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 Note de reche rche Pratiques des lieux, modes d’habiter, régimes d’habiter : pour une analyse trialogique  des dimensions spatiales des sociétés humaines Mathis Stock, EA HABITER (Universit é de Reims Champagne-Ardenne) & EA MIT (Université de Paris 7) & Laboratoi re Chôros, Ecole Po lytechni que Fédérale de Lausanne  Résumé On a récemment ouvert un nouveau projet de questionnement géographique visant à explorer des manières dont les individus habitent les lieux géographiques du Monde (Stock, 2001 ; 2004). Le présent article propose trois notions interdépendantes qui pourraient nous aider à intégrer l’habiter des individus dans un contexte sociétal et spatial. Les termes de pratiques des lieux, modes/style s d’habiter et r égimes d’habiter seront explorés quant à leur capacité heuristique à rendre compte des manières, changeantes, des sociétés à créer des référents  géograp hiques pour et par leurs p ratiques. mots-clés Habiter - Individu - Mobilité géographique - Mode d'habiter - Pratiques - Modèles - Théorie - Régime d'habiter.  Abstract We recently proposed a new project for the geographical research based on the ways individuals inhabit the  geograp hical places o f the Wor ld (Stock, 2 001; 2 004). We no w propose three interdep endent conc epts that cou ld help us to embed the dwelling of the individuals into a societal and spatial context. The notions of “practice of  places”, “modes or styles of dwelling” and “regimes of dwelling” will be explored on behalf their heurist ic capacity of grasping the changing manners, by societies, of creating geographical refe rents for and by practice. Keywords Dwelling - Geographical mobility - Individual - models - mode of dwelling - Practice - regime of dwelling - theory.  Zusammenfassu ng Wir haben kürzlich ein neues Projekt für die geographischen Fragestell ung vorgeschlagen, nämlich der Art und Weise, in der die Individuen die geographischen Orte der Welt bewohnen (Stock, 2001; 2004). Wir schlagen nun drei interdependente Konzepte vor, welche uns helfen könnten, die Individuen in einen sozietalen und räumlichen Kontext einzubeziehen. Die Begriffe der “ Praxis der Orte ”, der “ Arten oder Style des Wohnens ” und der “ Regime des Wohnens ” sollen hier auf ihre heuristische Fähigkeit, die sich wandelnden Arten und Weisen der Gesellschaften, geographische Fixierunge n für und durch Praxis zu schaffen, erkundet werden. Stichworte Individuum - Geog raphische Mobilität - Modell e - Modus des Wohnens - Praxis - Regime des Wohnens - T heorie - Wohnen. Introduction L’enjeu de la géographie réside, aujourd’hui plus que jamais, dans la construction d’une approche pertinente des dimensions spatiales des sociétés humaines contemporaines. Prendre en compte le contexte sociétal, travailler sur la société par de l’espace et par les spatialités, exige une recherche d’adéquation maximale des instruments

STOCK, Mathis. Pratiques Des Lieux, Modes d’Habiter, Régimes d’Habiter

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  • Note de recherche

    Pratiques des lieux, modes dhabiter, rgimes dhabiter : pour une analyse trialogique des dimensions spatiales des socits humaines

    Mathis Stock, EA HABITER (Universit de Reims Champagne-Ardenne) & EA MIT (Universit de Paris 7) &

    Laboratoire Chros, Ecole Polytechnique Fdrale de Lausanne Rsum On a rcemment ouvert un nouveau projet de questionnement gographique visant explorer des manires dont les individus habitent les lieux gographiques du Monde (Stock, 2001 ; 2004). Le prsent article propose trois notions interdpendantes qui pourraient nous aider intgrer lhabiter des individus dans un contexte socital et spatial. Les termes de pratiques des lieux, modes/styles dhabiter et rgimes dhabiter seront explors quant leur capacit heuristique rendre compte des manires, changeantes, des socits crer des rfrents gographiques pour et par leurs pratiques. mots-cls Habiter - Individu - Mobilit gographique - Mode d'habiter - Pratiques - Modles - Thorie - Rgime d'habiter. Abstract We recently proposed a new project for the geographical research based on the ways individuals inhabit the geographical places of the World (Stock, 2001; 2004). We now propose three interdependent concepts that could help us to embed the dwelling of the individuals into a societal and spatial context. The notions of practice of places, modes or styles of dwelling and regimes of dwelling will be explored on behalf their heuristic capacity of grasping the changing manners, by societies, of creating geographical referents for and by practice. Keywords Dwelling - Geographical mobility - Individual - models - mode of dwelling - Practice - regime of dwelling - theory. Zusammenfassung Wir haben krzlich ein neues Projekt fr die geographischen Fragestellung vorgeschlagen, nmlich der Art und Weise, in der die Individuen die geographischen Orte der Welt bewohnen (Stock, 2001; 2004). Wir schlagen nun drei interdependente Konzepte vor, welche uns helfen knnten, die Individuen in einen sozietalen und rumlichen Kontext einzubeziehen. Die Begriffe der Praxis der Orte , der Arten oder Style des Wohnens und der Regime des Wohnens sollen hier auf ihre heuristische Fhigkeit, die sich wandelnden Arten und Weisen der Gesellschaften, geographische Fixierungen fr und durch Praxis zu schaffen, erkundet werden. Stichworte Individuum - Geographische Mobilitt - Modelle - Modus des Wohnens - Praxis - Regime des Wohnens - Theorie - Wohnen. Introduction Lenjeu de la gographie rside, aujourdhui plus que jamais, dans la construction dune approche pertinente des dimensions spatiales des socits humaines contemporaines. Prendre en compte le contexte socital, travailler sur la socit par de lespace et par les spatialits, exige une recherche dadquation maximale des instruments

  • cognitifs avec les caractristiques des socits contemporaines1. Notamment, dautres manires de faire avec les lieux gographiques y mergent, diffrentes dautres types de socits. Ce point est fondamental : lhabiter change selon les socits, et la manire dtre et de faire avec les lieux gographiques ne sont pas les mmes selon les civilisations et degrs de dveloppement. Celles-ci sont aujourdhui fortement informes par la mobilit gographique et une individualisation gographique : do lappellation socits individus mobiles que lon peut leur assigner dun point de vue gographique (Stock, 2001). On peut penser que laccroissement de la mobilit ainsi que la diffrenciation des rythmes de dplacements ont pour consquence un changement de signification des diffrents lieux gographiques que les individus pratiquent. On assiste ainsi une recomposition des valeurs assignes aux lieux qui change radicalement la manire dont les individus habitent les lieux. Cest en ces termes que se pose dornavant la question de la gographicit des hommes/femmes vivant dans les socits individus mobiles. Comment les individus habitent-ils les lieux gographiques du Monde ? Voil la question fondamentale qui exprime la dimension gographique de ltre humain (Mensch) et dont les qualits changeantes au cours du temps requirent de prendre une distance critique par rapport aux manires habituelles de faire/penser/crire la gographie. En ce sens, nous posons que cette mobilit gographique accrue donc la multiplication des lieux pratiqus par les individus ainsi que les circulations effectues travers des itinraires dfinit et exprime de nouvelles pratiques des lieux, de nouveaux modes dhabiter et un nouveau rgime dhabiter. Le fait de pratiquer une multiplicit de lieux aurait pour consquence, - cest lhypothse -, lmergence dun nouveau rapport aux lieux gographiques, aux agencements spatiaux, la distance et au mouvement, mais aussi, par ricochet, Soi et lAutre. Ainsi, habiter, dfini uniquement lchelle des pratiques des lieux des individus (Stock, 2001 ; 2004) ou comme spatialit individuelle (Lvy & Lussault, 2003), nglige deux dimensions fondamentales : linterdpendance des pratiques et la socialisation ainsi que, plus gnralement, linscription de lindividu dans une socit et un Monde qui le dpasse, mais linclut. Afin de prendre en compte ces deux dimensions, je propose les notions de mode dhabiter et de rgime dhabiter qui sont articules aux pratiques des lieux. Dans cet article, quatre aspects sont travaills : dabord, la pertinence de la question de lhabiter loigne la problmatique de la Terre pour se centrer sur celle des lieux gographiques. Ensuite, la question des pratiques constitue la perspective centrale, du point de vue des individus, de la dmarche. Le troisime point concerne les modes dhabiter ou styles dhabiter qui dlaissent les pratiques prises isolment pour une vue densemble. Enfin, la notion de rgime dhabiter synthtise, au niveau socital, un ordre et un ordonnancement des rapports de lespace. 1. Le questionnement des socits par lhabiter La question de lhabiter permet dinterroger dune nouvelle faon, cest--dire en mettant au centre les pratiques des individus, les dimensions spatiales des socits contemporaines. Lhabiter est un terme qui a surtout t utilis dans la gographie phnomnologique du rapport entre lhomme et la Terre, notamment dinspiration heideggerienne (cf. Seamon & Mugerauer, 1989). Pour Heidegger ([1952], 2004a), habiter signifie un trait fondamental de ltre-l humain (p. 181) : tre humain signifie : tre sur la Terre en tant que mortel, cest--dire : habiter ([1952], 2004b, p. 141)2. Cet tre-sur-la-Terre, cet habiter, y a deux expressions : 1) habiter au sens davoir des habitudes dans le quotidien, 2) btir qui signifie une autre modalit dtre en 1 Je tente ici dviter larticle le ou un lorsque jutilise le terme espace . Cette tentative sinscrit dans la voie ouverte par Benno Werlen (1995 ; 1997) qui indique que espace peut tre utilis comme concept classificatoire, mais ne devant pas devenir lui-mme une partie de la classe espace . Ainsi, les expressions lespace ou un espace sont remplaces par les expressions de lespace et despace (production ou constitution despace par exemple). On trouve dans le texte Khra de Jacques Derrida (1993) le mme problme concernant linterprtation du texte Timaios de Platon o la question de chra , donc du lieu ou de lespace est pose. Pour ce problme de sens et de traduction du terme chra par rapport topos , Berque (2005) a propos la solution suivante : milieu existentiel par rapport lieu . On pourrait galement proposer lieu (Ort) par rapport endroit (Stelle). Cf. Bollnow (1963) pour une analyse approfondie du sens des termes Ort, Raum, Platz, Stelle. 2 Cependant, la gographie scientifique partir du 19me sicle propose de considrer la Terre comme la demeure de lhomme, position prolonge dans la gographie franaise par la notion d homme-habitant de Maurice Le Lannou (1949) : Habiter, cest vivre sur un morceau de la plante, en (sic) tirer de quoi satisfaire les besoins lmentaires (sic) de lexistence, et dans une mesure variable, un certain nombre de besoins (sic) acquis et de commodits superflues (sic) . Ainsi, la gographie humaine est la science de lhomme-habitant (1949). Ces formulations sont aujourdhui dpasses et ne mritent leur mention quau titre dexhaustivit historique : 1) vision sdentaire et agraire ; 2) vision comportementale (les

  • rapport avec la Terre : enclore , soigner , cultiver 3. Hoyaux (2000 ; 2001 ; 2002 ; 2003) utilise cette conception heideggerienne et dfinit lhabiter comme la constitution de lindividu par les lieux gographiques. Cette perspective nest pas adopte ici, et ce pour diffrentes raisons : le survalorisation du Sujet au dtriment du social, la perspective rurale o la proximit et le local ont une valeur positive, toujours postule, jamais dmontre, le rejet du lointain et de lailleurs dans la sphre du dangereux etc4. Pour rsumer, habiter nest pas non plus utilis dans le sens dune pratique habituelle ou familire de lespace, une utilisation du lieu de rsidence comme cest encore trop souvent le cas (cf. Mayol, 1990 ; Chalas, 2000) ni comme un certain rapport la Terre. La perspective adopte est celle des pratiques des lieux des individus (Stock, 2001), permettant ainsi dintgrer des pratiques et des lieux non-habituels, du hors-quotidien , de lphmre. Selon Lvy & Lussault (2003), habiter dsigne la spatialit des acteurs individuels (p. 440). Il permet de se situer du ct de la spatialit et non pas de lespace, deux catgories distinctes selon Lussault (2003), cest--dire de ce qui relve des actions spatiales des individus travers diffrentes technologies et instruments ainsi que leurs langages et imaginaires. On peut synthtiser ces propositions en affirmant que lhabiter est dfini comme tant le rapport de lespace tel quil est exprim par les pratiques humaines, ce qui est proche de la Praxis der Weltbindung , conceptualise par Werlen (1996 ; 1997). Il sagit dun projet cognitif qui prend au srieux lindividu comme acteur gographique et comme question centrale pour la gographie. Travailler sur lindividu dun point de vue gographique est lune des avances scientifiques rcentes ; aborder lhabiter comme tant centr sur les pratiques des lieux des individus tente de donner une cohrence ce projet scientifique qui reste thoriquement concrtiser5. Ce programme scientifique peut tre compris, pistmologiquement, comme tant un positionnement qui permet une reconnaissance de la plus grande complexit des objets humains, notamment en raison de la capacit symbolique des membres des socits humaines, par rapport aux objets des sciences physico-chimiques qui sont les moins complexes, et les objets des sciences du vivant, moyennement complexes (Elias, 1970). De ce point de vue, le projet de lhabiter nest pas rductible au courant dit de lanalyse spatiale qui correspond une tentative de physique sociale cest--dire qui fait comme si les objets humains avaient le mme degr de complexit que les objets des sciences physico-chimiques ni au courant de la gographie sociale comportementale (cf. Golledge & Stimson, 1997) o les objets humains sont rduits aux entits physiologiques qui ragissent aux stimuli de lenvironnement travers les perceptions. Ces approches pchent par un rductionnisme dans leurs tentatives dexplication : elles simplifient excessivement, voire vacuent les intentionnalits et stratgies humaines6. Dans le mme temps, il convient de ne pas isoler lindividu, ne pas faire comme si lindividu tait un homo clausus , comme lappelle Norbert Elias (1970), mais reli, en interdpendance avec dautres individus ainsi quavec les normes et valeurs sociales et insr dans diffrents contextes daction. De ce point de vue, il convient daller plus loin que les analyses centres sur le sujet en gographie depuis les annes 1970. Ainsi, lhabiter ne peut se ramener seulement lindividu, mais demande tre analys dun triple point de vue articul : les pratiques des individus, lensemble des pratiques des individus, et des lments ordonns qui dpassent lindividu mais qui font partie de son habiter. Do lexploration de trois notions interdpendantes : pratiques des lieux, modes/style dhabiter et rgime dhabiter qui correspondent trois niveaux danalyse de lhabiter.

    besoins lmentaires dfinies une fois pour toutes ; 3) commodits superflues qui ne sont justement superflues que dans une vision de survie physique alors mme quelles assurent le maintien de Soi et lacceptation dans un communaut ou un groupe. 3 Il y ajoute une troisime ide : cest cet habiter qui, travers le btir, mne la cration de lieu (Ort) et despace (Raum) sur une Terre pourvue demplacements (Stelle). Cest ce que Henri Lefebvre prolonge : Lhabiter sexprime objectivement dans un ensemble duvres, de produits, de choses qui constituent un systme partiel : la maison, la ville ou lagglomration (Lefebvre, 1999, p. 166). Ainsi se trouve exprime la distinction que font Lvy & Lussault (2003) de lhabitat comme organisation matrielle et de lhabiter comme spatialit de lacteur. 4 Il conviendrait de dvelopper ici une critique rigoureuse de la conception de lhabiter et de lespace de Heidegger, centre sur le proche comme assurant la scurit ontologique . Cf. Stock (2004) pour la justification dune autre perspective de lhabiter. 5 On peut faire remonter lattention aux acteurs en gographie aux annes 1980 (cf. Werlen, 1987), au Sujet aux annes 1970 (Relph, 1971 ; Tuan, 1971 ; Frmont, 1972). 6 Cela tant dit, il est ncessaire de travailler srieusement sur les articulations entre ces trois diffrents styles pistmologiques, den souligner les apports et les limites dun point de vue cognitif. Peut-on les articuler les uns aux autres ou bien forment-elles des points de vue incommensurables ? Ce sont ces questions quil convient de poser et auxquelles il sera ncessaire de rpondre. Dores et dj, on peut oser lhypothse que les procdures de types analyse spatiale arrivent une certaine mise en ordre descriptive et une qualification du monde des socits humaines, mais que lenchanement explicatif digne des standards scientifiques en vigueur dans les sciences humaines et sociales rsiste ces modles.

  • 2. Les pratiques des lieux font partie de lhabiter Apprhender lhabiter par les pratiques des individus ne va pas de soi, mais semble un parti pris indispensable pour connatre, avec plus de prcision que ne le font les modles classiques, les rapports de lespace. On peut noncer les arguments suivants pour ce choix :

    les lieux et lhabiter ne font sens quen situation, en acte (Lussault, 2000), dans des situations problmatiques (Foucault, 1984, Popper, 1998, Werlen, 1997) ; selon les situations, les sens assigns aux lieux gographiques varient (Stock, 2001). on observe une dissociation de plus en plus forte entre emplacement des pratiques humaines et lieu de rsidence, processus que la recherche en gographie a du mal saisir : lapproche par les pratiques conduit analyser plus finement les associations pratiques/lieux des individus. les reprsentations des lieux gographiques et de lagencement spatial stablissent en fonction des pratiques, en fonction dun projet de lindividu ; notamment, la mobilit gographique contribue former des comptences spatiales qui constituent limaginaire gographique. la pluralit des ressorts de laction (Lahire, 1998) font quil existe une variation intra-individuelle en fonction de diffrentes situations et non seulement une variation inter-socit ou inter-individuelle (Lahire, 2004) : il sagit donc dune prcision par rapport dautres approches. Le sens accord aux lieux gographiques varie notamment, pour un mme individu, selon le projet pratique travers lequel il est abord (Stock, 2001).

    Comment dfinir les pratiques des lieux ? Pour Lefebvre (1999), la pratique spatiale englobe production et reproduction, lieux spcifis et ensembles spatiaux propres chaque formation sociale, qui assure la continuit dans une certaine cohsion. Cette cohsion implique pour ce qui concerne lespace social et le rapport son espace de chaque membre de telle socit, la fois une comptence certaine et une performance (p. 42, soulign dans loriginal). Lefebvre (1999 : 70) dfend la thse selon laquelle lespace est pos avant la venue de lacteur ; les pratiques seffectuent ainsi dans de lespace toujours-dj-l, ce qui est la fois vrai et pose en mme temps un problme. tant donn que lacteur contribue galement constituer de lespace, voire le crer, le faire advenir par exemple la venue des touristes pendant la saison transforme un lieu infrastructures touristiques en un vritable lieu touristique par la prsence des touristes , la formulation induit en erreur et interdit dapprhender les lieux et agencements comme tant de lespace habit. Pour effectuer ce tournant, on peut sappuyer sur les travaux de Michel de Certeau (1990) et dfinir les pratiques spatiales comme tant des manires de faire avec de lespace. Plus prcisment, Michel de Certeau (1990) nomme pratique du lieu le fait de dployer les pratiques pour que le lieu devienne espace :

    Est un lieu lordre (quel quil soit) selon lequel des lments sont distribus dans des rapports de coexistence. Sy trouve donc exclue la possibilit, pour deux choses, dtre la mme place. La loi du propre y rgne : les lments considrs sont les uns ct des autres, chacun situ en un endroit propre et distinct quil dfinit. Un lieu est donc une configuration instantane de positions. Il implique une indication de stabilit. Il y a espace ds quon prend en considration des vecteurs de direction, des quantits de vitesse et la variable du temps. Lespace est un croisement de mobiles. Il est en quelque sorte anim par lensemble des mouvements qui sy dploient. Est espace leffet produit par les oprations qui lorientent, le circonstancient, le temporalisent et lamnent fonctionner en unit polyvalente de programmes conflictuels ou de proximits contractuelles. Lespace serait au lieu ce que devient le mot quand il est parl, cest--dire quand il est saisi dans lambigut dune effectuation, mu en un terme relevant de multiples conventions, pos comme lacte dun prsent (ou dun temps), et modifi par les transformations dues des voisinages successifs. la diffrence du lieu, il na donc ni lunivocit ni la stabilit dun propre. En somme lespace est un lieu pratiqu (p.173, soulign dans loriginal).

    Issue de cette rflexion, la notion pratiques des lieux sert exprimer que ce nest pas une pratique qui soppose lespace mais qui fait avec de lespace. En fait, elle fait plus avec les lieux, car, comme le dit Michel de Certeau, cest travers la pratique que le lieu est transform en espace. Lespace ne prexiste donc pas la pratique, mais nmerge qu la faveur des pratiques. Lide est que chaque pratique exprime un certain habiter lchelle de lindividu, un certain rapport lici et lailleurs, au quotidien et au hors-quotidien, aux lieux

  • familiers, associe un dplacement ou non, la qualit du lieu et aux accessibilits, la mobilit et aux mtriques. Cest cette ide qui sous-tend, par exemple, lanalyse des pratiques touristiques comme une manire dhabiter les lieux touristiques par les touristes : par un dplacement pour une pratique de recration temporaire in situ, de faon distancie, ce qui implique une certaine altrit grer7. Dans les socits individus mobiles, les associations pratiques/lieux gographiques se posent avec de plus en plus dacuit deviennent problmatiques au sens de Foucault (1984) : il faut dcider de rgles nonciatives , dans le sens o les individus doivent faire avec des lieux de plus en plus nombreux. Ceci est d la mobilit gographique accrue qui exprime le fait que les lieux gographiques associs aux pratiques sont de plus en plus nombreux et de plus en plus loigns les uns par rapport aux autres, relativement dautres rgimes dhabiter . Tentons de lister quelques pratiques qui aujourdhui sont associes des lieux plus ou moins loigns du ou des lieux de domicile, et ce sans souci dexhaustivit8 : mouvements pendulaires , voyages daffaires, sminaire dintgration, incentive, travailler comme VRP, aller un congrs9 ; aller au cinma, partir en vacances, visiter une ville, se rendre dans une base rgionale de loisir , aller dans sa maison de campagne ou celle damis, faire un spring break en tant qutudiant tats-unien ou canadien ou prendre le Loveboat pour les tudiants finlandais entre Turku et Stockholm ; apprendre langlais Malte ou Brighton, apprendre le franais Paris, en fait des pratiques qui associent un lieu autre une pratique relativement plus contraignante que les loisirs ; faire le plein dessence en Autriche ou au Luxembourg pour les Allemands, acheter des cigarettes au Luxembourg pour les Lorrains, exploitant ainsi un diffrentiel de prix ; faire des achats pendant son voyage de vacances ; se faire soigner dans un hpital franais ou espagnol pour les Anglais, se faire avorter en Belgique ou en Espagne ; faire du shopping les soldes de Londres pour les Europens et Israliens , faire les courses dans les usines center, dans un centre commercial, en centre-ville, mais aussi, pour les frontaliers, dans un autre pays : les Anglais dans le Nord-Pas-de-Calais, les Suisses dans le Jura et en Savoie, les Allemands Strasbourg, les Strasbourgeois Kehl, etc ; aller voir ses amis et sa famille afin de garder un lien damiti etc.10. Il sagit l de pratiques des lieux in situ, avec un dplacement la cl, plus prcisment une circulation (cf. Stock & Duhamel, 2005)11. Toutefois, toutes les pratiques se ne valent pas, mais se diffrencient notamment en fonction de laccessibilit et du sens, de lintentionnalit de la pratique : certaines se droulent dans le quotidien, dautres dans le hors-quotidien12. Ainsi, chaque pratique exprime lhabiter par un certain rapport de lespace : qualits des lieux associes la pratique, sens accords aux lieux, propre chaque pratique. Par exemple, les pratiques touristiques se caractrisent par un habiter temporaire o les pratiques de recration, cest--dire le relchement de lauto-contention par rapport au quotidien par les trois modalits dcouvrir, jouer, se reposer, sont associes un lieu autre, investi par lindividu comme tant relativement plus distanci que le lieu du quotidien (Knafou et al., 1997 ; Stock, 2001, Sacareau & Stock, 2003 ; Stock, 2005). Fondamentalement, nous faisons lhypothse que les pratiques intgrent chacune une certaine qualit intrinsque, avec une autonomie et des degrs de libert plus ou moins grands quant au problme despace. Ainsi, les dimensions spatiales de lindividu ont radicalement chang. Il sagit dindividus dont les rfrents gographiques de lidentit, des valeurs, des pratiques sont relativement plus autonomes, avec davantage de choix, de ce quils taient dans une socit industrielle .

    7 Cf. Urry (1990), Rmy (1996), Hennig (1997), Knafou et al. (1997), Stock (2001 ; 2005), quipe MIT (2002), Ceriani et al. (2004 ; 2005) pour la mise en place de cette ide. 8 Il sagit de pratiques collectes non pas travers une enqute scientifique, mais travers de lectures de diffrents mdias, surtout des journaux. 9 Il sagit de pratiques qui seffectuent dans la sphre du travail o un quart des dplacements se passe en dehors du lieu de travail habituel (Crague, 2003). Par ailleurs, lenqute Transports de lINSEE connat les motifs de dplacements suivants : motif lieu de travail fixe et habituel , motif lieu de travail non fixe : chantier, contacts ou runions, visites des clients, fournisseurs, sous-traitants, tourne professionnelle, VRP, repas d'affaires ; motif stage, confrence, congrs, formations, exposition professionnelle (dans un lieu diffrent du lieu de travail habituel) ; autres motifs professionnels non dsigns par ailleurs (Crague, 2003, p. 195). 10 Toutes ces pratiques ncessiteraient une analyse scientifique approfondie quant la valeur assigne aux lieux par les individus, les manires de les pratiquer ainsi que les comptences spatiales mobilises pour les effectuer. Ce programme ne pourra tre ralis ici. 11 Dans le mme temps, les circulations sont lies aux tl-communications : tlphone, courrier lectronique ou lettre nous dispense certes dune rencontre face--face, mais prpare souvent une circulation. Des exemples abondent : se faire livrer une pizza, prparer un voyage ou un rendez-vous professionnel etc. 12 Cf. Knafou et al. (1997), Stock (2001), Sacareau & Stock (2003), Stock & Duhamel (2005), Stock (2005) pour la distinction quotidien/hors-quotidien qui se fonde prcisment sur des critres gographiques daccessibilit et daltrit/tranget des lieux. Une difficult rside toutefois dans le fait que tantt on dcrit une pratique, tantt la manire dont on se dplace. La notion pratique des lieux tente denglober les deux aspects.

  • 3. Modes dhabiter, styles dhabiter Lanalyse des pratiques des lieux ne peut tre conduite de faon isole, elle doit prendre en compte virtuellement toutes les pratiques des individus. L rside, intrinsquement, la faiblesse des tudes sur les pratiques urbaines et les choix rsidentiels, dont la focalisation sur une seule pratique fait perdre de vue les liens avec dautres pratiques13. Il convient donc de commencer les articuler les unes aux autres. La notion de systme de mobilit (Bassand et al., 1985 ; Kaufmann et al., 1997 ; Knafou, 1998) peut tre utilise afin dy parvenir, en la transposant du niveau socital au niveau individuel par la conception de systmes individuels de mobilit (Stock, 2001) dans lesquels sont agences, au cours du temps, circulations et migrations. Ainsi, ce sont les manires spcifiques des individus darticuler les pratiques des lieux qui dfinissent les modes dhabiter . Par hypothse, ces modes dhabiter existent dans un continuum entre mono-topique et poly-topique (cf. fig. 1). La notion de mode dhabiter est classiquement utilise afin de mettre en avant la manire dont les individus rsident et le rapport lespace que ce mode rsidentiel (HLM, pavillon, appartement bourgeois, pri-urbain etc.) exprime. Cette optique rsidentielle a conduit des tudes approfondies sur le pavillonnaire ou les grands ensembles (cf. Haumont et al., 1999). La question de lhabiter a galement incit Mayol (1990) proposer une tude sur la vie des individus dans le quartier lyonnais de la Croix-Rousse. Toutefois, restreindre lhabiter la seule sphre rsidentielle conduit sous-estimer les autres lieux pratiqus. Comme lavait dj soulign Piolle (1990 ; 1991), on assiste une territorialisation multiple des individus, ce que la notion socit darchipels de Viard (1994) rend moins adquatement, car il dsigne les lieux, mais non les liens entre les lieux. Ceci permet denvisager une extension de ce quon appelle lespace de vie , cest--dire lensemble des lieux pratiqus, non seulement ceux du quotidien14. Les modes dhabiter peuvent donc tre dfinis comme tant lensemble des pratiques des lieux des individus. Cest dailleurs de cette faon que lon peut articuler la dimension spatiale et la dimension sociale : les modes dhabiter, par hypothse, expriment des styles de vie15. On dispose de deux contributions cette problmatique : celle de lErlebnisgesellschaft (Schulze, 1997) qui produit des styles de vie fonds sur le ludique, lexpressif et lesthtique, incluant ce qui permet de faire lexprience de sensations fortes16 ; celle dancrages des niveaux dchelle diffrents selon une matrise diffrentielle des mtriques (Lvy & Haegel, 1997). Afin de comprendre le changement des modes dhabiter, on peut tenter une modlisation de lensemble des pratiques des lieux, en distinguant deux modes dhabiter laide de lieux plus ou moins familiers pour les individus (cf. figure 1). Les points foncs indiquent les lieux familiers, les points en clair les lieux non familiers : ce modle graphique signifie que, contrairement ce qui se passe pour dautres socits ou dautres poques, les lieux proches ne sont plus ncessairement ceux qui sont les mieux connus et les plus familiers. On voit notamment dans ce modle que les lieux familiers peuvent tre situs des distances plus grandes que le rayon marquant la limite de lespace de proximit. La variable discriminante pour dterminer la familiarit davec les lieux nest plus la distance, mais la frquence de la pratique. Le second cercle symbolise laccroissement de laccessibilit partir dun lieu suppos en forme de cercles concentriques conformment aux modles spatiaux prsupposant lisotropie mais dont la conceptualisation ne rend pas compte des accessibilits

    13 Traditionnellement, les choix rsidentiels sont analyss en fonction du lieu de travail bien que Lefebvre (1999) entrevoit aussi la dtermination du lieu de rsidence par les lieux de loisir. 14 Cette notion, dfinie comme tant lespace habituellement pratiqu (cf. Frmont et al., 1984), est appele tre dpasse ou amende : en effet, on lude les lieux pratiqus en dehors des habitudes, mais pour quelle raison ? Les pratiques touristiques constituent un exemple frappant : elles sont entres dans les murs, mais ne seffectuent pas (toujours) dans les mmes lieux bien quil y ait des pratiques de recration dont la rcurrence du choix des lieux soit constitutive de leur spcificit. Cet exemple sert montrer les limites de la notion et une possibilit daller au-del : il suffit de dfinir comme espace de vie, lensemble des lieux pratiqus au quotidien et dans le hors-quotidien, peu importe la dure ou la rcursivit des pratiques des lieux. Cf. Stock (2001) pour une analyse dtaille de la notion espace de vie . 15 Do la possibilit, peut-tre, de les nommer styles dhabiter . 16 Le terme allemand erleben est difficile traduire en franais, car il comporte dautres connotations que vivre , notamment faire lpreuve , faire lexprience (Cassin, 2004). En phnomnologie, on fait la distinction entre erleben et gestalten , entre vivre et concevoir , sans doute exploit par Lefebvre (1974) pour la distinction entre espace vcu et espace conu . Dans le cas de Schulze (1997), cela signifie plutt une manire particulire dapprhender le vcu, cest--dire par lattention donne lexpressivit des pratiques. Plus prcisment, une attention plus grande la composante du plaisir, de lesthtique et du ludique dans les pratiques et la production des biens de consommation et des services.

  • diffrentielles ; il pourrait donc tre labor avec plus de prcision par un modle centr sur les accessibilits localement meilleures.

    Figure 1 : Les modles du style dhabiter mono-topique et du style dhabiter poly-topique

    Source : Stock (2001)

    Il sagit l dun modle grossier qui est invalid par les pratiques de double rsidence car il fait comme sil ny avait quun seul lieu de rsidence. Il pose galement problme parce que la conception despace isotrope distances gales dans toutes les directions nest pas la meilleure approximation la ralit. Enfin, des modles plus prcis existent, allouant un certain budget de temps chacun des lieux pratiqus (cf. Lvy, 2004). Lunique objectif de ce modle rside dans la contribution la rsolution dun problme : faire comprendre que ce ne sont pas les distances en cercles concentriques qui rgissent lespace de vie et la familiarit des lieux comme cela est stipul par le modle des coquilles du moi de Moles (1995) , mais la mobilit gographique17. On aboutit ainsi, en travaillant empiriquement, au classement de lieux plus ou moins familiers qui permettent de distinguer diffrents modes ou styles dhabiter.

    4. Rgimes dhabiter Pratiques des lieux et mode dhabiter comme manires individuelles dhabiter le Monde constituent un regard / "thorie" - theoreia signifie contemplation - qui laisse de ct le jeu des institutions, normes, infrastructures, valeurs sociales etc. dans lequel les premiers sinsrent. La notion de rgime dhabiter tente de les y intgrer, en utilisant lide dassemblage ordonn et ordonnant de plusieurs lments en interaction que rend galement de terme de systme : on pourrait aussi parler de systmes dhabiter. On peut retracer, entre autres, les utilisations suivantes du terme rgime . Il est utilis par le courant conomique de lcole de la rgulation afin de dcrire et expliquer les changements du capitalisme. Ils dfinissent comme rgime daccumulation un ensemble de pratiques et de normes de production et de consommation. Puis, la notion d urban regime de la thorie urbaine nord-amricaine tente, dans une perspective institutionnelle, de rendre compte du dveloppement urbain depuis 1970 (Soja, 2001). Un rgime urbain est dfini comme un agencement de personnes de pouvoir en un groupe qui vise grer lespace urbain (Soja, 2001). Enfin, Franois Hartog (2003) dfinit des rgimes dhistoricit comme une mise en ordre du temps ou, mieux, des temporalits18. Cette notion est destine dcrire et expliquer les rapports diffrents que les hommes construisent avec trois moments de lexistence : le pass, le prsent et le futur. Plus prcisment, Hartog dfinit le concept de rgime dhistoricit de la manire suivante : dune part comme manire dont une socit traite son pass et en traite ; dautre part comme modalit de conscience de soi dune communaut

    17 Il conviendrait ici de dvelopper une critique serre de ce quon pourrait appeler le modle Heidegger-Moles de lespace o la prvalence est donne au proche et lici, o le lointain et lailleurs ont une valeur ngative dinscurit et o lhomme est vu comme tant isol et nu. Cela irait trop loin ici et sera entrepris ultrieurement. 18 Les ordres du temps (Pomian), les Zeitschichten (Koselleck, 2000) et les degrs dhistoricit (Lvi-Strauss) sont ses sources dinspiration.

  • humaine. Il sert comparer des types diffrents dcriture de lhistoire et de mode de rapports au temps, que Hartog appelle des manires dtre au temps (p. 30), des faons darticuler pass, prsent, futur (p. 35)19. Ici, la notion de rgime dhabiter vise dfinir les rapports dominants, dune civilisation dune unit de survie comme Elias (1970) appelle la socit de rfrence , aux lieux gographiques et de lespace dans leurs multiples dimensions : I. Les spatialits, dfinies comme tant des manires de faire avec les agencements spatiaux et les lieux gographiques, sont devenues plus diffrencies et multiples. Elles incluent les valeurs des lieux (esthtique, patrimonial, conomique, rsidentiel etc.) et sincarnent dans les reprsentations, conceptions, images, discours despace (urbanisme, architecture, utopies. mdias), se dfinissent comme tant limagination laide de symboles de ralits qui recherchent soit la plus grande adquation possible, soit la plus grande libert possible avec la ralit despace. Elles dfinissent aussi, un niveau individuel et collectif, la familiarit/tranget des lieux, les rfrents gographiques de lidentit. Les disciplines despace (Foucault, 1984 ; Harley, 1995) concernent plus particulirement les manires dont on peut contrler de lespace ; les normes entendues la fois comme tant les rgles juridiques et sociales contribuent galement dfinir le rgime dhabiter contemporain du point de vue de la spatialit. II. Les pratiques des lieux et modes dhabiter comme exposs ci-dessus font partie du rgime dhabiter. La diffrenciation des modes dhabiter sentend comme tant une cration de diffrences et de distinctions opres par des groupes dindividus par rapport dautres, et ce par les systmes cohrents de mobilit et de rsidence. Lindividu, cest--dire le processus de dveloppement dun Je (Elias, 1970)20, insr dans une figuration ou une configuration socitale y acquiert des qualits spcifiques selon le rgime dhabiter et les pratiques et modes dhabiter. Ses dimensions spatiales sexpriment sous formes de comptences et les rfrents gographiques de lidentit, souvent multiples, en font un individu gographiquement pluriel ou bien un habitant gographiquement pluriel et temporaire des lieux gographiques. III. Les agencements spatiaux - dfinis comme tant les manires dont les lieux gographiques sont en interdpendance et se diffrencient les uns des autres ainsi que la diffrenciation spatiale des multiples phnomnes soci(t)aux21 -, les accessibilits et les qualits des lieux gographiques. La qualit des lieux se dfinit ici comme tant les lments prsents en un lieu en vue dun certain usage (Brunet, 1993). Les agencements, crs dans laction, peuvent tre apprhends dans leur organisation spatiale. Il sagit despace habit en ce sens que les pratiques co-constituent les lieux gographiques et conduit lhypothse de la diffrenciation accrue de lespace urbain (centre-ville, mgalopole, station touristique, pri-urbain, banlieue, ville moyenne, campagne, gated community, global city pour nen mentionner que quelques uns). IV. Les technologies spatiales, cest--dire un ensemble de machines et dquipements sous-tendus par un discours problmatisant22 constituent ainsi un machinic complex : developing bundle of institutions and

    19 Hartog dcrit trois rgimes dhistoricit : le pass clairant le prsent, exemplifi par lhistoria magistra ; le futur clairant le pass avec Chateaubriand et o la notion de progrs est centrale ; enfin, la priode contemporaine, depuis les annes 1970, marque par le prsentisme , cest--dire par le fait de considrer le pass en ayant en vue le prsent. A sa suite, Christian Grataloup (2003) dfinit le rgime de gographicit comme tant le rapport entre lici et lailleurs. Initialement, Christian Grataloup a prsent cette notion un sminaire de lquipe MIT portant sur la notion de moment de lieu (cf. Equipe MIT, 2005). Graldine Djament (2004) rend compte dun autre sminaire o Patrick Garcia intervenait sur lanalyse historique de lespace. 20 Obgleich es zunchst den herkmmlichen Sprach- und Denkgewohnheiten zuwiderluft, ist es viel sachgerechter, wenn man sagt, der Mensch ist stndig in Bewegung ; er durchluft nicht nur einen Proze, er ist ein Proze. Er entwickelt sich. Und wenn wir von einer Entwicklung sprechen, dann meinen wir die immanente Ordnung der kontinuierlichen Abfolge, in der jeweils eine sptere Gestalt aus frheren, in der etwa Jugend aus der Kindheit, Erwachsensein aus der Jugend ohne Unterbrechung hervorgeht. Der Mensch ist ein Proze (Elias, 1970, 127). Cest traduit en franais de faon suivante : Bien que ceci heurte les habitudes linguistiques et mentales, il est pertinent de dire que lhomme est constamment en mutation. Il nest pas soumis un processus : il est un processus, car il se dveloppe continment . Et lorsque nous parlons dvolution, nous voulons signifier lordre immanent lenchanement continu qui fait natre une forme de celle qui la prcde, comme la jeunesse nat de lenfance et lge adulte de la jeunesse, et cela interruption. Lhomme est un processus. (Elias, 1991, 141). Sans pouvoir en traiter en dtail, la traduction de Bewegung par mutation et non par mouvement , et celle de Entwicklung par volution , non par dveloppement pose problme en ce quelles sont proches du vocabulaire des sciences bio-physiques, ce qui est rejet par Elias dans ses textes. 21 Cf. la dfinition de Lussault (2003b) : Assemblage spatial de ralits socitales qui exprime laction dun acteur (p. 45). 22 Problmatisation ne veut pas dire reprsentation dun objet prexistant, ni non plus cration par le discours dun objet qui nexiste pas. Cest lensemble des pratiques discursives ou non discursives qui fait entrer quelque chose dans le jeu du vrai et du faux et le constitue comme objet pour la pense (que ce soit sous la forme de la rflexion morale, de la connaissance scientifique,

  • technologies, understood as non-exclusive and diverse organisations of knowledge-discipline-perception circulating in a constantly shifting parliament of things (Haraway, 1992b) : embodied subjects, machines, texts and metaphors (Thrift, 1996 : 263)23. Parmi ceux-ci, les modes de communication, technologies du dplacement, les technologies de rsidence les moyens et discours attachs la pratique de labriter , ainsi que les technologies de logistique, cest--dire de la coordination spatio-temporelle des flux de biens et dinformations sont au cur du fonctionnement mobilitaire du rgime dhabiter. V. Les situations se dfinissent dans/avec/par quoi les pratiques ont lieu, la fois un moment et un site, dans leur immdiatet spatiale et temporelle (Schtz, 1932). Elles apprhendent un ensemble dlments permettant de situer les pratiques en question en un contexte (Fornel & Qur, 1999). Elles se composent de la qualit despace, des rgles et normes sociales et des acteurs en prsence. Dans le rgime dhabiter actuel, elles se diffrencient de plus en plus, modulant le sens que les individus assignent aux lieux gographiques et obligeant une capacit de gestion plus fine despace et des interactions sociales. Lun des lments de variation des situations est constitu par les changements de lieux : passer ses vacances dans son lieu de rsidence ou dans un lieu autre constitue une diffrence fondamentale. Un autre est la variation de lintentionnalit : pratiquer Brighton & Hove en tant que rsident, touriste, retrait, lors dun colloque etc. crent des situations diffrentes et fait varier le rapport au lieu24. Fondamentalement, les rgimes expriment un certain ordre dans lequel sinsrent les pratiques des lieux et les individus. Rgime dhabiter est ainsi dfini comme tant le modle dominant des manires dtre et des manires de faire avec de lespace dune unit de survie , unit de rfrence socitale. Lun des aspects essentiels, - il sagit dune hypothse -, est que le rgime dhabiter contemporain est inform par la mobilit gographique. Cest ainsi que la notion de rgime dhabiter peut tre rapproche de lide de Thrift (1996) dune structure of feeling called mobility des socits contemporaines25. Pour Thrift, le rgime actuel est inform par la mobilit, car il articule trois machinic complexes - lectricit, lumire, vitesse - dune faon nouvelle depuis les annes 1960, oriente vers la mobilit gographique. Conclusion Ce texte a ouvert des questionnements dans plusieurs directions : dabord, la question de lhabiter qui nest plus conceptualis comme rapport la nature ou la Terre, mais qui devient un concept permettant de saisir thoriquement le rapport de lespace tel quil sexprime travers les pratiques des individus. Ensuite, que lindividu soit au centre ne signifie pas pour autant de ngliger des lments qui dpassent lindividu. Ainsi, des modles de styles dhabiter permettent de comparer diffrentes manires de faire avec de lespace et ouvrent sur la question de ltre-ensemble et la socialisation. La notion de rgime dhabiter permet enfin de placer les pratiques dans un ensemble ordonnant, en leur confrant une spcificit historique. Le fil conducteur pour toutes ces analyses tait la mobilit gographique : cest travers ce prisme que les manires de faire contemporaines avec de lespace ont t conues. En arrire-plan de toutes ces analyses se posait la question de la conceptualisation de lespace : loin dtre men son terme, on peut retenir deux aspects. Primo, espace est un concept de haut niveau de synthse qui englobe plusieurs problmes, dont la distance, la qualit des lieux, le paysage, la localisation, lagencement, lorientation, laccessibilit etc. Secundo, il sagit toujours de lespace habit, cest--dire co-constitu par les pratiques et remplace ainsi lide dun espace prexistant aux pratiques. Le cadre thorique ainsi esquiss permet non seulement dinsrer les faits contemporains dans un systme de classement, mais aussi de comprendre quil existe diffrents niveaux dans lapproche de lhabiter, et notamment dans les pratiques de mobilit : un niveau individuel et un niveau socital qui se soutiennent mutuellement, dialogiquement, voire trialogiquement , car il y a trois lments (pratique des lieux, modes dhabiter, rgime

    de lanalyse politique etc.) (Foucault, 1984, p. 670) ou encore un effort pour rendre problmatiques et douteuses des vidences, des pratiques, des rgles, des institutions et des habitudes qui staient sdimentes depuis des dcennies et des dcennies (ibid., p. 688). 23 On note laccent latourien de la thorie de lacteur-rseau avec des circulations de sens et la discursivit dans un parlement des choses (cf. Latour, 1991 ; 1993). 24 Cf. Stock (2001) pour un traitement approfondi de cette question. 25 Thrift prend la notion de structure of feeling Raymond Williams (1954) qui la dfinit comme tant une culture of a period ou the living result of all the elements in the general organisation (1979), cit daprs Thrift (1996 : 258). Ceci est galement proche de la notion dpistm de Michel Foucault (1966) qui dfinit un mme paradigme, un modle dominant de poser des questions une poque donne, ce que lon pourrait appeler un rgime paradigmatique.

  • dhabiter)26. Les pratiques des lieux et les modes dhabiter sinsrent obligatoirement dans un certain rgime dhabiter et ce dernier est, entre autres, produit par les premiers. Toutefois, les pratiques des lieux insres dans un rgime dhabiter sont plus ou moins conformes par rapport au modle dominant. Dans un rgime dhabiter fond sur la mobilit, tous les individus ne dveloppent pas un mode dhabiter fond sur la mobilit et des associations pratiques/lieux complexes. Limmobilit na pas perdu toute valeur : elle peut tre institue en ressource localement, mais restreint laccs dautres lieux gographiques du Monde. Habiter temporairement les lieux gographiques semble en faire de ces derniers de plus en plus des lieux de projet pour lesquels lancrage et lappropriation symbolique de la part des individus sont temporaires, toujours sujets ngociation en fonction des situations et du moment dans la vie des individus. Cette perspective des rgimes dhabiter ouvre des pistes pour des tudes empiriques dans diffrentes directions : ltude de la constitution despace dans diffrentes situations, des faons dont la coordination spatio-temporelle seffectue entre individus, de la composante spatiale des diffrentes pratiques (sous lhypothse de ladquation de plus en plus recherche dans lassociation pratiques/lieu), des styles dhabiter (plus ou moins informs par la mobilit), de la diffrenciation accrue de lurbain comme espace habit (centre-ville, station touristique, mgalopole, pri-urbain, campagne etc.), les rfrents gographiques de lidentit, etc. De surcrot, dans une perspective processuelle dun dveloppement des socits vision promue par Norbert Elias (1970 ; 1994) o le pass nest pas simplement le pass du prsent, mais une tape vers un prsent et un futur il est possible dobserver diffrents rgimes dhabiter, ayant chacun sa spcificit. Ce projet rejoint ainsi, en le complexifiant, celui dHenri Lefebvre (1974) pour qui diffrentes socits produisaient de lespace avec des caractristiques spcifiques et typiques, distinguant diffrentes civilisations par de lespace. Ici, ce nest pas la production despace qui est au centre, mais des rgimes dhabiter, centrs autour des diffrentes manires dhabiter des individus. Ainsi, lEurope au Moyen-ge, la Rome antique, Venise au 17me sicle, lEurope au 19me sicle etc. peuvent tre analyss comme tant diffrents rgimes dhabiter dans lesquels les pratiques de mobilits ne sont pas absentes o mais la valeur sociale de la mobilit, les technologies et la qualit et lagencement des lieux gographiques ainsi que les situations taient autres. Au-del de ces tudes empiriques possibles, le dbat sur les concepts et thories afin de contrler, rfuter, damender peut tre engag. Rfrences : AGLIETTA M., 1976, Rgulation et crises du capitalisme, Paris, Odile Jacob (3me d. 1997) BASSAND M., BRULHARDT M-C., HAINARD F. & SCHULER M., 1985, Les Suisses entre la mobilit et la sdentarit. Lausanne : Presses Polytechniques Romandes BERQUE A., 2005, Lieux substantiels, milieu existentiel : lespace coumnal, in Berthoz A. & Recht R. (dir.), Les espaces de lhomme, Paris, Odile Jacob, pp. 49-65 BERQUE A., 2002, Habitat insoutenable. Recherche sur une histoire de la dsurbanit , LEspace gographique, vol. 31, n 3, pp. 241-251 BERQUE A., 2000, coumne. Introduction ltude des milieux humains. Paris : Belin (coll. Mappemonde), 271p. BRUNET R., 1993, Article Qualit . In : BRUNET R., FERRAS R., THRY H., Les mots de la gographie. Dictionnaire critique. Paris/Montpellier : La documentation franais/RECLUS, p. 409-410 (3me d.) Bollnow O., 1999, Mensch und Raum, Stuttgart, Kohlhammer (1re d. 1963) Cassin B. (dir.), 2004, Vocabulaire europen des philosophies, Paris, Le Seuil/Le Robert,1531p. CERTEAU M. DE, 1990, Linvention du quotidien. 1. Arts de faire. Paris : Gallimard (1re d. 1980) CHALAS Y., 2000, La ville mergente, Paris, Anthropos, 199 p. CERIANI G., KNAFOU R. & STOCK M., 2004, Les comptences caches du touriste , Sciences Humaines, vol. 145, pp. 28-31 DERRIDA J., 1993, Khra, Paris, Galile, 103 p DJAMENT G., 2004, Rgimes dhistoricit et rgimes de gographicit , Espacestemps.net (http://www.espacestemps.net/document739.html) ELIAS N., 1997, ber die Zeit. Arbeiten zur Wissenssoziologie II. Francfort : Suhrkamp (1re d. 1984) ELIAS N., 1994, Die Gesellschaft der Individuen. Francfort : Suhrkamp (1re d. 1987) ELIAS N., 1991, Quest-ce que la sociologie ?, Tour dAigues, Edition de lAube ELIAS N., 1970, Was ist Soziologie ?, Munich, Juventus quipe MIT, 2005, Tourismes 2. Moments de lieux, Paris, Belin

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