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- I -
T H E S E
Pour l'obtention du Grade de
Docteur de l'Université de POITIERS
(Faculté des Sciences Fondamentales et Appliquées) (Diplôme National - Arrêté du 30 Mars 1992)
ECOLE DOCTORALE DES SCIENCES POUR L'INGENIEUR
Secteur de Recherche : GENIE MECANIQUE, PRODUCTIQUE, TRANSPORT
Présentée par :
Laurent HUMBERT
~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~
Formulation des effets tridimensionnels dans les plaques élastiques fissurées en mode I à partir de la
méthode d'éléments finis et de l'interférométrie. Application à l'exploitation de la méthode des caustiques
~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~
Directeur de thèse : Mario COTTRON Codirecteur : Valéry VALLE
~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~ Soutenue le 28 janvier 2000
devant la Commission d'Examen
JURY M. J.L. LATAILLADE Professeur, LAMEFIP, ENSAM Talence Président MM. T. DESOYER Professeur, LMA, ESM Marseille Rapporteur
F. HILD Chargé de Recherche habilité, LMT Cachan Rapporteur
MM. M. COTTRON Professeur, LMS Poitiers Examinateur J.C. DUPRE Chargé de Recherche, LMS Poitiers Examinateur
D. GAMBY Professeur, LMPM, ENSMA Poitiers Examinateur V. VALLE Maître de Conférences, LMS Poitiers Examinateur
- II -
- III -
A la mémoire de mon père,
A ma mère, à mon oncle Roland,
A ma famille,
A Valérie, à tous mes amis.
- IV -
- V -
AAvvaanntt –– pprrooppooss
Ce travail a été réalisé au Laboratoire de Mécanique des Solides de l'Université de
Poitiers (U.M.R. 6610) dirigé par Monsieur le Professeur J.P. LALLEMAND.
Je tiens à exprimer en premier lieu toute ma reconnaissance à Monsieur le Professeur
M. COTTRON pour m'avoir permis d'entreprendre et mener à bien cette étude. J'ai été
particulièrement sensible à ses conseils donnés avec clairvoyance, sa disponibilité et bonne
humeur, son soutien moral en toute circonstance. Je lui adresse ici l'expression de ma
profonde gratitude.
Mes remerciements iront ensuite à Monsieur le Professeur A. LAGARDE qui m'a
accueilli dans l'équipe de recherche et dont j'ai pu apprécier l'enthousiasme et le dynamisme
lorsqu'il exerçait ses fonctions de directeur d'équipe.
Je suis très honoré par la présence dans le jury de Monsieur le Professeur
T. DESOYER et Monsieur F. HILD qui ont bien voulu être juges de ce mémoire. Je leur
adresse toute ma reconnaissance.
Je remercie vivement les Professeurs D. GAMBY et J.L. LATAILLADE pour l'intérêt
qu'ils ont porté à mon travail en acceptant de participer au jury.
Je tiens à témoigner ma profonde gratitude et ma sympathie à Monsieur V. VALLE qui
m'a fait bénéficier de son savoir faire expérimental en optique, de ses compétences en
informatique et d'une aide toujours efficace. La présente étude lui doit évidemment beaucoup.
Monsieur le Professeur F. BREMAND et Monsieur J.C. DUPRE n'ont pas compté non
plus leurs heures pour me permettre de profiter de leur culture de mécaniciens. Je remercie le
Professeur F. BREMAND pour ses encouragements, ses qualités humaines et ses nombreuses
suggestions scientifiques. Je soulignerai tout particulièrement la disponibilité constante de
Monsieur J.C. DUPRE (qui déborde largement du cadre de la mécanique) et sa passion
musicale partagée qui m'ont été d'un grand réconfort, notamment lors des moments difficiles.
Il trouvera ici mes remerciements les plus profonds.
- VI -
J'ai beaucoup apprécié l'aide et les conseils techniques apportés par Monsieur
F. HESSER tout au long des ces travaux de recherche. Je le remercie très sincèrement.
Je ne saurais oublier les techniciens, en particulier Monsieur S. BROCHET, qui ont
réalisé les pièces mécaniques nécessaires au montage de cette étude. Je leur adresse à travers
ces quelques lignes toute ma reconnaissance amicale. Je remercie également le personnel
administratif ainsi que Monsieur J.J. BOUTET pour sa participation au tirage de ce mémoire.
Enfin que tous ceux qui n'ont pas été mentionnés et qui ont contribué à la réalisation
de ce travail reçoivent les remerciements qu'ils méritent.
- 1 -
IINNTTRROODDUUCCTTIIOONN
C’est un lieu commun de rappeler que plus un matériau contient de défauts , ou plus la
géométrie d’une pièce est tourmentée et plus le risque de rupture est élevé. En général toutes
les structures mécaniques sans exception contiennent des myriades de défauts issus de leur
réalisation ou tout simplement des matériaux constitutifs. Résultant en général de la
coalescence de défauts microscopiques, nul doute que les fissures sont les plus dangereuses à
cause des concentrations élevées de contraintes qui se produisent à leur voisinage. Cette
remarque est d’autant plus vraie lorsque une fissure s’est propagée et prend des proportions
considérables, non négligeables à l’échelle macroscopique. Les structures en service sont très
souvent constituées de plaques et l’apparition d’une telle fissure peut fragiliser l’ensemble.
Elle demandera donc une surveillance particulière, sans pour autant qu’il faille changer la
structure toute entière. On sait d’expérience en effet que dans certaines conditions (à définir
dans chaque cas) les solides supportent l’existence de fissures et qu’une destruction brutale
résulte de l’instabilité soudaine de ces dernières. Ainsi une carlingue d’avion contient un
nombre important de petites fissures détectables apparues au cours des vols. On conviendra
que le remplacement systématique de la carlingue après chaque sortie serait quelque peu
coûteux… Le risque de rupture est également lié étroitement à l’environnement dans lequel se
trouve la structure en question. On sait par ailleurs que la température extérieure conditionne
la nature de la cassure. C’est un fait d’expérience courante qu’un matériau devient cassant
lorsque la température s’abaisse. Il adopte alors un comportement de type fragile que l’on
peut modéliser avec la théorie de l’élasticité. Ce caractère fragile, qui existe chez tout solide,
apparaît à des températures qui dépendent typiquement du matériau considéré. On a observé
ainsi des ruptures brutales se produisaient surtout par temps froid, occasionnant des
destructions importantes sans grande déformation apparente des structures. Au contraire à
température élevée, la rupture s’accompagne d’une plus grande déformation plastique. On
parle alors de fissuration ductile. L’approche quantitative des problèmes de fissuration pour
des matériaux à comportement fragile relève de la mécanique de la rupture linéaire. Elle a
pour objet de prévoir le comportement des fissures macroscopiques présentes dans une
structure élastique soumise à un chargement donné afin de prévenir d’un risque de rupture. La
- 2 -
mécanique de la rupture linéaire caractérise alors le processus de fissuration macroscopique à
l’aide notamment des grandeurs mécaniques adaptées que sont les facteurs d’intensité de
contraintes.
L’étude proposée concerne les plaques élastiques contenant une fissure plane
préexistante qui traverse la plaque suivant son épaisseur. Ces plaques sont soumises à un
système simple d’efforts qui globalement ont tendance à écarter les lèvres de la fissure. On
parlera d’une sollicitation en mode I. On observe que le chargement imposé modifie
considérablement le relief en pointe de fissure (effet Poisson). D’un point de vue mécanique,
ce relief correspond au déplacement hors plan de la surface de la plaque. Notre mémoire
s’attache à décrire précisément cette grandeur mécanique en pointe de fissure pour une plaque
chargée en mode I.
Il est vrai que pour ce problème d’apparence simple, la mécanique de la rupture 2D
donne une solution analytique décrivant le déplacement hors plan. Néanmoins cette approche
simplifiée du problème ignore à la fois l’épaisseur de la plaque et toute évolution des
grandeurs mécaniques suivant cette épaisseur. Il en résulte une solution singulière pour le
déplacement inadaptée au voisinage immédiat de la pointe de fissure et qui peut engendrer, si
on n'y prend garde, des erreurs importantes dans certaines applications. Néanmoins pour les
plaques minces, il est vraisemblable qu’elle soit valable à partir d’une certaine distance qu’il
nous faudra assurément définir. A l’inverse le problème 3D général est trop complexe pour
être résolu analytiquement.
Une alternative est possible en utilisant les méthodes optiques susceptibles de fournir
des informations sur le déplacement hors plan. Parmi ces méthodes, l’interférométrie permet
d’appréhender les faibles variations de relief en pointe de fissure sous la forme de réseaux de
franges et apparaît de ce fait tout à fait adaptée pour notre étude. Le dépouillement des franges
s’effectue en s'appuyant sur les performances de la technique quasi hétérodyne. A partir de
trois images de franges déphasées, elle offre la possibilité d’accéder avec une précision
suffisante au relief en tout point de la zone de mesure. Son utilisation en mécanique de la
rupture nécessite un recalage des données, impossible à effectuer sans tenir compte de la
solution théorique 2D. Pour ce faire nous sommes amenés à définir quantitativement
l’étendue de la zone 2D, où la solution précédente est validée.
- 3 -
La résolution de ce problème entre autre nous a poussés à développer en parallèle une
modélisation numérique par éléments finis suffisamment précise afin de représenter la région
en pointe de fissure. On met alors clairement en évidence l’existence d’une zone 3D en pointe
de fissure dont la taille est inférieure à la demi épaisseur de la plaque. Dans cette zone
apparaissent des effets 3D non négligeables qui rendent toute analyse 2D erronée. Les
données issues de l’interférométrie nous ont conduit à rechercher une forme mathématique du
déplacement hors plan valable dans les zones 2D et 3D. Ce travail a été validé pour deux
matériaux fragiles différents, à savoir le PMMA et l'Araldite.
Par ailleurs l’application d’une méthode optique connue sous le nom de méthode des
caustiques aboutit aux mêmes conclusions. Cette technique, qui met à profit la présence d’un
gradient de contraintes, a été largement utilisée en mécanique de la rupture fragile dans le but
de mesurer le(s) facteur(s) d’intensité de contraintes. La mise en œuvre de la méthode
nécessite cependant la connaissance du relief en pointe de fissure. La solution analytique 2D
est de ce fait classiquement employée. Lorsque les informations recueillies sont issues de la
zone 3D, on obtient alors des résultats incohérents qui dépendent typiquement de l’endroit où
est réalisée la mesure. A l’extérieur de cette zone les données deviennent satisfaisantes.
Nous présentons maintenant les différents chapitres qui composent ce mémoire.
Le premier chapitre est consacré à la mécanique de la rupture 2D et aux concepts qui
en découlent. Le problème de rupture est abordé tout d'abord à partir de considérations
énergétiques. On définit ainsi le taux de restitution de l’énergie G, l’intégrale J. On expose
ensuite les principaux développements analytiques qui conduisent pour le mode I de
fissuration à l’expression des contraintes singulières et du déplacement hors plan associé,
pour une fissure de dimension finie traversant une plaque infinie. Le cas pratique de
l'éprouvette finie de type SEN est alors traité, nécessitant l'utilisation d’un code d’éléments
finis (i.e. Castem 2000).
Après avoir présenté quelques travaux concernant la fissuration 3D des plaques, le
deuxième chapitre se poursuit par une étude numérique en pointe de fissure pour les plaques
minces chargées en mode I. Nous proposons ainsi une modélisation précise du problème par
éléments finis, construisant un maillage qui prend en compte un front de fissure curviligne
symétrique par rapport au plan médian de la plaque. On met alors en évidence l'existence
- 4 -
d'une zone 3D au proche voisinage de la pointe de fissure dont la taille est approximativement
de l'ordre de la demi épaisseur de la plaque.
Le troisième chapitre expose les méthodes optiques utilisées par la suite dans ce
mémoire pour une approche expérimentale de la mécanique de la rupture. L'interférométrie et
la technique d'analyse par quasi hétérodynage y sont présentées. Cette dernière s'est
considérablement développée depuis l'apparition des systèmes informatisés de traitement
d'images et des capteurs CCD. Elle conduit, à un plan de référence près, à une estimation
rapide et suffisamment précise du relief en tout point de la zone de mesure. La seconde partie
de ce chapitre traite de la méthode des caustiques qui se distingue de la méthode précédente
dans le sens où elle n'exploite pas de réseau de franges d'interférence. Elle associe à la
singularité mécanique (i.e. la fissure), sur un plan image donné, une singularité optique (i.e. la
caustique) dont la forme et les dimensions dépendent expressément de l'expression singulière
du champ de contraintes en pointe de fissure, des propriétés mécaniques et/ou optiques du
matériau, des caractéristiques du montage expérimental. L'établissement de cette
correspondance et les relations géométriques qui en résultent permettent la mesure du facteur
d'intensité de contraintes. La méthode est détaillée pour un arrangement optique en réflexion.
La mise en œuvre expérimentale des méthodes optiques précédentes fait l'objet de la
première partie du quatrième chapitre. Trois exemples de plaques élastiques de type SEN sont
étudiées. On y propose alors une méthode expérimentale appropriée et suffisamment précise
pour mesurer le déplacement hors plan (de la surface libre de la plaque) en pointe de fissure.
Une formulation mathématique nouvelle du déplacement est finalement donnée pour le mode
I, formulation rendant compte de l'état mécanique tant dans la zone 3D en pointe de fissure
que dans le champ éloigné 2D. Elle est paramétrée en outre par six constantes qui dépendent
uniquement du matériau utilisé et dont on donnera une estimation numérique pour les trois
exemples présentés.
Le cinquième et dernier chapitre met à profit la connaissance d'une nouvelle
expression pour le déplacement hors plan, applicable à la méthode des caustiques. On
présente d'abord une simulation numérique des caustiques obtenues avec l'expression 3D
établie pour le déplacement hors plan, pour un plan image donné. On propose alors une loi qui
doit permettre de déterminer correctement le facteur d'intensité de contraintes, quelle que soit
la distance du plan image au modèle fissuré.
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CCHHAAPPIITTRREE 11
QUELQUES ASPECTS DE MECANIQUE DE LA RUPTURE FRAGILE
BIDIMENSIONNELLE
« Le secret d’ennuyer est celui de tout dire. »
Voltaire.
- 6 -
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1. PRESENTATION GENERALE
L’existence et la prise en compte de défauts dans les structures mécaniques ne peuvent
plus être ignorées de nos jours. D’origine et de nature variées, ils apparaissent lors de
l’élaboration, de la mise en forme et de l’usinage de pièces élémentaires telles que les tôles
laminées, les viroles ou encore au cours de l’assemblage de ces pièces. Il s’agit alors de
défauts introduits volontairement (ouvertures, pas de vis) ou qui résultent de travaux de
soudure et de collage. On les trouve également en service, sous forme de fissures de fatigue
qui s’amorcent par exemple de préférence dans des coudes de raccordement, de fissures de
corrosion sous contraintes après une exposition prolongée à un milieu corrosif, etc. On
distingue en fait deux types de défauts : les uns que l’on qualifie de volumiques (par exemple
les cavités, les trous) déterminés par trois dimensions dans l’espace et les autres de
surfaciques (à surface plane ou non) où seules deux dimensions interviennent. On trouve
parmi ces derniers les entailles avec un certain angle d’ouverture en fond, les fissures qui
constituent en fait les défauts les plus dangereux (particulièrement dans les milieux minces
comme les plaques) et que l’on considérera par la suite. Une fissure est caractérisée par sa
localisation dans la structure (fissures débouchantes ou fissures internes) par son orientation
par rapport aux directions de charges extérieures, par sa forme et ses dimensions.
Une structure dans l'industrie, mise à part sa fonction industrielle première, est avant
tout destinée à résister à un certain nombre de sollicitations ou des agressions mécaniques
extérieures de nature variée. Les défauts présents dans la structure, les contraintes résiduelles
de fabrication telles qu’elles existent après certaines soudures, peuvent créer localement des
contraintes suffisamment élevées favorisant la propagation d’une fissure sans pour autant que
les contraintes généralisées résultant de ces sollicitations ne dépassent la limite élastique du
matériau. De surcroît, les exigences économiques qui se manifestent par une réduction des
coûts de fabrication ont progressivement imposé une réduction des marges de sécurité
notamment dans le domaine industriel. En conséquence, il s’est avéré de plus en plus utile de
pouvoir donner une estimation quantitative précise de la tolérance de ces structures vis à vis
de défauts préexistants, afin de prévenir d’une éventuelle destruction catastrophique en
service. Une certaine prudence dans le tracé des pièces, en évitant soigneusement les formes
et les assemblages susceptibles d’engendrer des concentrations de contraintes, ainsi que le
retrait systématique des éléments présentant des défauts de fabrication ont sans doute
- 8 -
contribué par le passé à limiter raisonnablement les risques de destruction. Néanmoins,
lorsque les structures deviennent de plus en plus complexes géométriquement et
matériellement (alliages, composites), lorsque les facteurs de sécurité se réduisent, et
finalement lorsque subsistent les défauts locaux (trous, entailles, fissures), le
dimensionnement de ces structures à la rupture est rendu nécessaire.
C’est à ce titre que l’on a vu l’émergence d’une science relativement récente connue
sous le nom de mécanique de la rupture introduite par Inglis [1] en 1913 et Griffith [2] vers
1920. La mécanique de la rupture suppose l’existence d’un défaut caractérisé (par exemple un
trou) ou d’une fissure initiale dans la structure étudiée, provoquant une discontinuité des
champs de contraintes et de déformations à cet endroit. Elle permet alors l’étude de
l’interaction entre cette discontinuité géométrique et le milieu continu avoisinant ainsi que
l’évolution de cette discontinuité. Les premiers travaux analytiques en milieu fissuré plan,
fondés sur l’utilisation des fonctions d’Airy, sont dus en particulier à Westergaard [3] et
datent de 1939. Ce dernier proposa une formulation locale des champs de contraintes et
déformations en pointe de fissure dans le cas d’une plaque élastique mince chargée par une
pression isostatique uniforme. Williams [4] et Irwin [5] ont développé cette discipline dans les
années 50 pour des milieux isotropes, homogènes et linéaires. Ces modélisations rentrent dans
le cadre de la fissuration qualifiée de fragile et ont notamment pu être validées pour des
matériaux à faibles déformations plastiques. Ce type de fissuration s’accompagne toujours
d’une propagation brutale et très destructive de la fissure, avec une loi de comportement du
matériau qui reste globalement dans le domaine élastique linéaire. Divers problèmes
principalement bidimensionnels (2D) ont été traités depuis, notamment en proposant une
extension des théories précédentes aux matériaux ductiles, orthotropes, en appliquant des
conditions aux limites statiques ou dynamiques variées ou encore en compliquant les
configurations géométriques…
Après quelques généralités sur les origines de la mécanique de la rupture, nous
présentons les travaux des chercheurs cités ci-dessus concernant la fissuration fragile des
structures minces que sont les plaques. Adoptant toujours un point de vue 2D (i.e. on néglige
l’épaisseur de la plaque), on aborde en premier lieu le problème de rupture à partir de
considérations énergétiques. On définit alors le taux de restitution de l’énergie G, l’intégrale J.
On expose ensuite les principaux développements analytiques qui conduisent à l’expression
des contraintes singulières et du déplacement hors plan associé, dans le cas d’une fissure de
- 9 -
dimension finie traversant une plaque infinie. Dans le cadre de ce mémoire, seuls les résultats
concernant le mode d’ouverture de la fissure, appelé communément mode I, seront présentés.
Des corrections et des limitations sont apportées aux formulations précédentes afin de tenir
compte d’une zone plastique confinée en pointe de fissure ainsi que de dimensions
géométriques finies pour la plaque de type SEN. Les calculs obtenus à l’aide d’un code
d’éléments finis (et d’un maillage approprié de l’éprouvette SEN) nous conduisent finalement
à définir un domaine de validité (fonction de la taille de l’éprouvette) pour les solutions
asymptotiques précédentes.
2. MECANIQUE DE LA RUPTURE LINEAIRE EN MILIEU BIDIMENSIONNEL
2.1 Les origines de la mécanique de la rupture
La rupture d’un milieu matériel peut s’interpréter avant tout comme l’interruption
soudaine de la continuité de ce milieu. Ce phénomène se traduit alors, à l’échelle
macroscopique, par la création d’une surface de discontinuité que l’on appelle fissure. La
mécanique de la rupture n’est autre que l’application de la mécanique traditionnelle des
milieux continus à un corps sous sollicitation extérieure, auquel on ajoute des conditions aux
limites relatives à la présence géométrique des fissures. Avec les relations classiques de la
mécanique (équations d’équilibre, de compatibilité, loi de comportement du matériau,…), ces
conditions aux limites supplémentaires suffisent théoriquement à déterminer les champs de
contraintes, de déformations et de déplacements existant au sein du milieu fissuré. Cependant,
même avec une configuration géométrique simple et une loi de comportement élastique, il
s’est avéré difficile, voir impossible dans le cas général, de trouver des solutions
mathématiques qui remplissent à la fois les conditions mécaniques et géométriques
mentionnées précédemment.
On notera ici la distinction entre un problème de fissuration de type fragile et de type
ductile. Dans le premier cas, la propagation de fissures s’accompagne d’une faible
déformation plastique qui reste confinée au voisinage immédiat de la pointe de fissure. Par
opposition à la fissuration fragile, on parlera de fissuration ductile lorsque la présence de la
fissure engendre une déformation plastique non négligeable par rapport à la déformation
élastique en pointe de fissure. C’est le cas par exemple pour des matériaux ayant une loi de
comportement élasto-plastique.
- 10 -
A l’aide de la théorie de l’élasticité et d’une approche simplifiée bidimensionnelle,
Inglis [1] a été l’un des premiers à étudier formellement un problème de rupture. Le problème
traité est celui d’un trou elliptique bidimensionnel inclus dans une plaque élastique soumise à
une contrainte nominale σnom uniformément répartie à l’infini et perpendiculaire au grand
axe. La résolution en coordonnées curvilignes donne l’expression suivante de la contrainte
maximale ( )maxyyσ agissant au sommet du grand axe de l’ellipse dans la direction de σnom :
( ) ))R/a(21( 2/1nommaxyy +σ=σ (1.1)
Il apparaît dans la relation précédente que ( )maxyyσ est reliée à la contrainte nominale
par la quantité a/R, où a représente la longueur du demi grand axe de l’ellipse et R le rayon de
courbure au point considéré. Si b est la longueur du demi petit axe, R prend une valeur
minimum à cet endroit, qui vaut ab2 .
On notera que pour un trou circulaire (i.e. lorsque R = a) ( ) nommaxyy 3σ=σ . Cependant
pour le cas limite R = 0 qui est celui d’une fissure, la contrainte devient infinie. Ce résultat
suggère qu’un milieu fissuré ne peut supporter aucune charge extérieure ! Ce paradoxe qui
apparaît lorsque que l’on applique le résultat d’Inglis à une fissure, ne sera levé que plus tard
en utilisant de nouvelles méthodes de calcul permettant de déterminer l’état de contrainte
élastique autour des fissures et d’introduire notamment la notion de facteur d’intensité de
contraintes. Point de départ de l’analyse énergétique de Griffith exposée au paragraphe
suivant, cette relation importante a permis néanmoins de mettre en évidence la présence de
contraintes bien plus élevées que la contrainte nominale au voisinage de défauts tels que les
trous.
L’utilisation massive de métaux dans la fabrication de pièces mécaniques à la fin du
19ème siècle a nécessité la mise au point d’une méthode de calcul fiable afin de prévenir les
ruptures fragiles que pouvaient subir ces matériaux. Les expériences passées, comme on peut
le voir Figure 1-1, ont montré en effet toute la gravité des accidents survenus par rupture
brutale de pièces mécaniques, souvent sans déformation plastique appréciable. De plus, ces
destructions qui intervenaient sous contraintes généralisées souvent nettement inférieures à la
limite élastique du matériau, étaient totalement imprévisibles avec la seule connaissance du
critère de ténacité (essai Charpy) issu de la résistance des matériaux. Broek [6] relate dans son
ouvrage toute une série d’accidents survenus à la suite de ruptures soudaines et inattendues de
- 11 -
structures mécaniques: il y a eu par exemple en Grande Bretagne entre 1860 et 1870 plus de
200 morts chaque année à la suite d’accidents ferroviaires dont la plupart sont dus à des
ruptures de roues, d’axes ou de rails. A New York le 13 décembre 1898, la rupture d’un gros
réservoir de gaz tua un nombre important de personnes et occasionna des destructions
considérables aux alentours. Sur les 2500 bateaux Liberty construits durant la deuxième
guerre mondiale, 145 se cassèrent en deux et presque 700 contenaient de sérieuses fissures…
Figure 1-1: Rupture fragile d’un bateau (d'après [6])
Suite aux travaux d’Inglis, diverses méthodes d’analyses ont permis d’étudier les
champs de contraintes, de déformations et de déplacements au voisinage des fissures. Ces
méthodes se regroupent selon deux types d’approches. La première, qui est une approche
énergétique, est basée sur un bilan d’énergie global prenant en compte une énergie de création
de surface. La seconde est une approche locale et fait appel aux fonctions d’Airy, permettant
de résoudre principalement des problèmes plans.
2.2 Résolution du problème par une approche énergétique
2.2.1 Théorie de Griffith, taux de restitution de l’énergie
La contribution de Griffith [2] est fondamentale car elle a permis de s'affranchir d’une
contrainte infinie en pointe de fissure, qui survient lorsque la solution de Inglis est appliquée à
une structure fissurée. Par la même occasion, elle a conduit au développement de la
mécanique de la rupture et à son utilisation courante dans le domaine de l’ingénierie.
- 12 -
A l’échelle atomique, on assimilera pour simplifier un matériau sans défaut à une
structure cristallographique simple où les atomes sont disposés dans l’espace suivant un
réseau cubique de pas constant b0 (i.e. le paramètre de maille qui est de l’ordre de 0.5 nm). On
convient alors de représenter la contrainte normale σ, nécessaire à la séparation de deux plans
cristallographiques unitaires (dans une direction perpendiculaire à ces plans), par une courbe
sinusoïdale qui dépend du déplacement x des atomes par rapport à leur position d’équilibre
(voir figure 1-2). Cette fonction présente les trois caractéristiques suivantes : (a) au voisinage
de la position d’équilibre le comportement de la structure est purement élastique ce qui se
traduit par une pente à l’origine égale au module d’Young E ; (b) le travail total provoquant la
rupture (zone hachurée figure 1-2) vaut deux fois l’énergie de création γ d’une surface libre ;
(c) la fonction passe par un maximum qui s’interprète comme la contrainte de cohésion σth du
milieu. On a alors :
( )( )( )
0bx0
0
bbx
d
xdE
=
−σ
= (1.2)
00
02
10
21
0bx,
bbxbE
sinbE)x( ≥
−
γ
γ=σ (1.3)
Figure 1-2 : Rupture à l’échelle atomique
- 13 -
On notera que
γπ+=
210
0 Eb
bb correspond à la distance de séparation. La
contrainte de cohésion considérée comme la résistance théorique du matériau est donnée par :
2
1
0th b
E
γ=σ (1.4)
Des calculs de la contrainte de cohésion ont été réalisés avec des modélisations et des
représentations de σ plus précises que celles données ci-dessus. Ils aboutissent à des valeurs
de σth comprises entre E/4 et E/13. On estime néanmoins que σth ≈ E/10 est une bonne
approximation. Une telle prédiction est pourtant excessive en pratique. Elle a conduit Griffith,
après une série d’expériences réalisées sur la rupture de barres en verre de différentes
épaisseurs, à admettre que ces éprouvettes contenaient une multitude de micro fissures qui les
rendaient beaucoup plus vulnérables et provoquaient leur rupture bien en dessous du seuil
théorique (1.4). Ses résultats expérimentaux montraient en effet que la résistance théorique σth
pouvait être approchée lorsque l'épaisseur des barres utilisées se réduisait progressivement, ce
qui n'était plus du tout vrai dans le cas contraire. La démarche de Griffith suppose ensuite
qu’une fissure ne peut se propager que si elle reçoit une énergie suffisante nécessaire à la
création d’une nouvelle surface de rupture. Pour un milieu fragile idéal il postule que durant
un accroissement da de longueur de la fissure, l’énergie totale E du milieu composée de la
somme de l’énergie potentielle Wpot et d’une énergie S de création de surface ne varie pas. On
a ainsi :
extpotpot WWW,0dSdWdE −==+= (1.5)
W et Wext représentent respectivement l’énergie de déformation du milieu (pour un processus
adiabatique il s’agit également de l’énergie interne qui dépend alors uniquement du tenseur
des déformations ε ) et le travail des forces extérieures appliquées. Il faut noter que pour un
milieu infini les conditions aux limites ne sont pas affectées lors de la propagation de la
fissure (i.e. le travail des forces extérieures ne varie pas) et on a WWpot ≅ . D’après (1.5), la
rupture n’est donc possible que si la variation d’énergie potentielle extpot WWW −= due à un
accroissement da de la fissure est égale à l’énergie de surface S nécessaire à la séparation des
deux lèvres de la fissure.
- 14 -
Il est commode pour un milieu bidimensionnel de rapporter les quantités précédentes à
l’unité d’épaisseur du milieu. En modifiant alors l’écriture de dS et en introduisant le
paramètre G, appelé taux de restitution de l’énergie, comme suit :
da2dS γ= (1.6a)
potWdadG −= (1.6b)
le bilan (1.5) se réécrit sous la forme bien connue :
γ=2G (1.7)
A partir des travaux analytiques d’Inglis, Griffith a calculé l’énergie de déformation
dans le cas de la plaque élastique infinie (d’épaisseur unitaire) comportant un défaut elliptique
de longueur 2a :
*
2nom
2
pot Ea
WWσπ
−=≅ (1.8)
avec ( )2* 1EE ν−= en déformations planes et EE* = en contraintes planes. Avec (1.5),
(1.7) et (1.6a et b) en prenant garde de remplacer da par d2a, il en résulte une nouvelle
expression de la résistance du milieu fissuré :
2
1*
r aE2
πγ
=σ (1.9)
De la même manière en utilisant les expressions (1.1) et (1.5), on établit le critère de
rupture suivant :
2
1
0r ba4
E
ργ=σ (1.10)
Il est intéressant de noter que dans l’expression (1.9) le rayon de courbure au fond de
l’entaille elliptique n’apparaît pas : on dispose ainsi d’un critère de rupture valide pour de
faibles rayons de courbure (i.e. une fissure) contrairement au critère (1.10) qui conduit alors à
un σr nul, inconcevable physiquement. Le critère (1.9) a été vérifié expérimentalement pour
- 15 -
des matériaux parfaitement élastiques comme le verre. Diverses corrections ont été apportées
afin, par exemple, de tenir compte dans le calcul de l’énergie de déformation de la plaque de
contraintes résiduelles dues à l’existence de l’énergie de surface [7, 8]. Le critère a été étendu
à des matériaux moins fragiles [9] par l’introduction d’un terme correctif représentant une
énergie de déformation plastique en pointe de fissure. De même la prise en compte de
l’énergie cinétique dans la loi de bilan (1.5) permet de rendre compte d’une propagation
instable de la fissure.
2.2.2 Intégrale J et ses propriétés
Une autre expression du taux de restitution de l’énergie G introduit au paragraphe
précédent est possible au moyen d’une intégrale de contour. On considère pour cela un milieu
élastique fissuré, d’épaisseur unitaire, de frontière extérieure SF muni du repère ( )21 X,X,O
(voir figure 1-3a). On notera A la surface du corps délimitée par le contour SF. Un état de
déformation plane ou de contrainte plane est supposé exister au sein du milieu.
Pour une longueur a de la fissure et en absence de force volumique, l’énergie
potentielle du milieu est alors donnée par :
( ) dSuTdA)(WaW iS
di
Apot
T
∫∫ −ε= (1.11)
où le produit idi uT représente le produit scalaire des forces extérieures données dT
sur le
contour ST et des déplacements correspondants u , avec (i=1,2). Le contour SF est parcouru
dans le sens trigonométrique. SU correspond à la portion de SF où les déplacements extérieurs
sont imposés.
Dans l’expression (1.11) la quantité scalaire W (i.e. la densité d’énergie de
déformation) est une fonction convexe et définie positive ce qui assure entre autres la stabilité
du matériau [10]. Elle relie de façon très générale le tenseur des contraintes σ au tenseur des
déformations ε comme suit :
ij
ijWε∂∂
=σ (1.12)
- 16 -
En introduisant le système de coordonnées cartésiennes 1iii aXx δ−= attaché à la
pointe de fissure (δij est le symbole de Kronecker et i,j=1,2) et pour une propagation selon la
direction x1, on a :
11
1
xaxax
adad
∂∂
−∂∂
=∂∂
∂∂
+∂∂
=
On soulignera ici l’analogie avec la dérivée particulaire introduite classiquement en
cinématique : les composantes Xi et les xi correspondent respectivement à des coordonnées
lagrangiennes (fixes) et eulériennes reliées entre elles par le paramètre a. Si l’on différentie
(1.11) par rapport à a, en supposant les forces et déplacements extérieurs appliqués
indépendants de a, on obtient grâce à la relation précédente :
dSxu
auTdA
xW
aW
dadW
1
ii
S
di
A 1
pot
F
∂∂
−∂∂
−
∂∂
−∂∂
= ∫∫ (1.13)
On peut alors écrire en utilisant (1.12) et la propriété de symétrie du tenseur des
contraintes et des déformations :
∂∂
∂∂
σ=∂
ε∂
ε∂∂
=∂∂
au
xaW
aW i
jij
ij
ij (1.14)
où on a adopté la convention de sommation suivante : lorsqu’un indice est présent deux fois
dans une même expression on lui fait prendre les valeurs 1,2 et 3 (selon le contexte) puis on
somme. L’indice en question est alors qualifié d’indice muet par opposition à un indice franc
qui lui n’apparaît qu’une fois et garde une valeur fixe 1,2 ou 3 (selon le contexte). Dans
l’expression (1.14) et ce qui suit, les indices muets i,j prennent les valeurs 1 et 2.
Le principe des travaux virtuels permet d’écrire :
dSauTdA
au
xdA
aW i
S
di
A A
i
jij
F∂∂
=
∂∂
∂∂
σ=∂∂
∫∫ ∫ (1.15)
La relation (1.13) se simplifie alors, et par application du théorème de la divergence,
on obtient finalement :
dSxuTWdxdS
xuTWn
dadW
G1
idiS 2
S 1
idi1
pot
FF
∂∂
−=
∂∂
−=−= ∫∫ (1.16)
- 17 -
L’intégrale de contour (1.16) est classiquement appelée intégrale J. Rice [11] a montré
que pour une fissure rectiligne cette intégrale est indépendante du contour d’intégration
lorsque ce dernier englobe le fond de fissure. L’intégrale J est en fait nulle sur tout contour
fermé qui ne contient pas la pointe de fissure, ce qui permet d’établir cette propriété
d’indépendance vis-à-vis du contour d’intégration. La particularisation de l’expression (1.16)
à un contour circulaire orienté Γ de rayon r (figure 1-3b) donne en prenant les coordonnées
polaires associées:
( ) ( ) ( ) ( ) θ
θ
∂∂
θ−θ
θεθσ= ∫
π+
π−
d,rxu.,rTcos,r,r
21rJ
1
idiijij (1.17)
où
σσσσ
=2
1
2221
1211di n
nT avec
rxn 1
1 = et r
xn 22 = ,
et
∂∂∂∂
=∂∂
1
1
1
i
xvxu
xu
L’expression (1.17) est pratique pour évaluer J en déformation plane ou pour un état
de contraintes planes généralisées. On notera que le long de la fissure (i.e. les segments OA et
OB sur la figure 1-3b) les termes de l’intégrale J sont nuls et n’interviennent pas dans
l’expression (1.17).
2x
O
a
SF dS
1X
2X
2
1
nn
n
ST
SU
O’
dT
1x
1-3a 1-3b
B
A
Γ
O
r
θ
1x
2
1
nn
n2x
Figure 1-3: Représentation du contour d’intégration
- 18 -
En élasticité la propriété d’indépendance de l’intégrale J vis-à-vis du contour, permet
donc de l’interpréter comme un paramètre mécanique global équivalent à l’énergie G introduit
par Griffith. En milieu élastoplastique, il faut tenir compte dans l’expression de W d’un terme
qui est dû à la déformation plastique. Une partie de l’énergie W est alors directement dissipée
dans la matière et n’est donc plus utilisable pour propager la fissure. Autrement dit
l’équivalence entre les quantités G et J n’est plus vérifiée. On peut cependant montrer que
pour un certain type de déformation plastique, J dérive d’un potentiel. Ces deux propriétés
remarquables ont permis l’utilisation de J pour représenter les champs de contraintes et de
déformations en pointe de fissure dans le cas du matériau élastoplastique vérifiant la loi de
Ramberg-Osgood ou Prandtl-Reuss. Pour ce type de matériau, la solution asymptotique 2D
proposée est connue sous le nom de champ H.R.R. [12,13]. Notons enfin que d’autres
intégrales de contour ayant les mêmes caractéristiques que J ont été introduites par la suite.
On peut citer par exemple l’intégrale I établie par Bui [14] à partir de l’énergie de
déformation complémentaire WW ijij* −εσ= au lieu de W.
2.3 Déplacement des lèvres de la fissure et modes élémentaires de rupture
Au lieu d’aborder le problème de rupture en considérant l’énergie du système, on peut
étudier directement les champs de contraintes et de déplacements existants au voisinage de la
pointe de fissure. La fissure est représentée à l’aide de deux surfaces planes (i.e. les lèvres de
la fissure) qui se coupent selon une courbe simple appelée front de fissure. L’étude proposée
concerne les plaques élastiques dont l’un des côtés comporte une fissure traversante. Plus
précisément, les lèvres supérieure et inférieure de la fissure seront toujours des plans
transverses perpendiculaires à la surface extérieure (i.e. la surface libre ∂SL) de la plaque. De
plus dans ce chapitre le front de fissure est pris rectiligne et également perpendiculaire à la
surface libre comme le montre la figure 1-3. L’influence sur les champs de contraintes et de
déplacements d’un front de fissure courbe sera étudiée au chapitre suivant, dans le cadre de
l’analyse 3D.
On définit un repère orthonormé direct ( )z,y,x,O centré en pointe de fissure, d’axe
z tangent au front de fissure (voir figure 1-3). L’axe x se situe dans le prolongement de la
fissure. Un point de la plaque est alors repéré par ses coordonnées cylindriques (r, θ, z) où r
est la distance au front de fissure et θ la coordonnée angulaire prise à partir de l’axe x .
- 19 -
Surface libre ∂SL
r
x
y
z+t/2
O
Lèvresupérieure
Lèvreinférieure
Front
-t/2θ
σyyτxy
σxx
Figure 1-4 : Représentation d’une fissure dans une plaque chargée d’épaisseur t
Les mouvements cinématiques possibles des lèvres inférieure et supérieure de la
fissure, l’une par rapport à l’autre, se décomposent en trois mouvements élémentaires
indépendants schématisés figure 1-5 auxquels sont associés trois modes de fissuration. Irwin
[5,15] a montré que tout processus de fissuration pouvait se ramener à l’un de ces trois modes
ou à leur superposition. Pour un chargement plan, symétrique par rapport au plan de la fissure
(voir figure 1-4), seul le mode d’ouverture de la fissure (ou mode I) est activé. Les modes II et
III correspondent respectivement au mode de glissement dans le plan et hors du plan de la
fissure.
A chacun des trois modes correspondent des champs de contraintes et de déplacements
pour lesquels il existe, du moins dans le cadre de la théorie 2D, des expressions analytiques
asymptotiques valables au voisinage de la pointe de fissure. Les solutions proposées sont en
général données dans le repère d’étude précédent ( )z,y,x,O . La démarche scientifique qui a
permis d’établir ces solutions pour le mode I de fissuration fait l’objet des paragraphes
suivants.
- 20 -
z
x
y
Mode I
x
Mode II
z
y
z
x
y
Mode III
Figure 1-5 : Modes élémentaires de fissuration
On pourra dans la suite, sans nécessairement le préciser, adopter la notation suivante :
( )321 x,x,x,O pour représenter le repère ( )z,y,x,O . L’écriture des coordonnées d’un point,
des composantes d’un vecteur ou d’un tenseur suit logiquement : (x1, x2, x3) pour ( )z,y,x , u3
pour uz , σ11 et σ12 pour σxx et σxy , etc...
2.4 Rappels d’élasticité plane, fonction d’Airy
Considérons la plaque élastique fissurée représentée figure 1-3 et rapportée à son
repère d’étude ( )321 x,x,x,O . Si l’on introduit les coordonnées cartésiennes associées (x1 ,
x2 , x3), le domaine matériel occupé par la plaque est défini par : D = (x1, x2, x3) / (x1, x2) ∈
∂SL et | x3 | ≤ t/2 .
La détermination de l’état mécanique [ u ,σ ] de la plaque sous sollicitation extérieure
imposée (généralement impossible dans le cas général) s’inscrit dans le cadre d’un problème
plan (P) si l’on suppose les charges extérieures appliquées indépendantes de x3. On simplifie
encore le problème (on parle alors d’élasticité plane) en suivant deux approches classiques qui
proposent des hypothèses supplémentaires sur la forme du déplacement u ou sur celle du
tenseur des contraintes σ .
La première, connue sous le nom de déformation plane (DP), impose les conditions
suivantes sur le déplacement :
( )
0u2,1ix,xuu
3
21ii
≡==
(1.18)
- 21 -
La seconde est appelée état de contrainte plane (CP) et suppose que le tenseur des
contraintes ne dépend que de x1 et x2 avec les conditions supplémentaires suivantes :
0332313 =σ=σ=σ (1.19)
Pour les plaques fissurées de faible épaisseur, les solutions analytiques 2D
développées s’appuient en général sur le concept de contrainte plane. On notera que u3 dépend
alors linéairement de x3. En négligeant les forces de volume, en tenant compte de la loi de
Hooke et de la définition du tenseur des déformations (avec l'hypothèse des petites
perturbations) [17], les approches (DP) et (CP) conduisent alors aux équations d’équilibre
suivantes :
( ) ( )
( ) σ+σν
=σ=σ=σ
==∂
σ∂
CP0DP
et0
2,1j,i0x
2211332313
j
ij
(1.20)
où ν représente le coefficient de Poisson et la convention de l’indice muet a été adoptée. Il
convient de préciser que les approches précédentes ne permettent pas de vérifier toutes les
conditions et relations mathématiques requises par le problème plan (P) posé sous sa forme
générale [17]. Les solutions qui en résultent ne pourront être qu’une approximation de la
solution du problème plan (P). Néanmoins, nous verrons qu’elles sont tout à fait acceptables
dans le chapitre suivant sous certaines conditions et dans certaines régions d’une plaque
fissurée qui seront alors précisées.
On montre alors que l’on peut vérifier automatiquement les équations d’équilibre
(1.20) par l’intermédiaire d’un tenseur de fonction de contraintes Φ en posant :
( )
( )
=Φ
Φ=σ
21
t
x,xA00000000
avec
RotRot
(1.21)
La fonction A est appelée fonction d’Airy et permet d’exprimer les contraintes sous
une forme plus connue :
- 22 -
21
2
1221
2
2222
2
11 xxA,
xA,
xA
∂∂∂
−=σ∂∂
=σ∂∂
=σ (1.22)
La première équation de compatibilité impose une relation supplémentaire entre les
composantes du tenseur des déformations ε :
0xx
2xx 21
122
21
222
22
112
=∂∂ε∂
−∂ε∂
+∂ε∂
(1.23)
En contrainte plane, les trois autres équations de compatibilité concernent la
déformation ε33 et ne peuvent pas être vérifiées en général : elles imposent en effet que
2211 σ+σ soit une fonction linéaire de x1 et x2 ce qui est en général trop restrictif…
La relation (1.23) conduit alors en contrainte plane ou en déformation plane à une
équation différentielle vérifiée par la fonction d’Airy. Cette équation est appelée équation
biharmonique et a été donnée par Goursat en 1898 [18] :
0xA
xxA2
xAA 4
2
4
22
21
4
41
44 =
∂∂
+∂∂
∂+
∂∂
=∇ (1.24)
La mise en équation d’un problème de rupture, dans le cadre de l’élasticité plane,
pourra ainsi se faire en recherchant une fonction biharmonique appropriée qui dépend des
coordonnées x1 et x2. Il suffit simplement de trouver une fonction scalaire A(x1,x2) qui
satisfaisait (1.24) et les conditions aux limites du problème par le biais de (1.22) !
La théorie des fonctions complexes simplifie en fait considérablement la tâche en
offrant une méthode générale de résolution des problèmes d’élasticité plane depuis les travaux
importants de Goursat [18]. On ramène en effet la solution de l’équation biharmonique à la
détermination de deux fonctions analytiques ϕ et χ dans une région du plan ( )21 x,x,O avec
des conditions aux limites imposées. A toute fonction analytique f (ici f=ϕ ou f=χ), on associe
la fonction f définie par ( ) 21 xixzoù,)z(fzf +== . Soit alors :
( ) ( ) ( ) ( ) ( )[ ] ( ) ( )[ ]21
21xixzavec
zzzRe2zzzzzzx,xA−=
χ+ϕ=χ+χ+ϕ+ϕ= (1.25)
Cette solution a été développée et appliquée à certains problèmes d’élasticité plane par
Kolossov [19] au début du siècle et par Muskhelishvili ensuite [20,21].
- 23 -
En utilisant (1.22), les contraintes ijσ et les déplacements ui sont déterminés à l’aide
des dérivées des fonctions ϕ, χ, ϕ et χ par les relations :
( )[ ]( ) ( )[ ]
( ) ( ) ( ) )z()z('zz1uiuEz'z''z2i2
z'Re4
21
121122
2211
ψ−ϕ−ϕκ=ν++ψ+ϕ=σ+σ−σ
ϕ=σ+σ
(1.26)
avec ( ) ( )z'z χ=ψ et où z est un point du domaine matériel appartenant au plan ( )21 x,x,O .
E représente le module de Young et ν le coefficient de Poisson. On a également ν−=κ 43 et
( ) ( )ν+ν−=κ 13 respectivement pour un état de déformations planes et un état de
contraintes planes. Les fonctions ϕ et ψ, quant à elles, dépendent non seulement du
chargement extérieur mais également de la nature et de la forme du domaine considéré. Sans
utiliser les équations précédentes, Westergaard [3] a mené l’une des premières études en
milieu élastique fissuré, à partir des propriétés des fonctions complexes.
2.5 Approche locale : champs de contraintes et de déplacements au voisinage d’une
fissure
2.5.1 Les solutions analytiques 2D de Westergaard [3], Sih [22] et Eftis [23,24]
Westergaard [3] a résolu ainsi le problème symétrique d’une plaque infinie fissurée,
chargée hydrostatiquement en développant la fonction d’Airy A à l’aide d’une fonction
complexe Z(z) :
'Z
dzdZ,Z
dzZd,Z
dzZdoù
ZImxZReA 2
===
+= (1.27)
Comme la fonction est analytique sur le domaine d’étude considéré, il n’y a pas
d’ambiguïté dans la définition des dérivées. En utilisant les relations classiques de Cauchy-
Riemann, on montre facilement que la fonction ainsi définie vérifie l’équation biharmonique.
Elle conduit alors à l’expression suivante des contraintes :
'ZRex
'ZImxZRe'ZImxZRe
212
222
211
−=σ+=σ−=σ
(1.28)
- 24 -
La relation précédente est valable pour toute fonction analytique. Il faut donc trouver
la fonction Z(z) qui permette de vérifier également les conditions aux limites du problème
considéré. Ainsi pour le mode d’ouverture d’une fissure de longueur 2a contenue dans une
plaque infinie sous chargement biaxial σ (voir figure1-6), Westergaard a proposé la fonction
solution suivante :
2122xixz,
az
zZ +=−
σ= (1.29)
où les coordonnées x1, x2 sont liées au repère d’étude représenté figure 1-6. La fonction (1.29)
est holomorphe partout sauf sur la fissure. A l’aide de (1.28), on retrouve aisément les
contraintes imposées aux limites. Ainsi lorsque ∞→z , on a σ11 = σ22 = σ et σ12 = 0 et sur la
surface fissurée σ12 = σ22 = 0. La fonction proposée est donc une solution du problème.
Afin d’expliciter le champ de contraintes en pointe de fissure, il est commode
cependant de remplacer dans (1.29) z par (a + u) avec u = reiθ, (r, θ) sont les coordonnées
polaires prises en fond de fissure (voir figure 1-6). Avec la nouvelle variable u, on a alors au
voisinage de la pointe de fissure (i.e. lorsque 0u → ) :
u2
Ku2
aua2aZ I
0u π=
ππσ
=σ
=→ (1.30)
où le facteur multiplicatif π est traditionnellement rajouté. La quantité KI au numérateur est
fonction uniquement du chargement extérieur et de la demi-longueur de la fissure. Elle est
connue sous le nom de facteur d’intensité de contraintes. Compte tenu de l’expression de u en
coordonnées polaires, les contraintes en pointe de fissure peuvent être calculées à partir de
(1.30) et (1.28) :
23cos
2cos
2sin
r2K
23sin
2sin1
2cos
r2K
23sin
2sin1
2cos
r2K
I12
I22
I11
θθθπ
=σ
θθ+
θπ
=σ
θθ−
θπ
=σ
(1.31)
Notons ici que la démarche précédente est similaire en mode II et conduit à un champ
de contraintes associé présentant la même singularité en r-1/2que (1.31). Il faut cependant
choisir une autre fonction de contrainte Z pour solutionner le problème [25].
- 25 -
A partir de la représentation complexe de l’état de contraintes (1.26), il est possible de
traiter le même type de problème sous le chargement plus général de la figure 1-6
(k quelconque).
La condition de symétrie par rapport à Ox1 s’exprime de la façon suivante :
( ) ( )[ ] 0z'z''zIm12 =ψ+ϕ=σ (1.32)
Sih [22] a montré que cette condition est vérifiée si :
( ) ( ) 0Bz''zz' =+ϕ+ψ (1.33)
où B est une constante réelle qui dépend du chargement. La relation (1.33) permet d’exprimer
χ(z) à l’aide de B et ϕ(z) . Tout calcul fait [25], on aboutit à l’expression suivante de la
fonction d’Airy :
( ) ( )[ ] ( )[ ] ( )22
21221 xx
2Bz2Imxdzz2Rex,xA −−ϕ+ϕ= ∫ (1.34)
Soit en identifiant ( )z'2)z(Z ϕ≡ et en conservant les notations de Westergaard
définies en (1.27) :
( ) ( )22
21221 xx
2BZImxZRex,xA −−+= (1.35)
Le champ de contraintes est donné alors par :
'ZRex
B'ZImxZReB'ZImxZRe
212
222
211
−=σ−+=σ+−=σ
(1.36)
Les équations précédentes ont été établies par Sih [22]. En apportant la modification
suivante à la fonction Z(z) proposée par Westergaard :
Baz
zZ22+
−
σ= (1.37)
- 26 -
et en utilisant les équations (1.36), Eftis et Liebowitz [23,24] ont résolu le problème plus
général présenté figure 1-6. Pour que les contraintes vérifient correctement les conditions aux
limites, la constante B vaut selon leur analyse :
( )2k1B σ−
−= (1.38)
Compte tenu de (1.36-38), on a la représentation suivante du champ de contraintes en
pointe de fissure :
23cos
2cos
2sin
r2K
23sin
2sin1
2cos
r2K
)k1(2
3sin2
sin12
cosr2
K
I12
I22
I11
θθθπ
=σ
θθ+
θπ
=σ
σ−−
θθ−
θπ
=σ
(1.39)
On remarque que l’on retrouve facilement les solutions de Westergaard à partir des
systèmes (1.39) et (1.37) en prenant k=1. Le cas particulier important d’un milieu infini
sollicité uniaxialement suivant le mode d’ouverture de la fissure est décrit lorsque k=0.
x2
x12a
σ=σ∞→2x22
σ=σ∞→
k1x11
M
zu
θr
O
Figure 1-6 : Plaque fissurée, milieu bidimensionnel infini en mode I
- 27 -
En contraintes planes, le déplacement hors plan u3 de la surface libre d'une plaque
d'épaisseur t identique à celle considérée figure 1-6 lorsque k=0, est donné par :
( ) ( )
( )2t
Ecteavec
cter2
12
cosE
tKdx,r2tx,,ru I
32
t
03333
σν
=
+π
θν
−=∫ θε==θ (1.40)
où la coordonnée x3 est définie à partir du repère d’étude centré en fond de fissure (i.e. au
point O) de la figure 1-4. Vu la symétrie du problème, on obtient une expression de u3
identique, au signe près, pour l’autre surface libre.
2.5.2 Généralisation du problème à des milieux de dimension finie
Il est clair que les solutions précédentes ne s’appliquent qu’au cas idéal du massif
élastique fissuré infini figure 1-6. En pratique, les plaques étudiées ont des dimensions finies,
les fissures ne sont pas forcément localisées au centre. On trouve en général dans la littérature
[25, 26] quelques éprouvettes standards contenant des fissures traversantes, de géométrie
simple, sous différents types de chargement. On montre figure 1-7 les éprouvettes CN
(Central Notch), DEN (Double Edge Notch) et SEN (Single Edge Notch). Cette dernière
constituera la géométrie de référence dans notre étude.
a
Type SEN
W
a a
Type DEN
2W
2a
Type CN
2W
2V
σ0σ0
σ0 σ0
σ0
σ0
Figure 1-7 : Eprouvettes fissurées de type CN, DEN et SEN sous chargement uniaxial
(σ0 est la contrainte nominale associée)
- 28 -
a) Développement en série de Williams [27]
L’approche de Williams [27] propose une résolution alternative générale de l’équation
de comptabilité (1.24) en milieu plan, sans utiliser les fonctions complexes. On suppose pour
cela que la fonction d’Airy A s’écrit sous la forme :
( ) ( )θ=θ +λ Fr,rA 1 (1.41)
où λ est un scalaire et F(θ) une fonction continue et dérivable de θ à déterminer. Le repère
d’étude est toujours celui de la figure 1-3 : les grandeurs mécaniques qui suivent seront toutes
exprimées avec les coordonnées polaires associées.
En reportant l’expression précédente de A dans l’équation (1.24) réécrite en
coordonnées polaires, on obtient l’équation différentielle du 4ème ordre suivante pour F :
( ) ( ) ( )[ ] ( ) ( ) ( )[ ] ( ) 0F11dFd11
dFd 22
2
222
4
4=θ+λ−λ+
θθ
+λ+−λ+θθ (1.42)
dont la solution générale est :
( ) ( ) ( ) ( ) ( ) 01sinc1sinc1cosc1coscF 4321 =θ+λ+θ−λ+θ+λ+θ−λ=θ (1.43)
où les constantes ci sont à déterminer à partir des conditions aux limites. En injectant alors la
forme (1.41) dans les équations (1.22) les contraintes deviennent :
( ) ( ) ( ) ( )
( ) ( ) ( )[ ]
( ) ( )
θθ
λ−=∂θ∂
∂−
θ∂∂
=σ
θλ+λ=∂∂
=σ
θ+λ+
θθ
=θ∂∂
+∂∂
=σ
−λθ
−λθθ
−λ
ddFr
rA
r1A
r1
F1rrA
F1dFdrA
r1
rA
r1
12
2r
12
2
2
21
22rr
(1.44)
Les lèvres de la fissure sont libres de contraintes (i.e. π±=θ=σ=σ θθθ ,0r ), ce qui
conduit au système algébrique suivant pour les ci :
- 29 -
( ) ( )( ) ( )
( ) ( )( ) ( )
0
cccc
1cos1cos001sin1sin00
001sin1sin001cos1cos
4
3
2
1
=
π+λπ−λΓπ+λπ−λ
π+λπ−λΓπ+λπ−λ
(1.45)
avec ( ) ( )11 +λ−λ=Γ . On peut voir à partir de (1.45) que les constantes c1 et c2 sont
totalement indépendantes de c3 et c4 : les deux premières correspondent en fait au chargement
symétrique (mode I) alors que pour les deux autres il s’agit d’un chargement antisymétrique
(mode II). Une solution non triviale existe si le déterminant de la matrice s’annule. Après
simplification, la relation caractéristique que vérifie λ se réduit à :
( ) 02sin =πλ (1.46)
On obtient alors les valeurs propres λn de λ solutions de (1.46) :
+∈=λ *n Nn,
2n (1.47)
Notons que n est un entier positif afin de borner l’énergie de déformation. Aux valeurs
propres λn sont associés les coefficients c1n, c2
n et c3n, c4
n. En reportant dans (1.45) et pour le
mode I qui nous intéresse, on trouve les relations suivantes :
( ) ( )( ) +
−−− ∈
==
=
+
+−
−
=+−
∀
−=
=*
4n
3n
21m2
11m2
1m
2m2
1m2
m
Nm,
0cc
0cc1m23m21
0cc1
n21m2n
m2n
(1.48)
soit avec des notations évidentes, pour la fonction de contraintes A :
( )( )
( ) ( ) ( )[ ]∑
θ++θ−−−+
θ
+
+−
+θ
−−−
=θ∞
=+
+−
−
,...2,1m 1mm2
m
21m1m2
1msym
1mcos1mcosrc1
21mcos
1m23m2
23mcosrc1
,rA (1.49)
En ne conservant que les deux premiers termes ci dessus, pour un mode I de
chargement, on a :
- 30 -
( )
)r(O22sin
sincos
c4
23sin
2sin
23cos
2cos3
23cos
2cos5
r4c 212
2
2211
r
rr
+
θ−θθ
+
θ
−
θ−
θ
−
θ−
θ
+
θ−
=
σσσ
θ
θθ (1.50)
Si on réécrit (1.50) dans le système σ11, σ22, σ12 en utilisant la transformation
classique des composantes d’un tenseur il vient :
( )
2I
1
21I
12
22
11
c4Tet2Kcposanten
rO001
T
23cos
2sin
23sin
2sin1
23sin
2sin1
2cos
r2K
=π
−=
+
+
θθ
θθ+
θθ−
θπ
=
σσσ
(1.51)
On retrouve alors la solution asymptotique proposée par Eftis (cf. équations (1.39)) qui
devient un cas particulier du problème général traité par Williams. En effet dans l’analyse 2D
de Williams on ne fait aucune hypothèse sur la géométrie du corps fissuré et le mode de
chargement. A partir de (1.49), les contraintes se décomposent sous la forme générale
suivante :
( ) ( ) 2,1j,ifrcTfr2
K
1nnij
2n2nj1i1ij
Iij =θ+δδ+θ
π=σ ∑
∞
=+ (1.52)
où le premier terme du développement représente la solution asymptotique qui est dominante
en pointe de fissure. Les fonctions universelles fij(θ) sont écrites explicitement dans
l’expression (1.51). La connaissance de la géométrie et du chargement doit permettre
d’identifier tous les coefficients ci . En pratique lorsque les géométries se compliquent, il
n’existe pas de solution simple à ce problème : on a recours dans certains cas (éprouvettes de
référence figure 1-7) aux méthodes numériques. Pour une configuration stable donnée, les
deux constantes KI et T sont respectivement le facteur d’intensité de contraintes et la
contrainte transverse (voir [28] par exemple). Elles s’expriment respectivement en [ mMPa ]
et [MPa].
- 31 -
b) Facteur d’intensité de contraintes et contrainte transverse
Le facteur d’intensité de contraintes KI donne physiquement une mesure de l’intensité
de la singularité. Il dépend en général des paramètres de chargement et de géométrie du
problème étudié. Pour des systèmes géométriques simples que l’on rencontre en pratique
(cf. figure 1-7), on a l’habitude de poser :
aWV,
WaYK 0I πσ
= (1.53)
où Y est une fonction de forme qui dépend de la géométrie de la pièce, de la longueur de la
fissure, de sa localisation.
Ainsi pour une éprouvette de type CN chargée uniaxialement et comportant une
fissure très petite devant les dimensions planes de la pièce, cette fonction tend rapidement
vers 1. On retrouve bien sûr la solution théorique de Westergaard. Dans les mêmes conditions
pour l’éprouvette de type SEN, des études théoriques ont montré que la valeur limite était
alors 1,112. On trouve dans la littérature des représentations empiriques de Y en fonction des
paramètres géométriques caractérisant les éprouvettes précédentes, et cela pour différents
types de chargements [26].
D’après ce qui précède, le facteur d’intensité de contraintes apparaît donc comme un
paramètre intrinsèque de la rupture fragile. Il va donc pouvoir intervenir dans l’établissement
de critères de rupture. On montre, à partir de l’expression de l’intégrale J (1.17), qu’il est relié
au taux de restitution de l’énergie G de la façon suivante :
( )
( ) ( )
ν−=
DPE
K1
CPE
K
G 2I2
2I
(1.54)
Il est raisonnable de considérer la contrainte T comme une fonction de la contrainte
nominale uniaxiale appliquée 0σ (voir figure 1-7). On définit alors le taux de biaxialité B
ainsi [28] :
0
TBσ
= (1.55)
- 32 -
c) Zone plastique en pointe de fissure
L’expression du champ de contraintes (1.52) fait clairement apparaître une singularité
en pointe de fissure. Si elle s’explique par la prédominance du premier terme de la série au
voisinage de fissure, elle n’en demeure pas moins irréaliste lorsque l’on s’approche de la
pointe (i.e. r tend vers 0). En pratique lorsque la contrainte est supérieure à la limite élastique
σe du matériau, ce dernier se déforme plastiquement. Il existe donc une zone (i.e. la zone
plastique) au voisinage du front de fissure où les équations (1.52) ne sont plus valables. La
taille de ce domaine est donc fonction de la nature du matériau utilisé. Pour les matériaux
fragiles, la zone plastique est toujours de faible dimension par rapport à la zone d’étude
expérimentale (voir chapitre 4) et reste confinée en pointe de fissure.
Afin de donner une idée de l’étendue et de la forme de la zone plastique on adopte ici
le critère de Von Mises qui s’écrit, avec les contraintes principales σi :
( ) ( ) ( ) 2e
213
232
221 2σ=σ−σ+σ−σ+σ−σ (1.56)
Il vient alors, dans un repère principal centré en pointe de fissure, l’expression
asymptotique suivante pour le champ de contraintes (en déformation plane ou contrainte
plane) :
θ
πν=σ
θ−
θ+θ
π=
σσ
)CP(0
)DP(2
cosr2
K2avec
2sin1
2sin1
2cos
r2K I
3I
2
1 (1.57)
A partir de (1.56) et (1.57), on montre que la zone plastique est délimitée par une
courbe rp d’équation :
( )( ) ( )
θ+ν−+θ
θ+θ+θπσ
=θ)DP(cos121sin
23
)CP(cossin231
2cos
2Kr
22
2
22e
2I
p (1.58)
En première approche, il est habituel d’assimiler la courbe rp à un cercle limite de
rayon :
- 33 -
2e
2I
p 2Krπσ
= (1.59)
Pour les matériaux fragiles, on est assuré d’avoir une zone plastique de petite taille et
donc un problème ‘véritablement élastique’ en respectant la norme ASTM E 399 qui
recommande de prendre la longueur de fissure a, l’épaisseur t et la largeur W de plaque telles
que :
2
e
ICK5,2t,Wa,a
σ
≥− (1.60)
où KIC est la ténacité du matériau [25, 28].
2.5.3 Détermination des coefficients de la série de Williams pour des éprouvettes SEN
B C
DA
piAB
piBC
piCD
σ0
σ0
x2
O x1
a2V
W
Figure 1-8 : Distribution des points de collocation dans le cas d’une éprouvette SEN
Lors des études numériques 3D et expérimentales, nous utiliserons toujours des
éprouvettes de type SEN. On verra qu’il sera important de pouvoir estimer la limite
supérieure de la zone de prédominance de la solution asymptotique 2D. Autrement dit, si on
ramène la coordonnée radiale r à la quantité adimensionnée r/a (a est la longueur de fissure),
pour quelles valeurs de r/a peut on négliger les termes supérieurs à l’ordre 3 dans la série de
Williams ? Pour ce faire, on détermine ici, pour différentes tailles d’éprouvettes, les
coefficients ci à l’aide une méthode numérique connue sous le nom de collocation. On accède
- 34 -
ainsi en particulier aux valeurs de KI et T correspondantes. Par comparaison avec la solution
globale du problème obtenue au paragraphe suivant avec les éléments finis, on pourra alors
estimer la taille de la zone où l’approximation précédente est valide.
On considère figure 1-8 une éprouvette de largeur et de demi-longueur notées
respectivement W et V. La fissure AO, de longueur a, est sollicitée en mode I en appliquant
une traction uniforme σo sur BC. Les coefficients ci de la fonction de contrainte Asym de
Williams (1.49) sont calculés en suivant la démarche proposée par Gross [29]. La fonction
(1.49) a été construite afin de vérifier bien sûr automatiquement les conditions aux limites sur
les lèvres de la fissure (i.e. π±=θ=σ=σ ,01211 ). On vérifie que les conditions aux limites
restantes pour les contraintes sont également respectées si (voir (1.22)) :
( )
( )
( ) Wx
A,2W
A
0x
A,2
aax2
xA
0x
A,0A
CDsur
BCsur
ABsur
01
sym20sym
2
sym2
1
21
0sym
1
symsym
σ=∂∂σ
=
=∂∂
++σ=
=∂∂
=
(1.61)
où pour des raisons de symétrie, on ne considère que la partie supérieure de la plaque.
La méthode par collocation consiste à satisfaire simultanément les 6 équations (1.61)
en un certain nombre de points (disons n) régulièrement distribués sur chacun des côtés (AB),
(BC) et (CD) de la plaque. Les points choisis doivent être différents de B et C. On a donc au
total 3n points de collocation ( )ai2
ai1
ai x,xp , avec a = AB, BC, CD et i=1..n, représentés figure
1-8. Si on réécrit pour simplifier la fonction d’Airy tronquée à l’ordre m sous la forme
développée :
( ) ( ) ( ) i
m
1i21
symii
m
1i
symi
sym cx,xA~c,rA,rA ∑∑==
≡θ≅θ (1.62)
on est amené à résoudre le système matriciel linéaire surdéterminé (6n)×m suivant :
- 35 -
−
−=
Α−−−−−−
−−−−−−Α
n
1
m
1
n
1
B
...
B
c...c
... (1.63)
composé des n sous matrices bloc Αi obtenues à partir de (1.61) :
( ) ( )( ) ( )
( ) ( )( ) ( )
( ) ( )( ) ( )
n..1i,
x,aWA~x
...x,aWA~x
x,aWA~...x,aWA~
V,xA~x
...V,xA~x
V,xA~...V,xA~
x,aA~x
...x,aA~x
x,aA~...x,aA~
CDi2
symm
1
CDi2
sym1
1
CDi2
symm
CDi2
sym1
BCi1
symm
2
BCi1
sym1
2
BCi1
symm
BCi1
sym1
ABi2
symm
1
ABi2
sym1
1
ABi2
symm
ABi2
sym1
i =
−∂∂
−∂∂
−−
∂∂
∂∂
−∂∂
−∂∂
−−
=Α
et des n sous vecteurs Bi associés :
i,W2W
02
aax2
x00B 0
20
2
1
21
0iT ∀
σ
σ
++σ=
Le système matriciel (1.63) a été programmé à l’aide du logiciel de calcul formel
Maple V . Il s’est avéré que les 10 premiers termes de la série de Williams (i.e. m=10) et que
240 points de collocation (i.e. n=80) suffisaient largement à assurer la convergence du
système. Les calculs ont été effectués en normalisant les grandeurs σ0 et V à 1 pour diverses
valeurs des rapports a/W et V/W. On montre par exemple table 1-1 les coefficients ci calculés
lorsque a/W=0,3 et V/W=1. KI et T et par conséquent Y et B sont obtenus à partir de c1 et c2
en utilisant (1.51). Pour d’autres tailles d’éprouvettes, les expressions de Y et B sont
regroupées table 1-2. On peut constater l’influence de la géométrie sur ces paramètres en les
comparant avec les valeurs données pour le cas limite traité par Eftis (i.e. Y=1 et B=-1). Les
résultats obtenus pour Y sont en accord avec ceux que l’on trouve dans la littérature [30]. Les
valeurs numériques de B ne sont cependant pas disponibles pour les tailles d’éprouvettes qui
- 36 -
nous intéressent. On peut citer néanmoins l’étude réalisée par Leevers [31] où B est donné
pour des éprouvettes SEN de grandes dimensions (V/W = 2 ; 5).
Paramètres de calcul : a/W=0,3 v/W=1 σ0=1
c1 c2 c3 c4 c5 c6 c7 c8 c9 c10 …
-0,642 -0,171 0,082 0,065 0,112 0,101 -0,091 0,0076 0,0018 0,016 …
Table 1-1 : Exemple de calcul des premiers coefficients de la série de Williams
a/W 0,3 0,3 0,3 0,4 0,2 0,45 0,3
V/W 0,5 0,8 1 1 1 0,8 0,9
aKY 0I πσ= 1,848 1,672 1,660 2,111 1,363 2,43 1,663
0TB σ= -0,321 -0,643 -0,687 -0,609 -0,712 -0,46 -0,67
Table 1-2 : Valeurs calculées de Y et B pour différentes tailles d’éprouvette
2.6 Approche du problème par les éléments finis
Le problème précédent est abordé ici en utilisant la méthode des éléments finis. Nous
reviendrons sur cette méthode au chapitre suivant lors de l’étude 3D. Tous les calculs sont
réalisés à partir du code d’éléments finis Castem 2000 disponible au laboratoire.
La partie supérieure de l’éprouvette SEN (voir figure 1-8) a été maillée en utilisant des
éléments plans à 8 nœuds qua8 et tri8. Le maillage prend en compte différentes tailles
d’éprouvettes en imposant les rapports a/W et V/W. De plus il a été réalisé de façon à être
rayonnant et se densifier en pointe de fissure. En conservant les notations de la figure 1-8, on
montre figure 1-9 deux exemples de maillages obtenus pour a/W=0,3 et a/W=0,45 et
V/W=0,8 dans les deux cas.
- 37 -
Figure 1-9 : Maillages rayonnants réalisés pour l’éprouvette SEN
Le modèle mécanique utilisé est celui du solide élastique isotrope. Les conditions aux
limites imposées sont les suivantes : sur le côté BC on applique une traction uniforme
unitaire. Le calcul des forces nodales équivalentes à ce chargement est réalisé ensuite par le
logiciel. Pour des raisons de symétrie par rapport à l’axe de la fissure on doit bloquer le
déplacement des nœuds appartenant au coté OD (i.e. le ligament). La matrice de rigidité
globale du système est obtenue par assemblage des matrices élémentaires de rigidité des
éléments et la prise en compte des conditions aux limites précédentes. Connaissant cette
matrice, le problème continu est ramené à un système d’équations à un nombre fini
d’inconnues : à savoir les déplacements dans tous les nœuds de la structure (déplacements
nodaux) hormis les déplacements connus imposés sur le coté OD et les forces nodales
associées à l’exception de celles prescrites sur BC. L’application du principe de minimum de
l’énergie potentielle à partir d’un champ de déplacements supposé permet la résolution du
problème. Il s’agit de la méthode des éléments finis dite de déplacements. Les équations de la
cinématique et la loi de comportement permettent finalement d’accéder aux valeurs
numériques des contraintes σ11(x1,x2) et σ22(x1,x2) sur l’ensemble du domaine maillé.
En vue d’une comparaison avec la solution asymptotique, on s’intéresse ici à
l’évolution de ces contraintes dans le prolongement de la fissure (i.e. lorsque
0xetaWrx 21 =θ=−≤≡ ) : sur les figures 1-10a-b et 1-10c-d, les croix représentent les
contraintes σ22 et σ11 données en fonction du paramètre adimensionné r/a pour les deux
éprouvettes considérées auparavant. En pointillé, on a tracé dans les deux cas les solutions
- 38 -
asymptotiques correspondantes à l’aide des valeurs numériques de la table 1-2. L’intensité du
champ de contraintes en pointe de fissure dépend fortement de la longueur relative de la
fissure comme on a pu le montrer avec la fonction Y au paragraphe précédent. Le domaine de
validité de la solution asymptotique est fortement réduit lorsque le rapport a/W passe de 0,3 à
0,45. Néanmoins les éprouvettes d’étude utilisées ultérieurement sont telles que
0,3<a/W<0,45 et V/W ≅ 0,8. On montre de plus qu’une variation de V/W entre 0,8 et 1
influence très peu les courbes précédentes. Pour notre étude, la solution asymptotique sera
donc une bonne approximation du champ de contraintes 2D si :
10ar ≤ (1.64)
- 39 -
Figures 1-10 : Comparaison des expressions globales et asymptotiques du champ de
contraintes le long de la fissure
3. CONCLUSION
L’approche bidimensionnelle avec un état de contraintes ou de déformations planes a
contribuée à définir des grandeurs mécaniques particulièrement utiles pour l’étude du
comportement des plaques élastiques fissurées sous chargement extérieur. Pour un mode I de
chargement, la contrainte T et surtout le facteur d’intensité KI contrôlent à eux seuls
l’intensité du champ de contraintes en pointe de fissure. Le caractère très général du
formalisme de Williams-Irwin, intégrant les études antérieures de Westergaard, a permis son
utilisation dans la plupart des problèmes de rupture plane. Il doit certainement son succès au
fait qu’il donne une représentation correcte du champ de contraintes en pointe de fissure sans
- 40 -
pour autant connaître tous les termes de la série. Ces derniers semblent en effet bien difficiles
à évaluer pour des géométries compliquées. L’influence du chargement extérieur au loin et de
la géométrie est ressentie localement en pointe de fissure par le biais du facteur d’intensité de
contraintes. La zone de prédominance de la solution asymptotique a été clairement établie
dans le cas des éprouvettes de type SEN et dépend fortement des paramètres géométriques
considérés. Les approches énergétiques développées en parallèle ont défini d’autres
paramètres mécaniques importants caractérisant la rupture : le taux de restitution de l’énergie
G, l’intégrale J. Dans le cadre de l’élasticité linéaire (rupture fragile) on aboutit à des relations
simples entre ces grandeurs et le facteur d’intensité de contraintes.
Les solutions précédentes sont toujours limitées en fond de fissure par l’existence
d’une zone plastique de faible dimension qui permet d’éviter des contraintes infinies en bout
de singularité. En effet, même pour un matériau relativement fragile, on doit tenir compte
physiquement d’une limite élastique au dessus de laquelle le matériau se déforme
plastiquement. On conçoit intuitivement que le domaine plastique est d’autant plus réduit que
la limite élastique du matériau est élevée.
Nous verrons aux chapitres suivants, dans le cadre d’une étude 3D des plaques
élastiques fissurées, que la principale limite à la théorie de Williams est l’hypothèse 2D elle-
même. L’épaisseur de la plaque deviendra un paramètre d’étude important et nous conduira
alors à définir une zone 3D confinée en pointe de fissure, beaucoup plus grande que la zone
plastique. A cet endroit, l’approche de Williams et les solutions analytiques qui en résultent
ne seront plus valables.
- 41 -
CCHHAAPPIITTRREE 22
FISSURATION TRIDIMENSIONNELLE DE PLAQUES ELASTIQUES
« Comme le champ semé en verdure foisonne,
De verdure se haulse en tuyau verdissant,
Du tuyau se hérisse en epic florissant,
D'epic jaunit en grain, que le chaud assaisonne… »
Du Bellay (1558).
- 42 -
- 43 -
1. INTRODUCTION
Nous avons vu au chapitre précédent que les problèmes plans de rupture admettent
tous une solution théorique par les méthodes de Muskhelishvili ou Williams. Elles conduisent
alors à une représentation simplifiée des champs de contraintes et de déplacements existants
entre la discontinuité géométrique (i.e. la fissure) et le milieu continu avoisinant. Pour ce type
de problèmes on dispose en fait d’un arsenal mathématique relativement important (théorie
des fonctions complexes, séparation de variables, fonctions d'Airy, intégrales de contour, …)
pour résoudre les équations inhérentes au problème de rupture plane. Pour les plaques
élastiques fissurées, les solutions obtenues présentent toutes une singularité caractéristique du
champ de contraintes en r-1/2 qui les rendent donc physiquement inacceptables en pointe de
fissure. Outre l'existence d'une zone plastique, cette limitation est due à l'approche 2D
elle même qui ignore à la fois l'épaisseur de la plaque et toute évolution des grandeurs
mécaniques étudiée suivant cette épaisseur.
Lorsque l’on désire une modélisation plus fine et plus réaliste du comportement
mécanique d'un solide en pointe de fissure, on s’aperçoit très vite qu’il faut considérer le
problème de rupture dans son aspect général 3D. La recherche d’une solution analytique
globale pour un tel problème est généralement impossible à quelques exceptions près. On
trouve ainsi dans la littérature des solutions, basées sur les travaux de Green et Sneddon
[32,33], pour le problème d’une fissure circulaire ou elliptique dans un solide élastique infini
soumise à des contraintes d’ouverture ou de cisaillement [34,35]. Ces travaux ont été étendus
ensuite par Bui [36] aux fissures planes de forme quelconque. On peut citer enfin le cas
important d’une fissure semi elliptique débouchante dans une plaque soumise à une traction
uniforme traité par Irwin [37]. La solution approchée qui en résulte est encore utilisée
actuellement.
Ces résultats sont en règle générale limités aux fissures incluses dans des solides
infinis ou semi infinis et n'ont d'intérêt pratique que si les dimensions de la fissure sont petites
devant toutes les dimensions du solide. De plus ils ne s'appliquent pas lorsque l'on est en
présence d'une fissure qui traverse une plaque d'épaisseur finie. Il s'agit typiquement de
l'éprouvette SEN que nous avons choisie d'étudier dans ce mémoire. La détermination
théorique des champs de contraintes et de déplacements au voisinage d'une fissure
débouchante se heurte à une difficulté supplémentaire près du point d'intersection du front de
- 44 -
fissure et de la surface libre de la plaque : à cet endroit que l'on appelle aussi vertex, le champ
de contraintes est fortement perturbé localement par la proximité des deux lèvres de la fissure
et du bord libre de la plaque. Ces "effets de bord" sont pris en compte en admettant l'existence
d'une zone 3D confinée en pointe de fissure que l'on précisera plus loin, à l'intérieur de
laquelle le champ de contraintes est de nature tridimensionnelle et les solutions idéalisées 2D
ne s'appliquent pas. Il n'est certes pas aisé, même en élasticité, de trouver une solution
asymptotique dans la zone 3D qui vérifie à la fois les équations complètes d'équilibre et toutes
les conditions aux limites requises au voisinage du vertex. L'analyse d'une fissure traversante
(qui est toujours débouchante) se distingue alors de celle d'Irwin qui considère une fissure
elliptique fermée qui intercepte un seul des cotés de la plaque. Dans notre cas bien
évidemment les deux surfaces latérales (i.e. surfaces libres) sont à prendre en considération
bien que l'on puisse simplifier le problème si le chargement extérieur est symétrique par
rapport au plan médian de la plaque.
Comme le soulignait Bazant [38], la propagation de fissure dans les plaques est
indiscutablement influencée par la forme du front de fissure suivant l’épaisseur de la plaque.
Cette difficulté supplémentaire d’ordre géométrique rend une analyse du champ de contraintes
au voisinage du vertex encore plus difficile. La plupart des travaux théoriques sur la
fissuration 3D des plaques (travaux relativement récents) renonce, devant la complexité des
calculs analytiques, à intégrer un front de fissure curviligne dans leur analyse. A la suite des
travaux de Folias [39] en 1975 et de Benthem [40] en 1977, quelques chercheurs [38, 41] ont
contribué à donner une description locale des champs de contrainte et de déplacement près du
vertex. A partir d'un système de coordonnées sphériques ),,R( ϕθ centré sur le vertex, leurs
travaux conduisent, pour des plaques élastiques chargées en mode I, à une représentation des
contraintes sous la forme ( )ϕθλλ ,,fR où f est une fonction régulière. Les valeurs de la
puissance de la singularité λ dépendent du coefficient de Poisson et diffèrent de la singularité
classique 2D. Les solutions proposées pour λ ne concordent malheureusement pas toutes, et
sont relativement controversées pour certaines…
Au début de ce chapitre une première extension de la théorie 2D, applicable aux
plaques d'épaisseur finie, est présentée. On rappelle également les travaux de référence des
auteurs ci dessus qui sont complétés par quelques études plus récentes. On propose alors une
analyse par éléments finis de la zone 3D pour des plaques minces élastiques chargées en
mode I (typiquement l'éprouvette SEN du chapitre précèdent). L'étude de cette région requiert
- 45 -
un maillage particulier s'inspirant de celui de Nakamura et Parks [42] mais qui dans notre cas
prend en compte un front de fissure curviligne symétrique par rapport au plan médian de la
plaque. On cherche ainsi à caractériser "mécaniquement" et "géométriquement" cette zone par
rapport à la zone 2D classique. On verra que pour ce faire l'on est amené à définir une
grandeur mécanique supplémentaire caractéristique : le coefficient de triaxialité. La
modélisation proposée nous conduit finalement à donner le déplacement hors plan de la
surface libre de la plaque, calculé dans les zones 2D et 3D en pointe de fissure. On met alors
clairement en évidence l'influence des effets 3D sur la solution classique 2D. Ce chapitre a
pour objectif principal de donner une modélisation suffisamment réaliste du problème de
fissuration en vue d'obtenir un déplacement hors plan comparable à celui que l'on obtiendra
expérimentalement au chapitre 4.
2. ANALYSE TRIDIMENSIONNELLE EN MILIEU PLAN FISSURE
2.1 Solution exacte du problème en contraintes planes
Nous avons vu que pour l'état de contraintes planes tel qu'il a été défini au paragraphe
2.4 du chapitre précédent il n'est pas possible de vérifier toutes les équations de compatibilité
et donc de résoudre de façon exacte le problème. Selon les hypothèses retenues, les
contraintes σ3i sont identiquement nulles. De plus les contraintes non nulles σij (i,j=1,2) sont
supposées indépendantes de la position suivant l'épaisseur de la plaque x3. Dans un contexte
3D, les équations de compatibilité imposent en fait que la contrainte hydrostatique
( )2211 σ+σ soit une fonction linéaire de x1 et x2. Ce n'est assurément pas le cas pour le champ
de contraintes (1.39) obtenu à partir de l'analyse précédente et il est évident qu'un certain
degré d'approximation apparaît lorsque l'on utilise ces solutions avec une plaque d'épaisseur
finie. Néanmoins il est possible de générer un champ de contraintes approximatif
tridimensionnel à partir de l'analyse 2D, en permettant aux contraintes non nulles σij de varier
avec x3. Timoshenko et Goodier (1970) [43] ont démontré, que pour les problèmes
symétriques par rapport au plan médian d'une plaque (i.e. lorsque x3 = 0), il suffisait pour cela
de considérer la fonction de contraintes suivante :
( ) ( ) ( )
22
2
21
22
21022
3210321
xxavec
x,xAx12
1x,xAx,x,xA
∂∂
+∂∂
=∇
∇ν+
ν−=
(2.1)
- 46 -
où A0 (x1,x2) est la fonction d'Airy classique 2D qui vérifie l'équation biharmonique de
Goursat (cf. équation (1.24)). Soit,
0AA 022
04 =∇∇=∇ (2.2)
En appliquant la relation standard (1.22) on montre que le champ de contraintes ainsi
obtenu vérifie toutes les équations de Beltrami. Il s'agit donc bien d'une solution exacte du
problème en contraintes planes.
Pour un mode I d'ouverture, il est alors aisé d'obtenir une nouvelle solution
asymptotique en pointe de fissure à partir de la fonction d'Airy (1.49) et des relations (1.44) et
(2.1). La correction à apporter à la relation (1.50) est alors la suivante :
( )( )( ) ( )
θ−θθ
+
θ+
θ
ν+ν
−
θ+
θ
ν+ν
−
θ−
θ
ν+ν
+
π=
θσθσθσ
θ
θθ
2/2sinsincos
T
23sin
2sin
rx
131
23cos
2cos
rx
133
23cos
2cos
rx
135
41
r2K
x,,rx,,rx,,r
2
2
23
23
23
I
3r
3
3rr
(2.3)
Plusieurs observations peuvent être faites concernant les solutions ci-dessus. Tout
d'abord il est clair qu'elles restent à nouveau approximatives car elles présentent toutes une
singularité en r-5/2 lorsque r tend vers 0. Le terme constant d'ordre 2 ainsi que la contrainte
hydrostatique (σrr + σθθ) restent inchangés. Il s'en suit que les solutions "corrigées" (2.3) ne
modifient pas l'expression (1.40) pour le déplacement hors plan u3 de la surface libre. L'écart
maximum avec les contraintes classiques 2D a lieu sur les surfaces libres, lorsque 2tx3 =
pour une plaque d'épaisseur t, et pour le cas incompressible (i.e. ν=1/2), où le terme commun
( )ν+ν 13 vaut 1. Finalement lorsque r=5t, le calcul montre que la différence relative avec les
solutions simplifiées 2D est au maximum de 0,01.
- 47 -
2.2 Etudes théoriques au voisinage du vertex
2.2.1 L'approche de Folias [39]
Folias s'est intéressé à une plaque élastique infinie d'épaisseur t finie qui contient une
fissure traversante sollicitée selon le mode I. Le front de fissure est supposé rectiligne. A
partir des équations de Navier gouvernant les trois composantes du déplacement et des
conditions aux limites du problème, il propose de construire un système différentiel
équivalent en s'inspirant du calcul formel développé par Lure dans son ouvrage [44]. La
résolution des équations obtenues fait alors appel à des transformations intégrales
relativement complexes qui aboutissent à un système d'équations intégrales. La solution est
alors cherchée sous la forme d'une série de fonctions de Bessel dont les coefficients dépendent
uniquement des paramètres physiques du problème. Au voisinage de la pointe de fissure,
Folias montre que les contraintes sont uniquement proportionnelles au premier coefficient
qu'il détermine numériquement.
L'analyse de Folias montre qu'à l'intérieur de la plaque seules les contraintes planes σij
(i,j=1,2) et σ33 ont une singularité en 21r − alors qu'au voisinage du vertex elles présentent
toutes une singularité en ( )ν+ 221 . Lorsque ∞→t et 0→ν les solutions en déformations
planes et contraintes planes sont respectivement retrouvées. Néanmoins, pour certaines
valeurs du coefficient de Poisson ν, cette analyse fait apparaître des déplacements singuliers
au vertex bien que l'énergie de déformation reste bornée localement. Ces résultats ont soulevé
de ce fait une certaine polémique et beaucoup de chercheurs se refusent à les accepter…
2.2.2 Les analyses locales de Benthem [40], Kawai [41] et Bazant & Estenssoro [38]
Ces travaux, initiés par Benthem en 1977, sont regroupés ici car ils proposent tous une
étude des champs de contraintes et de déplacements localisés exclusivement au voisinage du
vertex. De plus ces études sont conduites en utilisant un système de coordonnées sphériques
centrées sur le vertex (voir figure 2-1) et en supposant le problème à variables séparables par
rapport à ces coordonnées. Cette hypothèse a été néanmoins critiquée par Folias [45] qui,
selon un juste retour des choses, en conclut qu'elle n'est pas valide.
Benthem a considéré le demi espace fissuré Ω qui s'étend selon les z>0 de la figure 2-
1. Les coordonnées sphériques r, θ, φ sont reliées aux coordonnées cartésiennes x, y, z par :
- 48 -
θ=
φθ=φθ=
cosrzsinsinrycossinrx
(2.4)
Surface libre
z
x
y
M(r,θ, φ)
θr
O
Fissure
Ω
φ
Figure 2-1 : Demi espace fissuré Ω (z ≥ 0)
La fissure occupe le quart de plan y=0, x>0, z>0. Benthem a cherché à déterminer un
état de contraintes élastiques dans Ω autour de la pointe de fissure sous la forme :
( )( )( )
,etc,,fr
,,fr
,,fr
xzxz
xyxy
xxxx
φθλ=σ
φθλ=σ
φθλ=σ
λ
λ
λ
(2.5)
qui laissent les surfaces de la fissure et le plan z=0 libres de contraintes. Les valeurs
"convenables" du paramètre λ sont calculées à partir d'une équation caractéristique, exprimant
la condition de nullité d'un déterminant d'ordre infini. On trouve ainsi une infinité de valeurs
propres ordonnées pour λ, solutions du problème. A chaque valeur de cet ensemble est
associé un état de contraintes connu mathématiquement sous le nom de fonction propre.
Physiquement, seules les solutions appartenant à l'intervalle ( ) 23Re −>λ sont à envisager,
afin que l'énergie de déformation reste bornée dans la région proche du vertex (i.e. lorsque
0r → ). La solution la plus proche de cette valeur limite donne alors une représentation du
champ de contraintes prépondérant à cet endroit, ceci pour différents coefficients de Poisson.
- 49 -
L'analyse de Benthem, valable uniquement pour un problème élastique, repose sur
l'utilisation des fonctions harmoniques de Boussinesq et Papkovich-Neuber. On dénombre 7
relations de base qui expriment simplement les 3 composantes du déplacement à l'aide des
dérivées premières de ces fonctions notées Ψi. Les composantes du déplacement vérifient
ainsi identiquement l'équation générale de Navier-Cauchy [17]. Par séparation de variables on
montre que les fonctions Ψi , parce qu'elles sont harmoniques, peuvent s'écrire en coordonnées
sphériques sous la forme suivante :
( )
7..1i,0avec
...,...,...,,cosPsincos
r
i2
7222
1
==Ψ∇
=Ψ=Ψθ
µφµφ
=Ψ µ+λ
+λ
(2.6)
où ( )θµ+λ cosP 2 est une fonction de Legendre de première espèce et λ et µ sont des nombres
complexes à déterminer. Les formules de différentiation des fonctions (2.6) ont été établies de
longue date et permettent d'exprimer algébriquement les déplacements, déformations et
contraintes associés. Afin de vérifier également les conditions aux limites du problème de
rupture, Benthem a été amené à créer d'autres fonctions harmoniques obtenues à partir des Ψi
et de leurs dérivées premières. Elles sont reliées aux composantes du déplacement en
combinant linéairement certaines des relations de base précédentes. Ces fonctions permettent
de construire alors plusieurs ensembles de solutions du même type que (2.6) dont les
contraintes associées vérifient déjà automatiquement une partie des conditions au limites du
problème. Il suffit pour cela de "particulariser" l'indice µ qui prend alors, suivant l'ensemble
considéré, un nombre infini ou fini de valeurs discrètes ordonnées imposées au préalable.
Benthem a créé typiquement trois ensembles A,B,C infinis de solutions ainsi que deux autres
D et E contenant chacun deux solutions.
Il se restreint à l'étude de systèmes de contraintes symétriques par rapport au plan φ=π,
soit finalement à un problème de rupture en mode I. La résolution complète du problème n'est
pas simple et se fait par superposition des ensembles précédents afin de satisfaire toutes les
conditions aux limites, ce qui donne au total (3 × ∞ + 4) degrés de liberté au problème. Il en
résulte un système infini d'équations linéaires paramétrées par le coefficient de Poisson ν et
par λ. Ce système admet une solution non triviale en annulant le déterminant de la matrice
associée (qui dépend uniquement de ν et de λ). On recherche alors les valeurs propres de λ en
fixant le coefficient de Poisson. Il faut noter qu'en présence d'un déterminant d'ordre infini,
- 50 -
qui est bien sûr tronqué dans les calculs numériques, il n'est réellement possible de trouver des
valeurs propres qu'à partir d'un nombre suffisamment grand de fonctions propres nécessaires à
la représentation des contraintes. En d'autres termes l'ensemble de solutions proposées doit
être d'un point de vue mathématique complet afin d'assurer une convergence stable vers les
valeurs propres et retrouver correctement les conditions aux limites imposées. Les résultats
numériques ont montré ainsi que les trois ensembles A,B,C ne permettaient pas à eux seuls de
résoudre le problème (même avec un grand nombre de solutions). La résolution est par contre
tout à fait possible en ajoutant les ensembles finis D et E. En pratique, Benthem a considéré
dans les calculs (3 × 16 + 4) = 52 (occasionnellement 40 ; 64 ; 76) degrés de liberté et a abouti
aux résultats montrés table 2-1. Les valeurs donnant une singularité se trouvent dans
l'intervalle [ ]5,0;332,0 −− , quel que soit ν compris entre 0 et 1/2.
Coefficient de Poisson ν Premières valeurs propres λ
0,0 -0,5 0,410 0,5
0,3 -0,4523 0,218 0,681
0,4 -0,4132 0,135 0,765
0,5 -0,3318 0,0 1,0
Table 2-1 : Valeurs propres λ calculées pour ( )φθλ=σ λ ,,fr ijij (d'après [40])
En introduisant ensuite le système de coordonnées cylindriques associées (ρ, θ, z) :
φ=θ
θ=θ=ρ
cosrzsinr
(2.7)
la contrainte asymptotique 2D σyy s'écrit le long de la fissure (i.e. lorsque φ=π) pour un plan z
choisi :
0,2K I
yy →ρπρ
=σ (2.8)
En identifiant (2.8) aux formules (2.5) réécrites en coordonnées cylindriques, Benthem
a montré que le facteur d'intensité de contrainte KI est lié à la position z de la façon suivante :
21I zK +λ∝ (2.9)
- 51 -
Le résultat (2.9) impose au facteur d'intensité de contraintes d'être nul sur la surface
libre z=0 (à l'exception de ν=0). Cela signifie simplement qu'il n'y a pas de contraintes qui
varient en ρ-1/2 sur la surface libre. Benthem en conclut que la conception du facteur
d'intensité de contraintes telle que l'envisageait la théorie 2D perd toute signification au
voisinage du vertex. Dans cette zone essentiellement 3D, les contraintes évoluent en ρλ.
Les travaux de Benthem ont ouvert la voie à d'autres études près du vertex. Ainsi
Kawai [41] reprend la configuration géométrique présentée figure 2-1 avec le même système
de coordonnés mais un angle d'ouverture (2π-α) pour les lèvres de la fissure. Il choisit
également de donner une représentation du tenseur des contraintes et du vecteur déplacement
dans un système sphérique. En utilisant à nouveau la méthode standard de séparation des
variables, la fonction de contraintes est prise sous une forme plus générale :
( ) ( ) ( ) ( ) 0avec,
sincosQccosPc
coscosQccosPcr 1
21
212
11
11
1 =Ψ∇
µφθ′+θ+
µφθ′+θ=Ψ
µλ
µλ
µλ
µλλ (2.10)
où ( ) ( )θθ µλ
µλ cosQ,cosP sont les fonctions de Legendre de première et seconde espèce
respectivement. Les constantes 11 c,c κκ ′ (avec κ=1,2) et les nombres λ, µ sont inconnus. La
théorie 3D de l'élasticité permet d'exprimer les composantes du tenseur des contraintes que
l'on donne ici de façon concise et que Kawai ne détaille pas d'ailleurs :
( ) ( )( ) 2,1et3,2,1m
,,rj,i
sinc,c,,,;F
cosc,c,,,;Fr,,r
mmij
2
mmij
12
ij =κ=φθ=
µφ′νµλθ+
µφ′νµλθ=φθσ
κκ
κκ−λ (2.11)
où F1ij et F2
ij (indépendants de r et φ) apparaissent comme combinaisons linéaires des
fonctions de Legendre P, Q et de leurs dérivées par rapport à θ. Les termes multiplicatifs
dépendent de λ, µ, ν, de la variable θ et des constantes inconnues mm c,c κκ ′ (avec m=1,2,3 et
κ=1,2) successivement introduites dans les calculs. Seuls les termes où apparaissent les
constantes m1
m1 c,c ′ sont à retenir pour un problème en mode I.
Les conditions aux limites sur le bord libre (θ = π/2) conduisent à un système matriciel
homogène où le vecteur inconnu est composé des constantes précédentes. L'existence d'une
solution non triviale est possible si le déterminant de la matrice est nul : on obtient alors une
condition sur la quantité ( )λ±µ qui doit être un entier positif. On dispose donc à nouveau
- 52 -
d'une infinité de "solutions" indépendantes de µ et vérifiant identiquement une partie des
conditions aux limites du problème. Ces solutions servent alors à établir l'équation
caractéristique transcendantale pour λ en satisfaisant les conditions aux limites restantes sur
les lèvres de la fissure ( 2α±=φ ). Selon Kawai, les valeurs calculées vérifiant
( ) 2Re1 <λ< donnent un champ de contraintes singulier, solution du problème.
Il obtient 3 racines réelles λi (i=1,2,3) comprises entre 1 et 2. Dans le cas d'une fissure
(α=2π), la plus petite λ1 est inférieure à 1,5 et donne lieu à une singularité plus importante que
celle prévue par la théorie 2D et par Benthem pour le champ de contraintes. Quel que soit le
coefficient de Poisson ν, les contraintes évoluent alors en 21r −λ avec 62,0270,0 1 −≤−λ≤− .
λ2 vaut constamment 1,5 et donne la singularité bien connue en r-1/2. La troisième racine λ3 est
supérieure à 1,5 et dépend de ν. Son évolution est relativement proche de celle proposée par
Benthem (voir table 2-1).
Bazant et Estenssoro [38] généralisent les travaux des auteurs précédents en prenant en
compte un front de fissure oblique et un plan de fissure incliné par rapport au bord libre de la
plaque. Dans cette présentation nous nous restreignons au cas où le plan de fissure est
perpendiculaire au bord libre. Comme le montre la figure 2-2, le front de fissure est donné par
une droite OO' dont l'orientation par rapport au bord libre est décrite par un angle β. Notons
que lorsque 2π=β , on retrouve la configuration de Benthem. Le point d'intersection de cette
droite avec le bord libre correspond au vertex O. Bazant et Estenssoro conservent le système
de coordonnées sphériques ( )φθ,,r centré en O mais considèrent directement le champ de
déplacements sous la forme :
( ) ( ) ( )φθ=φθ=φθ= λλλ ,Hrw,,Grv,,Fru (2.12)
où u, v, w sont respectivement les déplacements dans les directions r, θ et φ.
Ils donnent une expression de l'énergie de déformation élastique et, par application du
théorème du minimum de l'énergie potentielle, rapportent le problème à la minimisation d'une
fonctionnelle (non présentée ici). La solution est alors recherchée en adoptant une approche
par éléments finis. La "discrétisation" se fait dans le plan (θ,φ) correspondant au rayon
unitaire, et les fonctions inconnues F, G, H sont données à l'intérieur de chaque élément par :
- 53 -
( ) ( ) ( )
( ) ( ) ( )
( ) ( ) ( )φθρ==φθρ=φθ
φθρ==φθρ=φθ
φθρ==φθρ=φθ
∑
∑
∑
,hH,HX,h,H
,gG,GX,g,G
,fF,FX,f,F
ipi
i
ii
p
ipi
i
ii
p
ipi
i
ii
p
(2.13)
où f, g et h sont des polynômes en θ et φ. La quantité θ×≡ρ sin1 représente la distance entre
le point M considéré et la ligne OO'. La décomposition ci-dessus est introduite uniquement
pour éviter dans les calculs une singularité possible des fonctions F, G et H quand 0→θ .
Pour une fissure les valeurs [ [...,23,1,21,0p = sont généralement présentes. Lorsque p<1
les fonctions F, G et H, que l'on doit déterminer numériquement, exhibent une singularité sur
la ligne θ = 0 qui affecte de façon défavorable la précision de calcul et la rapidité de
convergence vers une solution stable. Les auteurs font ainsi disparaître artificiellement cette
singularité en choisissant dans leurs calculs p=1/2 ou p=0 selon le cas. Les quantités Xi
représentent les valeurs nodales de f, g et h ou de façon équivalente les déplacements nodaux
sur la sphère unité. Les fonctions de forme données fi, gi et hi permettent d'interpoler les
fonctions précédentes à travers l'élément considéré.
Le maillage du plan (θ, φ), montré schématiquement figure 2-3, a été réalisé avec des
quadrilatères à 4 nœuds. Limités par les moyens informatiques de l'époque, les auteurs ont
pris des grilles comportant au maximum 8×16 éléments, soient 459 équations. Pour un
problème symétrique par rapport au plan de la fissure (mode I), le domaine se restreint à
π≤φ≤0 .
- 54 -
Surface libre
φ
θ
M
r
β
Front de Fissure
O
O/
Ω
Fissure
ρ
θ
φ
O
β = π/2O/
M
Figure 2-2 : Demi espace fissuré Ω avec un front de fissure OO' oblique
La prise en compte de (2.13) dans l'équation variationnelle conduit Bazant et
Estenssoro à un système algébrique linéaire et homogène pour les inconnues nodales Xi :
( ) ( )M,...,2,1i,0Xk j
M
1jij ==λ∑
=
(2.14)
Les coefficients de rigidité kij sont en fait des polynômes quadratiques en λ ce qui
réduit (2.14) au système simplifié suivant :
[ ] 0Xbba 2 =λ+λ+ (2.15)
où a, b, c sont toutes des matrices carrées M×M indépendantes de λ et X est le vecteur
inconnu composé des Xi. On retrouve un problème généralisé aux valeurs propres.
- 55 -
π/20 πφ
θ
β
π/2
(π-β)θlim
Qua 4
Figure 2-3 : Maillage du domaine avec θ limité par ( )φβ=θ − costantan 1lim
Pour un front de fissure perpendiculairement à la surface libre (β = π/2), le calcul de λ
conduit aux résultats de Benthem à 0.4% près, quel que soit ν compris entre 0 et 0.48. Les
auteurs sont également en désaccord avec les résultats de Kawai qui préconisent une
singularité plus forte. Lorsque la fissure est oblique (β ≠ π/2), λ dépend fortement de l'angle
d'inclinaison β, lui-même lié au coefficient de Poisson, comme le montre la figure 2-4. On
remarque une évolution monotone de la singularité du champ de contraintes (en rλ-1) pour les
angles obtus (β > π/2), singularité qui dépasse d'ailleurs assez rapidement la singularité 2D
classique en 21r − .
Des considérations énergétiques basées sur l'intégrale J ont conduit Bazant et
Estenssoro à établir un critère nécessaire à la propagation d'une fissure. A l'aide des relations
(2.4), l'intégrale J s'exprime de la façon suivante le long d'un petit cercle L de rayon ρ = ρ0 =
(r0 sinθ0) autour du front de fissure (voir figure 2-2) :
∫
φρ
∂∂
σ−εσ=L
0i
ijjijij dxundy
21J (2.16)
où φφρ= dcosdy 0 et ( ) ( )( ) θ=ρφ∂∂ρφ−ρ∂∂φ=∂∂ sinravec,sincosx . Près du vertex
on a également λ∝ ru i et donc 1i rrxu −λλ ∝ρ∝∂∂ . De plus 1
ijij r −λ∝ε∝σ , ce qui donne
pour J :
Lsur,rJ 120
−λ∝ (2.17)
- 56 -
Selon Bazant et Estenssoro la fissure ne peut se propager que si J (i.e. l'énergie de
création de surface pour un problème élastique) est bornée et non nulle. La relation ci dessus
montre qu'il en est ainsi pour 0r0 → lorsque :
( ) 2/1Re =λ (2.18)
Dans ce cas le facteur d'intensité de contraintes donné par Benthem est borné si on
remplace λ par (λ-1) pour être en accord avec les notations employées ici. Les auteurs en
arrivent à la conclusion qu'une fissure qui vient de se propager (ou se propage) présente un
front de fissure incliné par rapport à la surface libre : l'angle d'inclinaison β est déterminé par
la condition (2.18), comme on peut le voir figure 2-4 pour ν=0,3. Le matériau considéré est
bien sûr supposé élastique et homogène.
Figure 2-4 : Résultats obtenus par Bazant & Estenssoro [38] pour une fissure oblique
- 57 -
2.3 Vers une solution complète du problème ?
Au milieu des années 80, certainement influencés par les travaux de Kane et Mindlin
[47] qui traitaient de la vibration de plaques élastiques, Yang et Freund [48] ont estimé que
les contraintes transverses σ13 et σ23 intervenaient de façon significative dans les champs de
contraintes et de déformation en pointe de fissure. Le modèle théorique développé par ces
auteurs ne vise certes pas à caractériser précisément le champ de contraintes à l’intérieur de la
plaque mais propose plutôt une solution alternative au problème de rupture 3D. Les
hypothèses cinématiques retenues pour le champ de déplacements ui(x1,x2,x3) sont :
( ) ( ) ( )2,1,h/x,xwxux,xvu 213321 =α== αα (2.19)
où w représente le déplacement hors plan de la surface libre de la plaque d’épaisseur 2h.
L'expression (2.19) suppose qu'une ligne matérielle normale au plan médian de la plaque
avant chargement le reste également dans l'état déformé. En substituant (2.19) dans les
équations d'équilibre 3D et en intégrant par rapport à x3 entre les bornes h± , on se ramène
alors à un problème 2D plus simple où les équations d'équilibre prennent la forme suivante :
( )2,1,NR
0N
33,
,
=βα=
=
αα
βαβ (2.20)
où Nαβ représentent les contraintes planes résultantes obtenues après intégration et
( ) 3hh 33 dxxR ∫ σ= − αα les contraintes transverses. Les relations entre les quantités Nαβ, Rα et
les déplacements (2.19) ont été établies par Mindlin et Kane dans le cadre de l'élasticité
linéaire. Elles permettent notamment d'éliminer la dernière équation de (2.20) qui est
remplacée par :
11221
2
bwaNw,wNN
0w
+==−∇ε
=∇
(2.21)
où 2NN αα= est la contrainte plane résultante moyenne et a, b, ε sont des constantes
connues qui ont respectivement les dimensions suivantes : [MPa-1], [MPa-1] et [m]. L’étude de
Yang et Freund s'oriente donc vers la recherche d’une expression du déplacement hors plan w
au voisinage de la fissure vérifiant (2.21). La symétrie du problème et la présence de la fissure
- 58 -
imposent les conditions aux limites suivantes, écrites en introduisant les coordonnées
( ) ε= /)x,x(y,x 21 :
+∞<<=∂∂
<<∞−=
+∞<<∞−=∂∂
=
=
=
x00yN
0x,0N
x,0ywN
0y
22
0y12
(2.22)
Le domaine d'étude D proposé est un cercle de rayon r0, centré en pointe de fissure. Un
état de contraintes planes généralisées est supposé exister partout ailleurs dans la plaque.
Lorsque D est suffisamment petit, le champ de contraintes singulier 2D et le déplacement hors
plan correspondant w2D (voir chapitre 1) peuvent être pris comme conditions aux limites sur la
frontière extérieure de D. Des conditions supplémentaires, qui bornent notamment le
déplacement w, sont imposées en pointe de fissure. Soit finalement,
( ) ( )
( ) ( )1OwlimrONlim
w,fr2
Klimw,Nlim
0r
2/1
0r
D2
0rr
≈≈
θ
π=
→
−αβ
→
αβ→
αβ∞→ (2.23)
La résolution du système (2.21) avec les conditions (2.22) et (2.23) se fait au moyen
de transformations intégrales de Fourier. La solution obtenue pour w s'écrit sous une forme
intégrale réelle relativement compliquée. Elle assure non seulement une transition continue
vers la solution classique w2D mais borne également le déplacement en pointe de fissure. Son
évolution notée w0 suivant le prolongement de la fissure, est montrée figure 2-5 pour
différents coefficients de Poisson ν. Le déplacement w0 est adimensionné à l'aide d'une
constante C qui apparaît dans les calculs et dont l'expression est :
πε
ν=
2KhaC
2 (2.24)
Yang et Freund montrent également que w0 commence à s'écarter de la solution
singulière w2D lorsque la coordonnée radiale r est inférieure à la demi épaisseur de la plaque.
Les auteurs confirment ce résultat important en se référant à la publication de Rosakis et
Ravi-Chandar [49] qui date de la même époque. Ces derniers ont abordé le même problème
- 59 -
de rupture d'un point de vue expérimental. Ils utilisent la méthode des caustiques (détaillée au
chapitre suivant), qui est une méthode optique de mesure. Les auteurs mettent alors
clairement en évidence la présence d'effets tridimensionnels en pointe de fissure conduisant à
des erreurs importantes sur le calcul de K, lorsque r est inférieur à la demi épaisseur de la
plaque. Ils donnent ainsi une limite inférieure au domaine d'application de la théorie 2D de la
rupture (qui par ailleurs donne des résultats corrects au delà).
Figure 2-5 : Résultats obtenus par Yang et Freund [48] pour le déplacement hors plan w0
La prise en compte de ces effets tridimensionnels apparaît donc relativement
importante pour une étude sur la fissuration des plaques, et cela même pour des milieux peu
épais. A en croire le rapport présenté par Williams [50] en 1992 à l'occasion du 22ème
Symposium américain sur la rupture, le problème soulevé n'était pas complètement solutionné
bien que des progrès importants aient été faits dans le domaine. Williams soulignait
précisément, que pour les plaques d'épaisseur finie, il manquait une caractérisation définitive
de la singularité 3D du champ de contraintes élastiques et une extension 3D satisfaisante aux
calculs élasto-plastiques.
On peut citer enfin quelques travaux supplémentaires réalisés depuis. Ainsi l'étude de
Leung et Su [51] propose une solution analytique pour le champ de contraintes singulier près
du vertex pour un mode I de fissuration. Le problème posé suppose un front de fissure
- 60 -
perpendiculaire à la surface libre d'une plaque élastique. Les contraintes sont obtenues par
superposition d'une solution 3D de la forme ( )z,gr 2/1 θ− dans le système classique (r,θ,z) de
coordonnées cylindriques et d'une solution ( )φθ− ,fR 2/1 dans un système de coordonnées
sphériques identique à celui utilisé par Benthem. La première solution a été établie à l'origine
par Hartranft et Sih [52] en vue de généraliser l'expansion de Williams aux milieux épais ; elle
donne le champ de contraintes à l'intérieur de la plaque mais laisse cependant une traction
normale non nulle σIZZ sur la surface libre. Les auteurs construisent alors une solution limite
σIIij qui vérifie précisément σII
ZZ = -σIZZ sur la surface libre. Cette solution est obtenue en
considérant le problème semi-infini et à variables séparables. En retenant la formulation de
Green et Zerna [53], le champ de contraintes σIIij est représenté à l'aide d'une seule fonction
harmonique. On retrouve un problème similaire à celui traité par Benthem, à la différence
près que la singularité du champ de contraintes est indépendante du coefficient de Poisson
près du vertex. Les contraintes sur le bord libre sont d'ailleurs proportionnelles à r-1/2. Les
travaux de Su et Sun [54] préconisent le même type de singularité à partir d'une analyse
asymptotique 3D différente mais en considérant toujours le problème à variables séparables.
Leur travaux présentent le facteur d'intensité de contraintes comme une fonction de la
coordonnée z. Ils aboutissent cependant au résultat assez inattendu suivant : toutes les
composantes singulières du champ de contraintes et de déformations s'annulent sur la surface
libre !
Nous terminons cet inventaire (non exhaustif) en mentionnant une série de trois
publications écrites récemment par Guo Wanlin [55, 56, 57] sur le champ élastoplastique 3D
en pointe de fissure. Le front de fissure est supposé rectiligne et coupe perpendiculairement le
bord libre de la plaque. Ce travail nous semble très intéressant dans la mesure où il propose de
caractériser le champ de contraintes asymptotique 3D en pointe de fissure non seulement pour
des matériaux fragiles mais également pour les matériaux ductiles vérifiant la loi de
comportement générale de Ramberg-Osgood. Précisons simplement ici que cette loi introduit
un exposant n (i.e. le coefficient d'écrouissage) qui dépend uniquement du matériau. On a de
plus ∞≤≤ n1 où le cas limite n=1 correspond au matériau élastique. Une analyse "physique"
du problème conduit Wanlin à considérer la singularité comme une fonction de la contrainte
triaxiale ( )[ ]θθσ+σσ= rrZZZT et de n. A l'instar des chercheurs précédents, il présente une
théorie où les contraintes σij ne s'expriment plus sous une forme à variables séparables mais
de la façon suivante :
- 61 -
( ) ( ) z,,rj,iT,~rK zij2n,Tf
ijz θ=θσ=σ − (2.25)
où ( ) ( )zTz,,rTZ →θ quand 0r → et f est une fonction régulière de Tz et n. K est un facteur
d'amplitude. Les contraintes (2.25) dépendent des coordonnées cylindriques et sont obtenues
classiquement (voir relations (1.44)) à l'aide de la fonction de contrainte :
( )z)n,T(f T,~rK z θΦ=Φ (2.26)
Il faut noter que l'analyse asymptotique de Wanlin est relativement globale dans le
sens où elle ne se cantonne pas uniquement au proche voisinage du vertex. Elle suppose une
évolution possible de la puissance de la singularité suivant l'épaisseur de la plaque.
Il faut tenir compte des restrictions suivantes pour Tz :
=ν≤≤>≤≤
1nT01n5,0T0
z
z (2.27)
où ν est le coefficient de Poisson. Les cas limites Tz =0 et Tz = (ν ou 0,5) correspondent
respectivement à un état de contraintes planes et un état de déformations planes. Pour
différentes valeurs de Tz et n fixées, Wanlin détermine numériquement f en résolvant une
équation homogène non linéaire du 4ème ordre pour Φ~ . Cette équation est également une
équation aux valeurs propres non linéaire pour f. La méthode numérique employée est une
méthode de Runge-Kutta qui conduit Wanlin aux résultats de la table 2-2. Pour les cas limites,
il retrouve la singularité classique en r-1/(n+1) du champ HRR. Les résultats pour le cas
élastique n = 1 ne sont pas donnés.
Tz
n
3 3,6364 8 10
0,00 -0,250000 -0,215686 -0,111111 -0,090909
0,30 -0,237825 -0,203186 -0,099617 -0,080280
0,40 -0,237730 -0,203186 -0,101835 -0,082909
0,45 -0,242500 -0,208336 -0,104511 -0,086409
0,50 -0,250000 -0,215686 -0,111111 -0,090909
Table 2-2 : Puissance de la singularité (f-2) calculée en fonction du coefficient de
consolidation n et de Tz (d'après [56])
- 62 -
3. MODELISATION PAR ELEMENTS FINIS AU VOISINAGE DE LA FISSURE
Dans cette dernière partie, nous proposons de traiter le problème 3D de la fissuration
d'une plaque à l'aide d'un code d'éléments finis. Il apparaît en effet d'après ce qui précède qu'il
n'existe pas pour l'instant de théorie "suffisamment universelle" (et acceptée par tous),
réellement capable de décrire complètement les champs de contraintes et de déplacements 3D
proches du front de fissure. Cette remarque est d'autant plus vraie avec un front de fissure non
rectiligne (ce que l'on constate expérimentalement) et un matériau qui n'est pas parfaitement
fragile (ce qui est aussi le cas en pratique)…
3.1 Présentation rapide du code de calcul
Nous disposons au laboratoire du code de calcul Castem 2000 qui été développé par le
Département des Etudes Mécaniques et Thermiques du Commissariat français à l'Energie
Atomique (CEA). Ce code intègre bien sûr les routines de calcul et les grandeurs mécaniques
liés à la théorie même des éléments finis. Il propose également à l'utilisateur des fonctions de
construction de modèles et de traitement des résultats. Il est possible a priori de traiter des
problèmes de milieux continus statiques et dynamiques les plus variés (et bien d'autres
encore) bien que malheureusement la mise en œuvre ne soit pas toujours très simple pour
l'utilisateur novice…
Castem 2000 est constitué d'une série d'opérateurs (plus de 800) qui servent chacun à
l'exécution d'une seule opération. Ils constituent les instructions du langage de programmation
associé (appelé Gibiane) qui fait l'interface entre l'utilisateur et le programme de calcul.
Chaque opérateur s'applique sur des objets fournis en argument en vue de les modifier ou d'en
créer de nouveaux. Ces opérations élémentaires font intervenir des objets de différents types,
plus ou moins complexes suivant les informations qu'ils contiennent, que l'utilisateur doit
systématiquement nommer. Cette manipulation d'objets constitue en fait une caractéristique
essentielle du Gibiane et on trouve des objets qui contiennent des informations aussi diverses
que la loi de comportement du matériau, les caractéristiques géométriques du maillage, les
champs de forces, les contraintes, la matrice de rigidité, un nombre entier ou réel, etc…. Le
Gibiane offre en outre les instructions classiques d'un langage de programmation (boucles de
répétition, tests logiques, procédures…). Il revient à l'utilisateur d'élaborer un programme
structuré avec ce "macrolangage" qui réponde aux exigences du problème aux éléments finis
- 63 -
traité. Il apparaît toutefois qu'un tel programme peut toujours se scinder en plusieurs phases
successives, résumées sur l'organigramme de la figure 2-6.
PARAMETRES GENERAUXType d'analyse (2D, 3D, …)Type d'élémentsPropriétés du matériau…
ELABORATION DE LA GEOMETRIE(Objet de type maillage)
CHOIX DU MODELE MECANIQUEElastique, élastoplastique, …
DONNEES DU MATERIAU
RESOLUTION DU PROBLEMEDISCRETISE
POST-TRAITEMENTDES DONNEES
ASSEMBLAGE DE LA MATRICEDE RIGIDITE GLOBALE
(Objet de type rigidité)
CONDITIONS AUX LIMITESChargement et déplacement
Figure 2-6 : Organisation d'un programme avec Castem 2000
3.2 Approche numérique du problème de fissuration 3D
3.2.1 Choix du modèle mécanique
Afin de s'approcher au mieux des réalités expérimentales, nous avons retenu le modèle
plastique à écrouissage isotrope qui prend en compte un comportement mécanique non
linéaire du matériau étudié. Bien que les matériaux utilisés expérimentalement dans notre
mémoire soient considérés comme élastiques (c'est le cas du polyméthyl-méthacrylate dit
PMMA), il est possible ainsi de considérer un comportement élastique éventuellement non
linéaire en pointe de fissure. Le milieu étudié est bien sûr supposé suffisamment homogène.
Le modèle ci-dessus est disponible avec l'opérateur mate de Castem. Il requiert en entrée,
outre les paramètres relatifs au comportement élastique (i.e. le module d'Young E et le
- 64 -
coefficient de Poisson ν), la courbe contraintes-déformations obtenue par un essai de traction.
Cette courbe est donnée sous la forme d'un objet de type évolution avec en abscisse les
déformations et en ordonnées les contraintes. Elle doit contenir comme premier point, le point
(0,0) et comme second point le point correspondant à la limite élastique ( )elaela ,σε .
Les essais de traction ont été réalisés sur des éprouvettes en Altuglas CN qui est la
marque commerciale du PMMA. Il s'agit d'un polymère amorphe dont la température de
transition vitreuse est située dans la plage de 110°C à 135°C, si bien qu'à température
ambiante il est dur, rigide et se casse avec un faible allongement. Notons qu'il résiste bien à la
rayure dans les conditions normales d'usinage et qu'il est surtout connu pour ses propriétés
optiques exceptionnelles. Ce polymère est en effet d'une transparence remarquable : 92% de
transmission lumineuse dans le visible. Ce matériau est généralement utilisé dans les études
mécaniques classiques en élasticité.
La courbe contraintes-déformations est obtenue à partir d'une méthode optique
développée dans le laboratoire au sein de l'équipe de photomécanique : le suivi de taches [58].
Selon cette méthode, on réalise manuellement quatre marqueurs disposés sur la surface
latérale de l'éprouvette étudiée (voir figure 2-7). Pour chaque état de charge, ils sont recueillis
par une caméra CCD et transformées par la suite en niveaux de gris entre 0 et 255. Un logiciel
associé, développé notamment par Dupré et Valle [59], repère alors pour chaque état de
charge les positions )4..1k(),y,x( kk = des taches (cf. équations (2.28)). La base de mesure
est délimitée par ces taches et vaut en pratique 5mm × 5mm. Notons que l'endroit étudié
importe peu mais qu'en revanche la déformation est considérée homogène sur la base de
mesure. Les déformations ( )xyyyxx ,, εεε associées sont calculées à partir de la théorie des
grandes déformations appliquée à un parallélogramme élémentaire (déformable) dont les
milieux des côtés correspondent aux taches précédentes. Un calcul précis en temps réel
nécessite évidemment un repérage correct des taches en question. Le logiciel offre pour cela à
l'utilisateur la possibilité d'entourer initialement chacune des taches d'une petite fenêtre de
calcul (qui se déplace avec elle) de dimensions nXk et nYk donnée en nombre de pixels. En
considérant le barycentre des intensités lumineuses I(xi, yj) (exprimées en niveau de gris)
prises en chacun des pixels (xi, yj) d'une fenêtre de calcul, on a (voir figure 2-7) :
- 65 -
( )( )
( )( )
( )( )
( )( )∑∑
∑∑
∑∑
∑∑
= =
= =
= =
= =
−
−
+=−
−
+=Xk Yk
Xk Yk
Xk Yk
Xk Yk
n
1i
n
1jsji
n
1i
n
1jsjij
kkn
1i
n
1jsji
n
1i
n
1jsjii
kk
Iy,xI
Iy,xIyYy,
Iy,xI
Iy,xIxXx (2.28)
où Is est un seuil d'intensité lumineuse permettant d'éliminer le bruit de fond. Xk et Yk
représentent les positions supérieures gauches des fenêtres de calcul.
PMMA
σ
σ
4 marqueurs
Yk
Xk
yk
xk
OX
OY
Zone d'étude (image donnée par la CCD)
Fenêtre de calcul
Figure 2-7 : Principe de la méthode du suivi de taches.
Facile à mettre en œuvre et s'accommodant de n'importe quel état de surface, cette
méthode donne une précision sur les déformations de l'ordre de 2.10-4. Elle conduit pour le
PMMA à la courbe contraintes-déformations figure 2-8 obtenue par Tie Bie et Dupré [60] lors
d'une campagne d'essais réalisés sur différents types de matériaux. Ces derniers ont
notamment étudié les échanges thermiques associés à l'aide d'une caméra infrarouge. Ils en
concluent de façon générale que le passage du domaine élastique au domaine plastique
correspond à une modification de l'évolution de la courbe de température [60]. On s'aperçoit
en effet figure 2-8 que dans le domaine élastique le PMMA se refroidit constamment,
tendance qui s'inverse complètement dans la zone plastique. Les auteurs proposent une
évaluation possible de la limite élastique σela du matériau pour une valeur de ε qui se situe peu
avant le changement de courbure de la courbe de température. Nous prendrons pour notre
modèle ( ) ( )MPa50;035,0, elaela =σε et ( ) ( )38,0;MPa2600,E =ν . Les données
- 66 -
expérimentales précédentes sont alors intégrées dans un objet de type évolution, interprétable
par Castem 2000.
-0.04 -0.02 0 0.02 0.04 0.06 0.08
ε-10
0
10
20
30
40
50
60
σ (M
Pa)
-1
-0.8
-0.6
-0.4
-0.2
0
θ =
∆T (°
C)
θ−εy
σ−εyσ−εx
O
A
CB
Figure 2-8 : Résultats expérimentaux obtenus avec le PMMA d'après [60]
3.2.2 Détermination de la zone d'étude, élaboration du maillage 3D
L'étude d'un problème de fissuration 3D requiert une modélisation géométrique
adaptée. On pourrait bien sûr mailler la plaque fissurée dans son intégralité comme nous
l'avions fait pour l'étude 2D au chapitre précédent. Il va sans dire, que même avec les
éléments cubiques à 8 nœuds (cub8), le problème 3D exigerait un nombre de nœuds et donc
d'équations à traiter relativement considérable. De plus les champs de contraintes et de
déplacements réguliers situés loin de la zone singulière (et qu'une étude classique 2D suffit
d'ailleurs à caractériser) ne présentent pas ici particulièrement d'intérêt. Au contraire, dans
notre cas il est important de réduire la zone à mailler au proche voisinage de la singularité afin
d'obtenir un maximum "d'informations fiables" près de cet endroit.
La modélisation retenue fait suite à celle proposée par Nakamura et Parks [42] pour
l'étude d'une plaque élastique mince fissurée (sollicitée en mode I) présentant un front de
fissure rectiligne perpendiculaire à la surface libre. L'adjectif mince peut sembler assez
imprécis. Il suppose néanmoins une épaisseur suffisamment petite de la plaque devant ses
dimensions planes pour assurer l'existence d'un état de contraintes essentiellement planes en
dehors de la zone 3D. Autrement dit la zone 3D reste confinée au voisinage immédiat de la
fissure et le champ de contraintes élastiques peut se représenter à l'aide du développement en
série de Williams à l'extérieur.
On isole donc un cylindre de matière entourant la pointe de la fissure d'une plaque
d'épaisseur t, comme le montre la figure 2-9 ci-dessous. Le front de fissure (pour l'instant
rectiligne) est situé le long de l'axe X3. Il limite le plan fissuré qui correspond donc à
- 67 -
( )0x,0x 21 =≤ . Le cylindre considéré a un rayon maximal rmax qui vaut cinq fois l'épaisseur
de la plaque (rmax/t=5). Nous justifierons ce choix plus loin lors de l'établissement des
conditions aux limites associées.
Figure 2-9 : Représentation schématique de la région étudiée en pointe de fissure
Pour l'analyse par éléments finis, on remarque que seul un quart du cylindre a
réellement besoin d'être maillé. Cette région correspond à la zone d'étude V0 montrée figure
2- 9. En effet si on considère un chargement uniaxial σ perpendiculaire à la surface fissurée,
le problème est symétrique par rapport aux plans de la fissure et du ligament (x2 = 0). Il
présente de plus une symétrie réflective par rapport au plan médian de la plaque (x3 = 0). Le
maillage de cette région est construit avec des hexaèdres trilinéaires à 8 nœuds (i.e. des
briques). Dans un plan perpendiculaire au front de fissure (la surface libre par exemple) on
construit un maillage rayonnant comme on peut le voir figure 2-10. La taille des éléments
augmente de plus graduellement avec la distance radiale r en s'éloignant de la pointe de
fissure mais reste constante suivant la coordonnée angulaire θ. L'incrément angulaire θ∆ de
chaque élément vaut 18/π . Ce maillage est répété identiquement du plan médian (x3 = 0) à la
surface libre (x3 = t/2) suivant l'axe X3. Afin de s'adapter aux variations importantes des
grandeurs mécaniques près de la surface libre, l'épaisseur des éléments cubiques ainsi
- 68 -
construits se réduit progressivement suivant x3 à l'approche de la surface libre (voir figure 2-
10).
Il convient de préciser que pour la structure informatique de Castem 2000, basée sur le
concept d'objets, la phase de génération du modèle géométrique correspond à la création d'une
série d'objets de type maillage, qui une fois réunis, constituent l'ensemble du domaine
discrétisé. Les objets de type maillage sont en fait des points (objet le plus élémentaire), des
lignes, des surfaces et des volumes pour lesquels il existe des opérateurs permettant non
seulement leur construction mais également d'effectuer des opérations géométriques sur ces
mêmes objets : rotations, translations, intersections, inclusions, etc.… Un objet géométrique,
quel qu'il soit, n'existe que sous forme discrétisée et c'est donc dès la phase de construction de
la géométrie qu'est effectuée la discrétisation du domaine d'analyse en éléments géométriques
élémentaires. Ainsi une droite est toujours construite à partir de ses deux points extrêmes,
auxquels on associe un nombre réel correspondant à la densité locale au point. Elle est alors
automatiquement subdivisée en un certain nombre Nradial choisi de segments dont les
extrémités correspondent aux points internes qui ne sont généralement pas nommés. La
longueur des segments dépend des densités affectées aux points extrêmes et constitue en fait
une progression géométrique entre les valeurs de ces densités. Précisons que seul le rapport R
des densités respectives de ces deux points influence réellement la taille des segments
intermédiaires.
Dans notre cas un maillage rayonnant de surface est créé par rotation d'une droite dont
les points extrêmes se situent sur le front de fissure et sur le rayon extérieur du cylindre. Pour
notre étude, le rapport des densités (R ≡ Rradial) et Nradial sont fixés respectivement à 1,7 et 28.
La rotation prise entre 0=θ et π=θ donne ici 18 secteurs angulaires de même taille
(i.e. Rangulaire=1) composés de quadrilatères à quatre nœuds (qua4) générés automatiquement.
Rappelons que le type d'éléments utilisés et la dimension du problème sont à définir dans les
paramètres généraux au début du programme. L'opérateur trans appliqué à la surface ainsi
créée permet d'obtenir le volume de la figure 2-10. Cet opérateur réalise une translation de la
surface selon une droite définie à nouveau par ses deux points extrêmes avec des densités
imposées et un certain nombre Népaisseur de segments intermédiaires. Les points en question
correspondent au vertex V et au centre Ce de la plaque. On a pris 1,5 et 15 respectivement
pour le rapport de densité Répaisseur et pour Népaisseur. Cette opération engendre donc une
succession de demi cylindres intermédiaires constitués d'éléments cubiques à 8 nœuds (cub8)
- 69 -
(i.e. de couches d'éléments), réunis automatiquement pour former le volume d'étude V0. Nous
avons donc au total un maillage constitué de 7560 éléments (28×18×15). On obtient au total
8528 nœuds en éliminant les (18×16) nœuds doubles (sur le front) de fissure résultants de la
rotation. Notons enfin que la numérotation relative aux nœuds et aux éléments est totalement
transparente pour l'utilisateur.
Figure 2-10 : Maillage du quart de cylindre (front de fissure rectiligne V-Ce)
Un maillage de ce type, relativement dense en pointe de fissure et a priori bien adapté
au voisinage du vertex, a été utilisé par Nakamura et Parks en 1988 pour leur étude générale
sur la fissuration 3D des plaques élastiques. Il est établi néanmoins à partir d'un front de
fissure rectiligne qui coupe perpendiculairement la surface libre. Nous avons choisi de
"coller" au maximum à l'étude expérimentale présentée au chapitre 4. On s'aperçoit, pour les
plaques en PMMA par exemple, que les fronts de fissure sont de manière générale de forme
parabolique symétrique par rapport au plan médian. Ces fissures sont obtenues à partir d'une
entaille initiale que l'on a fait progresser sous un chargement en mode I (ce processus est
détaillé au chapitre 4). Par conséquent il parait nécessaire de modifier le maillage précédent,
afin d'y intégrer un front de fissure parabolique. La construction du volume discrétisé n'est dès
lors plus si simple (même avec le Gibiane…) et à notre connaissance nous sommes les
premiers à l'avoir entrepris pour ce genre de problème. Il s'obtient à partir de trois volumes
distincts qui sont ensuite assemblés.
Le premier (ou volume extérieur noté V1) ressemble à celui de la figure 2-10 auquel
est retranché un petit cylindre intérieur de rayon rmin1. V1 est construit de la même façon que
- 70 -
V0, à la différence près que l'un des points extrêmes de la droite initiale (servant à la
construction) se trouve sur le cercle de rayon rmin1. On prend ici
( ) 2700)151810(NNN 1épaisseur
1angulaire
1radial =××=×× éléments, soit (11×19×16)=3334 nœuds.
Les rapports de densité sont donnés par ( ) )5,1;1;5,1(R,R,R 1épaisseur
1angulaire
1radial = .
rmin1
Ce1
X3
X1
V
Cex2=0
V1
Pint
rmax2
xmax
+t/2V3 V2
ε
Plan fissuré
β
Plan ligament(matériau)
-t/2
xmax
Figure 2-11 : Représentation schématique du front de fissure parabolique (x2 = 0)
En vue de créer le volume V2 directement associé au front de fissure parabolique, on
se réfère tout d'abord à la figure 2-11. On y montre schématiquement une vue en coupe de V1
suivant le plan x2 =0, où apparaît également le front de fissure parabolique. Cette ligne
parabolique est aussi pour Castem un objet de type maillage qui est obtenu à l'aide de
l'opérateur parabole à qui on fournit en argument les trois points : Ce1, Pint, V. Le point Ce1
d'abscisse x1 = xmax est situé sur la ligne médiane (x3 = 0 et x2 = 0). V correspond au vertex.
Pint est un point intérieur de cordonnées ( )
− courb11
2t,0,x max qui oriente la tangente à la
parabole en V. Comme pour les droites, il est possible d'associer aux points extrêmes V et
Ce1 une densité et de spécifier le nombre 2épaisseurN de segments de la ligne. Les deux
paramètres xmax et courb suffisent donc à définir le front de fissure parabolique. Physiquement
xmax correspond à l'avancement maximal de la fissure dans la matière qui a lieu ici au niveau
du plan médian de la plaque. En s'approchant du vertex V, nous retrouvons le problème limite
de Bazant et Estenssoro [38] où leur front de fissure oblique s'identifie à la tangente
- 71 -
précédente. Nous pouvons alors relier l'angle d'inclinaison β aux paramètres courb et xmax de
la façon suivante :
+
π=β −
2tcourbx
tg2
max1 (2.29)
On considère ensuite un maillage rayonnant de surface qualitativement identique à
celui qui a été utilisé pour construire V0 et dont les caractéristiques sont les suivantes : le
rayon maximum est rmax2 , ( ) ( )1;5,1R,R 2angulaire
2radial = et ( ) ( )18;10N,N 2
angulaire2radial = . Le
volume V2 est engendré par translation de la surface précédente parallèlement à la ligne
parabolique. On prend 4,1R 2épaisseur = et 15N2
épaisseur = . On crée ainsi une succession de 15
couches composées de cub8, dont les épaisseurs se réduisent à l'approche du bord libre. V2
comporte donc au total 2700 éléments, soit 3056 nœuds (comme pour V0 il faut retrancher les
nœuds doubles sur le front de fissure). Une représentation schématique en coupe de V2 est
montrée en pointillé sur la figure 2-11. Pour que les deux maillages ne se chevauchent pas, il
convient de respecter la relation suivante :
( ) 0,rxr 2maxmax1min >εε++≥ (2.30)
où ε est un nombre réel positif fixé en général à 0,05 pour le calcul.
Le dernier volume V3 (ou volume de raccord) occupe l'espace entre V1 et V2. Il se
construit avec l'opérateur volu qui raccorde les maillages surfaciques intérieur et extérieur de
V1 et V2 respectivement. Notons que cet opérateur permet de contrôler les densités radiales 3radialR extrêmes et le nombre radial 3
radialN de segments. Il suppose une structure de grille
pour les deux maillages surfaciques précédents. Les caractéristiques de V3 sont les suivantes
( ) )8;3,1(N,R 3radial
3radial = , soit 2160 éléments. V3 contient 2736 nœuds dont 608 en commun
avec V1 et V2.
L'assemblage de ces trois volumes conduit donc à un domaine d'étude discrétisé
3
1iiVV
=
= comportant 7560 éléments, soit au total 8528 nœuds. On montre figure 2-12 une
partie de V au proche voisinage de la fissure pour ( ) ( )8;3,0;6courb;x;t max = . Le maillage
- 72 -
ainsi réalisé est donc rayonnant tout le long du front de fissure et se densifie également
suivant l'épaisseur à l'approche de la surface libre.
Figure 2-12 : Maillage du quart de cylindre avec un front de fissure parabolique.
3.2.3 Application des conditions aux limites
Sur les plans ligament et médian (x3=0) respectivement notés (Plig) et (Pmed) des
volumes V0 et V, les symétries considérées imposent les seules conditions suivantes pour le
déplacement :
( ) ( )( ) ( )
∈≡∈≡
med3213
lig3212
Px,x,xM,0MuPx,x,xM,0Mu
(2.31)
où u2 et u3 sont les composantes cartésiennes du déplacement dans le repère de la figure 2- 9.
Notons que (Plig) n'est bien sûr pas identique pour V0 et V. On réalise assez facilement les
conditions (2.31) avec Castem 2000 à l'aide d'un opérateur qui permet de bloquer les nœuds
du maillage appartenant aux plans (Plig) et (Pmed) dans la ou les direction(s) définie(s) par
l'utilisateur. Néanmoins pour ce faire, la difficulté principale est de référencer ces plans
comme des objets (de type maillage) nommés et reconnus par le logiciel au même titre que V0
et V…
- 73 -
Pour les conditions aux limites en chargement nous supposons l'existence d'un état de
contraintes planes à l'extérieur des deux volumes (cf. problème de Yang et Freund [48]). Nous
savons de plus qu'ils sont tous deux limités extérieurement par la même "enveloppe"
cylindrique de rayon rmax que l'on appelle ici pour simplifier (Pcyl). En ce qui concerne
l'application du chargement extérieur, il n'y a donc pas de "distinction" entre les deux volumes
maillés V0 et V. Rappelons que pour les éléments finis le chargement surfacique extérieur est
toujours exprimé par des forces nodales équivalentes appliquées aux nœuds de la frontière du
domaine examiné. On considère dans notre cas les forces nodales correspondant au champ de
contraintes asymptotique 2D (voir équations (1.50)) aux nœuds de (Pcyl). Au début du chapitre
(équations (2.3)), nous avons vu que le champ 2D classique diffère très peu de la solution
corrigée établie par Timoshenko [43] si la distance radiale est supérieure à cinq fois
l'épaisseur de la plaque. Selon Nakamura et Parks [42], ce résultat justifie pleinement le choix
de rmax et facilite ainsi la programmation du chargement extérieur à cet endroit en prenant les
équations simplifiées (1.50) et (1.51) au lieu de (2.3). Pour calculer les forces nodales, nous
avons considéré chacun des éléments de surface (i.e. des quadrilatères qua4) constituant le
cylindre extérieur (Pcyl). Avec la normale extérieure [ ]0sincosn θθ à (Pcyl) en tout point,
l'effort élémentaire pour chaque élément est obtenu comme suit :
( ) ( )[ ]
( ) ( )[ ]
θθθσ+θθσ
θθθσ+θθσ
=
= ∫
∫
0
dzdrsinz,,rcosz,,r
dzdrsinz,,rcosz,,r
0ff
felem
maxmax22max12
elemmaxmax12max11
elem2
elem1
elem
(2.32)
L'opérateur fsur permet alors de calculer les forces nodales élémentaires équivalentes à elemf
appliquées sur les sommets du quadrilatère. Par sommation sur l'ensemble des
quadrilatères constituant (Pcyl), nous obtenons les forces nodales globales sur (Pcyl)
équivalentes au chargement extérieur imposé.
Notons que Castem 2000 peut réaliser cette opération sur (Pcyl) directement,
uniquement avec des chargements de surface uniformément répartis. Ce n'est évidemment pas
le cas pour nous, où l'effort élémentaire obtenu après intégration dépend des variables θ et z et
donc de l'élément considéré. On s'aperçoit enfin que "charger extérieurement une éprouvette
de type SEN (selon le mode I)" revient uniquement ici à préciser lors d'un calcul les grandeurs
- 74 -
mécaniques suivantes : le facteur d'intensité de contraintes K et la contrainte transverse T pris
maintenant comme paramètres.
3.2.4 Résolution du problème
Il s'agit donc de rechercher le champ discrétisé de déplacements qui résulte de
l'application d'un ensemble de conditions aux limites, pour un nombre fini de points nodaux
du domaine étudié. Ces conditions aux limites se présentent ici à la fois sous la forme de
forces nodales externes appliquées et de déplacements imposés sur la frontière de V0 ou V.
En pratique, pour obtenir le système résolvant complet il faut procéder en deux étapes
successives : la première consiste à créer un premier objet, contenant la matrice de rigidité du
système libre, avec l'opérateur rigi à qui l'on fournit en argument le modèle mécanique et les
données du matériau utilisé. Il faut noter que les calculs matriciels associés sont totalement
transparents pour l'utilisateur. Il suffit ensuite d'unir explicitement (opérateur de fusion et)
l'objet précédent avec celui résultant des conditions aux limites en déplacement. Cette
opération crée un objet obj1. La phase de définition des chargements externes correspond à la
création d'un autre objet obj2 de type champ par point. La résolution du problème (i.e. la
détermination des déplacements nodaux dans tout le domaine) se fait alors avec un opérateur
qui reçoit en argument obj1 et obj2.
Notre modèle requiert finalement cinq paramètres en entrée, outre ceux nécessaires
bien sûr à caractériser le matériau. Trois d'entre eux (t, xmax, courb) servent à définir la
géométrie elle-même : à savoir l'épaisseur de la plaque et la forme du front de fissure. Les
deux autres (K et T) rendent compte du chargement extérieur.
3.3 Résultats de l'étude numérique
3.3.1 Quelques remarques préliminaires
Le programme permet tout d'abord de choisir entre un front de fissure rectiligne ou
parabolique. Les résultats qui suivent sont établis avec une plaque d'épaisseur t = 6mm en
PPMA. La valeur du facteur d'intensité de contraintes K considéré est de mmMPa11,22 . Ce
choix est fait en vue d'une comparaison avec l'étude expérimentale présentée au chapitre 4. Il
en est de même pour les coefficients xmax et courb qui valent respectivement 0,3 et 8.
- 75 -
Nous avons vu au premier chapitre que T résultait directement des dimensions planes
de la plaque, via le facteur de biaxialité B (cf. table 1-2). Il apparaît dans les expressions 2D
du champ de contraintes et du déplacement hors plan u3 uniquement sous la forme d'un terme
constant. Les calculs entrepris pour différentes valeurs numériques de T nous ont montré en
fait qu'il n'influençait pas l'évolution de ces grandeurs mécaniques dans les zones 3D et 2D.
On s'attendait par ailleurs intuitivement à cette conclusion, étant donné que T se présente
comme une contrainte uniforme dans tout le domaine d'étude. Sans perdre de généralité
comme on le verra plus loin, il suffit de considérer T = 0 dans les calculs.
Il convient de remarquer que la condition (1.64) est toujours valable pour le champ 2D
en dehors de la zone 3D. On constate par conséquent que les calculs (qui ne tiennent pas
compte de la longueur de la fissure) ne sont physiquement acceptables que si 50at ≤ en
approchant la frontière r = rmax de V0 et V. En pratique ce n'est certes pas le cas et on a plutôt
1,0at ≅ . Nous devrons donc accorder une signification aux calculs lorsque r/t est
approximativement inférieur à 1. Cette nouvelle zone d'étude suffit à mettre en évidence les
effets 3D et permettre une comparaison ultérieure avec les données expérimentales.
3.3.2 Déplacement hors plan u3 de la surface libre
Nous donnons figure 2-13 les isovaleurs du déplacement hors plan u3 calculées avec
T=0 sur la surface libre par le logiciel, pour un front de fissure rectiligne. A chaque couleur
est affectée une valeur constante du déplacement u3. On dresse ainsi une cartographie du relief
de la surface libre en pointe de fissure.
- 76 -
Figure 2-13 : Isovaleurs du déplacement u3 en [mm] sur la surface libre
(front de fissure rectiligne)
L'évolution de u3 est également représentée figures 2-14a et 2-14b respectivement
pour un front de fissure rectiligne et parabolique, suivant quatre demi-droites issues de la
pointe de la fissure et dont l'orientation angulaire est définie par θ = 0°, 40°, 90° et 130.
Comme en témoignent les figures 2-14c et 2-14d, les courbes obtenues avec différentes
valeurs de T se déduisent des précédentes par de simples décalages verticaux. Ces décalages
sont donnés quantitativement par le terme constant de l'expression (1.40) en replaçant σ par T.
On peut donc se restreindre au cas T = 0, les autres en découlent facilement. Les petites croix
correspondent aux opposés des valeurs de u3 calculées par interpolation sur les demi-droites
précédentes. Les courbes sont données en fonction de la coordonnée radiale normalisée r/t. En
pointillé, apparaissent les évolutions singulières du déplacement hors plan prédit par la théorie
2D (i.e. équations (1.40)) pour θ = 0°, 40°, 90° et 130°. Sur les figures 2-14e et 2-14f, on
retrouve les déplacements hors plan respectifs des figures 2-14a et 2-14b, normalisés par la
quantité
π
ν
2EtK I . Notons que dans ce cas, on a ( ) 12/t;0;1t/ru norm3 == .
Précisons que Castem 2000 offre la possibilité d'interpoler une composante d'un objet
de type champ par point sur un maillage défini par l'utilisateur. Ce maillage est constitué ici
des demi-droites précédentes qu'il faut caractériser, c'est à dire donner les densités aux points
- 77 -
extrêmes, le nombre Nint de segments constitutifs comme au paragraphe 3-2-2. Le rapport des
densités noté Rint = 1,3 et Nint = 40 sur les figures 2-14a-f. L'interpolation se fait alors aux
nœuds ainsi créés. Il en résulte ici l'objet de type champ par point, à une composante u3 dont
l'évolution le long des lignes de nœuds est réalisée par l'opérateur evol. En abscisse figure
ainsi la coordonnée radiale (normalisée) de chaque nœud et en ordonnée la valeur de la
composante associée.
Figure 2-14a : Front de fissure rectiligne, T = 0 [MPa]
Figure 2-14b : Front de fissure parabolique, T = 0 [MPa]
- 78 -
Figure 2-14c : Front de fissure rectiligne, T = 5 [MPa]
Figure 2-14d : Front de fissure parabolique, T = 3 [MPa]
- 79 -
Figure 2-14e : u3 normalisé avec un front de fissure rectiligne (T = 0)
Figure 2-14f : u3 normalisé avec un front de fissure parabolique (T = 0)
Plusieurs remarques peuvent être faites en observant les figures 2-14a-f. Tout d'abord
nous notons que l'analyse par éléments finis donne un déplacement hors plan borné. Quel que
soit l'angle θ, ce dernier évolue de façon monotone vers une même quantité non nulle lorsque
- 80 -
r/t tend vers 0. La solution 2D classique est retrouvée lorsque r/t est supérieur à 0,5 en accord
avec l'étude expérimentale de Rosakis et Ravi-Chandar [49]. On note néanmoins une
différence avec la solution de Yang et Freund [48] qui prévoit une évolution non monotone du
déplacement en pointe de fissure (voir figure 2-5).
On montre ensuite que la forme du front de fissure peut accentuer de façon
considérable l'évolution de u3 en pointe de fissure, alors que son influence plus loin est
négligeable. A partir des expressions normalisées de u3 figures 2-14e et f, on note ainsi une
différence de l'ordre de 8% entre les deux valeurs prévues lorsque r/t est nul. Il faut rappeler
que le front de fissure est défini par les deux paramètres xmax et courb qui valent ici
respectivement 0,3 et 8. Si on fait prendre par exemple à courb toute une série de valeurs
entre 0 et 8, on obtient une série de courbes distinctes et ordonnées (non présentées par souci
de concision) comprises entre celles des deux figures précédentes. Il en est de même pour
xmax. Nous verrons au chapitre 4 que les données expérimentales permettent d'identifier ces
deux paramètres, justifiant ainsi les choix numériques précédents. Nous terminons, par une
estimation du rayon approximatif rp de la zone plastique en se référant à l'expression (1.59).
Avec les valeurs numériques prises dans cette étude, on a rp/t ≅ 0,005 qui est à mettre en
rapport avec la taille de la zone 3D (i.e. r3D/t ≅ 0,5). La zone plastique est ainsi négligeable en
comparaison de la zone 3D.
3.3.3 Evolution du coefficient de triaxialité Tz sur le plan ligament
Nous adoptons la représentation suivante du coefficient de triaxialité Tz :
( ) ( )[ ]yyxxZZ3Z x,,rT σ+σσν=θ (2.33)
On retrouve les deux cas limites (l'état de contraintes planes) et (l'état de déformations
planes) lorsque respectivement Tz = 0 et Tz =1. Dans le cas général Tz peut donc évoluer
entre les deux bornes précédentes. Nous avons calculé les isovaleurs de Tz sur le plan
ligament dans le cas du front de fissure rectiligne et dans celui du front parabolique. Les
résultats en pointe de fissure sont présentés figures 2-15a et 2-15b. Lorsque r/t est supérieur à
0,5 on retrouve un état de contraintes planes constant classiquement admis pour les plaques
minces. Il est intéressant d'observer que l'on tend vers un état de déformations planes dans les
deux cas, en s'approchant du front de fissure. Il est maintenant possible de caractériser la zone
3D qui se présente donc comme une zone d'évolution du paramètre triaxial Tz entre ces deux
états de contraintes.
- 81 -
Figure 2-15a : Evolution de la triaxialité sur le plan ligament en pointe de fissure
(front de fissure rectiligne)
Figure 2-15b : Evolution de la triaxialité sur le plan ligament en pointe de fissure
(front de fissure parabolique)
- 82 -
Les valeurs négatives enregistrées pour Tz correspondent, dans les deux cas, à une
zone très petite située à l'intérieur de l'élément adjacent au vertex et au bord libre (élément
limitrophe sur les figures 2-15). Elles ne semblent pas traduire un phénomène physique
particulier mais résultent plutôt de la difficulté à tenir compte au sein de l'élément des
modifications brutales des conditions aux limites près de la singularité.
Nous donnons précisément figures 2-16a, b et c les évolutions du paramètre triaxial Tz
suivant l'épaisseur de la plaque avec θ = 0°, pour différentes valeurs de r/t. En abscisse figure
la coordonnée adimensionnée x3/t. La façon de procéder est la même que pour u3 ; on
interpole Tz le long d'une ligne de nœuds situés sur les droites précédentes. Nous avons choisi
r/t > (xmax/t) afin de ne pas "traverser" le front de fissure parabolique. La tendance générale
pour Tz décrite auparavant est retrouvée. On notera une similitude entre les résultats de la
figure 2-16a et 2-16c. Les valeurs de r/t dans le dernier cas correspondent à celles données
figure 2-16a, auxquelles on a retranché (xmax/t). L'évolution de Tz juste en aval du front de
fissure parabolique est alors quasiment identique à celle prévue dans le cas rectiligne.
L'approximation par un front de fissure rectiligne "tangent" semble donc justifiée à cet
endroit, du moins lorsque x3/t tend vers 0. Précisons enfin que les résultats obtenus, figures
2-16b et c, sont en accord avec ceux présentés par Nakamura [42].
Figure 2-16a : Evolution de la triaxialité suivant l'épaisseur
(front de fissure parabolique)
- 83 -
2-16b
2-16c
Figures 2-16b et c : Evolution de la triaxialité suivant l'épaisseur
(front de fissure rectiligne)
3.3.4 Evolution de la contrainte σ22 sur la surface libre
La figure 2-17a montre l'évolution de la contrainte σ22 sur la surface libre suivant les
directions angulaires θ = 0°, 40°, 90° et 130°, pour un front de fissure rectiligne. En prenant la
même échelle, on obtient qualitativement la même chose pour le front de fissure parabolique.
Son influence sur la contrainte σ22 est néanmoins montrée plus loin pour θ = 0°. Le tracé a été
effectué avec 60 nœuds d'interpolation et un rapport de densité Rint = 1,1. On retrouve dans les
deux cas les solutions correspondantes 2D en pointillés (voir équations (1.39)), mais cette fois
un peu au delà de r/t = 0,5. Il est possible également d'obtenir une comparaison avec les
- 84 -
contraintes planes "exactes" (2.3) qui résultent de l'analyse de Timoshenko [43]. Pour
l'orientation particulière θ = 0°, on a simplement 22σ≡σθθ . Dans ce cas, la contrainte
classique 2D s'écrit r2K ID2
22 π=σ et il vient d'après (2.3) :
( )
( )
23
D222
322
rx
1431
x,0,r
ν+ν
−=σ
σ (2.34)
Pour θ = 0°, x3 = t/2 et un front de fissure rectiligne, nous avons représenté figure 2-
17b la contrainte σ22 calculée par le logiciel et normalisée par D222σ . L'évolution théorique
(2.34) est donnée en pointillés, pour x3 = t/2. On constate ainsi que la solution exacte 2D
reproduit correctement la solution calculée pour r/t>0,7-0,8. Une représentation similaire est
proposée figure 2-17 c avec le front de fissure parabolique. Ce dernier induit clairement une
élévation de la contrainte normalisée qui s'accentue (comme on peut le constater en r/t = 0,05
par exemple) lorsque l'on se rapproche du vertex. Notons que dans la zone 2D, la contrainte
est relativement peu perturbée.
Figure 2-17a : Représentation de la contrainte σ22 sur la surface libre
(front de fissure rectiligne)
- 85 -
Figure 2-17b : Comparaison de la solution calculée avec la solution 2D exacte
pour θ = 0° (front de fissure rectiligne)
Figure 2-17c : Comparaison de la solution calculée avec la solution 2D exacte
pour θ = 0° (front de fissure parabolique)
- 86 -
3.3.5 Intégrale J et facteur d'intensité de contraintes en zone 3D
Au chapitre 1 pour les milieux fragiles, nous avions exprimé le taux de restitution de
l'énergie sous forme d'une intégrale de contour définie par (1.16). Cette identification résultait
de la propriété d'indépendance de cette intégrale vis à vis du contour d'intégration. Sur le plan
numérique, une solution précise et efficace pour calculer les intégrales de contour consiste à
les transformer en des intégrales de volume en utilisant la transformation de Green-Gauss.
Dans la littérature on peut mentionner les travaux de Lorenzy [61] qui proposent une telle
transformation pour une configuration arbitraire de fissure 3D. La procédure G_theta
proposée par le code d'éléments finis Castem 2000 s'inspire de cette méthode et permet un
calcul local de l'intégrale J pour un milieu fissuré 3D. Notre propos ici n'est pas de détailler le
fonctionnement complexe de cette procédure, qui par ailleurs a fait l'objet d'un rapport du
C.E.A [62] de plus d'une centaine de pages d'explications. En pratique pour l'utilisateur, cette
procédure requiert en entrée deux objets de type maillage qui représentent respectivement les
lèvres et le front de la fissure. Il faut de plus préciser le nombre de couches d'éléments autour
du front de la fissure qui se déplace pour simuler la propagation de fissure. Nous avons testé
la procédure G_theta pour la géométrie 2D (éprouvette SEN) présentée au chapitre 1.
L'intégrale J est alors trouvée indépendante du nombre de couches utilisé c'est à dire du
domaine d'intégration. De plus en appliquant (1.54) pour une éprouvette SEN donnée, on
trouve le facteur d'intensité 2D correspondant à la valeur de J calculée. Les résultats obtenus
sont en parfait accord avec ceux de la table 1-2, attestant le bon fonctionnement de la
procédure.
Pour la configuration 3D, la procédure G_theta permet de calculer J en chaque nœud
des lignes constituant respectivement le front de fissure parabolique et rectiligne. Elle propose
en outre une valeur moyenne de Jmoy sur la ligne considérée. Nous présentons table 2-3 le
rapport Jmoy / J2D qui résulte du calcul, en considérant différentes couches d'éléments. J2D est
obtenue à partir de (1.54) pour un état de contraintes planes, soit :
( ) EKJ2D2
ID2 = (2.35)
où D2IK est le facteur d'intensité de contraintes 2D qui vaut dans notre cas mmMPa11,22 .
On définit alors le facteur d'intensité Kmoy qui est établi à partir de (2.35) où l'on remplace J2D
par Jmoy. On remarque table 2-3 que les valeurs de Jmoy et donc de Kmoy varient avec le
nombre de couches d'éléments qui se déplacent. En conséquence la propriété d'indépendance
- 87 -
de J vis à vis du domaine d'intégration n'est plus vraie dans la zone 3D. La quantité Kmoy reste
néanmoins bornée par les valeurs correspondantes à un état de contraintes planes et de
déformations planes. Autrement dit on a :
( ) ( )2/1
2D2
moy2/1
D2 1JEKJE
ν−<< (2.36)
Nombre de couches
Front rectiligne Front parabolique
Kmoy Jmoy / J2D Kmoy Jmoy / J2D
1 22,72 1,056 23,06 1,088
2 22,82 1,066 23,16 1,098
5 22,67 1,051 23,00 1,082
11 22,54 1,039 22,76 1,060
Table 2-3 : Valeurs moyennes de l'intégrale J et du facteur d'intensité de contrainte
associés en zone 3D
4. CONCLUSION
Nous avons montré dans ce chapitre toute l'importance des effets 3D dans une zone
localisée en pointe de fissure et dont la taille est inférieure à la demi épaisseur de la plaque
élastique. Les solutions analytiques multiples nous montrent alors, que contrairement au 2D,
il n'existe pas réellement une approche théorique "standard" et suffisamment générale du
problème à cet endroit. Cette remarque est d'autant plus vraie si l'on considère dans l'analyse
un front de fissure curviligne, qui se rapproche plus de la réalité expérimentale.
Nous avons donc opté pour une approche numérique par éléments finis, moyennant un
maillage localisé et bien adapté qui prend en compte un front de fissure rectiligne ou
parabolique. Le code de calcul utilisé permet en outre d'intégrer la loi de comportement du
matériau fragile à partir de données expérimentales. La modélisation utilisée a mis alors
clairement en évidence l'existence d'une zone 3D élastique (bien plus grande que la zone
plastique communément admise), non prévue par la théorie 2D. A cet endroit, on s'aperçoit
que le déplacement hors plan de la surface libre s'écarte largement de la solution 2D
singulière et prend des valeurs physiquement acceptables au voisinage de la singularité. On
- 88 -
montre de plus à cet endroit que la forme du front de fissure est susceptible de modifier de
façon conséquente les grandeurs mécaniques. On définit ainsi deux paramètres
supplémentaires qui caractérisent simplement la forme du front de fissure et dont on peut
contrôler l'effet sur le déplacement hors plan. Les conséquences sur les grandeurs mécaniques
telles que le coefficient de triaxialité, la contrainte σ22, l'intégrale J, le facteur d'intensité de
contraintes K sont également discutées. On retiendra par exemple l'évolution du coefficient de
triaxialité entre deux bornes fixées respectivement par un état de contraintes planes (au loin)
et de déformations planes le long du front de fissure. De même l'indépendance de J par
rapport au domaine d'intégration n'est plus vraie dans la zone 3D.
Précisons que ce chapitre ne cherche pas à étudier de façon exhaustive le champ de
contraintes et les grandeurs mécaniques associées dans la zone 3D. Le modèle numérique
retenu doit néanmoins nous permettre de recaler les solutions proposées pour le déplacement
hors plan de la surface libre avec les données expérimentales recueillies au chapitre 4. Cette
confrontation doit alors suffire à déterminer numériquement les cinq paramètres associés (i.e.
t, xmax, courb, K ,T) et assurer une modélisation suffisamment réaliste du problème.
- 89 -
CCHHAAPPIITTRREE 33
LES METHODES OPTIQUES : L'INTERFEROMETRIE PAR ANALYSE
QUASI- HETERODYNE, LA METHODE DES CAUSTIQUES
« Let n be a large number, say 3 ! »
E. Landau.
- 90 -
- 91 -
1. INTRODUCTION
Ce chapitre est consacré aux méthodes optiques utilisées par la suite en vue d'une
approche expérimentale de la mécanique de la rupture. Ainsi une évaluation quantitative
précise du champ de déplacement hors plan de faible amplitude (i.e. quelques microns) en
pointe de fissure, requiert à la fois un dispositif expérimental et des techniques de mesure
adaptées. Initiées à partir de différents types de montages interférométriques, un certain
nombre de méthodes optiques (interférométrie holographique mais aussi toutes les techniques
de moiré) reposent sur l'exploitation de réseaux de franges ainsi obtenus. Les méthodes sont
généralement choisies en fonction des grandeurs cinématiques à étudier et permettent des
mesures sans contact et donc non perturbatrices. Ces méthodes qui exigent un montage
expérimental d'une grande stabilité et font l'objet de développements en laboratoire sont
d'usage fréquent en industrie.
Notre choix est motivé par l'étude expérimentale présentée au chapitre suivant,
concernant la mesure du déplacement hors plan de la surface latérale d'une plaque en pointe
de fissure. Cette étude s'appuie sur un montage interférométrique de type Michelson dont on
rappelle le principe en première partie de chapitre. L'éclairage en lumière monochromatique
(laser) d'un tel dispositif conduit à un réseau de franges d'interférence directement
observables, résultant des différences de phase d'ondes dues au déplacement. L'interférométrie
est une méthode optique dite à haute sensibilité qui s'accommode d'une faible variation de
relief en pointe de fissure (quelques microns) et permet des mesures du déplacement très
précises à cet endroit. Ajoutons que son application exige tout de même un état de surface
correct et exclut toute variation brusque de relief qui provoquerait une densité de franges trop
élevée et donc inexploitable. Pour des reliefs plus prononcés (de quelques centièmes de
millimètres à plusieurs centimètres) rencontrés dans d'autres types de problèmes mécaniques,
il existe des méthodes "complémentaires" à plus faible sensibilité, regroupant les techniques
du moiré d'ombre et du moiré de projection. Plus faciles en général à mettre en œuvre et
moins coûteuses (l'éclairage en lumière blanche suffit), elles fournissent alors des franges qui
résultent de l'interférence géométrique de deux réseaux de traits superposés (un réseau dit de
référence fixe et l'autre constitué de l'ombre du premier sur la surface étudiée). Ces méthodes
dont la sensibilité est de l'ordre de grandeur du pas du réseau de référence s'avèrent cependant
inopérantes en pointe de fissure et ne seront donc pas présentées ici. Il va sans dire que toutes
ces techniques, dont les principes physiques sont généralement connus de longue date [61],
- 92 -
ont sans cesse été améliorées. Nous présentons ensuite une démarche connue sous le nom de
quasi hétérodynage qui est utilisée de nos jours pour l'exploitation des réseaux de franges.
Elle conduit à une estimation précise et rapide de la différence de phase en tout point du
champ d'interférence. Son usage s'est progressivement généralisé en mécanique expérimentale
avec l'apparition des systèmes informatisées de traitement d'images et des capteurs CCD.
Certains développements et applications de la méthode font d'ailleurs l'objet de plusieurs
travaux de recherche (thèse, publications) réalisés au sein de l'équipe photomécanique [62,
63].
En dernière partie, nous exposons la méthode des caustiques déjà mentionnée au
chapitre précédent. Cette méthode se distingue tout d'abord des précédentes car elle ne fait pas
appel aux interféromètres et n'exploite donc aucune frange d'interférence. Elle ne conduit pas
ainsi à la connaissance d'un champ scalaire (i.e. le déplacement hors plan) mesurable dans une
zone d'étude prédéfinie, comme c'était le cas précédemment. La caustique est avant tout une
singularité optique et se manifeste physiquement par une courbe stable très lumineuse visible
sur une surface donnée. Nul besoin dès lors de lumière cohérente et de dispositif expérimental
complexe pour en visualiser, si bien que les caustiques se présentent à nous depuis longtemps
(on en parlait déjà au moyen âge…) et de façon très simple par réflexion ou transmission de la
lumière du soleil. On trouve à ce titre dans l'ouvrage de Stavroudis [64] la phrase suivante :
"…the caustic is one of the few things in geometrical optics that has any physical reality…".
Une formulation théorique du phénomène n’est pourtant pas simple. Berry et Upstill [65] en
ont proposé une description mathématique très générale au moyen de la théorie des
catastrophes. Ils expliquent en outre les figures de diffraction associées aux caustiques.
Pour les applications en mécanique de la rupture une modélisation simplifiée qui fait
appel à l'optique géométrique suffit. Introduites au milieu des années 60 par Manogg [66], ces
applications se regroupent sous la dénomination commune de méthode des caustiques. Il est
alors possible "d'associer" à la singularité mécanique (i.e. la fissure) une singularité optique
(i.e. la caustique) dont la forme et les dimensions dépendent expressément de l'expression
singulière du champ de contraintes en pointe de fissure, des propriétés mécaniques et/ou
optiques du matériau, des caractéristiques du montage expérimental. L'établissement de cette
correspondance et les relations qui en résultent seront discutés en détail pour un arrangement
optique en réflexion.
- 93 -
2. TECHNIQUE DE MESURE DU DEPLACEMENT HORS PLAN
2.1 Considérations optiques et application de l'interférométrie de Michelson
Il est bien connu que lorsque deux ou plusieurs faisceaux lumineux se superposent, la
distribution de l'intensité lumineuse qui en résulte peut être décrite correctement à l'aide de la
théorie de l'optique ondulatoire. Ainsi lorsque la lumière provenant d'une source
suffisamment cohérente est divisée en deux faisceaux qui peuvent se combiner après avoir
suivi deux trajectoires différentes, l'intensité dans la région de superposition varie entre des
extremums qui dépassent la somme des intensités des deux faisceaux et des minimums
d'intensité nulle. Ce phénomène, appelé interférence, a beaucoup surpris autrefois au point
que l'on parlait même du "paradoxe de l'interférence" (lumière + lumière = obscurité). C'est
lui historiquement qui a permis d'établir le caractère vibratoire de la lumière. On trouve par la
suite une représentation théorique simplifiée de la lumière au moyen d'ondes
monochromatiques harmoniques vérifiant les célèbres équations de Maxwell [61].
Physiquement, on observe alors un ensemble de franges dont la localisation dépend de
la différence de chemin optique entre les deux ondes associées aux faisceau. Nous
reviendrons sur le concept de chemin optique plus loin. La superposition de sources
strictement monochromatiques donne lieu à des franges d'interférence et en général deux
ondes lumineuses quelconques indépendantes n'interfèrent pas. On met en évidence ce résultat
en considérant deux ondes lumineuses monochromatiques isochrones (de même pulsation ω)
polarisées rectilignement. Lorsque ces ondes se propagent dans un milieu homogène, isotrope
et non conducteur (l'air ambiant en première approximation), on les représente classiquement
par les vecteurs électriques 1E
et 2E
sous la forme suivante :
( ) [ ]
2,12,1j
2,12,1
tj*2,1
tj2,1
tj2,12,1
eeaAavec
eAeA21eARetE
φ
ωω−ω−
=
+== (3.1)
où l'étoile symbolise ici une grandeur complexe conjuguée et 1j2 −= . 1A
et 2A
sont des
vecteurs complexes orientés selon leur direction de polarisation, respectivement par les
vecteurs unitaires 1e et 2e . Les ai et φi sont les amplitudes et les phases réelles associées. La
période temporelle des oscillations est donnée par ωπ= 2T . Précisons également que ces
ondes sont transverses ; 1E
et 2E
sont toujours perpendiculaires à la direction de propagation.
- 94 -
Elles transportent selon la direction de propagation une énergie moyenne (il s'agit de
l'intensité lumineuse) qui est proportionnelle à l'indice du milieu traversé et au carré de
l'amplitude réelle du champ électrique. En pratique seule la répartition de l'intensité lumineuse
recueillie sur un plan image (par une caméra CCD par exemple) est intéressante, si bien que
l'on omet classiquement le coefficient de proportionnalité dans les expressions. Cette
"intensité lumineuse relative" est d'ailleurs la seule quantité physiquement détectable.
Le champ électrique total E
obtenu par superposition des deux ondes précédentes est
donné par la somme vectorielle 1E
+ 2E
(qui résulte de la linéarité des équations de
Maxwell). Lorsque l'indice du milieu traversé est proche de 1 (air ambiant), les intensités
moyennes I1 et I2 associées à chacune des ondes s'expriment donc sous la forme 211 EI
∝ et
222 EI
∝ , soit d'après (3-1) 2a2)A.A(I 21
*111 ==
et 2a2)A.A(I 22
*222 ==
. Notons que
le facteur 1/2 apparaît lors du calcul de la moyenne temporelle . (l'intervalle de temps
considéré est supposé grand en comparaison avec T). L'intensité lumineuse totale I obtenue
après superposition est donnée alors par :
( )( )
12
212121212121
avec
cosIIe.e2IIE.E2III
φ−φ=φ
φ++=++=
(3.2)
où 21 E.E2
est le terme d'interférence qui vaut également d'après (3.1) ( ) 2E.EE.E 2*1
*21
+ .
On voit également que ce terme est relié au déphasage φ introduit entre les deux ondes.
Lorsque les directions de polarisation sont orthogonales, il est clair qu'il n'y a pas
d'interférence. Au contraire si elles sont parallèles (le cas le plus favorable) l'intensité I peut
osciller entre les valeurs extrêmes Imax et Imin suivantes :
πππ=φ−+=ππ=φ++=
...,5,3,,II2III...,4,2,0,II2III
2121min
2121max (3.3)
On caractérise habituellement le contraste entre les "zones" d'intensité maximale et
minimale par le rapport Rc :
( )21
2121
minmax
minmaxc II
II2IIII
R+
=+−
= (3.4)
- 95 -
Notons que C est toujours inférieur à 1 et optimal lorsque les intensités I1 et I2 sont égales.
On peut obtenir deux ondes parfaitement isochrones, susceptibles d'interférer, à partir
d'une même source primaire, soit par division du front de l'onde ou par division de l'amplitude
de l'onde. Dans le premier cas il faut disposer d’une source relativement ponctuelle pour
observer correctement le phénomène. Citons simplement deux exemples historiques célèbres :
les miroirs de Fresnel, les fentes d'Young. A l’inverse, la deuxième solution peut être réalisée
avec une source primaire étendue et nous intéresse plus particulièrement ici. Des franges
d'interférence sont obtenues dans ce cas à l'aide de dispositifs optiques connus sous le nom
d'interféromètres. La source primaire (monochromatique) est divisée à l'entrée en deux ondes
(de même pulsation) qui se superposent en sortie après avoir effectué deux trajectoires
optiques différentes qui dépendent de l'interféromètre. Il en résulte un déphasage φ qui
s'exprime à l'aide de la différence de chemin optique L∆ introduite par l'interféromètre. On a
alors :
snL,L2
0∆=∆∆
λπ
=φ (3.5)
où Tc0 =λ est classiquement la longueur d'onde dans le vide et n l'indice du milieu traversé
(identique ici pour les deux ondes). La grandeur s∆ représente la variation de longueur due
uniquement à la différence de parcours "géométrique" des deux ondes. On dénombre dans la
littérature [61] plusieurs interféromètres plus ou moins complexes qui mettent à profit la
relation précédente. Nous avons retenu pour notre étude un interféromètre de type Michelson
présenté schématiquement figure 3-1.
Laser
Zone d'observation
M
M : Miroir de référence M' : Plan de référence La : Lame séparatrice S0 : Source primaire étendueS1, 2 : Faisceaux divisés
S0
La
Eprouvette
wM'
S1
S2
Figure 3-1 : Principe de l'interféromètre de Michelson
- 96 -
Un laser fournit une source monochromatique polarisée rectilignement, d'intensité I0,
qui est étendue par un système optique en S0. La source primaire parallèle S0 rencontre alors
une lame semi-réfléchissante La, inclinée à 45°, qui la sépare en deux faisceaux S1 et S2
perpendiculaires de même intensité, égale à I0/2. L'un des faisceaux est transmis alors par la
lame La puis se réfléchit successivement sur le miroir M et sur La. L'autre se réfléchit
successivement sur La et sur la face d'une éprouvette d'étude pour traverser ensuite La. Les
deux faisceaux se rencontrent et interfèrent finalement au niveau de la lame semi-
réfléchissante. Ce dispositif, placé dans l'air ambiant ( )1n ≈ , permet d'obtenir le relief de la
surface de l'éprouvette. On introduit pour cela le plan de référence M' de la figure 3-1 qui
correspond à la position géométrique de M, obtenue par symétrie par rapport à La. La
différence de chemin optique ( sL ∆≈∆ ) des deux ondes S1 et S2 équivaut alors
approximativement à deux fois la distance w prise entre un point lumineux du plan de
référence et sa projection sur la surface de l'éprouvette. La quantité w qui est donc fonction de
la position considérée représente à la fois l'élévation du relief de la surface en question et son
orientation par rapport à M'. L'équivalence w2L ≈∆ est largement employée pour ce type de
montage et suppose que le faisceau incident est peu dévié par la surface de l'éprouvette. En
pratique les variations de relief dans la zone éclairée (quelques millimètres) sont
suffisamment faibles (i.e. quelques microns) et justifient une telle approximation. On dispose
ainsi d'une relation simple entre la grandeur géométrique w et le déphasage φ. Les
interférences entre les deux ondes produisent en sortie un ensemble de franges sombres qui se
succèdent alternativement. Elles correspondent d'après (3.3) à des zones d'intensité minimale
Imin qui apparaissent lorsque le déphasage φ prend successivement les valeurs : π, 3π, 5π, ...
Par suite, les franges peuvent être assimilées à des lignes de niveau de la surface de l'objet
(autrement dit des isovaleurs de w) par rapport au plan de référence. La variation du relief
w∆ entre deux franges consécutives est une constante qui est donnée par :
2w 0λ=∆ (3.6)
Entre deux franges sombres, on passe toujours par un maximum d'intensité lumineuse
(i.e. franges claires) Imax comme le prévoit la théorie présentée précédemment. Néanmoins il
apparaît que le contraste Rc entre les zones claires et sombres (ou plus simplement le contraste
des franges) dépend fortement du pouvoir réfléchissant et de l'état de la surface de
l'éprouvette. En pratique il est possible d'améliorer le contraste, en y déposant une fine couche
d'aluminium très réfléchissante, obtenue par vaporisation dans une chambre à vide. Les
- 97 -
directions de polarisation des deux ondes sont identiques à celle de l'onde primaire, ce qui
revient à égaliser les deux vecteurs unitaires dans l'expression (3.2).
Notons que la sensibilité de cette technique de mesure est donnée par (3.6), soit pour
un laser à gaz à argon ionisé (λ0=514,5 nm) d'environ un quart de micron. Lorsque
l'interféromètre est placé dans l'air ambiant, il est facilement perturbé par les variations
thermiques dues par exemple à la présence et aux mouvements éventuels du manipulateur à
proximité des éléments du montage. De plus il convient de disposer d'un plan de travail très
stable qui amortit toutes les vibrations, notamment celles qui existent dans les hautes
fréquences.
Il faut souligner ici que les sources physiques réelles ne sont jamais strictement
monochromatiques. Un laser fournit toujours en sortie une source quasi-monochromatique
composée d'ondes monochromatiques dont les fréquences respectives sont distribuées
continûment à l'intérieur d'une bande spectrale étroite centrée sur une fréquence moyenne
c00 λ=ν . La largeur de cette bande ν∆ permet de définir une grandeur appelée longueur de
cohérence (temporelle) cl∆ du laser. Concrètement, on assiste à une extinction progressive
puis une disparition totale des franges d'interférence lorsque la variation de chemin optique
L∆ augmente et devient supérieure à la longueur de cohérence. Comme nous l'apprend la
physique atomique, l'émission de lumière se fait au grè des collisions entre atomes qui
produisent des ondes dont l'amplitude et la phase varient très rapidement et irrégulièrement
dans le temps (non détectables). Il est commode alors d'assimiler l'émission lumineuse à une
source composée de trains d'ondes de durée limitée t∆ qui se succèdent de façon aléatoire. En
outre la cavité optique d'un laser, formé d'un milieu actif et de deux miroirs réfléchissants
disposés en regard (interféromètre de Fabry-Perot), produit par résonance (en simplifiant) des
ondes stationnaires de fréquences déterminées. On utilise habituellement le mode
fondamental qui correspond à une fréquence 0ν , caractéristique du milieu actif et donc le
laser. Il s'agit du mode pour lequel la divergence du faisceau en sortie est la plus faible.
L'intensité lumineuse ( )νν0I (i.e. l'intensité spectrale) de l'onde qui émerge de la cavité
(polarisée rectilignement) est distribuée symétriquement par rapport à 0ν , où elle prend une
valeur maximale. Elle décroît rapidement vers zéro lorsque 20 ν∆>ν−ν . L'allure théorique
de la fonction ( )νν0I , qui du reste peut toujours être approchée par une fonction porte de
largeur ν∆ , suit en fait la modélisation envisagée pour décrire les trains d'ondes. Notons que
- 98 -
( )νν0I est toujours obtenue à partir de l'analyse spectrale de Fourier (par une transformation
de Fourier). En considérant que les trains d'ondes ont une durée identique t∆ , Born et Wolf
[61] obtiennent pour la répartition de l'intensité spectrale la représentation suivante :
( ) ( ) ( )
2
0
00 t
tsinI
∆ν−νπ∆ν−νπ
∝νν (3.7)
Le premier zéro de la fonction ci-dessus est donné pour ( ) t10 ∆±=ν−ν ; elle devient
négligeable ensuite. Par suite, les auteurs proposent la relation suivante entre la largeur
spectrale ν∆ et la durée d'un train d'onde t∆ :
t1 ∆≈ν∆ (3.8)
La longueur de cohérence (temporelle) cl∆ est alors donnée par :
ν∆≈∆=∆ ctclc (3.9)
Il en résulte que pour clL ∆>∆ les trains d'ondes issus des deux faisceaux S1 et S2 à la
sortie de l'interféromètre, ne proviennent pas d'un même train d'ondes issu de S0. On peut
montrer alors [61] que leur différence de phase φ n'est plus stationnaire (i.e. indépendante du
temps) mais devient fortement aléatoire et en moyenne nulle. Les sources S1 et S2 sont alors
devenues incohérentes et n'interfèrent plus. Il est clair toutefois que la solution (3.7) reste une
idéalisation qui suppose des trains d'ondes identiques, décrits par une fonction périodique
simple de fréquence 0ν . Une évaluation plus précise de la largeur spectrale est néanmoins
possible expérimentalement et conduit à des longueurs de cohérence qui varient entre
quelques mètres ou quelques centimètres selon les lasers. Nous disposons d'un laser argon
avec une longueur de cohérence d'environ 6 cm, qui limitera donc de moitié l'écart maximum
relatif entre le miroir et la pièce étudiée.
D'une grande sensibilité , l'interféromètre de Michelson se présente finalement comme
un outil puissant pour la mesure sans contact de la topographie d'une surface, du moins pour
de faibles variations de reliefs. Les applications pratiques sont nombreuses : Twyman et
Green [61] ont pu ainsi, les premiers, caractériser expérimentalement les aberrations
géométriques des lentilles. L’interféromètre précédent nous paraît donc tout indiqué pour
étudier la variation de relief en pointe de fissure, due au déplacement hors plan.
- 99 -
2.2 La technique quasi hétérodyne
D’après ce qui précède, l’interférométrie de Michelson est donc en mesure de fournir
la cartographie du relief de la surface latérale d’une éprouvette, qui se déforme faiblement
sous chargement extérieur (effet Poisson). A partir du réseau de franges d’interférence
associé, il est possible par conséquent d’évaluer quantitativement les variations du
déplacement hors plan résultant. La précision de la mesure dépend néanmoins du mode
d’exploitation (i.e. du dépouillement) du système de franges obtenu. Il est clair qu’un
dépouillement manuel consiste bien souvent à n’effectuer qu’un comptage des franges dans
une direction donnée : l’information recherchée n’est accessible manuellement que pour les
maxima et minima d’intensité, estimés par l’opérateur, qui correspondent respectivement aux
centres des franges claires et sombres. Rappelons qu’ils sont également obtenus d’après (3.3)
lorsque le déphasage φ introduit est un multiple de π. Cette opération est à vrai dire longue et
fastidieuse. Elle offre de toute évidence peu de précision, même si du reste les franges sont
généralement bien contrastées.
Avec l’avènement de l’informatique et le développement des systèmes numériques
d’acquisition et de traitement d’images, on a recours depuis à des techniques d’interpolation
plus rapides et plus précises. Précisons que ces méthodes ne nécessitent pas au préalable de
filtrage du réseau de franges, nécessaire par exemple avec le moiré d’ombre. Dans ce cas les
images de franges contiennent à la fois le moiré soustractif, qui seul donne l’information sur
le relief, et le réseau de référence lié à la méthode. Ce dernier crée une perturbation qu’il
convient d’éliminer avant toute mesure à l’aide de techniques de filtrage particulières (filtrage
spatial optique, filtrage spatial numérique) [63].
A l’origine, on trouve une méthode ancienne : l'hétérodynage qui introduit, à la
différence de l’interférométrie classique, un petit décalage entre les fréquences des ondes
lumineuses qui se superposent. Lorsque cette différence de fréquence (i.e. la fréquence de
battement ω∆ ) est faible, les ondes interfèrent et donnent lieu à des franges qui défilent
continûment au cours du temps (non stationnaires). En tout point du champ d'interférence, on
montre que l'intensité I, modulée par la fréquence de battement ω∆ , varie en fonction du
temps de la façon suivante :
( ) ( ) ( ) φ+ω∆=ΦΦ++= tt,tcosaa2
a2
atI 21
22
21 (3.10)
- 100 -
où a1 et a2 sont les amplitudes réelles des ondes lumineuses qui ont (pour simplifier l'écriture)
même direction de polarisation. Notons que l'on peut établir la relation ci-dessus à partir de
(3.1) en associant les fréquences angulaires ω1 et ω∆+ω=ω 12 respectivement aux ondes
1E
et 2E
. Lorsque ces ondes ont même direction, on retrouve l'expression de l'intensité
donnée par l'interférométrie classique ( 0=ω∆ ).
En interférométrie hétérodyne, comme le montre la relation (3.10), la différence de
phase φ entre les faisceaux lumineux n'est autre que la phase de la modulation d'intensité. La
phase relative Φ est une fonction linéaire du temps dont la pente est donnée par la fréquence
de battement. Lorsque ω∆ est prise suffisamment basse (< 100 kHz), il est possible de
détecter ces variations d'intensité et de mesurer localement la phase d'interférence φ avec une
grande précision (de l'ordre du millième d'interfrange) en utilisant un phasemètre
électronique. Les mesures sont indépendantes des amplitudes respectives des deux ondes mais
nécessitent sur tout un champ un temps de mesure considérable : l'usage de cette méthode est
exclue en temps réel.
On lui préfère une méthode de discrétisation certes moins précise mais plus rapide et
qui permet notamment de déterminer directement la phase sur tout un champ. L'utilisation de
cette méthode, connue sous le nom de méthode quasi hétérodyne ou encore méthode à
décalage de phase, s'est considérablement accrue ces dernières années avec l'apparition et le
développement des caméras CCD. Elle est fondée sur le même principe que l'hétérodynage
mais donne une approximation de la variation linéaire de la phase Φ par une variation en
escalier.
Considérons que I(x,y) représente l'intensité lumineuse (exprimée en niveau de gris)
en chaque pixel d'une image d'un champ de franges (recueillie par une caméra CCD). On
montre de manière générale, que cette image est assimilable à une distribution de l'intensité I
de la forme [67] :
( ) ( ) ( ) ( )[ ]y,xcosy,xby,xay,xI φ+= (3.11)
où ( )y,xφ est le terme de phase qui seul renseigne sur la distribution spatiale des franges.
Dans notre cas, la phase ( )y,xφ est liée au déplacement recherché par la relation (3.5). Les
fonctions inconnues a(x,y) et b(x,y) représentent respectivement le fond continu et un terme
- 101 -
d'amplitude. La connaissance des trois inconnues précédentes nécessite au minimum trois
équations, obtenues en ajoutant trois décalages de phase connus φ1, φ2, φ3 à la phase φ. Les
trois intensités Ii (i=1,2,3) correspondantes sont alors données par :
( ) ( ) ( ) ( )[ ] 3,2,1i,y,xcosy,xby,xay,xI ii =φ+φ+= (3.12)
La résolution du système (3.12) conduit aux solutions générales suivantes, en
simplifiant les écritures :
( ) ( ) ( ) ( )( ) ( ) ( )
( ) ( ) ( )( ) ( ) ( )11
21
23
312231123
312231123
cosy,xbIy,xa
coscosII
y,xb
sinIIsinIIsinIIcosIIcosIIcosII
y,xtan
φ+φ−=
φ+φ−φ+φ−
=
φ−+φ−+φ−φ−+φ−+φ−
=φ
(3.13)
En prenant ( ) 31n2n −π=φ avec (n=1,2,3), on obtient par exemple pour le terme de
phase :
( ) ( )321
32
III2II3
y,xtan−−−−
=φ (3.14)
Les solutions précédentes requièrent la prise de trois images par caméra CCD. Pour
chacune des images, les déphasages sont obtenus en pratique soit avec une platine de
déplacement (piézo-électrique) ou encore à l'aide de modulateurs acousto-optiques. Avec
l'interféromètre de Michelson, on réalise des déphasages après avoir collé le miroir de
référence sur une lame piézo-électrique qui est actionnée à distance. Il permet d'obtenir une
petite translation du miroir parallèlement à l'onde incidente (voir figure 3-1), qui modifie le
parcours optique des ondes et par conséquent le champ d'interférence. Pour différentes
positions du miroir, on introduit ainsi des déphasages arbitraires entre les images de franges,
successivement enregistrées avec une caméra CCD. Le déphasage entre deux images est
obtenu quantitativement en calculant séparément leurs phases à l'origine (transformée de
Fourier), puis en les soustrayant ensuite [63]. On évite ainsi les erreurs qui résulteraient d'une
estimation directe du déphasage à l'aide du déplacement fourni par le déphaseur. Le calcul
donne une précision sur la phase qui est de l'ordre du centième de franges.
- 102 -
On peut de toute évidence généraliser les expressions (3.13) en augmentant le nombre
d'images et donc le nombre d'équations (3.12). Un certain nombre de formules, dans la
littérature, donnent la phase φ en fonction du nombre N d'images pour des valeurs
particulières du déphasage φn (n=1..N) [68, 69]. On trouve ainsi des solutions qui supposent
des déphasages égaux à des multiples entiers de π/2 ou encore uniformément répartis dans
l'intervalle [ ]π2,0 (c'était le cas pour (3.14)). Notons qu'une solution générale qui ne fait
aucune hypothèse sur les déphasages a été développée au laboratoire [70]. Elle est valable
quel que soit le nombre N d'images et redonne notamment l'expression (3.13) pour N=3. En
pratique néanmoins un nombre trop élevé d'images conduit à des erreurs d'ordre
expérimentale par l'augmentation de l'incertitude sur les déphasages φn.
Nous utiliserons au chapitre suivant un logiciel intitulé Interf 32 qui met en œuvre la
technique quasi hétérodyne pour trois images. Il a été développé au laboratoire au sein de
l'équipe photomécanique par Dupré, Valle et Brémand [59]. A partir de trois images de
franges déphasées et des caractéristiques du montage optique (longueur d'onde de la source,
valeur de l'interfrange, grandissement de la caméra CCD), le logiciel permet un calcul direct
de la variation de relief de la surface déformée.
3. LA METHODE DES CAUSTIQUES
3.1 Le phénomène optique
En optique le phénomène de création d'une surface caustique est connu depuis
longtemps. Il semblerait en effet que les premières explications à ce sujet remontent au moyen
âge et soient dues à Maurolycos en 1530 [71]. Elles apparaissent ainsi lorsque une source
lumineuse (assez ponctuelle) est réfléchie ou réfractée par une ou plusieurs surfaces
curvilignes limitant au minimum deux milieux matériels différents. Généralement, seules "les
caustiques" se présentent à nous sous la forme de courbes stables fortement lumineuses (i.e.
singularités optiques) et résultent de l'intersection d'un plan image quelconque avec la surface
caustique. Il s'agit en fait d'un phénomène familier que tout un chacun peut observer
facilement chez lui. Pour s'en convaincre, il suffit le matin par exemple de regarder le fond
d'une tasse de café, de préférence blanche (pour accentuer le contraste) : on visualise une
courbe lumineuse simple et symétrique qui n'est autre qu'une caustique. L'expérience peut être
reconduite indéfiniment avec divers objets ou milieux qui permettent une bonne réflexion ou
transmission de la lumière. L'observation de caustiques est nettement améliorée avec une
- 103 -
source de lumière spatialement limitée : une lampe de chevet convient beaucoup mieux que
l'éclairage fourni par un néon.
Pour illustrer ce qui précède, nous présentons figure 3-2 une tasse (blanche), remplie
d'eau, qui est éclairée simplement par une lampe de bureau. Un bâtonnet en plastique flotte
librement sur l'eau dont il modifie localement l'état de surface. L'image qui en est donnée au
fond de la tasse est pour le reste assez surprenante. Elle est attribuée à la présence de deux
caustiques dues aux variations sensibles de relief aux extrémités du flotteur. La première
limite une zone non éclairée assimilable à première vue à un petit cercle sombre, que l'on
distingue assez facilement. La seconde est une courbe non fermée qui ressemble à la partie
supérieure d'un cœur. Notons ici que la traversée du liquide et l'état granuleux du fond de la
tasse ne favorisent pas le contraste si bien que les caustiques sont très peu lumineuses en
sortie. On verra plus loin également que la forme de la caustique est étroitement liée à la
géométrie du relief, rencontré par la lumière. Par anticipation, le croquis de la figure 3-2
associe un relief creusé (bombé) à la caustique fermée (respectivement ouverte), obtenue par
réfraction de la source lumineuse dans l'eau. Les variations de relief aux extrémités
s'expliquent par les pressions ou tensions superficielles existantes à la surface de l'eau, qui
dépendent généralement de la position du bâtonnet.
Figure 3-2 : Caustiques obtenues par transmission au fond d'une tasse remplie d'eau
- 104 -
L'exemple précédent nous montre des caustiques dont les formes sont relativement
simples et de ce fait reconnaissables. On relève bien d'autres variétés de caustiques dont les
formes sont assurément plus complexes. Ainsi Larmor [72], à la fin du siècle dernier, parlait
de caustiques obtenues à partir de la réfraction de la lumière à travers une plaque de verre,
recouverte de fines gouttes d'eau. Elles conduisent à de très belles images, composées d'une
multitude de petites courbes lumineuses qui s'assemblent pour former des surfaces
relativement surprenantes. Si les caustiques sont observées depuis longtemps, leur
compréhension théorique est plutôt récente. Malgré leur importance, elles n'apparaissaient pas
dans les théories classiques en optique principalement pour deux raisons selon Berry [65].
Tout d'abord leurs formes intriguaient beaucoup et on les classaient seulement comme
perturbations liées à une focale parfaite. D'autre part dans le cadre de l'optique géométrique
généralisée aux milieux inhomogènes, l'approximation classique au premier ordre des
fonctions d'ondes solutions de l'équation d'Helmholtz [61], est mise à défaut sur les caustiques
elles-mêmes : elle y prédit en effet une intensité infinie et donc irréaliste.
Une explication correcte du phénomène n'a été possible que par l'introduction en
optique d'une nouvelle branche des mathématiques appelée théorie des catastrophes [73],
inventée en 1972 par Thom [74]. Elle conduit alors principalement Berry [65] à construire
une théorie où les caustiques sont assimilables à des "catastrophes optiques". Notons
simplement ici que les travaux importants de Berry offrent un cadre théorique suffisamment
général qui permet non seulement d'expliquer la formation de surfaces caustiques aussi
complexes que celles obtenues par Larmor mais également de comprendre et retrouver les
figures de diffraction associées (on parle alors de diffraction catastrophique au voisinage des
caustiques).
Les applications en mécanique de la rupture donneront toujours des caustiques de
formes simples, qui s'apparentent à celles montrées figure 3-2. Leur compréhension et leur
représentation ne requièrent pas un formalisme aussi général et complet que celui de Berry, si
du moins l'on ne recherche pas à décrire de façon précise la distribution de l'intensité au
voisinage d'une caustique. Elles seront d'ailleurs assimilées à des courbes "fortement
lumineuses" et sans épaisseur limitant matériellement en général une zone d'ombre et une
zone éclairée. Par ailleurs, les relations mathématiques utilisées par la suite pour
"caractériser" les caustiques trouvent un fondement mathématique rigoureux avec la théorie
des catastrophes.
- 105 -
3.2 Applications à la mécanique de la rupture
3.2.1 Principe de la méthode des caustiques, arrangements optiques
Les premières applications des caustiques en mécanique de la rupture ont dues à
Manogg [66] et remontent au milieu des années 60. Réalisées à l'origine avec une plaque
transparente fissurée et sollicitée en mode I, elles ont été étendues ensuite notamment par
Theocaris [75] aux matériaux opaques et pour des chargements en mode mixte. On obtient
ainsi typiquement une surface caustique à partir d'une plaque fissurée chargée en mode I,
comme nous le montre la figure 3-3. Il s'agit dans ce cas d'un arrangement optique en
transmission qui permet d'expliquer simplement le phénomène.
Figure 3-3 : Formation de caustiques en mécanique de la rupture
Un faisceau lumineux, provenant d'une source suffisamment étendue, éclaire donc une
plaque transparente fissurée, sollicitée en traction. En raison du gradient de contraintes,
l'épaisseur (effet Poisson) et l'indice de réfraction de la plaque sont modifiés en pointe de
fissure, ce qui provoque une déviation des rayons lumineux traversant la zone déformée. Les
- 106 -
rayons déviés se concentrent alors le long d'une surface fortement lumineuse dans l'espace qui
n'est autre qu'une surface caustique. Cette surface de discontinuité du flux lumineux
enveloppe une zone d'ombre, caractérisée par une absence totale de rayons lumineux. On
visualise à l'intersection de la surface caustique et d'un plan image, placé parallèlement à une
certaine distance zI du modèle, une courbe singulière qui constitue la caustique.
On notera tout d'abord une ressemblance entre les caustiques expérimentales de la
figure 3-3 et celle obtenue au fond de la tasse figure 3-2. On remarque ensuite que les
caustiques, recueillies pour différents positions du plan image, ont des dimensions respectives
qui augmentent progressivement lorsque ce plan s'éloigne du modèle. Comme en témoignent
les caustiques obtenues expérimentalement, cet accroissement n'est de toute évidence pas
proportionnel à la distance zI. En outre plus la distance zI est grande et plus la zone d'où
proviennent les rayons lumineux réfractés est éloignée de la pointe de la fissure. Nous verrons
plus loin qu'il est possible d'établir une relation mathématique entre des points géométriques
de la surface du modèle et la caustique associée à un plan image. Cette relation est
précisément paramétrée par la distance zI , l'orientation du plan image par rapport au modèle
et plus généralement les caractéristiques du montage optique. Le lieu géométrique de ces
"points génériques" est alors appelé la courbe initiale. La forme de cette courbe dépend
principalement (comme on peut s'y attendre du reste) de la variation de relief en pointe de
fissure. La courbe initiale n'a certes pas de réalité physique mais permet de recueillir des
informations dans une zone proche de la singularité. La taille de la courbe et par conséquent
celle de la zone étudiée, sont conditionnées par le choix du plan image, donc de zI. Ainsi plus
zI est petit et plus les informations recueillies sont proches de la singularité.
Un phénomène identique est obtenu dans le cas d'une étude en réflexion sur des
matériaux opaques. Les dimensions et formes des caustiques dépendent de façon générale du
mode de fissuration [75, 76], des propriétés mécaniques et optiques du matériau constitutif de
la plaque [77] et des caractéristiques du montage expérimental. Par suite les caustiques
obtenues, pour un mode mixte de rupture et un arrangement en transmission par exemple, ne
conserveront pas la forme symétrique précédente, caractéristique du mode I. Nous regroupons
figure 3-4 les différents arrangements optiques [78] qui permettent d'obtenir une caustique à
partir d'une plaque fissurée sollicitée en traction. Ils se divisent en trois catégories :
1) L'arrangement en transmission, 2) L'arrangement en réflexion ou réflexion simple pour les
matériaux opaques, 3) L'arrangement en réflexion ou réflexion composée pour les matériaux
- 107 -
transparents. Le premier cas a été illustré avec l'exemple traité précédemment et donne donc
typiquement en mode I des caustiques réelles fermées et symétriques ; il est référencé par la
lettre (a) sur la figure 3-4. Le second, référencé par la lettre (b), fera l'objet d'une étude
détaillée au paragraphe suivant. Sur un plan image réel, il est associé à une caustique (réelle)
non fermée et symétrique qui ressemble à celle présentée figure 3-4. Le dernier arrangement
est un cas hybride qui donne qualitativement en sortie les deux caustiques précédentes (en
mode I) : la caustique interne (b) est obtenue par réflexion directe du faisceau incident sur la
face avant du modèle. La deuxième, plus grande que la caustique de transmission (a),
correspond à un double passage des rayons lumineux à l'intérieur de la plaque : soit une
réflexion sur la face arrière du modèle suivie d'une réfraction. Cet arrangement a été
principalement employé par Theocaris [75], pour ses études sur les plaques transparentes
chargées en mode mixte. Notons que des images réelles (i.e. que l'on peut recueillir
directement sur un écran physique) sont obtenues pour les cas (b) et (c), en interposant entre
le modèle et le faisceau incident une lame semi réfléchissante.
Figure 3-4 : Arrangements optiques, modèle sollicité en traction d'après [76, 78]
Les plans images sont qualifiés de réels ou virtuels selon leur position respective par
rapport au faisceau incident. Lorsque le matériau est opaque, les images de caustiques
recueillies en amont du modèle seront réelles (traits continus) et virtuelles (traits pointillés) en
- 108 -
aval. La situation est simplement inversée pour un matériau transparent, bien qu'il soit
toujours possible d'obtenir des images réelles pour le cas (c). Les parties grisées représentent
les zones d'ombre. Le signe de zI ne doit pas inquiéter : la distance entre le plan image et le
modèle est bien sûr positive ! Il s'agit d'une convention qui résulte de la relation
mathématique liant la caustique à la courbe initiale et permet de "choisir" entre une image
réelle et virtuelle. Elle sera justifiée au paragraphe suivant pour l'arrangement en réflexion.
En pratique, notons enfin qu'il est possible d'obtenir une caustique "virtuelle" avec une
caméra CCD, en focalisant l'objectif de la caméra sur un plan situé à l'arrière ou à l'avant du
modèle étudié. On montre typiquement figure 3-5 le résultat obtenu avec une plaque en
Araldite d'épaisseur 5 mm pour un arrangement en réflexion. La caustique observée "derrière
le modèle" à une distance zI = 200 mm, s'apparente à celles observées en transmission
précédemment.
Figure 3-5 : Caustique obtenue sur un plan image virtuel, arrangement en réflexion
3.2.2 Formation d'une caustique en réflexion : formulation théorique
De façon générale, le problème étudié met en œuvre un système composé d'une source
lumineuse, d'un déflecteur et d'un récepteur dont les positions relatives sont fixes dans
l'espace géométrique, rapporté au repère cartésien ( )321 e,e,e,O . Le déflecteur occupe un
volume délimité par une surface extérieure SD, d'équation donnée ( ) 0x,x,xF 321 = , où les xi
sont les coordonnées cartésiennes associées à ( )321 e,e,e,O . Lorsque SD est suffisamment
réfléchissante, le déflecteur agit alors comme un réflecteur qui dévie une partie des rayons
lumineux de la source vers le récepteur selon la loi classique de la réflexion. Dans notre cas le
réflecteur n'est autre que la plaque fissurée, dont l’une des surfaces au moins est supposée
réfléchissante. Elle est située par commodité selon le plan ( )21 e,e,O . Théocaris [71]
- 109 -
représente les déflexions de la surface sous la forme d'une fonction f(x1,x2). Le réflecteur sera
donc assimilé plus simplement à la surface d'équation :
0)x,x(fx)x,x,x(F 213321 =+≡ (3.15)
Le récepteur, quant à lui, correspond habituellement à un plan SP (i.e. le plan image)
de position et d'orientation données. Theocaris [71] a établi dans ces conditions une relation
de correspondance relativement générale entre les points objets situés sur le réflecteur (3.15)
et les points images du récepteur, quelle que soit la position de la source (physiquement
acceptable). Dans le cadre de l'optique géométrique, nous verrons par la suite qu’une telle
relation est nécessaire pour caractériser la surface caustique associée. L’étude théorique est
néanmoins simplifiée en orientant le plan image parallèlement à la surface de la plaque et en
éclairant cette surface avec une source parallèle sous incidence normale. Ces conditions
supplémentaires, observées d’ailleurs en pratique, ne modifient pas la nature du problème et
permettent un exposé concis.
PN
RéflecteurPlan image
n
Faisceau incident
OzI >0
x3 = -f(x1,x2)
Q
P(X1,X2)
(zI-f)
2ϕ
1e2e
3e
u
3e
Figure 3-6 : Système simplifié source-réflecteur-récepteur en réflexion
Considérons par conséquent figure 3-6 une source lumineuse, parallèle à l'axe 3e et
selon x3 <0, qui rencontre la surface réfléchissante de la plaque sous incidence normale [79].
Les rayons lumineux réfléchis sont enregistrés par une caméra CCD, placée à l'avant du
- 110 -
modèle. Le plan focal de cette caméra (i.e. le récepteur), correspond sur la figure 3-6 au plan
SI d'équation )0z(,zx II3 >−= , localisé derrière le réflecteur. Il intercepte ici les extensions
virtuelles des rayons lumineux réfléchis par la surface SR du réflecteur, dont l'équation est
donnée par (3-15). Il s'agit donc d'un plan virtuel, à la différence du plan réel d'équation
respective )0z(,zx II3 >+= . Considérons d'autre part, un rayon lumineux qui fait
correspondre à un point P(x1,x2) de SR son image virtuelle P(X1,X2) sur SI. La position
(virtuelle) de P(X1,X2) dépend de façon évidente à la fois de l'orientation de la normale N
à
SR au point P et de la distance zI. Notons que le système de coordonnées (X1,X2) repérant SI
est identique à (x1,x2), à la différence près que son origine est translatée de la distance zI
suivant 3e− . Soient ϕ l'angle entre le rayon incident et la normale N
en P(x1,x2) et Q la
projection normale de P(x1,x2) sur "l'écran virtuel", la position de P(X1,X2) est donnée par la
relation vectorielle suivante :
( )[ ]u2tanfzxX I
ϕ−+= (3.16)
où iiii exx,eXX
== et QPQPu = est un vecteur unitaire.
La normale extérieure à SF en P est définie par FF ∇∇
d'après (3.15). En outre, le
plan qui contient le rayon incident et le rayon réfléchi correspondant sur la figure 3-6 est
orienté par le vecteur unitaire 33 eNeNn
××= . L'intersection de ce plan avec l'écran
virtuel SI est précisément la ligne (PQ) orientée par le vecteur u . Ce dernier s'exprime alors
par :
ff
xf
xf
exfe
xf
enu 212
2
2
1
22
11
3∇
∇−=
∂∂
+
∂∂
∂∂
+∂∂
−=×=
(3.17)
Il est possible de plus d'exprimer la tangente de l'angle ϕ sous la forme suivante :
- 111 -
∇=
∂∂
+
∂∂
=×
=ϕϕ
=ϕ
ϕ−ϕ
=ϕ
fxf
xf
N.e
Ne
cossintan
tan1tan22tan
212
2
2
13
3
2
(3.18)
En substituant (3.17) et (3.18) dans (3.16) il vient alors :
( ) 2If1
ffz2xX∇−
∇−−=
(3.19)
La relation (3.19) (connue sous le nom de "optical mapping" en anglais) décrit, dans le
cas présent, la relation géométrique exacte liant les points objets de la plaque aux points
images de l'écran. Lorsque l'image est réelle (placée devant la plaque), le vecteur u prend une
direction opposée u− et la distance (zI-f) devient (zI+f) dans l'expression (3.16). Les autres
quantités introduites restent inchangées. Au final on retrouve l'expression (3.19), où il faut
simplement remplacer (zI) par (-zI). Par suite pour les arrangements en réflexion, on prend
l'habitude d'associer zI > 0 aux images virtuelles et zI < 0 aux images réelles.
La relation (3.19) peut être linéarisée en ajoutant les hypothèses supplémentaires
suivantes : zI >> f et ( ) 1xf 2i <<∂∂ . Elle se réduit à la forme classique :
( )f2zwavec
wxX
I∇−=
+=
(3.20)
Il faut souligner ici que l'on a éliminé artificiellement la singularité qui apparaît
lorsque 1f2=∇
, correspondant d'après (3.18) à un angle 4π±=ϕ . Il s'agit d'un cas limite
qui donne un rayon réfléchi parallèle au plan ( )21 e,e,O dont l'extension virtuelle ne coupe
pas le plan image SI.
Notons que des études simplifiées avec un arrangement en transmission ou en
réflexion composée conduisent à des relations de forme similaire à (3.20). Elles introduisent
cependant la variation de chemin optique ∆s(x1, x2) du faisceau incident qui contrôle alors le
vecteur w dans l'expression (3.20). A partir de l'équation iconale de l'optique géométrique
- 112 -
[61], on montre alors que le parcours d'un rayon lumineux à la sortie de la plaque est modifié
par :
( )( )21I x,xszw ∆∇−=
(3.21)
La variation de chemin optique résulte à la fois des déformations introduites sur les
deux cotés du modèle et de la variation non uniforme des indices de réfraction du matériau,
sous chargement. Une expression classique de ∆s(x1, x2), qui tient compte dans sa formulation
de ces deux phénomènes combinés, est présentée par exemple dans les références [76, 78].
Elle redonne la solution (3.20) dans le cas de la réflexion simple. Les variations d'indice dans
la plaque fissurée sont néanmoins décrites avec la loi de Maxwell-Neumann, en supposant un
état de contraintes planes ou de déformations planes. Cette hypothèse 2D est bien sûr trop
restrictive pour notre étude concernant les effets 3D en pointe de fissure. Une re-formulation
plus générale des lois dans ce cas nous entraîneraient dans des considérations mathématiques
complexes et incertaines qui peuvent être évitées. En effet les relations établies pour la
réflexion simple ici, ne font aucune hypothèse sur l'état de contrainte régnant dans la plaque.
Elles apparaissent de ce fait suffisamment générales pour l'application qui suivra au
chapitre 5. De plus une plaque transparente peut toujours être rendue opaque, en recouvrant
tout simplement l'une de ces faces d'un dépôt fortement réfléchissant.
Nous sommes en mesure maintenant de définir mathématiquement la caustique sur le
plan image SI. Elle apparaît comme le lieu des points sur SI où la relation (3.19) n'est pas
inversible. Une condition nécessaire et suffisante pour l'existence d'une caustique est donnée
par l'annulation du Jacobien du système d'équations (3.19) ou (3.20) [65] :
( ) 0xX
xX
xX
xXX,XJ
1
2
2
1
2
2
1
121 =
∂∂
∂∂
−∂∂
∂∂
= (3.22)
La solution de l'équation (3.22) forme typiquement la courbe initiale, lieu des points
génériques de la caustique. Cette courbe sera uniquement fonction des paramètres mécaniques
et géométriques associés à la plaque pour un arrangement optique en réflexion. Il faudrait y
ajouter en plus des paramètres optiques tels que les constantes photoélastiques absolues du
matériau dans les autres cas [75, 78]. Notons enfin que dans le cadre de l'optique géométrique,
la relation (3.22) conduit à une singularité de l'intensité lumineuse sur la caustique. Rappelons
- 113 -
que ce problème est résolu en faisant appel à une théorie plus générale introduite par Berry
[65].
3.2.3 Relations simplifiées issues de la mécanique de la rupture 2D, remarques
On considère à nouveau le montage optique de la figure 3-6 où le réflecteur est
constitué d'une plaque fissurée opaque d'épaisseur h. En mode I avec l'approximation 2D
classique, le déplacement hors plan u3 de la surface de la plaque est donné par la relation
(1.40). On a donc pour f(x1,x2) l'expression suivante avec les coordonnées polaires (r,θ)
associées :
( ) cte
r21
2cos
EhK),r(fx,xf I
21 +π
θν
−=θ≡ (3.23)
En substituant (3.23) dans l'équation linéarisée (3.20), et en appliquant la condition
(3.22), la caustique est donnée par les relations paramétriques suivantes en coordonnées
polaires [76] :
θ
±θ=
θ
±θ=
23sin2sin3
3r
X
23cos2cos3
3r
X
02
01
(3.24)
où r0 représente le rayon de la courbe initiale que l'on trouve ici de forme circulaire :
52
II0 E22
zKh3r
π
ν= (3.25)
Les équations (3.24) représentent une épicycloïde dont la taille est paramètrée par le
rayon de la courbe initiale. Ce dernier dépend uniquement des constantes mécaniques
associées à la plaque. Le signe positif est à prendre pour une image virtuelle (zI >0).
Inversement, le signe moins indique que le plan image est réel (zI < 0). On notera que suite
aux dérivations introduites, la constante dans (3.23) n'intervient pas dans l'équation d'une
caustique.
A partir des relations (3.19) et (3.20), adimensionnées au préalable par l'épaisseur h,
nous avons simulé figure 3-7 les caustiques obtenues pour différentes distances zI du plan
- 114 -
image. Les calculs ont été réalisés avec le logiciel MapleV, en prenant les valeurs numériques
suivantes : [ ] [ ] [ ]( ) ( )8;22;2600;37,0mmt;mmMPaK;MPaE; I =ν . Les représentations
graphiques se font dans des plans images repérés par les coordonnées cartésiennes
adimensionnées (X/h, Y/h) ≡ (X1/h, X2/h). A chaque caustique correspond alors une courbe
initiale de rayon adimensionné r0/h.
Figure 3-7 : Simulation de caustiques à partir des expressions (3.19), (3.20) et de la
formulation 2D du déplacement hors plan.
- 115 -
On remarque en premier lieu que les formes des caustiques sont totalement différentes
selon leur appartenance à un plan virtuel (zI > 0) ou un plan réel (zI < 0). Dans le premier cas
elles délimitent une zone d'ombre caractéristique facilement identifiable expérimentalement
qui permettent une mesure du facteur d'intensité de contrainte KI. On peut en effet montrer à
partir des équations (3.24) et (3.25) que le diamètre transverse de la caustique Dt , représenté
figure 3-7, est relié au facteur d'intensité de contrainte KI de la façon suivante [76] :
( ) ν
π=
hzDE
17,3322K
I
25t
25I (3.26)
On peut constater en outre sur la figure 3-7 que les caustiques calculées avec les
relations exactes (3.19) diffèrent très peu de celles obtenues, dans les mêmes conditions, avec
la relation approchée (3.20). Ces dernières seront donc suffisantes en pratique.
Une comparaison avec la caustique expérimentale figure 3-5 montre cependant une
réelle divergence avec les prévisions numériques. Cette différence est imputable non pas à
l'approximation (3.20), comme l'ont montré les simulations numériques, mais plutôt à
l'expression elle-même du déplacement u3 hors plan utilisée. Elle est issue de la théorie 2D,
alors que les points génériques de la caustique expérimentale sont déjà dans la zone 3D. On a
typiquement les paramètres mécaniques suivants pour la plaque en Araldite
[ ] [ ] [ ]( ) ( )5;20;2800;33,0mmt;mmMPaK;MPaE; I =ν , soit d'après (3.25) r0/h ≅ 0.23.
La formule (3.26) a été utilisée par Rosakis et Ravi-Chandar [49] pour caractériser la zone
3D, à l'intérieur de laquelle elle conduisait typiquement à une variation de KI. Il convient donc
de trouver une forme mieux adaptée pour u3 dans la zone 3D qui donne des prévisions plus
réalistes. Cette remarque a motivé notamment l'étude expérimentale conduite au chapitre 4 et
l'application qui en résulte pour les caustiques au chapitre 5.
3.3 Conclusion
Ce chapitre de transition était destiné à la présentation de deux méthodes optiques, très
utiles pour une approche expérimentale de la rupture. La première requiert un montage
interférométrique de type Michelson. Elle permet, sur tout un champ, de quantifier de faibles
variations de reliefs de l'ordre de quelques microns. L'interféromètre de Michelson donne les
lignes de niveaux d'une surface faiblement déformée sous la forme d'un réseau de franges.
L'interfrange correspond typiquement à une variation du relief de 2λ , où λ est la longueur
- 116 -
d'onde de la source lumineuse cohérente associée. Il faut néanmoins disposer d'une surface
suffisamment réfléchissante pour recueillir des franges bien contrastées. La technique quasi
hétérodyne, qui trouve tout son intérêt lorsqu'elle est associée à un système d'analyse
d'images, apparaît comme un moyen de discrétisation rapide et précis du réseau de franges
précédent. A partir de trois images de franges déphasées, on accède au relief en tout point de
la zone étudiée, avec une précision de l'ordre du centième de franges. Une utilisation
combinée de ces deux méthodes parait donc toute indiquée pour mesurer le déplacement hors
plan en pointe d'une fissure.
Les applications des caustiques en mécanique de la rupture se regroupent sous la
dénomination commune de méthode des caustiques. La singularité mécanique est alors
transformée en une singularité optique qui n'est autre qu'une caustique de forme simple que
l'on recueille sur un plan image réel ou virtuel placé à une certaine distance du modèle. Il
apparaît pour un mode I de fissuration, que les caustiques sont définies mathématiquement par
des épicycloïdes. Leurs points génériques sur le modèle fissuré (i.e. les courbes initiales) sont
des cercles concentriques qui définissent la zone d'étude pour un plan image donné. Les
relations mathématiques obtenues sont de plus exactes d'un point de vue géométrique,
uniquement pour les matériaux étudiés en réflexion simple. A partir de la mesure d'une
dimension privilégiée de l'épicycloïde (i.e. son diamètre transverse), il est alors possible de
calculer le facteur d'intensité de contraintes KI. Le calcul, qui suppose la connaissance du
relief en pointe de fissure, se fait classiquement à partir de l'expression 2D du déplacement
hors plan u3 à cet endroit. La confrontation des simulations numériques et d'une caustique
expérimentale montre clairement que l'expression de u3 est inappropriée dans la zone 3D.
Cette remarque se présente comme le point de départ de l'étude expérimentale au chapitre
suivant.
- 117 -
CCHHAAPPIITTRREE 44
DETERMINATION EXPERIMENTALE DU DEPLACEMENT HORS PLAN EN
POINTE DE FISSURE POUR UNE PLAQUE CHARGEE EN MODE I.
FORMULATION D'UNE EXPRESSION THEORIQUE.
« Comme expérimentateur, j'évite les systèmes
philosophiques, mais je ne saurais pour cela
repousser cet esprit philosophique qui, sans être
nulle part, est partout, et qui, sans appartenir à
aucun système, doit régner non seulement sur
toutes les sciences, mais sur toutes les
connaissances humaines…»
Claude Bernard.
- 118 -
- 119 -
1. INTRODUCTION
L'interférométrie associée à la technique quasi hétérodyne sont appliquées dans cette
partie à la mécanique de la rupture. La mise en œuvre expérimentale est décrite pour une
plaque élastique de type SEN chargée en mode I. Trois exemples seront ainsi étudiés, à savoir
deux plaques en PMMA d'épaisseurs respectives 8mm et 6mm et une plaque en Araldite de 5
mm d'épaisseur. Ce chapitre a principalement deux objectifs : le premier est de proposer une
méthode expérimentale appropriée et suffisamment précise pour mesurer le déplacement hors
plan (de la surface libre de la plaque) en pointe de fissure. Le second est de construire, à partir
des résultats expérimentaux donnés par l'interféromètre, une expression mathématique de ce
déplacement, physiquement acceptable à l'intérieur de la zone 3D. Une analyse par éléments
finis au chapitre 2 montrait en effet clairement une différence importante, précisément dans la
zone 3D, entre le déplacement hors plan calculé et les prédictions de la théorie 2D. Rappelons
que les écarts avec la théorie 2D se produisaient typiquement pour une distance radiale en
pointe de fissure inférieure à la demi épaisseur du modèle.
Le déplacement hors plan u3 se présente "géométriquement" comme la variation de
relief de la surface du modèle sous l'effet du chargement (effet Poisson), relief qui peut être
caractérisé selon le chapitre 3 par un réseau de franges avec l'interférométrie de Michelson.
L'utilisation d'un logiciel d'analyse développé au laboratoire (logiciel Interf 32) permet
ensuite, à partir de trois images de franges déphasées, le calcul du relief en tout point de la
surface déformée, à un plan de référence près (le choix est fait arbitrairement lors du calcul).
Pour accéder au déplacement u3 recherché, nous verrons qu'il faut néanmoins déterminer
précisément ce plan de référence. La démarche proposée consiste alors à recaler les données
calculées par le logiciel avec l'évolution du déplacement hors plan prévue par la théorie 2D
(toujours vraie) à l'extérieur de la zone 3D. Par suite, on est conduit à résoudre un système
d'équations surdéterminé à quatre inconnues qui permet de trouver par une méthode de
minimisation la position du plan de référence et le facteur d'intensité de contraintes KI. Les
données "expérimentales" ainsi recalées, renseignent alors sur l'évolution de u3, à l'intérieur de
la zone 3D. Une comparaison est ensuite possible avec les résultats fournis par la
modélisation numérique. Une formulation mathématique nouvelle du déplacement est
finalement proposée pour le mode I, valable quelle que soit la zone d'étude (2D classique ou
3D) en pointe de fissure. Elle est paramétrée en outre par six constantes qui dépendent
- 120 -
uniquement du matériau utilisé et dont on donnera une estimation numérique pour les trois
exemples présentés.
2. CONSIDERATIONS EXPERIMENTALES
2.1 Le dispositif expérimental
2.1.1 Description du site
Le dispositif expérimental utilisé est constitué de l'interféromètre de Michelson montré
figure 4-1. Il regroupe bien sûr les éléments optiques classiques présentés au chapitre
précédent, à savoir un laser argon, un cube séparateur qui joue ici le rôle de lame semi
réfléchissante et un miroir de référence. L'ensemble est monté sur un système de rails (fixes)
disposés en croix, au centre duquel se trouve le cube séparateur. Aux extrémités de la croix se
trouvent le miroir de référence et une plaque fissurée (de type SEN) chargée en mode I, de
dimensions planes caractéristiques 160 mm × 290 mm. Les rails sont surélevés et la plaque
orientée de manière à pouvoir éclairer perpendiculairement la pointe de fissure avec un
faisceau lumineux parallèle suffisamment étendu. L'interféromètre repose sur un marbre qui
permet d'éviter les vibrations parasites.
Figure 4-1 :Vues du site expérimental
- 121 -
Le principe de fonctionnement de l’interféromètre a été exposé au chapitre précédent. Il
est néanmoins résumé de façon schématique dans le cas présent figure 4-2. Des franges
d’interférence apparaissent sur l’écran du moniteur si la différence de chemin optique des
rayons émergeants en C est inférieure à la longueur de cohérence du laser (environ 6 cm).
Rappelons que cela correspond à une distance relative entre la plaque et le miroir inférieure à
3 cm.
L'acquisition d'images se fait grâce au logiciel Pcscope qui est lancé à partir d'un PC
classique, relié à une caméra CCD et un moniteur de contrôle que l'on aperçoit sur la
figure 4-1. La caméra est libre de se déplacer à la fois sur le rail et perpendiculairement à ce
dernier. Les mouvements transversaux (limités à quelques cm) sont assurés à l'aide de deux
platines de translation micrométriques fixées à la caméra. Elles offrent au manipulateur une
possibilité supplémentaire de réglage (précis) du capteur CCD, pour centrer une image par
exemple. On remarquera figure 4-1, la présence d'un objectif indépendant de la caméra qui
peut se mouvoir également sur le rail. Il permet de cette façon d'obtenir un élargissement (i.e.
un zoom) relativement important de la zone en pointe de fissure.
Notons enfin ici la présence d'une lame piézo-électrique sur laquelle est collé le miroir
de référence. Actionné à distance par système électrique, il engendre de faibles translations du
miroir perpendiculairement aux faisceaux incidents. On peut ainsi déphaser les images de
franges.
Figure 4-2 : Interféromètre de Michelson appliqué à la mécanique de la rupture
- 122 -
2.1.2 Elargissement du faisceau initial
On remarquera sur figure 4-1, outre une lentille L de distance focale f = 140 mm, un
doublet d'éléments optiques placés entre le cube séparateur et le laser. Ils assurent
principalement trois fonctions. La première est de faire converger la source laser au niveau de
la focale de la lentille convexe L afin d’obtenir un faisceau parallèle à l'entrée du cube. La
source laser est également filtrée, en supprimant une partie importante du bruit résultant de
l’émission laser. Il s'agit enfin d'obtenir un champ parallèle élargi sur une zone d'environ 20-
25 mm de diamètre qui correspond typiquement aux dimensions de la lentille utilisée. On
dispose ainsi d'une zone éclairée (la zone d'étude) suffisamment importante en pointe de
fissure.
Sourcelaser
O2
L1 L2D
α2
f2f1ff2
O1
L
Zoneéclairée
α1
Sourcelaser
L1 D
α1
f
L
f1
O1
Zoneéclairée
d
Figure 4-3a
Figure 4-3b
Figures 4-3 : Principe d'élargissement du faisceau laser
- 123 -
Le doublet optique est ainsi constitué de deux objectifs de microscope tenus par deux
montures indépendantes qui peuvent glisser sur le rail. Entre les deux objectifs, fixé à l'une
des montures se trouve un diaphragme D dont l'ouverture est typiquement de 15 µm. Le
premier objectif se comporte globalement comme une lentille L1 de faible focale f1 qui fait
converger le faisceau laser "brut" en un point O1, situé à l'intérieur de l'ouverture du
diaphragme D. Ce dernier agit ici principalement comme un filtre fréquentiel qui donne en
sortie un faisceau spatialement épuré (faiblement diffracté) qui se propage avec un certain
angle d'ouverture α1. On montre schématiquement figure 4-3a le dispositif précédent lorsque
le plan focal de la lentille L est situé sur D. En sortie le faisceau parallèle élargi est en général
limité à une portion de la lentille.
Le rôle principal du deuxième objectif, assimilé à nouveau à une lentille L2 de focale f2,
est simplement d'augmenter l'angle α1. Il est situé de façon à faire focaliser les rayons
lumineux issus de O1 en un point image (conjugué) O2. Schématiquement sur la figure 4-3b, le
plan focal objet de L2 est placé à une certaine distance d après D, qui détermine la position de
O2 et l'angle de sortie α2 des rayons lumineux en O2. Notons que, par construction, O2 se
trouve toujours après le plan focal image de L2. Le cas limite (i.e. O2 sur le plan focal image)
correspondrait à des faisceaux lumineux incidents parallèles. Avec l'objectif de microscope la
focale f2 est suffisamment petite, pour qu'une faible distance d sur la figure 4-3b suffise à
dévier considérablement les rayons en O2 ,soit α2 > α1. Lorsque O2 appartient au plan focal
objet de L, on peut obtenir ainsi en sortie un champ parallèle qui couvre l'ensemble de la
lentille. Notons qu'un résultat semblable ne pourrait être envisagé dans le premier cas qu'en
disposant d'une lentille L de focale bien plus grande. L’ajout d’un deuxième objectif réduit
ainsi considérablement l'encombrement du montage optique. Dans notre cas, la longueur
totale de l’ensemble optique nécessaire à élargir le faisceau laser n’excède pas 27 cm. Il
appartient néanmoins au manipulateur de faire correspondre (au mieux) les axes optiques de
tous ces éléments avec la direction du faisceau laser incident. La position relative des objectifs
doit être en outre correctement appréciée (en tenant compte de L) pour obtenir le résultat
souhaité.
- 124 -
2.1.3 Le système de chargement
Le système de chargement est constitué d'un cadre métallique qui a été fixé à la croix.
Comme le montre la figure 4-4 une vis V1, en contact avec un mors, bloque verticalement
l’une des extrémités de la plaque au niveau de la partie inférieure du cadre. L’autre mors est
relié à une deuxième vis V2 qui elle même est solidarisée à un capteur de force et une tige
filetée. L’ensemble subit un mouvement vertical ascendant en serrant la molette sur la
figure 4-4. On engendre ainsi une force de traction F, dont la résultante est parallèle à l’axe
(V1V2) et l’intensité mesurable avec un voltmètre. Les têtes des deux vis peuvent se
positionner librement à l'intérieur des mors ce qui atténue considérablement les effets de
flexion hors plan indésirables. L’effort de traction est réparti suivant la largeur de la plaque au
niveau de sept vis qui relient l’éprouvette aux mors.
Figure 4-4 : Schéma du montage de traction
- 125 -
Il est toujours possible de modifier légèrement l’orientation de la plaque en lui faisant
subir une petite rotation d’axe (V1V2). Notons également la présence de deux guides fixés
symétriquement par rapport à la fissure sur l’un des montants du cadre, comme l’indique la
figure 4-4. Ils permettent de corriger un léger écartement hors plan des lèvres de la fissure qui
apparaît lorsque le chargement est appliqué. Cet effet, difficilement contrôlable lors du
chargement, perturbe légèrement la symétrie du réseau de franges attendue pour un problème
en mode I idéalisé. Le chargement appliqué n’est en effet jamais totalement plan en pratique
et un léger mode III peut se superposer au mode I. On supprime "artificiellement" ce mode III
(sans modifier le mode I) en ramenant les lèvres à leur position initiale à l’aide de petites vis
(de pas très faible) montées au préalable sur les guides. On s’arrange alors pour qu’elles
exercent une poussée (opposée) sur les faces de l’éprouvette qui compense la résultante de
cisaillement hors plan engendré. Cette opération nécessite un pas de vis relativement faible.
2.1.4 Caractéristiques et préparation des éprouvettes
Les éprouvettes utilisées pour l'expérimentation ont toutes pour dimension plane
160 mm × 290 mm, avec une distance entre mors de 270 mm (voir figure 4-4). Elles ont été
réalisées dans deux matériaux différents de type fragile. Le PMMA est utilisé pour les
éprouvettes d’épaisseur 8 mm et 6 mm. L’éprouvette de 6 mm a été usinée avec une plaque
rectangulaire (de bonne planéité) que nous avons achetée chez un fabricant sous la marque
commerciale d’Altuglas CN. Il ne faut pas s’attendre néanmoins à ce qu’elle présente des
caractéristiques mécaniques (E, ν) identiques à l’éprouvette de 8 mm, qui provient d’une
plaque de Plexiglas qui était stockée au laboratoire. Le PMMA, dont on a rappelé quelques
propriétés mécaniques et optique au chapitre 2, est en effet hygroscopique. Les effets du
vieillissement se traduisent dans certains cas par une perte de l'eau absorbée qui durcit et
fragilise donc le matériau. Les éprouvettes de 8 et 6 mm seront appelées respectivement
PMMA(1) et PMMA(2). La dernière éprouvette en Araldite a une épaisseur de 5 mm.
L’Araldite est un matériau à comportement fragile qui présente de faibles effets
viscoélastiques. A l’inverse du PMMA, il est d’une grande sensibilité optique et notamment
hautement anisotrope optiquement [78].
Suite aux essais de traction réalisés par Tie Bie et Dupré avec les matériaux présentés
ci-dessus [60], nous regroupons table 4-1 les constantes mécaniques (E, ν) caractérisant nos
éprouvettes. Ces valeurs moyennes résultent des courbes contraintes-déformations obtenues
avec la méthode expérimentale du suivi de taches, décrite au chapitre 2. Il faut préciser
- 126 -
également que les éprouvettes utilisées pour les essais de traction sont issues des plaques qui
ont servi à usiner les modèles fissurés. De plus la machine de traction permet de choisir la
vitesse de chargement qui est prise dans notre cas à 0,2 mm/minute. Ce choix est justifié afin
d'assurer un comportement comparable à celui d'une sollicitation statique.
Les modèles fissurés de type SEN ont été réalisés dans le but d'étudier un mode I de
chargement. Pour que l'étude puisse se dérouler dans de bonnes conditions, il est important
que les fissures conservent une direction perpendiculaire à l'effort de traction. Pour réaliser la
fissure nous disposons d'une lame aiguisée (i.e. lame du cutter) qui vient se loger dans une
entaille usinée au préalable sur l'un des cotés de l'éprouvette. Un léger choc sur la lame ainsi
guidée engendre une propagation de la fissure. On n'est certes pas assuré à chaque fois
d'obtenir le plan fissuré souhaité, perpendiculaire à la direction du chargement et aux faces
latérales de la plaque ; tout dépend bien sûr de la façon dont le coup est porté. Néanmoins, il
est possible d'utiliser accessoirement deux blocs de métal en U maintenus de part et d'autre de
l'éprouvette avec des serre-joints. Ils sont disposés de façon à entourer l'entaille initiale et
orientés selon la direction de propagation souhaitée, servant ainsi de guide. Après un premier
coup qui provoque un départ de la fissure sur une distance limitée, on libère l'éprouvette des
blocs. Le(s) coup(s) suivant(s) permet(tent) en général une propagation relativement contrôlée
de la fissure qui suit à quelques degrés près la direction souhaitée. Lorsque l'opération est
réussie, on constate que le front de fissure présente toujours une forme qui s'apparente à une
parabole, symétrique par rapport au plan médian de la plaque. La longueur de fissure retenue
se situe entre le tiers et la demi largeur de la plaque. Il convient, pour les manipulations en
mode I, de ne conserver que les éprouvettes dont les fissures s'approchent au mieux des
conditions géométriques précédentes. Tout écart important, même lorsque le chargement est
plan, engendre immanquablement l'apparition des modes II et III de fissuration.
PMMA(1) PMMA(2) Araldite
Epaisseur de la plaque en [mm] 8 6 5
Longueur de la fissure en [mm] 60 62 64
E en [MPa] 3000 2600 2830
ν 0,37 0,38 0,33
Table 4-1 : Caractéristiques mécaniques et géométriques des éprouvettes expérimentales
- 127 -
Afin d’assurer une bonne réflexion de la lumière, la face avant des modèles fissurés
est recouverte au préalable d’une fine couche d’aluminium (dont l’épaisseur est inférieure à
50 nm). Ce dépôt est réalisé dans une chambre à vide, dans laquelle un fil d’aluminium est
vaporisé sur la face de la plaque. Les matériaux sont donc rendus totalement opaques et l'on
évite ainsi les réflexions sur la face arrière qui conduiraient à un réseau de franges inapproprié
pour notre étude. Il faut veiller enfin à conserver un état de surface propre en pointe de fissure
en évitant les traces de doigt ou toute rayure malencontreuse.
2.2 Démarche expérimentale
2.2.1 Estimation du facteur d'intensité de contraintes
Les éprouvettes précédentes sont chargées en contrôlant la force de traction appliquée
F qui se déduit aisément de la lecture du voltmètre. L'effort transmis dans une section droite S
de la plaque, après les mors, est représenté classiquement par une contrainte nominale
uniforme SFappl =σ qui sollicite la fissure en mode I. En se référant au chapitre 1, nous
sommes en mesure de donner une estimation du facteur d'intensité de contraintes SENIK appliqué, pour la configuration géométrique et le chargement présents. Rappelons que
la détermination de SENIK nécessite la connaissance d'une fonction ( )WV,WaY où a, W, V
sont respectivement la longueur de la fissure, la largeur et la longueur de l'éprouvette. Les
valeurs de ( )WV,WaY sont calculées table 4-2 pour les configurations géométriques
présentes. On a d'après (1.53) :
( ) aSFWV,WaYKSEN
I π= (4.1)
Notons qu'il est assez difficile de donner ici avec précision les valeurs des rapports
a/W et surtout V/W. La longueur effective des éprouvettes est prise à 270 mm, soit
approximativement un rapport 84,0W/V = . Il faut rappeler du reste que ce rapport influence
assez peu le résultat final lorsqu'il est compris entre 0,5 et 1. La table 4-2 regroupe les valeurs
de SENIK calculées pour nos trois éprouvettes en fonction des rapports a/W et V/W retenus et
de la force F enregistrée. On donne par la même occasion le taux de biaxialité B calculé dans
les trois cas.
- 128 -
PMMA(1) PMMA(2) Araldite
F en [N] 1200 720 570
σappl en [MPa] 0,93 0,75 0,71
a/W 0,375 0,387 0,40
V/W 0,84 0,84 0,84
( )WV,WaY 1,98 2,05 2,12
B -0,56 -0,55 -0,54
]mmMPa[enKSENI 25,3 21,5 21,3
Table 4-2 : Facteur d'intensité de contraintes évalué en fonction de la force appliquée F et des
données géométriques relatives aux éprouvettes d'étude
2.2.2 Présentation des interférogrammes associés
Après avoir réglé l'interféromètre et la caméra CCD, on visualise sur le moniteur de
contrôle des franges d'interférence concentriques entourant la pointe de fissure. Elles
témoignent de la présence d'un puits qui creuse la surface de l'éprouvette de façon régulière à
l'approche de la pointe de la fissure. En ajustant la position du miroir de référence, les franges
observées sont rendues globalement symétriques par rapport à la fissure, comme on l'attend
du reste pour un problème en mode I. Néanmoins au voisinage des lèvres, la symétrie peut
être altérée à cause principalement du léger écartement hors plan des lèvres de la fissure (i.e.
le mode III). Il convient de réduire cet effet de bord, qui engendre un mode III résiduel, à
l'aide de la technique exposée au paragraphe 2.2.1. Pour ce faire un moyen efficace consiste à
visualiser en même temps une caustique sur un plan image virtuel. Lorsque le dispositif de
chargement est correctement réglé (pour engendrer un mode I suffisamment pur), la caustique
prend une forme bien symétrique par rapport à la fissure, identique à celle de la figure 3-5. Le
mode II a, quant à lui, très peu d'influence sur nos éprouvettes et ne perturbe pas la symétrie
du réseau de franges.
Nous montrons sur la figure 4-5 les interférogrammes réalisés en pointe de fissure
avec les trois éprouvettes d'étude précédentes, soumises respectivement aux forces de traction
F de la table 4-2. La fissure apparaît verticalement en haut ou en bas sur les images en
fonction de l'orientation de la caméra. Il s'agit en réalité de l'horizontale sur le modèle. La
- 129 -
caméra est montée sur un support qui nécessite de la tourner d'un angle droit pour réaliser les
prises de vue, d'où l'orientation correspondante de la fissure sur les images. Sur la gauche, les
interférogrammes correspondent à un champ qualifié de large qui s'étend en partie sur la zone
2D présentée lors de l'étude théorique. Nous verrons par la suite que ces images sont
indispensables pour recaler les données expérimentales fournies par interférométrie. Un
élargissement de la zone d'étude initiale est possible en modifiant à la fois la position et le
réglage de l'objectif placé devant la caméra CCD. Il en résulte les images de franges montrées
sur la partie droite de la figure 4-5. Notons que ces images sont obtenues dans les mêmes
conditions expérimentales que pour le champ large, c'est à dire en veillant à ne pas bouger
l'interféromètre et le système de chargement. Il est intéressant de remarquer que les franges ne
se densifient pas en pointe de fissure et sont donc de ce fait exploitables à cet endroit.
Les franges sur la figure 4-5 rendent compte à la fois du relief de la surface latérale de
la plaque étudiée et de l’orientation de cette surface par rapport au miroir de référence. Notons
que chaque saut de frange représente une élévation du relief de 257 nm (avec notre laser).
Généralement, pour une surface non déformée et suffisamment plane (typiquement un
miroir), seules des franges rectilignes et parallèles sont visibles. Les deux phénomènes sont en
fait couplés et nous verrons que l’analyse des franges d’interférence ne donne pas directement
la contraction de la surface du modèle, due au chargement uniquement. On peut en outre
vérifier expérimentalement le caractère fragile des matériaux utilisés. Lorsque les éprouvettes
sont déchargées, la variation de relief devient négligeable en pointe de fissure. En orientant le
miroir de référence parallèlement à la surface d'une éprouvette, on observe alors une teinte
quasiment uniforme, où très peu de franges sont visibles dans les zones d'étude précédentes.
On en déduit que la zone plastique, où les déformations sont permanentes, reste très réduite et
n'influence pas les mesures qui suivent.
- 130 -
Figure 4-5 : Interférogrammes obtenus en pointe de fissure (champ large et champ zoomé)
2.2.3 Détermination du facteur de grandissement
Les distances réelles, relatives aux objets (i.e. les éprouvettes fissurées), sont évaluées
à l'aide d'un réseau de traits transparent de pas constant (croisés ou non), que l'on superpose
sur chacune des images de franges. On constitue ainsi six images de référence, dont celles
associées au PMMA(2) sont montrées sur la figure 4-6 à titre d'exemple. Le pas réel vertical
- 131 -
du réseau, noté PV vaut 1 mm dans les deux cas. Les images enregistrées par la caméra sont
codées en 8 bits (256 niveaux de gris) sur une matrice 512 × 512 pixels. Comme on peut le
voir la figure 4-6 on associe habituellement un repère ( )J,I,O
à l'image traitée, ce qui permet
de repérer les points images (i.e. les pixels) par les coordonnées entières (xpix, ypix) avec
512y,x0 pixpix <≤ . Notons que les pixels sont rectangulaires avec un rapport hauteur/largeur
constant noté γc qui dépend de la caméra utilisée ; soit ici 0,71. La hauteur et la largeur d'un
pixel sont définies pour nos images respectivement suivant la direction I
et J
. On
remarquera d'ailleurs un allongement vertical des images présentées (proportionnelles aux
originales) dû à la caméra CCD.
Les images de référence nous servent à déterminer le facteur de grandissement γ,
défini comme le rapport d'une longueur réelle (en mm par exemple) sur l'objet étudié sur sa
longueur effective dans le plan image (en pixels). L'exploitation des réseaux de franges se fait
quantitativement par une analyse numérique points par points des images associées qui
nécessite la connaissance de ce facteur, afin d'attribuer chacune des valeurs calculées sur
l'image au point correspondant sur la face de la plaque.
Figure 4-6 : Images de référence pour le PMMA(2) avec un réseau croisé millimétré
- 132 -
Afin de limiter les erreurs de mesure, il convient de déterminer γ en comptant n traits
du réseau sur une distance DI assez grande de l'image. Il vient alors :
I
V
DPn
=γ (4.2)
où DI est évaluée dans notre cas en nombre de pixels selon la direction J
, soit par exemple
figure 4-6 DI ≅ 506 pixels et n = 15.
Considérons en outre les variations de longueur pixx∆ ou pixy∆ prises respectivement
selon les directions I
ou J
du plan image, les valeurs correspondantes réelles x∆ et y∆ sont
données par la relation :
∆γ=∆γ∆γ=∆
pixc
pix
yyxx (4.3)
2.2.4 Mise en œuvre de la méthode quasi-hétérodyne
L’analyse des franges d'interférence se fait au moyen du logiciel Interf 32 qui calcule
la phase en tout point de l'image par quasi-hétérodynage (cf. chapitre 3). La mise en œuvre de
la méthode avec le logiciel nécessite la prise de trois images déphasées (enregistrées au
préalable). Après avoir fourni certains paramètres d'entrée dont notamment les
caractéristiques optiques du montage (la longueur d'onde λ de la source, la valeur λ/2 de
l'interfrange), les grandissements γ et γc, l'utilisateur accède alors au relief de la plaque sur la
zone d'étude.
Pour chacun des modèles fissurés, on réalise une série de trois images déphasées, en
champ large et en champ zoomé, à l'aide d’un système de contrôle agissant sur la lame piézo-
électrique. Les images obtenues sont qualitativement identiques à celles de la figure 4-5 et ne
seront donc pas présentées ici. Précisons qu'un déphasage relativement uniforme pour tout le
réseau de franges considéré, est obtenu en translatant le modèle étudié perpendiculairement au
plan de référence choisi pour évaluer initialement le relief de la surface [63]. Dans notre cas le
déphasage recherché est effectué de manière similaire par simple translation du miroir de
référence. La lame piézo-électrique assure précisément cette opération en conservant la
direction d'origine du miroir (établie lors du réglage) et donne le résultat souhaité.
- 133 -
La figure 4-7 montre le résultat du calcul effectué par le logiciel avec les six cas
d'étude précédents. Le relief est présenté sous la forme d'isovaleurs du déplacement hors plan
données en µm, à partir d'un point de référence PR où débute le recalage de la phase.
L'utilisateur impose une valeur de la phase en ce point qui est par défaut le pixel (128, 128).
On prend habituellement 0° pour la phase, ce qui donne alors une valeur nulle pour le relief à
cet endroit. Par la même occasion, le plan de référence servant à donner les résultats du calcul
est fixé. On justifie de ce fait les valeurs positives ou négatives prises par le déplacement hors
plan par rapport à ce plan sur la figure 4-7. Précisons ici que pour recaler correctement la
phase, il convient d'ajouter sur les images de franges un trait noir sur la fissure afin de
matérialiser suffisamment la discontinuité lors du calcul. Les zones noires correspondent aux
points où des valeurs aberrantes ont été automatiquement exclues en raison par exemple de la
densité des franges ou de la présence d'impuretés localisées.
Les profils correspondants sont observés en niveaux de gris sur la figure 4-8 selon une
ligne horizontale AB située devant la pointe fissure. Les valeurs incohérentes sont écartées à
l'aide d'un masque en leur imposant une valeur nulle.
- 134 -
Figure 4-7 : Déplacement hors plan en [µm] calculé par quasi-hétérodynage en pointe de
fissure.
- 135 -
Figure 4-8 : Profils associés aux interférogrammes de la figure 4-7 le long d'une ligne
AB située devant la pointe de fissure
Le logiciel permet de sauvegarder, sous la forme de fichiers de données, les valeurs
réelles du relief calculées (par rapport à la référence choisie) figure 4-7, à partir des
paramètres imposés par le montage interférométrique. On notera par la suite ces valeurs wexp.
Les fichiers donnent typiquement les coordonnées des pixels appartenant à la zone de calcul
et les valeurs de wexp associées. Il est possible en outre de récupérer les pixels le long de
segments dont les extrémités sont fixées par l'utilisateur. Nous procéderons de la sorte pour
traiter les données expérimentales fournies par l'interférométrie. En faisant correspondre l'une
des extrémités d'un segment avec la pointe de fissure, on obtient ainsi les valeurs de u3 suivant
- 136 -
une direction radiale du repère polaire classiquement utilisé en mécanique de la rupture (cf.
chapitres 1 et 2). L'exploitation des données ainsi recueillies n'est pourtant pas directe à cause
principalement des grandissements γ et γC et des plans de référence arbitrairement introduits
lors des calculs. Elle nécessite une étude préalable qui fait l'objet des paragraphes suivants.
2.3 Exploitation des données calculées par la méthode quasi-hétérodyne
2.3.1 Etude préliminaire
Comme le montre la figure 4-9, on associe systématiquement par la suite le repère
( )J,I,O
aux images calculées par Interf 32. Avec les notations du paragraphe 2-2-3, à chaque
pixel de coordonnées entières (xpix, ypix) du plan image, correspond une valeur du relief
( )pixpixexp y,xw donnée en µm par rapport à la référence de calcul. La pointe de fissure est
repérée sur l'image par le pixel ( )pixf
pixff y,xP . L'une des fonctionnalités du logiciel Interf 32
est d'offrir la possibilité à l'opérateur d'obtenir interactivement les coordonnées d'un point, en
positionnant la souris sur le point concerné. Cette identification se fait en pratique (pour plus
de précision) à l'aide de l'image de franges correspondante figure 4-5. La position de la fissure
est évidemment strictement identique dans les deux cas.
pixfy
pixfx
0x
Pf
0y
Pint
I
J
O
1x
1yFissure
M(x1, y1)
Image calculée
α
pixfy
pixfx
0x
Pf0y
Pint
I
J
O
1x
1y
α
Image calculée
M(x1, y1)
Fissure
pixintx pix
intx
Fissure en haut Fissure en bas
Figure 4-9 : Représentation des différents repères associés aux images enregistrées
De même, on repère ( )pixint
pixintint y,xP qui représente l'intersection de la fissure avec le
bord inférieur ou supérieur de l'image. On tiendra compte pour la suite d'une faible inclinaison
- 137 -
de la fissure par rapport à la verticale qui est la position idéale de la fissure sur l'image
(l'horizontale en réalité). Les écarts enregistrés résultent de la réalisation expérimentale de la
fissure. Dans un second repère ( )00f y,x,P , dont l'orientation est précisée figure 4-9, la
position réelle d'un point M(x0,y0) est alors donnée par (4.3) :
γγ−ε=γ−ε=
cpixf
pixM0
pixf
pixM0
)xx(y)yy(x (4.4)
où ε vaut +1 ou –1 lorsque la fissure coupe respectivement le bord supérieur ou inférieur de
l'image traitée. Le passage entre ces deux configurations fait tourner le repère ( )00f y,x,P de
l'angle +π.
Considérons maintenant le repère d'étude ( )11f y,x,P directement associé à la fissure,
pour lequel l'axe 1x suit le prolongement de la fissure. Ce repère a même orientation que
( )00f y,x,P et fait un angle α réel avec ce dernier qui est donné par :
( )( ) ] [2,2,1
yyxx
tgc
pixint
pixf
pixint
pixf ππ−∈α
γ−
−=α (4.5)
La formule (4.5) donne un angle α positif pour les deux configurations présentées
figure 4-9. Au contraire α devient négatif si pixint
pixf xx < et pix
intpixf xx > lorsque la fissure est
située respectivement en haut et en bas de l'image. Il faut préciser ici que les angles α calculés
sur la zone d'analyse sont inférieurs à 4°. On obtient alors les composantes réelles ( )11 y,x de
M dans le repère associé au fond de fissure par l'expression classique :
α+α−=α+α=
001
001
ycosxsinyysinxcosx
(4.6)
Pour chacune des images calculées figure 4-7, on constitue une série de fichiers de
données à partir de Interf 32 en sélectionnant des demi-droites issues de la pointe de fissure à
intervalle angulaire régulier (une vingtaine en général). Il faut toujours veiller à conserver le
même intervalle angulaire apparent entre les demi-droites choisies pour le champ large et le
champ zoomé, afin de pouvoir recaler par la suite les valeurs de wexp associées. Les fichiers
ainsi créés peuvent être directement traités avec le logiciel Maple V. Nous y avons
programmé une routine, à l'aide des relations (4.4), (4.5), (4.6) qui transforme
- 138 -
systématiquement les coordonnées des points (en pixels) associés aux directions radiales
récupérées en coordonnées cartésiennes réelles (x1, y1) données dans le repère d'étude
( )11f y,x,P . On calcule alors les coordonnées polaires (R = r/t, θ) normalisées associées à (x1,
y1), où t représente la largeur de l'éprouvette considérée.
Pour résumer, on applique le changement de coordonnées suivant :
( )( ) 512y,x0,
y,xy,xRR pixpix
pixpix
pixpix<≤
θ=θ= (4.7)
qui permet de passer d'un point du plan image à son homologue réel dans le repère associé à
la pointe de fissure, avec ( ) ( )θ≡ ,Rwy,xw exppixpix
exp .
2.3.2 Détermination du plan de référence, calcul de KI
Rappelons que le plan de référence choisi par l'utilisateur lors du calcul de wexp est fixé
arbitrairement à l'aide d'un point référent Pr Les valeurs de wexp (positives ou négatives selon
l'endroit où a été effectué le calcul) dans la zone d'étude sont donc relatives à ce plan. Il
convient de les transformer de manière à représenter le déplacement hors plan recherché, qui
doit résulter uniquement du chargement de l'éprouvette. Par ailleurs les données wexp incluent
implicitement la position encore inconnue de la plaque par rapport au miroir M. En effet une
surface non déformée (i.e. une plaque non chargée) engendre un réseau de franges parallèles
régulièrement espacées si elle n'a pas précisément même orientation que le miroir. Ces
franges témoignent d'une variation linéaire de relief qu'il est difficile voire impossible d'éviter,
lors du chargement. Afin d’en tenir compte, l’équation d’un plan de référence est introduite
dans cette partie.
On considère pour cela le repère orthonormé ( )z,y,x,Pf dont l’origine Pf coïncide avec
le vertex du modèle fissuré (cf. chapitres 1 et 2). Les axes x et y sont associés à la surface
libre et correspondent maintenant au repère d'étude ( )11f y,x,P défini au paragraphe
précédent. En introduisant les coordonnées cylindriques normalisées associées (R = r/t, θ, z),
où t est l’épaisseur de la plaque, la position du plan de référence dans ce système est
représentée par :
0yxref u)sin(Rp)cos(Rpz),R(w +θ+θ==θ (4.8)
- 139 -
Les quantités px et py dénotent respectivement les pentes du plan de référence par
rapport à l’axe x et à l’axe y dans le système de coordonnées (R, θ, z). On notera que les
paramètres px et py ainsi définis ont la dimension d'une longueur. Une translation du plan de
référence normal au plan x-y est représentée par le paramètre u0.
En suivant les résultats numériques du chapitre 2, on peut considérer un état de
contraintes planes 2D prédominant en pointe de fissure lorsque 5,0R > . De plus la solution
de Williams, qui décrit alors le champ de contraintes, peut se réduire à l'expression
asymptotique classique de l'expression (1.52) dans une couronne centrée en pointe de fissure
dont la limite supérieure Rlim dépend typiquement de la géométrie de l'éprouvette. L'analyse
par éléments finis du premier chapitre avait d'ailleurs permis de donner une estimation de
cette limite pour l'éprouvette SEN en fixant typiquement t10aR < . Cette condition
s'applique néanmoins lorsque la longueur a de la fissure est comprise entre le tiers et la demi
largeur de la plaque. Nous prenons ici Rlim = (0,7 ; 0,9 ; 1) respectivement pour le modèle en
PMMA(1), en PMMA(2) et Araldite. On définit ainsi une région 2D bornée en pointe de
fissure dans laquelle nous noterons ici wpl l'expression asymptotique du déplacement hors
plan de la surface libre de la plaque. Soit d'après (1.40) en choisissant de prendre les z>0 vers
l'intérieur du modèle :
( )
( )2tB
Ewavec
wR2
12
cosE
tKz,Rw
appl0
0
21I
pl
σν
=
+π
θν
==θ (4.9)
où, KI représente le facteur d’intensité de contraintes en mode I, considéré ici comme un
paramètre. E et ν sont respectivement le module de Young et le coefficient de Poisson des
modèles fissurés donnés table 4-1. La contrainte appliquée σappl et le taux de biaxialité B sont
également connus (cf. table 4-2).
Lorsque limRR5,0 << , les expressions (4.7) et (4.8) sont reliées aux valeurs wexp
calculées par Interf 32 de la manière suivante :
),R(w),R(w),R(w refplexp θ+θ=θ (4.10)
- 140 -
L'équation (4.10) permet de recaler les données wexp avec la solution théorique 2D (i.e.
wpl), qui est supposée toujours exister dans la zone limRR5,0 << . Il s'agit donc maintenant
de déterminer les quatre paramètres introduits par les équations (4.8) et (4.9), à savoir px, py,
u0 et KI. Pour ce faire nous avons écrit une routine sur Maple V qui sélectionne les valeurs
discrètes ( )ikexp ,Rw θ , provenant des fichiers crées avec Interf32, en imposant la condition
] [limk R;5,0R ∈ . Précisons que les points qui donnent des valeurs aberrantes sont
automatiquement écartés par le programme, quel que soit Rk. Chaque fichier regroupe ainsi
les déplacements ( )ikexp ,Rw θ calculés selon une direction angulaire θi particulière prise
dans l'intervalle ( ) ( )] [ε−πε−π− ; . Cette procédure ne nécessite en outre que les informations
provenant des images d'interférence réalisées en champ large. En pratique, on écarte de
l'analyse les données localisées dans un secteur angulaire ] [εε− ; qui recouvre les lèvres de la
fissure : c'est en effet à cet endroit que les effets du mode III sont les plus sensibles.
Soit plus précisément un angle θ1, pour lequel M1 valeurs de wexp satisfont les
conditions énoncées précédemment. On crée ainsi un vecteur B1 contenant M1 éléments
wexp(Ri , θ1) avec ( )1M..1i = . Correspondant au vecteur B1, une matrice A1 de M1×4 est
obtenue en utilisant le membre de droite de l'équation (4.10). En répétant cette procédure avec
N angles θj linéairement distribués dans l'intervalle ( ) ( )] [ε−πε−π− ; , une série de N vecteurs
Bj et N matrices Aj sont ainsi crées (j=1..N). Les vecteurs Bj , constitués de Mj éléments, sont
alors réunis pour donner le vecteur ( )TN321 BBBBB ,...,,,= , contenant
M= )M( N1j j∑ = éléments. De la même façon, une matrice A associée est obtenue en joignant les
sous-matrices Aj. Cette matrice qui contient alors M×4 éléments se présente sous la forme :
=
N
3
2
1
A ...
A A A
A
La détermination des quatre paramètres introduits précédemment se fait par la
résolution du système matriciel linéaire surdéterminé :
A X = B (4.11)
- 141 -
où le vecteur inconnu X s'écrit ( )TI0yx K,U,p,p avec 000 wuU += d'après (4.9).
La résolution du système (4.11) a été réalisée avec les valeurs numériques données table
4-1 pour les trois éprouvettes expérimentales. Les paramètres ainsi calculés sont regroupés
table 4-3. Nous avons retenu 19 ou 25 valeurs θi pour θ, prises dans un intervalle angulaire
dont la taille varie de [ ]°°− 120;120 à [ ]°°− 170;170 , soit tous les 10° ou 20° en moyenne.
Pour le champ large, il faut traiter ainsi 19 ou 25 fichiers de données, qui fournissent chacun
les valeurs du relief ( )ikexp ,Rw θ selon les 19 ou 25 directions θi choisies avec bien sûr la
condition ] [limk R;5,0R ∈ . Au final, il en résulte une matrice A qui contient généralement
plus de 3000 éléments. L'orientation d'une demi-droite issue de la pointe de la fissure est
accessible au degré près avec le logiciel Interf 32. La valeur de θ qui en résulte est néanmoins
donnée à l'aide des coordonnées (en pixels) des points images considérés. Elle sera donc
recalculée (cf. paragraphe 2.3.1) et convertie en valeur réelle correspondante dans le repère
( )y,x,Pf avant le traitement des données associées.
PMMA(1) PMMA(2) Araldite
w0 en [µm] -0,25 -0,18 -0,11
U0 en [µm] 2,6 1,8 2
px en [µm] 0,71 0,34 1,2
py en [µm] 0,43 -0,08 0,22
u0 en [µm] 2,35 1,62 1,89
mmMPaenK I 26,67 22,11 20,21
Table 4-3 : Valeurs numériques des paramètres px , py , u0 et KI
On observe en règle générale une stabilité correcte des valeurs présentées ci-dessus en
modifiant l'intervalle sélectionnant les donnés wexp. Notre programme permet de changer en
effet les bornes de [ ]limR;5,0 . Ainsi une variation limR∆ de ±10 % entraîne une modification
de la valeur de KI calculée de l'ordre de ±1 % à ±2 % selon le modèle. On est en droit
également de s'interroger sur la stabilité de KI vis à vis de la borne inférieure de l'intervalle, à
savoir 0,5. En effet cette valeur ne résulte pas d'un calcul, mais plutôt d'une estimation basée à
la fois sur les résultats numériques du chapitre 2 et les observations expérimentales de
- 142 -
Rosakis et Ravi-Chandar [49]. Là encore en prenant (0,5 ±0,05) on observe une variation de
KI du même ordre de grandeur que précédemment. La situation se dégrade lorsque l'on réduit
cette valeur de façon plus significative, preuve que les effets 3D s'accentuent. Il paraît
cependant relativement difficile de quantifier précisément la séparation entre la zone 2D et la
zone 3D qui du reste s'opère de façon progressive. Nous conserverons donc la valeur 0,5 qui
est représentative de cette zone de transition. Une comparaison avec les résultats obtenus pour
KI table 4-3 et table 4-2 donne une erreur relative qui n'excède pas 5%.
Il faut disposer cependant pour le calcul d'un nombre suffisamment important de
données, réparties dans la zone 2D de façon homogène. Lors de la sélection des demi droites,
on se réfère toujours à la direction de la fissure (i.e. θ = 0) qui n'est pas perturbée par le mode
III. Rappelons en effet ici l'expression 2D du déplacement hors plan qui correspond à un
chargement en mode III pur d'une plaque élastique [26] :
[ ]2
sin/r2G
Kw 21III θπ= (4.12)
où KIII est le facteur d'intensité de contraintes en mode III et ( )12EG +ν= le module de
cisaillement.
Les résultats de la table 4-3 devraient être théoriquement indépendants à la fois du
nombre de demi droites utilisé pour extraire les déplacements et de leurs positions relatives
dans la zone 2D. En pratique, il en est approximativement ainsi lorsque les directions radiales
"partitionnent" suffisamment la zone 2D considérée, corrigeant de ce fait considérablement
les erreurs éventuelles dues par exemple à des défauts de planéité localisés de la surface avant
chargement. En outre il faut éviter de prendre en compte la zone angulaire proche des lèvres
de la fissure sujette de façon plus significative au mode III résiduel. De plus à cet endroit, le
déplacement hors plan, associé au mode I uniquement, devient relativement faible à l'inverse
de (4.12) qui peut être prépondérant. Ces remarques ont motivé les choix qui ont été faits pour
les calculs précédents. On a pu vérifier dans ce cas que le retrait ou le remplacement de l'une
ou l'autre des courbes modifiait globalement très peu les valeurs de KI.
- 143 -
2.3.3 Représentation du déplacement hors plan en pointe de fissure
Considérons à présent la relation (4.10). Les valeurs [ ]( )ikrefexp ,Rww θ− donnent
une discrétisation du déplacement hors plan recherché qui résulte uniquement du chargement
en mode I. Remarquons alors que l'on accède ainsi au déplacement hors plan dans la zone 3D
lorsque Rk < 0,5. Afin d'obtenir des informations plus précises au voisinage immédiat de la
pointe de fissure, nous utilisons également les valeurs calculées par Interf 32 à partir des
interférogrammes enregistrés en champ zoomé. On constitue des fichiers de données suivant
le même principe que ceux qui ont été établis pour le champ large. Un traitement avec
Maple V conduit alors à une représentation du relief sous la forme d'une fonction
( )ikexp ,Rw θ∗∗ dans le repère réel en pointe de fissure. Rappelons que l'on récupère les valeurs
calculées ( )ikexp ,Rw θ∗∗ suivant les directions angulaires θi fixées par le champ large (avec
i=1..19 ou i=1..25 selon les éprouvettes considérées). Il revient donc à l'expérimentateur de
bien respecter la condition précédente lors de l'établissement des fichiers de données.
Cependant comme nous l'avons vu précédemment pour le champ large, les valeurs
( )ikexp ,Rw θ∗∗ ne représentent pas encore le déplacement hors plan recherché. Il convient donc
ici de les recaler avec les valeurs précédentes [ ]( )ikrefexp ,Rww θ− . Le recalage est possible
lorsque le champ zoomé possède une zone commune Ic avec le champ large. Nous avons ainsi
programmé sur Maple V une routine qui extrait les données qui proviennent des deux champs
et qui se trouvent dans la couronne commune [ ]maxcmincc R;RI = . Pour le champ large et le
champ zoomé, on récupère ainsi respectivement les quantités [ ]( )ikrefexp ,Rww θ− et
( )ikexp ,Rw θ∗∗ avec ckk IR,R ∈∗ . Trois directions angulaires θi privilégiées et suffisantes en
pratique ont été retenues pour le recalage, à savoir 0 et ±π/2. On réalise une interpolation
linéaire des six "courbes" formées par les couples de points [ ]( )( )ikrefexpk ,Rww,R θ− ou
( )( )ikexp*k ,Rw,R θ∗∗ . Autrement dit d'un ensemble de points discrets constituée par exemple des
couples ( )( )2/,Rw,R kexp*k π∗∗ , on obtient une droite continue dans l'intervalle Ic qui varie en
fonction de R. Il faut néanmoins considérer un intervalle Ic qui ne soit pas trop étendu (ou le
réduire en conséquence) pour que l'approximation linéaire ait un sens. Les données sont alors
recalées lorsque le système suivant est vérifié :
( ) ( ) ( ) 0uuu)sin(Rppp)cos(Rppp 02010iy2y1yix2x1x =−++θ−++θ−+ ∗∗∗ (4.13)
- 144 -
où 2/,2,0i π−π=θ . Les pentes p1x, p1y et la constante u01 résultent des interpolations
linéaires réalisées à partir des données provenant du champ zoomé. Il en est de même pour les
valeurs de référence p2x, p2y et u02 obtenues à partir du champ large. Les "corrections" ∗∗0
*yx u,p,p sont déterminées, en minimisant le système (4.13) pour les inconnues précédentes,
après discrétisation de la variable R, identique pour les champs larges et zoomés, dans
l'intervalle Ic. Nous rappelons le principe de minimisation d'une fonction en annexe B.
Pour le champ zoomé, on aboutit à une discrétisation du déplacement hors plan
recherché, selon les angles θi choisis, qui s'écrit :
[ ]( )
∗∗∗∗∗∗
∗
+θ+θ=θ
θ+
0ikyikxik*ref
ik*exp
*ref
u)sin(Rp)cos(Rp),R(wavec
,Rww (4.14)
On regroupe les données des deux champs en notant finalement
l'ensemble ( )ijD3 ,Rw θ . Les deux ensembles sont réunis en ordonnant les couples de données
selon les valeurs croissantes de R dans la zone commune avec un algorithme de tri classique.
Les valeurs de ( )ijD3 ,Rw θ sont représentées figure 4-10 par de petits cercles, pour
quelques angles θi pris parmi les 19 ou 25 valeurs utilisées au départ. Les cercles ont un grisé
différent selon qu'ils représentent les données provenant du champ large ou du champ zoomé.
Les courbes en pointillés, indiquent le déplacement hors plan 2D pour les mêmes angles.
Comme attendu, lorsque R>0.5, une bonne correspondance est observée entre la
représentation théorique 2D du déplacement hors plan et les valeurs obtenues pour
( )ijD3 ,Rw θ . Au contraire, lorsque R<0,5 les courbes issues des données expérimentales
montrent clairement une divergence importante avec la théorie 2D : on se trouve typiquement
dans la zone 3D.
- 145 -
Figure 4-10 : Représentations du déplacement hors plan w3D
- 146 -
2.4 Comparaison avec les résultats de l'analyse numérique
Nous proposons pour le PMMA(2), figure 4-11, une comparaison des résultats
expérimentaux précédents avec les valeurs du déplacement hors plan calculées par éléments
finis au chapitre 2. La comparaison est montrée ici pour trois directions angulaires. La valeur
de KI calculée table 4-3 ainsi que les caractéristiques mécaniques et géométriques de
l'éprouvette table 4-2 ont fourni les paramètres d'entrée nécessaires au fonctionnement du
programme. Nous avons alors recherché la fissure parabolique qui semblait la mieux adaptée
pour reproduire les données expérimentales. Il en résulte les paramètres (Xmax, courb) =
(0,05 ; 8) qui ont servi aux calculs présentés chapitre 2. Une démarche identique conduit à des
résultats comparables pour les deux autres types d'éprouvettes.
Figure 4-11 : Comparaison avec le modèle numérique pour le PMMA(2)
- 147 -
3. EXPRESSION THEORIQUE DU DEPLACEMENT HORS PLAN
Les résultats expérimentaux précédents vont nous servir à donner une expression
mathématique du déplacement hors plan du bord libre de la plaque, valide dans la région 3D
entourant la pointe de fissure. Avec à nouveau le système de coordonnées (R, θ, z), nous
proposons d'utiliser l'expression suivante pour représenter le déplacement hors plan :
( )
π−θ+θ
ν==−θ −
R21)e1()2/cos()Ra,2(Eb
EtKzw),R(w Rc
I
5.I
0thD3 (4.15)
où la constante w0 est donnée table 4-3 pour chacun des modèles fissurés. Dans l'expression
(4.15), b et c sont des constantes inconnues et a(θ) une fonction inconnue de θ. EI est une
fonction exponentielle intégrale d'ordre 2 qui assure une transition continue avec l'expression
(4.9) lorsque R > 0.5 et borne le déplacement quand R tend vers zéro. Quelques propriétés
mathématiques des fonctions exponentielles intégrales sont présentées en annexe A. La
fonction EI(2,R) s'exprime explicitement sous la forme :
)0R(,dtt
e)R,2(E1
2
tR
I >∫=∞ −
(4.16)
Les constantes b, c et a(θ) sont déterminées en identifiant l'expression (4.15) et les
données expérimentales ( )ijD3 ,Rw θ . Lorsque θi = 0, on considère tout d'abord le système
d'équations suivant :
)N..1j(,0)0,R(w)0,RR,c,b,a(w)c,b,a(f ijD3jthD3j ===θ−=θ== (4.17)
où 0 < R1 < R2 < R3 < ... < RN < Rlim et a(0) est noté simplement a. Les Rj représentent les
abscisses croissantes des N points expérimentaux qui apparaissent sur les courbes de la figure
4.10 lorsque θi = 0°. N n'est par ailleurs pas forcément identique pour les trois cas d'étude.
Une méthode de minimisation telle que la méthode de Newton (cf. Annexe B) peut être
appliquée afin de trouver un minimum local de la fonction :
∑ ===
N
1i
2i )c,b,a(x,)x(f)x(F (4.18)
- 148 -
Avec des valeurs initiales appropriées la méthode converge vers une solution
présentée table 4-4 pour les trois éprouvettes étudiées. En connaissant les coefficients b et c,
des calculs similaires sont repris cette fois avec le seul paramètre inconnu ( )ia θ pour les
différents angles θi donnant ( )ijD3 ,Rw θ . On détermine ainsi un ensemble de points (19 ou 25
ici) qui donnent l'évolution de la fonction a(θ) dans l'intervalle ] [ππ− ; . Les évolutions sont
présentées pour les trois modèles fissurés figure 4-12.
Finalement en utilisant une technique d'interpolation classique, on montre que la
fonction a(θ) peut se représenter à l'aide du développement suivant :
( ) θ+θ+θ+=θ 34
2321 cosAcosAcosAAa (4.19)
où les Ai ont été calculés pour chacune des éprouvettes et sont regroupés table 4-4. La
fonction (4.19) est une fonction paire de θ sur l'intervalle ] [ππ− ; , comme l'impose la
symétrie du problème. La relation (4.15) prévoit que les coefficients de la table 4-4 soient
sans dimension. Il semble néanmoins que la nature de l'éprouvette, voir le chargement
influencent leurs valeurs avec globalement une valeur constante pour c. Malheureusement ici
nous ne pouvons en donner une signification physique précise qui exigerait du reste un
nombre plus important d'expérimentations avec divers types de matériaux.
Le tracé de la forme théorique (4.15), associé à (4.19) et aux valeurs numériques table
4-4 est donné figure 4-13 en trait plein pour quelques angles θi. Elle reproduit correctement le
déplacement hors plan expérimental w3D, attestant du bon fonctionnement de la démarche
proposée.
PMMA(1) PMMA(2) Araldite
a 15,06 10,75 5,38
b 11,61 9,55 6,74
c 0,99 0,95 0,86
A1 11,73 10,45 9,18
A2 7,42 1,45 1,62
A3 -1,43 -2,74 -4,63
A4 -2,87 1,56 -0,68
Table 4-4 : Evolution des paramètres intervenant dans les relations (4.15) et (4.19)
- 149 -
Figure 4-12 : Evolution de a(θ) dans l'intervalle ] [ππ− ;
- 150 -
Figure 4-13 : Comparaison entre le déplacement théorique (4.15) et les valeurs
expérimentales w3D pour différentes valeurs angulaires
- 151 -
4. CONCLUSION
Dans ce chapitre, une méthode hybride combinant l'interférométrie, la méthode quasi-
hétérodyne et les résultats théoriques 2D a été présentée en vue de déterminer le déplacement
hors plan de la surface libre d'une plaque élastique fissurée chargée en mode I. Les
expérimentations ont été conduites avec trois éprouvettes particulières, deux en PMMA et une
troisième en Araldite. Pour chacune des éprouvettes, deux séries d'interférogrammes ont été
recueillies en vue d'obtenir les valeurs expérimentales du déplacement à la fois au proche
voisinage de la fissure et dans la zone 2D classique.
Un recalage des données interférométriques est dès lors possible dans la zone 2D
lorsque le champ d’interférence est suffisamment étendu (i.e. un champ large) pour couvrir en
partie cette zone. L’interférométrie donne en effet les variations de relief sous la forme d’un
réseau de franges, à un plan de référence près. Le plan de référence est déterminé en recalant,
dans la zone 2D, les valeurs calculées pour le relief, le long d’une série de demi droites issues
de la pointe de fissure avec l’expression 2D théorique du déplacement hors plan. Nous
sommes ainsi conduits à résoudre un système d’équations surdéterminé à quatre inconnues. Il
convient de disposer d’un nombre de données suffisantes afin d’assurer une bonne stabilité du
système. On détermine par suite à la fois le plan de référence inconnu et le facteur d’intensité
de contraintes associé au champ de contraintes 2D. La connaissance du plan de référence
permet alors d’obtenir le déplacement hors plan recherché, qui résulte du chargement en mode
I uniquement. Afin d’obtenir de plus amples informations sur le déplacement hors plan au
proche voisinage de la pointe de fissure, nous utilisons les images de franges obtenues en
zoomant considérablement cet endroit avec l’objectif de la caméra (i.e. le champ zoomé). Les
valeurs donnant le relief sont alors recalées à l’aide des courbes obtenues pour le champ large
(qui elles mêmes sont déjà recalées) en calculant à nouveau un plan de référence convenable.
La méthode proposée permet de mesurer par conséquent le déplacement hors plan non
seulement à l'intérieur de la zone 2D classique mais également au proche voisinage de la
pointe de fissure où les effets tridimensionnels ne sont plus négligeables. Nous donnons
finalement une nouvelle expression du déplacement faisant intervenir une fonction
exponentielle intégrale. Cette expression est paramétrée par six coefficients qui dépendent du
matériau étudié. L'évolution du déplacement issu des données expérimentales est parfaitement
reproduite avec la formulation proposée.
- 152 -
- 153 -
CCHHAAPPIITTRREE 55
APPLICATION A L'EXPLOITATION DE LA METHODE DES CAUSTIQUES.
«Sculpteur, cherche avec soin, en attendant l'extase,
Un marbre sans défaut, pour en faire un beau vase…»
Théodore De Banville (1846).
- 154 -
- 155 -
1. INTRODUCTION
Avec la connaissance d'une nouvelle expression pour le déplacement hors plan, nous
pouvons maintenant modifier les expressions classiques du chapitre 3 décrivant la formation
d'une caustique appartenant à un plan image donné. Il apparaît en effet une différence
qualitative notable en comparant les caustiques expérimentales obtenues en réflexion et les
épicycloïdes idéalisées qui résultent de l'analyse 2D. Ainsi la courbe lumineuse donnant la
caustique expérimentale figure 3-5 n'est certainement pas fermée et s'efface, comme on peut
le remarquer, progressivement vers l'avant. En outre plusieurs campagnes d'essais nous
avaient clairement montrés en début de thèse, que pour des plans images relativement proches
du modèle fissuré, la formulation (3.26) ne donnait pas une estimation correcte du facteur
d'intensité de contraintes KI à partir des caustiques enregistrées. Bien au contraire lorsque les
plans images se rapprochaient de l'éprouvette, nous observions, au lieu de la constante
attendue, une décroissance progressive des valeurs calculées pour KI !
Ce chapitre débute par une simulation numérique des caustiques obtenues avec
l'expression 3D proposée pour le déplacement hors plan, pour un plan image donné. Nous
présentons ensuite un algorithme de calcul qui recherche systématiquement les diamètres
transverses des caustiques ainsi formées. Cette démarche entreprise pour l'Araldite, conduit
alors dans ce cas à une reformulation de la loi (3.26). L'évolution proposée doit permettre de
déterminer correctement le facteur d'intensité de contraintes, quelle que soit la distance du
plan image au modèle fissuré.
2. SIMULATION D'UNE CAUSTIQUE PAR LE DEPLACEMENT HORS PLAN 3D
2.1 Position du problème
Nous résumons ici les équations nécessaires à la représentation d'une caustique pour
un arrangement optique en réflexion. Rappelons schématiquement figure (5-1) le processus de
formation d'une caustique dans un plan image (X1, X2), à partir des extensions virtuelles des
faisceaux lumineux réfléchis à la surface du modèle fissuré. La surface est repérée par le plan
(x1, x2) et distante de zI>0 du plan image considéré.
- 156 -
(X1, X2) (x1, x2)zI
fissureDt
Faisceauincident
)x,x(fw 21thD3 ≡
Caustique
O 3e2e
Figure 5-1 : Représentation schématique en réflexion de la formation d'une caustique
Les points images sont reliés aux points de la surface par la relation linéarisée
suivante, qui résulte de l'expression générale (3.19) :
( )0z2,1i,xfz2xX I
iIii >=∂∂
−= (5.1)
où la fonction f est maintenant donnée par la nouvelle expression du déplacement hors plan thD3w . Le repère d'étude associé est donné précisément figure 3-6. Avec la convention de signe
choisie pour représenter thD3w au chapitre 4 (i.e. 0w th
D3 > vers l'intérieur du modèle),
l'équation de la surface déformée est donc ici :
thD33 wx −= (5.2)
La caustique correspondante est alors le lieu des points sur l'écran pour lesquels le système
d'équations (5.1) n'est pas inversible. Il en résulte que le déterminant ( )21 X,XJ de la matrice
jacobienne associée doit être nul, soit explicitement :
( )( ) 0
xf
xf
xxfz4
xf
xfz21
x,xX,XJ 2
2
2
21
22
21
22I2
2
2
21
2
I21
21 =
∂∂
∂∂
−
∂∂
∂−
∂∂
+∂∂
−=∂∂
= (5.3)
- 157 -
La résolution de (5.3) donne l'ensemble des points de la surface réfléchissante (non
déformée) d'où sont issus les rayons lumineux (réels ou virtuels) formant la caustique.
Autrement dit, pour chaque plan image placé à une distance zI du modèle fissuré, on obtient
ainsi la courbe initiale générant la caustique. Nous avons vu également au chapitre 3 que la
distinction entre les images virtuelles et les images réelles revenait, mathématiquement, à
changer le signe de zI dans l'expression (5.3). Typiquement on a zI>0 et zI<0 pour les images
respectivement virtuelles et réelles.
2.2 Simulation d'une caustique en réflexion
La fonction f s'exprime en général à l'aide des coordonnées polaires ( )θ,r associées
aux coordonnées cartésiennes (x1, x2). Pour les représentations qui suivent, il est commode d’
adimensionner la coordonnée radiale r en prenant à la place R=r/h, où h est l'épaisseur de la
plaque. Le plan image associé est alors repéré par les coordonnées cartésiennes normalisées
( )h/X,h/X 21 . On transforme ainsi les dérivées apparaissant dans les équations (5.1) et (5.2)
dans le nouveau système de coordonnées ( )θ,R à l'aide des relations classiques :
θ∂∂θ
+∂∂
θ=∂∂
θ∂∂θ
−∂∂
θ=∂∂
Rcos
Rsinh
x
Rsin
Rcosh
x
2
1 (5.4)
Les calculs sont entrepris avec le logiciel Maple V en prenant les expressions
mathématiques (4.15) et (4.19) pour le déplacement hors plan. Les paramètres intervenant
dans les équations (i.e. ν, E, KI, h, les six coefficients Ai , b et c) ont les valeurs numériques
données pour l'Araldite, tables 4-1,2,4.
Une simulation du système (5.1) est alors proposée figure 5-2 dans un plan image
virtuel ( )h/X,h/X 21 avec une distance zI = 220 mm. On "visualise" de la sorte la fonction
vectorielle (5.1) qui fait correspondre les points images ( ) ( )[ ]h/,RX,h/,RX 21 θθ à chaque
point objet de coordonnées normalisées (R,θ) pris dans le repère habituel centré en pointe de
fissure.
- 158 -
Figure 5-2 : Simulation d'une caustique dans un plan image virtuel avec l'expression
3D du déplacement hors plan particularisé à l'Araldite.
On remarque que la forme de la caustique simulée figure 5-2 s'apparente à celle qui est
obtenue expérimentalement à la même distance zI. La couronne lumineuse simulée est non
fermée et s'estompe progressivement lorsque la coordonnée angulaire θ est inférieure à π/2.
Précisons enfin ici que les dimensions (transversales) réelles des caustiques expérimentales
sont obtenues de la même façon que pour les images de franges. On enregistre à nouveau une
image de référence (non présentée ici) contenant un réseau de traits, dont le pas réel est
connu. Ce réseau permet de calculer le grandissement et par suite les dimensions recherchées.
2.3 Recherche du diamètre transversal des caustiques
Nous avons vu que la formulation classique 2D du déplacement hors plan conduit à
des caustiques fermées (i.e. des épicycloïdes). Par ailleurs il est possible de résoudre
analytiquement le système (5.3) et d'obtenir ainsi une courbe initiale de forme géométrique
simple, à savoir un cercle de rayon r0. Le rayon du cercle est du reste proportionnel à la
quantité 5/2Iz− d'après (3.25). En reportant la valeur de r0 dans (5.1) on trouve typiquement
l'équation de la caustique sous la forme paramétrique (3.24). Pour l'Araldite et à nouveau une
distance zI = 220 mm, le graphe de la fonction (3.24) donne l'épicycloïde en trait continu qui
est superposée figure 5-3 sur la simulation précédente. La valeur correspondante du rayon
adimensionné r0/h, calculé avec la relation (3.25), est de 0,24. Les effets 3D sont donc déjà
- 159 -
importants et on remarque que la caustique 2D est de taille plus importante que celle obtenue
avec l'expression du déplacement hors plan proposée. Rappelons enfin que dans ce cas le
diamètre transversal Dt de la caustique est toujours relié à r0 par la relation 0t r167,3D = [76].
Figure 5-3 : Comparaison des caustiques simulées avec les formulations 2D et 3D du
déplacement hors plan.
Dans notre cas la recherche du diamètre transversal de la caustique est plus complexe.
En effet la résolution du système (5.3) ne peut être entreprise que numériquement en
discrétisant la variable angulaire θ dans un intervalle Iθ de la forme [ ]maxmin ;θθ . En se
référant à la figure 5-3, les bornes de l'intervalle Iθ sont choisies de manière à inclure la valeur
2/π . On considère alors un ensemble de N valeurs discrètes θi régulièrement espacées dans Iθ
telles que N1ii21 ...... θ>>θ>θ>>θ>θ + . Les bornes inférieure et supérieure de l'intervalle
Iθ correspondent respectivement à θN et θ1. Pour chaque θi, on résout numériquement le
système (5.3) par la méthode classique de Newton-Raphson. Soit pour un plan image distant
de zI du modèle fissuré :
- 160 -
( ) ( )N..1iI,0,rJ iiIz =∈θ=θ θ (5.5)
A chaque itération, lorsque le système a une solution, on trouve une valeur ri qui est
injectée dans le système (5.1). On peut ainsi calculer le couple ( ) ( )[ ]i2i1 X;X θθ qui donne le
point représentatif de la caustique dans le plan image lorsque θ = θi. Notons que la courbe
initiale associée est représentée alors par les couples de points ( ) ( )[ ]iiii sinr;cosr θθ dans le
repère cartésien lié au modèle fissuré. On définit le diamètre transverse Dt de la caustique
ainsi :
( )( )i2N..1it X2maxD θ= = (5.6)
Comme on peut le constater sur la figure 5-3, cette valeur maximale n'est pas donnée
pour 2π=θ et sa localisation dépend en général de zI. La relation (5.6) suppose
implicitement de prendre un intervalle Iθ suffisamment grand pour pouvoir déterminer Dt.
Néanmoins lorsque l'intervalle chevauche "la zone effacée" figure 5-3, la caustique n'est plus
définie et l'équation (5.5) n'a donc plus de solution. Cette remarque justifie le fait de débuter
une procédure de calcul pour trouver Dt, avec une valeur initiale θ0 dans une zone bien
définie, soit typiquement le quadrant ] [ππ ,2/ . Les valeurs θi sont alors obtenues en faisant
θ∆−θ=θ i0i où θ∆ est un incrément constant et N..1i = .
Nous réutilisons le logiciel Maple V afin de programmer l'algorithme nécessaire à la
détermination de Dt. Pour zI donné en prenant θ0 comme valeur initiale, le programme calcule
successivement les valeurs ( )i2X θ grâce aux relations (5.3) et (5.1). Lorsque le diamètre
maximum Dt n'est pas atteint, avec deux valeurs θi et θi+1 successives on a en règle générale
( ) ( )i21i2 XX θ>θ + . Néanmoins à chaque itération, un test permet d'écarter une valeur ( )i2X θ
éventuellement aberrante, qui signifierait que l'équation (5.3) n'a pu être résolue. On associe
dans ce cas à θi la valeur ( )1i2X −θ et le calcul se poursuit pour θi+1. Notons que cette situation
se produit seulement pour quelques valeurs isolées θi dans le quadrant ] [ππ ,2/ . La routine
suppose toutefois une valeur initiale ( )02X θ correctement évaluée. Après avoir effectué M
itérations (et appliqué à chaque fois le test précédent), si ( ) ( )1M2M2 XX −θ<θ la procédure est
stoppée. La valeur retenue pour Dt/2 est alors ( )1M2X −θ . Dans certains cas enfin, Dt est
associé à une valeur θi très proche de la limite entre la zone d'existence de la caustique et la
- 161 -
zone effacée. Avec un choix raisonnable pour θ∆ , on ne peut trouver un entier M tel que
( ) ( )1M2M2 XX −θ<θ et les valeurs ( )i2X θ deviennent systématiquement toutes aberrantes
lorsque i>M-1. Un deuxième test permet d'en tenir compte et de stopper la procédure en
prenant ( )1M2X −θ pour Dt/2. Nous résumons figure 5-4 ce qui vient d'être dit sous la forme
d'un organigramme.
L'algorithme de calcul précédent a été appliqué pour les caustiques simulées en
différents plan images (i.e. différentes valeurs de zI) avec l'Araldite. On regroupe table 5-1 les
diamètres transversaux (adimensionnés) Dt/h, calculés en fonction des quantités zI/h. Les
quantités entre parenthèses (2D) et (3D) signifient que les caustiques considérées sont
formées en prenant respectivement l'expression classique (2D) et l'expression (4.15) pour le
déplacement hors plan.
zI/h 474,9 107,0 44,7 24,1 20 14,9 10,1 7,2 5,4 4,2 3,3
Dt/h (2D) 1,955 1,077 0,757 0,592 0,538 0,488 0,418 0,366 0,327 0,295 0,270
Dt/h (3D) 1,938 0,913 0,524 0,362 0,325 0,276 0,222 0,185 0,158 0,137 0,121
Table 5-1 : Valeurs de Dt/h calculées en fonction de zI/h
- 162 -
Valeur initiale : θ0
Paramètres d'entrée : ε1, ε2, θ∆ , zI, Ni=1, i1=1, i2=1
Résolution numérique de l'équation (5.5)+ relation (5.1)⇒ ( )i2X θ
( ) θ∆−−θ=θ 1i0i
i1 = i + 1i2 = i2 + 1
( ) ( )1i2i2 XX −θ=θ
oui1i2 =
noni ≥ 2
et( ) ( ) 11i2i2 XX ε>θ−θ −
?
i > i1et
( ) ( )1i2i2 XX −θ<θ( )1i2t X2/D −θ=
FINoui
?
i2 > ε2( )1i2t X2/D −θ=
FIN
oui
non1ii +=
Ni ≤
non
?
Figure 5-4 : Organigramme du programme de recherche du diamètre transversal d'une
caustique
- 163 -
3. DEMARCHE EXPERIMENTALE
Pour la plaque en Araldite et en se plaçant strictement dans les mêmes conditions de
chargement qu'au chapitre 4, nous avons également enregistré une série de caustiques
virtuelles associées appartenant à différents plans images. Pour ce faire, la caméra CCD,
focalisée au préalable au niveau de la surface réfléchissante du modèle fissuré, est simplement
translatée sur le rail en direction du cube séparateur (cf. figure 4-1). Il est possible ainsi de
mesurer avec précision la distance zI entre le plan image considéré et la surface de la plaque.
Notons que de cette façon on ne modifie pas le grandissement qui est calculé initialement en
enregistrant un réseau de traits transparent placé sur la surface réfléchissante de la plaque
(image de référence). La figure 5-5 présente, pour quelques plans images, les caustiques
obtenues expérimentalement. Au total 16 images ont été prises. Nous regroupons table 5-2 les
diamètres transversaux mesurés et les valeurs de zI correspondantes.
Figure 5-5 : Caustiques virtuelles obtenues en réflexion pour différentes valeurs de zI
z I e
n [m
m]
20 40 60 80 100 120 140 160 180 200 220 240 260 280 300 335
Dt e
n [m
m]
0,65 0,97 1,22 1,45 1,63 1,88 2,0 2,20 2,36 2,53 2,69 2,81 2,91 3,06 3,22 3,44
Table 5-2 : Résultat des mesures
- 164 -
4. PROPOSITION D'UNE NOUVELLE LOI D'EVOLUTION
Les données numériques de la table 5-1 sont reportées figure 5-6 dans un repère
adimensionné d'abscisse zI/h et d'ordonnée Dt/h. Elles sont représentées par des losanges (au
total 22). La courbe d'évolution 2D classique est donnée par la relation (3.26), soit
typiquement ici :
( )
π
ν=α
α=52
I5/1meca
52Imecat
E22K3
h17,3avec
hzhD
(5.7)
Lorsque le calcul de Dt est effectué avec l'expression (2D) classique du déplacement
hors plan, elles se situent, bien entendu, sur la courbe d'évolution 2D. Il n'en est plus de même
avec la nouvelle expression du déplacement hors plan, comme on peut le constater sur la
figure 5-6.
Figure 5-6 : Evolution du diamètre transversal des caustiques en fonction de la
distance zI (représentation adimensionnée)
- 165 -
La figure 5-6 nous conduit à modifier la loi d'évolution 2D et à proposer à la place la
fonction suivante, que l'on appellera évolution 3D :
( )[ ] ( ) 52II1I2mecat hzhzb,2Eb1hD −α= (5.8)
où EI est à nouveau une fonction exponentielle intégrale d'ordre 2. Les constantes b1 et b2 sont
déterminées en identifiant l'expression (5.8) et les 11 données calculées table 5-1 (avec la
formulation 3D pour le déplacement hors plan). On constitue alors une fonction de la forme
(4.18) qui permet d'obtenir, par minimisation (cf. annexe B), les deux paramètres inconnus.
Le principe de résolution est identique à celui présenté au chapitre 4 et ne sera donc pas
détaillé ici. Tout calcul fait, on trouve ici :
==
59,0b0058,0b
2
1 (5.9)
Les données expérimentales issues de la table 5-2 sont représentées figure 5-7, par de
petits cercles dans le repère précédent. On constate clairement qu'elles ne "suivent" pas la
courbe d'évolution 2D. Ces données sont par contre en parfaite coïncidence avec l'évolution
(5.8) issue du déplacement hors plan 3D.
Figure 5-7 : Comparaison avec les données expérimentales de la table 5-2
- 166 -
Nous sommes maintenant en mesure d'obtenir le facteur d'intensité de contraintes KI à
partir des relations (5.8) et (5.9) et des données expérimentales table 5-2. La figure 5-8 nous
montre ainsi que la correction apportée à la loi d'évolution classique permet d'obtenir des
valeurs relativement constantes pour KI qui fluctuent autour de mmMPa20 , quel que soit
le plan image considéré. Au contraire l'application de l'expression (3.26) conduit à des valeurs
erronées bien différentes de la valeur attendue pour KI (donnée table 4-3 pour l'Araldite).
Figure 5-8 : Evolution du facteur d'intensité de contrainte en fonction de zI
Pour tous les plans images considérés tels que zI/h < 70, les points issus des courbes
initiales correspondantes se trouvent à des endroits où la triaxialité est déjà très marquée. Il
résulte un écart important entre les valeurs de KI calculées dans les deux cas, avec un rapport
allant de 2 à plus de 10.
5. CONCLUSION
Ce dernier chapitre consacré à l'exploitation de la méthode des caustiques, illustre
l'intérêt de la nouvelle formulation du déplacement hors plan établie au chapitre 4. En effet, à
partir des équations paramétriques de la méthode des caustiques, la détermination du facteur
d'intensité de contraintes (pour un mode I de chargement) repose sur une loi classique 2D qui
est donnée typiquement par l'expression (3.26). Néanmoins nous avons vu, qu'à l'encontre de
la formulation 2D, l'introduction du déplacement hors plan proposé dans les équations
paramétriques précédentes permet de simuler des caustiques dont les formes reproduisent
- 167 -
correctement les caustiques expérimentales. Il apparaît dés lors que l'évaluation du diamètre
transversal Dt d'une telle caustique doit se faire numériquement. Un algorithme de calcul a été
programmé à cet effet.
La démarche est mise en œuvre pour la plaque fissurée en Aradilte. Le calcul de Dt
effectué pour différents plans images nous conduit à reformuler la loi (3.26). Les valeurs de
Dt obtenues expérimentalement appuient cette décision. A partir de ces mêmes données, la loi
proposée est à même de donner une estimation du facteur d'intensité de contraintes KI en
accord avec les valeurs établies au chapitre 4, cela pour de faibles distances entre le plan
image et le modèle fissuré. A l'opposé, une utilisation abusive de l'évolution 2D pour ces
mêmes distances (soit zI/h < 100) conduit à des erreurs considérables sur l'estimation de KI.
En outre, lorsque le plan image s'éloigne de façon importante du modèle fissuré (2 à 3 mètres
par exemple), il n'est pas aisé d'enregistrer les caustiques virtuelles associées. La courbe
initiale se situe alors dans une zone peu déformée. Il en résulte des images de mauvaise
qualité où les caustiques sont peu contrastées et difficilement exploitables. On notera enfin
que l'emploi de la méthode des caustiques, avec la formulation (5.8) proposée, nécessite la
connaissance de deux paramètres (b1, b2) qui dépendent a priori uniquement de la plaque
utilisée. Ils sont liés de façon complexe aux six paramètres utilisés pour la représentation du
déplacement hors plan 3D.
- 168 -
- 169 -
CCOONNCCLLUUSSIIOONN GGEENNEERRAALLEE // PPEERRSSPPEECCTTIIVVEESS
Nous rappelons ici que nos travaux sont consacrés à la détermination du déplacement
hors plan en pointe de fissure pour une plaque élastique chargée en mode I. Si la théorie 2D
de la rupture reproduit correctement le déplacement hors plan des surfaces latérales de la
plaque à une certaine distance de la fissure il n’en est plus de même lorsque l’on se rapproche
de la pointe de fissure. En effet à cet endroit, le déplacement habituellement calculé devient
singulier et ne peut de ce fait représenter une grandeur physique. Notre étude, appuyée par
quelques travaux disponibles dans la littérature, a clairement mis en évidence l'existence d'une
zone confinée entourant la pointe de fissure pour laquelle les effets tridimensionnels ne
peuvent plus être négligés, cela même pour des plaques minces.
Nous avons mené ce travail en faisant appel à deux disciplines bien différentes : la
modélisation numérique et les méthodes expérimentales de mesure. Les enseignements de
l'une permettant de répondre aux exigences de l'autre et réciproquement. Ainsi l'intégration
d'un front de fissure parabolique, lors de la modélisation par éléments finis de la région en
pointe de fissure, résulte bien des observations expérimentales. Nous avons vu, que
moyennant cet ajout, il est alors possible de recaler les solutions calculées pour le
déplacement hors plan des surfaces de la plaque avec les données expérimentales issues de
l'interférométrie. Si le déplacement hors plan apparaît comme une grandeur mesurable en
pointe de fissure, les effets 3D sur les grandeurs mécaniques internes à la plaque n'ont pu être
observés que par éléments finis.
L'interférométrie, associée à une technique quasi hétérodyne, est apparue comme la
seule méthode efficace pour mesurer les variations du relief en pointe de fissure. Elle offre en
effet la possibilité d'appréhender, à un plan de référence près, des variations de surface de
quelques microns en tout point de la zone de mesure. L'accès au déplacement hors plan
associé n'est pourtant pas direct et exige au préalable un recalage des données mesurées. La
méthode proposée introduit un plan de référence inconnu qui ne peut être déterminé qu'en
prenant en compte les résultats théoriques 2D, loin de la pointe de fissure. Des données
expérimentales (recalées), dans un proche voisinage du fond de fissure où les effets 3D sont
- 170 -
importants, conduisent à donner une nouvelle expression du déplacement hors plan faisant
intervenir des fonctions exponentielles intégrales.
Cette démarche hybride a été mise en œuvre sur trois types d'éprouvettes, de
caractéristiques mécaniques et géométriques différentes, chargées statiquement selon le mode
I. La formulation proposée permet de reproduire fidèlement, pour les trois cas étudiés,
l'évolution du champ de déplacement mesuré. L'identification au moyen de six paramètres est
suffisamment générale pour décrire le déplacement tant dans la zone éloignée à comportement
bidimensionnel que dans région proche où sévit un état tridimensionnel.
Une application particulière, mettant en œuvre la formulation proposée du déplacement
hors plan, a été proposée pour l’Aradite. Ainsi la méthode des caustiques en réflexion simple
nécessite pour sa réalisation la connaissance d’une expression mathématique décrivant le
relief en pointe de fissure. Rappelons que cette méthode optique permet la détermination du
facteur d'intensité de contraintes (pour un mode I de chargement) à partir de la mesure d'une
dimension privilégiée d’une caustique (i.e. le diamètre transversal) dans un plan image donné.
La démarche repose néanmoins sur une loi classique 2D qui est établie à partir de l’expression
2D du déplacement hors plan. Nous avons observé qu'elle donnait des valeurs aberrantes pour
le facteur d’intensité de contraintes lorsque les plans images sont proches du modèle fissuré.
La correction apportée au déplacement hors plan permet de simuler des caustiques dont les
formes s'apparentent aux caustiques trouvées expérimentalement pour l'Araldite. De plus elle
conduit à une mesure correcte du facteur d'intensité de contrainte, quelle que soit la distance
entre le plan image et le modèle fissuré.
Dans un premier temps, quelques améliorations peuvent être apportées à notre
démarche. Il serait par exemple intéressant de profiter d'un maximum de données calculées
par le logiciel Interf 32, lors de la détermination du plan de référence servant au recalage des
données. On éviterait ainsi de particulariser la sélection des données à quelques demi-droites
issues de la pointe de fissure (nous en avons pris une vingtaine). Il en résulterait une valeur
finale pour le facteur d'intensité de contraintes de toute évidence plus précise et moins sujette
à d'éventuels défauts localisés de surface. En contre partie la réalisation des calculs
demanderait un ordinateur suffisamment puissant capable de traiter quelques dizaines de
milliers de données (i.e. les pixels de l'image servant au recalage) lors de la résolution
numérique du système matriciel.
- 171 -
Notons que les six paramètres introduits lors de la formulation du déplacement hors
plan n'ont pas de signification physique propre pour l'instant. Il conviendrait d'y remédier en
multipliant par exemple les expérimentations en mode I avec différentes valeurs de l'effort
appliqué, plusieurs épaisseurs de plaques, d'autres matériaux fragiles. Indiquons que la
démarche n'est pas limitée à l'étude de polymères, et que des investigations sur métaux, sur
verres pourraient être conduites. La prise en compte des autres modes de fissuration (mode II
et mode III) dans l'analyse devrait permettre de généraliser la méthode aux matériaux fragiles,
sans avoir à contrôler au préalable le chargement plan opéré. De plus une direction
quelconque du plan fissuré pourrait être prise.
L'investigation sur matériaux ductiles est une perpective à moyen terme. Il s'agirait de
mettre à nouveau en évidence une zone 3D et de reformuler, à partir de l'expression 2D issue
du champ H.R.R., une expression du déplacement hors plan compatible avec les données
expérimentales comme nous l'avons fait pour le cas élastique. Indiquons que des préétudes
sont déjà en cours au sein du laboratoire.
Signalons enfin que notre contribution à l'exploitation des caustiques en tout plan
image nous paraît offrir des applications intéressantes pour l'étude de problèmes de fissuration
sur matériaux très rigides tels que les verres et les céramiques. En effet, le faible coefficient
de Poisson fait que les caustiques sont générées par des points situés au très proche voisinage
du fond de fissure. L'analyse de la singularité optique nécessite alors une formulation
tridimensionnelle du déplacement hors plan.
- 172 -
- 173 -
AANNNNEEXXEE AA
Quelques propriétés mathématiques des fonctions exponentielles intégrales
Définition :
,...)2,1,0n(,dtt
e)z,2(E1
n
tz
I == ∫∞ −
(A.1)
Relation de récurrence :
( )[ ] ...),3,2,1n(,z,nEzen1)z,1n(E I
zI =−=+ − (A.2)
Valeurs particulières :
( ) ( )
( )z
ez,0E
1n,1n
10,nE
z
I
I
−
=
>−
= (A.3)
Dérivation :
( ) ( ) ...),3,2,1n(,z,1nEzd
z,nEdI
I =−−= (A.4)
- 174 -
Développement asymptotique :
( ) ( ) ( )( )
+
++−
++−≈
−
...z
2n1nnz
1nnzn1
zez,nE 32
z
I (A.5)
Inégalité :
( ) ...),3,2,1n,0z(,1nz
1z,nEenz
1I
z =>−+
≤≤+
(A.6)
- 175 -
AANNNNEEXXEE BB
Principe de la méthode de minimisation (méthode de Newton)
Le problème est présenté sous une forme générale. Soit une fonction donnée F telle
que :
( ) ( )xFx,...,x,xFy n21
== (B.1)
Il s’agit de trouver un point qui donne un minimum local de F. Considérons alors le
développement suivant de la fonction en série de Taylor :
( ) ( ) ....xx
Fhh21
xFhxFhxF
ki
2
kii
i +∂∂
∂+
∂∂
+=+ ∑∑
(B.2)
Les coefficients des termes du second ordre peuvent s’organiser selon une matrice [H]
qui a pour éléments ki2
ik xxFH ∂∂∂= . [H] est habituellement appelé le Hessian. On écrit
alors le développement (B.2) sous la forme :
( ) ( ) ( ) ...h]H[.h21xFgrad.hxFhxF TT +++=+
(B.3)
En négligeant les termes d’ordre supérieur, nous choisissons ( )n21 h,...,h,hh =
de
façon à rendre F minimale, soit :
0hxx
FxF
hF
kk ki
2
ii
=∂∂
∂+
∂∂
≅∂∂ ∑ (B.4)
ou sous forme vectorielle :
0h]H[FgradhF
=+≅∂∂
(B.5)
- 176 -
En pratique on choisit une valeur initiale )0(h
suffisamment proche de la solution.
L’expression (B.5) permet de calculer la valeur suivante )1(h
en résolvant pour 0hd
le
système :
( ) ( ))0(0
)0( hFgradhd]hH[
−= (B.6)
il vient alors pour )1(h
:
0)0()1( hdhh
+= (B.7)
soit après n itérations :
( ) ( )
1n)1n()n(
)1n(1n
)1n(
hdhhet
hFgradhd]hH[
−−
−−
−
+=
−=
(B.8)
On évalue à chaque étape la différence 2
)1n(2
)n(n hhd −−=
où 2. représente la
norme 2 classique du vecteur. La procédure est stoppée dès que dn est suffisamment petit.
Lorsqu’il y a convergence (il s'agit d'une convergence au sens de la norme), on obtient alors la
solution recherchée avec la précision souhaitée. Cette méthode est connue sous le nom de
méthode de Newton pour le problème de minimisation.
Au cours du mémoire nous aurons à résoudre des systèmes d’équations du type :
( ) N..1i,0x,...x,xf n21i == (B.7)
On forme alors la fonction F suivante :
( ) ( )2n
1i i xfxF ∑==
(B.8)
et les résultats précédents sont applicables.
- 177 -
RREEFFEERREENNCCEESS BBIIBBLLIIOOGGRRAAPPHHIIQQUUEESS
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- 183 -
LLIISSTTEE DDEESS IILLLLUUSSTTRRAATTIIOONNSS
CHAPITRE 1
:
Figure 1-1 : Rupture fragile d’un bateau…………………………………………….. 11
Figure 1-2 : Rupture à l’échelle atomique…………………………………………… 12
Figure 1-3 : Représentation du contour d’intégration……………………………….. 17
Figure 1-4 : Représentation d’une fissure dans une plaque chargée d’épaisseur t…... 19
Figure 1-5 : Modes élémentaires de fissuration………………………………………20
Figure 1-6 : Plaque fissurée, milieu bidimensionnel infini en mode I………………..26
Figure 1-7 : Eprouvettes fissurées de type CN, DEN et SEN sous chargement uniaxial (σ0 est la contrainte nominale associée)……. 27
Figure 1-8 : Distribution des points de collocation dans le cas d’une éprouvette SEN……………………………………………….…. 33
Figure 1-9 : Maillages rayonnants réalisés pour l’éprouvette SEN………………….. 37
Figures 1-10 : Comparaison des expressions globales et asymptotiques du champ de contraintes le long de la fissure………………………… 39
Table 1-1 : Exemple de calcul des premiers coefficients de la série de Williams…... 36
Table 1-2 : Valeurs calculées de Y et B pour différentes tailles d’éprouvette……... 36
- 184 -
CHAPITRE 2
:
Figure 2-1 : Demi espace fissuré Ω (z ≥ 0)…………………………………………...48
Figure 2-2 : Demi espace fissuré Ω avec un front de fissure OO' oblique……………52
Figure 2-3 : Maillage du domaine avec θ limité par ( )φβ=θ − costantan 1lim …….. 55
Figure 2-4 : Résultats obtenus par Bazant & Estenssoro pour une fissure oblique….. 56
Figure 2-5 : Résultats obtenus par Yang et Freund [48] pour le déplacement hors plan w0……………………………………….59
Figure 2-6 : Organisation d'un programme avec Castem 2000……………………… 63
Figure 2-7 : Principe de la méthode du suivi de taches……………………………… 65
Figure 2-8 : Résultats expérimentaux obtenus avec le PMMA……………………… 66
Figure 2-9 : Représentation schématique de la région étudiée en pointe de fissure… 67
Figure 2-10 : Maillage du quart de cylindre (front de fissure rectiligne V-Ce)…….. 69
Figure 2-11 : Représentation schématique du front de fissure parabolique (x2 = 0)… 70
Figure 2-12 : Maillage du quart de cylindre avec un front de fissure parabolique…...72
Figure 2-13 : Isovaleurs du déplacement u3 en [mm] sur la surface libre (front de fissure rectiligne)………………………. 76
Figure 2-14a : Front de fissure rectiligne, T = 0 [MPa]………………………………77
Figure 2-14b : Front de fissure parabolique, T = 0 [MPa]……………………………77
Figure 2-14c : Front de fissure rectiligne, T = 5 [MPa]………………………………78
Figure 2-14d : Front de fissure parabolique, T = 3 [MPa]……………………………78
Figure 2-14e : u3 normalisé avec un front de fissure rectiligne (T = 0)……………... 79
Figure 2-14f : u3 normalisé avec un front de fissure parabolique (T = 0)…………... 79
Figure 2-15a : Evolution de la triaxialité sur le plan ligament en pointe de fissure (front de fissure rectiligne)……………………… 81
Figure 2-15b : Evolution de la triaxialité sur le plan ligament en pointe de fissure (front de fissure parabolique)………………….. 81
Figure 2-16a : Evolution de la triaxialité suivant l'épaisseur (front de fissure parabolique)……………………………………….. 82
Figures 2-16b et c : Evolution de la triaxialité suivant l'épaisseur (front de fissure rectiligne)…………………………………….. 83
- 185 -
Figure 2-17a : Représentation de la contrainte σ22 sur la surface libre (front de fissure rectiligne)………………………………………….. 84
Figure 2-17b : Comparaison de la solution calculée avec la solution 2D exacte pour θ = 0° (front de fissure rectiligne)………………………85
Figure 2-17c : Comparaison de la solution calculée avec la solution 2D exacte pour θ = 0° (front de fissure parabolique)…………………… 85
Table 2-1 : Valeurs propres λ calculées pour ( )φθλ=σ λ ,,fr ijij ……………………. 50
Table 2-2 : Puissance de la singularité (f-2) calculée en fonction du coefficient de consolidation n et de Tz……………………………….. 61
Table 2-3 : Valeurs moyennes de l'intégrale J et du facteur d'intensité de contrainte associés en zone 3D…………………87
CHAPITRE 3
:
Figure 3-1 : Principe de l'interféromètre de Michelson …………………………... 95
Figure 3-2 : Caustiques obtenues par transmission au fond d'une tasse remplie d'eau……………………………………... 103
Figure 3-3 : Formation de caustiques en mécanique de la rupture…………………. 105
Figure 3-4 : Arrangements optiques, modèle sollicité en traction…………………..107
Figure 3-5 : Caustique obtenue sur un plan image virtuel, arrangement en réflexion………………………………………………108
Figure 3-6 : Système simplifié source-réflecteur-récepteur en réflexion………….. 109
Figure 3-7 : Simulation de caustiques à partir des expressions (3.19), (3.20) et de la formulation 2D du déplacement hors plan…………………….114
- 186 -
CHAPITRE 4
:
Figure 4-1 : Vues du site expérimental……………………………………………...120
Figure 4-2 : Interféromètre de Michelson appliqué à la mécanique de la rupture…..121
Figures 4-3 : Principe d'élargissement du faisceau laser…………………………… 122
Figure 4-4 : Schéma du montage de traction……………………………………….. 124
Figure 4-5 : Interférogrammes obtenus en pointe de fissure (champ large et champ zoomé)……………………………………….. 130
Figure 4-6 : Images de référence pour le PMMA(2) avec un réseau croisé millimétré……………………………………… 131
Figure 4-7 : Déplacement hors plan en µm calculé par quasi-hétérodynage en pointe de fissure………………………….. 134
Figure 4-8 : Profils associés aux interférogrammes de la figure 4-7 le long d'une ligne AB située devant la pointe de fissure……………………...135
Figure 4-9 : Représentation des différents repères associés aux images enregistrées………………………………………………..136
Figure 4-10 : Représentations du déplacement hors plan w3D………………………145
Figure 4-11 : Comparaison avec le modèle numérique pour le PMMA(2)………… 146
Figure 4-12 : Evolution de a(θ) dans l'intervalle ] [ππ− ; ………………………….. 149
Figure 4-13 : Comparaison entre le déplacement théorique (4.15) et les valeurs expérimentales w3D pour différentes valeurs angulaires……. 150
Table 4-1 : Caractéristiques mécaniques et géométriques des éprouvettes expérimentales………………………………………… 126
Table 4-2 : Facteur d'intensité de contraintes évalué en fonction de la force appliquée F et des données géométriques relatives aux éprouvettes d'étude………... 128
Table 4-3 : Valeurs numériques des paramètres px , py , u0 et KI…………………… 141
Table 4-4 : Evolution des paramètres intervenant dans les relations (4.15) et (4.19)………………………………………………... 148
- 187 -
CHAPITRE 5
:
Figure 5-1 : Représentation schématique en réflexion de la formation d'une caustique…………………………………...…... 156
Figure 5-2 : Simulation d'une caustique dans un plan image virtuel avec l'expression 3D du déplacement hors plan particularisé à l'Araldite………………………………………………..158
Figure 5-3 : Comparaison des caustiques simulées avec les formulations 2D et 3D du déplacement hors plan……………………………………159
Figure 5-4 : Organigramme du programme de recherche du diamètre transversal d'une caustique………………………………. 162
Figure 5-5 : Caustiques virtuelles obtenues en réflexion pour différentes valeurs de zI…………………………………………. 163
Figure 5-6 : Evolution du diamètre transversal des caustiques en fonction de la distance zI (représentation adimensionnée)………… 164
Figure 5-7 : Comparaison avec les données expérimentales de la table 5-2……….. 165
Figure 5-8 : Evolution du facteur d'intensité de contrainte en fonction de zI………. 166
Table 5-1 : Valeurs de Dt/h calculées en fonction de zI/h……………………………161
Table 5-2 : Résultat des mesures…………………………………………….………163
- 188 -
- 189 -
TTAABBLLEE DDEESS MMAATTIIEERREESS
INTRODUCTION …………………………………………………………………………… 1
CHAPITRE 1FRAGILE BIDIMENSIONNELLE……………………………………… 5
: QUELQUES ASPECTS DE MECANIQUE DE LA RUPTURE
1. PRESENTATION GENERALE………………………………………………….……………….7
2. MECANIQUE DE LA RUPTURE LINEAIRE EN MILIEU BIDIMENSIONNEL…………….………..9
2.1 Les origines de la mécanique de la rupture………………………………………... 9
2.2 Résolution du problème par une approche énergétique………………….………. 11
2.2.1 Théorie de Griffith, taux de restitution de l’énergie……………………. 11
2.2.2 Intégrale J et ses propriétés……………………………………………...15
2.3 Déplacement des lèvres de la fissure et modes élémentaires de rupture…………. 18
2.4 Rappels d’élasticité plane, fonction d’Airy………………………………………. 20
2.5 Approche locale : champs de contraintes et de déplacements au voisinage d’une fissure……………………………………………………….. 23
2.5.1 Les solutions analytiques de Westergaard, Sih et Eftis………………… 23
2.5.2 Généralisation du problème à des milieux de dimension finie………… 27
2.5.3 Détermination des coefficients de la série de Williams pour des éprouvettes SEN……………………………………………… 33
2.6 Approche du problème par les éléments finis……………………………………. 36
3. CONCLUSION……………………………………………………………………………… 39
- 190 -
CHAPITRE 2 DE PLAQUES ELASTIQUES………………………...41
: FISSURATION TRIDIMENSIONNELLE
1. INTRODUCTION………………………………………………….………………………….43
2. ANALYSE TRIDIMENSIONNELLE EN MILIEU PLAN FISSURE……………………………….. 45
2.1 Solution exacte du problème en contraintes planes……………………………….45
2.2 Etudes théoriques au voisinage du vertex…………………………………………47
2.2.1 L’approche de Folias…………………………………………………… 47
2.2.2 Les analyses locales de Benthem, Kawai et Bazant & Estenssoro……...47
2.3 Vers une solution complète du problème ?………………………………………. 62
3. MODELISATION PAR ELEMENTS FINIS AU VOISINAGE DE LA FISSURE……………………. 62
3.1 Présentation rapide du code de calcul……………………………………………. 62
3.2 Approche numérique du problème de fissuration tridimensionnel………………. 63
3.2.1 Choix du modèle mécanique…………………………………………… 63
3.2.2 Détermination de la zone d’étude, élaboration du maillage 3D………... 66
3.2.3 Application des conditions aux limites………………………………….72
3.2.4 Résolution du problème………………………………………………… 74
3.3 Résultats de l’étude numérique……………………………………………………74
3.3.1 Quelques remarques préléminaires…………………………………….. 74
3.3.2 Déplacement hors plan u3 de la surface libre…………………………... 75
3.3.3 Evolution du coefficient de triaxialité Tz sur le plan ligament…………. 80
3.3.4 Evolution de la contrainte σ22 sur la surface libre……………………… 83
3.3.5 Intégrale J et facteur d’intensité de contraintes en zone 3D……………. 86
4. CONCLUSION………………………………………………………………………………. 87
- 191 -
CHAPITRE 3L’INTERFEROMETRIE PAR ANALYSE QUASI-HETERODYNE,
: LES METHODES OPTIQUES :
LA METHODE DES CAUSTIQUES……………………………………89
1. INTRODUCTION………………………………………………….………………………….91
2. TECHNIQUE DE MESURE DU DEPLACEMENT HORS PLAN…………………………………. 93
2.1 Considérations optiques et application de l’interférométrie de Michelson………. 93
2.2 La technique quasi-hétérodyne…………………………………………………… 99
3. LA METHODE DES CAUSTIQUES…………………………………………………………. 102
3.1 Le phénomène optique………………………………………………………….. 102
3.2 Applications à la mécanique de la rupture……………………………………….105
3.2.1 Principe de la méthode des caustiques, arrangements optiques………..105
3.2.2 Formation d’une caustique en réflexion : formulation théorique…… 107
3.2.3 Relations simplifiées issues de la mécanique de la rupture 2D, remarques…………………………………………………………….. 113
3.3 Conclusion……………………………………………………………………… 115
- 192 -
CHAPITRE 4HORS PLAN EN POINTE DE FISSURE POUR UNE PLAQUE
: DETERMINATION EXPERIMENTALE DU DEPLACEMENT
CHARGEE EN MODE I. FORMULATION D’UNE EXPRESSION THEORIQUE…………. 117
1. INTRODUCTION…………………………………………………….………………….... 119
2. CONSIDERATIONS EXPERIMENTALES…………………………………………………… 120
2.1 Le dispositif expérimental……………………………………………………… 120
2.1.1 Description du site……………………………………………………. 120
2.1.2 Elargissement du faisceau initial…………………………………….. 122
2.1.3 Le système de chargement……………………………………………. 124
2.1.4 Caractéristiques et préparation des éprouvettes………………………. 125
2.2 Démarche expérimentale……………………………………………………….. 127
2.2.1 Estimation du facteur d’intensité de contraintes……………………… 127
2.2.2 Présentation des interférogrammes associés………………………….. 128
2.2.3 Détermination du facteur de grandissement………………………….. 130
2.2.4 Mise en œuvre de la méthode quasi-hétérodyne……………………… 132
2.3 Exploitation des données calculées par la méthode quasi-hétérodyne…………. 136
2.3.1 Etude préléminaire……………………………………………………. 136
2.3.2 Détermination du plan de référence, calcul de KI…………………….. 138
2.3.3 Représentation du déplacement hors plan en pointe de fissure………. 143
2.4 Comparaison avec les résultats de l’analyse numérique……………………….. 146
3. EXPRESSION THEORIQUE DU DEPLACEMENT HORS PLAN………………………………. 147
4. CONCLUSION…………………………………………………………………………….. 151
- 193 -
CHAPITRE 5DE LA METHODE DES CAUSTIQUES……………………………. 153
: APPLICATION A L’EXPLOITATION
1. INTRODUCTION……………………………………..……………….………………..…. 155
2. SIMULATION D’UNE CAUSTIQUE PAR LE DEPLACEMENT HORS PLAN 3D………….…… 155
2.1 Position du problème…………………………………………………………… 155
2.2 Simulation d’une caustique en réflexion………………………….……………. 157
2.3 Recherche du diamètre transversal des caustiques…………………….……….. 158
3. DEMARCHE EXPERIMENTALE…………………………………………………………… 163
4. PROPOSITION D’UNE NOUVELLE LOI D’EVOLUTION…………………….…….………… 164
5. CONCLUSION……………………………………………………………………….……. 166
CONCLUSION GENERALE / PERSPECTIVES………………………………………. 169
ANNEXES
A. QUELQUES PROPRIETES MATHEMATIQUES
…………………………………………………………………………………. 173
DES FONCTIONS EXPONENTIELLES INTEGRALES………………………………………... 173
B. PRINCIPE DE LA METHODE DE MINIMISATION (METHODE DE NEWTON)………………. 175
BIBLIOGRAPHIE………………………………………………………………………… 177
LISTE DES ILLUSTRATIONS
…………………………………………………………...183
- 195 -
PPUUBBLLIICCAATTIIOONNSS
Article dans une revue internationale : HUMBERT L., VALLE V., COTTRON M., « Experimental determination and empirical representation of out-of-plane displacements in a cracked elastic plate loaded in Mode I » acceptée le 13 août 1999, International Journal of Solids and Structures . Communication dans un congrès international avec publication des actes : HUMBERT L., VALLE V., COTTRON M., « Lateral surface contraction of an elastic cracked plate. Three dimensional effects », GAMM 99, Metz, France 12-16 April 1999. Communication dans un congrès national avec publication des actes : HUMBERT L., VALLE V., COTTRON M., « Déplacement expérimental et analytique du bord libre d’une plaque élastique fissurée chargée en mode I», 14éme Congrès français de Mécanique, Toulouse 1999. HUMBERT L., COTTRON M., LAGARDE A, « Exploitation de la méthode des caustiques pour la mesure du déplacement des surfaces latérales d’une plaque fissurée », 13éme Congrès français de Mécanique, Poitiers 1997.
Résumé
L'étude traite des effets tridimensionnels (3D) dans les plaques élastiques fissurées de type SEN, chargées statiquement selon le mode I. L'interférométrie, associée à une technique quasi hétérodyne, est mise en œuvre pour appréhender, à un plan de référence près, des variations de surface de quelques microns en tout point de la zone entourant la fissure. L'accès au déplacement hors plan recherché n'est pas direct et exige au préalable un recalage des données expérimentales. Pour ce faire, nous développons une méthode hybride introduisant notamment un plan de référence inconnu qui est déterminé à partir des résultats théoriques 2D, toujours valables loin de la pointe de fissure (zone 2D). La mise en œuvre de la méthode conduit à des données expérimentales recalées qui représentent le déplacement hors plan au proche voisinage du front de fissure où les effets 3D sont importants. Par identification sur trois types d'éprouvettes de caractéristiques mécaniques et géométriques différentes, une expression mathématique nouvelle est proposée pour le déplacement hors plan, valide à la fois dans la zone 2D classique et dans la zone 3D. Une approche numérique du problème de rupture 3D, à l'aide de la méthode des éléments finis, permet de fournir la cartographie du déplacement hors plan qui est en parfaite correspondance avec le champ expérimental et la formulation proposée. Une application particulière, utilisant la formulation nouvelle du déplacement hors plan, est proposée pour l'Araldite. Elle apporte dans ce cas une correction à la méthode des caustiques, appliquée en réflexion, qui conduit à une mesure correcte du facteur d'intensité de contraintes, quelque soit la distance entre le plan image et le modèle fissuré.
::
Abstract
The study concerns the three-dimensional effects (3D) in cracked elastic plates, subjected statically to a mode I loading. Interferometry, associated with a phase shifting method, is applied to provide surface variations of few microns in the entire area around the crack tip. The knowledge of the out of plane displacement requires nevertheless a shifting of the experimental data. With this intention, we develop a hybrid method which introduces a unknown reference plane. This plane is determined starting from the theoretical 2D results, always valid far from the crack tip (2D area). The previous method leads to shifted experimental data which are in a position to represent the out of plane displacement in the close vicinity of the crack tip, where the 3D effects are important. By identification on three specimens with different mechanical and geometrical characteristics, a new mathematical expression is proposed to describe the out of plane displacement everywhere near the crack tip. A numerical approach, using the finite element method, provides the displacement cartography in a good agreement with the experimental field and the formulation suggested. A particular application, using the new formulation of the out of plane displacement, is proposed for Araldite. Changes are then introduce in the method of caustics applied in reflection, which lead to a correct evaluation of the stress intensity factor, whatever the distance between the image plane and the cracked specimen is.
:
Mots clés : Key words
- Rupture, effets tridimensionnels - Fracture mechanics, 3D effects
:
- Interférométrie - Interferometry - Analyse d'images - Images analysis -.Identification - Identification - Eléments finis - Finite element - Déplacement hors plan - Out of plane displacement - Méthode des caustiques - Method of caustics