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- I - T H E S E Pour l'obtention du Grade de Docteur de l'Université de POITIERS (Faculté des Sciences Fondamentales et Appliquées) (Diplôme National - Arrêté du 30 Mars 1992) ECOLE DOCTORALE DES SCIENCES POUR L'INGENIEUR Secteur de Recherche : GENIE MECANIQUE, PRODUCTIQUE, TRANSPORT Présentée par : Laurent HUMBERT ~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~ Formulation des effets tridimensionnels dans les plaques élastiques fissurées en mode I à partir de la méthode d'éléments finis et de l'interférométrie. Application à l'exploitation de la méthode des caustiques ~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~ Directeur de thèse : Mario COTTRON Codirecteur : Valéry VALLE ~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~ Soutenue le 28 janvier 2000 devant la Commission d'Examen JURY M. J.L. LATAILLADE Professeur, LAMEFIP, ENSAM Talence Président MM. T. DESOYER Professeur, LMA, ESM Marseille Rapporteur F. HILD Chargé de Recherche habilité, LMT Cachan Rapporteur MM. M. COTTRON Professeur, LMS Poitiers Examinateur J.C. DUPRE Chargé de Recherche, LMS Poitiers Examinateur D. GAMBY Professeur, LMPM, ENSMA Poitiers Examinateur V. VALLE Maître de Conférences, LMS Poitiers Examinateur

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T H E S E

Pour l'obtention du Grade de

Docteur de l'Université de POITIERS

(Faculté des Sciences Fondamentales et Appliquées) (Diplôme National - Arrêté du 30 Mars 1992)

ECOLE DOCTORALE DES SCIENCES POUR L'INGENIEUR

Secteur de Recherche : GENIE MECANIQUE, PRODUCTIQUE, TRANSPORT

Présentée par :

Laurent HUMBERT

~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~

Formulation des effets tridimensionnels dans les plaques élastiques fissurées en mode I à partir de la

méthode d'éléments finis et de l'interférométrie. Application à l'exploitation de la méthode des caustiques

~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~

Directeur de thèse : Mario COTTRON Codirecteur : Valéry VALLE

~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~ Soutenue le 28 janvier 2000

devant la Commission d'Examen

JURY M. J.L. LATAILLADE Professeur, LAMEFIP, ENSAM Talence Président MM. T. DESOYER Professeur, LMA, ESM Marseille Rapporteur

F. HILD Chargé de Recherche habilité, LMT Cachan Rapporteur

MM. M. COTTRON Professeur, LMS Poitiers Examinateur J.C. DUPRE Chargé de Recherche, LMS Poitiers Examinateur

D. GAMBY Professeur, LMPM, ENSMA Poitiers Examinateur V. VALLE Maître de Conférences, LMS Poitiers Examinateur

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A la mémoire de mon père,

A ma mère, à mon oncle Roland,

A ma famille,

A Valérie, à tous mes amis.

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- V -

AAvvaanntt –– pprrooppooss

Ce travail a été réalisé au Laboratoire de Mécanique des Solides de l'Université de

Poitiers (U.M.R. 6610) dirigé par Monsieur le Professeur J.P. LALLEMAND.

Je tiens à exprimer en premier lieu toute ma reconnaissance à Monsieur le Professeur

M. COTTRON pour m'avoir permis d'entreprendre et mener à bien cette étude. J'ai été

particulièrement sensible à ses conseils donnés avec clairvoyance, sa disponibilité et bonne

humeur, son soutien moral en toute circonstance. Je lui adresse ici l'expression de ma

profonde gratitude.

Mes remerciements iront ensuite à Monsieur le Professeur A. LAGARDE qui m'a

accueilli dans l'équipe de recherche et dont j'ai pu apprécier l'enthousiasme et le dynamisme

lorsqu'il exerçait ses fonctions de directeur d'équipe.

Je suis très honoré par la présence dans le jury de Monsieur le Professeur

T. DESOYER et Monsieur F. HILD qui ont bien voulu être juges de ce mémoire. Je leur

adresse toute ma reconnaissance.

Je remercie vivement les Professeurs D. GAMBY et J.L. LATAILLADE pour l'intérêt

qu'ils ont porté à mon travail en acceptant de participer au jury.

Je tiens à témoigner ma profonde gratitude et ma sympathie à Monsieur V. VALLE qui

m'a fait bénéficier de son savoir faire expérimental en optique, de ses compétences en

informatique et d'une aide toujours efficace. La présente étude lui doit évidemment beaucoup.

Monsieur le Professeur F. BREMAND et Monsieur J.C. DUPRE n'ont pas compté non

plus leurs heures pour me permettre de profiter de leur culture de mécaniciens. Je remercie le

Professeur F. BREMAND pour ses encouragements, ses qualités humaines et ses nombreuses

suggestions scientifiques. Je soulignerai tout particulièrement la disponibilité constante de

Monsieur J.C. DUPRE (qui déborde largement du cadre de la mécanique) et sa passion

musicale partagée qui m'ont été d'un grand réconfort, notamment lors des moments difficiles.

Il trouvera ici mes remerciements les plus profonds.

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J'ai beaucoup apprécié l'aide et les conseils techniques apportés par Monsieur

F. HESSER tout au long des ces travaux de recherche. Je le remercie très sincèrement.

Je ne saurais oublier les techniciens, en particulier Monsieur S. BROCHET, qui ont

réalisé les pièces mécaniques nécessaires au montage de cette étude. Je leur adresse à travers

ces quelques lignes toute ma reconnaissance amicale. Je remercie également le personnel

administratif ainsi que Monsieur J.J. BOUTET pour sa participation au tirage de ce mémoire.

Enfin que tous ceux qui n'ont pas été mentionnés et qui ont contribué à la réalisation

de ce travail reçoivent les remerciements qu'ils méritent.

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IINNTTRROODDUUCCTTIIOONN

C’est un lieu commun de rappeler que plus un matériau contient de défauts , ou plus la

géométrie d’une pièce est tourmentée et plus le risque de rupture est élevé. En général toutes

les structures mécaniques sans exception contiennent des myriades de défauts issus de leur

réalisation ou tout simplement des matériaux constitutifs. Résultant en général de la

coalescence de défauts microscopiques, nul doute que les fissures sont les plus dangereuses à

cause des concentrations élevées de contraintes qui se produisent à leur voisinage. Cette

remarque est d’autant plus vraie lorsque une fissure s’est propagée et prend des proportions

considérables, non négligeables à l’échelle macroscopique. Les structures en service sont très

souvent constituées de plaques et l’apparition d’une telle fissure peut fragiliser l’ensemble.

Elle demandera donc une surveillance particulière, sans pour autant qu’il faille changer la

structure toute entière. On sait d’expérience en effet que dans certaines conditions (à définir

dans chaque cas) les solides supportent l’existence de fissures et qu’une destruction brutale

résulte de l’instabilité soudaine de ces dernières. Ainsi une carlingue d’avion contient un

nombre important de petites fissures détectables apparues au cours des vols. On conviendra

que le remplacement systématique de la carlingue après chaque sortie serait quelque peu

coûteux… Le risque de rupture est également lié étroitement à l’environnement dans lequel se

trouve la structure en question. On sait par ailleurs que la température extérieure conditionne

la nature de la cassure. C’est un fait d’expérience courante qu’un matériau devient cassant

lorsque la température s’abaisse. Il adopte alors un comportement de type fragile que l’on

peut modéliser avec la théorie de l’élasticité. Ce caractère fragile, qui existe chez tout solide,

apparaît à des températures qui dépendent typiquement du matériau considéré. On a observé

ainsi des ruptures brutales se produisaient surtout par temps froid, occasionnant des

destructions importantes sans grande déformation apparente des structures. Au contraire à

température élevée, la rupture s’accompagne d’une plus grande déformation plastique. On

parle alors de fissuration ductile. L’approche quantitative des problèmes de fissuration pour

des matériaux à comportement fragile relève de la mécanique de la rupture linéaire. Elle a

pour objet de prévoir le comportement des fissures macroscopiques présentes dans une

structure élastique soumise à un chargement donné afin de prévenir d’un risque de rupture. La

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mécanique de la rupture linéaire caractérise alors le processus de fissuration macroscopique à

l’aide notamment des grandeurs mécaniques adaptées que sont les facteurs d’intensité de

contraintes.

L’étude proposée concerne les plaques élastiques contenant une fissure plane

préexistante qui traverse la plaque suivant son épaisseur. Ces plaques sont soumises à un

système simple d’efforts qui globalement ont tendance à écarter les lèvres de la fissure. On

parlera d’une sollicitation en mode I. On observe que le chargement imposé modifie

considérablement le relief en pointe de fissure (effet Poisson). D’un point de vue mécanique,

ce relief correspond au déplacement hors plan de la surface de la plaque. Notre mémoire

s’attache à décrire précisément cette grandeur mécanique en pointe de fissure pour une plaque

chargée en mode I.

Il est vrai que pour ce problème d’apparence simple, la mécanique de la rupture 2D

donne une solution analytique décrivant le déplacement hors plan. Néanmoins cette approche

simplifiée du problème ignore à la fois l’épaisseur de la plaque et toute évolution des

grandeurs mécaniques suivant cette épaisseur. Il en résulte une solution singulière pour le

déplacement inadaptée au voisinage immédiat de la pointe de fissure et qui peut engendrer, si

on n'y prend garde, des erreurs importantes dans certaines applications. Néanmoins pour les

plaques minces, il est vraisemblable qu’elle soit valable à partir d’une certaine distance qu’il

nous faudra assurément définir. A l’inverse le problème 3D général est trop complexe pour

être résolu analytiquement.

Une alternative est possible en utilisant les méthodes optiques susceptibles de fournir

des informations sur le déplacement hors plan. Parmi ces méthodes, l’interférométrie permet

d’appréhender les faibles variations de relief en pointe de fissure sous la forme de réseaux de

franges et apparaît de ce fait tout à fait adaptée pour notre étude. Le dépouillement des franges

s’effectue en s'appuyant sur les performances de la technique quasi hétérodyne. A partir de

trois images de franges déphasées, elle offre la possibilité d’accéder avec une précision

suffisante au relief en tout point de la zone de mesure. Son utilisation en mécanique de la

rupture nécessite un recalage des données, impossible à effectuer sans tenir compte de la

solution théorique 2D. Pour ce faire nous sommes amenés à définir quantitativement

l’étendue de la zone 2D, où la solution précédente est validée.

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La résolution de ce problème entre autre nous a poussés à développer en parallèle une

modélisation numérique par éléments finis suffisamment précise afin de représenter la région

en pointe de fissure. On met alors clairement en évidence l’existence d’une zone 3D en pointe

de fissure dont la taille est inférieure à la demi épaisseur de la plaque. Dans cette zone

apparaissent des effets 3D non négligeables qui rendent toute analyse 2D erronée. Les

données issues de l’interférométrie nous ont conduit à rechercher une forme mathématique du

déplacement hors plan valable dans les zones 2D et 3D. Ce travail a été validé pour deux

matériaux fragiles différents, à savoir le PMMA et l'Araldite.

Par ailleurs l’application d’une méthode optique connue sous le nom de méthode des

caustiques aboutit aux mêmes conclusions. Cette technique, qui met à profit la présence d’un

gradient de contraintes, a été largement utilisée en mécanique de la rupture fragile dans le but

de mesurer le(s) facteur(s) d’intensité de contraintes. La mise en œuvre de la méthode

nécessite cependant la connaissance du relief en pointe de fissure. La solution analytique 2D

est de ce fait classiquement employée. Lorsque les informations recueillies sont issues de la

zone 3D, on obtient alors des résultats incohérents qui dépendent typiquement de l’endroit où

est réalisée la mesure. A l’extérieur de cette zone les données deviennent satisfaisantes.

Nous présentons maintenant les différents chapitres qui composent ce mémoire.

Le premier chapitre est consacré à la mécanique de la rupture 2D et aux concepts qui

en découlent. Le problème de rupture est abordé tout d'abord à partir de considérations

énergétiques. On définit ainsi le taux de restitution de l’énergie G, l’intégrale J. On expose

ensuite les principaux développements analytiques qui conduisent pour le mode I de

fissuration à l’expression des contraintes singulières et du déplacement hors plan associé,

pour une fissure de dimension finie traversant une plaque infinie. Le cas pratique de

l'éprouvette finie de type SEN est alors traité, nécessitant l'utilisation d’un code d’éléments

finis (i.e. Castem 2000).

Après avoir présenté quelques travaux concernant la fissuration 3D des plaques, le

deuxième chapitre se poursuit par une étude numérique en pointe de fissure pour les plaques

minces chargées en mode I. Nous proposons ainsi une modélisation précise du problème par

éléments finis, construisant un maillage qui prend en compte un front de fissure curviligne

symétrique par rapport au plan médian de la plaque. On met alors en évidence l'existence

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d'une zone 3D au proche voisinage de la pointe de fissure dont la taille est approximativement

de l'ordre de la demi épaisseur de la plaque.

Le troisième chapitre expose les méthodes optiques utilisées par la suite dans ce

mémoire pour une approche expérimentale de la mécanique de la rupture. L'interférométrie et

la technique d'analyse par quasi hétérodynage y sont présentées. Cette dernière s'est

considérablement développée depuis l'apparition des systèmes informatisés de traitement

d'images et des capteurs CCD. Elle conduit, à un plan de référence près, à une estimation

rapide et suffisamment précise du relief en tout point de la zone de mesure. La seconde partie

de ce chapitre traite de la méthode des caustiques qui se distingue de la méthode précédente

dans le sens où elle n'exploite pas de réseau de franges d'interférence. Elle associe à la

singularité mécanique (i.e. la fissure), sur un plan image donné, une singularité optique (i.e. la

caustique) dont la forme et les dimensions dépendent expressément de l'expression singulière

du champ de contraintes en pointe de fissure, des propriétés mécaniques et/ou optiques du

matériau, des caractéristiques du montage expérimental. L'établissement de cette

correspondance et les relations géométriques qui en résultent permettent la mesure du facteur

d'intensité de contraintes. La méthode est détaillée pour un arrangement optique en réflexion.

La mise en œuvre expérimentale des méthodes optiques précédentes fait l'objet de la

première partie du quatrième chapitre. Trois exemples de plaques élastiques de type SEN sont

étudiées. On y propose alors une méthode expérimentale appropriée et suffisamment précise

pour mesurer le déplacement hors plan (de la surface libre de la plaque) en pointe de fissure.

Une formulation mathématique nouvelle du déplacement est finalement donnée pour le mode

I, formulation rendant compte de l'état mécanique tant dans la zone 3D en pointe de fissure

que dans le champ éloigné 2D. Elle est paramétrée en outre par six constantes qui dépendent

uniquement du matériau utilisé et dont on donnera une estimation numérique pour les trois

exemples présentés.

Le cinquième et dernier chapitre met à profit la connaissance d'une nouvelle

expression pour le déplacement hors plan, applicable à la méthode des caustiques. On

présente d'abord une simulation numérique des caustiques obtenues avec l'expression 3D

établie pour le déplacement hors plan, pour un plan image donné. On propose alors une loi qui

doit permettre de déterminer correctement le facteur d'intensité de contraintes, quelle que soit

la distance du plan image au modèle fissuré.

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CCHHAAPPIITTRREE 11

QUELQUES ASPECTS DE MECANIQUE DE LA RUPTURE FRAGILE

BIDIMENSIONNELLE

« Le secret d’ennuyer est celui de tout dire. »

Voltaire.

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1. PRESENTATION GENERALE

L’existence et la prise en compte de défauts dans les structures mécaniques ne peuvent

plus être ignorées de nos jours. D’origine et de nature variées, ils apparaissent lors de

l’élaboration, de la mise en forme et de l’usinage de pièces élémentaires telles que les tôles

laminées, les viroles ou encore au cours de l’assemblage de ces pièces. Il s’agit alors de

défauts introduits volontairement (ouvertures, pas de vis) ou qui résultent de travaux de

soudure et de collage. On les trouve également en service, sous forme de fissures de fatigue

qui s’amorcent par exemple de préférence dans des coudes de raccordement, de fissures de

corrosion sous contraintes après une exposition prolongée à un milieu corrosif, etc. On

distingue en fait deux types de défauts : les uns que l’on qualifie de volumiques (par exemple

les cavités, les trous) déterminés par trois dimensions dans l’espace et les autres de

surfaciques (à surface plane ou non) où seules deux dimensions interviennent. On trouve

parmi ces derniers les entailles avec un certain angle d’ouverture en fond, les fissures qui

constituent en fait les défauts les plus dangereux (particulièrement dans les milieux minces

comme les plaques) et que l’on considérera par la suite. Une fissure est caractérisée par sa

localisation dans la structure (fissures débouchantes ou fissures internes) par son orientation

par rapport aux directions de charges extérieures, par sa forme et ses dimensions.

Une structure dans l'industrie, mise à part sa fonction industrielle première, est avant

tout destinée à résister à un certain nombre de sollicitations ou des agressions mécaniques

extérieures de nature variée. Les défauts présents dans la structure, les contraintes résiduelles

de fabrication telles qu’elles existent après certaines soudures, peuvent créer localement des

contraintes suffisamment élevées favorisant la propagation d’une fissure sans pour autant que

les contraintes généralisées résultant de ces sollicitations ne dépassent la limite élastique du

matériau. De surcroît, les exigences économiques qui se manifestent par une réduction des

coûts de fabrication ont progressivement imposé une réduction des marges de sécurité

notamment dans le domaine industriel. En conséquence, il s’est avéré de plus en plus utile de

pouvoir donner une estimation quantitative précise de la tolérance de ces structures vis à vis

de défauts préexistants, afin de prévenir d’une éventuelle destruction catastrophique en

service. Une certaine prudence dans le tracé des pièces, en évitant soigneusement les formes

et les assemblages susceptibles d’engendrer des concentrations de contraintes, ainsi que le

retrait systématique des éléments présentant des défauts de fabrication ont sans doute

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contribué par le passé à limiter raisonnablement les risques de destruction. Néanmoins,

lorsque les structures deviennent de plus en plus complexes géométriquement et

matériellement (alliages, composites), lorsque les facteurs de sécurité se réduisent, et

finalement lorsque subsistent les défauts locaux (trous, entailles, fissures), le

dimensionnement de ces structures à la rupture est rendu nécessaire.

C’est à ce titre que l’on a vu l’émergence d’une science relativement récente connue

sous le nom de mécanique de la rupture introduite par Inglis [1] en 1913 et Griffith [2] vers

1920. La mécanique de la rupture suppose l’existence d’un défaut caractérisé (par exemple un

trou) ou d’une fissure initiale dans la structure étudiée, provoquant une discontinuité des

champs de contraintes et de déformations à cet endroit. Elle permet alors l’étude de

l’interaction entre cette discontinuité géométrique et le milieu continu avoisinant ainsi que

l’évolution de cette discontinuité. Les premiers travaux analytiques en milieu fissuré plan,

fondés sur l’utilisation des fonctions d’Airy, sont dus en particulier à Westergaard [3] et

datent de 1939. Ce dernier proposa une formulation locale des champs de contraintes et

déformations en pointe de fissure dans le cas d’une plaque élastique mince chargée par une

pression isostatique uniforme. Williams [4] et Irwin [5] ont développé cette discipline dans les

années 50 pour des milieux isotropes, homogènes et linéaires. Ces modélisations rentrent dans

le cadre de la fissuration qualifiée de fragile et ont notamment pu être validées pour des

matériaux à faibles déformations plastiques. Ce type de fissuration s’accompagne toujours

d’une propagation brutale et très destructive de la fissure, avec une loi de comportement du

matériau qui reste globalement dans le domaine élastique linéaire. Divers problèmes

principalement bidimensionnels (2D) ont été traités depuis, notamment en proposant une

extension des théories précédentes aux matériaux ductiles, orthotropes, en appliquant des

conditions aux limites statiques ou dynamiques variées ou encore en compliquant les

configurations géométriques…

Après quelques généralités sur les origines de la mécanique de la rupture, nous

présentons les travaux des chercheurs cités ci-dessus concernant la fissuration fragile des

structures minces que sont les plaques. Adoptant toujours un point de vue 2D (i.e. on néglige

l’épaisseur de la plaque), on aborde en premier lieu le problème de rupture à partir de

considérations énergétiques. On définit alors le taux de restitution de l’énergie G, l’intégrale J.

On expose ensuite les principaux développements analytiques qui conduisent à l’expression

des contraintes singulières et du déplacement hors plan associé, dans le cas d’une fissure de

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dimension finie traversant une plaque infinie. Dans le cadre de ce mémoire, seuls les résultats

concernant le mode d’ouverture de la fissure, appelé communément mode I, seront présentés.

Des corrections et des limitations sont apportées aux formulations précédentes afin de tenir

compte d’une zone plastique confinée en pointe de fissure ainsi que de dimensions

géométriques finies pour la plaque de type SEN. Les calculs obtenus à l’aide d’un code

d’éléments finis (et d’un maillage approprié de l’éprouvette SEN) nous conduisent finalement

à définir un domaine de validité (fonction de la taille de l’éprouvette) pour les solutions

asymptotiques précédentes.

2. MECANIQUE DE LA RUPTURE LINEAIRE EN MILIEU BIDIMENSIONNEL

2.1 Les origines de la mécanique de la rupture

La rupture d’un milieu matériel peut s’interpréter avant tout comme l’interruption

soudaine de la continuité de ce milieu. Ce phénomène se traduit alors, à l’échelle

macroscopique, par la création d’une surface de discontinuité que l’on appelle fissure. La

mécanique de la rupture n’est autre que l’application de la mécanique traditionnelle des

milieux continus à un corps sous sollicitation extérieure, auquel on ajoute des conditions aux

limites relatives à la présence géométrique des fissures. Avec les relations classiques de la

mécanique (équations d’équilibre, de compatibilité, loi de comportement du matériau,…), ces

conditions aux limites supplémentaires suffisent théoriquement à déterminer les champs de

contraintes, de déformations et de déplacements existant au sein du milieu fissuré. Cependant,

même avec une configuration géométrique simple et une loi de comportement élastique, il

s’est avéré difficile, voir impossible dans le cas général, de trouver des solutions

mathématiques qui remplissent à la fois les conditions mécaniques et géométriques

mentionnées précédemment.

On notera ici la distinction entre un problème de fissuration de type fragile et de type

ductile. Dans le premier cas, la propagation de fissures s’accompagne d’une faible

déformation plastique qui reste confinée au voisinage immédiat de la pointe de fissure. Par

opposition à la fissuration fragile, on parlera de fissuration ductile lorsque la présence de la

fissure engendre une déformation plastique non négligeable par rapport à la déformation

élastique en pointe de fissure. C’est le cas par exemple pour des matériaux ayant une loi de

comportement élasto-plastique.

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A l’aide de la théorie de l’élasticité et d’une approche simplifiée bidimensionnelle,

Inglis [1] a été l’un des premiers à étudier formellement un problème de rupture. Le problème

traité est celui d’un trou elliptique bidimensionnel inclus dans une plaque élastique soumise à

une contrainte nominale σnom uniformément répartie à l’infini et perpendiculaire au grand

axe. La résolution en coordonnées curvilignes donne l’expression suivante de la contrainte

maximale ( )maxyyσ agissant au sommet du grand axe de l’ellipse dans la direction de σnom :

( ) ))R/a(21( 2/1nommaxyy +σ=σ (1.1)

Il apparaît dans la relation précédente que ( )maxyyσ est reliée à la contrainte nominale

par la quantité a/R, où a représente la longueur du demi grand axe de l’ellipse et R le rayon de

courbure au point considéré. Si b est la longueur du demi petit axe, R prend une valeur

minimum à cet endroit, qui vaut ab2 .

On notera que pour un trou circulaire (i.e. lorsque R = a) ( ) nommaxyy 3σ=σ . Cependant

pour le cas limite R = 0 qui est celui d’une fissure, la contrainte devient infinie. Ce résultat

suggère qu’un milieu fissuré ne peut supporter aucune charge extérieure ! Ce paradoxe qui

apparaît lorsque que l’on applique le résultat d’Inglis à une fissure, ne sera levé que plus tard

en utilisant de nouvelles méthodes de calcul permettant de déterminer l’état de contrainte

élastique autour des fissures et d’introduire notamment la notion de facteur d’intensité de

contraintes. Point de départ de l’analyse énergétique de Griffith exposée au paragraphe

suivant, cette relation importante a permis néanmoins de mettre en évidence la présence de

contraintes bien plus élevées que la contrainte nominale au voisinage de défauts tels que les

trous.

L’utilisation massive de métaux dans la fabrication de pièces mécaniques à la fin du

19ème siècle a nécessité la mise au point d’une méthode de calcul fiable afin de prévenir les

ruptures fragiles que pouvaient subir ces matériaux. Les expériences passées, comme on peut

le voir Figure 1-1, ont montré en effet toute la gravité des accidents survenus par rupture

brutale de pièces mécaniques, souvent sans déformation plastique appréciable. De plus, ces

destructions qui intervenaient sous contraintes généralisées souvent nettement inférieures à la

limite élastique du matériau, étaient totalement imprévisibles avec la seule connaissance du

critère de ténacité (essai Charpy) issu de la résistance des matériaux. Broek [6] relate dans son

ouvrage toute une série d’accidents survenus à la suite de ruptures soudaines et inattendues de

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structures mécaniques: il y a eu par exemple en Grande Bretagne entre 1860 et 1870 plus de

200 morts chaque année à la suite d’accidents ferroviaires dont la plupart sont dus à des

ruptures de roues, d’axes ou de rails. A New York le 13 décembre 1898, la rupture d’un gros

réservoir de gaz tua un nombre important de personnes et occasionna des destructions

considérables aux alentours. Sur les 2500 bateaux Liberty construits durant la deuxième

guerre mondiale, 145 se cassèrent en deux et presque 700 contenaient de sérieuses fissures…

Figure 1-1: Rupture fragile d’un bateau (d'après [6])

Suite aux travaux d’Inglis, diverses méthodes d’analyses ont permis d’étudier les

champs de contraintes, de déformations et de déplacements au voisinage des fissures. Ces

méthodes se regroupent selon deux types d’approches. La première, qui est une approche

énergétique, est basée sur un bilan d’énergie global prenant en compte une énergie de création

de surface. La seconde est une approche locale et fait appel aux fonctions d’Airy, permettant

de résoudre principalement des problèmes plans.

2.2 Résolution du problème par une approche énergétique

2.2.1 Théorie de Griffith, taux de restitution de l’énergie

La contribution de Griffith [2] est fondamentale car elle a permis de s'affranchir d’une

contrainte infinie en pointe de fissure, qui survient lorsque la solution de Inglis est appliquée à

une structure fissurée. Par la même occasion, elle a conduit au développement de la

mécanique de la rupture et à son utilisation courante dans le domaine de l’ingénierie.

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- 12 -

A l’échelle atomique, on assimilera pour simplifier un matériau sans défaut à une

structure cristallographique simple où les atomes sont disposés dans l’espace suivant un

réseau cubique de pas constant b0 (i.e. le paramètre de maille qui est de l’ordre de 0.5 nm). On

convient alors de représenter la contrainte normale σ, nécessaire à la séparation de deux plans

cristallographiques unitaires (dans une direction perpendiculaire à ces plans), par une courbe

sinusoïdale qui dépend du déplacement x des atomes par rapport à leur position d’équilibre

(voir figure 1-2). Cette fonction présente les trois caractéristiques suivantes : (a) au voisinage

de la position d’équilibre le comportement de la structure est purement élastique ce qui se

traduit par une pente à l’origine égale au module d’Young E ; (b) le travail total provoquant la

rupture (zone hachurée figure 1-2) vaut deux fois l’énergie de création γ d’une surface libre ;

(c) la fonction passe par un maximum qui s’interprète comme la contrainte de cohésion σth du

milieu. On a alors :

( )( )( )

0bx0

0

bbx

d

xdE

=

−σ

= (1.2)

00

02

10

21

0bx,

bbxbE

sinbE)x( ≥

γ

γ=σ (1.3)

Figure 1-2 : Rupture à l’échelle atomique

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- 13 -

On notera que

γπ+=

210

0 Eb

bb correspond à la distance de séparation. La

contrainte de cohésion considérée comme la résistance théorique du matériau est donnée par :

2

1

0th b

E

γ=σ (1.4)

Des calculs de la contrainte de cohésion ont été réalisés avec des modélisations et des

représentations de σ plus précises que celles données ci-dessus. Ils aboutissent à des valeurs

de σth comprises entre E/4 et E/13. On estime néanmoins que σth ≈ E/10 est une bonne

approximation. Une telle prédiction est pourtant excessive en pratique. Elle a conduit Griffith,

après une série d’expériences réalisées sur la rupture de barres en verre de différentes

épaisseurs, à admettre que ces éprouvettes contenaient une multitude de micro fissures qui les

rendaient beaucoup plus vulnérables et provoquaient leur rupture bien en dessous du seuil

théorique (1.4). Ses résultats expérimentaux montraient en effet que la résistance théorique σth

pouvait être approchée lorsque l'épaisseur des barres utilisées se réduisait progressivement, ce

qui n'était plus du tout vrai dans le cas contraire. La démarche de Griffith suppose ensuite

qu’une fissure ne peut se propager que si elle reçoit une énergie suffisante nécessaire à la

création d’une nouvelle surface de rupture. Pour un milieu fragile idéal il postule que durant

un accroissement da de longueur de la fissure, l’énergie totale E du milieu composée de la

somme de l’énergie potentielle Wpot et d’une énergie S de création de surface ne varie pas. On

a ainsi :

extpotpot WWW,0dSdWdE −==+= (1.5)

W et Wext représentent respectivement l’énergie de déformation du milieu (pour un processus

adiabatique il s’agit également de l’énergie interne qui dépend alors uniquement du tenseur

des déformations ε ) et le travail des forces extérieures appliquées. Il faut noter que pour un

milieu infini les conditions aux limites ne sont pas affectées lors de la propagation de la

fissure (i.e. le travail des forces extérieures ne varie pas) et on a WWpot ≅ . D’après (1.5), la

rupture n’est donc possible que si la variation d’énergie potentielle extpot WWW −= due à un

accroissement da de la fissure est égale à l’énergie de surface S nécessaire à la séparation des

deux lèvres de la fissure.

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- 14 -

Il est commode pour un milieu bidimensionnel de rapporter les quantités précédentes à

l’unité d’épaisseur du milieu. En modifiant alors l’écriture de dS et en introduisant le

paramètre G, appelé taux de restitution de l’énergie, comme suit :

da2dS γ= (1.6a)

potWdadG −= (1.6b)

le bilan (1.5) se réécrit sous la forme bien connue :

γ=2G (1.7)

A partir des travaux analytiques d’Inglis, Griffith a calculé l’énergie de déformation

dans le cas de la plaque élastique infinie (d’épaisseur unitaire) comportant un défaut elliptique

de longueur 2a :

*

2nom

2

pot Ea

WWσπ

−=≅ (1.8)

avec ( )2* 1EE ν−= en déformations planes et EE* = en contraintes planes. Avec (1.5),

(1.7) et (1.6a et b) en prenant garde de remplacer da par d2a, il en résulte une nouvelle

expression de la résistance du milieu fissuré :

2

1*

r aE2

πγ

=σ (1.9)

De la même manière en utilisant les expressions (1.1) et (1.5), on établit le critère de

rupture suivant :

2

1

0r ba4

E

ργ=σ (1.10)

Il est intéressant de noter que dans l’expression (1.9) le rayon de courbure au fond de

l’entaille elliptique n’apparaît pas : on dispose ainsi d’un critère de rupture valide pour de

faibles rayons de courbure (i.e. une fissure) contrairement au critère (1.10) qui conduit alors à

un σr nul, inconcevable physiquement. Le critère (1.9) a été vérifié expérimentalement pour

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- 15 -

des matériaux parfaitement élastiques comme le verre. Diverses corrections ont été apportées

afin, par exemple, de tenir compte dans le calcul de l’énergie de déformation de la plaque de

contraintes résiduelles dues à l’existence de l’énergie de surface [7, 8]. Le critère a été étendu

à des matériaux moins fragiles [9] par l’introduction d’un terme correctif représentant une

énergie de déformation plastique en pointe de fissure. De même la prise en compte de

l’énergie cinétique dans la loi de bilan (1.5) permet de rendre compte d’une propagation

instable de la fissure.

2.2.2 Intégrale J et ses propriétés

Une autre expression du taux de restitution de l’énergie G introduit au paragraphe

précédent est possible au moyen d’une intégrale de contour. On considère pour cela un milieu

élastique fissuré, d’épaisseur unitaire, de frontière extérieure SF muni du repère ( )21 X,X,O

(voir figure 1-3a). On notera A la surface du corps délimitée par le contour SF. Un état de

déformation plane ou de contrainte plane est supposé exister au sein du milieu.

Pour une longueur a de la fissure et en absence de force volumique, l’énergie

potentielle du milieu est alors donnée par :

( ) dSuTdA)(WaW iS

di

Apot

T

∫∫ −ε= (1.11)

où le produit idi uT représente le produit scalaire des forces extérieures données dT

sur le

contour ST et des déplacements correspondants u , avec (i=1,2). Le contour SF est parcouru

dans le sens trigonométrique. SU correspond à la portion de SF où les déplacements extérieurs

sont imposés.

Dans l’expression (1.11) la quantité scalaire W (i.e. la densité d’énergie de

déformation) est une fonction convexe et définie positive ce qui assure entre autres la stabilité

du matériau [10]. Elle relie de façon très générale le tenseur des contraintes σ au tenseur des

déformations ε comme suit :

ij

ijWε∂∂

=σ (1.12)

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- 16 -

En introduisant le système de coordonnées cartésiennes 1iii aXx δ−= attaché à la

pointe de fissure (δij est le symbole de Kronecker et i,j=1,2) et pour une propagation selon la

direction x1, on a :

11

1

xaxax

adad

∂∂

−∂∂

=∂∂

∂∂

+∂∂

=

On soulignera ici l’analogie avec la dérivée particulaire introduite classiquement en

cinématique : les composantes Xi et les xi correspondent respectivement à des coordonnées

lagrangiennes (fixes) et eulériennes reliées entre elles par le paramètre a. Si l’on différentie

(1.11) par rapport à a, en supposant les forces et déplacements extérieurs appliqués

indépendants de a, on obtient grâce à la relation précédente :

dSxu

auTdA

xW

aW

dadW

1

ii

S

di

A 1

pot

F

∂∂

−∂∂

∂∂

−∂∂

= ∫∫ (1.13)

On peut alors écrire en utilisant (1.12) et la propriété de symétrie du tenseur des

contraintes et des déformations :

∂∂

∂∂

σ=∂

ε∂

ε∂∂

=∂∂

au

xaW

aW i

jij

ij

ij (1.14)

où on a adopté la convention de sommation suivante : lorsqu’un indice est présent deux fois

dans une même expression on lui fait prendre les valeurs 1,2 et 3 (selon le contexte) puis on

somme. L’indice en question est alors qualifié d’indice muet par opposition à un indice franc

qui lui n’apparaît qu’une fois et garde une valeur fixe 1,2 ou 3 (selon le contexte). Dans

l’expression (1.14) et ce qui suit, les indices muets i,j prennent les valeurs 1 et 2.

Le principe des travaux virtuels permet d’écrire :

dSauTdA

au

xdA

aW i

S

di

A A

i

jij

F∂∂

=

∂∂

∂∂

σ=∂∂

∫∫ ∫ (1.15)

La relation (1.13) se simplifie alors, et par application du théorème de la divergence,

on obtient finalement :

dSxuTWdxdS

xuTWn

dadW

G1

idiS 2

S 1

idi1

pot

FF

∂∂

−=

∂∂

−=−= ∫∫ (1.16)

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- 17 -

L’intégrale de contour (1.16) est classiquement appelée intégrale J. Rice [11] a montré

que pour une fissure rectiligne cette intégrale est indépendante du contour d’intégration

lorsque ce dernier englobe le fond de fissure. L’intégrale J est en fait nulle sur tout contour

fermé qui ne contient pas la pointe de fissure, ce qui permet d’établir cette propriété

d’indépendance vis-à-vis du contour d’intégration. La particularisation de l’expression (1.16)

à un contour circulaire orienté Γ de rayon r (figure 1-3b) donne en prenant les coordonnées

polaires associées:

( ) ( ) ( ) ( ) θ

θ

∂∂

θ−θ

θεθσ= ∫

π+

π−

d,rxu.,rTcos,r,r

21rJ

1

idiijij (1.17)

σσσσ

=2

1

2221

1211di n

nT avec

rxn 1

1 = et r

xn 22 = ,

et

∂∂∂∂

=∂∂

1

1

1

i

xvxu

xu

L’expression (1.17) est pratique pour évaluer J en déformation plane ou pour un état

de contraintes planes généralisées. On notera que le long de la fissure (i.e. les segments OA et

OB sur la figure 1-3b) les termes de l’intégrale J sont nuls et n’interviennent pas dans

l’expression (1.17).

2x

O

a

SF dS

1X

2X

2

1

nn

n

ST

SU

O’

dT

1x

1-3a 1-3b

B

A

Γ

O

r

θ

1x

2

1

nn

n2x

Figure 1-3: Représentation du contour d’intégration

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- 18 -

En élasticité la propriété d’indépendance de l’intégrale J vis-à-vis du contour, permet

donc de l’interpréter comme un paramètre mécanique global équivalent à l’énergie G introduit

par Griffith. En milieu élastoplastique, il faut tenir compte dans l’expression de W d’un terme

qui est dû à la déformation plastique. Une partie de l’énergie W est alors directement dissipée

dans la matière et n’est donc plus utilisable pour propager la fissure. Autrement dit

l’équivalence entre les quantités G et J n’est plus vérifiée. On peut cependant montrer que

pour un certain type de déformation plastique, J dérive d’un potentiel. Ces deux propriétés

remarquables ont permis l’utilisation de J pour représenter les champs de contraintes et de

déformations en pointe de fissure dans le cas du matériau élastoplastique vérifiant la loi de

Ramberg-Osgood ou Prandtl-Reuss. Pour ce type de matériau, la solution asymptotique 2D

proposée est connue sous le nom de champ H.R.R. [12,13]. Notons enfin que d’autres

intégrales de contour ayant les mêmes caractéristiques que J ont été introduites par la suite.

On peut citer par exemple l’intégrale I établie par Bui [14] à partir de l’énergie de

déformation complémentaire WW ijij* −εσ= au lieu de W.

2.3 Déplacement des lèvres de la fissure et modes élémentaires de rupture

Au lieu d’aborder le problème de rupture en considérant l’énergie du système, on peut

étudier directement les champs de contraintes et de déplacements existants au voisinage de la

pointe de fissure. La fissure est représentée à l’aide de deux surfaces planes (i.e. les lèvres de

la fissure) qui se coupent selon une courbe simple appelée front de fissure. L’étude proposée

concerne les plaques élastiques dont l’un des côtés comporte une fissure traversante. Plus

précisément, les lèvres supérieure et inférieure de la fissure seront toujours des plans

transverses perpendiculaires à la surface extérieure (i.e. la surface libre ∂SL) de la plaque. De

plus dans ce chapitre le front de fissure est pris rectiligne et également perpendiculaire à la

surface libre comme le montre la figure 1-3. L’influence sur les champs de contraintes et de

déplacements d’un front de fissure courbe sera étudiée au chapitre suivant, dans le cadre de

l’analyse 3D.

On définit un repère orthonormé direct ( )z,y,x,O centré en pointe de fissure, d’axe

z tangent au front de fissure (voir figure 1-3). L’axe x se situe dans le prolongement de la

fissure. Un point de la plaque est alors repéré par ses coordonnées cylindriques (r, θ, z) où r

est la distance au front de fissure et θ la coordonnée angulaire prise à partir de l’axe x .

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- 19 -

Surface libre ∂SL

r

x

y

z+t/2

O

Lèvresupérieure

Lèvreinférieure

Front

-t/2θ

σyyτxy

σxx

Figure 1-4 : Représentation d’une fissure dans une plaque chargée d’épaisseur t

Les mouvements cinématiques possibles des lèvres inférieure et supérieure de la

fissure, l’une par rapport à l’autre, se décomposent en trois mouvements élémentaires

indépendants schématisés figure 1-5 auxquels sont associés trois modes de fissuration. Irwin

[5,15] a montré que tout processus de fissuration pouvait se ramener à l’un de ces trois modes

ou à leur superposition. Pour un chargement plan, symétrique par rapport au plan de la fissure

(voir figure 1-4), seul le mode d’ouverture de la fissure (ou mode I) est activé. Les modes II et

III correspondent respectivement au mode de glissement dans le plan et hors du plan de la

fissure.

A chacun des trois modes correspondent des champs de contraintes et de déplacements

pour lesquels il existe, du moins dans le cadre de la théorie 2D, des expressions analytiques

asymptotiques valables au voisinage de la pointe de fissure. Les solutions proposées sont en

général données dans le repère d’étude précédent ( )z,y,x,O . La démarche scientifique qui a

permis d’établir ces solutions pour le mode I de fissuration fait l’objet des paragraphes

suivants.

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- 20 -

z

x

y

Mode I

x

Mode II

z

y

z

x

y

Mode III

Figure 1-5 : Modes élémentaires de fissuration

On pourra dans la suite, sans nécessairement le préciser, adopter la notation suivante :

( )321 x,x,x,O pour représenter le repère ( )z,y,x,O . L’écriture des coordonnées d’un point,

des composantes d’un vecteur ou d’un tenseur suit logiquement : (x1, x2, x3) pour ( )z,y,x , u3

pour uz , σ11 et σ12 pour σxx et σxy , etc...

2.4 Rappels d’élasticité plane, fonction d’Airy

Considérons la plaque élastique fissurée représentée figure 1-3 et rapportée à son

repère d’étude ( )321 x,x,x,O . Si l’on introduit les coordonnées cartésiennes associées (x1 ,

x2 , x3), le domaine matériel occupé par la plaque est défini par : D = (x1, x2, x3) / (x1, x2) ∈

∂SL et | x3 | ≤ t/2 .

La détermination de l’état mécanique [ u ,σ ] de la plaque sous sollicitation extérieure

imposée (généralement impossible dans le cas général) s’inscrit dans le cadre d’un problème

plan (P) si l’on suppose les charges extérieures appliquées indépendantes de x3. On simplifie

encore le problème (on parle alors d’élasticité plane) en suivant deux approches classiques qui

proposent des hypothèses supplémentaires sur la forme du déplacement u ou sur celle du

tenseur des contraintes σ .

La première, connue sous le nom de déformation plane (DP), impose les conditions

suivantes sur le déplacement :

( )

0u2,1ix,xuu

3

21ii

≡==

(1.18)

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- 21 -

La seconde est appelée état de contrainte plane (CP) et suppose que le tenseur des

contraintes ne dépend que de x1 et x2 avec les conditions supplémentaires suivantes :

0332313 =σ=σ=σ (1.19)

Pour les plaques fissurées de faible épaisseur, les solutions analytiques 2D

développées s’appuient en général sur le concept de contrainte plane. On notera que u3 dépend

alors linéairement de x3. En négligeant les forces de volume, en tenant compte de la loi de

Hooke et de la définition du tenseur des déformations (avec l'hypothèse des petites

perturbations) [17], les approches (DP) et (CP) conduisent alors aux équations d’équilibre

suivantes :

( ) ( )

( ) σ+σν

=σ=σ=σ

==∂

σ∂

CP0DP

et0

2,1j,i0x

2211332313

j

ij

(1.20)

où ν représente le coefficient de Poisson et la convention de l’indice muet a été adoptée. Il

convient de préciser que les approches précédentes ne permettent pas de vérifier toutes les

conditions et relations mathématiques requises par le problème plan (P) posé sous sa forme

générale [17]. Les solutions qui en résultent ne pourront être qu’une approximation de la

solution du problème plan (P). Néanmoins, nous verrons qu’elles sont tout à fait acceptables

dans le chapitre suivant sous certaines conditions et dans certaines régions d’une plaque

fissurée qui seront alors précisées.

On montre alors que l’on peut vérifier automatiquement les équations d’équilibre

(1.20) par l’intermédiaire d’un tenseur de fonction de contraintes Φ en posant :

( )

( )

Φ=σ

21

t

x,xA00000000

avec

RotRot

(1.21)

La fonction A est appelée fonction d’Airy et permet d’exprimer les contraintes sous

une forme plus connue :

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- 22 -

21

2

1221

2

2222

2

11 xxA,

xA,

xA

∂∂∂

−=σ∂∂

=σ∂∂

=σ (1.22)

La première équation de compatibilité impose une relation supplémentaire entre les

composantes du tenseur des déformations ε :

0xx

2xx 21

122

21

222

22

112

=∂∂ε∂

−∂ε∂

+∂ε∂

(1.23)

En contrainte plane, les trois autres équations de compatibilité concernent la

déformation ε33 et ne peuvent pas être vérifiées en général : elles imposent en effet que

2211 σ+σ soit une fonction linéaire de x1 et x2 ce qui est en général trop restrictif…

La relation (1.23) conduit alors en contrainte plane ou en déformation plane à une

équation différentielle vérifiée par la fonction d’Airy. Cette équation est appelée équation

biharmonique et a été donnée par Goursat en 1898 [18] :

0xA

xxA2

xAA 4

2

4

22

21

4

41

44 =

∂∂

+∂∂

∂+

∂∂

=∇ (1.24)

La mise en équation d’un problème de rupture, dans le cadre de l’élasticité plane,

pourra ainsi se faire en recherchant une fonction biharmonique appropriée qui dépend des

coordonnées x1 et x2. Il suffit simplement de trouver une fonction scalaire A(x1,x2) qui

satisfaisait (1.24) et les conditions aux limites du problème par le biais de (1.22) !

La théorie des fonctions complexes simplifie en fait considérablement la tâche en

offrant une méthode générale de résolution des problèmes d’élasticité plane depuis les travaux

importants de Goursat [18]. On ramène en effet la solution de l’équation biharmonique à la

détermination de deux fonctions analytiques ϕ et χ dans une région du plan ( )21 x,x,O avec

des conditions aux limites imposées. A toute fonction analytique f (ici f=ϕ ou f=χ), on associe

la fonction f définie par ( ) 21 xixzoù,)z(fzf +== . Soit alors :

( ) ( ) ( ) ( ) ( )[ ] ( ) ( )[ ]21

21xixzavec

zzzRe2zzzzzzx,xA−=

χ+ϕ=χ+χ+ϕ+ϕ= (1.25)

Cette solution a été développée et appliquée à certains problèmes d’élasticité plane par

Kolossov [19] au début du siècle et par Muskhelishvili ensuite [20,21].

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- 23 -

En utilisant (1.22), les contraintes ijσ et les déplacements ui sont déterminés à l’aide

des dérivées des fonctions ϕ, χ, ϕ et χ par les relations :

( )[ ]( ) ( )[ ]

( ) ( ) ( ) )z()z('zz1uiuEz'z''z2i2

z'Re4

21

121122

2211

ψ−ϕ−ϕκ=ν++ψ+ϕ=σ+σ−σ

ϕ=σ+σ

(1.26)

avec ( ) ( )z'z χ=ψ et où z est un point du domaine matériel appartenant au plan ( )21 x,x,O .

E représente le module de Young et ν le coefficient de Poisson. On a également ν−=κ 43 et

( ) ( )ν+ν−=κ 13 respectivement pour un état de déformations planes et un état de

contraintes planes. Les fonctions ϕ et ψ, quant à elles, dépendent non seulement du

chargement extérieur mais également de la nature et de la forme du domaine considéré. Sans

utiliser les équations précédentes, Westergaard [3] a mené l’une des premières études en

milieu élastique fissuré, à partir des propriétés des fonctions complexes.

2.5 Approche locale : champs de contraintes et de déplacements au voisinage d’une

fissure

2.5.1 Les solutions analytiques 2D de Westergaard [3], Sih [22] et Eftis [23,24]

Westergaard [3] a résolu ainsi le problème symétrique d’une plaque infinie fissurée,

chargée hydrostatiquement en développant la fonction d’Airy A à l’aide d’une fonction

complexe Z(z) :

'Z

dzdZ,Z

dzZd,Z

dzZdoù

ZImxZReA 2

===

+= (1.27)

Comme la fonction est analytique sur le domaine d’étude considéré, il n’y a pas

d’ambiguïté dans la définition des dérivées. En utilisant les relations classiques de Cauchy-

Riemann, on montre facilement que la fonction ainsi définie vérifie l’équation biharmonique.

Elle conduit alors à l’expression suivante des contraintes :

'ZRex

'ZImxZRe'ZImxZRe

212

222

211

−=σ+=σ−=σ

(1.28)

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- 24 -

La relation précédente est valable pour toute fonction analytique. Il faut donc trouver

la fonction Z(z) qui permette de vérifier également les conditions aux limites du problème

considéré. Ainsi pour le mode d’ouverture d’une fissure de longueur 2a contenue dans une

plaque infinie sous chargement biaxial σ (voir figure1-6), Westergaard a proposé la fonction

solution suivante :

2122xixz,

az

zZ +=−

σ= (1.29)

où les coordonnées x1, x2 sont liées au repère d’étude représenté figure 1-6. La fonction (1.29)

est holomorphe partout sauf sur la fissure. A l’aide de (1.28), on retrouve aisément les

contraintes imposées aux limites. Ainsi lorsque ∞→z , on a σ11 = σ22 = σ et σ12 = 0 et sur la

surface fissurée σ12 = σ22 = 0. La fonction proposée est donc une solution du problème.

Afin d’expliciter le champ de contraintes en pointe de fissure, il est commode

cependant de remplacer dans (1.29) z par (a + u) avec u = reiθ, (r, θ) sont les coordonnées

polaires prises en fond de fissure (voir figure 1-6). Avec la nouvelle variable u, on a alors au

voisinage de la pointe de fissure (i.e. lorsque 0u → ) :

u2

Ku2

aua2aZ I

0u π=

ππσ

=→ (1.30)

où le facteur multiplicatif π est traditionnellement rajouté. La quantité KI au numérateur est

fonction uniquement du chargement extérieur et de la demi-longueur de la fissure. Elle est

connue sous le nom de facteur d’intensité de contraintes. Compte tenu de l’expression de u en

coordonnées polaires, les contraintes en pointe de fissure peuvent être calculées à partir de

(1.30) et (1.28) :

23cos

2cos

2sin

r2K

23sin

2sin1

2cos

r2K

23sin

2sin1

2cos

r2K

I12

I22

I11

θθθπ

θθ+

θπ

θθ−

θπ

(1.31)

Notons ici que la démarche précédente est similaire en mode II et conduit à un champ

de contraintes associé présentant la même singularité en r-1/2que (1.31). Il faut cependant

choisir une autre fonction de contrainte Z pour solutionner le problème [25].

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- 25 -

A partir de la représentation complexe de l’état de contraintes (1.26), il est possible de

traiter le même type de problème sous le chargement plus général de la figure 1-6

(k quelconque).

La condition de symétrie par rapport à Ox1 s’exprime de la façon suivante :

( ) ( )[ ] 0z'z''zIm12 =ψ+ϕ=σ (1.32)

Sih [22] a montré que cette condition est vérifiée si :

( ) ( ) 0Bz''zz' =+ϕ+ψ (1.33)

où B est une constante réelle qui dépend du chargement. La relation (1.33) permet d’exprimer

χ(z) à l’aide de B et ϕ(z) . Tout calcul fait [25], on aboutit à l’expression suivante de la

fonction d’Airy :

( ) ( )[ ] ( )[ ] ( )22

21221 xx

2Bz2Imxdzz2Rex,xA −−ϕ+ϕ= ∫ (1.34)

Soit en identifiant ( )z'2)z(Z ϕ≡ et en conservant les notations de Westergaard

définies en (1.27) :

( ) ( )22

21221 xx

2BZImxZRex,xA −−+= (1.35)

Le champ de contraintes est donné alors par :

'ZRex

B'ZImxZReB'ZImxZRe

212

222

211

−=σ−+=σ+−=σ

(1.36)

Les équations précédentes ont été établies par Sih [22]. En apportant la modification

suivante à la fonction Z(z) proposée par Westergaard :

Baz

zZ22+

σ= (1.37)

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- 26 -

et en utilisant les équations (1.36), Eftis et Liebowitz [23,24] ont résolu le problème plus

général présenté figure 1-6. Pour que les contraintes vérifient correctement les conditions aux

limites, la constante B vaut selon leur analyse :

( )2k1B σ−

−= (1.38)

Compte tenu de (1.36-38), on a la représentation suivante du champ de contraintes en

pointe de fissure :

23cos

2cos

2sin

r2K

23sin

2sin1

2cos

r2K

)k1(2

3sin2

sin12

cosr2

K

I12

I22

I11

θθθπ

θθ+

θπ

σ−−

θθ−

θπ

(1.39)

On remarque que l’on retrouve facilement les solutions de Westergaard à partir des

systèmes (1.39) et (1.37) en prenant k=1. Le cas particulier important d’un milieu infini

sollicité uniaxialement suivant le mode d’ouverture de la fissure est décrit lorsque k=0.

x2

x12a

σ=σ∞→2x22

σ=σ∞→

k1x11

M

zu

θr

O

Figure 1-6 : Plaque fissurée, milieu bidimensionnel infini en mode I

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- 27 -

En contraintes planes, le déplacement hors plan u3 de la surface libre d'une plaque

d'épaisseur t identique à celle considérée figure 1-6 lorsque k=0, est donné par :

( ) ( )

( )2t

Ecteavec

cter2

12

cosE

tKdx,r2tx,,ru I

32

t

03333

σν

=

θν

−=∫ θε==θ (1.40)

où la coordonnée x3 est définie à partir du repère d’étude centré en fond de fissure (i.e. au

point O) de la figure 1-4. Vu la symétrie du problème, on obtient une expression de u3

identique, au signe près, pour l’autre surface libre.

2.5.2 Généralisation du problème à des milieux de dimension finie

Il est clair que les solutions précédentes ne s’appliquent qu’au cas idéal du massif

élastique fissuré infini figure 1-6. En pratique, les plaques étudiées ont des dimensions finies,

les fissures ne sont pas forcément localisées au centre. On trouve en général dans la littérature

[25, 26] quelques éprouvettes standards contenant des fissures traversantes, de géométrie

simple, sous différents types de chargement. On montre figure 1-7 les éprouvettes CN

(Central Notch), DEN (Double Edge Notch) et SEN (Single Edge Notch). Cette dernière

constituera la géométrie de référence dans notre étude.

a

Type SEN

W

a a

Type DEN

2W

2a

Type CN

2W

2V

σ0σ0

σ0 σ0

σ0

σ0

Figure 1-7 : Eprouvettes fissurées de type CN, DEN et SEN sous chargement uniaxial

(σ0 est la contrainte nominale associée)

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- 28 -

a) Développement en série de Williams [27]

L’approche de Williams [27] propose une résolution alternative générale de l’équation

de comptabilité (1.24) en milieu plan, sans utiliser les fonctions complexes. On suppose pour

cela que la fonction d’Airy A s’écrit sous la forme :

( ) ( )θ=θ +λ Fr,rA 1 (1.41)

où λ est un scalaire et F(θ) une fonction continue et dérivable de θ à déterminer. Le repère

d’étude est toujours celui de la figure 1-3 : les grandeurs mécaniques qui suivent seront toutes

exprimées avec les coordonnées polaires associées.

En reportant l’expression précédente de A dans l’équation (1.24) réécrite en

coordonnées polaires, on obtient l’équation différentielle du 4ème ordre suivante pour F :

( ) ( ) ( )[ ] ( ) ( ) ( )[ ] ( ) 0F11dFd11

dFd 22

2

222

4

4=θ+λ−λ+

θθ

+λ+−λ+θθ (1.42)

dont la solution générale est :

( ) ( ) ( ) ( ) ( ) 01sinc1sinc1cosc1coscF 4321 =θ+λ+θ−λ+θ+λ+θ−λ=θ (1.43)

où les constantes ci sont à déterminer à partir des conditions aux limites. En injectant alors la

forme (1.41) dans les équations (1.22) les contraintes deviennent :

( ) ( ) ( ) ( )

( ) ( ) ( )[ ]

( ) ( )

θθ

λ−=∂θ∂

∂−

θ∂∂

θλ+λ=∂∂

θ+λ+

θθ

=θ∂∂

+∂∂

−λθ

−λθθ

−λ

ddFr

rA

r1A

r1

F1rrA

F1dFdrA

r1

rA

r1

12

2r

12

2

2

21

22rr

(1.44)

Les lèvres de la fissure sont libres de contraintes (i.e. π±=θ=σ=σ θθθ ,0r ), ce qui

conduit au système algébrique suivant pour les ci :

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- 29 -

( ) ( )( ) ( )

( ) ( )( ) ( )

0

cccc

1cos1cos001sin1sin00

001sin1sin001cos1cos

4

3

2

1

=

π+λπ−λΓπ+λπ−λ

π+λπ−λΓπ+λπ−λ

(1.45)

avec ( ) ( )11 +λ−λ=Γ . On peut voir à partir de (1.45) que les constantes c1 et c2 sont

totalement indépendantes de c3 et c4 : les deux premières correspondent en fait au chargement

symétrique (mode I) alors que pour les deux autres il s’agit d’un chargement antisymétrique

(mode II). Une solution non triviale existe si le déterminant de la matrice s’annule. Après

simplification, la relation caractéristique que vérifie λ se réduit à :

( ) 02sin =πλ (1.46)

On obtient alors les valeurs propres λn de λ solutions de (1.46) :

+∈=λ *n Nn,

2n (1.47)

Notons que n est un entier positif afin de borner l’énergie de déformation. Aux valeurs

propres λn sont associés les coefficients c1n, c2

n et c3n, c4

n. En reportant dans (1.45) et pour le

mode I qui nous intéresse, on trouve les relations suivantes :

( ) ( )( ) +

−−− ∈

==

=

+

+−

=+−

−=

=*

4n

3n

21m2

11m2

1m

2m2

1m2

m

Nm,

0cc

0cc1m23m21

0cc1

n21m2n

m2n

(1.48)

soit avec des notations évidentes, pour la fonction de contraintes A :

( )( )

( ) ( ) ( )[ ]∑

θ++θ−−−+

θ

+

+−

−−−

=θ∞

=+

+−

,...2,1m 1mm2

m

21m1m2

1msym

1mcos1mcosrc1

21mcos

1m23m2

23mcosrc1

,rA (1.49)

En ne conservant que les deux premiers termes ci dessus, pour un mode I de

chargement, on a :

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- 30 -

( )

)r(O22sin

sincos

c4

23sin

2sin

23cos

2cos3

23cos

2cos5

r4c 212

2

2211

r

rr

+

θ−θθ

+

θ

θ−

θ

θ−

θ

+

θ−

=

σσσ

θ

θθ (1.50)

Si on réécrit (1.50) dans le système σ11, σ22, σ12 en utilisant la transformation

classique des composantes d’un tenseur il vient :

( )

2I

1

21I

12

22

11

c4Tet2Kcposanten

rO001

T

23cos

2sin

23sin

2sin1

23sin

2sin1

2cos

r2K

−=

+

+

θθ

θθ+

θθ−

θπ

=

σσσ

(1.51)

On retrouve alors la solution asymptotique proposée par Eftis (cf. équations (1.39)) qui

devient un cas particulier du problème général traité par Williams. En effet dans l’analyse 2D

de Williams on ne fait aucune hypothèse sur la géométrie du corps fissuré et le mode de

chargement. A partir de (1.49), les contraintes se décomposent sous la forme générale

suivante :

( ) ( ) 2,1j,ifrcTfr2

K

1nnij

2n2nj1i1ij

Iij =θ+δδ+θ

π=σ ∑

=+ (1.52)

où le premier terme du développement représente la solution asymptotique qui est dominante

en pointe de fissure. Les fonctions universelles fij(θ) sont écrites explicitement dans

l’expression (1.51). La connaissance de la géométrie et du chargement doit permettre

d’identifier tous les coefficients ci . En pratique lorsque les géométries se compliquent, il

n’existe pas de solution simple à ce problème : on a recours dans certains cas (éprouvettes de

référence figure 1-7) aux méthodes numériques. Pour une configuration stable donnée, les

deux constantes KI et T sont respectivement le facteur d’intensité de contraintes et la

contrainte transverse (voir [28] par exemple). Elles s’expriment respectivement en [ mMPa ]

et [MPa].

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- 31 -

b) Facteur d’intensité de contraintes et contrainte transverse

Le facteur d’intensité de contraintes KI donne physiquement une mesure de l’intensité

de la singularité. Il dépend en général des paramètres de chargement et de géométrie du

problème étudié. Pour des systèmes géométriques simples que l’on rencontre en pratique

(cf. figure 1-7), on a l’habitude de poser :

aWV,

WaYK 0I πσ

= (1.53)

où Y est une fonction de forme qui dépend de la géométrie de la pièce, de la longueur de la

fissure, de sa localisation.

Ainsi pour une éprouvette de type CN chargée uniaxialement et comportant une

fissure très petite devant les dimensions planes de la pièce, cette fonction tend rapidement

vers 1. On retrouve bien sûr la solution théorique de Westergaard. Dans les mêmes conditions

pour l’éprouvette de type SEN, des études théoriques ont montré que la valeur limite était

alors 1,112. On trouve dans la littérature des représentations empiriques de Y en fonction des

paramètres géométriques caractérisant les éprouvettes précédentes, et cela pour différents

types de chargements [26].

D’après ce qui précède, le facteur d’intensité de contraintes apparaît donc comme un

paramètre intrinsèque de la rupture fragile. Il va donc pouvoir intervenir dans l’établissement

de critères de rupture. On montre, à partir de l’expression de l’intégrale J (1.17), qu’il est relié

au taux de restitution de l’énergie G de la façon suivante :

( )

( ) ( )

ν−=

DPE

K1

CPE

K

G 2I2

2I

(1.54)

Il est raisonnable de considérer la contrainte T comme une fonction de la contrainte

nominale uniaxiale appliquée 0σ (voir figure 1-7). On définit alors le taux de biaxialité B

ainsi [28] :

0

TBσ

= (1.55)

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- 32 -

c) Zone plastique en pointe de fissure

L’expression du champ de contraintes (1.52) fait clairement apparaître une singularité

en pointe de fissure. Si elle s’explique par la prédominance du premier terme de la série au

voisinage de fissure, elle n’en demeure pas moins irréaliste lorsque l’on s’approche de la

pointe (i.e. r tend vers 0). En pratique lorsque la contrainte est supérieure à la limite élastique

σe du matériau, ce dernier se déforme plastiquement. Il existe donc une zone (i.e. la zone

plastique) au voisinage du front de fissure où les équations (1.52) ne sont plus valables. La

taille de ce domaine est donc fonction de la nature du matériau utilisé. Pour les matériaux

fragiles, la zone plastique est toujours de faible dimension par rapport à la zone d’étude

expérimentale (voir chapitre 4) et reste confinée en pointe de fissure.

Afin de donner une idée de l’étendue et de la forme de la zone plastique on adopte ici

le critère de Von Mises qui s’écrit, avec les contraintes principales σi :

( ) ( ) ( ) 2e

213

232

221 2σ=σ−σ+σ−σ+σ−σ (1.56)

Il vient alors, dans un repère principal centré en pointe de fissure, l’expression

asymptotique suivante pour le champ de contraintes (en déformation plane ou contrainte

plane) :

θ

πν=σ

θ−

θ+θ

π=

σσ

)CP(0

)DP(2

cosr2

K2avec

2sin1

2sin1

2cos

r2K I

3I

2

1 (1.57)

A partir de (1.56) et (1.57), on montre que la zone plastique est délimitée par une

courbe rp d’équation :

( )( ) ( )

θ+ν−+θ

θ+θ+θπσ

=θ)DP(cos121sin

23

)CP(cossin231

2cos

2Kr

22

2

22e

2I

p (1.58)

En première approche, il est habituel d’assimiler la courbe rp à un cercle limite de

rayon :

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- 33 -

2e

2I

p 2Krπσ

= (1.59)

Pour les matériaux fragiles, on est assuré d’avoir une zone plastique de petite taille et

donc un problème ‘véritablement élastique’ en respectant la norme ASTM E 399 qui

recommande de prendre la longueur de fissure a, l’épaisseur t et la largeur W de plaque telles

que :

2

e

ICK5,2t,Wa,a

σ

≥− (1.60)

où KIC est la ténacité du matériau [25, 28].

2.5.3 Détermination des coefficients de la série de Williams pour des éprouvettes SEN

B C

DA

piAB

piBC

piCD

σ0

σ0

x2

O x1

a2V

W

Figure 1-8 : Distribution des points de collocation dans le cas d’une éprouvette SEN

Lors des études numériques 3D et expérimentales, nous utiliserons toujours des

éprouvettes de type SEN. On verra qu’il sera important de pouvoir estimer la limite

supérieure de la zone de prédominance de la solution asymptotique 2D. Autrement dit, si on

ramène la coordonnée radiale r à la quantité adimensionnée r/a (a est la longueur de fissure),

pour quelles valeurs de r/a peut on négliger les termes supérieurs à l’ordre 3 dans la série de

Williams ? Pour ce faire, on détermine ici, pour différentes tailles d’éprouvettes, les

coefficients ci à l’aide une méthode numérique connue sous le nom de collocation. On accède

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- 34 -

ainsi en particulier aux valeurs de KI et T correspondantes. Par comparaison avec la solution

globale du problème obtenue au paragraphe suivant avec les éléments finis, on pourra alors

estimer la taille de la zone où l’approximation précédente est valide.

On considère figure 1-8 une éprouvette de largeur et de demi-longueur notées

respectivement W et V. La fissure AO, de longueur a, est sollicitée en mode I en appliquant

une traction uniforme σo sur BC. Les coefficients ci de la fonction de contrainte Asym de

Williams (1.49) sont calculés en suivant la démarche proposée par Gross [29]. La fonction

(1.49) a été construite afin de vérifier bien sûr automatiquement les conditions aux limites sur

les lèvres de la fissure (i.e. π±=θ=σ=σ ,01211 ). On vérifie que les conditions aux limites

restantes pour les contraintes sont également respectées si (voir (1.22)) :

( )

( )

( ) Wx

A,2W

A

0x

A,2

aax2

xA

0x

A,0A

CDsur

BCsur

ABsur

01

sym20sym

2

sym2

1

21

0sym

1

symsym

σ=∂∂σ

=

=∂∂

++σ=

=∂∂

=

(1.61)

où pour des raisons de symétrie, on ne considère que la partie supérieure de la plaque.

La méthode par collocation consiste à satisfaire simultanément les 6 équations (1.61)

en un certain nombre de points (disons n) régulièrement distribués sur chacun des côtés (AB),

(BC) et (CD) de la plaque. Les points choisis doivent être différents de B et C. On a donc au

total 3n points de collocation ( )ai2

ai1

ai x,xp , avec a = AB, BC, CD et i=1..n, représentés figure

1-8. Si on réécrit pour simplifier la fonction d’Airy tronquée à l’ordre m sous la forme

développée :

( ) ( ) ( ) i

m

1i21

symii

m

1i

symi

sym cx,xA~c,rA,rA ∑∑==

≡θ≅θ (1.62)

on est amené à résoudre le système matriciel linéaire surdéterminé (6n)×m suivant :

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- 35 -

−=

Α−−−−−−

−−−−−−Α

n

1

m

1

n

1

B

...

B

c...c

... (1.63)

composé des n sous matrices bloc Αi obtenues à partir de (1.61) :

( ) ( )( ) ( )

( ) ( )( ) ( )

( ) ( )( ) ( )

n..1i,

x,aWA~x

...x,aWA~x

x,aWA~...x,aWA~

V,xA~x

...V,xA~x

V,xA~...V,xA~

x,aA~x

...x,aA~x

x,aA~...x,aA~

CDi2

symm

1

CDi2

sym1

1

CDi2

symm

CDi2

sym1

BCi1

symm

2

BCi1

sym1

2

BCi1

symm

BCi1

sym1

ABi2

symm

1

ABi2

sym1

1

ABi2

symm

ABi2

sym1

i =

−∂∂

−∂∂

−−

∂∂

∂∂

−∂∂

−∂∂

−−

et des n sous vecteurs Bi associés :

i,W2W

02

aax2

x00B 0

20

2

1

21

0iT ∀

σ

σ

++σ=

Le système matriciel (1.63) a été programmé à l’aide du logiciel de calcul formel

Maple V . Il s’est avéré que les 10 premiers termes de la série de Williams (i.e. m=10) et que

240 points de collocation (i.e. n=80) suffisaient largement à assurer la convergence du

système. Les calculs ont été effectués en normalisant les grandeurs σ0 et V à 1 pour diverses

valeurs des rapports a/W et V/W. On montre par exemple table 1-1 les coefficients ci calculés

lorsque a/W=0,3 et V/W=1. KI et T et par conséquent Y et B sont obtenus à partir de c1 et c2

en utilisant (1.51). Pour d’autres tailles d’éprouvettes, les expressions de Y et B sont

regroupées table 1-2. On peut constater l’influence de la géométrie sur ces paramètres en les

comparant avec les valeurs données pour le cas limite traité par Eftis (i.e. Y=1 et B=-1). Les

résultats obtenus pour Y sont en accord avec ceux que l’on trouve dans la littérature [30]. Les

valeurs numériques de B ne sont cependant pas disponibles pour les tailles d’éprouvettes qui

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- 36 -

nous intéressent. On peut citer néanmoins l’étude réalisée par Leevers [31] où B est donné

pour des éprouvettes SEN de grandes dimensions (V/W = 2 ; 5).

Paramètres de calcul : a/W=0,3 v/W=1 σ0=1

c1 c2 c3 c4 c5 c6 c7 c8 c9 c10 …

-0,642 -0,171 0,082 0,065 0,112 0,101 -0,091 0,0076 0,0018 0,016 …

Table 1-1 : Exemple de calcul des premiers coefficients de la série de Williams

a/W 0,3 0,3 0,3 0,4 0,2 0,45 0,3

V/W 0,5 0,8 1 1 1 0,8 0,9

aKY 0I πσ= 1,848 1,672 1,660 2,111 1,363 2,43 1,663

0TB σ= -0,321 -0,643 -0,687 -0,609 -0,712 -0,46 -0,67

Table 1-2 : Valeurs calculées de Y et B pour différentes tailles d’éprouvette

2.6 Approche du problème par les éléments finis

Le problème précédent est abordé ici en utilisant la méthode des éléments finis. Nous

reviendrons sur cette méthode au chapitre suivant lors de l’étude 3D. Tous les calculs sont

réalisés à partir du code d’éléments finis Castem 2000 disponible au laboratoire.

La partie supérieure de l’éprouvette SEN (voir figure 1-8) a été maillée en utilisant des

éléments plans à 8 nœuds qua8 et tri8. Le maillage prend en compte différentes tailles

d’éprouvettes en imposant les rapports a/W et V/W. De plus il a été réalisé de façon à être

rayonnant et se densifier en pointe de fissure. En conservant les notations de la figure 1-8, on

montre figure 1-9 deux exemples de maillages obtenus pour a/W=0,3 et a/W=0,45 et

V/W=0,8 dans les deux cas.

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- 37 -

Figure 1-9 : Maillages rayonnants réalisés pour l’éprouvette SEN

Le modèle mécanique utilisé est celui du solide élastique isotrope. Les conditions aux

limites imposées sont les suivantes : sur le côté BC on applique une traction uniforme

unitaire. Le calcul des forces nodales équivalentes à ce chargement est réalisé ensuite par le

logiciel. Pour des raisons de symétrie par rapport à l’axe de la fissure on doit bloquer le

déplacement des nœuds appartenant au coté OD (i.e. le ligament). La matrice de rigidité

globale du système est obtenue par assemblage des matrices élémentaires de rigidité des

éléments et la prise en compte des conditions aux limites précédentes. Connaissant cette

matrice, le problème continu est ramené à un système d’équations à un nombre fini

d’inconnues : à savoir les déplacements dans tous les nœuds de la structure (déplacements

nodaux) hormis les déplacements connus imposés sur le coté OD et les forces nodales

associées à l’exception de celles prescrites sur BC. L’application du principe de minimum de

l’énergie potentielle à partir d’un champ de déplacements supposé permet la résolution du

problème. Il s’agit de la méthode des éléments finis dite de déplacements. Les équations de la

cinématique et la loi de comportement permettent finalement d’accéder aux valeurs

numériques des contraintes σ11(x1,x2) et σ22(x1,x2) sur l’ensemble du domaine maillé.

En vue d’une comparaison avec la solution asymptotique, on s’intéresse ici à

l’évolution de ces contraintes dans le prolongement de la fissure (i.e. lorsque

0xetaWrx 21 =θ=−≤≡ ) : sur les figures 1-10a-b et 1-10c-d, les croix représentent les

contraintes σ22 et σ11 données en fonction du paramètre adimensionné r/a pour les deux

éprouvettes considérées auparavant. En pointillé, on a tracé dans les deux cas les solutions

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asymptotiques correspondantes à l’aide des valeurs numériques de la table 1-2. L’intensité du

champ de contraintes en pointe de fissure dépend fortement de la longueur relative de la

fissure comme on a pu le montrer avec la fonction Y au paragraphe précédent. Le domaine de

validité de la solution asymptotique est fortement réduit lorsque le rapport a/W passe de 0,3 à

0,45. Néanmoins les éprouvettes d’étude utilisées ultérieurement sont telles que

0,3<a/W<0,45 et V/W ≅ 0,8. On montre de plus qu’une variation de V/W entre 0,8 et 1

influence très peu les courbes précédentes. Pour notre étude, la solution asymptotique sera

donc une bonne approximation du champ de contraintes 2D si :

10ar ≤ (1.64)

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Figures 1-10 : Comparaison des expressions globales et asymptotiques du champ de

contraintes le long de la fissure

3. CONCLUSION

L’approche bidimensionnelle avec un état de contraintes ou de déformations planes a

contribuée à définir des grandeurs mécaniques particulièrement utiles pour l’étude du

comportement des plaques élastiques fissurées sous chargement extérieur. Pour un mode I de

chargement, la contrainte T et surtout le facteur d’intensité KI contrôlent à eux seuls

l’intensité du champ de contraintes en pointe de fissure. Le caractère très général du

formalisme de Williams-Irwin, intégrant les études antérieures de Westergaard, a permis son

utilisation dans la plupart des problèmes de rupture plane. Il doit certainement son succès au

fait qu’il donne une représentation correcte du champ de contraintes en pointe de fissure sans

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- 40 -

pour autant connaître tous les termes de la série. Ces derniers semblent en effet bien difficiles

à évaluer pour des géométries compliquées. L’influence du chargement extérieur au loin et de

la géométrie est ressentie localement en pointe de fissure par le biais du facteur d’intensité de

contraintes. La zone de prédominance de la solution asymptotique a été clairement établie

dans le cas des éprouvettes de type SEN et dépend fortement des paramètres géométriques

considérés. Les approches énergétiques développées en parallèle ont défini d’autres

paramètres mécaniques importants caractérisant la rupture : le taux de restitution de l’énergie

G, l’intégrale J. Dans le cadre de l’élasticité linéaire (rupture fragile) on aboutit à des relations

simples entre ces grandeurs et le facteur d’intensité de contraintes.

Les solutions précédentes sont toujours limitées en fond de fissure par l’existence

d’une zone plastique de faible dimension qui permet d’éviter des contraintes infinies en bout

de singularité. En effet, même pour un matériau relativement fragile, on doit tenir compte

physiquement d’une limite élastique au dessus de laquelle le matériau se déforme

plastiquement. On conçoit intuitivement que le domaine plastique est d’autant plus réduit que

la limite élastique du matériau est élevée.

Nous verrons aux chapitres suivants, dans le cadre d’une étude 3D des plaques

élastiques fissurées, que la principale limite à la théorie de Williams est l’hypothèse 2D elle-

même. L’épaisseur de la plaque deviendra un paramètre d’étude important et nous conduira

alors à définir une zone 3D confinée en pointe de fissure, beaucoup plus grande que la zone

plastique. A cet endroit, l’approche de Williams et les solutions analytiques qui en résultent

ne seront plus valables.

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CCHHAAPPIITTRREE 22

FISSURATION TRIDIMENSIONNELLE DE PLAQUES ELASTIQUES

« Comme le champ semé en verdure foisonne,

De verdure se haulse en tuyau verdissant,

Du tuyau se hérisse en epic florissant,

D'epic jaunit en grain, que le chaud assaisonne… »

Du Bellay (1558).

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1. INTRODUCTION

Nous avons vu au chapitre précédent que les problèmes plans de rupture admettent

tous une solution théorique par les méthodes de Muskhelishvili ou Williams. Elles conduisent

alors à une représentation simplifiée des champs de contraintes et de déplacements existants

entre la discontinuité géométrique (i.e. la fissure) et le milieu continu avoisinant. Pour ce type

de problèmes on dispose en fait d’un arsenal mathématique relativement important (théorie

des fonctions complexes, séparation de variables, fonctions d'Airy, intégrales de contour, …)

pour résoudre les équations inhérentes au problème de rupture plane. Pour les plaques

élastiques fissurées, les solutions obtenues présentent toutes une singularité caractéristique du

champ de contraintes en r-1/2 qui les rendent donc physiquement inacceptables en pointe de

fissure. Outre l'existence d'une zone plastique, cette limitation est due à l'approche 2D

elle même qui ignore à la fois l'épaisseur de la plaque et toute évolution des grandeurs

mécaniques étudiée suivant cette épaisseur.

Lorsque l’on désire une modélisation plus fine et plus réaliste du comportement

mécanique d'un solide en pointe de fissure, on s’aperçoit très vite qu’il faut considérer le

problème de rupture dans son aspect général 3D. La recherche d’une solution analytique

globale pour un tel problème est généralement impossible à quelques exceptions près. On

trouve ainsi dans la littérature des solutions, basées sur les travaux de Green et Sneddon

[32,33], pour le problème d’une fissure circulaire ou elliptique dans un solide élastique infini

soumise à des contraintes d’ouverture ou de cisaillement [34,35]. Ces travaux ont été étendus

ensuite par Bui [36] aux fissures planes de forme quelconque. On peut citer enfin le cas

important d’une fissure semi elliptique débouchante dans une plaque soumise à une traction

uniforme traité par Irwin [37]. La solution approchée qui en résulte est encore utilisée

actuellement.

Ces résultats sont en règle générale limités aux fissures incluses dans des solides

infinis ou semi infinis et n'ont d'intérêt pratique que si les dimensions de la fissure sont petites

devant toutes les dimensions du solide. De plus ils ne s'appliquent pas lorsque l'on est en

présence d'une fissure qui traverse une plaque d'épaisseur finie. Il s'agit typiquement de

l'éprouvette SEN que nous avons choisie d'étudier dans ce mémoire. La détermination

théorique des champs de contraintes et de déplacements au voisinage d'une fissure

débouchante se heurte à une difficulté supplémentaire près du point d'intersection du front de

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fissure et de la surface libre de la plaque : à cet endroit que l'on appelle aussi vertex, le champ

de contraintes est fortement perturbé localement par la proximité des deux lèvres de la fissure

et du bord libre de la plaque. Ces "effets de bord" sont pris en compte en admettant l'existence

d'une zone 3D confinée en pointe de fissure que l'on précisera plus loin, à l'intérieur de

laquelle le champ de contraintes est de nature tridimensionnelle et les solutions idéalisées 2D

ne s'appliquent pas. Il n'est certes pas aisé, même en élasticité, de trouver une solution

asymptotique dans la zone 3D qui vérifie à la fois les équations complètes d'équilibre et toutes

les conditions aux limites requises au voisinage du vertex. L'analyse d'une fissure traversante

(qui est toujours débouchante) se distingue alors de celle d'Irwin qui considère une fissure

elliptique fermée qui intercepte un seul des cotés de la plaque. Dans notre cas bien

évidemment les deux surfaces latérales (i.e. surfaces libres) sont à prendre en considération

bien que l'on puisse simplifier le problème si le chargement extérieur est symétrique par

rapport au plan médian de la plaque.

Comme le soulignait Bazant [38], la propagation de fissure dans les plaques est

indiscutablement influencée par la forme du front de fissure suivant l’épaisseur de la plaque.

Cette difficulté supplémentaire d’ordre géométrique rend une analyse du champ de contraintes

au voisinage du vertex encore plus difficile. La plupart des travaux théoriques sur la

fissuration 3D des plaques (travaux relativement récents) renonce, devant la complexité des

calculs analytiques, à intégrer un front de fissure curviligne dans leur analyse. A la suite des

travaux de Folias [39] en 1975 et de Benthem [40] en 1977, quelques chercheurs [38, 41] ont

contribué à donner une description locale des champs de contrainte et de déplacement près du

vertex. A partir d'un système de coordonnées sphériques ),,R( ϕθ centré sur le vertex, leurs

travaux conduisent, pour des plaques élastiques chargées en mode I, à une représentation des

contraintes sous la forme ( )ϕθλλ ,,fR où f est une fonction régulière. Les valeurs de la

puissance de la singularité λ dépendent du coefficient de Poisson et diffèrent de la singularité

classique 2D. Les solutions proposées pour λ ne concordent malheureusement pas toutes, et

sont relativement controversées pour certaines…

Au début de ce chapitre une première extension de la théorie 2D, applicable aux

plaques d'épaisseur finie, est présentée. On rappelle également les travaux de référence des

auteurs ci dessus qui sont complétés par quelques études plus récentes. On propose alors une

analyse par éléments finis de la zone 3D pour des plaques minces élastiques chargées en

mode I (typiquement l'éprouvette SEN du chapitre précèdent). L'étude de cette région requiert

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un maillage particulier s'inspirant de celui de Nakamura et Parks [42] mais qui dans notre cas

prend en compte un front de fissure curviligne symétrique par rapport au plan médian de la

plaque. On cherche ainsi à caractériser "mécaniquement" et "géométriquement" cette zone par

rapport à la zone 2D classique. On verra que pour ce faire l'on est amené à définir une

grandeur mécanique supplémentaire caractéristique : le coefficient de triaxialité. La

modélisation proposée nous conduit finalement à donner le déplacement hors plan de la

surface libre de la plaque, calculé dans les zones 2D et 3D en pointe de fissure. On met alors

clairement en évidence l'influence des effets 3D sur la solution classique 2D. Ce chapitre a

pour objectif principal de donner une modélisation suffisamment réaliste du problème de

fissuration en vue d'obtenir un déplacement hors plan comparable à celui que l'on obtiendra

expérimentalement au chapitre 4.

2. ANALYSE TRIDIMENSIONNELLE EN MILIEU PLAN FISSURE

2.1 Solution exacte du problème en contraintes planes

Nous avons vu que pour l'état de contraintes planes tel qu'il a été défini au paragraphe

2.4 du chapitre précédent il n'est pas possible de vérifier toutes les équations de compatibilité

et donc de résoudre de façon exacte le problème. Selon les hypothèses retenues, les

contraintes σ3i sont identiquement nulles. De plus les contraintes non nulles σij (i,j=1,2) sont

supposées indépendantes de la position suivant l'épaisseur de la plaque x3. Dans un contexte

3D, les équations de compatibilité imposent en fait que la contrainte hydrostatique

( )2211 σ+σ soit une fonction linéaire de x1 et x2. Ce n'est assurément pas le cas pour le champ

de contraintes (1.39) obtenu à partir de l'analyse précédente et il est évident qu'un certain

degré d'approximation apparaît lorsque l'on utilise ces solutions avec une plaque d'épaisseur

finie. Néanmoins il est possible de générer un champ de contraintes approximatif

tridimensionnel à partir de l'analyse 2D, en permettant aux contraintes non nulles σij de varier

avec x3. Timoshenko et Goodier (1970) [43] ont démontré, que pour les problèmes

symétriques par rapport au plan médian d'une plaque (i.e. lorsque x3 = 0), il suffisait pour cela

de considérer la fonction de contraintes suivante :

( ) ( ) ( )

22

2

21

22

21022

3210321

xxavec

x,xAx12

1x,xAx,x,xA

∂∂

+∂∂

=∇

∇ν+

ν−=

(2.1)

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où A0 (x1,x2) est la fonction d'Airy classique 2D qui vérifie l'équation biharmonique de

Goursat (cf. équation (1.24)). Soit,

0AA 022

04 =∇∇=∇ (2.2)

En appliquant la relation standard (1.22) on montre que le champ de contraintes ainsi

obtenu vérifie toutes les équations de Beltrami. Il s'agit donc bien d'une solution exacte du

problème en contraintes planes.

Pour un mode I d'ouverture, il est alors aisé d'obtenir une nouvelle solution

asymptotique en pointe de fissure à partir de la fonction d'Airy (1.49) et des relations (1.44) et

(2.1). La correction à apporter à la relation (1.50) est alors la suivante :

( )( )( ) ( )

θ−θθ

+

θ+

θ

ν+ν

θ+

θ

ν+ν

θ−

θ

ν+ν

+

π=

θσθσθσ

θ

θθ

2/2sinsincos

T

23sin

2sin

rx

131

23cos

2cos

rx

133

23cos

2cos

rx

135

41

r2K

x,,rx,,rx,,r

2

2

23

23

23

I

3r

3

3rr

(2.3)

Plusieurs observations peuvent être faites concernant les solutions ci-dessus. Tout

d'abord il est clair qu'elles restent à nouveau approximatives car elles présentent toutes une

singularité en r-5/2 lorsque r tend vers 0. Le terme constant d'ordre 2 ainsi que la contrainte

hydrostatique (σrr + σθθ) restent inchangés. Il s'en suit que les solutions "corrigées" (2.3) ne

modifient pas l'expression (1.40) pour le déplacement hors plan u3 de la surface libre. L'écart

maximum avec les contraintes classiques 2D a lieu sur les surfaces libres, lorsque 2tx3 =

pour une plaque d'épaisseur t, et pour le cas incompressible (i.e. ν=1/2), où le terme commun

( )ν+ν 13 vaut 1. Finalement lorsque r=5t, le calcul montre que la différence relative avec les

solutions simplifiées 2D est au maximum de 0,01.

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2.2 Etudes théoriques au voisinage du vertex

2.2.1 L'approche de Folias [39]

Folias s'est intéressé à une plaque élastique infinie d'épaisseur t finie qui contient une

fissure traversante sollicitée selon le mode I. Le front de fissure est supposé rectiligne. A

partir des équations de Navier gouvernant les trois composantes du déplacement et des

conditions aux limites du problème, il propose de construire un système différentiel

équivalent en s'inspirant du calcul formel développé par Lure dans son ouvrage [44]. La

résolution des équations obtenues fait alors appel à des transformations intégrales

relativement complexes qui aboutissent à un système d'équations intégrales. La solution est

alors cherchée sous la forme d'une série de fonctions de Bessel dont les coefficients dépendent

uniquement des paramètres physiques du problème. Au voisinage de la pointe de fissure,

Folias montre que les contraintes sont uniquement proportionnelles au premier coefficient

qu'il détermine numériquement.

L'analyse de Folias montre qu'à l'intérieur de la plaque seules les contraintes planes σij

(i,j=1,2) et σ33 ont une singularité en 21r − alors qu'au voisinage du vertex elles présentent

toutes une singularité en ( )ν+ 221 . Lorsque ∞→t et 0→ν les solutions en déformations

planes et contraintes planes sont respectivement retrouvées. Néanmoins, pour certaines

valeurs du coefficient de Poisson ν, cette analyse fait apparaître des déplacements singuliers

au vertex bien que l'énergie de déformation reste bornée localement. Ces résultats ont soulevé

de ce fait une certaine polémique et beaucoup de chercheurs se refusent à les accepter…

2.2.2 Les analyses locales de Benthem [40], Kawai [41] et Bazant & Estenssoro [38]

Ces travaux, initiés par Benthem en 1977, sont regroupés ici car ils proposent tous une

étude des champs de contraintes et de déplacements localisés exclusivement au voisinage du

vertex. De plus ces études sont conduites en utilisant un système de coordonnées sphériques

centrées sur le vertex (voir figure 2-1) et en supposant le problème à variables séparables par

rapport à ces coordonnées. Cette hypothèse a été néanmoins critiquée par Folias [45] qui,

selon un juste retour des choses, en conclut qu'elle n'est pas valide.

Benthem a considéré le demi espace fissuré Ω qui s'étend selon les z>0 de la figure 2-

1. Les coordonnées sphériques r, θ, φ sont reliées aux coordonnées cartésiennes x, y, z par :

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θ=

φθ=φθ=

cosrzsinsinrycossinrx

(2.4)

Surface libre

z

x

y

M(r,θ, φ)

θr

O

Fissure

Ω

φ

Figure 2-1 : Demi espace fissuré Ω (z ≥ 0)

La fissure occupe le quart de plan y=0, x>0, z>0. Benthem a cherché à déterminer un

état de contraintes élastiques dans Ω autour de la pointe de fissure sous la forme :

( )( )( )

,etc,,fr

,,fr

,,fr

xzxz

xyxy

xxxx

φθλ=σ

φθλ=σ

φθλ=σ

λ

λ

λ

(2.5)

qui laissent les surfaces de la fissure et le plan z=0 libres de contraintes. Les valeurs

"convenables" du paramètre λ sont calculées à partir d'une équation caractéristique, exprimant

la condition de nullité d'un déterminant d'ordre infini. On trouve ainsi une infinité de valeurs

propres ordonnées pour λ, solutions du problème. A chaque valeur de cet ensemble est

associé un état de contraintes connu mathématiquement sous le nom de fonction propre.

Physiquement, seules les solutions appartenant à l'intervalle ( ) 23Re −>λ sont à envisager,

afin que l'énergie de déformation reste bornée dans la région proche du vertex (i.e. lorsque

0r → ). La solution la plus proche de cette valeur limite donne alors une représentation du

champ de contraintes prépondérant à cet endroit, ceci pour différents coefficients de Poisson.

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L'analyse de Benthem, valable uniquement pour un problème élastique, repose sur

l'utilisation des fonctions harmoniques de Boussinesq et Papkovich-Neuber. On dénombre 7

relations de base qui expriment simplement les 3 composantes du déplacement à l'aide des

dérivées premières de ces fonctions notées Ψi. Les composantes du déplacement vérifient

ainsi identiquement l'équation générale de Navier-Cauchy [17]. Par séparation de variables on

montre que les fonctions Ψi , parce qu'elles sont harmoniques, peuvent s'écrire en coordonnées

sphériques sous la forme suivante :

( )

7..1i,0avec

...,...,...,,cosPsincos

r

i2

7222

1

==Ψ∇

=Ψ=Ψθ

µφµφ

=Ψ µ+λ

(2.6)

où ( )θµ+λ cosP 2 est une fonction de Legendre de première espèce et λ et µ sont des nombres

complexes à déterminer. Les formules de différentiation des fonctions (2.6) ont été établies de

longue date et permettent d'exprimer algébriquement les déplacements, déformations et

contraintes associés. Afin de vérifier également les conditions aux limites du problème de

rupture, Benthem a été amené à créer d'autres fonctions harmoniques obtenues à partir des Ψi

et de leurs dérivées premières. Elles sont reliées aux composantes du déplacement en

combinant linéairement certaines des relations de base précédentes. Ces fonctions permettent

de construire alors plusieurs ensembles de solutions du même type que (2.6) dont les

contraintes associées vérifient déjà automatiquement une partie des conditions au limites du

problème. Il suffit pour cela de "particulariser" l'indice µ qui prend alors, suivant l'ensemble

considéré, un nombre infini ou fini de valeurs discrètes ordonnées imposées au préalable.

Benthem a créé typiquement trois ensembles A,B,C infinis de solutions ainsi que deux autres

D et E contenant chacun deux solutions.

Il se restreint à l'étude de systèmes de contraintes symétriques par rapport au plan φ=π,

soit finalement à un problème de rupture en mode I. La résolution complète du problème n'est

pas simple et se fait par superposition des ensembles précédents afin de satisfaire toutes les

conditions aux limites, ce qui donne au total (3 × ∞ + 4) degrés de liberté au problème. Il en

résulte un système infini d'équations linéaires paramétrées par le coefficient de Poisson ν et

par λ. Ce système admet une solution non triviale en annulant le déterminant de la matrice

associée (qui dépend uniquement de ν et de λ). On recherche alors les valeurs propres de λ en

fixant le coefficient de Poisson. Il faut noter qu'en présence d'un déterminant d'ordre infini,

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qui est bien sûr tronqué dans les calculs numériques, il n'est réellement possible de trouver des

valeurs propres qu'à partir d'un nombre suffisamment grand de fonctions propres nécessaires à

la représentation des contraintes. En d'autres termes l'ensemble de solutions proposées doit

être d'un point de vue mathématique complet afin d'assurer une convergence stable vers les

valeurs propres et retrouver correctement les conditions aux limites imposées. Les résultats

numériques ont montré ainsi que les trois ensembles A,B,C ne permettaient pas à eux seuls de

résoudre le problème (même avec un grand nombre de solutions). La résolution est par contre

tout à fait possible en ajoutant les ensembles finis D et E. En pratique, Benthem a considéré

dans les calculs (3 × 16 + 4) = 52 (occasionnellement 40 ; 64 ; 76) degrés de liberté et a abouti

aux résultats montrés table 2-1. Les valeurs donnant une singularité se trouvent dans

l'intervalle [ ]5,0;332,0 −− , quel que soit ν compris entre 0 et 1/2.

Coefficient de Poisson ν Premières valeurs propres λ

0,0 -0,5 0,410 0,5

0,3 -0,4523 0,218 0,681

0,4 -0,4132 0,135 0,765

0,5 -0,3318 0,0 1,0

Table 2-1 : Valeurs propres λ calculées pour ( )φθλ=σ λ ,,fr ijij (d'après [40])

En introduisant ensuite le système de coordonnées cylindriques associées (ρ, θ, z) :

φ=θ

θ=θ=ρ

cosrzsinr

(2.7)

la contrainte asymptotique 2D σyy s'écrit le long de la fissure (i.e. lorsque φ=π) pour un plan z

choisi :

0,2K I

yy →ρπρ

=σ (2.8)

En identifiant (2.8) aux formules (2.5) réécrites en coordonnées cylindriques, Benthem

a montré que le facteur d'intensité de contrainte KI est lié à la position z de la façon suivante :

21I zK +λ∝ (2.9)

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Le résultat (2.9) impose au facteur d'intensité de contraintes d'être nul sur la surface

libre z=0 (à l'exception de ν=0). Cela signifie simplement qu'il n'y a pas de contraintes qui

varient en ρ-1/2 sur la surface libre. Benthem en conclut que la conception du facteur

d'intensité de contraintes telle que l'envisageait la théorie 2D perd toute signification au

voisinage du vertex. Dans cette zone essentiellement 3D, les contraintes évoluent en ρλ.

Les travaux de Benthem ont ouvert la voie à d'autres études près du vertex. Ainsi

Kawai [41] reprend la configuration géométrique présentée figure 2-1 avec le même système

de coordonnés mais un angle d'ouverture (2π-α) pour les lèvres de la fissure. Il choisit

également de donner une représentation du tenseur des contraintes et du vecteur déplacement

dans un système sphérique. En utilisant à nouveau la méthode standard de séparation des

variables, la fonction de contraintes est prise sous une forme plus générale :

( ) ( ) ( ) ( ) 0avec,

sincosQccosPc

coscosQccosPcr 1

21

212

11

11

1 =Ψ∇

µφθ′+θ+

µφθ′+θ=Ψ

µλ

µλ

µλ

µλλ (2.10)

où ( ) ( )θθ µλ

µλ cosQ,cosP sont les fonctions de Legendre de première et seconde espèce

respectivement. Les constantes 11 c,c κκ ′ (avec κ=1,2) et les nombres λ, µ sont inconnus. La

théorie 3D de l'élasticité permet d'exprimer les composantes du tenseur des contraintes que

l'on donne ici de façon concise et que Kawai ne détaille pas d'ailleurs :

( ) ( )( ) 2,1et3,2,1m

,,rj,i

sinc,c,,,;F

cosc,c,,,;Fr,,r

mmij

2

mmij

12

ij =κ=φθ=

µφ′νµλθ+

µφ′νµλθ=φθσ

κκ

κκ−λ (2.11)

où F1ij et F2

ij (indépendants de r et φ) apparaissent comme combinaisons linéaires des

fonctions de Legendre P, Q et de leurs dérivées par rapport à θ. Les termes multiplicatifs

dépendent de λ, µ, ν, de la variable θ et des constantes inconnues mm c,c κκ ′ (avec m=1,2,3 et

κ=1,2) successivement introduites dans les calculs. Seuls les termes où apparaissent les

constantes m1

m1 c,c ′ sont à retenir pour un problème en mode I.

Les conditions aux limites sur le bord libre (θ = π/2) conduisent à un système matriciel

homogène où le vecteur inconnu est composé des constantes précédentes. L'existence d'une

solution non triviale est possible si le déterminant de la matrice est nul : on obtient alors une

condition sur la quantité ( )λ±µ qui doit être un entier positif. On dispose donc à nouveau

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d'une infinité de "solutions" indépendantes de µ et vérifiant identiquement une partie des

conditions aux limites du problème. Ces solutions servent alors à établir l'équation

caractéristique transcendantale pour λ en satisfaisant les conditions aux limites restantes sur

les lèvres de la fissure ( 2α±=φ ). Selon Kawai, les valeurs calculées vérifiant

( ) 2Re1 <λ< donnent un champ de contraintes singulier, solution du problème.

Il obtient 3 racines réelles λi (i=1,2,3) comprises entre 1 et 2. Dans le cas d'une fissure

(α=2π), la plus petite λ1 est inférieure à 1,5 et donne lieu à une singularité plus importante que

celle prévue par la théorie 2D et par Benthem pour le champ de contraintes. Quel que soit le

coefficient de Poisson ν, les contraintes évoluent alors en 21r −λ avec 62,0270,0 1 −≤−λ≤− .

λ2 vaut constamment 1,5 et donne la singularité bien connue en r-1/2. La troisième racine λ3 est

supérieure à 1,5 et dépend de ν. Son évolution est relativement proche de celle proposée par

Benthem (voir table 2-1).

Bazant et Estenssoro [38] généralisent les travaux des auteurs précédents en prenant en

compte un front de fissure oblique et un plan de fissure incliné par rapport au bord libre de la

plaque. Dans cette présentation nous nous restreignons au cas où le plan de fissure est

perpendiculaire au bord libre. Comme le montre la figure 2-2, le front de fissure est donné par

une droite OO' dont l'orientation par rapport au bord libre est décrite par un angle β. Notons

que lorsque 2π=β , on retrouve la configuration de Benthem. Le point d'intersection de cette

droite avec le bord libre correspond au vertex O. Bazant et Estenssoro conservent le système

de coordonnées sphériques ( )φθ,,r centré en O mais considèrent directement le champ de

déplacements sous la forme :

( ) ( ) ( )φθ=φθ=φθ= λλλ ,Hrw,,Grv,,Fru (2.12)

où u, v, w sont respectivement les déplacements dans les directions r, θ et φ.

Ils donnent une expression de l'énergie de déformation élastique et, par application du

théorème du minimum de l'énergie potentielle, rapportent le problème à la minimisation d'une

fonctionnelle (non présentée ici). La solution est alors recherchée en adoptant une approche

par éléments finis. La "discrétisation" se fait dans le plan (θ,φ) correspondant au rayon

unitaire, et les fonctions inconnues F, G, H sont données à l'intérieur de chaque élément par :

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( ) ( ) ( )

( ) ( ) ( )

( ) ( ) ( )φθρ==φθρ=φθ

φθρ==φθρ=φθ

φθρ==φθρ=φθ

,hH,HX,h,H

,gG,GX,g,G

,fF,FX,f,F

ipi

i

ii

p

ipi

i

ii

p

ipi

i

ii

p

(2.13)

où f, g et h sont des polynômes en θ et φ. La quantité θ×≡ρ sin1 représente la distance entre

le point M considéré et la ligne OO'. La décomposition ci-dessus est introduite uniquement

pour éviter dans les calculs une singularité possible des fonctions F, G et H quand 0→θ .

Pour une fissure les valeurs [ [...,23,1,21,0p = sont généralement présentes. Lorsque p<1

les fonctions F, G et H, que l'on doit déterminer numériquement, exhibent une singularité sur

la ligne θ = 0 qui affecte de façon défavorable la précision de calcul et la rapidité de

convergence vers une solution stable. Les auteurs font ainsi disparaître artificiellement cette

singularité en choisissant dans leurs calculs p=1/2 ou p=0 selon le cas. Les quantités Xi

représentent les valeurs nodales de f, g et h ou de façon équivalente les déplacements nodaux

sur la sphère unité. Les fonctions de forme données fi, gi et hi permettent d'interpoler les

fonctions précédentes à travers l'élément considéré.

Le maillage du plan (θ, φ), montré schématiquement figure 2-3, a été réalisé avec des

quadrilatères à 4 nœuds. Limités par les moyens informatiques de l'époque, les auteurs ont

pris des grilles comportant au maximum 8×16 éléments, soient 459 équations. Pour un

problème symétrique par rapport au plan de la fissure (mode I), le domaine se restreint à

π≤φ≤0 .

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Surface libre

φ

θ

M

r

β

Front de Fissure

O

O/

Ω

Fissure

ρ

θ

φ

O

β = π/2O/

M

Figure 2-2 : Demi espace fissuré Ω avec un front de fissure OO' oblique

La prise en compte de (2.13) dans l'équation variationnelle conduit Bazant et

Estenssoro à un système algébrique linéaire et homogène pour les inconnues nodales Xi :

( ) ( )M,...,2,1i,0Xk j

M

1jij ==λ∑

=

(2.14)

Les coefficients de rigidité kij sont en fait des polynômes quadratiques en λ ce qui

réduit (2.14) au système simplifié suivant :

[ ] 0Xbba 2 =λ+λ+ (2.15)

où a, b, c sont toutes des matrices carrées M×M indépendantes de λ et X est le vecteur

inconnu composé des Xi. On retrouve un problème généralisé aux valeurs propres.

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π/20 πφ

θ

β

π/2

(π-β)θlim

Qua 4

Figure 2-3 : Maillage du domaine avec θ limité par ( )φβ=θ − costantan 1lim

Pour un front de fissure perpendiculairement à la surface libre (β = π/2), le calcul de λ

conduit aux résultats de Benthem à 0.4% près, quel que soit ν compris entre 0 et 0.48. Les

auteurs sont également en désaccord avec les résultats de Kawai qui préconisent une

singularité plus forte. Lorsque la fissure est oblique (β ≠ π/2), λ dépend fortement de l'angle

d'inclinaison β, lui-même lié au coefficient de Poisson, comme le montre la figure 2-4. On

remarque une évolution monotone de la singularité du champ de contraintes (en rλ-1) pour les

angles obtus (β > π/2), singularité qui dépasse d'ailleurs assez rapidement la singularité 2D

classique en 21r − .

Des considérations énergétiques basées sur l'intégrale J ont conduit Bazant et

Estenssoro à établir un critère nécessaire à la propagation d'une fissure. A l'aide des relations

(2.4), l'intégrale J s'exprime de la façon suivante le long d'un petit cercle L de rayon ρ = ρ0 =

(r0 sinθ0) autour du front de fissure (voir figure 2-2) :

φρ

∂∂

σ−εσ=L

0i

ijjijij dxundy

21J (2.16)

où φφρ= dcosdy 0 et ( ) ( )( ) θ=ρφ∂∂ρφ−ρ∂∂φ=∂∂ sinravec,sincosx . Près du vertex

on a également λ∝ ru i et donc 1i rrxu −λλ ∝ρ∝∂∂ . De plus 1

ijij r −λ∝ε∝σ , ce qui donne

pour J :

Lsur,rJ 120

−λ∝ (2.17)

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Selon Bazant et Estenssoro la fissure ne peut se propager que si J (i.e. l'énergie de

création de surface pour un problème élastique) est bornée et non nulle. La relation ci dessus

montre qu'il en est ainsi pour 0r0 → lorsque :

( ) 2/1Re =λ (2.18)

Dans ce cas le facteur d'intensité de contraintes donné par Benthem est borné si on

remplace λ par (λ-1) pour être en accord avec les notations employées ici. Les auteurs en

arrivent à la conclusion qu'une fissure qui vient de se propager (ou se propage) présente un

front de fissure incliné par rapport à la surface libre : l'angle d'inclinaison β est déterminé par

la condition (2.18), comme on peut le voir figure 2-4 pour ν=0,3. Le matériau considéré est

bien sûr supposé élastique et homogène.

Figure 2-4 : Résultats obtenus par Bazant & Estenssoro [38] pour une fissure oblique

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2.3 Vers une solution complète du problème ?

Au milieu des années 80, certainement influencés par les travaux de Kane et Mindlin

[47] qui traitaient de la vibration de plaques élastiques, Yang et Freund [48] ont estimé que

les contraintes transverses σ13 et σ23 intervenaient de façon significative dans les champs de

contraintes et de déformation en pointe de fissure. Le modèle théorique développé par ces

auteurs ne vise certes pas à caractériser précisément le champ de contraintes à l’intérieur de la

plaque mais propose plutôt une solution alternative au problème de rupture 3D. Les

hypothèses cinématiques retenues pour le champ de déplacements ui(x1,x2,x3) sont :

( ) ( ) ( )2,1,h/x,xwxux,xvu 213321 =α== αα (2.19)

où w représente le déplacement hors plan de la surface libre de la plaque d’épaisseur 2h.

L'expression (2.19) suppose qu'une ligne matérielle normale au plan médian de la plaque

avant chargement le reste également dans l'état déformé. En substituant (2.19) dans les

équations d'équilibre 3D et en intégrant par rapport à x3 entre les bornes h± , on se ramène

alors à un problème 2D plus simple où les équations d'équilibre prennent la forme suivante :

( )2,1,NR

0N

33,

,

=βα=

=

αα

βαβ (2.20)

où Nαβ représentent les contraintes planes résultantes obtenues après intégration et

( ) 3hh 33 dxxR ∫ σ= − αα les contraintes transverses. Les relations entre les quantités Nαβ, Rα et

les déplacements (2.19) ont été établies par Mindlin et Kane dans le cadre de l'élasticité

linéaire. Elles permettent notamment d'éliminer la dernière équation de (2.20) qui est

remplacée par :

11221

2

bwaNw,wNN

0w

+==−∇ε

=∇

(2.21)

où 2NN αα= est la contrainte plane résultante moyenne et a, b, ε sont des constantes

connues qui ont respectivement les dimensions suivantes : [MPa-1], [MPa-1] et [m]. L’étude de

Yang et Freund s'oriente donc vers la recherche d’une expression du déplacement hors plan w

au voisinage de la fissure vérifiant (2.21). La symétrie du problème et la présence de la fissure

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imposent les conditions aux limites suivantes, écrites en introduisant les coordonnées

( ) ε= /)x,x(y,x 21 :

+∞<<=∂∂

<<∞−=

+∞<<∞−=∂∂

=

=

=

x00yN

0x,0N

x,0ywN

0y

22

0y12

(2.22)

Le domaine d'étude D proposé est un cercle de rayon r0, centré en pointe de fissure. Un

état de contraintes planes généralisées est supposé exister partout ailleurs dans la plaque.

Lorsque D est suffisamment petit, le champ de contraintes singulier 2D et le déplacement hors

plan correspondant w2D (voir chapitre 1) peuvent être pris comme conditions aux limites sur la

frontière extérieure de D. Des conditions supplémentaires, qui bornent notamment le

déplacement w, sont imposées en pointe de fissure. Soit finalement,

( ) ( )

( ) ( )1OwlimrONlim

w,fr2

Klimw,Nlim

0r

2/1

0r

D2

0rr

≈≈

θ

π=

−αβ

αβ→

αβ∞→ (2.23)

La résolution du système (2.21) avec les conditions (2.22) et (2.23) se fait au moyen

de transformations intégrales de Fourier. La solution obtenue pour w s'écrit sous une forme

intégrale réelle relativement compliquée. Elle assure non seulement une transition continue

vers la solution classique w2D mais borne également le déplacement en pointe de fissure. Son

évolution notée w0 suivant le prolongement de la fissure, est montrée figure 2-5 pour

différents coefficients de Poisson ν. Le déplacement w0 est adimensionné à l'aide d'une

constante C qui apparaît dans les calculs et dont l'expression est :

πε

ν=

2KhaC

2 (2.24)

Yang et Freund montrent également que w0 commence à s'écarter de la solution

singulière w2D lorsque la coordonnée radiale r est inférieure à la demi épaisseur de la plaque.

Les auteurs confirment ce résultat important en se référant à la publication de Rosakis et

Ravi-Chandar [49] qui date de la même époque. Ces derniers ont abordé le même problème

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de rupture d'un point de vue expérimental. Ils utilisent la méthode des caustiques (détaillée au

chapitre suivant), qui est une méthode optique de mesure. Les auteurs mettent alors

clairement en évidence la présence d'effets tridimensionnels en pointe de fissure conduisant à

des erreurs importantes sur le calcul de K, lorsque r est inférieur à la demi épaisseur de la

plaque. Ils donnent ainsi une limite inférieure au domaine d'application de la théorie 2D de la

rupture (qui par ailleurs donne des résultats corrects au delà).

Figure 2-5 : Résultats obtenus par Yang et Freund [48] pour le déplacement hors plan w0

La prise en compte de ces effets tridimensionnels apparaît donc relativement

importante pour une étude sur la fissuration des plaques, et cela même pour des milieux peu

épais. A en croire le rapport présenté par Williams [50] en 1992 à l'occasion du 22ème

Symposium américain sur la rupture, le problème soulevé n'était pas complètement solutionné

bien que des progrès importants aient été faits dans le domaine. Williams soulignait

précisément, que pour les plaques d'épaisseur finie, il manquait une caractérisation définitive

de la singularité 3D du champ de contraintes élastiques et une extension 3D satisfaisante aux

calculs élasto-plastiques.

On peut citer enfin quelques travaux supplémentaires réalisés depuis. Ainsi l'étude de

Leung et Su [51] propose une solution analytique pour le champ de contraintes singulier près

du vertex pour un mode I de fissuration. Le problème posé suppose un front de fissure

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perpendiculaire à la surface libre d'une plaque élastique. Les contraintes sont obtenues par

superposition d'une solution 3D de la forme ( )z,gr 2/1 θ− dans le système classique (r,θ,z) de

coordonnées cylindriques et d'une solution ( )φθ− ,fR 2/1 dans un système de coordonnées

sphériques identique à celui utilisé par Benthem. La première solution a été établie à l'origine

par Hartranft et Sih [52] en vue de généraliser l'expansion de Williams aux milieux épais ; elle

donne le champ de contraintes à l'intérieur de la plaque mais laisse cependant une traction

normale non nulle σIZZ sur la surface libre. Les auteurs construisent alors une solution limite

σIIij qui vérifie précisément σII

ZZ = -σIZZ sur la surface libre. Cette solution est obtenue en

considérant le problème semi-infini et à variables séparables. En retenant la formulation de

Green et Zerna [53], le champ de contraintes σIIij est représenté à l'aide d'une seule fonction

harmonique. On retrouve un problème similaire à celui traité par Benthem, à la différence

près que la singularité du champ de contraintes est indépendante du coefficient de Poisson

près du vertex. Les contraintes sur le bord libre sont d'ailleurs proportionnelles à r-1/2. Les

travaux de Su et Sun [54] préconisent le même type de singularité à partir d'une analyse

asymptotique 3D différente mais en considérant toujours le problème à variables séparables.

Leur travaux présentent le facteur d'intensité de contraintes comme une fonction de la

coordonnée z. Ils aboutissent cependant au résultat assez inattendu suivant : toutes les

composantes singulières du champ de contraintes et de déformations s'annulent sur la surface

libre !

Nous terminons cet inventaire (non exhaustif) en mentionnant une série de trois

publications écrites récemment par Guo Wanlin [55, 56, 57] sur le champ élastoplastique 3D

en pointe de fissure. Le front de fissure est supposé rectiligne et coupe perpendiculairement le

bord libre de la plaque. Ce travail nous semble très intéressant dans la mesure où il propose de

caractériser le champ de contraintes asymptotique 3D en pointe de fissure non seulement pour

des matériaux fragiles mais également pour les matériaux ductiles vérifiant la loi de

comportement générale de Ramberg-Osgood. Précisons simplement ici que cette loi introduit

un exposant n (i.e. le coefficient d'écrouissage) qui dépend uniquement du matériau. On a de

plus ∞≤≤ n1 où le cas limite n=1 correspond au matériau élastique. Une analyse "physique"

du problème conduit Wanlin à considérer la singularité comme une fonction de la contrainte

triaxiale ( )[ ]θθσ+σσ= rrZZZT et de n. A l'instar des chercheurs précédents, il présente une

théorie où les contraintes σij ne s'expriment plus sous une forme à variables séparables mais

de la façon suivante :

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( ) ( ) z,,rj,iT,~rK zij2n,Tf

ijz θ=θσ=σ − (2.25)

où ( ) ( )zTz,,rTZ →θ quand 0r → et f est une fonction régulière de Tz et n. K est un facteur

d'amplitude. Les contraintes (2.25) dépendent des coordonnées cylindriques et sont obtenues

classiquement (voir relations (1.44)) à l'aide de la fonction de contrainte :

( )z)n,T(f T,~rK z θΦ=Φ (2.26)

Il faut noter que l'analyse asymptotique de Wanlin est relativement globale dans le

sens où elle ne se cantonne pas uniquement au proche voisinage du vertex. Elle suppose une

évolution possible de la puissance de la singularité suivant l'épaisseur de la plaque.

Il faut tenir compte des restrictions suivantes pour Tz :

=ν≤≤>≤≤

1nT01n5,0T0

z

z (2.27)

où ν est le coefficient de Poisson. Les cas limites Tz =0 et Tz = (ν ou 0,5) correspondent

respectivement à un état de contraintes planes et un état de déformations planes. Pour

différentes valeurs de Tz et n fixées, Wanlin détermine numériquement f en résolvant une

équation homogène non linéaire du 4ème ordre pour Φ~ . Cette équation est également une

équation aux valeurs propres non linéaire pour f. La méthode numérique employée est une

méthode de Runge-Kutta qui conduit Wanlin aux résultats de la table 2-2. Pour les cas limites,

il retrouve la singularité classique en r-1/(n+1) du champ HRR. Les résultats pour le cas

élastique n = 1 ne sont pas donnés.

Tz

n

3 3,6364 8 10

0,00 -0,250000 -0,215686 -0,111111 -0,090909

0,30 -0,237825 -0,203186 -0,099617 -0,080280

0,40 -0,237730 -0,203186 -0,101835 -0,082909

0,45 -0,242500 -0,208336 -0,104511 -0,086409

0,50 -0,250000 -0,215686 -0,111111 -0,090909

Table 2-2 : Puissance de la singularité (f-2) calculée en fonction du coefficient de

consolidation n et de Tz (d'après [56])

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3. MODELISATION PAR ELEMENTS FINIS AU VOISINAGE DE LA FISSURE

Dans cette dernière partie, nous proposons de traiter le problème 3D de la fissuration

d'une plaque à l'aide d'un code d'éléments finis. Il apparaît en effet d'après ce qui précède qu'il

n'existe pas pour l'instant de théorie "suffisamment universelle" (et acceptée par tous),

réellement capable de décrire complètement les champs de contraintes et de déplacements 3D

proches du front de fissure. Cette remarque est d'autant plus vraie avec un front de fissure non

rectiligne (ce que l'on constate expérimentalement) et un matériau qui n'est pas parfaitement

fragile (ce qui est aussi le cas en pratique)…

3.1 Présentation rapide du code de calcul

Nous disposons au laboratoire du code de calcul Castem 2000 qui été développé par le

Département des Etudes Mécaniques et Thermiques du Commissariat français à l'Energie

Atomique (CEA). Ce code intègre bien sûr les routines de calcul et les grandeurs mécaniques

liés à la théorie même des éléments finis. Il propose également à l'utilisateur des fonctions de

construction de modèles et de traitement des résultats. Il est possible a priori de traiter des

problèmes de milieux continus statiques et dynamiques les plus variés (et bien d'autres

encore) bien que malheureusement la mise en œuvre ne soit pas toujours très simple pour

l'utilisateur novice…

Castem 2000 est constitué d'une série d'opérateurs (plus de 800) qui servent chacun à

l'exécution d'une seule opération. Ils constituent les instructions du langage de programmation

associé (appelé Gibiane) qui fait l'interface entre l'utilisateur et le programme de calcul.

Chaque opérateur s'applique sur des objets fournis en argument en vue de les modifier ou d'en

créer de nouveaux. Ces opérations élémentaires font intervenir des objets de différents types,

plus ou moins complexes suivant les informations qu'ils contiennent, que l'utilisateur doit

systématiquement nommer. Cette manipulation d'objets constitue en fait une caractéristique

essentielle du Gibiane et on trouve des objets qui contiennent des informations aussi diverses

que la loi de comportement du matériau, les caractéristiques géométriques du maillage, les

champs de forces, les contraintes, la matrice de rigidité, un nombre entier ou réel, etc…. Le

Gibiane offre en outre les instructions classiques d'un langage de programmation (boucles de

répétition, tests logiques, procédures…). Il revient à l'utilisateur d'élaborer un programme

structuré avec ce "macrolangage" qui réponde aux exigences du problème aux éléments finis

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traité. Il apparaît toutefois qu'un tel programme peut toujours se scinder en plusieurs phases

successives, résumées sur l'organigramme de la figure 2-6.

PARAMETRES GENERAUXType d'analyse (2D, 3D, …)Type d'élémentsPropriétés du matériau…

ELABORATION DE LA GEOMETRIE(Objet de type maillage)

CHOIX DU MODELE MECANIQUEElastique, élastoplastique, …

DONNEES DU MATERIAU

RESOLUTION DU PROBLEMEDISCRETISE

POST-TRAITEMENTDES DONNEES

ASSEMBLAGE DE LA MATRICEDE RIGIDITE GLOBALE

(Objet de type rigidité)

CONDITIONS AUX LIMITESChargement et déplacement

Figure 2-6 : Organisation d'un programme avec Castem 2000

3.2 Approche numérique du problème de fissuration 3D

3.2.1 Choix du modèle mécanique

Afin de s'approcher au mieux des réalités expérimentales, nous avons retenu le modèle

plastique à écrouissage isotrope qui prend en compte un comportement mécanique non

linéaire du matériau étudié. Bien que les matériaux utilisés expérimentalement dans notre

mémoire soient considérés comme élastiques (c'est le cas du polyméthyl-méthacrylate dit

PMMA), il est possible ainsi de considérer un comportement élastique éventuellement non

linéaire en pointe de fissure. Le milieu étudié est bien sûr supposé suffisamment homogène.

Le modèle ci-dessus est disponible avec l'opérateur mate de Castem. Il requiert en entrée,

outre les paramètres relatifs au comportement élastique (i.e. le module d'Young E et le

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coefficient de Poisson ν), la courbe contraintes-déformations obtenue par un essai de traction.

Cette courbe est donnée sous la forme d'un objet de type évolution avec en abscisse les

déformations et en ordonnées les contraintes. Elle doit contenir comme premier point, le point

(0,0) et comme second point le point correspondant à la limite élastique ( )elaela ,σε .

Les essais de traction ont été réalisés sur des éprouvettes en Altuglas CN qui est la

marque commerciale du PMMA. Il s'agit d'un polymère amorphe dont la température de

transition vitreuse est située dans la plage de 110°C à 135°C, si bien qu'à température

ambiante il est dur, rigide et se casse avec un faible allongement. Notons qu'il résiste bien à la

rayure dans les conditions normales d'usinage et qu'il est surtout connu pour ses propriétés

optiques exceptionnelles. Ce polymère est en effet d'une transparence remarquable : 92% de

transmission lumineuse dans le visible. Ce matériau est généralement utilisé dans les études

mécaniques classiques en élasticité.

La courbe contraintes-déformations est obtenue à partir d'une méthode optique

développée dans le laboratoire au sein de l'équipe de photomécanique : le suivi de taches [58].

Selon cette méthode, on réalise manuellement quatre marqueurs disposés sur la surface

latérale de l'éprouvette étudiée (voir figure 2-7). Pour chaque état de charge, ils sont recueillis

par une caméra CCD et transformées par la suite en niveaux de gris entre 0 et 255. Un logiciel

associé, développé notamment par Dupré et Valle [59], repère alors pour chaque état de

charge les positions )4..1k(),y,x( kk = des taches (cf. équations (2.28)). La base de mesure

est délimitée par ces taches et vaut en pratique 5mm × 5mm. Notons que l'endroit étudié

importe peu mais qu'en revanche la déformation est considérée homogène sur la base de

mesure. Les déformations ( )xyyyxx ,, εεε associées sont calculées à partir de la théorie des

grandes déformations appliquée à un parallélogramme élémentaire (déformable) dont les

milieux des côtés correspondent aux taches précédentes. Un calcul précis en temps réel

nécessite évidemment un repérage correct des taches en question. Le logiciel offre pour cela à

l'utilisateur la possibilité d'entourer initialement chacune des taches d'une petite fenêtre de

calcul (qui se déplace avec elle) de dimensions nXk et nYk donnée en nombre de pixels. En

considérant le barycentre des intensités lumineuses I(xi, yj) (exprimées en niveau de gris)

prises en chacun des pixels (xi, yj) d'une fenêtre de calcul, on a (voir figure 2-7) :

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( )( )

( )( )

( )( )

( )( )∑∑

∑∑

∑∑

∑∑

= =

= =

= =

= =

+=−

+=Xk Yk

Xk Yk

Xk Yk

Xk Yk

n

1i

n

1jsji

n

1i

n

1jsjij

kkn

1i

n

1jsji

n

1i

n

1jsjii

kk

Iy,xI

Iy,xIyYy,

Iy,xI

Iy,xIxXx (2.28)

où Is est un seuil d'intensité lumineuse permettant d'éliminer le bruit de fond. Xk et Yk

représentent les positions supérieures gauches des fenêtres de calcul.

PMMA

σ

σ

4 marqueurs

Yk

Xk

yk

xk

OX

OY

Zone d'étude (image donnée par la CCD)

Fenêtre de calcul

Figure 2-7 : Principe de la méthode du suivi de taches.

Facile à mettre en œuvre et s'accommodant de n'importe quel état de surface, cette

méthode donne une précision sur les déformations de l'ordre de 2.10-4. Elle conduit pour le

PMMA à la courbe contraintes-déformations figure 2-8 obtenue par Tie Bie et Dupré [60] lors

d'une campagne d'essais réalisés sur différents types de matériaux. Ces derniers ont

notamment étudié les échanges thermiques associés à l'aide d'une caméra infrarouge. Ils en

concluent de façon générale que le passage du domaine élastique au domaine plastique

correspond à une modification de l'évolution de la courbe de température [60]. On s'aperçoit

en effet figure 2-8 que dans le domaine élastique le PMMA se refroidit constamment,

tendance qui s'inverse complètement dans la zone plastique. Les auteurs proposent une

évaluation possible de la limite élastique σela du matériau pour une valeur de ε qui se situe peu

avant le changement de courbure de la courbe de température. Nous prendrons pour notre

modèle ( ) ( )MPa50;035,0, elaela =σε et ( ) ( )38,0;MPa2600,E =ν . Les données

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- 66 -

expérimentales précédentes sont alors intégrées dans un objet de type évolution, interprétable

par Castem 2000.

-0.04 -0.02 0 0.02 0.04 0.06 0.08

ε-10

0

10

20

30

40

50

60

σ (M

Pa)

-1

-0.8

-0.6

-0.4

-0.2

0

θ =

∆T (°

C)

θ−εy

σ−εyσ−εx

O

A

CB

Figure 2-8 : Résultats expérimentaux obtenus avec le PMMA d'après [60]

3.2.2 Détermination de la zone d'étude, élaboration du maillage 3D

L'étude d'un problème de fissuration 3D requiert une modélisation géométrique

adaptée. On pourrait bien sûr mailler la plaque fissurée dans son intégralité comme nous

l'avions fait pour l'étude 2D au chapitre précédent. Il va sans dire, que même avec les

éléments cubiques à 8 nœuds (cub8), le problème 3D exigerait un nombre de nœuds et donc

d'équations à traiter relativement considérable. De plus les champs de contraintes et de

déplacements réguliers situés loin de la zone singulière (et qu'une étude classique 2D suffit

d'ailleurs à caractériser) ne présentent pas ici particulièrement d'intérêt. Au contraire, dans

notre cas il est important de réduire la zone à mailler au proche voisinage de la singularité afin

d'obtenir un maximum "d'informations fiables" près de cet endroit.

La modélisation retenue fait suite à celle proposée par Nakamura et Parks [42] pour

l'étude d'une plaque élastique mince fissurée (sollicitée en mode I) présentant un front de

fissure rectiligne perpendiculaire à la surface libre. L'adjectif mince peut sembler assez

imprécis. Il suppose néanmoins une épaisseur suffisamment petite de la plaque devant ses

dimensions planes pour assurer l'existence d'un état de contraintes essentiellement planes en

dehors de la zone 3D. Autrement dit la zone 3D reste confinée au voisinage immédiat de la

fissure et le champ de contraintes élastiques peut se représenter à l'aide du développement en

série de Williams à l'extérieur.

On isole donc un cylindre de matière entourant la pointe de la fissure d'une plaque

d'épaisseur t, comme le montre la figure 2-9 ci-dessous. Le front de fissure (pour l'instant

rectiligne) est situé le long de l'axe X3. Il limite le plan fissuré qui correspond donc à

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( )0x,0x 21 =≤ . Le cylindre considéré a un rayon maximal rmax qui vaut cinq fois l'épaisseur

de la plaque (rmax/t=5). Nous justifierons ce choix plus loin lors de l'établissement des

conditions aux limites associées.

Figure 2-9 : Représentation schématique de la région étudiée en pointe de fissure

Pour l'analyse par éléments finis, on remarque que seul un quart du cylindre a

réellement besoin d'être maillé. Cette région correspond à la zone d'étude V0 montrée figure

2- 9. En effet si on considère un chargement uniaxial σ perpendiculaire à la surface fissurée,

le problème est symétrique par rapport aux plans de la fissure et du ligament (x2 = 0). Il

présente de plus une symétrie réflective par rapport au plan médian de la plaque (x3 = 0). Le

maillage de cette région est construit avec des hexaèdres trilinéaires à 8 nœuds (i.e. des

briques). Dans un plan perpendiculaire au front de fissure (la surface libre par exemple) on

construit un maillage rayonnant comme on peut le voir figure 2-10. La taille des éléments

augmente de plus graduellement avec la distance radiale r en s'éloignant de la pointe de

fissure mais reste constante suivant la coordonnée angulaire θ. L'incrément angulaire θ∆ de

chaque élément vaut 18/π . Ce maillage est répété identiquement du plan médian (x3 = 0) à la

surface libre (x3 = t/2) suivant l'axe X3. Afin de s'adapter aux variations importantes des

grandeurs mécaniques près de la surface libre, l'épaisseur des éléments cubiques ainsi

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construits se réduit progressivement suivant x3 à l'approche de la surface libre (voir figure 2-

10).

Il convient de préciser que pour la structure informatique de Castem 2000, basée sur le

concept d'objets, la phase de génération du modèle géométrique correspond à la création d'une

série d'objets de type maillage, qui une fois réunis, constituent l'ensemble du domaine

discrétisé. Les objets de type maillage sont en fait des points (objet le plus élémentaire), des

lignes, des surfaces et des volumes pour lesquels il existe des opérateurs permettant non

seulement leur construction mais également d'effectuer des opérations géométriques sur ces

mêmes objets : rotations, translations, intersections, inclusions, etc.… Un objet géométrique,

quel qu'il soit, n'existe que sous forme discrétisée et c'est donc dès la phase de construction de

la géométrie qu'est effectuée la discrétisation du domaine d'analyse en éléments géométriques

élémentaires. Ainsi une droite est toujours construite à partir de ses deux points extrêmes,

auxquels on associe un nombre réel correspondant à la densité locale au point. Elle est alors

automatiquement subdivisée en un certain nombre Nradial choisi de segments dont les

extrémités correspondent aux points internes qui ne sont généralement pas nommés. La

longueur des segments dépend des densités affectées aux points extrêmes et constitue en fait

une progression géométrique entre les valeurs de ces densités. Précisons que seul le rapport R

des densités respectives de ces deux points influence réellement la taille des segments

intermédiaires.

Dans notre cas un maillage rayonnant de surface est créé par rotation d'une droite dont

les points extrêmes se situent sur le front de fissure et sur le rayon extérieur du cylindre. Pour

notre étude, le rapport des densités (R ≡ Rradial) et Nradial sont fixés respectivement à 1,7 et 28.

La rotation prise entre 0=θ et π=θ donne ici 18 secteurs angulaires de même taille

(i.e. Rangulaire=1) composés de quadrilatères à quatre nœuds (qua4) générés automatiquement.

Rappelons que le type d'éléments utilisés et la dimension du problème sont à définir dans les

paramètres généraux au début du programme. L'opérateur trans appliqué à la surface ainsi

créée permet d'obtenir le volume de la figure 2-10. Cet opérateur réalise une translation de la

surface selon une droite définie à nouveau par ses deux points extrêmes avec des densités

imposées et un certain nombre Népaisseur de segments intermédiaires. Les points en question

correspondent au vertex V et au centre Ce de la plaque. On a pris 1,5 et 15 respectivement

pour le rapport de densité Répaisseur et pour Népaisseur. Cette opération engendre donc une

succession de demi cylindres intermédiaires constitués d'éléments cubiques à 8 nœuds (cub8)

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(i.e. de couches d'éléments), réunis automatiquement pour former le volume d'étude V0. Nous

avons donc au total un maillage constitué de 7560 éléments (28×18×15). On obtient au total

8528 nœuds en éliminant les (18×16) nœuds doubles (sur le front) de fissure résultants de la

rotation. Notons enfin que la numérotation relative aux nœuds et aux éléments est totalement

transparente pour l'utilisateur.

Figure 2-10 : Maillage du quart de cylindre (front de fissure rectiligne V-Ce)

Un maillage de ce type, relativement dense en pointe de fissure et a priori bien adapté

au voisinage du vertex, a été utilisé par Nakamura et Parks en 1988 pour leur étude générale

sur la fissuration 3D des plaques élastiques. Il est établi néanmoins à partir d'un front de

fissure rectiligne qui coupe perpendiculairement la surface libre. Nous avons choisi de

"coller" au maximum à l'étude expérimentale présentée au chapitre 4. On s'aperçoit, pour les

plaques en PMMA par exemple, que les fronts de fissure sont de manière générale de forme

parabolique symétrique par rapport au plan médian. Ces fissures sont obtenues à partir d'une

entaille initiale que l'on a fait progresser sous un chargement en mode I (ce processus est

détaillé au chapitre 4). Par conséquent il parait nécessaire de modifier le maillage précédent,

afin d'y intégrer un front de fissure parabolique. La construction du volume discrétisé n'est dès

lors plus si simple (même avec le Gibiane…) et à notre connaissance nous sommes les

premiers à l'avoir entrepris pour ce genre de problème. Il s'obtient à partir de trois volumes

distincts qui sont ensuite assemblés.

Le premier (ou volume extérieur noté V1) ressemble à celui de la figure 2-10 auquel

est retranché un petit cylindre intérieur de rayon rmin1. V1 est construit de la même façon que

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V0, à la différence près que l'un des points extrêmes de la droite initiale (servant à la

construction) se trouve sur le cercle de rayon rmin1. On prend ici

( ) 2700)151810(NNN 1épaisseur

1angulaire

1radial =××=×× éléments, soit (11×19×16)=3334 nœuds.

Les rapports de densité sont donnés par ( ) )5,1;1;5,1(R,R,R 1épaisseur

1angulaire

1radial = .

rmin1

Ce1

X3

X1

V

Cex2=0

V1

Pint

rmax2

xmax

+t/2V3 V2

ε

Plan fissuré

β

Plan ligament(matériau)

-t/2

xmax

Figure 2-11 : Représentation schématique du front de fissure parabolique (x2 = 0)

En vue de créer le volume V2 directement associé au front de fissure parabolique, on

se réfère tout d'abord à la figure 2-11. On y montre schématiquement une vue en coupe de V1

suivant le plan x2 =0, où apparaît également le front de fissure parabolique. Cette ligne

parabolique est aussi pour Castem un objet de type maillage qui est obtenu à l'aide de

l'opérateur parabole à qui on fournit en argument les trois points : Ce1, Pint, V. Le point Ce1

d'abscisse x1 = xmax est situé sur la ligne médiane (x3 = 0 et x2 = 0). V correspond au vertex.

Pint est un point intérieur de cordonnées ( )

− courb11

2t,0,x max qui oriente la tangente à la

parabole en V. Comme pour les droites, il est possible d'associer aux points extrêmes V et

Ce1 une densité et de spécifier le nombre 2épaisseurN de segments de la ligne. Les deux

paramètres xmax et courb suffisent donc à définir le front de fissure parabolique. Physiquement

xmax correspond à l'avancement maximal de la fissure dans la matière qui a lieu ici au niveau

du plan médian de la plaque. En s'approchant du vertex V, nous retrouvons le problème limite

de Bazant et Estenssoro [38] où leur front de fissure oblique s'identifie à la tangente

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précédente. Nous pouvons alors relier l'angle d'inclinaison β aux paramètres courb et xmax de

la façon suivante :

+

π=β −

2tcourbx

tg2

max1 (2.29)

On considère ensuite un maillage rayonnant de surface qualitativement identique à

celui qui a été utilisé pour construire V0 et dont les caractéristiques sont les suivantes : le

rayon maximum est rmax2 , ( ) ( )1;5,1R,R 2angulaire

2radial = et ( ) ( )18;10N,N 2

angulaire2radial = . Le

volume V2 est engendré par translation de la surface précédente parallèlement à la ligne

parabolique. On prend 4,1R 2épaisseur = et 15N2

épaisseur = . On crée ainsi une succession de 15

couches composées de cub8, dont les épaisseurs se réduisent à l'approche du bord libre. V2

comporte donc au total 2700 éléments, soit 3056 nœuds (comme pour V0 il faut retrancher les

nœuds doubles sur le front de fissure). Une représentation schématique en coupe de V2 est

montrée en pointillé sur la figure 2-11. Pour que les deux maillages ne se chevauchent pas, il

convient de respecter la relation suivante :

( ) 0,rxr 2maxmax1min >εε++≥ (2.30)

où ε est un nombre réel positif fixé en général à 0,05 pour le calcul.

Le dernier volume V3 (ou volume de raccord) occupe l'espace entre V1 et V2. Il se

construit avec l'opérateur volu qui raccorde les maillages surfaciques intérieur et extérieur de

V1 et V2 respectivement. Notons que cet opérateur permet de contrôler les densités radiales 3radialR extrêmes et le nombre radial 3

radialN de segments. Il suppose une structure de grille

pour les deux maillages surfaciques précédents. Les caractéristiques de V3 sont les suivantes

( ) )8;3,1(N,R 3radial

3radial = , soit 2160 éléments. V3 contient 2736 nœuds dont 608 en commun

avec V1 et V2.

L'assemblage de ces trois volumes conduit donc à un domaine d'étude discrétisé

3

1iiVV

=

= comportant 7560 éléments, soit au total 8528 nœuds. On montre figure 2-12 une

partie de V au proche voisinage de la fissure pour ( ) ( )8;3,0;6courb;x;t max = . Le maillage

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ainsi réalisé est donc rayonnant tout le long du front de fissure et se densifie également

suivant l'épaisseur à l'approche de la surface libre.

Figure 2-12 : Maillage du quart de cylindre avec un front de fissure parabolique.

3.2.3 Application des conditions aux limites

Sur les plans ligament et médian (x3=0) respectivement notés (Plig) et (Pmed) des

volumes V0 et V, les symétries considérées imposent les seules conditions suivantes pour le

déplacement :

( ) ( )( ) ( )

∈≡∈≡

med3213

lig3212

Px,x,xM,0MuPx,x,xM,0Mu

(2.31)

où u2 et u3 sont les composantes cartésiennes du déplacement dans le repère de la figure 2- 9.

Notons que (Plig) n'est bien sûr pas identique pour V0 et V. On réalise assez facilement les

conditions (2.31) avec Castem 2000 à l'aide d'un opérateur qui permet de bloquer les nœuds

du maillage appartenant aux plans (Plig) et (Pmed) dans la ou les direction(s) définie(s) par

l'utilisateur. Néanmoins pour ce faire, la difficulté principale est de référencer ces plans

comme des objets (de type maillage) nommés et reconnus par le logiciel au même titre que V0

et V…

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Pour les conditions aux limites en chargement nous supposons l'existence d'un état de

contraintes planes à l'extérieur des deux volumes (cf. problème de Yang et Freund [48]). Nous

savons de plus qu'ils sont tous deux limités extérieurement par la même "enveloppe"

cylindrique de rayon rmax que l'on appelle ici pour simplifier (Pcyl). En ce qui concerne

l'application du chargement extérieur, il n'y a donc pas de "distinction" entre les deux volumes

maillés V0 et V. Rappelons que pour les éléments finis le chargement surfacique extérieur est

toujours exprimé par des forces nodales équivalentes appliquées aux nœuds de la frontière du

domaine examiné. On considère dans notre cas les forces nodales correspondant au champ de

contraintes asymptotique 2D (voir équations (1.50)) aux nœuds de (Pcyl). Au début du chapitre

(équations (2.3)), nous avons vu que le champ 2D classique diffère très peu de la solution

corrigée établie par Timoshenko [43] si la distance radiale est supérieure à cinq fois

l'épaisseur de la plaque. Selon Nakamura et Parks [42], ce résultat justifie pleinement le choix

de rmax et facilite ainsi la programmation du chargement extérieur à cet endroit en prenant les

équations simplifiées (1.50) et (1.51) au lieu de (2.3). Pour calculer les forces nodales, nous

avons considéré chacun des éléments de surface (i.e. des quadrilatères qua4) constituant le

cylindre extérieur (Pcyl). Avec la normale extérieure [ ]0sincosn θθ à (Pcyl) en tout point,

l'effort élémentaire pour chaque élément est obtenu comme suit :

( ) ( )[ ]

( ) ( )[ ]

θθθσ+θθσ

θθθσ+θθσ

=

= ∫

0

dzdrsinz,,rcosz,,r

dzdrsinz,,rcosz,,r

0ff

felem

maxmax22max12

elemmaxmax12max11

elem2

elem1

elem

(2.32)

L'opérateur fsur permet alors de calculer les forces nodales élémentaires équivalentes à elemf

appliquées sur les sommets du quadrilatère. Par sommation sur l'ensemble des

quadrilatères constituant (Pcyl), nous obtenons les forces nodales globales sur (Pcyl)

équivalentes au chargement extérieur imposé.

Notons que Castem 2000 peut réaliser cette opération sur (Pcyl) directement,

uniquement avec des chargements de surface uniformément répartis. Ce n'est évidemment pas

le cas pour nous, où l'effort élémentaire obtenu après intégration dépend des variables θ et z et

donc de l'élément considéré. On s'aperçoit enfin que "charger extérieurement une éprouvette

de type SEN (selon le mode I)" revient uniquement ici à préciser lors d'un calcul les grandeurs

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mécaniques suivantes : le facteur d'intensité de contraintes K et la contrainte transverse T pris

maintenant comme paramètres.

3.2.4 Résolution du problème

Il s'agit donc de rechercher le champ discrétisé de déplacements qui résulte de

l'application d'un ensemble de conditions aux limites, pour un nombre fini de points nodaux

du domaine étudié. Ces conditions aux limites se présentent ici à la fois sous la forme de

forces nodales externes appliquées et de déplacements imposés sur la frontière de V0 ou V.

En pratique, pour obtenir le système résolvant complet il faut procéder en deux étapes

successives : la première consiste à créer un premier objet, contenant la matrice de rigidité du

système libre, avec l'opérateur rigi à qui l'on fournit en argument le modèle mécanique et les

données du matériau utilisé. Il faut noter que les calculs matriciels associés sont totalement

transparents pour l'utilisateur. Il suffit ensuite d'unir explicitement (opérateur de fusion et)

l'objet précédent avec celui résultant des conditions aux limites en déplacement. Cette

opération crée un objet obj1. La phase de définition des chargements externes correspond à la

création d'un autre objet obj2 de type champ par point. La résolution du problème (i.e. la

détermination des déplacements nodaux dans tout le domaine) se fait alors avec un opérateur

qui reçoit en argument obj1 et obj2.

Notre modèle requiert finalement cinq paramètres en entrée, outre ceux nécessaires

bien sûr à caractériser le matériau. Trois d'entre eux (t, xmax, courb) servent à définir la

géométrie elle-même : à savoir l'épaisseur de la plaque et la forme du front de fissure. Les

deux autres (K et T) rendent compte du chargement extérieur.

3.3 Résultats de l'étude numérique

3.3.1 Quelques remarques préliminaires

Le programme permet tout d'abord de choisir entre un front de fissure rectiligne ou

parabolique. Les résultats qui suivent sont établis avec une plaque d'épaisseur t = 6mm en

PPMA. La valeur du facteur d'intensité de contraintes K considéré est de mmMPa11,22 . Ce

choix est fait en vue d'une comparaison avec l'étude expérimentale présentée au chapitre 4. Il

en est de même pour les coefficients xmax et courb qui valent respectivement 0,3 et 8.

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Nous avons vu au premier chapitre que T résultait directement des dimensions planes

de la plaque, via le facteur de biaxialité B (cf. table 1-2). Il apparaît dans les expressions 2D

du champ de contraintes et du déplacement hors plan u3 uniquement sous la forme d'un terme

constant. Les calculs entrepris pour différentes valeurs numériques de T nous ont montré en

fait qu'il n'influençait pas l'évolution de ces grandeurs mécaniques dans les zones 3D et 2D.

On s'attendait par ailleurs intuitivement à cette conclusion, étant donné que T se présente

comme une contrainte uniforme dans tout le domaine d'étude. Sans perdre de généralité

comme on le verra plus loin, il suffit de considérer T = 0 dans les calculs.

Il convient de remarquer que la condition (1.64) est toujours valable pour le champ 2D

en dehors de la zone 3D. On constate par conséquent que les calculs (qui ne tiennent pas

compte de la longueur de la fissure) ne sont physiquement acceptables que si 50at ≤ en

approchant la frontière r = rmax de V0 et V. En pratique ce n'est certes pas le cas et on a plutôt

1,0at ≅ . Nous devrons donc accorder une signification aux calculs lorsque r/t est

approximativement inférieur à 1. Cette nouvelle zone d'étude suffit à mettre en évidence les

effets 3D et permettre une comparaison ultérieure avec les données expérimentales.

3.3.2 Déplacement hors plan u3 de la surface libre

Nous donnons figure 2-13 les isovaleurs du déplacement hors plan u3 calculées avec

T=0 sur la surface libre par le logiciel, pour un front de fissure rectiligne. A chaque couleur

est affectée une valeur constante du déplacement u3. On dresse ainsi une cartographie du relief

de la surface libre en pointe de fissure.

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Figure 2-13 : Isovaleurs du déplacement u3 en [mm] sur la surface libre

(front de fissure rectiligne)

L'évolution de u3 est également représentée figures 2-14a et 2-14b respectivement

pour un front de fissure rectiligne et parabolique, suivant quatre demi-droites issues de la

pointe de la fissure et dont l'orientation angulaire est définie par θ = 0°, 40°, 90° et 130.

Comme en témoignent les figures 2-14c et 2-14d, les courbes obtenues avec différentes

valeurs de T se déduisent des précédentes par de simples décalages verticaux. Ces décalages

sont donnés quantitativement par le terme constant de l'expression (1.40) en replaçant σ par T.

On peut donc se restreindre au cas T = 0, les autres en découlent facilement. Les petites croix

correspondent aux opposés des valeurs de u3 calculées par interpolation sur les demi-droites

précédentes. Les courbes sont données en fonction de la coordonnée radiale normalisée r/t. En

pointillé, apparaissent les évolutions singulières du déplacement hors plan prédit par la théorie

2D (i.e. équations (1.40)) pour θ = 0°, 40°, 90° et 130°. Sur les figures 2-14e et 2-14f, on

retrouve les déplacements hors plan respectifs des figures 2-14a et 2-14b, normalisés par la

quantité

π

ν

2EtK I . Notons que dans ce cas, on a ( ) 12/t;0;1t/ru norm3 == .

Précisons que Castem 2000 offre la possibilité d'interpoler une composante d'un objet

de type champ par point sur un maillage défini par l'utilisateur. Ce maillage est constitué ici

des demi-droites précédentes qu'il faut caractériser, c'est à dire donner les densités aux points

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extrêmes, le nombre Nint de segments constitutifs comme au paragraphe 3-2-2. Le rapport des

densités noté Rint = 1,3 et Nint = 40 sur les figures 2-14a-f. L'interpolation se fait alors aux

nœuds ainsi créés. Il en résulte ici l'objet de type champ par point, à une composante u3 dont

l'évolution le long des lignes de nœuds est réalisée par l'opérateur evol. En abscisse figure

ainsi la coordonnée radiale (normalisée) de chaque nœud et en ordonnée la valeur de la

composante associée.

Figure 2-14a : Front de fissure rectiligne, T = 0 [MPa]

Figure 2-14b : Front de fissure parabolique, T = 0 [MPa]

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Figure 2-14c : Front de fissure rectiligne, T = 5 [MPa]

Figure 2-14d : Front de fissure parabolique, T = 3 [MPa]

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Figure 2-14e : u3 normalisé avec un front de fissure rectiligne (T = 0)

Figure 2-14f : u3 normalisé avec un front de fissure parabolique (T = 0)

Plusieurs remarques peuvent être faites en observant les figures 2-14a-f. Tout d'abord

nous notons que l'analyse par éléments finis donne un déplacement hors plan borné. Quel que

soit l'angle θ, ce dernier évolue de façon monotone vers une même quantité non nulle lorsque

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r/t tend vers 0. La solution 2D classique est retrouvée lorsque r/t est supérieur à 0,5 en accord

avec l'étude expérimentale de Rosakis et Ravi-Chandar [49]. On note néanmoins une

différence avec la solution de Yang et Freund [48] qui prévoit une évolution non monotone du

déplacement en pointe de fissure (voir figure 2-5).

On montre ensuite que la forme du front de fissure peut accentuer de façon

considérable l'évolution de u3 en pointe de fissure, alors que son influence plus loin est

négligeable. A partir des expressions normalisées de u3 figures 2-14e et f, on note ainsi une

différence de l'ordre de 8% entre les deux valeurs prévues lorsque r/t est nul. Il faut rappeler

que le front de fissure est défini par les deux paramètres xmax et courb qui valent ici

respectivement 0,3 et 8. Si on fait prendre par exemple à courb toute une série de valeurs

entre 0 et 8, on obtient une série de courbes distinctes et ordonnées (non présentées par souci

de concision) comprises entre celles des deux figures précédentes. Il en est de même pour

xmax. Nous verrons au chapitre 4 que les données expérimentales permettent d'identifier ces

deux paramètres, justifiant ainsi les choix numériques précédents. Nous terminons, par une

estimation du rayon approximatif rp de la zone plastique en se référant à l'expression (1.59).

Avec les valeurs numériques prises dans cette étude, on a rp/t ≅ 0,005 qui est à mettre en

rapport avec la taille de la zone 3D (i.e. r3D/t ≅ 0,5). La zone plastique est ainsi négligeable en

comparaison de la zone 3D.

3.3.3 Evolution du coefficient de triaxialité Tz sur le plan ligament

Nous adoptons la représentation suivante du coefficient de triaxialité Tz :

( ) ( )[ ]yyxxZZ3Z x,,rT σ+σσν=θ (2.33)

On retrouve les deux cas limites (l'état de contraintes planes) et (l'état de déformations

planes) lorsque respectivement Tz = 0 et Tz =1. Dans le cas général Tz peut donc évoluer

entre les deux bornes précédentes. Nous avons calculé les isovaleurs de Tz sur le plan

ligament dans le cas du front de fissure rectiligne et dans celui du front parabolique. Les

résultats en pointe de fissure sont présentés figures 2-15a et 2-15b. Lorsque r/t est supérieur à

0,5 on retrouve un état de contraintes planes constant classiquement admis pour les plaques

minces. Il est intéressant d'observer que l'on tend vers un état de déformations planes dans les

deux cas, en s'approchant du front de fissure. Il est maintenant possible de caractériser la zone

3D qui se présente donc comme une zone d'évolution du paramètre triaxial Tz entre ces deux

états de contraintes.

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Figure 2-15a : Evolution de la triaxialité sur le plan ligament en pointe de fissure

(front de fissure rectiligne)

Figure 2-15b : Evolution de la triaxialité sur le plan ligament en pointe de fissure

(front de fissure parabolique)

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Les valeurs négatives enregistrées pour Tz correspondent, dans les deux cas, à une

zone très petite située à l'intérieur de l'élément adjacent au vertex et au bord libre (élément

limitrophe sur les figures 2-15). Elles ne semblent pas traduire un phénomène physique

particulier mais résultent plutôt de la difficulté à tenir compte au sein de l'élément des

modifications brutales des conditions aux limites près de la singularité.

Nous donnons précisément figures 2-16a, b et c les évolutions du paramètre triaxial Tz

suivant l'épaisseur de la plaque avec θ = 0°, pour différentes valeurs de r/t. En abscisse figure

la coordonnée adimensionnée x3/t. La façon de procéder est la même que pour u3 ; on

interpole Tz le long d'une ligne de nœuds situés sur les droites précédentes. Nous avons choisi

r/t > (xmax/t) afin de ne pas "traverser" le front de fissure parabolique. La tendance générale

pour Tz décrite auparavant est retrouvée. On notera une similitude entre les résultats de la

figure 2-16a et 2-16c. Les valeurs de r/t dans le dernier cas correspondent à celles données

figure 2-16a, auxquelles on a retranché (xmax/t). L'évolution de Tz juste en aval du front de

fissure parabolique est alors quasiment identique à celle prévue dans le cas rectiligne.

L'approximation par un front de fissure rectiligne "tangent" semble donc justifiée à cet

endroit, du moins lorsque x3/t tend vers 0. Précisons enfin que les résultats obtenus, figures

2-16b et c, sont en accord avec ceux présentés par Nakamura [42].

Figure 2-16a : Evolution de la triaxialité suivant l'épaisseur

(front de fissure parabolique)

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2-16b

2-16c

Figures 2-16b et c : Evolution de la triaxialité suivant l'épaisseur

(front de fissure rectiligne)

3.3.4 Evolution de la contrainte σ22 sur la surface libre

La figure 2-17a montre l'évolution de la contrainte σ22 sur la surface libre suivant les

directions angulaires θ = 0°, 40°, 90° et 130°, pour un front de fissure rectiligne. En prenant la

même échelle, on obtient qualitativement la même chose pour le front de fissure parabolique.

Son influence sur la contrainte σ22 est néanmoins montrée plus loin pour θ = 0°. Le tracé a été

effectué avec 60 nœuds d'interpolation et un rapport de densité Rint = 1,1. On retrouve dans les

deux cas les solutions correspondantes 2D en pointillés (voir équations (1.39)), mais cette fois

un peu au delà de r/t = 0,5. Il est possible également d'obtenir une comparaison avec les

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contraintes planes "exactes" (2.3) qui résultent de l'analyse de Timoshenko [43]. Pour

l'orientation particulière θ = 0°, on a simplement 22σ≡σθθ . Dans ce cas, la contrainte

classique 2D s'écrit r2K ID2

22 π=σ et il vient d'après (2.3) :

( )

( )

23

D222

322

rx

1431

x,0,r

ν+ν

−=σ

σ (2.34)

Pour θ = 0°, x3 = t/2 et un front de fissure rectiligne, nous avons représenté figure 2-

17b la contrainte σ22 calculée par le logiciel et normalisée par D222σ . L'évolution théorique

(2.34) est donnée en pointillés, pour x3 = t/2. On constate ainsi que la solution exacte 2D

reproduit correctement la solution calculée pour r/t>0,7-0,8. Une représentation similaire est

proposée figure 2-17 c avec le front de fissure parabolique. Ce dernier induit clairement une

élévation de la contrainte normalisée qui s'accentue (comme on peut le constater en r/t = 0,05

par exemple) lorsque l'on se rapproche du vertex. Notons que dans la zone 2D, la contrainte

est relativement peu perturbée.

Figure 2-17a : Représentation de la contrainte σ22 sur la surface libre

(front de fissure rectiligne)

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Figure 2-17b : Comparaison de la solution calculée avec la solution 2D exacte

pour θ = 0° (front de fissure rectiligne)

Figure 2-17c : Comparaison de la solution calculée avec la solution 2D exacte

pour θ = 0° (front de fissure parabolique)

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3.3.5 Intégrale J et facteur d'intensité de contraintes en zone 3D

Au chapitre 1 pour les milieux fragiles, nous avions exprimé le taux de restitution de

l'énergie sous forme d'une intégrale de contour définie par (1.16). Cette identification résultait

de la propriété d'indépendance de cette intégrale vis à vis du contour d'intégration. Sur le plan

numérique, une solution précise et efficace pour calculer les intégrales de contour consiste à

les transformer en des intégrales de volume en utilisant la transformation de Green-Gauss.

Dans la littérature on peut mentionner les travaux de Lorenzy [61] qui proposent une telle

transformation pour une configuration arbitraire de fissure 3D. La procédure G_theta

proposée par le code d'éléments finis Castem 2000 s'inspire de cette méthode et permet un

calcul local de l'intégrale J pour un milieu fissuré 3D. Notre propos ici n'est pas de détailler le

fonctionnement complexe de cette procédure, qui par ailleurs a fait l'objet d'un rapport du

C.E.A [62] de plus d'une centaine de pages d'explications. En pratique pour l'utilisateur, cette

procédure requiert en entrée deux objets de type maillage qui représentent respectivement les

lèvres et le front de la fissure. Il faut de plus préciser le nombre de couches d'éléments autour

du front de la fissure qui se déplace pour simuler la propagation de fissure. Nous avons testé

la procédure G_theta pour la géométrie 2D (éprouvette SEN) présentée au chapitre 1.

L'intégrale J est alors trouvée indépendante du nombre de couches utilisé c'est à dire du

domaine d'intégration. De plus en appliquant (1.54) pour une éprouvette SEN donnée, on

trouve le facteur d'intensité 2D correspondant à la valeur de J calculée. Les résultats obtenus

sont en parfait accord avec ceux de la table 1-2, attestant le bon fonctionnement de la

procédure.

Pour la configuration 3D, la procédure G_theta permet de calculer J en chaque nœud

des lignes constituant respectivement le front de fissure parabolique et rectiligne. Elle propose

en outre une valeur moyenne de Jmoy sur la ligne considérée. Nous présentons table 2-3 le

rapport Jmoy / J2D qui résulte du calcul, en considérant différentes couches d'éléments. J2D est

obtenue à partir de (1.54) pour un état de contraintes planes, soit :

( ) EKJ2D2

ID2 = (2.35)

où D2IK est le facteur d'intensité de contraintes 2D qui vaut dans notre cas mmMPa11,22 .

On définit alors le facteur d'intensité Kmoy qui est établi à partir de (2.35) où l'on remplace J2D

par Jmoy. On remarque table 2-3 que les valeurs de Jmoy et donc de Kmoy varient avec le

nombre de couches d'éléments qui se déplacent. En conséquence la propriété d'indépendance

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de J vis à vis du domaine d'intégration n'est plus vraie dans la zone 3D. La quantité Kmoy reste

néanmoins bornée par les valeurs correspondantes à un état de contraintes planes et de

déformations planes. Autrement dit on a :

( ) ( )2/1

2D2

moy2/1

D2 1JEKJE

ν−<< (2.36)

Nombre de couches

Front rectiligne Front parabolique

Kmoy Jmoy / J2D Kmoy Jmoy / J2D

1 22,72 1,056 23,06 1,088

2 22,82 1,066 23,16 1,098

5 22,67 1,051 23,00 1,082

11 22,54 1,039 22,76 1,060

Table 2-3 : Valeurs moyennes de l'intégrale J et du facteur d'intensité de contrainte

associés en zone 3D

4. CONCLUSION

Nous avons montré dans ce chapitre toute l'importance des effets 3D dans une zone

localisée en pointe de fissure et dont la taille est inférieure à la demi épaisseur de la plaque

élastique. Les solutions analytiques multiples nous montrent alors, que contrairement au 2D,

il n'existe pas réellement une approche théorique "standard" et suffisamment générale du

problème à cet endroit. Cette remarque est d'autant plus vraie si l'on considère dans l'analyse

un front de fissure curviligne, qui se rapproche plus de la réalité expérimentale.

Nous avons donc opté pour une approche numérique par éléments finis, moyennant un

maillage localisé et bien adapté qui prend en compte un front de fissure rectiligne ou

parabolique. Le code de calcul utilisé permet en outre d'intégrer la loi de comportement du

matériau fragile à partir de données expérimentales. La modélisation utilisée a mis alors

clairement en évidence l'existence d'une zone 3D élastique (bien plus grande que la zone

plastique communément admise), non prévue par la théorie 2D. A cet endroit, on s'aperçoit

que le déplacement hors plan de la surface libre s'écarte largement de la solution 2D

singulière et prend des valeurs physiquement acceptables au voisinage de la singularité. On

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montre de plus à cet endroit que la forme du front de fissure est susceptible de modifier de

façon conséquente les grandeurs mécaniques. On définit ainsi deux paramètres

supplémentaires qui caractérisent simplement la forme du front de fissure et dont on peut

contrôler l'effet sur le déplacement hors plan. Les conséquences sur les grandeurs mécaniques

telles que le coefficient de triaxialité, la contrainte σ22, l'intégrale J, le facteur d'intensité de

contraintes K sont également discutées. On retiendra par exemple l'évolution du coefficient de

triaxialité entre deux bornes fixées respectivement par un état de contraintes planes (au loin)

et de déformations planes le long du front de fissure. De même l'indépendance de J par

rapport au domaine d'intégration n'est plus vraie dans la zone 3D.

Précisons que ce chapitre ne cherche pas à étudier de façon exhaustive le champ de

contraintes et les grandeurs mécaniques associées dans la zone 3D. Le modèle numérique

retenu doit néanmoins nous permettre de recaler les solutions proposées pour le déplacement

hors plan de la surface libre avec les données expérimentales recueillies au chapitre 4. Cette

confrontation doit alors suffire à déterminer numériquement les cinq paramètres associés (i.e.

t, xmax, courb, K ,T) et assurer une modélisation suffisamment réaliste du problème.

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CCHHAAPPIITTRREE 33

LES METHODES OPTIQUES : L'INTERFEROMETRIE PAR ANALYSE

QUASI- HETERODYNE, LA METHODE DES CAUSTIQUES

« Let n be a large number, say 3 ! »

E. Landau.

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1. INTRODUCTION

Ce chapitre est consacré aux méthodes optiques utilisées par la suite en vue d'une

approche expérimentale de la mécanique de la rupture. Ainsi une évaluation quantitative

précise du champ de déplacement hors plan de faible amplitude (i.e. quelques microns) en

pointe de fissure, requiert à la fois un dispositif expérimental et des techniques de mesure

adaptées. Initiées à partir de différents types de montages interférométriques, un certain

nombre de méthodes optiques (interférométrie holographique mais aussi toutes les techniques

de moiré) reposent sur l'exploitation de réseaux de franges ainsi obtenus. Les méthodes sont

généralement choisies en fonction des grandeurs cinématiques à étudier et permettent des

mesures sans contact et donc non perturbatrices. Ces méthodes qui exigent un montage

expérimental d'une grande stabilité et font l'objet de développements en laboratoire sont

d'usage fréquent en industrie.

Notre choix est motivé par l'étude expérimentale présentée au chapitre suivant,

concernant la mesure du déplacement hors plan de la surface latérale d'une plaque en pointe

de fissure. Cette étude s'appuie sur un montage interférométrique de type Michelson dont on

rappelle le principe en première partie de chapitre. L'éclairage en lumière monochromatique

(laser) d'un tel dispositif conduit à un réseau de franges d'interférence directement

observables, résultant des différences de phase d'ondes dues au déplacement. L'interférométrie

est une méthode optique dite à haute sensibilité qui s'accommode d'une faible variation de

relief en pointe de fissure (quelques microns) et permet des mesures du déplacement très

précises à cet endroit. Ajoutons que son application exige tout de même un état de surface

correct et exclut toute variation brusque de relief qui provoquerait une densité de franges trop

élevée et donc inexploitable. Pour des reliefs plus prononcés (de quelques centièmes de

millimètres à plusieurs centimètres) rencontrés dans d'autres types de problèmes mécaniques,

il existe des méthodes "complémentaires" à plus faible sensibilité, regroupant les techniques

du moiré d'ombre et du moiré de projection. Plus faciles en général à mettre en œuvre et

moins coûteuses (l'éclairage en lumière blanche suffit), elles fournissent alors des franges qui

résultent de l'interférence géométrique de deux réseaux de traits superposés (un réseau dit de

référence fixe et l'autre constitué de l'ombre du premier sur la surface étudiée). Ces méthodes

dont la sensibilité est de l'ordre de grandeur du pas du réseau de référence s'avèrent cependant

inopérantes en pointe de fissure et ne seront donc pas présentées ici. Il va sans dire que toutes

ces techniques, dont les principes physiques sont généralement connus de longue date [61],

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ont sans cesse été améliorées. Nous présentons ensuite une démarche connue sous le nom de

quasi hétérodynage qui est utilisée de nos jours pour l'exploitation des réseaux de franges.

Elle conduit à une estimation précise et rapide de la différence de phase en tout point du

champ d'interférence. Son usage s'est progressivement généralisé en mécanique expérimentale

avec l'apparition des systèmes informatisées de traitement d'images et des capteurs CCD.

Certains développements et applications de la méthode font d'ailleurs l'objet de plusieurs

travaux de recherche (thèse, publications) réalisés au sein de l'équipe photomécanique [62,

63].

En dernière partie, nous exposons la méthode des caustiques déjà mentionnée au

chapitre précédent. Cette méthode se distingue tout d'abord des précédentes car elle ne fait pas

appel aux interféromètres et n'exploite donc aucune frange d'interférence. Elle ne conduit pas

ainsi à la connaissance d'un champ scalaire (i.e. le déplacement hors plan) mesurable dans une

zone d'étude prédéfinie, comme c'était le cas précédemment. La caustique est avant tout une

singularité optique et se manifeste physiquement par une courbe stable très lumineuse visible

sur une surface donnée. Nul besoin dès lors de lumière cohérente et de dispositif expérimental

complexe pour en visualiser, si bien que les caustiques se présentent à nous depuis longtemps

(on en parlait déjà au moyen âge…) et de façon très simple par réflexion ou transmission de la

lumière du soleil. On trouve à ce titre dans l'ouvrage de Stavroudis [64] la phrase suivante :

"…the caustic is one of the few things in geometrical optics that has any physical reality…".

Une formulation théorique du phénomène n’est pourtant pas simple. Berry et Upstill [65] en

ont proposé une description mathématique très générale au moyen de la théorie des

catastrophes. Ils expliquent en outre les figures de diffraction associées aux caustiques.

Pour les applications en mécanique de la rupture une modélisation simplifiée qui fait

appel à l'optique géométrique suffit. Introduites au milieu des années 60 par Manogg [66], ces

applications se regroupent sous la dénomination commune de méthode des caustiques. Il est

alors possible "d'associer" à la singularité mécanique (i.e. la fissure) une singularité optique

(i.e. la caustique) dont la forme et les dimensions dépendent expressément de l'expression

singulière du champ de contraintes en pointe de fissure, des propriétés mécaniques et/ou

optiques du matériau, des caractéristiques du montage expérimental. L'établissement de cette

correspondance et les relations qui en résultent seront discutés en détail pour un arrangement

optique en réflexion.

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2. TECHNIQUE DE MESURE DU DEPLACEMENT HORS PLAN

2.1 Considérations optiques et application de l'interférométrie de Michelson

Il est bien connu que lorsque deux ou plusieurs faisceaux lumineux se superposent, la

distribution de l'intensité lumineuse qui en résulte peut être décrite correctement à l'aide de la

théorie de l'optique ondulatoire. Ainsi lorsque la lumière provenant d'une source

suffisamment cohérente est divisée en deux faisceaux qui peuvent se combiner après avoir

suivi deux trajectoires différentes, l'intensité dans la région de superposition varie entre des

extremums qui dépassent la somme des intensités des deux faisceaux et des minimums

d'intensité nulle. Ce phénomène, appelé interférence, a beaucoup surpris autrefois au point

que l'on parlait même du "paradoxe de l'interférence" (lumière + lumière = obscurité). C'est

lui historiquement qui a permis d'établir le caractère vibratoire de la lumière. On trouve par la

suite une représentation théorique simplifiée de la lumière au moyen d'ondes

monochromatiques harmoniques vérifiant les célèbres équations de Maxwell [61].

Physiquement, on observe alors un ensemble de franges dont la localisation dépend de

la différence de chemin optique entre les deux ondes associées aux faisceau. Nous

reviendrons sur le concept de chemin optique plus loin. La superposition de sources

strictement monochromatiques donne lieu à des franges d'interférence et en général deux

ondes lumineuses quelconques indépendantes n'interfèrent pas. On met en évidence ce résultat

en considérant deux ondes lumineuses monochromatiques isochrones (de même pulsation ω)

polarisées rectilignement. Lorsque ces ondes se propagent dans un milieu homogène, isotrope

et non conducteur (l'air ambiant en première approximation), on les représente classiquement

par les vecteurs électriques 1E

et 2E

sous la forme suivante :

( ) [ ]

2,12,1j

2,12,1

tj*2,1

tj2,1

tj2,12,1

eeaAavec

eAeA21eARetE

φ

ωω−ω−

=

+== (3.1)

où l'étoile symbolise ici une grandeur complexe conjuguée et 1j2 −= . 1A

et 2A

sont des

vecteurs complexes orientés selon leur direction de polarisation, respectivement par les

vecteurs unitaires 1e et 2e . Les ai et φi sont les amplitudes et les phases réelles associées. La

période temporelle des oscillations est donnée par ωπ= 2T . Précisons également que ces

ondes sont transverses ; 1E

et 2E

sont toujours perpendiculaires à la direction de propagation.

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Elles transportent selon la direction de propagation une énergie moyenne (il s'agit de

l'intensité lumineuse) qui est proportionnelle à l'indice du milieu traversé et au carré de

l'amplitude réelle du champ électrique. En pratique seule la répartition de l'intensité lumineuse

recueillie sur un plan image (par une caméra CCD par exemple) est intéressante, si bien que

l'on omet classiquement le coefficient de proportionnalité dans les expressions. Cette

"intensité lumineuse relative" est d'ailleurs la seule quantité physiquement détectable.

Le champ électrique total E

obtenu par superposition des deux ondes précédentes est

donné par la somme vectorielle 1E

+ 2E

(qui résulte de la linéarité des équations de

Maxwell). Lorsque l'indice du milieu traversé est proche de 1 (air ambiant), les intensités

moyennes I1 et I2 associées à chacune des ondes s'expriment donc sous la forme 211 EI

∝ et

222 EI

∝ , soit d'après (3-1) 2a2)A.A(I 21

*111 ==

et 2a2)A.A(I 22

*222 ==

. Notons que

le facteur 1/2 apparaît lors du calcul de la moyenne temporelle . (l'intervalle de temps

considéré est supposé grand en comparaison avec T). L'intensité lumineuse totale I obtenue

après superposition est donnée alors par :

( )( )

12

212121212121

avec

cosIIe.e2IIE.E2III

φ−φ=φ

φ++=++=

(3.2)

où 21 E.E2

est le terme d'interférence qui vaut également d'après (3.1) ( ) 2E.EE.E 2*1

*21

+ .

On voit également que ce terme est relié au déphasage φ introduit entre les deux ondes.

Lorsque les directions de polarisation sont orthogonales, il est clair qu'il n'y a pas

d'interférence. Au contraire si elles sont parallèles (le cas le plus favorable) l'intensité I peut

osciller entre les valeurs extrêmes Imax et Imin suivantes :

πππ=φ−+=ππ=φ++=

...,5,3,,II2III...,4,2,0,II2III

2121min

2121max (3.3)

On caractérise habituellement le contraste entre les "zones" d'intensité maximale et

minimale par le rapport Rc :

( )21

2121

minmax

minmaxc II

II2IIII

R+

=+−

= (3.4)

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Notons que C est toujours inférieur à 1 et optimal lorsque les intensités I1 et I2 sont égales.

On peut obtenir deux ondes parfaitement isochrones, susceptibles d'interférer, à partir

d'une même source primaire, soit par division du front de l'onde ou par division de l'amplitude

de l'onde. Dans le premier cas il faut disposer d’une source relativement ponctuelle pour

observer correctement le phénomène. Citons simplement deux exemples historiques célèbres :

les miroirs de Fresnel, les fentes d'Young. A l’inverse, la deuxième solution peut être réalisée

avec une source primaire étendue et nous intéresse plus particulièrement ici. Des franges

d'interférence sont obtenues dans ce cas à l'aide de dispositifs optiques connus sous le nom

d'interféromètres. La source primaire (monochromatique) est divisée à l'entrée en deux ondes

(de même pulsation) qui se superposent en sortie après avoir effectué deux trajectoires

optiques différentes qui dépendent de l'interféromètre. Il en résulte un déphasage φ qui

s'exprime à l'aide de la différence de chemin optique L∆ introduite par l'interféromètre. On a

alors :

snL,L2

0∆=∆∆

λπ

=φ (3.5)

où Tc0 =λ est classiquement la longueur d'onde dans le vide et n l'indice du milieu traversé

(identique ici pour les deux ondes). La grandeur s∆ représente la variation de longueur due

uniquement à la différence de parcours "géométrique" des deux ondes. On dénombre dans la

littérature [61] plusieurs interféromètres plus ou moins complexes qui mettent à profit la

relation précédente. Nous avons retenu pour notre étude un interféromètre de type Michelson

présenté schématiquement figure 3-1.

Laser

Zone d'observation

M

M : Miroir de référence M' : Plan de référence La : Lame séparatrice S0 : Source primaire étendueS1, 2 : Faisceaux divisés

S0

La

Eprouvette

wM'

S1

S2

Figure 3-1 : Principe de l'interféromètre de Michelson

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Un laser fournit une source monochromatique polarisée rectilignement, d'intensité I0,

qui est étendue par un système optique en S0. La source primaire parallèle S0 rencontre alors

une lame semi-réfléchissante La, inclinée à 45°, qui la sépare en deux faisceaux S1 et S2

perpendiculaires de même intensité, égale à I0/2. L'un des faisceaux est transmis alors par la

lame La puis se réfléchit successivement sur le miroir M et sur La. L'autre se réfléchit

successivement sur La et sur la face d'une éprouvette d'étude pour traverser ensuite La. Les

deux faisceaux se rencontrent et interfèrent finalement au niveau de la lame semi-

réfléchissante. Ce dispositif, placé dans l'air ambiant ( )1n ≈ , permet d'obtenir le relief de la

surface de l'éprouvette. On introduit pour cela le plan de référence M' de la figure 3-1 qui

correspond à la position géométrique de M, obtenue par symétrie par rapport à La. La

différence de chemin optique ( sL ∆≈∆ ) des deux ondes S1 et S2 équivaut alors

approximativement à deux fois la distance w prise entre un point lumineux du plan de

référence et sa projection sur la surface de l'éprouvette. La quantité w qui est donc fonction de

la position considérée représente à la fois l'élévation du relief de la surface en question et son

orientation par rapport à M'. L'équivalence w2L ≈∆ est largement employée pour ce type de

montage et suppose que le faisceau incident est peu dévié par la surface de l'éprouvette. En

pratique les variations de relief dans la zone éclairée (quelques millimètres) sont

suffisamment faibles (i.e. quelques microns) et justifient une telle approximation. On dispose

ainsi d'une relation simple entre la grandeur géométrique w et le déphasage φ. Les

interférences entre les deux ondes produisent en sortie un ensemble de franges sombres qui se

succèdent alternativement. Elles correspondent d'après (3.3) à des zones d'intensité minimale

Imin qui apparaissent lorsque le déphasage φ prend successivement les valeurs : π, 3π, 5π, ...

Par suite, les franges peuvent être assimilées à des lignes de niveau de la surface de l'objet

(autrement dit des isovaleurs de w) par rapport au plan de référence. La variation du relief

w∆ entre deux franges consécutives est une constante qui est donnée par :

2w 0λ=∆ (3.6)

Entre deux franges sombres, on passe toujours par un maximum d'intensité lumineuse

(i.e. franges claires) Imax comme le prévoit la théorie présentée précédemment. Néanmoins il

apparaît que le contraste Rc entre les zones claires et sombres (ou plus simplement le contraste

des franges) dépend fortement du pouvoir réfléchissant et de l'état de la surface de

l'éprouvette. En pratique il est possible d'améliorer le contraste, en y déposant une fine couche

d'aluminium très réfléchissante, obtenue par vaporisation dans une chambre à vide. Les

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directions de polarisation des deux ondes sont identiques à celle de l'onde primaire, ce qui

revient à égaliser les deux vecteurs unitaires dans l'expression (3.2).

Notons que la sensibilité de cette technique de mesure est donnée par (3.6), soit pour

un laser à gaz à argon ionisé (λ0=514,5 nm) d'environ un quart de micron. Lorsque

l'interféromètre est placé dans l'air ambiant, il est facilement perturbé par les variations

thermiques dues par exemple à la présence et aux mouvements éventuels du manipulateur à

proximité des éléments du montage. De plus il convient de disposer d'un plan de travail très

stable qui amortit toutes les vibrations, notamment celles qui existent dans les hautes

fréquences.

Il faut souligner ici que les sources physiques réelles ne sont jamais strictement

monochromatiques. Un laser fournit toujours en sortie une source quasi-monochromatique

composée d'ondes monochromatiques dont les fréquences respectives sont distribuées

continûment à l'intérieur d'une bande spectrale étroite centrée sur une fréquence moyenne

c00 λ=ν . La largeur de cette bande ν∆ permet de définir une grandeur appelée longueur de

cohérence (temporelle) cl∆ du laser. Concrètement, on assiste à une extinction progressive

puis une disparition totale des franges d'interférence lorsque la variation de chemin optique

L∆ augmente et devient supérieure à la longueur de cohérence. Comme nous l'apprend la

physique atomique, l'émission de lumière se fait au grè des collisions entre atomes qui

produisent des ondes dont l'amplitude et la phase varient très rapidement et irrégulièrement

dans le temps (non détectables). Il est commode alors d'assimiler l'émission lumineuse à une

source composée de trains d'ondes de durée limitée t∆ qui se succèdent de façon aléatoire. En

outre la cavité optique d'un laser, formé d'un milieu actif et de deux miroirs réfléchissants

disposés en regard (interféromètre de Fabry-Perot), produit par résonance (en simplifiant) des

ondes stationnaires de fréquences déterminées. On utilise habituellement le mode

fondamental qui correspond à une fréquence 0ν , caractéristique du milieu actif et donc le

laser. Il s'agit du mode pour lequel la divergence du faisceau en sortie est la plus faible.

L'intensité lumineuse ( )νν0I (i.e. l'intensité spectrale) de l'onde qui émerge de la cavité

(polarisée rectilignement) est distribuée symétriquement par rapport à 0ν , où elle prend une

valeur maximale. Elle décroît rapidement vers zéro lorsque 20 ν∆>ν−ν . L'allure théorique

de la fonction ( )νν0I , qui du reste peut toujours être approchée par une fonction porte de

largeur ν∆ , suit en fait la modélisation envisagée pour décrire les trains d'ondes. Notons que

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( )νν0I est toujours obtenue à partir de l'analyse spectrale de Fourier (par une transformation

de Fourier). En considérant que les trains d'ondes ont une durée identique t∆ , Born et Wolf

[61] obtiennent pour la répartition de l'intensité spectrale la représentation suivante :

( ) ( ) ( )

2

0

00 t

tsinI

∆ν−νπ∆ν−νπ

∝νν (3.7)

Le premier zéro de la fonction ci-dessus est donné pour ( ) t10 ∆±=ν−ν ; elle devient

négligeable ensuite. Par suite, les auteurs proposent la relation suivante entre la largeur

spectrale ν∆ et la durée d'un train d'onde t∆ :

t1 ∆≈ν∆ (3.8)

La longueur de cohérence (temporelle) cl∆ est alors donnée par :

ν∆≈∆=∆ ctclc (3.9)

Il en résulte que pour clL ∆>∆ les trains d'ondes issus des deux faisceaux S1 et S2 à la

sortie de l'interféromètre, ne proviennent pas d'un même train d'ondes issu de S0. On peut

montrer alors [61] que leur différence de phase φ n'est plus stationnaire (i.e. indépendante du

temps) mais devient fortement aléatoire et en moyenne nulle. Les sources S1 et S2 sont alors

devenues incohérentes et n'interfèrent plus. Il est clair toutefois que la solution (3.7) reste une

idéalisation qui suppose des trains d'ondes identiques, décrits par une fonction périodique

simple de fréquence 0ν . Une évaluation plus précise de la largeur spectrale est néanmoins

possible expérimentalement et conduit à des longueurs de cohérence qui varient entre

quelques mètres ou quelques centimètres selon les lasers. Nous disposons d'un laser argon

avec une longueur de cohérence d'environ 6 cm, qui limitera donc de moitié l'écart maximum

relatif entre le miroir et la pièce étudiée.

D'une grande sensibilité , l'interféromètre de Michelson se présente finalement comme

un outil puissant pour la mesure sans contact de la topographie d'une surface, du moins pour

de faibles variations de reliefs. Les applications pratiques sont nombreuses : Twyman et

Green [61] ont pu ainsi, les premiers, caractériser expérimentalement les aberrations

géométriques des lentilles. L’interféromètre précédent nous paraît donc tout indiqué pour

étudier la variation de relief en pointe de fissure, due au déplacement hors plan.

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2.2 La technique quasi hétérodyne

D’après ce qui précède, l’interférométrie de Michelson est donc en mesure de fournir

la cartographie du relief de la surface latérale d’une éprouvette, qui se déforme faiblement

sous chargement extérieur (effet Poisson). A partir du réseau de franges d’interférence

associé, il est possible par conséquent d’évaluer quantitativement les variations du

déplacement hors plan résultant. La précision de la mesure dépend néanmoins du mode

d’exploitation (i.e. du dépouillement) du système de franges obtenu. Il est clair qu’un

dépouillement manuel consiste bien souvent à n’effectuer qu’un comptage des franges dans

une direction donnée : l’information recherchée n’est accessible manuellement que pour les

maxima et minima d’intensité, estimés par l’opérateur, qui correspondent respectivement aux

centres des franges claires et sombres. Rappelons qu’ils sont également obtenus d’après (3.3)

lorsque le déphasage φ introduit est un multiple de π. Cette opération est à vrai dire longue et

fastidieuse. Elle offre de toute évidence peu de précision, même si du reste les franges sont

généralement bien contrastées.

Avec l’avènement de l’informatique et le développement des systèmes numériques

d’acquisition et de traitement d’images, on a recours depuis à des techniques d’interpolation

plus rapides et plus précises. Précisons que ces méthodes ne nécessitent pas au préalable de

filtrage du réseau de franges, nécessaire par exemple avec le moiré d’ombre. Dans ce cas les

images de franges contiennent à la fois le moiré soustractif, qui seul donne l’information sur

le relief, et le réseau de référence lié à la méthode. Ce dernier crée une perturbation qu’il

convient d’éliminer avant toute mesure à l’aide de techniques de filtrage particulières (filtrage

spatial optique, filtrage spatial numérique) [63].

A l’origine, on trouve une méthode ancienne : l'hétérodynage qui introduit, à la

différence de l’interférométrie classique, un petit décalage entre les fréquences des ondes

lumineuses qui se superposent. Lorsque cette différence de fréquence (i.e. la fréquence de

battement ω∆ ) est faible, les ondes interfèrent et donnent lieu à des franges qui défilent

continûment au cours du temps (non stationnaires). En tout point du champ d'interférence, on

montre que l'intensité I, modulée par la fréquence de battement ω∆ , varie en fonction du

temps de la façon suivante :

( ) ( ) ( ) φ+ω∆=ΦΦ++= tt,tcosaa2

a2

atI 21

22

21 (3.10)

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où a1 et a2 sont les amplitudes réelles des ondes lumineuses qui ont (pour simplifier l'écriture)

même direction de polarisation. Notons que l'on peut établir la relation ci-dessus à partir de

(3.1) en associant les fréquences angulaires ω1 et ω∆+ω=ω 12 respectivement aux ondes

1E

et 2E

. Lorsque ces ondes ont même direction, on retrouve l'expression de l'intensité

donnée par l'interférométrie classique ( 0=ω∆ ).

En interférométrie hétérodyne, comme le montre la relation (3.10), la différence de

phase φ entre les faisceaux lumineux n'est autre que la phase de la modulation d'intensité. La

phase relative Φ est une fonction linéaire du temps dont la pente est donnée par la fréquence

de battement. Lorsque ω∆ est prise suffisamment basse (< 100 kHz), il est possible de

détecter ces variations d'intensité et de mesurer localement la phase d'interférence φ avec une

grande précision (de l'ordre du millième d'interfrange) en utilisant un phasemètre

électronique. Les mesures sont indépendantes des amplitudes respectives des deux ondes mais

nécessitent sur tout un champ un temps de mesure considérable : l'usage de cette méthode est

exclue en temps réel.

On lui préfère une méthode de discrétisation certes moins précise mais plus rapide et

qui permet notamment de déterminer directement la phase sur tout un champ. L'utilisation de

cette méthode, connue sous le nom de méthode quasi hétérodyne ou encore méthode à

décalage de phase, s'est considérablement accrue ces dernières années avec l'apparition et le

développement des caméras CCD. Elle est fondée sur le même principe que l'hétérodynage

mais donne une approximation de la variation linéaire de la phase Φ par une variation en

escalier.

Considérons que I(x,y) représente l'intensité lumineuse (exprimée en niveau de gris)

en chaque pixel d'une image d'un champ de franges (recueillie par une caméra CCD). On

montre de manière générale, que cette image est assimilable à une distribution de l'intensité I

de la forme [67] :

( ) ( ) ( ) ( )[ ]y,xcosy,xby,xay,xI φ+= (3.11)

où ( )y,xφ est le terme de phase qui seul renseigne sur la distribution spatiale des franges.

Dans notre cas, la phase ( )y,xφ est liée au déplacement recherché par la relation (3.5). Les

fonctions inconnues a(x,y) et b(x,y) représentent respectivement le fond continu et un terme

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d'amplitude. La connaissance des trois inconnues précédentes nécessite au minimum trois

équations, obtenues en ajoutant trois décalages de phase connus φ1, φ2, φ3 à la phase φ. Les

trois intensités Ii (i=1,2,3) correspondantes sont alors données par :

( ) ( ) ( ) ( )[ ] 3,2,1i,y,xcosy,xby,xay,xI ii =φ+φ+= (3.12)

La résolution du système (3.12) conduit aux solutions générales suivantes, en

simplifiant les écritures :

( ) ( ) ( ) ( )( ) ( ) ( )

( ) ( ) ( )( ) ( ) ( )11

21

23

312231123

312231123

cosy,xbIy,xa

coscosII

y,xb

sinIIsinIIsinIIcosIIcosIIcosII

y,xtan

φ+φ−=

φ+φ−φ+φ−

=

φ−+φ−+φ−φ−+φ−+φ−

(3.13)

En prenant ( ) 31n2n −π=φ avec (n=1,2,3), on obtient par exemple pour le terme de

phase :

( ) ( )321

32

III2II3

y,xtan−−−−

=φ (3.14)

Les solutions précédentes requièrent la prise de trois images par caméra CCD. Pour

chacune des images, les déphasages sont obtenus en pratique soit avec une platine de

déplacement (piézo-électrique) ou encore à l'aide de modulateurs acousto-optiques. Avec

l'interféromètre de Michelson, on réalise des déphasages après avoir collé le miroir de

référence sur une lame piézo-électrique qui est actionnée à distance. Il permet d'obtenir une

petite translation du miroir parallèlement à l'onde incidente (voir figure 3-1), qui modifie le

parcours optique des ondes et par conséquent le champ d'interférence. Pour différentes

positions du miroir, on introduit ainsi des déphasages arbitraires entre les images de franges,

successivement enregistrées avec une caméra CCD. Le déphasage entre deux images est

obtenu quantitativement en calculant séparément leurs phases à l'origine (transformée de

Fourier), puis en les soustrayant ensuite [63]. On évite ainsi les erreurs qui résulteraient d'une

estimation directe du déphasage à l'aide du déplacement fourni par le déphaseur. Le calcul

donne une précision sur la phase qui est de l'ordre du centième de franges.

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On peut de toute évidence généraliser les expressions (3.13) en augmentant le nombre

d'images et donc le nombre d'équations (3.12). Un certain nombre de formules, dans la

littérature, donnent la phase φ en fonction du nombre N d'images pour des valeurs

particulières du déphasage φn (n=1..N) [68, 69]. On trouve ainsi des solutions qui supposent

des déphasages égaux à des multiples entiers de π/2 ou encore uniformément répartis dans

l'intervalle [ ]π2,0 (c'était le cas pour (3.14)). Notons qu'une solution générale qui ne fait

aucune hypothèse sur les déphasages a été développée au laboratoire [70]. Elle est valable

quel que soit le nombre N d'images et redonne notamment l'expression (3.13) pour N=3. En

pratique néanmoins un nombre trop élevé d'images conduit à des erreurs d'ordre

expérimentale par l'augmentation de l'incertitude sur les déphasages φn.

Nous utiliserons au chapitre suivant un logiciel intitulé Interf 32 qui met en œuvre la

technique quasi hétérodyne pour trois images. Il a été développé au laboratoire au sein de

l'équipe photomécanique par Dupré, Valle et Brémand [59]. A partir de trois images de

franges déphasées et des caractéristiques du montage optique (longueur d'onde de la source,

valeur de l'interfrange, grandissement de la caméra CCD), le logiciel permet un calcul direct

de la variation de relief de la surface déformée.

3. LA METHODE DES CAUSTIQUES

3.1 Le phénomène optique

En optique le phénomène de création d'une surface caustique est connu depuis

longtemps. Il semblerait en effet que les premières explications à ce sujet remontent au moyen

âge et soient dues à Maurolycos en 1530 [71]. Elles apparaissent ainsi lorsque une source

lumineuse (assez ponctuelle) est réfléchie ou réfractée par une ou plusieurs surfaces

curvilignes limitant au minimum deux milieux matériels différents. Généralement, seules "les

caustiques" se présentent à nous sous la forme de courbes stables fortement lumineuses (i.e.

singularités optiques) et résultent de l'intersection d'un plan image quelconque avec la surface

caustique. Il s'agit en fait d'un phénomène familier que tout un chacun peut observer

facilement chez lui. Pour s'en convaincre, il suffit le matin par exemple de regarder le fond

d'une tasse de café, de préférence blanche (pour accentuer le contraste) : on visualise une

courbe lumineuse simple et symétrique qui n'est autre qu'une caustique. L'expérience peut être

reconduite indéfiniment avec divers objets ou milieux qui permettent une bonne réflexion ou

transmission de la lumière. L'observation de caustiques est nettement améliorée avec une

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source de lumière spatialement limitée : une lampe de chevet convient beaucoup mieux que

l'éclairage fourni par un néon.

Pour illustrer ce qui précède, nous présentons figure 3-2 une tasse (blanche), remplie

d'eau, qui est éclairée simplement par une lampe de bureau. Un bâtonnet en plastique flotte

librement sur l'eau dont il modifie localement l'état de surface. L'image qui en est donnée au

fond de la tasse est pour le reste assez surprenante. Elle est attribuée à la présence de deux

caustiques dues aux variations sensibles de relief aux extrémités du flotteur. La première

limite une zone non éclairée assimilable à première vue à un petit cercle sombre, que l'on

distingue assez facilement. La seconde est une courbe non fermée qui ressemble à la partie

supérieure d'un cœur. Notons ici que la traversée du liquide et l'état granuleux du fond de la

tasse ne favorisent pas le contraste si bien que les caustiques sont très peu lumineuses en

sortie. On verra plus loin également que la forme de la caustique est étroitement liée à la

géométrie du relief, rencontré par la lumière. Par anticipation, le croquis de la figure 3-2

associe un relief creusé (bombé) à la caustique fermée (respectivement ouverte), obtenue par

réfraction de la source lumineuse dans l'eau. Les variations de relief aux extrémités

s'expliquent par les pressions ou tensions superficielles existantes à la surface de l'eau, qui

dépendent généralement de la position du bâtonnet.

Figure 3-2 : Caustiques obtenues par transmission au fond d'une tasse remplie d'eau

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L'exemple précédent nous montre des caustiques dont les formes sont relativement

simples et de ce fait reconnaissables. On relève bien d'autres variétés de caustiques dont les

formes sont assurément plus complexes. Ainsi Larmor [72], à la fin du siècle dernier, parlait

de caustiques obtenues à partir de la réfraction de la lumière à travers une plaque de verre,

recouverte de fines gouttes d'eau. Elles conduisent à de très belles images, composées d'une

multitude de petites courbes lumineuses qui s'assemblent pour former des surfaces

relativement surprenantes. Si les caustiques sont observées depuis longtemps, leur

compréhension théorique est plutôt récente. Malgré leur importance, elles n'apparaissaient pas

dans les théories classiques en optique principalement pour deux raisons selon Berry [65].

Tout d'abord leurs formes intriguaient beaucoup et on les classaient seulement comme

perturbations liées à une focale parfaite. D'autre part dans le cadre de l'optique géométrique

généralisée aux milieux inhomogènes, l'approximation classique au premier ordre des

fonctions d'ondes solutions de l'équation d'Helmholtz [61], est mise à défaut sur les caustiques

elles-mêmes : elle y prédit en effet une intensité infinie et donc irréaliste.

Une explication correcte du phénomène n'a été possible que par l'introduction en

optique d'une nouvelle branche des mathématiques appelée théorie des catastrophes [73],

inventée en 1972 par Thom [74]. Elle conduit alors principalement Berry [65] à construire

une théorie où les caustiques sont assimilables à des "catastrophes optiques". Notons

simplement ici que les travaux importants de Berry offrent un cadre théorique suffisamment

général qui permet non seulement d'expliquer la formation de surfaces caustiques aussi

complexes que celles obtenues par Larmor mais également de comprendre et retrouver les

figures de diffraction associées (on parle alors de diffraction catastrophique au voisinage des

caustiques).

Les applications en mécanique de la rupture donneront toujours des caustiques de

formes simples, qui s'apparentent à celles montrées figure 3-2. Leur compréhension et leur

représentation ne requièrent pas un formalisme aussi général et complet que celui de Berry, si

du moins l'on ne recherche pas à décrire de façon précise la distribution de l'intensité au

voisinage d'une caustique. Elles seront d'ailleurs assimilées à des courbes "fortement

lumineuses" et sans épaisseur limitant matériellement en général une zone d'ombre et une

zone éclairée. Par ailleurs, les relations mathématiques utilisées par la suite pour

"caractériser" les caustiques trouvent un fondement mathématique rigoureux avec la théorie

des catastrophes.

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3.2 Applications à la mécanique de la rupture

3.2.1 Principe de la méthode des caustiques, arrangements optiques

Les premières applications des caustiques en mécanique de la rupture ont dues à

Manogg [66] et remontent au milieu des années 60. Réalisées à l'origine avec une plaque

transparente fissurée et sollicitée en mode I, elles ont été étendues ensuite notamment par

Theocaris [75] aux matériaux opaques et pour des chargements en mode mixte. On obtient

ainsi typiquement une surface caustique à partir d'une plaque fissurée chargée en mode I,

comme nous le montre la figure 3-3. Il s'agit dans ce cas d'un arrangement optique en

transmission qui permet d'expliquer simplement le phénomène.

Figure 3-3 : Formation de caustiques en mécanique de la rupture

Un faisceau lumineux, provenant d'une source suffisamment étendue, éclaire donc une

plaque transparente fissurée, sollicitée en traction. En raison du gradient de contraintes,

l'épaisseur (effet Poisson) et l'indice de réfraction de la plaque sont modifiés en pointe de

fissure, ce qui provoque une déviation des rayons lumineux traversant la zone déformée. Les

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rayons déviés se concentrent alors le long d'une surface fortement lumineuse dans l'espace qui

n'est autre qu'une surface caustique. Cette surface de discontinuité du flux lumineux

enveloppe une zone d'ombre, caractérisée par une absence totale de rayons lumineux. On

visualise à l'intersection de la surface caustique et d'un plan image, placé parallèlement à une

certaine distance zI du modèle, une courbe singulière qui constitue la caustique.

On notera tout d'abord une ressemblance entre les caustiques expérimentales de la

figure 3-3 et celle obtenue au fond de la tasse figure 3-2. On remarque ensuite que les

caustiques, recueillies pour différents positions du plan image, ont des dimensions respectives

qui augmentent progressivement lorsque ce plan s'éloigne du modèle. Comme en témoignent

les caustiques obtenues expérimentalement, cet accroissement n'est de toute évidence pas

proportionnel à la distance zI. En outre plus la distance zI est grande et plus la zone d'où

proviennent les rayons lumineux réfractés est éloignée de la pointe de la fissure. Nous verrons

plus loin qu'il est possible d'établir une relation mathématique entre des points géométriques

de la surface du modèle et la caustique associée à un plan image. Cette relation est

précisément paramétrée par la distance zI , l'orientation du plan image par rapport au modèle

et plus généralement les caractéristiques du montage optique. Le lieu géométrique de ces

"points génériques" est alors appelé la courbe initiale. La forme de cette courbe dépend

principalement (comme on peut s'y attendre du reste) de la variation de relief en pointe de

fissure. La courbe initiale n'a certes pas de réalité physique mais permet de recueillir des

informations dans une zone proche de la singularité. La taille de la courbe et par conséquent

celle de la zone étudiée, sont conditionnées par le choix du plan image, donc de zI. Ainsi plus

zI est petit et plus les informations recueillies sont proches de la singularité.

Un phénomène identique est obtenu dans le cas d'une étude en réflexion sur des

matériaux opaques. Les dimensions et formes des caustiques dépendent de façon générale du

mode de fissuration [75, 76], des propriétés mécaniques et optiques du matériau constitutif de

la plaque [77] et des caractéristiques du montage expérimental. Par suite les caustiques

obtenues, pour un mode mixte de rupture et un arrangement en transmission par exemple, ne

conserveront pas la forme symétrique précédente, caractéristique du mode I. Nous regroupons

figure 3-4 les différents arrangements optiques [78] qui permettent d'obtenir une caustique à

partir d'une plaque fissurée sollicitée en traction. Ils se divisent en trois catégories :

1) L'arrangement en transmission, 2) L'arrangement en réflexion ou réflexion simple pour les

matériaux opaques, 3) L'arrangement en réflexion ou réflexion composée pour les matériaux

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transparents. Le premier cas a été illustré avec l'exemple traité précédemment et donne donc

typiquement en mode I des caustiques réelles fermées et symétriques ; il est référencé par la

lettre (a) sur la figure 3-4. Le second, référencé par la lettre (b), fera l'objet d'une étude

détaillée au paragraphe suivant. Sur un plan image réel, il est associé à une caustique (réelle)

non fermée et symétrique qui ressemble à celle présentée figure 3-4. Le dernier arrangement

est un cas hybride qui donne qualitativement en sortie les deux caustiques précédentes (en

mode I) : la caustique interne (b) est obtenue par réflexion directe du faisceau incident sur la

face avant du modèle. La deuxième, plus grande que la caustique de transmission (a),

correspond à un double passage des rayons lumineux à l'intérieur de la plaque : soit une

réflexion sur la face arrière du modèle suivie d'une réfraction. Cet arrangement a été

principalement employé par Theocaris [75], pour ses études sur les plaques transparentes

chargées en mode mixte. Notons que des images réelles (i.e. que l'on peut recueillir

directement sur un écran physique) sont obtenues pour les cas (b) et (c), en interposant entre

le modèle et le faisceau incident une lame semi réfléchissante.

Figure 3-4 : Arrangements optiques, modèle sollicité en traction d'après [76, 78]

Les plans images sont qualifiés de réels ou virtuels selon leur position respective par

rapport au faisceau incident. Lorsque le matériau est opaque, les images de caustiques

recueillies en amont du modèle seront réelles (traits continus) et virtuelles (traits pointillés) en

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aval. La situation est simplement inversée pour un matériau transparent, bien qu'il soit

toujours possible d'obtenir des images réelles pour le cas (c). Les parties grisées représentent

les zones d'ombre. Le signe de zI ne doit pas inquiéter : la distance entre le plan image et le

modèle est bien sûr positive ! Il s'agit d'une convention qui résulte de la relation

mathématique liant la caustique à la courbe initiale et permet de "choisir" entre une image

réelle et virtuelle. Elle sera justifiée au paragraphe suivant pour l'arrangement en réflexion.

En pratique, notons enfin qu'il est possible d'obtenir une caustique "virtuelle" avec une

caméra CCD, en focalisant l'objectif de la caméra sur un plan situé à l'arrière ou à l'avant du

modèle étudié. On montre typiquement figure 3-5 le résultat obtenu avec une plaque en

Araldite d'épaisseur 5 mm pour un arrangement en réflexion. La caustique observée "derrière

le modèle" à une distance zI = 200 mm, s'apparente à celles observées en transmission

précédemment.

Figure 3-5 : Caustique obtenue sur un plan image virtuel, arrangement en réflexion

3.2.2 Formation d'une caustique en réflexion : formulation théorique

De façon générale, le problème étudié met en œuvre un système composé d'une source

lumineuse, d'un déflecteur et d'un récepteur dont les positions relatives sont fixes dans

l'espace géométrique, rapporté au repère cartésien ( )321 e,e,e,O . Le déflecteur occupe un

volume délimité par une surface extérieure SD, d'équation donnée ( ) 0x,x,xF 321 = , où les xi

sont les coordonnées cartésiennes associées à ( )321 e,e,e,O . Lorsque SD est suffisamment

réfléchissante, le déflecteur agit alors comme un réflecteur qui dévie une partie des rayons

lumineux de la source vers le récepteur selon la loi classique de la réflexion. Dans notre cas le

réflecteur n'est autre que la plaque fissurée, dont l’une des surfaces au moins est supposée

réfléchissante. Elle est située par commodité selon le plan ( )21 e,e,O . Théocaris [71]

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- 109 -

représente les déflexions de la surface sous la forme d'une fonction f(x1,x2). Le réflecteur sera

donc assimilé plus simplement à la surface d'équation :

0)x,x(fx)x,x,x(F 213321 =+≡ (3.15)

Le récepteur, quant à lui, correspond habituellement à un plan SP (i.e. le plan image)

de position et d'orientation données. Theocaris [71] a établi dans ces conditions une relation

de correspondance relativement générale entre les points objets situés sur le réflecteur (3.15)

et les points images du récepteur, quelle que soit la position de la source (physiquement

acceptable). Dans le cadre de l'optique géométrique, nous verrons par la suite qu’une telle

relation est nécessaire pour caractériser la surface caustique associée. L’étude théorique est

néanmoins simplifiée en orientant le plan image parallèlement à la surface de la plaque et en

éclairant cette surface avec une source parallèle sous incidence normale. Ces conditions

supplémentaires, observées d’ailleurs en pratique, ne modifient pas la nature du problème et

permettent un exposé concis.

PN

RéflecteurPlan image

n

Faisceau incident

OzI >0

x3 = -f(x1,x2)

Q

P(X1,X2)

(zI-f)

1e2e

3e

u

3e

Figure 3-6 : Système simplifié source-réflecteur-récepteur en réflexion

Considérons par conséquent figure 3-6 une source lumineuse, parallèle à l'axe 3e et

selon x3 <0, qui rencontre la surface réfléchissante de la plaque sous incidence normale [79].

Les rayons lumineux réfléchis sont enregistrés par une caméra CCD, placée à l'avant du

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modèle. Le plan focal de cette caméra (i.e. le récepteur), correspond sur la figure 3-6 au plan

SI d'équation )0z(,zx II3 >−= , localisé derrière le réflecteur. Il intercepte ici les extensions

virtuelles des rayons lumineux réfléchis par la surface SR du réflecteur, dont l'équation est

donnée par (3-15). Il s'agit donc d'un plan virtuel, à la différence du plan réel d'équation

respective )0z(,zx II3 >+= . Considérons d'autre part, un rayon lumineux qui fait

correspondre à un point P(x1,x2) de SR son image virtuelle P(X1,X2) sur SI. La position

(virtuelle) de P(X1,X2) dépend de façon évidente à la fois de l'orientation de la normale N

à

SR au point P et de la distance zI. Notons que le système de coordonnées (X1,X2) repérant SI

est identique à (x1,x2), à la différence près que son origine est translatée de la distance zI

suivant 3e− . Soient ϕ l'angle entre le rayon incident et la normale N

en P(x1,x2) et Q la

projection normale de P(x1,x2) sur "l'écran virtuel", la position de P(X1,X2) est donnée par la

relation vectorielle suivante :

( )[ ]u2tanfzxX I

ϕ−+= (3.16)

où iiii exx,eXX

== et QPQPu = est un vecteur unitaire.

La normale extérieure à SF en P est définie par FF ∇∇

d'après (3.15). En outre, le

plan qui contient le rayon incident et le rayon réfléchi correspondant sur la figure 3-6 est

orienté par le vecteur unitaire 33 eNeNn

××= . L'intersection de ce plan avec l'écran

virtuel SI est précisément la ligne (PQ) orientée par le vecteur u . Ce dernier s'exprime alors

par :

ff

xf

xf

exfe

xf

enu 212

2

2

1

22

11

3∇

∇−=

∂∂

+

∂∂

∂∂

+∂∂

−=×=

(3.17)

Il est possible de plus d'exprimer la tangente de l'angle ϕ sous la forme suivante :

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∇=

∂∂

+

∂∂

=ϕϕ

ϕ−ϕ

fxf

xf

N.e

Ne

cossintan

tan1tan22tan

212

2

2

13

3

2

(3.18)

En substituant (3.17) et (3.18) dans (3.16) il vient alors :

( ) 2If1

ffz2xX∇−

∇−−=

(3.19)

La relation (3.19) (connue sous le nom de "optical mapping" en anglais) décrit, dans le

cas présent, la relation géométrique exacte liant les points objets de la plaque aux points

images de l'écran. Lorsque l'image est réelle (placée devant la plaque), le vecteur u prend une

direction opposée u− et la distance (zI-f) devient (zI+f) dans l'expression (3.16). Les autres

quantités introduites restent inchangées. Au final on retrouve l'expression (3.19), où il faut

simplement remplacer (zI) par (-zI). Par suite pour les arrangements en réflexion, on prend

l'habitude d'associer zI > 0 aux images virtuelles et zI < 0 aux images réelles.

La relation (3.19) peut être linéarisée en ajoutant les hypothèses supplémentaires

suivantes : zI >> f et ( ) 1xf 2i <<∂∂ . Elle se réduit à la forme classique :

( )f2zwavec

wxX

I∇−=

+=

(3.20)

Il faut souligner ici que l'on a éliminé artificiellement la singularité qui apparaît

lorsque 1f2=∇

, correspondant d'après (3.18) à un angle 4π±=ϕ . Il s'agit d'un cas limite

qui donne un rayon réfléchi parallèle au plan ( )21 e,e,O dont l'extension virtuelle ne coupe

pas le plan image SI.

Notons que des études simplifiées avec un arrangement en transmission ou en

réflexion composée conduisent à des relations de forme similaire à (3.20). Elles introduisent

cependant la variation de chemin optique ∆s(x1, x2) du faisceau incident qui contrôle alors le

vecteur w dans l'expression (3.20). A partir de l'équation iconale de l'optique géométrique

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[61], on montre alors que le parcours d'un rayon lumineux à la sortie de la plaque est modifié

par :

( )( )21I x,xszw ∆∇−=

(3.21)

La variation de chemin optique résulte à la fois des déformations introduites sur les

deux cotés du modèle et de la variation non uniforme des indices de réfraction du matériau,

sous chargement. Une expression classique de ∆s(x1, x2), qui tient compte dans sa formulation

de ces deux phénomènes combinés, est présentée par exemple dans les références [76, 78].

Elle redonne la solution (3.20) dans le cas de la réflexion simple. Les variations d'indice dans

la plaque fissurée sont néanmoins décrites avec la loi de Maxwell-Neumann, en supposant un

état de contraintes planes ou de déformations planes. Cette hypothèse 2D est bien sûr trop

restrictive pour notre étude concernant les effets 3D en pointe de fissure. Une re-formulation

plus générale des lois dans ce cas nous entraîneraient dans des considérations mathématiques

complexes et incertaines qui peuvent être évitées. En effet les relations établies pour la

réflexion simple ici, ne font aucune hypothèse sur l'état de contrainte régnant dans la plaque.

Elles apparaissent de ce fait suffisamment générales pour l'application qui suivra au

chapitre 5. De plus une plaque transparente peut toujours être rendue opaque, en recouvrant

tout simplement l'une de ces faces d'un dépôt fortement réfléchissant.

Nous sommes en mesure maintenant de définir mathématiquement la caustique sur le

plan image SI. Elle apparaît comme le lieu des points sur SI où la relation (3.19) n'est pas

inversible. Une condition nécessaire et suffisante pour l'existence d'une caustique est donnée

par l'annulation du Jacobien du système d'équations (3.19) ou (3.20) [65] :

( ) 0xX

xX

xX

xXX,XJ

1

2

2

1

2

2

1

121 =

∂∂

∂∂

−∂∂

∂∂

= (3.22)

La solution de l'équation (3.22) forme typiquement la courbe initiale, lieu des points

génériques de la caustique. Cette courbe sera uniquement fonction des paramètres mécaniques

et géométriques associés à la plaque pour un arrangement optique en réflexion. Il faudrait y

ajouter en plus des paramètres optiques tels que les constantes photoélastiques absolues du

matériau dans les autres cas [75, 78]. Notons enfin que dans le cadre de l'optique géométrique,

la relation (3.22) conduit à une singularité de l'intensité lumineuse sur la caustique. Rappelons

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- 113 -

que ce problème est résolu en faisant appel à une théorie plus générale introduite par Berry

[65].

3.2.3 Relations simplifiées issues de la mécanique de la rupture 2D, remarques

On considère à nouveau le montage optique de la figure 3-6 où le réflecteur est

constitué d'une plaque fissurée opaque d'épaisseur h. En mode I avec l'approximation 2D

classique, le déplacement hors plan u3 de la surface de la plaque est donné par la relation

(1.40). On a donc pour f(x1,x2) l'expression suivante avec les coordonnées polaires (r,θ)

associées :

( ) cte

r21

2cos

EhK),r(fx,xf I

21 +π

θν

−=θ≡ (3.23)

En substituant (3.23) dans l'équation linéarisée (3.20), et en appliquant la condition

(3.22), la caustique est donnée par les relations paramétriques suivantes en coordonnées

polaires [76] :

θ

±θ=

θ

±θ=

23sin2sin3

3r

X

23cos2cos3

3r

X

02

01

(3.24)

où r0 représente le rayon de la courbe initiale que l'on trouve ici de forme circulaire :

52

II0 E22

zKh3r

π

ν= (3.25)

Les équations (3.24) représentent une épicycloïde dont la taille est paramètrée par le

rayon de la courbe initiale. Ce dernier dépend uniquement des constantes mécaniques

associées à la plaque. Le signe positif est à prendre pour une image virtuelle (zI >0).

Inversement, le signe moins indique que le plan image est réel (zI < 0). On notera que suite

aux dérivations introduites, la constante dans (3.23) n'intervient pas dans l'équation d'une

caustique.

A partir des relations (3.19) et (3.20), adimensionnées au préalable par l'épaisseur h,

nous avons simulé figure 3-7 les caustiques obtenues pour différentes distances zI du plan

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image. Les calculs ont été réalisés avec le logiciel MapleV, en prenant les valeurs numériques

suivantes : [ ] [ ] [ ]( ) ( )8;22;2600;37,0mmt;mmMPaK;MPaE; I =ν . Les représentations

graphiques se font dans des plans images repérés par les coordonnées cartésiennes

adimensionnées (X/h, Y/h) ≡ (X1/h, X2/h). A chaque caustique correspond alors une courbe

initiale de rayon adimensionné r0/h.

Figure 3-7 : Simulation de caustiques à partir des expressions (3.19), (3.20) et de la

formulation 2D du déplacement hors plan.

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On remarque en premier lieu que les formes des caustiques sont totalement différentes

selon leur appartenance à un plan virtuel (zI > 0) ou un plan réel (zI < 0). Dans le premier cas

elles délimitent une zone d'ombre caractéristique facilement identifiable expérimentalement

qui permettent une mesure du facteur d'intensité de contrainte KI. On peut en effet montrer à

partir des équations (3.24) et (3.25) que le diamètre transverse de la caustique Dt , représenté

figure 3-7, est relié au facteur d'intensité de contrainte KI de la façon suivante [76] :

( ) ν

π=

hzDE

17,3322K

I

25t

25I (3.26)

On peut constater en outre sur la figure 3-7 que les caustiques calculées avec les

relations exactes (3.19) diffèrent très peu de celles obtenues, dans les mêmes conditions, avec

la relation approchée (3.20). Ces dernières seront donc suffisantes en pratique.

Une comparaison avec la caustique expérimentale figure 3-5 montre cependant une

réelle divergence avec les prévisions numériques. Cette différence est imputable non pas à

l'approximation (3.20), comme l'ont montré les simulations numériques, mais plutôt à

l'expression elle-même du déplacement u3 hors plan utilisée. Elle est issue de la théorie 2D,

alors que les points génériques de la caustique expérimentale sont déjà dans la zone 3D. On a

typiquement les paramètres mécaniques suivants pour la plaque en Araldite

[ ] [ ] [ ]( ) ( )5;20;2800;33,0mmt;mmMPaK;MPaE; I =ν , soit d'après (3.25) r0/h ≅ 0.23.

La formule (3.26) a été utilisée par Rosakis et Ravi-Chandar [49] pour caractériser la zone

3D, à l'intérieur de laquelle elle conduisait typiquement à une variation de KI. Il convient donc

de trouver une forme mieux adaptée pour u3 dans la zone 3D qui donne des prévisions plus

réalistes. Cette remarque a motivé notamment l'étude expérimentale conduite au chapitre 4 et

l'application qui en résulte pour les caustiques au chapitre 5.

3.3 Conclusion

Ce chapitre de transition était destiné à la présentation de deux méthodes optiques, très

utiles pour une approche expérimentale de la rupture. La première requiert un montage

interférométrique de type Michelson. Elle permet, sur tout un champ, de quantifier de faibles

variations de reliefs de l'ordre de quelques microns. L'interféromètre de Michelson donne les

lignes de niveaux d'une surface faiblement déformée sous la forme d'un réseau de franges.

L'interfrange correspond typiquement à une variation du relief de 2λ , où λ est la longueur

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d'onde de la source lumineuse cohérente associée. Il faut néanmoins disposer d'une surface

suffisamment réfléchissante pour recueillir des franges bien contrastées. La technique quasi

hétérodyne, qui trouve tout son intérêt lorsqu'elle est associée à un système d'analyse

d'images, apparaît comme un moyen de discrétisation rapide et précis du réseau de franges

précédent. A partir de trois images de franges déphasées, on accède au relief en tout point de

la zone étudiée, avec une précision de l'ordre du centième de franges. Une utilisation

combinée de ces deux méthodes parait donc toute indiquée pour mesurer le déplacement hors

plan en pointe d'une fissure.

Les applications des caustiques en mécanique de la rupture se regroupent sous la

dénomination commune de méthode des caustiques. La singularité mécanique est alors

transformée en une singularité optique qui n'est autre qu'une caustique de forme simple que

l'on recueille sur un plan image réel ou virtuel placé à une certaine distance du modèle. Il

apparaît pour un mode I de fissuration, que les caustiques sont définies mathématiquement par

des épicycloïdes. Leurs points génériques sur le modèle fissuré (i.e. les courbes initiales) sont

des cercles concentriques qui définissent la zone d'étude pour un plan image donné. Les

relations mathématiques obtenues sont de plus exactes d'un point de vue géométrique,

uniquement pour les matériaux étudiés en réflexion simple. A partir de la mesure d'une

dimension privilégiée de l'épicycloïde (i.e. son diamètre transverse), il est alors possible de

calculer le facteur d'intensité de contraintes KI. Le calcul, qui suppose la connaissance du

relief en pointe de fissure, se fait classiquement à partir de l'expression 2D du déplacement

hors plan u3 à cet endroit. La confrontation des simulations numériques et d'une caustique

expérimentale montre clairement que l'expression de u3 est inappropriée dans la zone 3D.

Cette remarque se présente comme le point de départ de l'étude expérimentale au chapitre

suivant.

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CCHHAAPPIITTRREE 44

DETERMINATION EXPERIMENTALE DU DEPLACEMENT HORS PLAN EN

POINTE DE FISSURE POUR UNE PLAQUE CHARGEE EN MODE I.

FORMULATION D'UNE EXPRESSION THEORIQUE.

« Comme expérimentateur, j'évite les systèmes

philosophiques, mais je ne saurais pour cela

repousser cet esprit philosophique qui, sans être

nulle part, est partout, et qui, sans appartenir à

aucun système, doit régner non seulement sur

toutes les sciences, mais sur toutes les

connaissances humaines…»

Claude Bernard.

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1. INTRODUCTION

L'interférométrie associée à la technique quasi hétérodyne sont appliquées dans cette

partie à la mécanique de la rupture. La mise en œuvre expérimentale est décrite pour une

plaque élastique de type SEN chargée en mode I. Trois exemples seront ainsi étudiés, à savoir

deux plaques en PMMA d'épaisseurs respectives 8mm et 6mm et une plaque en Araldite de 5

mm d'épaisseur. Ce chapitre a principalement deux objectifs : le premier est de proposer une

méthode expérimentale appropriée et suffisamment précise pour mesurer le déplacement hors

plan (de la surface libre de la plaque) en pointe de fissure. Le second est de construire, à partir

des résultats expérimentaux donnés par l'interféromètre, une expression mathématique de ce

déplacement, physiquement acceptable à l'intérieur de la zone 3D. Une analyse par éléments

finis au chapitre 2 montrait en effet clairement une différence importante, précisément dans la

zone 3D, entre le déplacement hors plan calculé et les prédictions de la théorie 2D. Rappelons

que les écarts avec la théorie 2D se produisaient typiquement pour une distance radiale en

pointe de fissure inférieure à la demi épaisseur du modèle.

Le déplacement hors plan u3 se présente "géométriquement" comme la variation de

relief de la surface du modèle sous l'effet du chargement (effet Poisson), relief qui peut être

caractérisé selon le chapitre 3 par un réseau de franges avec l'interférométrie de Michelson.

L'utilisation d'un logiciel d'analyse développé au laboratoire (logiciel Interf 32) permet

ensuite, à partir de trois images de franges déphasées, le calcul du relief en tout point de la

surface déformée, à un plan de référence près (le choix est fait arbitrairement lors du calcul).

Pour accéder au déplacement u3 recherché, nous verrons qu'il faut néanmoins déterminer

précisément ce plan de référence. La démarche proposée consiste alors à recaler les données

calculées par le logiciel avec l'évolution du déplacement hors plan prévue par la théorie 2D

(toujours vraie) à l'extérieur de la zone 3D. Par suite, on est conduit à résoudre un système

d'équations surdéterminé à quatre inconnues qui permet de trouver par une méthode de

minimisation la position du plan de référence et le facteur d'intensité de contraintes KI. Les

données "expérimentales" ainsi recalées, renseignent alors sur l'évolution de u3, à l'intérieur de

la zone 3D. Une comparaison est ensuite possible avec les résultats fournis par la

modélisation numérique. Une formulation mathématique nouvelle du déplacement est

finalement proposée pour le mode I, valable quelle que soit la zone d'étude (2D classique ou

3D) en pointe de fissure. Elle est paramétrée en outre par six constantes qui dépendent

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uniquement du matériau utilisé et dont on donnera une estimation numérique pour les trois

exemples présentés.

2. CONSIDERATIONS EXPERIMENTALES

2.1 Le dispositif expérimental

2.1.1 Description du site

Le dispositif expérimental utilisé est constitué de l'interféromètre de Michelson montré

figure 4-1. Il regroupe bien sûr les éléments optiques classiques présentés au chapitre

précédent, à savoir un laser argon, un cube séparateur qui joue ici le rôle de lame semi

réfléchissante et un miroir de référence. L'ensemble est monté sur un système de rails (fixes)

disposés en croix, au centre duquel se trouve le cube séparateur. Aux extrémités de la croix se

trouvent le miroir de référence et une plaque fissurée (de type SEN) chargée en mode I, de

dimensions planes caractéristiques 160 mm × 290 mm. Les rails sont surélevés et la plaque

orientée de manière à pouvoir éclairer perpendiculairement la pointe de fissure avec un

faisceau lumineux parallèle suffisamment étendu. L'interféromètre repose sur un marbre qui

permet d'éviter les vibrations parasites.

Figure 4-1 :Vues du site expérimental

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Le principe de fonctionnement de l’interféromètre a été exposé au chapitre précédent. Il

est néanmoins résumé de façon schématique dans le cas présent figure 4-2. Des franges

d’interférence apparaissent sur l’écran du moniteur si la différence de chemin optique des

rayons émergeants en C est inférieure à la longueur de cohérence du laser (environ 6 cm).

Rappelons que cela correspond à une distance relative entre la plaque et le miroir inférieure à

3 cm.

L'acquisition d'images se fait grâce au logiciel Pcscope qui est lancé à partir d'un PC

classique, relié à une caméra CCD et un moniteur de contrôle que l'on aperçoit sur la

figure 4-1. La caméra est libre de se déplacer à la fois sur le rail et perpendiculairement à ce

dernier. Les mouvements transversaux (limités à quelques cm) sont assurés à l'aide de deux

platines de translation micrométriques fixées à la caméra. Elles offrent au manipulateur une

possibilité supplémentaire de réglage (précis) du capteur CCD, pour centrer une image par

exemple. On remarquera figure 4-1, la présence d'un objectif indépendant de la caméra qui

peut se mouvoir également sur le rail. Il permet de cette façon d'obtenir un élargissement (i.e.

un zoom) relativement important de la zone en pointe de fissure.

Notons enfin ici la présence d'une lame piézo-électrique sur laquelle est collé le miroir

de référence. Actionné à distance par système électrique, il engendre de faibles translations du

miroir perpendiculairement aux faisceaux incidents. On peut ainsi déphaser les images de

franges.

Figure 4-2 : Interféromètre de Michelson appliqué à la mécanique de la rupture

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- 122 -

2.1.2 Elargissement du faisceau initial

On remarquera sur figure 4-1, outre une lentille L de distance focale f = 140 mm, un

doublet d'éléments optiques placés entre le cube séparateur et le laser. Ils assurent

principalement trois fonctions. La première est de faire converger la source laser au niveau de

la focale de la lentille convexe L afin d’obtenir un faisceau parallèle à l'entrée du cube. La

source laser est également filtrée, en supprimant une partie importante du bruit résultant de

l’émission laser. Il s'agit enfin d'obtenir un champ parallèle élargi sur une zone d'environ 20-

25 mm de diamètre qui correspond typiquement aux dimensions de la lentille utilisée. On

dispose ainsi d'une zone éclairée (la zone d'étude) suffisamment importante en pointe de

fissure.

Sourcelaser

O2

L1 L2D

α2

f2f1ff2

O1

L

Zoneéclairée

α1

Sourcelaser

L1 D

α1

f

L

f1

O1

Zoneéclairée

d

Figure 4-3a

Figure 4-3b

Figures 4-3 : Principe d'élargissement du faisceau laser

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- 123 -

Le doublet optique est ainsi constitué de deux objectifs de microscope tenus par deux

montures indépendantes qui peuvent glisser sur le rail. Entre les deux objectifs, fixé à l'une

des montures se trouve un diaphragme D dont l'ouverture est typiquement de 15 µm. Le

premier objectif se comporte globalement comme une lentille L1 de faible focale f1 qui fait

converger le faisceau laser "brut" en un point O1, situé à l'intérieur de l'ouverture du

diaphragme D. Ce dernier agit ici principalement comme un filtre fréquentiel qui donne en

sortie un faisceau spatialement épuré (faiblement diffracté) qui se propage avec un certain

angle d'ouverture α1. On montre schématiquement figure 4-3a le dispositif précédent lorsque

le plan focal de la lentille L est situé sur D. En sortie le faisceau parallèle élargi est en général

limité à une portion de la lentille.

Le rôle principal du deuxième objectif, assimilé à nouveau à une lentille L2 de focale f2,

est simplement d'augmenter l'angle α1. Il est situé de façon à faire focaliser les rayons

lumineux issus de O1 en un point image (conjugué) O2. Schématiquement sur la figure 4-3b, le

plan focal objet de L2 est placé à une certaine distance d après D, qui détermine la position de

O2 et l'angle de sortie α2 des rayons lumineux en O2. Notons que, par construction, O2 se

trouve toujours après le plan focal image de L2. Le cas limite (i.e. O2 sur le plan focal image)

correspondrait à des faisceaux lumineux incidents parallèles. Avec l'objectif de microscope la

focale f2 est suffisamment petite, pour qu'une faible distance d sur la figure 4-3b suffise à

dévier considérablement les rayons en O2 ,soit α2 > α1. Lorsque O2 appartient au plan focal

objet de L, on peut obtenir ainsi en sortie un champ parallèle qui couvre l'ensemble de la

lentille. Notons qu'un résultat semblable ne pourrait être envisagé dans le premier cas qu'en

disposant d'une lentille L de focale bien plus grande. L’ajout d’un deuxième objectif réduit

ainsi considérablement l'encombrement du montage optique. Dans notre cas, la longueur

totale de l’ensemble optique nécessaire à élargir le faisceau laser n’excède pas 27 cm. Il

appartient néanmoins au manipulateur de faire correspondre (au mieux) les axes optiques de

tous ces éléments avec la direction du faisceau laser incident. La position relative des objectifs

doit être en outre correctement appréciée (en tenant compte de L) pour obtenir le résultat

souhaité.

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2.1.3 Le système de chargement

Le système de chargement est constitué d'un cadre métallique qui a été fixé à la croix.

Comme le montre la figure 4-4 une vis V1, en contact avec un mors, bloque verticalement

l’une des extrémités de la plaque au niveau de la partie inférieure du cadre. L’autre mors est

relié à une deuxième vis V2 qui elle même est solidarisée à un capteur de force et une tige

filetée. L’ensemble subit un mouvement vertical ascendant en serrant la molette sur la

figure 4-4. On engendre ainsi une force de traction F, dont la résultante est parallèle à l’axe

(V1V2) et l’intensité mesurable avec un voltmètre. Les têtes des deux vis peuvent se

positionner librement à l'intérieur des mors ce qui atténue considérablement les effets de

flexion hors plan indésirables. L’effort de traction est réparti suivant la largeur de la plaque au

niveau de sept vis qui relient l’éprouvette aux mors.

Figure 4-4 : Schéma du montage de traction

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Il est toujours possible de modifier légèrement l’orientation de la plaque en lui faisant

subir une petite rotation d’axe (V1V2). Notons également la présence de deux guides fixés

symétriquement par rapport à la fissure sur l’un des montants du cadre, comme l’indique la

figure 4-4. Ils permettent de corriger un léger écartement hors plan des lèvres de la fissure qui

apparaît lorsque le chargement est appliqué. Cet effet, difficilement contrôlable lors du

chargement, perturbe légèrement la symétrie du réseau de franges attendue pour un problème

en mode I idéalisé. Le chargement appliqué n’est en effet jamais totalement plan en pratique

et un léger mode III peut se superposer au mode I. On supprime "artificiellement" ce mode III

(sans modifier le mode I) en ramenant les lèvres à leur position initiale à l’aide de petites vis

(de pas très faible) montées au préalable sur les guides. On s’arrange alors pour qu’elles

exercent une poussée (opposée) sur les faces de l’éprouvette qui compense la résultante de

cisaillement hors plan engendré. Cette opération nécessite un pas de vis relativement faible.

2.1.4 Caractéristiques et préparation des éprouvettes

Les éprouvettes utilisées pour l'expérimentation ont toutes pour dimension plane

160 mm × 290 mm, avec une distance entre mors de 270 mm (voir figure 4-4). Elles ont été

réalisées dans deux matériaux différents de type fragile. Le PMMA est utilisé pour les

éprouvettes d’épaisseur 8 mm et 6 mm. L’éprouvette de 6 mm a été usinée avec une plaque

rectangulaire (de bonne planéité) que nous avons achetée chez un fabricant sous la marque

commerciale d’Altuglas CN. Il ne faut pas s’attendre néanmoins à ce qu’elle présente des

caractéristiques mécaniques (E, ν) identiques à l’éprouvette de 8 mm, qui provient d’une

plaque de Plexiglas qui était stockée au laboratoire. Le PMMA, dont on a rappelé quelques

propriétés mécaniques et optique au chapitre 2, est en effet hygroscopique. Les effets du

vieillissement se traduisent dans certains cas par une perte de l'eau absorbée qui durcit et

fragilise donc le matériau. Les éprouvettes de 8 et 6 mm seront appelées respectivement

PMMA(1) et PMMA(2). La dernière éprouvette en Araldite a une épaisseur de 5 mm.

L’Araldite est un matériau à comportement fragile qui présente de faibles effets

viscoélastiques. A l’inverse du PMMA, il est d’une grande sensibilité optique et notamment

hautement anisotrope optiquement [78].

Suite aux essais de traction réalisés par Tie Bie et Dupré avec les matériaux présentés

ci-dessus [60], nous regroupons table 4-1 les constantes mécaniques (E, ν) caractérisant nos

éprouvettes. Ces valeurs moyennes résultent des courbes contraintes-déformations obtenues

avec la méthode expérimentale du suivi de taches, décrite au chapitre 2. Il faut préciser

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également que les éprouvettes utilisées pour les essais de traction sont issues des plaques qui

ont servi à usiner les modèles fissurés. De plus la machine de traction permet de choisir la

vitesse de chargement qui est prise dans notre cas à 0,2 mm/minute. Ce choix est justifié afin

d'assurer un comportement comparable à celui d'une sollicitation statique.

Les modèles fissurés de type SEN ont été réalisés dans le but d'étudier un mode I de

chargement. Pour que l'étude puisse se dérouler dans de bonnes conditions, il est important

que les fissures conservent une direction perpendiculaire à l'effort de traction. Pour réaliser la

fissure nous disposons d'une lame aiguisée (i.e. lame du cutter) qui vient se loger dans une

entaille usinée au préalable sur l'un des cotés de l'éprouvette. Un léger choc sur la lame ainsi

guidée engendre une propagation de la fissure. On n'est certes pas assuré à chaque fois

d'obtenir le plan fissuré souhaité, perpendiculaire à la direction du chargement et aux faces

latérales de la plaque ; tout dépend bien sûr de la façon dont le coup est porté. Néanmoins, il

est possible d'utiliser accessoirement deux blocs de métal en U maintenus de part et d'autre de

l'éprouvette avec des serre-joints. Ils sont disposés de façon à entourer l'entaille initiale et

orientés selon la direction de propagation souhaitée, servant ainsi de guide. Après un premier

coup qui provoque un départ de la fissure sur une distance limitée, on libère l'éprouvette des

blocs. Le(s) coup(s) suivant(s) permet(tent) en général une propagation relativement contrôlée

de la fissure qui suit à quelques degrés près la direction souhaitée. Lorsque l'opération est

réussie, on constate que le front de fissure présente toujours une forme qui s'apparente à une

parabole, symétrique par rapport au plan médian de la plaque. La longueur de fissure retenue

se situe entre le tiers et la demi largeur de la plaque. Il convient, pour les manipulations en

mode I, de ne conserver que les éprouvettes dont les fissures s'approchent au mieux des

conditions géométriques précédentes. Tout écart important, même lorsque le chargement est

plan, engendre immanquablement l'apparition des modes II et III de fissuration.

PMMA(1) PMMA(2) Araldite

Epaisseur de la plaque en [mm] 8 6 5

Longueur de la fissure en [mm] 60 62 64

E en [MPa] 3000 2600 2830

ν 0,37 0,38 0,33

Table 4-1 : Caractéristiques mécaniques et géométriques des éprouvettes expérimentales

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Afin d’assurer une bonne réflexion de la lumière, la face avant des modèles fissurés

est recouverte au préalable d’une fine couche d’aluminium (dont l’épaisseur est inférieure à

50 nm). Ce dépôt est réalisé dans une chambre à vide, dans laquelle un fil d’aluminium est

vaporisé sur la face de la plaque. Les matériaux sont donc rendus totalement opaques et l'on

évite ainsi les réflexions sur la face arrière qui conduiraient à un réseau de franges inapproprié

pour notre étude. Il faut veiller enfin à conserver un état de surface propre en pointe de fissure

en évitant les traces de doigt ou toute rayure malencontreuse.

2.2 Démarche expérimentale

2.2.1 Estimation du facteur d'intensité de contraintes

Les éprouvettes précédentes sont chargées en contrôlant la force de traction appliquée

F qui se déduit aisément de la lecture du voltmètre. L'effort transmis dans une section droite S

de la plaque, après les mors, est représenté classiquement par une contrainte nominale

uniforme SFappl =σ qui sollicite la fissure en mode I. En se référant au chapitre 1, nous

sommes en mesure de donner une estimation du facteur d'intensité de contraintes SENIK appliqué, pour la configuration géométrique et le chargement présents. Rappelons que

la détermination de SENIK nécessite la connaissance d'une fonction ( )WV,WaY où a, W, V

sont respectivement la longueur de la fissure, la largeur et la longueur de l'éprouvette. Les

valeurs de ( )WV,WaY sont calculées table 4-2 pour les configurations géométriques

présentes. On a d'après (1.53) :

( ) aSFWV,WaYKSEN

I π= (4.1)

Notons qu'il est assez difficile de donner ici avec précision les valeurs des rapports

a/W et surtout V/W. La longueur effective des éprouvettes est prise à 270 mm, soit

approximativement un rapport 84,0W/V = . Il faut rappeler du reste que ce rapport influence

assez peu le résultat final lorsqu'il est compris entre 0,5 et 1. La table 4-2 regroupe les valeurs

de SENIK calculées pour nos trois éprouvettes en fonction des rapports a/W et V/W retenus et

de la force F enregistrée. On donne par la même occasion le taux de biaxialité B calculé dans

les trois cas.

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PMMA(1) PMMA(2) Araldite

F en [N] 1200 720 570

σappl en [MPa] 0,93 0,75 0,71

a/W 0,375 0,387 0,40

V/W 0,84 0,84 0,84

( )WV,WaY 1,98 2,05 2,12

B -0,56 -0,55 -0,54

]mmMPa[enKSENI 25,3 21,5 21,3

Table 4-2 : Facteur d'intensité de contraintes évalué en fonction de la force appliquée F et des

données géométriques relatives aux éprouvettes d'étude

2.2.2 Présentation des interférogrammes associés

Après avoir réglé l'interféromètre et la caméra CCD, on visualise sur le moniteur de

contrôle des franges d'interférence concentriques entourant la pointe de fissure. Elles

témoignent de la présence d'un puits qui creuse la surface de l'éprouvette de façon régulière à

l'approche de la pointe de la fissure. En ajustant la position du miroir de référence, les franges

observées sont rendues globalement symétriques par rapport à la fissure, comme on l'attend

du reste pour un problème en mode I. Néanmoins au voisinage des lèvres, la symétrie peut

être altérée à cause principalement du léger écartement hors plan des lèvres de la fissure (i.e.

le mode III). Il convient de réduire cet effet de bord, qui engendre un mode III résiduel, à

l'aide de la technique exposée au paragraphe 2.2.1. Pour ce faire un moyen efficace consiste à

visualiser en même temps une caustique sur un plan image virtuel. Lorsque le dispositif de

chargement est correctement réglé (pour engendrer un mode I suffisamment pur), la caustique

prend une forme bien symétrique par rapport à la fissure, identique à celle de la figure 3-5. Le

mode II a, quant à lui, très peu d'influence sur nos éprouvettes et ne perturbe pas la symétrie

du réseau de franges.

Nous montrons sur la figure 4-5 les interférogrammes réalisés en pointe de fissure

avec les trois éprouvettes d'étude précédentes, soumises respectivement aux forces de traction

F de la table 4-2. La fissure apparaît verticalement en haut ou en bas sur les images en

fonction de l'orientation de la caméra. Il s'agit en réalité de l'horizontale sur le modèle. La

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caméra est montée sur un support qui nécessite de la tourner d'un angle droit pour réaliser les

prises de vue, d'où l'orientation correspondante de la fissure sur les images. Sur la gauche, les

interférogrammes correspondent à un champ qualifié de large qui s'étend en partie sur la zone

2D présentée lors de l'étude théorique. Nous verrons par la suite que ces images sont

indispensables pour recaler les données expérimentales fournies par interférométrie. Un

élargissement de la zone d'étude initiale est possible en modifiant à la fois la position et le

réglage de l'objectif placé devant la caméra CCD. Il en résulte les images de franges montrées

sur la partie droite de la figure 4-5. Notons que ces images sont obtenues dans les mêmes

conditions expérimentales que pour le champ large, c'est à dire en veillant à ne pas bouger

l'interféromètre et le système de chargement. Il est intéressant de remarquer que les franges ne

se densifient pas en pointe de fissure et sont donc de ce fait exploitables à cet endroit.

Les franges sur la figure 4-5 rendent compte à la fois du relief de la surface latérale de

la plaque étudiée et de l’orientation de cette surface par rapport au miroir de référence. Notons

que chaque saut de frange représente une élévation du relief de 257 nm (avec notre laser).

Généralement, pour une surface non déformée et suffisamment plane (typiquement un

miroir), seules des franges rectilignes et parallèles sont visibles. Les deux phénomènes sont en

fait couplés et nous verrons que l’analyse des franges d’interférence ne donne pas directement

la contraction de la surface du modèle, due au chargement uniquement. On peut en outre

vérifier expérimentalement le caractère fragile des matériaux utilisés. Lorsque les éprouvettes

sont déchargées, la variation de relief devient négligeable en pointe de fissure. En orientant le

miroir de référence parallèlement à la surface d'une éprouvette, on observe alors une teinte

quasiment uniforme, où très peu de franges sont visibles dans les zones d'étude précédentes.

On en déduit que la zone plastique, où les déformations sont permanentes, reste très réduite et

n'influence pas les mesures qui suivent.

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Figure 4-5 : Interférogrammes obtenus en pointe de fissure (champ large et champ zoomé)

2.2.3 Détermination du facteur de grandissement

Les distances réelles, relatives aux objets (i.e. les éprouvettes fissurées), sont évaluées

à l'aide d'un réseau de traits transparent de pas constant (croisés ou non), que l'on superpose

sur chacune des images de franges. On constitue ainsi six images de référence, dont celles

associées au PMMA(2) sont montrées sur la figure 4-6 à titre d'exemple. Le pas réel vertical

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du réseau, noté PV vaut 1 mm dans les deux cas. Les images enregistrées par la caméra sont

codées en 8 bits (256 niveaux de gris) sur une matrice 512 × 512 pixels. Comme on peut le

voir la figure 4-6 on associe habituellement un repère ( )J,I,O

à l'image traitée, ce qui permet

de repérer les points images (i.e. les pixels) par les coordonnées entières (xpix, ypix) avec

512y,x0 pixpix <≤ . Notons que les pixels sont rectangulaires avec un rapport hauteur/largeur

constant noté γc qui dépend de la caméra utilisée ; soit ici 0,71. La hauteur et la largeur d'un

pixel sont définies pour nos images respectivement suivant la direction I

et J

. On

remarquera d'ailleurs un allongement vertical des images présentées (proportionnelles aux

originales) dû à la caméra CCD.

Les images de référence nous servent à déterminer le facteur de grandissement γ,

défini comme le rapport d'une longueur réelle (en mm par exemple) sur l'objet étudié sur sa

longueur effective dans le plan image (en pixels). L'exploitation des réseaux de franges se fait

quantitativement par une analyse numérique points par points des images associées qui

nécessite la connaissance de ce facteur, afin d'attribuer chacune des valeurs calculées sur

l'image au point correspondant sur la face de la plaque.

Figure 4-6 : Images de référence pour le PMMA(2) avec un réseau croisé millimétré

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Afin de limiter les erreurs de mesure, il convient de déterminer γ en comptant n traits

du réseau sur une distance DI assez grande de l'image. Il vient alors :

I

V

DPn

=γ (4.2)

où DI est évaluée dans notre cas en nombre de pixels selon la direction J

, soit par exemple

figure 4-6 DI ≅ 506 pixels et n = 15.

Considérons en outre les variations de longueur pixx∆ ou pixy∆ prises respectivement

selon les directions I

ou J

du plan image, les valeurs correspondantes réelles x∆ et y∆ sont

données par la relation :

∆γ=∆γ∆γ=∆

pixc

pix

yyxx (4.3)

2.2.4 Mise en œuvre de la méthode quasi-hétérodyne

L’analyse des franges d'interférence se fait au moyen du logiciel Interf 32 qui calcule

la phase en tout point de l'image par quasi-hétérodynage (cf. chapitre 3). La mise en œuvre de

la méthode avec le logiciel nécessite la prise de trois images déphasées (enregistrées au

préalable). Après avoir fourni certains paramètres d'entrée dont notamment les

caractéristiques optiques du montage (la longueur d'onde λ de la source, la valeur λ/2 de

l'interfrange), les grandissements γ et γc, l'utilisateur accède alors au relief de la plaque sur la

zone d'étude.

Pour chacun des modèles fissurés, on réalise une série de trois images déphasées, en

champ large et en champ zoomé, à l'aide d’un système de contrôle agissant sur la lame piézo-

électrique. Les images obtenues sont qualitativement identiques à celles de la figure 4-5 et ne

seront donc pas présentées ici. Précisons qu'un déphasage relativement uniforme pour tout le

réseau de franges considéré, est obtenu en translatant le modèle étudié perpendiculairement au

plan de référence choisi pour évaluer initialement le relief de la surface [63]. Dans notre cas le

déphasage recherché est effectué de manière similaire par simple translation du miroir de

référence. La lame piézo-électrique assure précisément cette opération en conservant la

direction d'origine du miroir (établie lors du réglage) et donne le résultat souhaité.

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La figure 4-7 montre le résultat du calcul effectué par le logiciel avec les six cas

d'étude précédents. Le relief est présenté sous la forme d'isovaleurs du déplacement hors plan

données en µm, à partir d'un point de référence PR où débute le recalage de la phase.

L'utilisateur impose une valeur de la phase en ce point qui est par défaut le pixel (128, 128).

On prend habituellement 0° pour la phase, ce qui donne alors une valeur nulle pour le relief à

cet endroit. Par la même occasion, le plan de référence servant à donner les résultats du calcul

est fixé. On justifie de ce fait les valeurs positives ou négatives prises par le déplacement hors

plan par rapport à ce plan sur la figure 4-7. Précisons ici que pour recaler correctement la

phase, il convient d'ajouter sur les images de franges un trait noir sur la fissure afin de

matérialiser suffisamment la discontinuité lors du calcul. Les zones noires correspondent aux

points où des valeurs aberrantes ont été automatiquement exclues en raison par exemple de la

densité des franges ou de la présence d'impuretés localisées.

Les profils correspondants sont observés en niveaux de gris sur la figure 4-8 selon une

ligne horizontale AB située devant la pointe fissure. Les valeurs incohérentes sont écartées à

l'aide d'un masque en leur imposant une valeur nulle.

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Figure 4-7 : Déplacement hors plan en [µm] calculé par quasi-hétérodynage en pointe de

fissure.

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Figure 4-8 : Profils associés aux interférogrammes de la figure 4-7 le long d'une ligne

AB située devant la pointe de fissure

Le logiciel permet de sauvegarder, sous la forme de fichiers de données, les valeurs

réelles du relief calculées (par rapport à la référence choisie) figure 4-7, à partir des

paramètres imposés par le montage interférométrique. On notera par la suite ces valeurs wexp.

Les fichiers donnent typiquement les coordonnées des pixels appartenant à la zone de calcul

et les valeurs de wexp associées. Il est possible en outre de récupérer les pixels le long de

segments dont les extrémités sont fixées par l'utilisateur. Nous procéderons de la sorte pour

traiter les données expérimentales fournies par l'interférométrie. En faisant correspondre l'une

des extrémités d'un segment avec la pointe de fissure, on obtient ainsi les valeurs de u3 suivant

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une direction radiale du repère polaire classiquement utilisé en mécanique de la rupture (cf.

chapitres 1 et 2). L'exploitation des données ainsi recueillies n'est pourtant pas directe à cause

principalement des grandissements γ et γC et des plans de référence arbitrairement introduits

lors des calculs. Elle nécessite une étude préalable qui fait l'objet des paragraphes suivants.

2.3 Exploitation des données calculées par la méthode quasi-hétérodyne

2.3.1 Etude préliminaire

Comme le montre la figure 4-9, on associe systématiquement par la suite le repère

( )J,I,O

aux images calculées par Interf 32. Avec les notations du paragraphe 2-2-3, à chaque

pixel de coordonnées entières (xpix, ypix) du plan image, correspond une valeur du relief

( )pixpixexp y,xw donnée en µm par rapport à la référence de calcul. La pointe de fissure est

repérée sur l'image par le pixel ( )pixf

pixff y,xP . L'une des fonctionnalités du logiciel Interf 32

est d'offrir la possibilité à l'opérateur d'obtenir interactivement les coordonnées d'un point, en

positionnant la souris sur le point concerné. Cette identification se fait en pratique (pour plus

de précision) à l'aide de l'image de franges correspondante figure 4-5. La position de la fissure

est évidemment strictement identique dans les deux cas.

pixfy

pixfx

0x

Pf

0y

Pint

I

J

O

1x

1yFissure

M(x1, y1)

Image calculée

α

pixfy

pixfx

0x

Pf0y

Pint

I

J

O

1x

1y

α

Image calculée

M(x1, y1)

Fissure

pixintx pix

intx

Fissure en haut Fissure en bas

Figure 4-9 : Représentation des différents repères associés aux images enregistrées

De même, on repère ( )pixint

pixintint y,xP qui représente l'intersection de la fissure avec le

bord inférieur ou supérieur de l'image. On tiendra compte pour la suite d'une faible inclinaison

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de la fissure par rapport à la verticale qui est la position idéale de la fissure sur l'image

(l'horizontale en réalité). Les écarts enregistrés résultent de la réalisation expérimentale de la

fissure. Dans un second repère ( )00f y,x,P , dont l'orientation est précisée figure 4-9, la

position réelle d'un point M(x0,y0) est alors donnée par (4.3) :

γγ−ε=γ−ε=

cpixf

pixM0

pixf

pixM0

)xx(y)yy(x (4.4)

où ε vaut +1 ou –1 lorsque la fissure coupe respectivement le bord supérieur ou inférieur de

l'image traitée. Le passage entre ces deux configurations fait tourner le repère ( )00f y,x,P de

l'angle +π.

Considérons maintenant le repère d'étude ( )11f y,x,P directement associé à la fissure,

pour lequel l'axe 1x suit le prolongement de la fissure. Ce repère a même orientation que

( )00f y,x,P et fait un angle α réel avec ce dernier qui est donné par :

( )( ) ] [2,2,1

yyxx

tgc

pixint

pixf

pixint

pixf ππ−∈α

γ−

−=α (4.5)

La formule (4.5) donne un angle α positif pour les deux configurations présentées

figure 4-9. Au contraire α devient négatif si pixint

pixf xx < et pix

intpixf xx > lorsque la fissure est

située respectivement en haut et en bas de l'image. Il faut préciser ici que les angles α calculés

sur la zone d'analyse sont inférieurs à 4°. On obtient alors les composantes réelles ( )11 y,x de

M dans le repère associé au fond de fissure par l'expression classique :

α+α−=α+α=

001

001

ycosxsinyysinxcosx

(4.6)

Pour chacune des images calculées figure 4-7, on constitue une série de fichiers de

données à partir de Interf 32 en sélectionnant des demi-droites issues de la pointe de fissure à

intervalle angulaire régulier (une vingtaine en général). Il faut toujours veiller à conserver le

même intervalle angulaire apparent entre les demi-droites choisies pour le champ large et le

champ zoomé, afin de pouvoir recaler par la suite les valeurs de wexp associées. Les fichiers

ainsi créés peuvent être directement traités avec le logiciel Maple V. Nous y avons

programmé une routine, à l'aide des relations (4.4), (4.5), (4.6) qui transforme

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systématiquement les coordonnées des points (en pixels) associés aux directions radiales

récupérées en coordonnées cartésiennes réelles (x1, y1) données dans le repère d'étude

( )11f y,x,P . On calcule alors les coordonnées polaires (R = r/t, θ) normalisées associées à (x1,

y1), où t représente la largeur de l'éprouvette considérée.

Pour résumer, on applique le changement de coordonnées suivant :

( )( ) 512y,x0,

y,xy,xRR pixpix

pixpix

pixpix<≤

θ=θ= (4.7)

qui permet de passer d'un point du plan image à son homologue réel dans le repère associé à

la pointe de fissure, avec ( ) ( )θ≡ ,Rwy,xw exppixpix

exp .

2.3.2 Détermination du plan de référence, calcul de KI

Rappelons que le plan de référence choisi par l'utilisateur lors du calcul de wexp est fixé

arbitrairement à l'aide d'un point référent Pr Les valeurs de wexp (positives ou négatives selon

l'endroit où a été effectué le calcul) dans la zone d'étude sont donc relatives à ce plan. Il

convient de les transformer de manière à représenter le déplacement hors plan recherché, qui

doit résulter uniquement du chargement de l'éprouvette. Par ailleurs les données wexp incluent

implicitement la position encore inconnue de la plaque par rapport au miroir M. En effet une

surface non déformée (i.e. une plaque non chargée) engendre un réseau de franges parallèles

régulièrement espacées si elle n'a pas précisément même orientation que le miroir. Ces

franges témoignent d'une variation linéaire de relief qu'il est difficile voire impossible d'éviter,

lors du chargement. Afin d’en tenir compte, l’équation d’un plan de référence est introduite

dans cette partie.

On considère pour cela le repère orthonormé ( )z,y,x,Pf dont l’origine Pf coïncide avec

le vertex du modèle fissuré (cf. chapitres 1 et 2). Les axes x et y sont associés à la surface

libre et correspondent maintenant au repère d'étude ( )11f y,x,P défini au paragraphe

précédent. En introduisant les coordonnées cylindriques normalisées associées (R = r/t, θ, z),

où t est l’épaisseur de la plaque, la position du plan de référence dans ce système est

représentée par :

0yxref u)sin(Rp)cos(Rpz),R(w +θ+θ==θ (4.8)

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Les quantités px et py dénotent respectivement les pentes du plan de référence par

rapport à l’axe x et à l’axe y dans le système de coordonnées (R, θ, z). On notera que les

paramètres px et py ainsi définis ont la dimension d'une longueur. Une translation du plan de

référence normal au plan x-y est représentée par le paramètre u0.

En suivant les résultats numériques du chapitre 2, on peut considérer un état de

contraintes planes 2D prédominant en pointe de fissure lorsque 5,0R > . De plus la solution

de Williams, qui décrit alors le champ de contraintes, peut se réduire à l'expression

asymptotique classique de l'expression (1.52) dans une couronne centrée en pointe de fissure

dont la limite supérieure Rlim dépend typiquement de la géométrie de l'éprouvette. L'analyse

par éléments finis du premier chapitre avait d'ailleurs permis de donner une estimation de

cette limite pour l'éprouvette SEN en fixant typiquement t10aR < . Cette condition

s'applique néanmoins lorsque la longueur a de la fissure est comprise entre le tiers et la demi

largeur de la plaque. Nous prenons ici Rlim = (0,7 ; 0,9 ; 1) respectivement pour le modèle en

PMMA(1), en PMMA(2) et Araldite. On définit ainsi une région 2D bornée en pointe de

fissure dans laquelle nous noterons ici wpl l'expression asymptotique du déplacement hors

plan de la surface libre de la plaque. Soit d'après (1.40) en choisissant de prendre les z>0 vers

l'intérieur du modèle :

( )

( )2tB

Ewavec

wR2

12

cosE

tKz,Rw

appl0

0

21I

pl

σν

=

θν

==θ (4.9)

où, KI représente le facteur d’intensité de contraintes en mode I, considéré ici comme un

paramètre. E et ν sont respectivement le module de Young et le coefficient de Poisson des

modèles fissurés donnés table 4-1. La contrainte appliquée σappl et le taux de biaxialité B sont

également connus (cf. table 4-2).

Lorsque limRR5,0 << , les expressions (4.7) et (4.8) sont reliées aux valeurs wexp

calculées par Interf 32 de la manière suivante :

),R(w),R(w),R(w refplexp θ+θ=θ (4.10)

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- 140 -

L'équation (4.10) permet de recaler les données wexp avec la solution théorique 2D (i.e.

wpl), qui est supposée toujours exister dans la zone limRR5,0 << . Il s'agit donc maintenant

de déterminer les quatre paramètres introduits par les équations (4.8) et (4.9), à savoir px, py,

u0 et KI. Pour ce faire nous avons écrit une routine sur Maple V qui sélectionne les valeurs

discrètes ( )ikexp ,Rw θ , provenant des fichiers crées avec Interf32, en imposant la condition

] [limk R;5,0R ∈ . Précisons que les points qui donnent des valeurs aberrantes sont

automatiquement écartés par le programme, quel que soit Rk. Chaque fichier regroupe ainsi

les déplacements ( )ikexp ,Rw θ calculés selon une direction angulaire θi particulière prise

dans l'intervalle ( ) ( )] [ε−πε−π− ; . Cette procédure ne nécessite en outre que les informations

provenant des images d'interférence réalisées en champ large. En pratique, on écarte de

l'analyse les données localisées dans un secteur angulaire ] [εε− ; qui recouvre les lèvres de la

fissure : c'est en effet à cet endroit que les effets du mode III sont les plus sensibles.

Soit plus précisément un angle θ1, pour lequel M1 valeurs de wexp satisfont les

conditions énoncées précédemment. On crée ainsi un vecteur B1 contenant M1 éléments

wexp(Ri , θ1) avec ( )1M..1i = . Correspondant au vecteur B1, une matrice A1 de M1×4 est

obtenue en utilisant le membre de droite de l'équation (4.10). En répétant cette procédure avec

N angles θj linéairement distribués dans l'intervalle ( ) ( )] [ε−πε−π− ; , une série de N vecteurs

Bj et N matrices Aj sont ainsi crées (j=1..N). Les vecteurs Bj , constitués de Mj éléments, sont

alors réunis pour donner le vecteur ( )TN321 BBBBB ,...,,,= , contenant

M= )M( N1j j∑ = éléments. De la même façon, une matrice A associée est obtenue en joignant les

sous-matrices Aj. Cette matrice qui contient alors M×4 éléments se présente sous la forme :

=

N

3

2

1

A ...

A A A

A

La détermination des quatre paramètres introduits précédemment se fait par la

résolution du système matriciel linéaire surdéterminé :

A X = B (4.11)

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où le vecteur inconnu X s'écrit ( )TI0yx K,U,p,p avec 000 wuU += d'après (4.9).

La résolution du système (4.11) a été réalisée avec les valeurs numériques données table

4-1 pour les trois éprouvettes expérimentales. Les paramètres ainsi calculés sont regroupés

table 4-3. Nous avons retenu 19 ou 25 valeurs θi pour θ, prises dans un intervalle angulaire

dont la taille varie de [ ]°°− 120;120 à [ ]°°− 170;170 , soit tous les 10° ou 20° en moyenne.

Pour le champ large, il faut traiter ainsi 19 ou 25 fichiers de données, qui fournissent chacun

les valeurs du relief ( )ikexp ,Rw θ selon les 19 ou 25 directions θi choisies avec bien sûr la

condition ] [limk R;5,0R ∈ . Au final, il en résulte une matrice A qui contient généralement

plus de 3000 éléments. L'orientation d'une demi-droite issue de la pointe de la fissure est

accessible au degré près avec le logiciel Interf 32. La valeur de θ qui en résulte est néanmoins

donnée à l'aide des coordonnées (en pixels) des points images considérés. Elle sera donc

recalculée (cf. paragraphe 2.3.1) et convertie en valeur réelle correspondante dans le repère

( )y,x,Pf avant le traitement des données associées.

PMMA(1) PMMA(2) Araldite

w0 en [µm] -0,25 -0,18 -0,11

U0 en [µm] 2,6 1,8 2

px en [µm] 0,71 0,34 1,2

py en [µm] 0,43 -0,08 0,22

u0 en [µm] 2,35 1,62 1,89

mmMPaenK I 26,67 22,11 20,21

Table 4-3 : Valeurs numériques des paramètres px , py , u0 et KI

On observe en règle générale une stabilité correcte des valeurs présentées ci-dessus en

modifiant l'intervalle sélectionnant les donnés wexp. Notre programme permet de changer en

effet les bornes de [ ]limR;5,0 . Ainsi une variation limR∆ de ±10 % entraîne une modification

de la valeur de KI calculée de l'ordre de ±1 % à ±2 % selon le modèle. On est en droit

également de s'interroger sur la stabilité de KI vis à vis de la borne inférieure de l'intervalle, à

savoir 0,5. En effet cette valeur ne résulte pas d'un calcul, mais plutôt d'une estimation basée à

la fois sur les résultats numériques du chapitre 2 et les observations expérimentales de

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Rosakis et Ravi-Chandar [49]. Là encore en prenant (0,5 ±0,05) on observe une variation de

KI du même ordre de grandeur que précédemment. La situation se dégrade lorsque l'on réduit

cette valeur de façon plus significative, preuve que les effets 3D s'accentuent. Il paraît

cependant relativement difficile de quantifier précisément la séparation entre la zone 2D et la

zone 3D qui du reste s'opère de façon progressive. Nous conserverons donc la valeur 0,5 qui

est représentative de cette zone de transition. Une comparaison avec les résultats obtenus pour

KI table 4-3 et table 4-2 donne une erreur relative qui n'excède pas 5%.

Il faut disposer cependant pour le calcul d'un nombre suffisamment important de

données, réparties dans la zone 2D de façon homogène. Lors de la sélection des demi droites,

on se réfère toujours à la direction de la fissure (i.e. θ = 0) qui n'est pas perturbée par le mode

III. Rappelons en effet ici l'expression 2D du déplacement hors plan qui correspond à un

chargement en mode III pur d'une plaque élastique [26] :

[ ]2

sin/r2G

Kw 21III θπ= (4.12)

où KIII est le facteur d'intensité de contraintes en mode III et ( )12EG +ν= le module de

cisaillement.

Les résultats de la table 4-3 devraient être théoriquement indépendants à la fois du

nombre de demi droites utilisé pour extraire les déplacements et de leurs positions relatives

dans la zone 2D. En pratique, il en est approximativement ainsi lorsque les directions radiales

"partitionnent" suffisamment la zone 2D considérée, corrigeant de ce fait considérablement

les erreurs éventuelles dues par exemple à des défauts de planéité localisés de la surface avant

chargement. En outre il faut éviter de prendre en compte la zone angulaire proche des lèvres

de la fissure sujette de façon plus significative au mode III résiduel. De plus à cet endroit, le

déplacement hors plan, associé au mode I uniquement, devient relativement faible à l'inverse

de (4.12) qui peut être prépondérant. Ces remarques ont motivé les choix qui ont été faits pour

les calculs précédents. On a pu vérifier dans ce cas que le retrait ou le remplacement de l'une

ou l'autre des courbes modifiait globalement très peu les valeurs de KI.

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2.3.3 Représentation du déplacement hors plan en pointe de fissure

Considérons à présent la relation (4.10). Les valeurs [ ]( )ikrefexp ,Rww θ− donnent

une discrétisation du déplacement hors plan recherché qui résulte uniquement du chargement

en mode I. Remarquons alors que l'on accède ainsi au déplacement hors plan dans la zone 3D

lorsque Rk < 0,5. Afin d'obtenir des informations plus précises au voisinage immédiat de la

pointe de fissure, nous utilisons également les valeurs calculées par Interf 32 à partir des

interférogrammes enregistrés en champ zoomé. On constitue des fichiers de données suivant

le même principe que ceux qui ont été établis pour le champ large. Un traitement avec

Maple V conduit alors à une représentation du relief sous la forme d'une fonction

( )ikexp ,Rw θ∗∗ dans le repère réel en pointe de fissure. Rappelons que l'on récupère les valeurs

calculées ( )ikexp ,Rw θ∗∗ suivant les directions angulaires θi fixées par le champ large (avec

i=1..19 ou i=1..25 selon les éprouvettes considérées). Il revient donc à l'expérimentateur de

bien respecter la condition précédente lors de l'établissement des fichiers de données.

Cependant comme nous l'avons vu précédemment pour le champ large, les valeurs

( )ikexp ,Rw θ∗∗ ne représentent pas encore le déplacement hors plan recherché. Il convient donc

ici de les recaler avec les valeurs précédentes [ ]( )ikrefexp ,Rww θ− . Le recalage est possible

lorsque le champ zoomé possède une zone commune Ic avec le champ large. Nous avons ainsi

programmé sur Maple V une routine qui extrait les données qui proviennent des deux champs

et qui se trouvent dans la couronne commune [ ]maxcmincc R;RI = . Pour le champ large et le

champ zoomé, on récupère ainsi respectivement les quantités [ ]( )ikrefexp ,Rww θ− et

( )ikexp ,Rw θ∗∗ avec ckk IR,R ∈∗ . Trois directions angulaires θi privilégiées et suffisantes en

pratique ont été retenues pour le recalage, à savoir 0 et ±π/2. On réalise une interpolation

linéaire des six "courbes" formées par les couples de points [ ]( )( )ikrefexpk ,Rww,R θ− ou

( )( )ikexp*k ,Rw,R θ∗∗ . Autrement dit d'un ensemble de points discrets constituée par exemple des

couples ( )( )2/,Rw,R kexp*k π∗∗ , on obtient une droite continue dans l'intervalle Ic qui varie en

fonction de R. Il faut néanmoins considérer un intervalle Ic qui ne soit pas trop étendu (ou le

réduire en conséquence) pour que l'approximation linéaire ait un sens. Les données sont alors

recalées lorsque le système suivant est vérifié :

( ) ( ) ( ) 0uuu)sin(Rppp)cos(Rppp 02010iy2y1yix2x1x =−++θ−++θ−+ ∗∗∗ (4.13)

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où 2/,2,0i π−π=θ . Les pentes p1x, p1y et la constante u01 résultent des interpolations

linéaires réalisées à partir des données provenant du champ zoomé. Il en est de même pour les

valeurs de référence p2x, p2y et u02 obtenues à partir du champ large. Les "corrections" ∗∗0

*yx u,p,p sont déterminées, en minimisant le système (4.13) pour les inconnues précédentes,

après discrétisation de la variable R, identique pour les champs larges et zoomés, dans

l'intervalle Ic. Nous rappelons le principe de minimisation d'une fonction en annexe B.

Pour le champ zoomé, on aboutit à une discrétisation du déplacement hors plan

recherché, selon les angles θi choisis, qui s'écrit :

[ ]( )

∗∗∗∗∗∗

+θ+θ=θ

θ+

0ikyikxik*ref

ik*exp

*ref

u)sin(Rp)cos(Rp),R(wavec

,Rww (4.14)

On regroupe les données des deux champs en notant finalement

l'ensemble ( )ijD3 ,Rw θ . Les deux ensembles sont réunis en ordonnant les couples de données

selon les valeurs croissantes de R dans la zone commune avec un algorithme de tri classique.

Les valeurs de ( )ijD3 ,Rw θ sont représentées figure 4-10 par de petits cercles, pour

quelques angles θi pris parmi les 19 ou 25 valeurs utilisées au départ. Les cercles ont un grisé

différent selon qu'ils représentent les données provenant du champ large ou du champ zoomé.

Les courbes en pointillés, indiquent le déplacement hors plan 2D pour les mêmes angles.

Comme attendu, lorsque R>0.5, une bonne correspondance est observée entre la

représentation théorique 2D du déplacement hors plan et les valeurs obtenues pour

( )ijD3 ,Rw θ . Au contraire, lorsque R<0,5 les courbes issues des données expérimentales

montrent clairement une divergence importante avec la théorie 2D : on se trouve typiquement

dans la zone 3D.

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Figure 4-10 : Représentations du déplacement hors plan w3D

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2.4 Comparaison avec les résultats de l'analyse numérique

Nous proposons pour le PMMA(2), figure 4-11, une comparaison des résultats

expérimentaux précédents avec les valeurs du déplacement hors plan calculées par éléments

finis au chapitre 2. La comparaison est montrée ici pour trois directions angulaires. La valeur

de KI calculée table 4-3 ainsi que les caractéristiques mécaniques et géométriques de

l'éprouvette table 4-2 ont fourni les paramètres d'entrée nécessaires au fonctionnement du

programme. Nous avons alors recherché la fissure parabolique qui semblait la mieux adaptée

pour reproduire les données expérimentales. Il en résulte les paramètres (Xmax, courb) =

(0,05 ; 8) qui ont servi aux calculs présentés chapitre 2. Une démarche identique conduit à des

résultats comparables pour les deux autres types d'éprouvettes.

Figure 4-11 : Comparaison avec le modèle numérique pour le PMMA(2)

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3. EXPRESSION THEORIQUE DU DEPLACEMENT HORS PLAN

Les résultats expérimentaux précédents vont nous servir à donner une expression

mathématique du déplacement hors plan du bord libre de la plaque, valide dans la région 3D

entourant la pointe de fissure. Avec à nouveau le système de coordonnées (R, θ, z), nous

proposons d'utiliser l'expression suivante pour représenter le déplacement hors plan :

( )

π−θ+θ

ν==−θ −

R21)e1()2/cos()Ra,2(Eb

EtKzw),R(w Rc

I

5.I

0thD3 (4.15)

où la constante w0 est donnée table 4-3 pour chacun des modèles fissurés. Dans l'expression

(4.15), b et c sont des constantes inconnues et a(θ) une fonction inconnue de θ. EI est une

fonction exponentielle intégrale d'ordre 2 qui assure une transition continue avec l'expression

(4.9) lorsque R > 0.5 et borne le déplacement quand R tend vers zéro. Quelques propriétés

mathématiques des fonctions exponentielles intégrales sont présentées en annexe A. La

fonction EI(2,R) s'exprime explicitement sous la forme :

)0R(,dtt

e)R,2(E1

2

tR

I >∫=∞ −

(4.16)

Les constantes b, c et a(θ) sont déterminées en identifiant l'expression (4.15) et les

données expérimentales ( )ijD3 ,Rw θ . Lorsque θi = 0, on considère tout d'abord le système

d'équations suivant :

)N..1j(,0)0,R(w)0,RR,c,b,a(w)c,b,a(f ijD3jthD3j ===θ−=θ== (4.17)

où 0 < R1 < R2 < R3 < ... < RN < Rlim et a(0) est noté simplement a. Les Rj représentent les

abscisses croissantes des N points expérimentaux qui apparaissent sur les courbes de la figure

4.10 lorsque θi = 0°. N n'est par ailleurs pas forcément identique pour les trois cas d'étude.

Une méthode de minimisation telle que la méthode de Newton (cf. Annexe B) peut être

appliquée afin de trouver un minimum local de la fonction :

∑ ===

N

1i

2i )c,b,a(x,)x(f)x(F (4.18)

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Avec des valeurs initiales appropriées la méthode converge vers une solution

présentée table 4-4 pour les trois éprouvettes étudiées. En connaissant les coefficients b et c,

des calculs similaires sont repris cette fois avec le seul paramètre inconnu ( )ia θ pour les

différents angles θi donnant ( )ijD3 ,Rw θ . On détermine ainsi un ensemble de points (19 ou 25

ici) qui donnent l'évolution de la fonction a(θ) dans l'intervalle ] [ππ− ; . Les évolutions sont

présentées pour les trois modèles fissurés figure 4-12.

Finalement en utilisant une technique d'interpolation classique, on montre que la

fonction a(θ) peut se représenter à l'aide du développement suivant :

( ) θ+θ+θ+=θ 34

2321 cosAcosAcosAAa (4.19)

où les Ai ont été calculés pour chacune des éprouvettes et sont regroupés table 4-4. La

fonction (4.19) est une fonction paire de θ sur l'intervalle ] [ππ− ; , comme l'impose la

symétrie du problème. La relation (4.15) prévoit que les coefficients de la table 4-4 soient

sans dimension. Il semble néanmoins que la nature de l'éprouvette, voir le chargement

influencent leurs valeurs avec globalement une valeur constante pour c. Malheureusement ici

nous ne pouvons en donner une signification physique précise qui exigerait du reste un

nombre plus important d'expérimentations avec divers types de matériaux.

Le tracé de la forme théorique (4.15), associé à (4.19) et aux valeurs numériques table

4-4 est donné figure 4-13 en trait plein pour quelques angles θi. Elle reproduit correctement le

déplacement hors plan expérimental w3D, attestant du bon fonctionnement de la démarche

proposée.

PMMA(1) PMMA(2) Araldite

a 15,06 10,75 5,38

b 11,61 9,55 6,74

c 0,99 0,95 0,86

A1 11,73 10,45 9,18

A2 7,42 1,45 1,62

A3 -1,43 -2,74 -4,63

A4 -2,87 1,56 -0,68

Table 4-4 : Evolution des paramètres intervenant dans les relations (4.15) et (4.19)

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Figure 4-12 : Evolution de a(θ) dans l'intervalle ] [ππ− ;

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Figure 4-13 : Comparaison entre le déplacement théorique (4.15) et les valeurs

expérimentales w3D pour différentes valeurs angulaires

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4. CONCLUSION

Dans ce chapitre, une méthode hybride combinant l'interférométrie, la méthode quasi-

hétérodyne et les résultats théoriques 2D a été présentée en vue de déterminer le déplacement

hors plan de la surface libre d'une plaque élastique fissurée chargée en mode I. Les

expérimentations ont été conduites avec trois éprouvettes particulières, deux en PMMA et une

troisième en Araldite. Pour chacune des éprouvettes, deux séries d'interférogrammes ont été

recueillies en vue d'obtenir les valeurs expérimentales du déplacement à la fois au proche

voisinage de la fissure et dans la zone 2D classique.

Un recalage des données interférométriques est dès lors possible dans la zone 2D

lorsque le champ d’interférence est suffisamment étendu (i.e. un champ large) pour couvrir en

partie cette zone. L’interférométrie donne en effet les variations de relief sous la forme d’un

réseau de franges, à un plan de référence près. Le plan de référence est déterminé en recalant,

dans la zone 2D, les valeurs calculées pour le relief, le long d’une série de demi droites issues

de la pointe de fissure avec l’expression 2D théorique du déplacement hors plan. Nous

sommes ainsi conduits à résoudre un système d’équations surdéterminé à quatre inconnues. Il

convient de disposer d’un nombre de données suffisantes afin d’assurer une bonne stabilité du

système. On détermine par suite à la fois le plan de référence inconnu et le facteur d’intensité

de contraintes associé au champ de contraintes 2D. La connaissance du plan de référence

permet alors d’obtenir le déplacement hors plan recherché, qui résulte du chargement en mode

I uniquement. Afin d’obtenir de plus amples informations sur le déplacement hors plan au

proche voisinage de la pointe de fissure, nous utilisons les images de franges obtenues en

zoomant considérablement cet endroit avec l’objectif de la caméra (i.e. le champ zoomé). Les

valeurs donnant le relief sont alors recalées à l’aide des courbes obtenues pour le champ large

(qui elles mêmes sont déjà recalées) en calculant à nouveau un plan de référence convenable.

La méthode proposée permet de mesurer par conséquent le déplacement hors plan non

seulement à l'intérieur de la zone 2D classique mais également au proche voisinage de la

pointe de fissure où les effets tridimensionnels ne sont plus négligeables. Nous donnons

finalement une nouvelle expression du déplacement faisant intervenir une fonction

exponentielle intégrale. Cette expression est paramétrée par six coefficients qui dépendent du

matériau étudié. L'évolution du déplacement issu des données expérimentales est parfaitement

reproduite avec la formulation proposée.

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CCHHAAPPIITTRREE 55

APPLICATION A L'EXPLOITATION DE LA METHODE DES CAUSTIQUES.

«Sculpteur, cherche avec soin, en attendant l'extase,

Un marbre sans défaut, pour en faire un beau vase…»

Théodore De Banville (1846).

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1. INTRODUCTION

Avec la connaissance d'une nouvelle expression pour le déplacement hors plan, nous

pouvons maintenant modifier les expressions classiques du chapitre 3 décrivant la formation

d'une caustique appartenant à un plan image donné. Il apparaît en effet une différence

qualitative notable en comparant les caustiques expérimentales obtenues en réflexion et les

épicycloïdes idéalisées qui résultent de l'analyse 2D. Ainsi la courbe lumineuse donnant la

caustique expérimentale figure 3-5 n'est certainement pas fermée et s'efface, comme on peut

le remarquer, progressivement vers l'avant. En outre plusieurs campagnes d'essais nous

avaient clairement montrés en début de thèse, que pour des plans images relativement proches

du modèle fissuré, la formulation (3.26) ne donnait pas une estimation correcte du facteur

d'intensité de contraintes KI à partir des caustiques enregistrées. Bien au contraire lorsque les

plans images se rapprochaient de l'éprouvette, nous observions, au lieu de la constante

attendue, une décroissance progressive des valeurs calculées pour KI !

Ce chapitre débute par une simulation numérique des caustiques obtenues avec

l'expression 3D proposée pour le déplacement hors plan, pour un plan image donné. Nous

présentons ensuite un algorithme de calcul qui recherche systématiquement les diamètres

transverses des caustiques ainsi formées. Cette démarche entreprise pour l'Araldite, conduit

alors dans ce cas à une reformulation de la loi (3.26). L'évolution proposée doit permettre de

déterminer correctement le facteur d'intensité de contraintes, quelle que soit la distance du

plan image au modèle fissuré.

2. SIMULATION D'UNE CAUSTIQUE PAR LE DEPLACEMENT HORS PLAN 3D

2.1 Position du problème

Nous résumons ici les équations nécessaires à la représentation d'une caustique pour

un arrangement optique en réflexion. Rappelons schématiquement figure (5-1) le processus de

formation d'une caustique dans un plan image (X1, X2), à partir des extensions virtuelles des

faisceaux lumineux réfléchis à la surface du modèle fissuré. La surface est repérée par le plan

(x1, x2) et distante de zI>0 du plan image considéré.

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(X1, X2) (x1, x2)zI

fissureDt

Faisceauincident

)x,x(fw 21thD3 ≡

Caustique

O 3e2e

Figure 5-1 : Représentation schématique en réflexion de la formation d'une caustique

Les points images sont reliés aux points de la surface par la relation linéarisée

suivante, qui résulte de l'expression générale (3.19) :

( )0z2,1i,xfz2xX I

iIii >=∂∂

−= (5.1)

où la fonction f est maintenant donnée par la nouvelle expression du déplacement hors plan thD3w . Le repère d'étude associé est donné précisément figure 3-6. Avec la convention de signe

choisie pour représenter thD3w au chapitre 4 (i.e. 0w th

D3 > vers l'intérieur du modèle),

l'équation de la surface déformée est donc ici :

thD33 wx −= (5.2)

La caustique correspondante est alors le lieu des points sur l'écran pour lesquels le système

d'équations (5.1) n'est pas inversible. Il en résulte que le déterminant ( )21 X,XJ de la matrice

jacobienne associée doit être nul, soit explicitement :

( )( ) 0

xf

xf

xxfz4

xf

xfz21

x,xX,XJ 2

2

2

21

22

21

22I2

2

2

21

2

I21

21 =

∂∂

∂∂

∂∂

∂−

∂∂

+∂∂

−=∂∂

= (5.3)

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La résolution de (5.3) donne l'ensemble des points de la surface réfléchissante (non

déformée) d'où sont issus les rayons lumineux (réels ou virtuels) formant la caustique.

Autrement dit, pour chaque plan image placé à une distance zI du modèle fissuré, on obtient

ainsi la courbe initiale générant la caustique. Nous avons vu également au chapitre 3 que la

distinction entre les images virtuelles et les images réelles revenait, mathématiquement, à

changer le signe de zI dans l'expression (5.3). Typiquement on a zI>0 et zI<0 pour les images

respectivement virtuelles et réelles.

2.2 Simulation d'une caustique en réflexion

La fonction f s'exprime en général à l'aide des coordonnées polaires ( )θ,r associées

aux coordonnées cartésiennes (x1, x2). Pour les représentations qui suivent, il est commode d’

adimensionner la coordonnée radiale r en prenant à la place R=r/h, où h est l'épaisseur de la

plaque. Le plan image associé est alors repéré par les coordonnées cartésiennes normalisées

( )h/X,h/X 21 . On transforme ainsi les dérivées apparaissant dans les équations (5.1) et (5.2)

dans le nouveau système de coordonnées ( )θ,R à l'aide des relations classiques :

θ∂∂θ

+∂∂

θ=∂∂

θ∂∂θ

−∂∂

θ=∂∂

Rcos

Rsinh

x

Rsin

Rcosh

x

2

1 (5.4)

Les calculs sont entrepris avec le logiciel Maple V en prenant les expressions

mathématiques (4.15) et (4.19) pour le déplacement hors plan. Les paramètres intervenant

dans les équations (i.e. ν, E, KI, h, les six coefficients Ai , b et c) ont les valeurs numériques

données pour l'Araldite, tables 4-1,2,4.

Une simulation du système (5.1) est alors proposée figure 5-2 dans un plan image

virtuel ( )h/X,h/X 21 avec une distance zI = 220 mm. On "visualise" de la sorte la fonction

vectorielle (5.1) qui fait correspondre les points images ( ) ( )[ ]h/,RX,h/,RX 21 θθ à chaque

point objet de coordonnées normalisées (R,θ) pris dans le repère habituel centré en pointe de

fissure.

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Figure 5-2 : Simulation d'une caustique dans un plan image virtuel avec l'expression

3D du déplacement hors plan particularisé à l'Araldite.

On remarque que la forme de la caustique simulée figure 5-2 s'apparente à celle qui est

obtenue expérimentalement à la même distance zI. La couronne lumineuse simulée est non

fermée et s'estompe progressivement lorsque la coordonnée angulaire θ est inférieure à π/2.

Précisons enfin ici que les dimensions (transversales) réelles des caustiques expérimentales

sont obtenues de la même façon que pour les images de franges. On enregistre à nouveau une

image de référence (non présentée ici) contenant un réseau de traits, dont le pas réel est

connu. Ce réseau permet de calculer le grandissement et par suite les dimensions recherchées.

2.3 Recherche du diamètre transversal des caustiques

Nous avons vu que la formulation classique 2D du déplacement hors plan conduit à

des caustiques fermées (i.e. des épicycloïdes). Par ailleurs il est possible de résoudre

analytiquement le système (5.3) et d'obtenir ainsi une courbe initiale de forme géométrique

simple, à savoir un cercle de rayon r0. Le rayon du cercle est du reste proportionnel à la

quantité 5/2Iz− d'après (3.25). En reportant la valeur de r0 dans (5.1) on trouve typiquement

l'équation de la caustique sous la forme paramétrique (3.24). Pour l'Araldite et à nouveau une

distance zI = 220 mm, le graphe de la fonction (3.24) donne l'épicycloïde en trait continu qui

est superposée figure 5-3 sur la simulation précédente. La valeur correspondante du rayon

adimensionné r0/h, calculé avec la relation (3.25), est de 0,24. Les effets 3D sont donc déjà

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importants et on remarque que la caustique 2D est de taille plus importante que celle obtenue

avec l'expression du déplacement hors plan proposée. Rappelons enfin que dans ce cas le

diamètre transversal Dt de la caustique est toujours relié à r0 par la relation 0t r167,3D = [76].

Figure 5-3 : Comparaison des caustiques simulées avec les formulations 2D et 3D du

déplacement hors plan.

Dans notre cas la recherche du diamètre transversal de la caustique est plus complexe.

En effet la résolution du système (5.3) ne peut être entreprise que numériquement en

discrétisant la variable angulaire θ dans un intervalle Iθ de la forme [ ]maxmin ;θθ . En se

référant à la figure 5-3, les bornes de l'intervalle Iθ sont choisies de manière à inclure la valeur

2/π . On considère alors un ensemble de N valeurs discrètes θi régulièrement espacées dans Iθ

telles que N1ii21 ...... θ>>θ>θ>>θ>θ + . Les bornes inférieure et supérieure de l'intervalle

Iθ correspondent respectivement à θN et θ1. Pour chaque θi, on résout numériquement le

système (5.3) par la méthode classique de Newton-Raphson. Soit pour un plan image distant

de zI du modèle fissuré :

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( ) ( )N..1iI,0,rJ iiIz =∈θ=θ θ (5.5)

A chaque itération, lorsque le système a une solution, on trouve une valeur ri qui est

injectée dans le système (5.1). On peut ainsi calculer le couple ( ) ( )[ ]i2i1 X;X θθ qui donne le

point représentatif de la caustique dans le plan image lorsque θ = θi. Notons que la courbe

initiale associée est représentée alors par les couples de points ( ) ( )[ ]iiii sinr;cosr θθ dans le

repère cartésien lié au modèle fissuré. On définit le diamètre transverse Dt de la caustique

ainsi :

( )( )i2N..1it X2maxD θ= = (5.6)

Comme on peut le constater sur la figure 5-3, cette valeur maximale n'est pas donnée

pour 2π=θ et sa localisation dépend en général de zI. La relation (5.6) suppose

implicitement de prendre un intervalle Iθ suffisamment grand pour pouvoir déterminer Dt.

Néanmoins lorsque l'intervalle chevauche "la zone effacée" figure 5-3, la caustique n'est plus

définie et l'équation (5.5) n'a donc plus de solution. Cette remarque justifie le fait de débuter

une procédure de calcul pour trouver Dt, avec une valeur initiale θ0 dans une zone bien

définie, soit typiquement le quadrant ] [ππ ,2/ . Les valeurs θi sont alors obtenues en faisant

θ∆−θ=θ i0i où θ∆ est un incrément constant et N..1i = .

Nous réutilisons le logiciel Maple V afin de programmer l'algorithme nécessaire à la

détermination de Dt. Pour zI donné en prenant θ0 comme valeur initiale, le programme calcule

successivement les valeurs ( )i2X θ grâce aux relations (5.3) et (5.1). Lorsque le diamètre

maximum Dt n'est pas atteint, avec deux valeurs θi et θi+1 successives on a en règle générale

( ) ( )i21i2 XX θ>θ + . Néanmoins à chaque itération, un test permet d'écarter une valeur ( )i2X θ

éventuellement aberrante, qui signifierait que l'équation (5.3) n'a pu être résolue. On associe

dans ce cas à θi la valeur ( )1i2X −θ et le calcul se poursuit pour θi+1. Notons que cette situation

se produit seulement pour quelques valeurs isolées θi dans le quadrant ] [ππ ,2/ . La routine

suppose toutefois une valeur initiale ( )02X θ correctement évaluée. Après avoir effectué M

itérations (et appliqué à chaque fois le test précédent), si ( ) ( )1M2M2 XX −θ<θ la procédure est

stoppée. La valeur retenue pour Dt/2 est alors ( )1M2X −θ . Dans certains cas enfin, Dt est

associé à une valeur θi très proche de la limite entre la zone d'existence de la caustique et la

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zone effacée. Avec un choix raisonnable pour θ∆ , on ne peut trouver un entier M tel que

( ) ( )1M2M2 XX −θ<θ et les valeurs ( )i2X θ deviennent systématiquement toutes aberrantes

lorsque i>M-1. Un deuxième test permet d'en tenir compte et de stopper la procédure en

prenant ( )1M2X −θ pour Dt/2. Nous résumons figure 5-4 ce qui vient d'être dit sous la forme

d'un organigramme.

L'algorithme de calcul précédent a été appliqué pour les caustiques simulées en

différents plan images (i.e. différentes valeurs de zI) avec l'Araldite. On regroupe table 5-1 les

diamètres transversaux (adimensionnés) Dt/h, calculés en fonction des quantités zI/h. Les

quantités entre parenthèses (2D) et (3D) signifient que les caustiques considérées sont

formées en prenant respectivement l'expression classique (2D) et l'expression (4.15) pour le

déplacement hors plan.

zI/h 474,9 107,0 44,7 24,1 20 14,9 10,1 7,2 5,4 4,2 3,3

Dt/h (2D) 1,955 1,077 0,757 0,592 0,538 0,488 0,418 0,366 0,327 0,295 0,270

Dt/h (3D) 1,938 0,913 0,524 0,362 0,325 0,276 0,222 0,185 0,158 0,137 0,121

Table 5-1 : Valeurs de Dt/h calculées en fonction de zI/h

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Valeur initiale : θ0

Paramètres d'entrée : ε1, ε2, θ∆ , zI, Ni=1, i1=1, i2=1

Résolution numérique de l'équation (5.5)+ relation (5.1)⇒ ( )i2X θ

( ) θ∆−−θ=θ 1i0i

i1 = i + 1i2 = i2 + 1

( ) ( )1i2i2 XX −θ=θ

oui1i2 =

noni ≥ 2

et( ) ( ) 11i2i2 XX ε>θ−θ −

?

i > i1et

( ) ( )1i2i2 XX −θ<θ( )1i2t X2/D −θ=

FINoui

?

i2 > ε2( )1i2t X2/D −θ=

FIN

oui

non1ii +=

Ni ≤

non

?

Figure 5-4 : Organigramme du programme de recherche du diamètre transversal d'une

caustique

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3. DEMARCHE EXPERIMENTALE

Pour la plaque en Araldite et en se plaçant strictement dans les mêmes conditions de

chargement qu'au chapitre 4, nous avons également enregistré une série de caustiques

virtuelles associées appartenant à différents plans images. Pour ce faire, la caméra CCD,

focalisée au préalable au niveau de la surface réfléchissante du modèle fissuré, est simplement

translatée sur le rail en direction du cube séparateur (cf. figure 4-1). Il est possible ainsi de

mesurer avec précision la distance zI entre le plan image considéré et la surface de la plaque.

Notons que de cette façon on ne modifie pas le grandissement qui est calculé initialement en

enregistrant un réseau de traits transparent placé sur la surface réfléchissante de la plaque

(image de référence). La figure 5-5 présente, pour quelques plans images, les caustiques

obtenues expérimentalement. Au total 16 images ont été prises. Nous regroupons table 5-2 les

diamètres transversaux mesurés et les valeurs de zI correspondantes.

Figure 5-5 : Caustiques virtuelles obtenues en réflexion pour différentes valeurs de zI

z I e

n [m

m]

20 40 60 80 100 120 140 160 180 200 220 240 260 280 300 335

Dt e

n [m

m]

0,65 0,97 1,22 1,45 1,63 1,88 2,0 2,20 2,36 2,53 2,69 2,81 2,91 3,06 3,22 3,44

Table 5-2 : Résultat des mesures

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4. PROPOSITION D'UNE NOUVELLE LOI D'EVOLUTION

Les données numériques de la table 5-1 sont reportées figure 5-6 dans un repère

adimensionné d'abscisse zI/h et d'ordonnée Dt/h. Elles sont représentées par des losanges (au

total 22). La courbe d'évolution 2D classique est donnée par la relation (3.26), soit

typiquement ici :

( )

π

ν=α

α=52

I5/1meca

52Imecat

E22K3

h17,3avec

hzhD

(5.7)

Lorsque le calcul de Dt est effectué avec l'expression (2D) classique du déplacement

hors plan, elles se situent, bien entendu, sur la courbe d'évolution 2D. Il n'en est plus de même

avec la nouvelle expression du déplacement hors plan, comme on peut le constater sur la

figure 5-6.

Figure 5-6 : Evolution du diamètre transversal des caustiques en fonction de la

distance zI (représentation adimensionnée)

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La figure 5-6 nous conduit à modifier la loi d'évolution 2D et à proposer à la place la

fonction suivante, que l'on appellera évolution 3D :

( )[ ] ( ) 52II1I2mecat hzhzb,2Eb1hD −α= (5.8)

où EI est à nouveau une fonction exponentielle intégrale d'ordre 2. Les constantes b1 et b2 sont

déterminées en identifiant l'expression (5.8) et les 11 données calculées table 5-1 (avec la

formulation 3D pour le déplacement hors plan). On constitue alors une fonction de la forme

(4.18) qui permet d'obtenir, par minimisation (cf. annexe B), les deux paramètres inconnus.

Le principe de résolution est identique à celui présenté au chapitre 4 et ne sera donc pas

détaillé ici. Tout calcul fait, on trouve ici :

==

59,0b0058,0b

2

1 (5.9)

Les données expérimentales issues de la table 5-2 sont représentées figure 5-7, par de

petits cercles dans le repère précédent. On constate clairement qu'elles ne "suivent" pas la

courbe d'évolution 2D. Ces données sont par contre en parfaite coïncidence avec l'évolution

(5.8) issue du déplacement hors plan 3D.

Figure 5-7 : Comparaison avec les données expérimentales de la table 5-2

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Nous sommes maintenant en mesure d'obtenir le facteur d'intensité de contraintes KI à

partir des relations (5.8) et (5.9) et des données expérimentales table 5-2. La figure 5-8 nous

montre ainsi que la correction apportée à la loi d'évolution classique permet d'obtenir des

valeurs relativement constantes pour KI qui fluctuent autour de mmMPa20 , quel que soit

le plan image considéré. Au contraire l'application de l'expression (3.26) conduit à des valeurs

erronées bien différentes de la valeur attendue pour KI (donnée table 4-3 pour l'Araldite).

Figure 5-8 : Evolution du facteur d'intensité de contrainte en fonction de zI

Pour tous les plans images considérés tels que zI/h < 70, les points issus des courbes

initiales correspondantes se trouvent à des endroits où la triaxialité est déjà très marquée. Il

résulte un écart important entre les valeurs de KI calculées dans les deux cas, avec un rapport

allant de 2 à plus de 10.

5. CONCLUSION

Ce dernier chapitre consacré à l'exploitation de la méthode des caustiques, illustre

l'intérêt de la nouvelle formulation du déplacement hors plan établie au chapitre 4. En effet, à

partir des équations paramétriques de la méthode des caustiques, la détermination du facteur

d'intensité de contraintes (pour un mode I de chargement) repose sur une loi classique 2D qui

est donnée typiquement par l'expression (3.26). Néanmoins nous avons vu, qu'à l'encontre de

la formulation 2D, l'introduction du déplacement hors plan proposé dans les équations

paramétriques précédentes permet de simuler des caustiques dont les formes reproduisent

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correctement les caustiques expérimentales. Il apparaît dés lors que l'évaluation du diamètre

transversal Dt d'une telle caustique doit se faire numériquement. Un algorithme de calcul a été

programmé à cet effet.

La démarche est mise en œuvre pour la plaque fissurée en Aradilte. Le calcul de Dt

effectué pour différents plans images nous conduit à reformuler la loi (3.26). Les valeurs de

Dt obtenues expérimentalement appuient cette décision. A partir de ces mêmes données, la loi

proposée est à même de donner une estimation du facteur d'intensité de contraintes KI en

accord avec les valeurs établies au chapitre 4, cela pour de faibles distances entre le plan

image et le modèle fissuré. A l'opposé, une utilisation abusive de l'évolution 2D pour ces

mêmes distances (soit zI/h < 100) conduit à des erreurs considérables sur l'estimation de KI.

En outre, lorsque le plan image s'éloigne de façon importante du modèle fissuré (2 à 3 mètres

par exemple), il n'est pas aisé d'enregistrer les caustiques virtuelles associées. La courbe

initiale se situe alors dans une zone peu déformée. Il en résulte des images de mauvaise

qualité où les caustiques sont peu contrastées et difficilement exploitables. On notera enfin

que l'emploi de la méthode des caustiques, avec la formulation (5.8) proposée, nécessite la

connaissance de deux paramètres (b1, b2) qui dépendent a priori uniquement de la plaque

utilisée. Ils sont liés de façon complexe aux six paramètres utilisés pour la représentation du

déplacement hors plan 3D.

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CCOONNCCLLUUSSIIOONN GGEENNEERRAALLEE // PPEERRSSPPEECCTTIIVVEESS

Nous rappelons ici que nos travaux sont consacrés à la détermination du déplacement

hors plan en pointe de fissure pour une plaque élastique chargée en mode I. Si la théorie 2D

de la rupture reproduit correctement le déplacement hors plan des surfaces latérales de la

plaque à une certaine distance de la fissure il n’en est plus de même lorsque l’on se rapproche

de la pointe de fissure. En effet à cet endroit, le déplacement habituellement calculé devient

singulier et ne peut de ce fait représenter une grandeur physique. Notre étude, appuyée par

quelques travaux disponibles dans la littérature, a clairement mis en évidence l'existence d'une

zone confinée entourant la pointe de fissure pour laquelle les effets tridimensionnels ne

peuvent plus être négligés, cela même pour des plaques minces.

Nous avons mené ce travail en faisant appel à deux disciplines bien différentes : la

modélisation numérique et les méthodes expérimentales de mesure. Les enseignements de

l'une permettant de répondre aux exigences de l'autre et réciproquement. Ainsi l'intégration

d'un front de fissure parabolique, lors de la modélisation par éléments finis de la région en

pointe de fissure, résulte bien des observations expérimentales. Nous avons vu, que

moyennant cet ajout, il est alors possible de recaler les solutions calculées pour le

déplacement hors plan des surfaces de la plaque avec les données expérimentales issues de

l'interférométrie. Si le déplacement hors plan apparaît comme une grandeur mesurable en

pointe de fissure, les effets 3D sur les grandeurs mécaniques internes à la plaque n'ont pu être

observés que par éléments finis.

L'interférométrie, associée à une technique quasi hétérodyne, est apparue comme la

seule méthode efficace pour mesurer les variations du relief en pointe de fissure. Elle offre en

effet la possibilité d'appréhender, à un plan de référence près, des variations de surface de

quelques microns en tout point de la zone de mesure. L'accès au déplacement hors plan

associé n'est pourtant pas direct et exige au préalable un recalage des données mesurées. La

méthode proposée introduit un plan de référence inconnu qui ne peut être déterminé qu'en

prenant en compte les résultats théoriques 2D, loin de la pointe de fissure. Des données

expérimentales (recalées), dans un proche voisinage du fond de fissure où les effets 3D sont

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importants, conduisent à donner une nouvelle expression du déplacement hors plan faisant

intervenir des fonctions exponentielles intégrales.

Cette démarche hybride a été mise en œuvre sur trois types d'éprouvettes, de

caractéristiques mécaniques et géométriques différentes, chargées statiquement selon le mode

I. La formulation proposée permet de reproduire fidèlement, pour les trois cas étudiés,

l'évolution du champ de déplacement mesuré. L'identification au moyen de six paramètres est

suffisamment générale pour décrire le déplacement tant dans la zone éloignée à comportement

bidimensionnel que dans région proche où sévit un état tridimensionnel.

Une application particulière, mettant en œuvre la formulation proposée du déplacement

hors plan, a été proposée pour l’Aradite. Ainsi la méthode des caustiques en réflexion simple

nécessite pour sa réalisation la connaissance d’une expression mathématique décrivant le

relief en pointe de fissure. Rappelons que cette méthode optique permet la détermination du

facteur d'intensité de contraintes (pour un mode I de chargement) à partir de la mesure d'une

dimension privilégiée d’une caustique (i.e. le diamètre transversal) dans un plan image donné.

La démarche repose néanmoins sur une loi classique 2D qui est établie à partir de l’expression

2D du déplacement hors plan. Nous avons observé qu'elle donnait des valeurs aberrantes pour

le facteur d’intensité de contraintes lorsque les plans images sont proches du modèle fissuré.

La correction apportée au déplacement hors plan permet de simuler des caustiques dont les

formes s'apparentent aux caustiques trouvées expérimentalement pour l'Araldite. De plus elle

conduit à une mesure correcte du facteur d'intensité de contrainte, quelle que soit la distance

entre le plan image et le modèle fissuré.

Dans un premier temps, quelques améliorations peuvent être apportées à notre

démarche. Il serait par exemple intéressant de profiter d'un maximum de données calculées

par le logiciel Interf 32, lors de la détermination du plan de référence servant au recalage des

données. On éviterait ainsi de particulariser la sélection des données à quelques demi-droites

issues de la pointe de fissure (nous en avons pris une vingtaine). Il en résulterait une valeur

finale pour le facteur d'intensité de contraintes de toute évidence plus précise et moins sujette

à d'éventuels défauts localisés de surface. En contre partie la réalisation des calculs

demanderait un ordinateur suffisamment puissant capable de traiter quelques dizaines de

milliers de données (i.e. les pixels de l'image servant au recalage) lors de la résolution

numérique du système matriciel.

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Notons que les six paramètres introduits lors de la formulation du déplacement hors

plan n'ont pas de signification physique propre pour l'instant. Il conviendrait d'y remédier en

multipliant par exemple les expérimentations en mode I avec différentes valeurs de l'effort

appliqué, plusieurs épaisseurs de plaques, d'autres matériaux fragiles. Indiquons que la

démarche n'est pas limitée à l'étude de polymères, et que des investigations sur métaux, sur

verres pourraient être conduites. La prise en compte des autres modes de fissuration (mode II

et mode III) dans l'analyse devrait permettre de généraliser la méthode aux matériaux fragiles,

sans avoir à contrôler au préalable le chargement plan opéré. De plus une direction

quelconque du plan fissuré pourrait être prise.

L'investigation sur matériaux ductiles est une perpective à moyen terme. Il s'agirait de

mettre à nouveau en évidence une zone 3D et de reformuler, à partir de l'expression 2D issue

du champ H.R.R., une expression du déplacement hors plan compatible avec les données

expérimentales comme nous l'avons fait pour le cas élastique. Indiquons que des préétudes

sont déjà en cours au sein du laboratoire.

Signalons enfin que notre contribution à l'exploitation des caustiques en tout plan

image nous paraît offrir des applications intéressantes pour l'étude de problèmes de fissuration

sur matériaux très rigides tels que les verres et les céramiques. En effet, le faible coefficient

de Poisson fait que les caustiques sont générées par des points situés au très proche voisinage

du fond de fissure. L'analyse de la singularité optique nécessite alors une formulation

tridimensionnelle du déplacement hors plan.

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- 173 -

AANNNNEEXXEE AA

Quelques propriétés mathématiques des fonctions exponentielles intégrales

Définition :

,...)2,1,0n(,dtt

e)z,2(E1

n

tz

I == ∫∞ −

(A.1)

Relation de récurrence :

( )[ ] ...),3,2,1n(,z,nEzen1)z,1n(E I

zI =−=+ − (A.2)

Valeurs particulières :

( ) ( )

( )z

ez,0E

1n,1n

10,nE

z

I

I

=

>−

= (A.3)

Dérivation :

( ) ( ) ...),3,2,1n(,z,1nEzd

z,nEdI

I =−−= (A.4)

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- 174 -

Développement asymptotique :

( ) ( ) ( )( )

+

++−

++−≈

...z

2n1nnz

1nnzn1

zez,nE 32

z

I (A.5)

Inégalité :

( ) ...),3,2,1n,0z(,1nz

1z,nEenz

1I

z =>−+

≤≤+

(A.6)

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- 175 -

AANNNNEEXXEE BB

Principe de la méthode de minimisation (méthode de Newton)

Le problème est présenté sous une forme générale. Soit une fonction donnée F telle

que :

( ) ( )xFx,...,x,xFy n21

== (B.1)

Il s’agit de trouver un point qui donne un minimum local de F. Considérons alors le

développement suivant de la fonction en série de Taylor :

( ) ( ) ....xx

Fhh21

xFhxFhxF

ki

2

kii

i +∂∂

∂+

∂∂

+=+ ∑∑

(B.2)

Les coefficients des termes du second ordre peuvent s’organiser selon une matrice [H]

qui a pour éléments ki2

ik xxFH ∂∂∂= . [H] est habituellement appelé le Hessian. On écrit

alors le développement (B.2) sous la forme :

( ) ( ) ( ) ...h]H[.h21xFgrad.hxFhxF TT +++=+

(B.3)

En négligeant les termes d’ordre supérieur, nous choisissons ( )n21 h,...,h,hh =

de

façon à rendre F minimale, soit :

0hxx

FxF

hF

kk ki

2

ii

=∂∂

∂+

∂∂

≅∂∂ ∑ (B.4)

ou sous forme vectorielle :

0h]H[FgradhF

=+≅∂∂

(B.5)

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- 176 -

En pratique on choisit une valeur initiale )0(h

suffisamment proche de la solution.

L’expression (B.5) permet de calculer la valeur suivante )1(h

en résolvant pour 0hd

le

système :

( ) ( ))0(0

)0( hFgradhd]hH[

−= (B.6)

il vient alors pour )1(h

:

0)0()1( hdhh

+= (B.7)

soit après n itérations :

( ) ( )

1n)1n()n(

)1n(1n

)1n(

hdhhet

hFgradhd]hH[

−−

−−

+=

−=

(B.8)

On évalue à chaque étape la différence 2

)1n(2

)n(n hhd −−=

où 2. représente la

norme 2 classique du vecteur. La procédure est stoppée dès que dn est suffisamment petit.

Lorsqu’il y a convergence (il s'agit d'une convergence au sens de la norme), on obtient alors la

solution recherchée avec la précision souhaitée. Cette méthode est connue sous le nom de

méthode de Newton pour le problème de minimisation.

Au cours du mémoire nous aurons à résoudre des systèmes d’équations du type :

( ) N..1i,0x,...x,xf n21i == (B.7)

On forme alors la fonction F suivante :

( ) ( )2n

1i i xfxF ∑==

(B.8)

et les résultats précédents sont applicables.

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- 183 -

LLIISSTTEE DDEESS IILLLLUUSSTTRRAATTIIOONNSS

CHAPITRE 1

:

Figure 1-1 : Rupture fragile d’un bateau…………………………………………….. 11

Figure 1-2 : Rupture à l’échelle atomique…………………………………………… 12

Figure 1-3 : Représentation du contour d’intégration……………………………….. 17

Figure 1-4 : Représentation d’une fissure dans une plaque chargée d’épaisseur t…... 19

Figure 1-5 : Modes élémentaires de fissuration………………………………………20

Figure 1-6 : Plaque fissurée, milieu bidimensionnel infini en mode I………………..26

Figure 1-7 : Eprouvettes fissurées de type CN, DEN et SEN sous chargement uniaxial (σ0 est la contrainte nominale associée)……. 27

Figure 1-8 : Distribution des points de collocation dans le cas d’une éprouvette SEN……………………………………………….…. 33

Figure 1-9 : Maillages rayonnants réalisés pour l’éprouvette SEN………………….. 37

Figures 1-10 : Comparaison des expressions globales et asymptotiques du champ de contraintes le long de la fissure………………………… 39

Table 1-1 : Exemple de calcul des premiers coefficients de la série de Williams…... 36

Table 1-2 : Valeurs calculées de Y et B pour différentes tailles d’éprouvette……... 36

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- 184 -

CHAPITRE 2

:

Figure 2-1 : Demi espace fissuré Ω (z ≥ 0)…………………………………………...48

Figure 2-2 : Demi espace fissuré Ω avec un front de fissure OO' oblique……………52

Figure 2-3 : Maillage du domaine avec θ limité par ( )φβ=θ − costantan 1lim …….. 55

Figure 2-4 : Résultats obtenus par Bazant & Estenssoro pour une fissure oblique….. 56

Figure 2-5 : Résultats obtenus par Yang et Freund [48] pour le déplacement hors plan w0……………………………………….59

Figure 2-6 : Organisation d'un programme avec Castem 2000……………………… 63

Figure 2-7 : Principe de la méthode du suivi de taches……………………………… 65

Figure 2-8 : Résultats expérimentaux obtenus avec le PMMA……………………… 66

Figure 2-9 : Représentation schématique de la région étudiée en pointe de fissure… 67

Figure 2-10 : Maillage du quart de cylindre (front de fissure rectiligne V-Ce)…….. 69

Figure 2-11 : Représentation schématique du front de fissure parabolique (x2 = 0)… 70

Figure 2-12 : Maillage du quart de cylindre avec un front de fissure parabolique…...72

Figure 2-13 : Isovaleurs du déplacement u3 en [mm] sur la surface libre (front de fissure rectiligne)………………………. 76

Figure 2-14a : Front de fissure rectiligne, T = 0 [MPa]………………………………77

Figure 2-14b : Front de fissure parabolique, T = 0 [MPa]……………………………77

Figure 2-14c : Front de fissure rectiligne, T = 5 [MPa]………………………………78

Figure 2-14d : Front de fissure parabolique, T = 3 [MPa]……………………………78

Figure 2-14e : u3 normalisé avec un front de fissure rectiligne (T = 0)……………... 79

Figure 2-14f : u3 normalisé avec un front de fissure parabolique (T = 0)…………... 79

Figure 2-15a : Evolution de la triaxialité sur le plan ligament en pointe de fissure (front de fissure rectiligne)……………………… 81

Figure 2-15b : Evolution de la triaxialité sur le plan ligament en pointe de fissure (front de fissure parabolique)………………….. 81

Figure 2-16a : Evolution de la triaxialité suivant l'épaisseur (front de fissure parabolique)……………………………………….. 82

Figures 2-16b et c : Evolution de la triaxialité suivant l'épaisseur (front de fissure rectiligne)…………………………………….. 83

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- 185 -

Figure 2-17a : Représentation de la contrainte σ22 sur la surface libre (front de fissure rectiligne)………………………………………….. 84

Figure 2-17b : Comparaison de la solution calculée avec la solution 2D exacte pour θ = 0° (front de fissure rectiligne)………………………85

Figure 2-17c : Comparaison de la solution calculée avec la solution 2D exacte pour θ = 0° (front de fissure parabolique)…………………… 85

Table 2-1 : Valeurs propres λ calculées pour ( )φθλ=σ λ ,,fr ijij ……………………. 50

Table 2-2 : Puissance de la singularité (f-2) calculée en fonction du coefficient de consolidation n et de Tz……………………………….. 61

Table 2-3 : Valeurs moyennes de l'intégrale J et du facteur d'intensité de contrainte associés en zone 3D…………………87

CHAPITRE 3

:

Figure 3-1 : Principe de l'interféromètre de Michelson …………………………... 95

Figure 3-2 : Caustiques obtenues par transmission au fond d'une tasse remplie d'eau……………………………………... 103

Figure 3-3 : Formation de caustiques en mécanique de la rupture…………………. 105

Figure 3-4 : Arrangements optiques, modèle sollicité en traction…………………..107

Figure 3-5 : Caustique obtenue sur un plan image virtuel, arrangement en réflexion………………………………………………108

Figure 3-6 : Système simplifié source-réflecteur-récepteur en réflexion………….. 109

Figure 3-7 : Simulation de caustiques à partir des expressions (3.19), (3.20) et de la formulation 2D du déplacement hors plan…………………….114

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CHAPITRE 4

:

Figure 4-1 : Vues du site expérimental……………………………………………...120

Figure 4-2 : Interféromètre de Michelson appliqué à la mécanique de la rupture…..121

Figures 4-3 : Principe d'élargissement du faisceau laser…………………………… 122

Figure 4-4 : Schéma du montage de traction……………………………………….. 124

Figure 4-5 : Interférogrammes obtenus en pointe de fissure (champ large et champ zoomé)……………………………………….. 130

Figure 4-6 : Images de référence pour le PMMA(2) avec un réseau croisé millimétré……………………………………… 131

Figure 4-7 : Déplacement hors plan en µm calculé par quasi-hétérodynage en pointe de fissure………………………….. 134

Figure 4-8 : Profils associés aux interférogrammes de la figure 4-7 le long d'une ligne AB située devant la pointe de fissure……………………...135

Figure 4-9 : Représentation des différents repères associés aux images enregistrées………………………………………………..136

Figure 4-10 : Représentations du déplacement hors plan w3D………………………145

Figure 4-11 : Comparaison avec le modèle numérique pour le PMMA(2)………… 146

Figure 4-12 : Evolution de a(θ) dans l'intervalle ] [ππ− ; ………………………….. 149

Figure 4-13 : Comparaison entre le déplacement théorique (4.15) et les valeurs expérimentales w3D pour différentes valeurs angulaires……. 150

Table 4-1 : Caractéristiques mécaniques et géométriques des éprouvettes expérimentales………………………………………… 126

Table 4-2 : Facteur d'intensité de contraintes évalué en fonction de la force appliquée F et des données géométriques relatives aux éprouvettes d'étude………... 128

Table 4-3 : Valeurs numériques des paramètres px , py , u0 et KI…………………… 141

Table 4-4 : Evolution des paramètres intervenant dans les relations (4.15) et (4.19)………………………………………………... 148

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CHAPITRE 5

:

Figure 5-1 : Représentation schématique en réflexion de la formation d'une caustique…………………………………...…... 156

Figure 5-2 : Simulation d'une caustique dans un plan image virtuel avec l'expression 3D du déplacement hors plan particularisé à l'Araldite………………………………………………..158

Figure 5-3 : Comparaison des caustiques simulées avec les formulations 2D et 3D du déplacement hors plan……………………………………159

Figure 5-4 : Organigramme du programme de recherche du diamètre transversal d'une caustique………………………………. 162

Figure 5-5 : Caustiques virtuelles obtenues en réflexion pour différentes valeurs de zI…………………………………………. 163

Figure 5-6 : Evolution du diamètre transversal des caustiques en fonction de la distance zI (représentation adimensionnée)………… 164

Figure 5-7 : Comparaison avec les données expérimentales de la table 5-2……….. 165

Figure 5-8 : Evolution du facteur d'intensité de contrainte en fonction de zI………. 166

Table 5-1 : Valeurs de Dt/h calculées en fonction de zI/h……………………………161

Table 5-2 : Résultat des mesures…………………………………………….………163

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TTAABBLLEE DDEESS MMAATTIIEERREESS

INTRODUCTION …………………………………………………………………………… 1

CHAPITRE 1FRAGILE BIDIMENSIONNELLE……………………………………… 5

: QUELQUES ASPECTS DE MECANIQUE DE LA RUPTURE

1. PRESENTATION GENERALE………………………………………………….……………….7

2. MECANIQUE DE LA RUPTURE LINEAIRE EN MILIEU BIDIMENSIONNEL…………….………..9

2.1 Les origines de la mécanique de la rupture………………………………………... 9

2.2 Résolution du problème par une approche énergétique………………….………. 11

2.2.1 Théorie de Griffith, taux de restitution de l’énergie……………………. 11

2.2.2 Intégrale J et ses propriétés……………………………………………...15

2.3 Déplacement des lèvres de la fissure et modes élémentaires de rupture…………. 18

2.4 Rappels d’élasticité plane, fonction d’Airy………………………………………. 20

2.5 Approche locale : champs de contraintes et de déplacements au voisinage d’une fissure……………………………………………………….. 23

2.5.1 Les solutions analytiques de Westergaard, Sih et Eftis………………… 23

2.5.2 Généralisation du problème à des milieux de dimension finie………… 27

2.5.3 Détermination des coefficients de la série de Williams pour des éprouvettes SEN……………………………………………… 33

2.6 Approche du problème par les éléments finis……………………………………. 36

3. CONCLUSION……………………………………………………………………………… 39

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CHAPITRE 2 DE PLAQUES ELASTIQUES………………………...41

: FISSURATION TRIDIMENSIONNELLE

1. INTRODUCTION………………………………………………….………………………….43

2. ANALYSE TRIDIMENSIONNELLE EN MILIEU PLAN FISSURE……………………………….. 45

2.1 Solution exacte du problème en contraintes planes……………………………….45

2.2 Etudes théoriques au voisinage du vertex…………………………………………47

2.2.1 L’approche de Folias…………………………………………………… 47

2.2.2 Les analyses locales de Benthem, Kawai et Bazant & Estenssoro……...47

2.3 Vers une solution complète du problème ?………………………………………. 62

3. MODELISATION PAR ELEMENTS FINIS AU VOISINAGE DE LA FISSURE……………………. 62

3.1 Présentation rapide du code de calcul……………………………………………. 62

3.2 Approche numérique du problème de fissuration tridimensionnel………………. 63

3.2.1 Choix du modèle mécanique…………………………………………… 63

3.2.2 Détermination de la zone d’étude, élaboration du maillage 3D………... 66

3.2.3 Application des conditions aux limites………………………………….72

3.2.4 Résolution du problème………………………………………………… 74

3.3 Résultats de l’étude numérique……………………………………………………74

3.3.1 Quelques remarques préléminaires…………………………………….. 74

3.3.2 Déplacement hors plan u3 de la surface libre…………………………... 75

3.3.3 Evolution du coefficient de triaxialité Tz sur le plan ligament…………. 80

3.3.4 Evolution de la contrainte σ22 sur la surface libre……………………… 83

3.3.5 Intégrale J et facteur d’intensité de contraintes en zone 3D……………. 86

4. CONCLUSION………………………………………………………………………………. 87

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CHAPITRE 3L’INTERFEROMETRIE PAR ANALYSE QUASI-HETERODYNE,

: LES METHODES OPTIQUES :

LA METHODE DES CAUSTIQUES……………………………………89

1. INTRODUCTION………………………………………………….………………………….91

2. TECHNIQUE DE MESURE DU DEPLACEMENT HORS PLAN…………………………………. 93

2.1 Considérations optiques et application de l’interférométrie de Michelson………. 93

2.2 La technique quasi-hétérodyne…………………………………………………… 99

3. LA METHODE DES CAUSTIQUES…………………………………………………………. 102

3.1 Le phénomène optique………………………………………………………….. 102

3.2 Applications à la mécanique de la rupture……………………………………….105

3.2.1 Principe de la méthode des caustiques, arrangements optiques………..105

3.2.2 Formation d’une caustique en réflexion : formulation théorique…… 107

3.2.3 Relations simplifiées issues de la mécanique de la rupture 2D, remarques…………………………………………………………….. 113

3.3 Conclusion……………………………………………………………………… 115

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CHAPITRE 4HORS PLAN EN POINTE DE FISSURE POUR UNE PLAQUE

: DETERMINATION EXPERIMENTALE DU DEPLACEMENT

CHARGEE EN MODE I. FORMULATION D’UNE EXPRESSION THEORIQUE…………. 117

1. INTRODUCTION…………………………………………………….………………….... 119

2. CONSIDERATIONS EXPERIMENTALES…………………………………………………… 120

2.1 Le dispositif expérimental……………………………………………………… 120

2.1.1 Description du site……………………………………………………. 120

2.1.2 Elargissement du faisceau initial…………………………………….. 122

2.1.3 Le système de chargement……………………………………………. 124

2.1.4 Caractéristiques et préparation des éprouvettes………………………. 125

2.2 Démarche expérimentale……………………………………………………….. 127

2.2.1 Estimation du facteur d’intensité de contraintes……………………… 127

2.2.2 Présentation des interférogrammes associés………………………….. 128

2.2.3 Détermination du facteur de grandissement………………………….. 130

2.2.4 Mise en œuvre de la méthode quasi-hétérodyne……………………… 132

2.3 Exploitation des données calculées par la méthode quasi-hétérodyne…………. 136

2.3.1 Etude préléminaire……………………………………………………. 136

2.3.2 Détermination du plan de référence, calcul de KI…………………….. 138

2.3.3 Représentation du déplacement hors plan en pointe de fissure………. 143

2.4 Comparaison avec les résultats de l’analyse numérique……………………….. 146

3. EXPRESSION THEORIQUE DU DEPLACEMENT HORS PLAN………………………………. 147

4. CONCLUSION…………………………………………………………………………….. 151

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CHAPITRE 5DE LA METHODE DES CAUSTIQUES……………………………. 153

: APPLICATION A L’EXPLOITATION

1. INTRODUCTION……………………………………..……………….………………..…. 155

2. SIMULATION D’UNE CAUSTIQUE PAR LE DEPLACEMENT HORS PLAN 3D………….…… 155

2.1 Position du problème…………………………………………………………… 155

2.2 Simulation d’une caustique en réflexion………………………….……………. 157

2.3 Recherche du diamètre transversal des caustiques…………………….……….. 158

3. DEMARCHE EXPERIMENTALE…………………………………………………………… 163

4. PROPOSITION D’UNE NOUVELLE LOI D’EVOLUTION…………………….…….………… 164

5. CONCLUSION……………………………………………………………………….……. 166

CONCLUSION GENERALE / PERSPECTIVES………………………………………. 169

ANNEXES

A. QUELQUES PROPRIETES MATHEMATIQUES

…………………………………………………………………………………. 173

DES FONCTIONS EXPONENTIELLES INTEGRALES………………………………………... 173

B. PRINCIPE DE LA METHODE DE MINIMISATION (METHODE DE NEWTON)………………. 175

BIBLIOGRAPHIE………………………………………………………………………… 177

LISTE DES ILLUSTRATIONS

…………………………………………………………...183

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PPUUBBLLIICCAATTIIOONNSS

Article dans une revue internationale : HUMBERT L., VALLE V., COTTRON M., « Experimental determination and empirical representation of out-of-plane displacements in a cracked elastic plate loaded in Mode I » acceptée le 13 août 1999, International Journal of Solids and Structures . Communication dans un congrès international avec publication des actes : HUMBERT L., VALLE V., COTTRON M., « Lateral surface contraction of an elastic cracked plate. Three dimensional effects », GAMM 99, Metz, France 12-16 April 1999. Communication dans un congrès national avec publication des actes : HUMBERT L., VALLE V., COTTRON M., « Déplacement expérimental et analytique du bord libre d’une plaque élastique fissurée chargée en mode I», 14éme Congrès français de Mécanique, Toulouse 1999. HUMBERT L., COTTRON M., LAGARDE A, « Exploitation de la méthode des caustiques pour la mesure du déplacement des surfaces latérales d’une plaque fissurée », 13éme Congrès français de Mécanique, Poitiers 1997.

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Résumé

L'étude traite des effets tridimensionnels (3D) dans les plaques élastiques fissurées de type SEN, chargées statiquement selon le mode I. L'interférométrie, associée à une technique quasi hétérodyne, est mise en œuvre pour appréhender, à un plan de référence près, des variations de surface de quelques microns en tout point de la zone entourant la fissure. L'accès au déplacement hors plan recherché n'est pas direct et exige au préalable un recalage des données expérimentales. Pour ce faire, nous développons une méthode hybride introduisant notamment un plan de référence inconnu qui est déterminé à partir des résultats théoriques 2D, toujours valables loin de la pointe de fissure (zone 2D). La mise en œuvre de la méthode conduit à des données expérimentales recalées qui représentent le déplacement hors plan au proche voisinage du front de fissure où les effets 3D sont importants. Par identification sur trois types d'éprouvettes de caractéristiques mécaniques et géométriques différentes, une expression mathématique nouvelle est proposée pour le déplacement hors plan, valide à la fois dans la zone 2D classique et dans la zone 3D. Une approche numérique du problème de rupture 3D, à l'aide de la méthode des éléments finis, permet de fournir la cartographie du déplacement hors plan qui est en parfaite correspondance avec le champ expérimental et la formulation proposée. Une application particulière, utilisant la formulation nouvelle du déplacement hors plan, est proposée pour l'Araldite. Elle apporte dans ce cas une correction à la méthode des caustiques, appliquée en réflexion, qui conduit à une mesure correcte du facteur d'intensité de contraintes, quelque soit la distance entre le plan image et le modèle fissuré.

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Abstract

The study concerns the three-dimensional effects (3D) in cracked elastic plates, subjected statically to a mode I loading. Interferometry, associated with a phase shifting method, is applied to provide surface variations of few microns in the entire area around the crack tip. The knowledge of the out of plane displacement requires nevertheless a shifting of the experimental data. With this intention, we develop a hybrid method which introduces a unknown reference plane. This plane is determined starting from the theoretical 2D results, always valid far from the crack tip (2D area). The previous method leads to shifted experimental data which are in a position to represent the out of plane displacement in the close vicinity of the crack tip, where the 3D effects are important. By identification on three specimens with different mechanical and geometrical characteristics, a new mathematical expression is proposed to describe the out of plane displacement everywhere near the crack tip. A numerical approach, using the finite element method, provides the displacement cartography in a good agreement with the experimental field and the formulation suggested. A particular application, using the new formulation of the out of plane displacement, is proposed for Araldite. Changes are then introduce in the method of caustics applied in reflection, which lead to a correct evaluation of the stress intensity factor, whatever the distance between the image plane and the cracked specimen is.

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Mots clés : Key words

- Rupture, effets tridimensionnels - Fracture mechanics, 3D effects

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- Interférométrie - Interferometry - Analyse d'images - Images analysis -.Identification - Identification - Eléments finis - Finite element - Déplacement hors plan - Out of plane displacement - Méthode des caustiques - Method of caustics