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PETIT DÉJ POÉTIQUE SERVI PAR LES ÉDITIONS BRUNO DOUCEY & NATHALIE NOVI n°1

servi par - Éditions Bruno Doucey...Sans la moindre chance de remon - ter au jour pour témoigner. Les paroles recueillies sont comme des clous plantés. Chercher les manières d’écrire

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Petit déj poétiqueservi parles éditions bruno doucey& nathalie novi

n°1

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Pour un excès d’éclatsur des lessives multicoloresPour une attente sans issue désespérément repousséePour marteler le temps, nous-mêmes, les nuagespour appeler la pluie, le soleil et les ventsPour écouter les chants revenir en nous dans les cascadesPour plonger dans une mer vraiePour aimer au creux d’un rocherune illusion, pour laver des bruits le silenceet retrouver les froissements des vies confuses, mouvementsd’une existence d’avant l’être, pour partager le flux des vaguesPasser dans les saisonsPour une île au milieu du fleuve, pour revivre.

Dis-moi ma vie_80p_oct.2018.indd 48 21/11/18 15:17

pierre Seghers

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IX

Écrire la routine. Ces jours un peu pareils. Ces moments répétés qui n’auront droit ni à une photo, ni à un poème, ni à se changer en souvenir. Sans la moindre chance de remon-ter au jour pour témoigner. Les paroles recueillies sont comme des clous plantés. Chercher les manières d’écrire juste. Écrire sur le bruit de la chasse d’eau. Sur l’odeur qui s’échappe des poubelles. Sur le grincement concerté des volets électriques. Écrire le rituel du réveil en trois temps, la poussière qui s’amoncelle sur les marches de l’escalier. Écrire neutre. Pour faire venir le monde.

Contre la nuit_112p_135x175.indd 97 04/03/19 14:34

Stéphane Bataillon

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Pour achever la nuit

Ouvre en grand le vent témoin besogneux des secrètes transhumances et entre dans les murs du temps fossile La rosée de l’espace aura fait œuvre fertile Il te suffira de planter des fleurs dans ton cœur pour achever la nuit

Éternité renversée

L’Océan, c’est l’éternité renversée, sur la terre ferme des nuages, le recours inachevé à la foule absente des siècles, la noble saisie des songes à l’entassement des saisons.

L’Océan, c’est l’identité, toujours, de l’immuable question des jours, où, pour ne plus parler, s’enferment l’âme et les bras des hivers glacés, portefaix des idées sans paroles, courant au pas des clartés, sans jamais les précéder.

C’est la densité des silences infaillibles sur la gorge des femmes éblouies, la toile longuement tissée des ciels tom-bés, sur les désirs coureurs de peau nue, l’allongement des regards enfouis dans le ventre vert des houles, sans jamais les prendre.

L’Océan, c’est la nuit faite femme, aux seins lourds de l’éter-nel amour, une histoire où le coucher des rumeurs porte tout bas l’éparpillement des sables, sur les yeux battus des statues et des rêves, quand l’épaule a verdi de sa passion.

L’Océan, c’est le sommeil prodigue sous l’immense nuit des hommes à venir.Jean-Marie Berthier

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L’histoirepour border l’enfant raconte-la moi les matins incertains

Je franchis les barbelés_112p_135x175.indd 27 31/05/19 15:09

Souad Labbize

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coquillage de feu

à quoi servent vos illustres royaumesquand le vent du matin fait défautune maille odorante passe par le jardinune petite lune empêtrée dans sa course endormie ?

à quoi bon dégorger la poésie de sa glaisesi je ne vois pas pointer l’étoile du réveilbrune et flambante sur les pliset replis des collines ?

quel manque de sens : nos applaudissements de papillonsmon nom comme une griffecrachée dans vos journauxsi mes jours ne sont pas tissés de silence

la vie est une femme : des forêts dans la brumelueur de lune timide, sanglotensommeillé du loriot, roulis du bateaula faille de vérité entre soulèvement et mort

que signifie le mot : coquillagesans l’incessant baiser de la mersi je ne peux marcher seulvers les derniers feux de l’aurore ?

La femme dans le soleil_112p.135x175.indd 97 05/03/15 13:43

Breyten Breytenbach

Nathalie Novi

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Pour croire encore au bonheurIl suffirait qu’un oiseau passeDans les fontaines du cielQue le feuillage d’un arbreS’éveille à la grâce du givreÉcoute mon cœur est vivantCe soir au creux de la neigeLes choses lentement renaissentComme autrefois dans la chambreLa lampe fait son officeEt voilà que je te rejoinsSur les hauteurs du silence.Pour que ton ombre s’y reposeLa neige est tendre sur ma gorgeEt le ciel retient le jour.

LeBonheurDuJour_112p.135x175_EMD.indd 32 15/10/12 12:28

Hélène Cadou

Nathalie Novi

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Peut-être est-ce la peurqui nous pousse à poser lâchementune buée sur les choses à ne pas dire ensemble le oui et le nonéviter la question

tordre nos révoltes en bannières changer le doute en illusion peut-être seulement la peur

qui nous pousse à fermer les portesà refuser d’entendre le merle moqueurce chant rebelle que l’on garde au cœur

On continueallumant d’autres réverbèrespeuplés d’utopies ces lieux de nulle part

ce qu’on invente vrai

on continuel’émotion portée hautdes foules solidairesnos initiales accrochées à un fil« embarqués »

on tente chaque fois de forcer le passagede trouver vainement de nouveaux dieuxcache-misère par-dessus l’essoufflement des lilas

on voudrait tantdélier les futurson voudrait

emprunter des chemins différents

même sans point finalun frisson d’ouverture

signer notre libertéce qu’on invente vrai

Mireille Fargier-Caruso

Nathalie NoviDessin issu du livre Le rêveur qui ramassait des papiers bonbon, texte de David Dumortier, © éditions La poule qui pond, 2015.

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retrouvez NoS LivreS

pierre Seghers, Dis-moi, ma vie, 2018.

Stéphane Bataillon, Contre la nuit, 2019.

Jean-Marie Berthier, Ne te retourne plus, 2017.

Souad Labbize, Je franchis les barbelés, 2019.

Breyten Breytenbach, La femme dans le soleil, 2015.

Hélène Cadou Le bonheur du jour, 2012.

Mireille Fargier-Caruso, Comme une promesse abandonnée, 2019.

en librairievous avez aimé un des textes proposés ? pour nous soutenir, rien de plus simple : vous pouvez commander le recueil dont il est extrait auprès de votre libraire !

vous pouvez retrouver les dessins de Nathalie Novi dans ses ouvrages parus chez Didier Jeunesse, rue du Monde, Galli-mard Jeunesse, thierry Magnier et Albin Michel Jeunesse, ainsi que sur son site : www.nathalienovi.com.

et bien sûr dans l’ouvrage de la collection poés’histoires :

Bruno Doucey, La vie est belle, dessins de Nathalie Novi, 2019.