs
quelques annes
d'exprience, il
a dmontr son efficacit
mais
le problme de ses
rapports avec
les
diverses organisations de
consommateurs
n'est
pas
rsolu.
1.221. L'organisation de l'I.N.C. a
t conue pour permettre une
collaboration trs souple
des consommateurs,
des
producteurs
et
des
(21) CE.
13
novembre 1959, Navizet, Revue
du
droit public, 1960,
p.
1034,
Concl. Heumann.
7/25/2019 ridc_0035-3337_1974_num_26_3_15568
15/36
604
LA PROTECTION DES
CONSOMMATEURS
EN FRANCE
pouvoirs publics en
confiant aux
reprsentants
des
consommateu
une
part
prpondrante dans sa gestion, avec
une tutelle
du minist
de l'Economie et
des
Finances.
L'I.N.C. est un tablissement public administratif, dot de
personnalit morale
et
de l'autonomie
financire.
Le Conseil d'adn
nistration
dlibre
sur toutes les questions ressortissant
l'objet
l'Institut, et notamment sur
les
programmes
d'action
prsents
par
directeur.
Sur
les
vingt-trois
membres le
composant,
douze repi
sentent les
consommateurs (organismes familiaux, coopratives (
consommation, unions
de consommateurs), six reprsentent
les
ac
vits
professionnelles
(commerce, publicit, pches, agriculture, indu
trie et presse) et cinq
les pouvoirs
publics
(agriculture,
industri
information,
affaires
sociales
et
ducation nationale). On note:
d'ailleurs que, dans un souci de meilleure
coordination
des divers*
actions,
c'est
le
chef
du
Service
de la
rpression des
fraudes
qi
reprsente le
ministre
de l'Agriculture, et le commissaire
la
Norm
lisation celui
de
l'Industrie. Les reprsentants
des consommateu]
sont dsigns par le ministre de l'Economie et des
Finances
sur :
proposition
des
groupements
reprsents
au
Comit national
de
consommation.
Le
directeur
de
l'Institut,
dont le rle
est
trs important, n ei
ni dsign ni
propos
par le Conseil
d'administration, comme 1
consommateurs le
souhaitaient
: l'article 10 du dcret du 14 dcen
bre 1967
dispose
qu'il
est
choisi et nomm par
arrt
du
ministre
l'Economie
et des Finances, sans participation du Conseil. C'est u
des
aspects
de
la
tutelle
que
les
pouvoirs publics
entendent
exerce
sur
l'I.N.C.
Cette
tutelle
s'exerce galement par le truchement
d'u
Commissaire du Gouvernement
(le
directeur
gnral du Commerc
intrieur
et
des Prix) qui
dispose
d'un droit de veto
suspensif su
les
dlibrations
du Conseil :
son
opposition est leve de plein droi
si elle
n'est
pas confirme
par
le
ministre
dans le dlai d'un moi;
Enfin
l'influence des pouvoirs
publics
est sensible galement sur 1
plan financier. Le budget total de l'Institut pour 1973 tait de l'ordr
de 12 700
000
francs,
dont
la
moiti
environ attendue de ses recette
propres (vente de publications, notamment) et le reste sous la form
d'une
subvention
de l'Etat. On avait un temps
envisag
de
finance
l'I.N.C.
par une taxe
sur
le
chiffre
d'affaires
de
la
publicit
:
cett
formule lui
aurait
sans aucun doute garanti une
plus
grande inde
pendance
financire. Son organisation est
en fin de compte
ambigu
elle donne aux consommateurs
une
position prpondrante,
mais
ell
laisse
aux pouvoirs
publics les
moyens de s'opposer
toute entrepris
d'envergure qu'ils n'approuveraient pas.
1.222.
La
mission
de
l'I.N.C.
est plus ambigu encore. Selon la lo
du
22 dcembre 1966,
il
est
un ... centre
de
recherche,
d'informatioi
et d'tudes sur les
problmes
de la
consommation
. Le
dcret
di
14 dcembre 1967 prcise son rle. Comme
centre
d'essais,
il
peu
faire procder
des examens ou essais de produits dans des labo
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16/36
LA
PROTECTION DES CONSOMMATEURS EN FRANCE
605
ratoires
publics
ou privs ;
comme bureau
d'information, il diffuse
les
rsultats
de
ces essais
et
plus
gnralement toutes
informations
sur la qualit des produits
ou
la protection
des consommateurs
:
comme
organe de protection des consommateurs enfin,
il
procde
des
tudes
juridiques
et
rpond
des demandes individuelles ou
collectives
ce
sujet. De
fait l'I.N.C, install maintenant dans
des
conditions apparemment satisfaisantes
(22), se livre
ces diffrentes
activits :
il
procde
des essais comparatifs,
il
en publie
les
rsultats
dans
une revue destine au
grand
public, il rpond
aux demandes
de
renseignements
des particuliers, des organisations de consommateurs,
et des pouvoirs
publics.
Son action
suscite
pourtant
des
rserves
de
la part
de
certaines
organisations
de
consommateurs
et
la
plus
importante d'entre
elles,
l'Union
fdrale
des consommateurs, a quitt
le Conseil
d'administ
ratione l'LN.C.
l'automne
1972 (23).
Pour elle,
l'I.N.C.
est un
merveilleux
outil grce auquel ...
les
pouvoirs
publics et
les
fabri
cants peuvent faire croire l'opinion
publique
qu'il est dirig par
les
consommateurs, tout en en gardant le
contrle . Elle
lui reproche
certaines insuffisances de son
action
: l'tiquetage
informatif
tarde
se raliser ;
l'I.N.C. n'a
pu empcher l'O.R.T.F. de diffuser des
publicits
abusives
malgr sa participation aux travaux de la Rgie
franaise
de
publicit
; dans l'affaire
de la pollution
bactrienne des
plages,
il
a prfr
suivre les positions du secrtariat d'Etat au Tou
risme plutt
que
de soutenir la campagne de l'U.F.C. Mais
plus
fonda
mentalement
l'U.F.C. n'admet pas que l'Institut,
prsent lors
de
sa
cration
comme un
instrument
technique au
service
des
consom
mateurs
et
de
leurs organisations, exerce de plus
en plus les
fonctions
d'une organisation de consommateurs
(revue,
essais comparatifs,
reprsentation
des
consommateurs
dans
divers organismes)
:
elle
estime
en
effet que ses
liens
avec les
pouvoirs
publics
l'empchent
d'tre
reprsentatif des intrts des consommateurs, et
que
l'aide
financire reue
de l'Etat le privilgie abusivement,
freinant
du
mme
coup le
dveloppement
des authentiques organisations de
consomm
ateurs. Ces thses ne
sont d'ailleurs
pas propres l'U.F.C, et de
nombreux auteurs
les ont reprises (24).
Il ne
saurait
tre
question
de
trancher
dans un dbat dont
on
n'est
jamais
assur
de
connatre
toutes les donnes.
Quelques
remar
ques ont cependant faire. Il est vident
que l'I.N.C. n'est
pas une
organisation
de consommateurs : son statut l'indique clairement, et
il ne peut de ce
fait
prtendre reprsenter les consommateurs (25).
(22)
98, rue
de
Svres,
Paris.
(23)
Nous
quittons l I.N.C. :
pourquoi
?
Que choisir ?
octobre
1972.
(24)
Cf. notamment, J. Neyrick et
W.
Hilgers,
Le consommateur pig,
Paris,
Ed. ouvrires, 1973, p. 265 ; Ch.
Doremus
et G. Sautray, Consommateurs
ou Consomms, Paris,
Le Seuil,
1973
p.
186
;
J. Marcus-Steiff,
Information
et
dfense des consommateurs, Communications,
nov. 1971,
p. 119.
(25) C est pourtant son
Prsident
qui
sigeait,
seul reprsentant de leurs
intrts, au Comit de la Concurrence du VI* Plan.
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17/36
606 LA PROTECTION
DES
CONSOMMATEURS
EN
FRANCE
II est certain galement que l'I.N.C.
bnficie beaucoup plus
que les
organisations de
consommateurs
de l'aide
financire
de l'Etat
:
6 300 000
francs
de subvention en 1973, contre
350
ou 400 000 francs
environ
l'ensemble
des organisations ;
si
leurs activits
sont
concurr
entes, il s'agira ncessairement d'une concurrence fausse. Il
n'est
pas
vident
en revanche que
le dveloppement des activits
de l'I.N.C.
soit
une
gne
pour
les
organisations
de consommateurs : la crois
sance rapide des abonnements
la revue de
l'U.F.C.
plaide en sens
contraire.
Les
dirigeants
de l'I.N.C. raffirment d'ailleurs leur volont
de ne pas cder ... la tentation de se substituer aux mouvements
militants
actuels ou venir, seuls
fonds
assumer la reprsentativit
des
consommateurs ... et
d'tre
un ...
outil
technique mis la
disposition
des consommateurs
et de
leurs
organisations
(26).
On
imagine
les ractions
des
syndicats ouvriers si,
leurs cts, un
tablissement
public se mettait
en
place
pour
dfendre
les
salaris
:
c'est
un peu
ce
qui
se passe
ici, et les
difficults actuelles sont assez
naturelles. Sans doute seraient-elles
plus
facilement aplanies si les
organisations de consommateurs
taient moins divises, et si l'Etat
leur
accordait des
moyens
d'action juridiques et financiers moins
drisoires.
1.3.
LES
ACTIVITES PRIVEES CONCOURANT
A
LA PROTECTION
DES
CONSOMMATEURS
Les pouvoirs
publics n'ont pas
voulu
prendre
en charge direct
ement
outes
les
activits susceptibles
de
concourir
la
protection
du consommateur. C'est l'un des traits du
no-libralisme
: l admi
nistration
renonce agir elle-mme,
mais
suscite
des
initiatives qu'elle
encouragera
tout en
les contrlant. Ici
des associations prives
rgies
par
la loi
du 1er
juillet 1901
collaborent avec les pouvoirs
publics en vue de mieux informer
les
consommateurs sur la
qualit
des
biens
et services (27). Elles se situent aux frontires incertaines
du service public
et
de l'activit
prive
d'intrt gnral
et concernent
la normalisation, la
certification
de la qualit, et
l'tiquetage
infor-
matif.
1.31. La
normalisation.
La
normalisation
est
un
moyen
d'instaurer
une
discipline col
lective de la production,
en
obligeant
les producteurs
respecter
les normes auxquelles certains biens, doivent rpondre. Selon
l'.S.O. (Comit
international pour
la normalisation), elle est mise
en
uvre ...
dans
l'intrt commun
tant
des
consommateurs
que
des producteurs
. Elle est
en
tout cas un moyen d'informer le
consommateur sur
les
qualits
qu'il peut attendre
d'un produit :
(26) Interview de
M.
Estingoy,
directeur
de l I.N.C.,
Le
Point, 6
aot
1973.
(27) J.-M.
Garrigou-Lagrange,
Recherches
sur les
rapports
des associations
avec
les
pouvoirs publics,
Paris,
L.G.D.J., 1970.
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18/36
LA
PROTECTION
DES CONSOMMATEURS EN
FRANCE
607
c'est le but
que
lui assignent la loi et le dcret du 24 mai 1941
organisant en France la normalisation.
1.311.
L'Association franaise de normalisation (A.F.N.O.R.)
est
une
association prive rgie par la
loi
du 1er juillet 1901, dont la
cration
a
t dcide par l'article
8 du
dcret du
24
mai 1941. Elle
a
pour mission,
selon le
mme
texte, de ... centraliser et coordonner
en France
sous l'autorit des
secrtaires
d'Etat responsables
tous
les
travaux,
recherches
et
tudes
concernant
la
normalisation .
La
composition de son Conseil d'administration est fixe par dcret
:
les
producteurs y jouent
le rle
essentiel, un
dixime
des
siges
seulement
tant
rserv aux consommateurs.
L'A.F.N.O.R. est videmment une association
insolite
au regard
des principes
de
la
loi du 1er
juillet
1901 organisant
la
libert d assoc
iation.
Sa
cration a
t
dcide par l'Etat,
et
non par
les
associs
;
son objet
et
la composition de son
conseil sont
fixs par dcret,
et
non par
ses
statuts ; enfin le Commissaire
la normalisation, haut
fonctionnaire du ministre
de l'Industrie, est Commissaire du
Gou
vernement auprs de l A.
F.
NO.R. L'apparence
juridique
de
l asso
ciation est seulement un moyen
commode
de
faire
collaborer
la
profession et les pouvoirs publics.
Si,
comme on
l'estime en
gnral,
la normalisation constitue un service public
(28),
on se trouve en
prsence
de
l'un des
trs
nombreux
services
publics grs par
des
organismes privs.
1.312. L'laboration
des
normes est conduite par l'A.F.N.O.R.
Mais c'est
l'Etat
qui
fixe
les
directives
gnrales, notamment
en
ce
qui
concerne
le programme des
travaux.
Et une instruction minist
rielle fixe la procdure
suivre.
Le
travail
technique
prparatoire est
ralis par
des
bureaux
de normalisation agrs, qui sont souvent l'manation des profess
ionnels. Le
projet
de
norme ainsi
prpar est
transmis l'A.F.N.O.R.,
qui le soumet
une enqute publique au cours de laquelle tous les
avis,
y compris ceux des consommateurs,
peuvent tre recueillis.
Si les rsultats
de l'enqute sont favorables, le
texte
dfinitif de la
norme
est
arrt ; sinon l'A.F.N.O.R. peut crer une commission
d'arbitrage et,
en
cas
de besoin, le
Commissaire
la normalisation
dispose d'un pouvoir de substitution pour fixer la
norme.
Une
fois
labore,
la
norme
est
soumise
l'homologation
ministrielle. L'arrt d'homologation rend son
application
obli
gatoire
dans
les marchs publics
;
il peut mme, en vertu de
l'article 13 du
dcret
du
24 mai
1941,
gnraliser
son application
:
ds lors
tous les
produits de l'espce
proposs
la
vente devront
remplir
les
conditions spcifies par la norme (29). La conformit
(28)
Andr de Laubadre, La protection
du
consommateur, Rapport
l Association H. Capitant, 1973. Dans
le mme
sens, Denise Nguyen-Thanh,
op. cit.
p.
151.
(29)
Cf. par exemple
un
arrt du 12 mars
1970 selon
lequel toutes les
machines laver vendues
en
France doivent tre
titulaires
de la marque N.F.
ou
avoir
subi
des
essais
dans
des laboratoires
agrs.
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19/36
608
LA PROTECTION DES CONSOMMATEURS EN FRANCE
la
norme
homologue
donne droit la marque N.F., marque natio
nale cre par un dcret-loi du 12 novembre 1938,
dont l'A.F.N.O.R.
est titulaire : le fabricant s'engage alors
n'apposer la marque que
sur des
biens
conformes
au
prototype agr,
et
accepter
tous les
contrles effectus par l'A.F.N.O.R. ou des
organismes
agrs par
elle.
1.32.
Les
labels et certificats de qualit.
Les
labels et
certificats
de
qualit
tendent ...
attester
des
fins
commerciales
qu'un
produit prsente
certaines
qualits
spci
fiques.
Ils sont
dlivrs
par un organisme
qui
n'assure
pas
lui-mme
la
fabrication,
la production
ou
la vente de ce produit
(30).
Leur
dlivrance
est rgle par la loi d'orientation
agricole
du
5 aot 1960
et
son dcret
d'application
du 13 janvier 1965 pour
les
labels
agri
coles,
et
par les
articles
7
et
8
de
la loi
du
2
juillet
1963
(31) pour
les
labels
industriels dits
certificats de qualit
.
La
multiplicit
des
organismes certificateurs,
et la
difficult qu'il y a
les
contrler
rgulirement,
font
que la
garantie
apporte aux consommateurs
est trs
variable.
Encore
faut-il distinguer,
et rserver une
place
particulire au label Qualit-France.
1.321. Le label Qualit-France a
t
cr par
un dcret
du
12
juin
1946 (32), pris pour l'application de la loi du
1er
aot 1905
en
ce
qui
concerne le
marquage
de
qualit.
Il
autorise
le ministre
des
Finances dposer une
marque nationale
de
qualit
dont
des
arrts
subsquents fixeront les modalits
d'attribution.
L'Association
nationale
pour
la
dfense
de
la
qualit
franaise
a
t
cre, l'initiative de l'Etat, en
1947,
pour attribuer
la
marque
de qualit institue par le dcret du 12
juin
1946.
C'est
une
association
rgie par la loi du 1er juillet 1901,
dont
le
Conseil d'administration
comprend
en
trois parts
gales
des
reprsentants
de l'industrie et
des
services
d'une
part, de l'agriculture et
des
industries aliment
aires d'autre part, un reprsentant
de
l'Etat,
des
personnalits
indpendantes et
des
consommateurs enfin : comme
pour
l'A.F.N.O.R.
la prpondrance
des producteurs
est vidente et
ce
n'est pas la
cration rcente d'un Comit
consultatif
des consommateurs qui
peut modifier
cette situation.
D'aprs ses
statuts,
l'association
doit
poursuivre un
triple
but
:
promouvoir les produits
franais
de qualit, informer les consom
mateurs et aider
les
producteurs (33). Son rle est
d'attribuer aprs
examen du produit une
notice
descriptive indiquant ses caract
ristiques spcifiques. Le
label Qualit-France, qui s'applique
des
(30) Denise Nguyen-Thanh, op. cit. p.
180.
(31)
Dont
les textes
d application
n ont
jamais
t
pris :
les labels
indust
riels sont donc dlivrs sans rfrence
une
quelconque rglementation.
(32)
Dcret
46-1391
du 12 juin
1946,
D.
1946,
IV, 256.
(33)
La nature de
cette mission
aurait
pu
justifier une gestion tripartite :
Etat,
consommateurs,
producteurs.
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20/36
LA
PROTECTION DES CONSOMMATEURS EN FRANCE
609
marchandises trs diverses, constitue la
fois
un instrument de
certification de qualit
et
une technique d'tiquetage informatif. Si
le
produit
est
agr,
un
contrat
pass
entre
l'association
et
le
pro
ducteur
prcise
les
obligations de
ce
dernier
: maintenir
la conformit
du
produit
la notice descriptive de
qualit
et
accepter
les contrles
ncessaires ;
en
cas de manquements,
le
contrat
prvoit
diverses
sanctions allant
de ramende la rsiliation avec perte du label.
L'intervention des
pouvoirs
publics est ici beaucoup
plus discrte
qu'en matire
de
normalisation.
La mission de
l'association
est
sans
doute
d'intrt
gnral mais ne
peut
en
aucune manire
tre qualifie
de
mission
de
service public, et
les relations juridiques qu'elle
noue
avec le fabricant sont
l'vidence rgies par le droit priv.
1.322.
Les
autres
organismes certificateurs sont infiniment nomb
reux
et
divers.
Il
s'agit
d'associations
ou
syndicats
professionnels,
regroupant des
producteurs,
mais ne se livrant pas eux-mmes
la
fabrication ou la vente. En
matire de
labels
agricoles
ils sont soumis
un contrle au
demeurant
assez
formel
des
pouvoirs
publics
:
dpt
des
statuts, agrment, et contrle possible par les
agents
des
fraudes.
La dlivrance d'un
label est
soumise l'homologation pralable
par le ministre de
l'Agriculture
(34) de son rglement,
qui
dfinit
l'ensemble des caractristiques
techniques
du
produit
auquel le label
sera attribu
(35).
Le
ministre
peut
approuver,
demander des
modif
ications
ou
refuser
l'homologation
: il dispose cet gard
d'un
pouvoir discrtionnaire
dans l'apprciation
du
niveau de
qualit
exiger du produit. Il peut, par la suite, retirer l'homologation ... lors
que
les caractristiques prvues
au
rglement
apparaissent
insuffi
santes en raison de l'volution survenue dans les
conditions
de
production
ou de
commercialisation
du
produit
en
cause
(36).
Mais la technique du label peut se rvler dangereuse si un
contrle
trs
rigoureux de la conformit
du
produit au rglement n'est
pas
rgulirement assur : il donnerait en effet
une
garantie illusoire
au consommateur.
C'est
pourquoi l'organisme
certificateur
s'engage
procder
des vrifications
(37) ;
dans la plupart
des cas
l asso
ciation
Qualit-France
est
charge par contrat de procder des
contrles techniques
;
enfin
les
agents
du
service des fraudes peuvent
vrifier
leur
tour
l'efficacit
de
ces
divers contrles.
Le
retrait
du
label
sanctionne
en principe les
manquements.
Les
labels correspondent
des
situations trop diffrentes pour
que l'on
puisse
dire
qu'ils
constituent
tous une garantie
galement
(34)
On
ne peut parler
ici
que des
labels
agricoles, en l absence de rgle
ment
sur les
labels
industriels.
(35)
Cf.
par
exemple
la dcision
02-71 du 16 juillet
1971
homologuant
le
rglement
du
label
Poulets de
chair
blanche
du
Prigord
.
(36) D.
13
janvier 1965, art.
10.
(37) Des contrleurs
syndicaux
visitent
chaque mois
les
usines o
se
fabrique le
Camembert
de
Normandie .
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21/36
610
LA
PROTECTION
DES
CONSOMMATEURS
EN FRANCE
satisfaisante
de la qualit des produits. Il
est
craindre que
dans
bien
des
cas,
au
bout
de quelque temps,
les
vrifications se
fassent
moins
frquentes
;
or les
agents de
la
rpression des
fraudes n'ont
pas
les
moyens
de
s'en
apercevoir
toujours.
1.33. L'tiquetage d'information.
L'tiquetage
d'information est un
bon moyen
de
fournir au
consommateur
une information
objective sur
les biens
qui lui sont
proposs. Il doit lui permettre de
faire
un
choix raisonn,
en sachant
si
le produit rpond ses besoins.
Dans ce
domaine, on a vu
dj
qu'un dcret du 12 octobre 1972 avait rendu obligatoire,
pour
certains
produits,
un
tiquetage
minimum. Mais on peut penser
et c'est un
nouveau
rapprochement
avec le droit du travail que la loi et le
rglement
se
contenteront
en
la
matire d'instituer
une protection
lmentaire laissant
aux divers
partenaires
conomiques
le
soin
d'aller volontairement
au-del
de
ce
minimum lgal.
C'est ce qui se
passe, semble-t-il, avec la cration de l'Association franaise
pour
l'tiquetage d'information.
1.331.
L'Association franaise pour l'tiquetage
d'information
(A.F.E.I.) est une association prive rgie
par
la
loi
du 1er
juillet
1901.
Elle a t cre
en application
d'une Convention signe le 1er
s
ptembre 1970
entre
le Conseil national du patronat
franais
et l'Institut
national
de la consommation.
L'Association
est
administre par un conseil paritaire de vingt-
quatre membres reprsentant pour moiti le
C.N.P.F.,
c'est--dire
les
producteurs,
et
pour moiti
l'I.N.C.
(38).
Des
commissions techniques
composes d'experts dsigns par l'I.N.C.
et
par les
branches
profes
sionnelles
intresses
seront constitues pour chaque grande catgorie
de produits ou services.
L'objet de
l'A.F.E.I.
est ... la cration, la gestion et la promotion
du
systme
d'tiquetage d'information,
selon les
principes exposs
par
la Convention de
cration...
(statuts, art. 2).
La
Convention
du
1er
septembre 1970
indique
sur
ce point
dans son
article 7
:
L tique
tage'information,
qui
a
pour
seul but d'aider
le
consommateur dans
son choix en lui communiquant par le moyen d'tiquettes imprimes
ou
jointes aux
produits
mis en vente ou aux services offerts, des
don
nes
caractristiques
concernant
ces
produits
ou
ces
services,
et
pou
vant informer
utilement
le consommateur, ne saurait
en
aucun cas
se
substituer
aux
textes lgaux en vigueur, ni constituer
une certification
de qualit .
La
prsence des pouvoirs publics
est
ici plus
discrte encore
qu'en
matire
de
normalisation
ou de
certification
de
qualit. L'initiative
n'est
pas venue de l'Etat ; la convention originaire conclue
entre
un
(38)
Et
non
les consommateurs, comme le dit la brochure
sur l A.F.E.I.
diffuse par
l I.N.C.
L article 7
des
statuts indique
que la moiti des adminis
trateurs est
dsigne
par l I.N.C., mais sans prciser qu il doit s agir de repr
sentants des consommateurs.
7/25/2019 ridc_0035-3337_1974_num_26_3_15568
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LA
PROTECTION DES
CONSOMMATEURS
EN FRANCE 611
tablissement
public administratif
et le C.N.P.F.
ne concerne
nullement
l'excution
d'un
service
public
et
ne contient nulle
clause
exorbitante
du
droit
commun
:
elle
est
de
ce fait
rgie
par
le
droit
priv
;
l assoc
iation cre fonctionne
dans
les
conditions du
droit
commun, et la
procdure mise en
place
pour raliser
l'tiquetage
d'information
n'implique
ni
prrogatives de puissance publique
ni
contrle des
pouvoirs
publics.
1.332.
La procdure de ralisation de l'tiquetage
est
prcise
la
fois
dans la
Convention
de cration du 1er septembre 1970
et
dans
les contrats passs
entre l'A.F.E.I.
et les
branches
professionnelles
ou
les entreprises intresses.
Les
commissions
techniques
paritaires
prparent
des tiquettes
dont les
diverses
rubriques doivent donner
des
informations
qxianti-
fiables,
objectives
et
contrlables.
L'entreprise
qui
a
volontairement
dcid d'utiliser
pour
un de ses produits
les
tiquettes
A.F.E.I.
conclut
un contrat avec l'A.F.E.I.
Elle s'engage
ce faisant ce
que
le produit
rponde aux normes obligatoires ou aux dispositions lgales ou rgle
mentaires
en vigueur. C'est elle
qui
appose sous sa
propre
responsa
bilit
es
mentions
devant figurer aux
diverses
rubriques
de
l ti
quette
sans pouvoir
laisser
en blanc aucune rubrique ni
rajouter
aucune
autre indication. L'A.F.E.I. procdera
des
contrles
a poster
iori,oit de sa propre initiative soit sur rclamation d'un consomm
ateur. 'ils rvlent des
dfauts de
conformit entre les mentions
portes sur
l'tiquette et
le produit,
des sanctions
pourront tre prises
allant
de
l'avertissement
au
retrait
de
l'tiquette
:
mais
le
contractant
devra
avoir t
mis en
mesure
de
prsenter ses observations.
On
notera
une
innovation
intressante,
prvue l'article 7 du
contrat
type. Une sanction complmentaire
du
contractant vis--vis
du
consommateur qui
est un tiers
par rapport
au
contrat
et
allant de la remise en tat ou du
remplacement
du produit une
indemnisation,
peut
tre
prononce
par le Conseil
d'administration
de l'A.F.E.I.
Le
financement
de l'ensemble de ces oprations
est assur
par
es entreprises
dsirant
bnficier de l'tiquetage. Elles
versent
un
droit
d'adhsion,
une
redevance calcule sur le chiffre d'affaires total
du
produit
soumis
l'tiquetage,
avec
taux dgressif
de
0,10
/oo