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RÉSEAU INFO-RESSOURCES MUSIQUES ACTUELLES DES PAYS DE LA LOIRE BABEL QUARTET ARNO GONZALEZ BIRDS ARE ALIVE N°21 AUTOMNE 2011 GRATUIT DOSSIER : MUSICIEN, UNE NÉCESSITÉ DE DIVERSIFIER SON ACTIVITÉ ? THE PATRIOTIC SUNDAY

TohuBohu21

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R É S E A U I N F O - R E S S O U R C E S M U S I Q U E S A C T U E L L E S D E S PAYS D E L A LO I R E

BABEL QUARTETARNO GONZALEZ

BIRDS ARE ALIVE

N°21AUTOMNE

2011GRATUIT

DOSSIER : MUSICIEN, UNE NÉCESSITÉ DE DIVERSIFIER SON ACTIVITÉ ?

THE PATRIOTIC SUNDAY

HTTP://TOHUBOHU.TREMPO.COM

INTERVIEWS ARTISTESMansfield. TYA

IdemA Few My Nephew

ZenzileArbadétorneBoNObo Trio

CyesmFaustine Seilman & The Healthy Boy

LIVE REPORTKid Koala – Scopitone

PROJETSInauguration de La Fabrique

CE MOIS-CI, RETROUVEZ ONLINE :

Photo : Mansfield. TYA par RICO FORHAN

SOMMAIRE

TOHU BOHU N°21 AUTOMNE 2011 3

INFOSLes brèves . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 04

ARTISTESBabel Quartet . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 06Arno Gonzalez . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 08The Patriotic Sunday . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 10Birds Are Alive . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 12

PROJETSOvvk recordings . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 14La Baraka Prod . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 15

GÉNÉRATION YMusic Beta . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 16

THE NEXT BIG THINGParoles d’acteurs . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 17

DOSSIERMusicien, une nécessité de diversifier son activité ? . . 18

TRACES ET IMPRESSIONSLivres du moment . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 24Questions à Luz . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 25

DISQUESDernières sorties musicales . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 26

PLAYLISTS . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .32

Photo couverture : Babel Quartet (Richar Vella)Directeur de la publication : Vincent PriouRédactrice en chef : Cécile ArnouxChroniqueurs / Rédacteurs : Mickaël Auffray, Sébastien Bertho, Emmanuel Bois, Lucie Brunet, Sylvain Chantal, François Delotte, Benoît Devillers, Denis Dréan, Eric Fagnot, Georges Fischer, Gérôme Guibert, Cédric Huchet, Yohan Le Belevec, Damien Le Berre, Manu Legrand, Gilles Lebreton, Julien Martineau, Mr Flatulens, Chloé Nataf, Jérôme Kalcha Simonneau, Tod, Olivier Tura .Secrétariat de rédaction : Lucie Brunet, Benjamin Reverdy, Amandine Rouzeau

Conception graphique : 2 point 2Impression : Imprimerie ChiffoleauTirage : 10 000 exemplaires – Papier PEFCISSN : 2109-0904Dépôt légal : à parutionSiret : 37992484800029Tohu Bohu est une publication de Trempolino,6 bd Léon Bureau - 44200 Nantes, et du réseau Tohu Bohu, réseau info-ressources musiques actuelles des Pays de la Loire .

Prochaine parution : 10 février 2012Bouclage : 16 janvier 2011

LE RÉSEAUCOORDINATION : Cécile Arnoux / T. 02 40 46 66 33 / [email protected]

CHABADA / Jérôme Kalcha SimonneauChemin Cerclère, Route de Briollay, 49100 AngersT. 02 41 34 93 87 / [email protected] / www.lechabada.com

BEBOP / Julien Martineau28 avenue Jean-Jaurès, 72100 Le MansT. 02 43 78 92 30 / [email protected] / www.oasislemans.fr

FUZZ’YON / Benoît Devillers18 rue Sadi-Carnot, 85005 La Roche-sur-Yon CedexT. 02 51 06 97 70 / [email protected] / www.fuzzyon.com

LE 6PAR4 / Eric Fagnot177 rue du Vieux St Louis, 53000 LavalT. 02 43 59 77 80 / [email protected] / www.6par4.com

TREMPOLINO / Lucie Brunet6 bd Léon-Bureau, 44200 NantesT. 02 40 46 66 99 / [email protected] / www.trempo.com

VIP / Emmanuel LegrandBase sous-marine, bd Légion d’Honneur, 44600 Saint-NazaireT. 02 40 22 66 89 / [email protected] / www.les-escales.com

INFOS

TOHU BOHU N°21 AUTOMNE 20114

Oui, il reste encore des labels de disques qui fêtent leurs 10 ans ! Et pour fêter son anniv’, YOTANKA sort coup sur coup le coffret Zenzile et le nouvel album d’Idem, respectivement 18e et 19e références, qui s’ajoutent à Nouvel R, Sweet Back, Mas Bajo… Deux beaux cadeaux au label et 19 aux mélomanes que vous êtes !

www.yotanka.net

1NAME4ACREW vous connaissez ? C’est un collectif (regroupant Sidony Box, Western Trio, Ekko et Gloss autour du projet 1Band4acrew) découvert

le 25 septembre dernier (lors du festival Spot à Nantes), un fantastique orchestre qui met le post-rock, le jazz, le métal sur la même portée, tout ça avec du dessin en live par Clémence Bourdaud (asso Le Chakipu) . Un peu les Do Make Say Think ou A Silver Mt Zion Nantais !

www.1name4acrew.com

PIANO CHAT, projet d’un Tourangeau mathématicien-rockeur, rejoint le box n°23 de l’écurie de Kithybong . Le poulain parcourt déjà les hippodromes de France…Et au triple galop !

www.pianochat.fr/

Micro label mais ultra méga producteur raisonné (enfin peut-être) SUPER APES ! Des petits moyens certes, mais un terroir fertile . Pour preuves, deux disques à sortir : la compil’ Tribute to Jorge Bernstein, le mythe nantais auquel 5 artistes rendent hommage, et

Kaleidoson, parisien illuminé et loufoque, membre de la Bernstein Corporation . La céréale s’appelle électro !

http://superapes.blogspot.com

Nantes est jumelée musicalement avec Tucson ! Brèche ouverte par Les Little Rabbits, amitié et collaborations entretenues depuis par le French Tourist . Après une 1e édition de la TUCSON NOCHE aux States, débarquent Messieurs Brian Lopez et Gabriel Sullivan, deux ovnis héritiers (entre autres) des Calexico et Giant Sand . 22 dates en France entre le 14 octobre et le 4 décembre 2011, pas d’excuse pour louper ça !

www.myspace.com/frenchtourist

On ne va pas se priver d’une DÉDICACE PERSO, alors on salue, on remercie, on souhaite le meilleur à Manu de Bebop qui quitte la province pour la capitale . Julien (qui le remplace), you’re welcome ! Quant à notre ambassadeur mayennais, membre du réseau Tohu Bohu, Eric Fagnot, il travaille dé-sormais dans les murs du 6PAR4 . Avis donc aux musiciens, assos et autres porteurs de projets à la recherche de contacts, infos, conseils, etc .

Pour tous les romantiques et adeptes de musique HARDCORE, MÉTAL, PUNK, ROCK’N’ROLL, rappelons l’existence d’un site de fans du genre . Tout y est : les bons plans concerts, sorties de disques, une webradio…

www.nantesmonamour.com

HORS SILLON c’est quoi déjà ? Benh un super blog où on choppe plein d’infos pour peu que l’on s’intéresse au disque et tout ce qui va avec . Des conseils, des infos, des données… récoltées par Dame Chloé de Trempo . C’est aussi depuis peu une émission diffusée sur TéléNantes .

www.trempo.com/hors-sillon/ www.telenantes.com/Musique/Hors-sillon

INFOS

TOHU BOHU N°21 AUTOMNE 2011 5

Rockeurs, rappeurs, métaleux, DJ’s… tous au Conservatoire de Mayenne ! Deux STUDIOS DE RÉPÉ vous y attendent, des studios équipés de sono, batterie, amplis, micros . . . et un control room pour l’enregistrement de démos .

Contact : 02 43 11 19 89 ou [email protected]

« Il est plus difficile de désa-gréger un préjugé qu’un atome », disait Albert Eins-tein . Voilà bien le combat mené par La Cimade . Du 18 au 27 novembre 2011, le FESTIVAL MIGRANT SCÈNE porté par La Cimade s’intéresse aux migrants et ouvre un débat de société, celui du vivre ensemble, contrairement à certains messages politi ques à quelques mois d’une échéance électorale . Débats, expos, cinéma, les arts pour porter une parole, un message . Allez-y !

www.migrantscene.org

On connaissait l’Europa Jazz qui proposait déjà dans sa program-mation du blues . Mais le blues a, depuis cette année, son festival en Sarthe : le SO BLUES FESTIVAL . Du 21 au 26 novembre 2011, honneur à une musique si revendiquée par les mu-siciens, quels qu’ils soient !

www.europajazz.fr

CULTURE BAR-BARS remet le couvert les 24, 25 et 26 novembre prochains, et c’est la 10e édition . Alors, un ptit conseil, organisez-vous bien . À moins que vous optiez pour la flânerie de bars à bars . Peut-être la meilleure option pour découvrir les lieux et les groupes . Rien qu’à Nantes, quelques centaines de propositions en 3 jours…

www.bar-bars.com

La rentrée du label angevin EGO TWISTER, c’est un 45t vinyle blanc de Niwouinwouin tiré à 300 unités, et une compile Party Ruiners volume 3 aussi en vinyle, jaune cette fois et 333 exemplaires . Ces beaux objets, on les commande ici :

www.egotwister.com

Non, les CITY SERIES NANTES n’est pas une nouvelle série américaine, mais bien des petites vidéos tournées dans différents lieux de la ville de Nantes . Sont filmés Von Pariahs, Marc Morvan & Ben Jarry, Will Guthrie, A Few My Nephew, Mansfield .Tya, My Name Is Nobody, Am Lily Andorphin Et The Patriotic Sunday . Retrouvez-les sur www.trempo.com, ou alors, pour les voir en grand format, une projection est prévue le 15 novembre à La Place (Trempolino à La Fabrique) .

Le BISTROT DU COURS, c’est l’ancienne Mayenne, sur le cours des 50 Otages à Nantes . Charles-Eric Charrier n’est pas que musicien, il devient « initiateur de projets » et surtout « initiateur de rencontres » . Pas très étonnant quand on connaît

toutes ses collaborations musicales . Alors, tous les 3e jeudi du mois, il vous invite à vous rencontrer et rencontrer des personnalités musicales aussi singulières que Black Sifichi, E Joung Ju, Cyril Secq…

Quel(s) point(s) commun(s) y-a-t-il entre Sidony Box, Ciocan, Glück, Malted Milk, Tribeqa, Vincent Courtois, La Pompe, Hazebrouk/Omar Sosa, BoNObo… : ils colorent l’affiche de JAZZ TEMPO, festival de jazz en région, qui se tiendra du 3 novembre au 2 décembre, une véritable photographie de ce qui se fait de mieux en jazz dans notre région .

www.crdj.org

Il pleut DES DISQUES en cette rentrée . Certains arrivent après bouclage, mais ne vous inquiétez pas, on leur réserve de la place dans le numéro 22 : Chausse-Trappes, Tabloïd, Belles de Jour, Les Fils Canouche, Zeka Lopez, Jack In My Head, Bi .ba, Ghost in Saturn, Electric Love Band… .Ça ne vous empêche pas d’aller déjà écouter !

ARTISTES

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TU AS COMMENCÉ CE PREMIER ALBUM EN SOLO AVANTDE LE TERMINER EN QUARTET, POURQUOI CETTE ÉVOLUTIONEN COURS DE ROUTE ?

C’est la réalisation de l’album qui a confirmé le choix d’aller dans cette direction . Ce fut la première étape importante dans ce processus d’évolution . J’avais envie de bosser avec Romuald Gablin, de faire un travail de studio plus arrangé sans savoir ce que cela donnerait . J’ai donc fait des essais et me suis rendu compte que le projet collait parfaitement lorsque tu y ajoutais un DJ ou un pianiste . Nous en sommes restés là . Puis j’ai rencontré une personne qui m’encourageait à travailler avec des musiciens, lui même en connaissait, et m’a donc présenté Nino le pianiste, Solène la violoncelliste et DJ Slade . Je ne voulais pas associer 3 musiciens de la même famille pour éviter de tomber dans un son trop

formaté, j’avais envie de proposer quelque chose de plus métissé . Le hasard a voulu que je rencontre des musiciens avec des profils différents, cela s’est réalisé sans calcul et a conforté le sens vers lequel je souhaitais aller . C’est comme cela que le Babel Quartet a commencé .

CETTE NOUVELLE FORMULE EST ELLE UNE MANIÈREDE SE DÉMARQUER DES CODES PARFOIS ÉTRIQUÉS DU MONDEDE LA CHANSON ?

Aujourd’hui nous sommes en permanence dans un rapport d’identification, cela doit avoir un côté rassurant de te mettre dans une catégorie parce que cela doit valoir tel prix . Tu dois trouver ta place et la garder . J’ai du mal avec ce discours car j’estime être toujours en mouvement, il ne s’agit pas de papillonner mais de s’intéresser à diverses choses

À LA FOIS CONTEUR, SLAMEUR ET CHANTEUR, BABEL CULTIVE UNE CERTAINE IDÉE DE LA POLYVALENCE QU’IL IMPRIME À COUP DE RIMES DANS UN RÉPERTOIRE CHANT-SON QUI MÉRITE LE DÉTOUR. ENTOURÉ D’UN PIANISTE DE JAZZ, D’UNE VIOLONCELLISTE CLASSIQUE ET D’UN DJ, IL TENTE DES RAPPROCHEMENTS OSÉS POUR MIEUX SE RETROUVER DANS UN QUARTET DÉTONNANT. ENTRE LA SORTIE DU PREMIER ALBUM ET LE RODAGE DU NOUVEAU SPECTACLE, BABEL FAIT LE TOUR DE SON NOUVEAU PROJET TRÈS PROMETTEUR.Par Éric FagnotPhotos : Richar Vella

BABELAUTOUR DE…

ARTISTES

TOHU BOHU N°21 AUTOMNE 2011 7

qui finissent par construire un chemin . J’essaie de cheminer et de ne pas rester cloisonné à ma place de chanteur pour être mieux identifié . Pour en revenir au style musical, on appelle cela du chant-son . C’est de la chanson basée sur la mise en avant du texte et de la musique derrière . Quand bien même la musique est très étoffée, les arrangements sont recherchés, cela reste de la chanson .

À L’ÉCOUTE DE L’ALBUM ON PEUT DÉCOUVRIR CERTAINS TITRES ENGAGÉS, EST-CE UN MOYEN POUR TOI DE CONSIDÉRER LA CHANSON COMME UN HAUT-PARLEUR POLITIQUE ?

C’est vrai que certaines chansons peuvent avoir une connotation politique comme « L’évadé » ou « Petit rossignol », on peut dire qu’elles sont engagées mais je ne me considère pas comme un chanteur engagé . Je ne veux pas sacrifier la chanson pour un engagement, il peut intervenir par petites touches, parce que je ne me sens pas légitime de brandir le poing ou de porter un drapeau . Je préfère que l’engagement soit au service de l’histoire et non l’inverse . J’aurais l’impression d’y perdre quelque chose d’un point de vue artistique . C’est plus le plaisir de jouer avec les mots qui peut m’emmener sur certains terrains . Le chanteur engagé va partir d’une idée alors que je vais plus jouer sur une émotion en essayant de plus parler avec les tripes qu’avec la tête .

L’INTÉGRATION DES MUSICIENS A-T-ELLE MODIFIÉ LA MANIÈRE DE TRAVAILLER TA MUSIQUE ?

Le son qui se dégage du quartet est largement lié au groupe, c’est une aventure dont je suis la locomotive mais qui devient de plus en plus collective avec un engagement de chacun dans l’histoire . On essaie de fonctionner de façon démocratique dans la création des arrangements et des compositions, tout en gardant l’idée que cela reste de la chanson et que le texte doit être entendu . Au-delà de l’artistique, le projet est enrichissant humainement . La formule solo avait ce côté appréciable d’être libre mais en même temps présentait une limite dans la manière de composer . Le quartet permet d’aller plus loin dans la composition ou l’arrangement, cette formule est aussi très libératrice dans la manière d’aborder la scène . Avant j’étais tout seul sur un fil et j’essayais de passer en force avec le public, ce qui pouvait comporter certains risques . Alors que là tu es plus dans le confort, la formule apporte de la stabilité, de l’assise rythmique qui permet de se libérer dans la manière de chanter .

L’ALBUM PEUT-IL AUSSI BIEN SE DÉFENDRE DANS LES CENTRES CULTURELS QUE DANS LES SALLES MUSIQUES ACTUELLES ?

Quelques dates commencent à tomber, en ce moment nous préparons le concert de la sortie

de l’album, programmé mi-octobre au 6PAR4 (Laval) . Du côté de la structuration professionnelle, l’équipe s’étoffe progressivement, ce sont entre 7 et 8 personnes qui travaillent pour le Babel Quartet . L’objectif prioritaire est de trouver un manager qui occuperait la place que j’occupe actuellement . Une personne avec si possible une sensibilité artistique qui puisse nous mettre en lien avec des partenaires susceptibles de faire avancer le projet . Un intermédiaire qui sait frapper aux bonnes portes . Quant à la question du tour, nous avons a priori notre place sur la scène « chanson », c’est un peu les retours que nous avons eu de la part des programmateurs notamment ceux qui nous ont vu au Chainon Manquant . Par contre, nous avons moins expérimenté le réseau des salles musiques actuelles, mais je pense que l’on a notre place sur les deux tableaux . C’est quelque chose d’assez actuel tout en étant chanson . Il me semble qu’on peut jouer à peu près partout .

Après quelques années de nomadisme, seul à voyager dans la rime, Babel s’est entouré d’un pianiste jazz, d’une violoncelliste classique et d’un DJ pour proposer un nouveau répertoire chant-son . Il le concrétise dans un premier album surprenant, et réussit du même coup à bousculer les codes parfois formatés de la chanson . Les textes chantés ou slammés convoquent des thèmes variés, prenant parfois le risque de se hisser sur des terrains engagés « L’évadé » ou « Petit Rossignol », l’artiste sait aussi être poétique avec « Le Monde », chanson majestueuse qui clôture l’album . C’est aussi dans le plaisir de jouer avec les mots « Mai slamante-huit » que se révèle une plume à la fois grinçante et singulière . La nouveauté réside dans la texture sonore où le Babel Quartet se permet des accointances musicales audacieuses entre beats hip hop et coups d’archets, ambiance jazzy et guitare apaisée . Les langages s’emmêlent en un habillage musical subtil, enveloppent les mots pour créer au final la bande originale du texte . Un changement de cap concluant .

Éric Fagnot

www.myspace.com/babeltourwww.babelquartet.com/

BABEL QUARTET L’évadéAP, Musicast - 2011

ARTISTES

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QUI AURAIT IMAGINÉ, IL Y A UNE DIZAINE D’ANNÉES, LE CHABADA D’ANGERS EN INCUBATEUR DE MUSIQUES À DANSER ? NON PAS QUE HINT OU ZENZILE NE SOIENT PAS GÉNÉRATEURS DE TRANSES COLLECTIVES, MAIS IL Y A UN PAS AVEC LA MUSIQUE DU DJ PRODUCTEUR ARNO GONZALEZ. INITIATEUR DES FAMEUSES SOIRÉES MODERN FACTORY (AU CHABADA, JUSTEMENT), IL FRANCHIT UN CAP AVEC SON PREMIER ALBUM.Par Manu LegrandPhoto : DR

TU DIS DESTINER TA MUSIQUE AUX CLUBBERS. ON SE DITGÉNÉRALEMENT QUE CE PUBLIC N’EST PAS FORCÉMENT SENSIBLE AU FORMAT ALBUM. DE PLUS LA CIRCULATIONDE LA MUSIQUE SUR LES PLATEFORMES DIGITALES FAVORISE PLUTÔT LES SINGLES. POURQUOI ALORS AVOIR DÉCIDÉDE FAIRE UN LONG FORMAT ?

Pour s’affranchir des codes et des obligations du format maxi, pouvoir raconter une histoire sur la longueur (12 morceaux), ralentir le tempo sur certains tracks ou encore travailler des structures différentes . Travailler sur cet album m’a également appris a composé sur un ensemble de tracks en même temps, afin d’avoir un sound design cohérent sur le projet . Je pense également qu’il était temps pour moi de proposer un projet plus consistant que quelques maxis et remixes . Quant au débat sur les plateformes digitales, libre à ceux qui ne veulent que quelques titres de l’album de les acheter sans le reste, libre à ceux qui veulent acheter le CD de le faire aussi . Ces derniers auront le privilège d’avoir un bel objet avec le projet global entre les mains et moins cher qu’en achetant tous les tracks en digital . Tout le monde y trouvera donc son compte . . .

AS-TU CONÇU « ENCOUNTERS » POUR LE JOUER DANS LES CLUBS ?

Quelques tracks trouveront leur place sur les platines de certains DJ’s mais d’autres sont plus

ARNO GONZALEZD(‘)ANGER(S) ON THE DANCEFLOOR

ARTISTES

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destinées à une écoute « domestique » . Je ne me suis jamais mis en tête de ne faire que dans l’efficacité, autant rester dans un format maxi pour cela . De plus les notions de groove et de retenue sont très importantes pour moi et dominent cet album .

CET ALBUM A T-IL ÉTÉ PENSÉ ET PRODUIT COMME UN ENSEMBLE OU AS-TU RÉUTILISÉ DU MATÉRIEL DE TES PRÉCÉDENTS EP ?

Tout a été produit entre 2010 et 2011 pour cet album . La question m’a longuement trotté dans la tête, je voulais peut-être y intégrer d’anciens titres tels que « My link to the past » (Missive Music) ou encore « Deadline » (Timid Records), deux EP joués dans les sets de Richie Hawtin il y a quelques temps . Au final, j’avais assez de matériel pour ne proposer que de la nouveauté et une plus grande cohérence dans le son, le travail ayant été effectué durant la même période .

IL Y A DE NOMBREUX FEATURING SUR L’ALBUM. PEUX-TU NOUSEXPLIQUER CES RENCONTRES ET CE QUE CHACUN A APPORTÉ À « ENCOUNTERS ».

« HIPPY FREAKS » FEAT. JONAS SELLAJonas Sella a découvert la musique électronique en venant aux « Modern » que j’organisais à l’époque dans un petit club à Angers (Le Jungle Jane) . Il apporte au track des plans de cut de voix dont lui seul a le secret et des tomes qui remplacent aisément une ligne de basse qui tarde à rentrer pendant que je m’amuse à placer des mélodies et rythmiques qui s’insinuent dans ce joyeux bordel .

« WASTING MY TIME » FEAT. GEORGES GUELTERSJe connais Seb (son vrai nom) depuis au moins 15 ans . Il a joué dans de nombreuses formations angevines en tant que percussionniste : Soulchoc (hip-hop) puis La Cellule (funky house) ; a formé le duo Bed & Breakfast, Stéréo Lips puis continué en solo sous le nom de Georges Guelters . Il a une faculté à développer de superbes mélodies dans ses tracks . Paradoxalement dans « Wasting my time », nous avons au final un track essentiellement basé sur le groove avec une ligne de basse profonde auquel il apporte une rythmique ciselée . . . Le contre-pied a parfois du bon .

« ENCOUNTERS » FEAT. THOMAS SARIThomas Sari est un artiste belge (Bruxelles) que j’ai rencontré pour la première fois lors d’une soirée Missive au Nouveau Casino . J’avais déjà remixé un de ses morceaux pour le label mais le voir en live m’a convaincu de le faire venir jouer sur Angers et par la suite de l’impliquer dans mon projet d’album . C’est un ingénieur du son de formation qui aime faire sonner ses claviers . Le résultat : deepness, funk et hypnotisme !

« MODERN » FEAT. TEPRTEPR était en résidence au Chabada à Angers avec son projet Abstrakt Keal Agram (qui a mué en Fortune par la suite) lorsque je l’ai rencontré la première fois . Nous nous sommes tout de suite très bien entendus lors de sa venue à la soirée « Modern » avec son projet solo . Nous sommes toujours restés en contact . Malgré une actualité très chargée (avec Yelle notamment), il a activement participé à cet album de part son featuring sur le track « Modern » où il apporte puissance et efficacité, mais également en m’épaulant dans le mixage final de l’ensemble des tracks de l’album . Il a cette faculté à s’intéresser à tous les styles musicaux et à travailler très rapidement . C’est un vrai geek de production, j’ai beaucoup appris à ses côtés durant cette dernière phase .

« MAR BELLA » FEAT. OR’LOR’L est un ami de longue date rencontré à Saint-Malo où il officiait dans « Party People », une association de joyeux trublions qui ont fait beaucoup pour la musique électronique . Il est par la suite devenu dj résident et programmateur de L’Escalier (Saint-Malo) . Il sort de plus en plus de maxis sur de nombreux labels, en solo ou en duo sous le nom « Dirty Virgin Breaker » mais nous n’avions jamais pris le temps de travailler sur un projet commun . Il apporte son côté soulful dans ce « Mar Bella » . . . Les pieds dans l’eau en quelque sorte . . .

ARNO GONZALEZ EncountersTimid Records - 2011

Arno Gonzalez, avec ce premier album, passe de la piste de danse au canapé . Habitué des sound sytems puissants d’une palanquée de clubs européens, il se plie à l’exercice de la musique « domestique » . Et si ses talents de maître à dan-ser sont à présent reconnus par tous, force est de constater qu’Arno Gonzalez est tout simplement un excellent musicien . Encounters est un exemple de maîtrise, un disque soigné, voire soyeux ou Arno Gonzalez ba-lade l’auditeur aux quatre coins de son univers .

Manu Legrandwww.timid-records.com

ARTISTES

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CE NOUVEL ALBUM SONNE TRÈS DIFFÉREMMENT DE « CHARACTERS ». C’EST DU AU FAIT QUE TU ES DÉSORMAISACCOMPAGNÉ DE LA TERRE TREMBLE!!!, OU BIEN TU L’AVAIS IMAGINÉ COMME ÇA DÈS LE DÉPART ?

« Characters » a été réalisé en 2007 et en 2008 donc ça fait déjà un certain temps . Je crois que mes envies ont changé au fur et à mesure du temps . J’ai rencontré Julien, Paul et Benoît lors de concerts avec Papier Tigre et The Patriotic Sunday . On s’est bien entendus humainement et musicalement . On avait envie d’essayer des choses ensemble . J’avais dans l’esprit une formule assez simple avec des morceaux plus bruts que ceux de « Characters », des textes plus imagés et poétiques que narratifs . On s’est retrouvés pour tenter des choses pendant quelques jours, et spontanément les morceaux que j’avais s’en retrouvaient tout chamboulés . Tout est allé assez vite après deux sessions d’arrangements, on s’est mis à enregistrer avec Miguel Constantino quelques mois après . Je n’avais pas imaginé grand chose, mais ce qu’on a pu réaliser m’a tout de suite plu . Après, sur l’enregistrement, nos idées se sont entremêlées pour réaliser « Actual Fiction » . Je pense notamment aux chœur que Paul a arrangés avec Astrid Radigue et Caroline Aubert . J’ai continué à collaborer et à

m’entourer des personnes avec qui je n’avais jamais travaillé auparavant notamment pour la pochette de Pierre Verdon (de Pan!) ou le clip de « A Set Of Seemingly Disconnected Words » de Benjamin Ferré . Ces rencontres ont vraiment permis d’apporter un souffle nouveau au projet tout en créant plein de nouvelles perspectives pour la suite .

ON SENT QUELQUES INFLUENCES BRÉSILIENNES DANS CE DISQUE. IL Y EN AVAIT PEUT-ÊTRE D’AUTRES AUPARAVANT MAIS JE NE LES AVAIS JAMAIS ENTENDUES À CE POINT. C’EST UNE SOURCE D’INSPIRATION RÉCENTE ? QU’EST-CE QUE TU TROUVES DANSLA POP BRÉSILIENNE DES 60’S/70’S QUE TU NE TROUVES PAS CHEZ LES GROUPES ANGLO-SAXONS DE LA MÊME ÉPOQUE ?

Il y en avait déjà pas mal à l’époque de mon premier disque, « Lay Your Soul Bare » (collectif Effervescence, 2005), surtout de la bossa-nova car j’étais bien obsédé par Joao Gilberto, où l’harmonie guitare/voix est poussée à son paroxysme . Je suis venu plus tard aux petits

THE PATRIOTIC SUNDAYFICTION DU DIMANCHE

ÉRIC PASQUEREAU NE S’ARRÊTE JAMAIS. QUAND IL N’EST PAS PAR MONTS ET PAR VAUX AVEC PAPIER TIGRE, LE CHANTEUR/GUITARISTE NANTAIS SORT D’EXCELLENTS DISQUES SOUS LE NOM DE THE PATRIOTIC SUNDAY. SON TROISIÈME ALBUM S’APPELLE « ACTUAL FICTION » ET A ÉTÉ REALISÉ EN COLLABORATION AVEC SES COLLÈGUES DE LABEL, LE TRIO «LA TERRE TREMBLE !!!» L’OCCASION DE DISCUTER LE BOUT DE GRAS AVEC UN PASSIONNÉ DE MUSIQUES AU PLURIEL.Par KalchaPhoto : Xavier Mora

ARTISTES

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frères comme Caetano Veloso, Os Mutantes . . . Ils ont une liberté et une matière incroyable, entre influences pop anglo-saxonnes, héritage musical brésilien et expérimentations diverses . Ils se jouent des codes aussi bien dans la langue (les textes et les voix) que dans l’instrumentation . Pour moi, ils sont un complément parfait à ce que pouvaient faire les Beatles, les Zombies ou le Velvet à la même époque . Ils apportent un regard neuf, une envie de folie et d’excentricité en contradiction complète avec les dictatures militaires qui arrivaient au pouvoir lors de l’éclosion de ces mêmes musiciens . D’ailleurs pour ceux que ça intéresse, le label Soul Jazz a fait paraitre récemment deux compilations très réussies : une sur la bossa nova (« Bossa Nova : The Rise of Brazilian Music in The Sixties ») et une autre sur le mouvement tropicaliste (« Tropicalia : A Revolution In Sound ») .

IL Y A EN CE MOMENT UNE TOTALE REDÉCOUVERTE DES DISQUES DES PAYS NON-ANGLO-SAXONS (SCÈNE PSYCHÉDELIQUE, ÉTHIOPIQUES, ETC.) PAR LES GROUPES DE POP OU ROCK ANGLAIS ET AMÉRICAINS. EST-CE QUE C’EST QUELQUE CHOSE QUI TE TOUCHE ÉGALEMENT ? QUI OUVRE DES PERSPECTIVES ?

Ce phénomène n’est pas forcément nouveau . Des groupes anglo-saxons s’intéressent à ces musiques depuis longtemps, comme les Talking Heads par exemple, qui est un groupe qui mérite le statut culte qu’on lui confère enfin . Le post-punk jusqu’à « Graceland » de Paul Simon explore différents métissages musicaux . Certains sont réussis d’autres non . Grâce au MP3, les musiques sont diffusées librement, beaucoup de jeunes groupes ont accès à énormément de musiques en très peu de temps . Je trouve ça très bien qu’ils s’inspirent des artistes psychédéliques ou autres en marge du mainstream . Après, comme toujours, beaucoup de choses sont trop édulcorées pour être captivantes dans la musique d’aujourd’hui, mais ça ouvre des perspectives musicales intéressantes, ça permet de décloisonner les genres et parfois de sensibiliser le grand public à des musiques un peu plus exigeantes .

J’AI TOUJOURS ÉTÉ BEAUCOUP TOUCHÉ PAR TA VOIX.JE NE SAURAIS DIRE SI TU CHANTES JUSTE AU SENS MUSICAL DU TERME MAIS TU FAIS EN TOUT CAS PASSER BEAUCOUP D’ÉMOTION, JE TROUVE. TU LA TRAVAILLES BEAUCOUP ? QUELLE EST TA DÉFINITION D’UN(E) BON(NE) CHANTEUR(SE) ? TU PEUX CITER DES EXEMPLES DANS LES GENS QUI T’ONT MARQUÉ ?

Merci . Je crois que le bon chanteur est celui qui sait ce qu’il dit . David Berman (des Silver Jews), Billie Holiday et David Yow (de Jesus Lizard) sont des grands chanteurs parce qu’ils subliment le texte

avec une énergie, un vécu et une personnalité singulière . C’est plus que de la justesse . Je suis très loin de ces gens-là . Mais j’essaie d’être le plus juste possible dans cette définition-là . Après, la manière dont chacun le perçoit est très personnelle .

J’AI CRU ENTENDRE DIRE QUE TU AVAIS FAIT TON PREMIER CONCERT À LA BEAUJOIRE. TU PEUX REVENIR SURLES CIRCONSTANCES ET TES IMPRESSIONS ?

Trempolino m’a proposé de me filmer tout seul en acoustique dans un lieu de la ville dans le cadre des films City Series Nantes (co-produit par Kidam et Trempolino avec le soutien de la Ville de Nantes, NDLR) . En tant que supporter du FC Nantes, j’ai demandé immédiatement La Beaujoire . Pour rigoler . Et puis, les autorités ont validé mon après-midi en communion tout seul au milieu de la pelouse . Après, la chanson (« Self Employement ») est un peu grave et ne parle pas du tout du foot . Mais la tristesse est là, quand je vois certaines passes ratées et autres fautes techniques qu’ont pu réaliser différents joueurs ces dernières années . J’espère que le jeu de la balle au pied reviendra dans ce club vite, même si là, au moment où l’on parle, c’est pas si mal .

Le dernier album de Eric Pasquereau aka The Patriotic Sunday, « Characters », pouvait être considéré comme la seule réponse française crédible à la pop alambiquée de Why? ou Pa-vement . Son troisième album sous ce nom s’éloigne singulièrement de ces ambiances . Peut-être parce que le groupe qui l’accompagne n’est plus le même? Désormais entouré de La Terre Tremble!!!, Eric Pasquereau développe une pop au premier abord plus classique, mais dont les nombreux clins d’œil (à la folk, à la bossa nova ou à la noisy pop) donnent toutefois au disque toute sa personnalité . Il manque peut-être tout de même à ce « Actual Fiction » un ou deux tubes du calibre de « Jonas » ou « Capital Letters » pour s’imposer immédiatement . Mais Pasquereau peut toujours compter sur sa voix magnifique et son chant parfait pour marquer des points sur la durée .

Kalchawww.collectif-effervescence.com

THE PATRIOTIC SUNDAY Actual FictionEffervescence/Differ-Ant - 2011

ARTISTES

TOHU BOHU N°21 AUTOMNE 201112

JE ME SOUVIENS (VAGUEMENT) D’UNE DISCUSSION QUE NOUSAVIONS EUE À PROPOS DE CE QU’IL FALLAIT POUR ÉCRIRE UNE BONNE CHANSON DE BLUES. JE L’ÉVOQUE VAGUEMENT D’AILLEURS DANS MA CHRONIQUE DE TON DERNIER ALBUM MAIS QU’EST-CE QUI SELON TOI FAIT UNE BONNE CHANSONDE BLUES ?Je ne me souviens pas de cette discussion, mais je pense que le blues n’a rien à voir avec la chanson, c’est ça qu’il faut comprendre, le blues n’est pas un ingrédient .

OK, MERCI POUR TA FRANCHISE. POUR RESTER DANS CETTE CONFRONTATION DE POINT DE VUE ENTRE CHRONIQUEURET CHRONIQUE, QU’EST-CE QUI A CHANGÉ DANS TA MUSIQUE ENTRE « BLUES COOKED FOR CANNIBALS » ET « PLUKED AND FUCKED ? » QUEL EST DONC POUR BAA LE FAMEUX « CAP DU DEUXIÈME ALBUM » ?Franchement c’est pas un problème .

ENCORE MERCI, MAIS NE PARLE PAS TROP, ÇA ME FATIGUEUN PEU, TA VOIX EST TRÈS DÉSAGRÉABLE. SINON POURQUOICE NOM D’ALBUM ? Cuisiner de l’humain, et en manger, c’est ce qu’on fait quand on est vivant, métaphoriquement bien sûr . « Blues Cooked for Cannibals », c’est un titre qui ne veut à la fois rien dire et qui résume tout, puisqu’il faut toujours nommer les choses . . . . .

LE NOM MÊME DU « GROUPE » BIRDS ARE ALIVE EST PLUTÔTÉTRANGE. MOI ÇA M’A TOUJOURS FAIT PENSER À RICHARDCHAMBERLAIN DANS « LES OISEAUX SE CACHENT POURMOURIR ». Il n’y a pourtant pas de quoi se cacher, mourir est une chose bien naturelle non ? Enfin, encore faut-il couler des jours paisibles, à l’abri des chasseurs .

J’AI L’IMPRESSION QU’IL Y A DE PLUS EN PLUS SOUVENTUN RAPPORT À L’AFRIQUE DANS CE QUE TU FAIS. LE PREMIERMORCEAU DU DERNIER ALBUM SONNE D’AILLEURS TRÈSAFRICAIN (SELON MOI).

VOILÀ DE RETOUR LE GRAND ESCOGRIFFE ROMAIN MARSAULT, AKA BIRDS ARE ALIVE (BAA) AVEC UN TRÈS BON NOUVEL ALBUM, « BLUES COOKED FOR CANNIBALS », SORTI CHEZ LE NON MOINS BON LABEL NANTAIS KIZMIAZ RECORDS. APRÈS QUELQUES JOURS DE TRAQUE INTENSE, J’AI RETROUVÉ LA TRACE DE L’OISEAU ALORS EN TOURNÉE ESPAGNOLE, QUELQUE PART ENTRE BARCELONE ET MADRID, ET TENTÉ DE LE CUISINER DANS UNE INTERVIEW DÉMATÉRIALISÉE UN BRIN SURRÉALISTE… Par Ben DevillersPhoto : Faustine Seilman

BIRDS ARE ALIVEAUX PETITS OIGNONS

ARTISTES

TOHU BOHU N°21 AUTOMNE 2011 13

Disons que la musique d’Ali Farka Touré est arrivée dans mes oreilles, et j’ai commencé à essayer d’en faire quelque chose .

QUE PENSES-TU JUSTEMENT DE CETTE SCÈNE BLUES AFRICAINE,CELLE DES TOUAREGS COMME TINARIWEN OU TERAKAFT,OU BIEN DES MALIENS COMME BOUBACAR TRAORE OU DU JEUNE VIEUX FARKA TOURE ?Je connais peu la musique africaine, Ali Farka Touré surtout, comme je te le disais, Tinariwen aussi, et j’y suis sensible .

TU AS OUVERT POUR LES DEUX DERNIÈRES DATES DES BLACKKEYS EN FRANCE, À L’OLYMPIA ET À L’OLYMPIC. QU’EST-CE QU’ON RESSENT DANS CE CAS-LÀ ? AS-TU PU ÉCHANGER UNPEU AVEC EUX ? SAIS-TU S’ILS ONT VU TES PRESTATIONS ?C’était très surréaliste . Je n’ai pas vraiment eu l’occasion d’échanger quoi que ce soit si ce n’est une poignée de main et une mauvaise blague sur les Japonais .

ON A PARLÉ DE LA SCÈNE BLUES AFRICAINE, ON A PARLÉ DE LANOUVELLE GARDE DES BLACK KEYS, MAIS QUI REPRÉSENTE SELON TOI LE BLUESMAN ULTIME PARMI LES VIEUX DE LA VIEILLE AMÉRIQUE ? ON CITE SOUVENT ROBERT JOHNSONOU CHARLEY PATTON, QU’EN DIS-TU ?J’ai ma petite préférence pour R .L . Burnside mais en plus antique, je dirais Son House et Mississipi Fred Mc Dowell .

COMMENT TE SITUES-TU DANS LA SCÈNE NANTAISE ACTUELLE ?D’AILLEURS, CONSIDÈRES-TU QU’IL Y AIT VRAIMENT UNE SCÈNE NANTAISE PARTICULIÈRE ?Non, les choses sont beaucoup plus profondes que ça, heureusement et d’abord je ne suis pas Nantais . À Nantes, il y a des musiciens que j’apprécie, des copains qui organisent de belles choses, dans le peu de lieux alternatifs qu’on peut encore trouver, il y a des labels indépendants, ça c’est important* . La scène nantaise, ça ne veut rien dire puisque ça résume les choses .

C’EST QUOI LES AVANTAGES ET LES INCONVÉNIENTS À TOURNERTOUT SEUL ? N’EN AS-TU PAS MARRE DU FORMAT ONE MANBAND, DE TOURNER TOUT SEUL ? PAS DE PROJET DE GROUPEÀ L’HORIZON ? Je ne sais pas conduire une voiture, je suis souvent avec des amis quand je pars jouer quelque part, ou alors en train, finalement je suis très assisté pour un one man band . Pour les projets, rien de concret mais j’ai bien envie de faire aussi de la musique avec d’autres humanoïdes dans le futur .

POUR FINIR, JE CROIS QUE TU SAIS AUSSI FAIRE AUTRE CHOSEDE TES DOIGTS, TU AS NOTAMMENT RÉALISÉ PAS MALDE TES AFFICHES ET MÊME LE VISUEL DE TON PREMIER ALBUM.J’AI ENTENDU PARLER D’UN PROJET DE FANZINE, J’AI RÊVÉOU BIEN ?Ca s’appelle « Dépôt, Dessins et Poésies », j’en ai fait imprimer 100 du n°1 en avril, mais ils ne sont toujours pas reliés, et c’est entièrement de ma faute si ça traîne . Quand je pense que j’avais donné une deadline aux potes qui y participent . . . C’est sûrement pour ça que j’ai pas de groupe, je ne suis pas fiable .

* NDLR : comme notre oiseau est un grand timide, on balancera pour lui le nom des amis en questions : du côté des organisateurs Loubards Pédés, Back to Garage, Force Béton ; du côté des labels Kythibong, Kizmiaz… Et pour les copains, citons entre autres Faustine Seilman et The Healthy Boy, avec qui il était en tournée dans la péninsule ibérique au moment de l’interview.

BAA a tout compris au songwriting blues : une bonne chanson parle de cul, de nanas, de cul ET de nanas, de cuites, de trahison, de bagarres, de la bonne et surtout de la mauvaise conscience . . . C’était déjà le cas dans le premier opus, mais puisque pour tout second un chroniqueur doit trouver quel cap le chroniqué a franchi, on s’attardera ici sur la prod du disque . Si l’aîné était roots comme une signature Alive Records, on découvre un petit dernier plus léché . Et ce, d’entrée de jeu avec une émouvante balade guitare-voix à la sonorité presque africaine . Les arrangements ne se limitent pas au poum-tchack-gratte du live et nous font découvrir le savoir-faire du grand oiseau à l’harmonica, tandis que des cuivres viennent épaissir deux autres compos . Dont l’avant-dernière, qui paradoxalement renoue avec l’abrasivité du premier album . BAA ne s’assagit pas, il a simplement mûri dans un bon vieux fût .

Ben Devillerswww.birdsarealive.frwww.myspace.com/kizmiazrecords

BIRDS ARE ALIVE Blues Cooked For Cannibals Kizmiaz Records - 2011

PROJETS

TOHU BOHU N°21 AUTOMNE 201114

N’allez pas croire que le disque se porte mieux . Si un nouveau label nantais est né, ce n’est pas tant pour vendre du disque que pour mettre en avant des artistes dont la qualité n’est pas à prouver, et pour lesquels aucun label n’a jusqu’à présent mis un kopek . « De nombreux amis musiciens qui font une musique de qualité ne sont pas publiés », avoue Lolek . C’est un peu le pourquoi du comment . Ovvk Recordings est donc né un jour de 2005 .

Avant d’être micro-label, Ovvk Recordings est une sorte de boîte de dépôt, un point écoute virtuel, une plate-forme sur le web où des artistes déposent des mp3, et invitent les internautes à aller les écouter via des forums spécialisés . Figurent alors sur cette plate-forme des artistes aussi divers que Jake Manley (Jellica), JB Boutet (Triton, Jean-Brique Bête), Stefan Threadgold (Stethr), Lolek .

Artisans dans l’âme, Lolek et JB travaillent le composite « musiques expérimentales et musiques plus pop », et collaborent avec des artistes qui font passerelle entre ces deux aspects . « Nous avons pas mal d’artistes électronica mais c’est déjà un genre qui comporte beaucoup de styles différents . Notre première compilation à venir en novembre, Opening Sampler, recoupe ce genre mais on pourra y entendre des accents krautrock, électro-acoustiques . Une deuxième compilation à sortir cet hiver sera dédiée aux sons de guitares (indie rock, shoegaze, no-wave) . La troisième – qui sortira en 2012 – sera consacrée au sons acoustiques et électro-acoustiques » . Les compilations gratuites, un bon moyen de faire découvrir des artistes souterrains . Autre manière de voir les choses donc . Le label s’apparente à de la

promotion de groupes ou artistes, et à un véritable partenaire du projet puisqu’il cofinance à hauteur de 50% avec les artistes, et le produit des ventes est aussi partagé à hauteur de 50% .

Le catalogue compte aujourd’hui 15 artistes différents, nationaux et internationaux, entre lesquels les connections demeurent pérennes, des connections passées, ou actuelles, entre les musiciens nantais mais également entre David Guillochet (Shampoo) et Morgan Daguenet (Bertuf), membres des rennais de Mils . De la consanguinité tout ça, des histoires de sympathie .

Outre les connivences entre musiciens, Ovvk devrait se rapprocher de Bruit Clair pour sortir le projet Bidlo, un des premiers projets de Mathias Delplanque, car, comme le dit Lolek : « il est souhaitable de coproduire des albums en association avec un ou plusieurs labels » .Petites productions, sans intermédiaire, les formats sont donc plutôt des éditions limitées en CD-R et du digital, avec la forte envie de sortir du vinyle . Les packagings devraient évoluer vers des matières écologiques .

Ovvk fait fort en ce début d’automne . On reparlera de tout ça dans les numéros à venir . L’artisanat, ça a du bon !

http://ovvkrecordings.blogspot.com/

http://soundcloud.com/ovvk-recordings

OVVK RECORDINGS

Par Cécile ArnouxPhotos DR

PROJETS

TOHU BOHU N°21 AUTOMNE 2011 15

BARAKA PRODLES FONDEMENTS…Le projet de La Baraka est né de l’histoire de deux associations : She-bab Jeune, activiste dans le sport, qui militait pour l’éducation populaire, et de l’autre côté, MK3 Prod, qui œuvrait sur le plan artistique, côté musique . « Pendant 10 ans ça a duré comme cela, chacun fai-sant sa route . » En 2008, suite à l’essoufflement de leurs activités respectives, une fusion des deux struc-tures a été proposée . Ce rapprochement paraissait finalement logique dans leur idée d’intervention associative en local, tant sur un plan social que culturel .

… DE L’IDÉE AU PROJET…« Très simplement, la base de l’édifice a été posée lorsque le projet de l’artiste rap, Youkoff, commen-çait à prendre de la contenance . Le but était de sor-tir un 1er album . » Les comparses se sont alors réu-nis et ont décidé d’unir leurs forces pour se lancer dans l’aventure collective en commençant par ce projet d’album Le silence est cri, en 2006 .Leur mode d’intervention s’est donc très vite trouvé : de l’artistique comme vecteur de créa-tion de lien social . Concrètement et au-delà de la promotion, du développement et de la diffusion des cultures urbaines, l’association envisage les choses plus globalement, « on considère que nous sommes plus sur le champ de l’éducation popu-laire, à l’image des valeurs portées par les membres du combo . »« Sur le terrain, nous faisons de la diffusion, en organisant divers événements au cours de l’année (le festival Crèv’ la dale, Les rencontres orientales), on développe notre label et un studio d’enregistre-ment, et on endosse une mission de transmission et d’éducation, en proposant des ateliers de pra-tiques (atelier de danses hip-hop) . »

… CRÈV’ LA DALE, UN FESTIVAL POUR LIER LE TOUT…Il est la pierre angulaire du projet . « Il est l’expres-sion de notre envie d’agir au cœur de notre ville,

voire au-delà : faire parta-ger des découvertes musi-cales, faciliter l’accès à la culture pour le plus grand nombre – aussi bien par le tarif que dans les proposi-tions culturelles, à la fois larges et pointues – et favo-riser la mixité sociale et le vivre ensemble . Il est éga-lement une vitrine de l’en-semble de nos activités .»

… DES PARTENAIRES ET DES FORCES VIVES INCONTOUR-NABLES !« C’est ce qui fait la force du projet . Sans le sou-tien de nos bénévoles, du Conseil Général et la Ville d’Allonnes, nous ne pour-

rions avancer de la sorte . Il y a une politique de la ville très forte dans le soutien de notre démarche . Nous leur en sommes reconnaissants . »Ce n’est pas tout, pour mener le travail du dévelop-pement de la structure, l’équipe s’est élargie natu-rellement . « Produire un album demande beaucoup de travail, pour la communication, la distribution… Cela nous a permis d’ouvrir le champ à des per-sonnes qui ont des compétences et une optique associative pour poser les choses et penser déve-loppement . »L’équipe de La Baraka Prod, c’est 10 actifs au quo-tidien et 30 adhérents dynamiques pour la mise en place des événements . « Et depuis peu, toujours dans un souci de transmission, on a recours à un service civique volontaire pour soulager le travail des bénévoles . »

La Baraka Prod demeure une aventure humaine et culturelle, forte de savoir-faire, de volonté de trans-mettre, de partager et de s’ouvrir à l’autre .

www.labarakaprod.com

Par Emmanuel BoisPhotos : DR

GÉNÉRATION Y

TOHU BOHU N°21 AUTOMNE 201116

GÉNÉRATION Y

TOHU BOHU N°21 AUTOMNE 201116

GÉNÉRATION Y

Depuis mai dernier, Google a lancé son service de musique en ligne . Aujourd’hui encore, il n’est toujours pas accessible pour l’internaute, pourtant possesseur d’un compte Google, qui tenterait de s’inscrire à partir d’un pays autre que les États-Unis . Cependant, sans être un informaticien chevronné, une connexion momentanée au travers d’un proxy légal américain, suffira à passer outre cette interdiction et bluffera le service du géant américain . Celui-ci en est certainement pas moins dupe, en effet c’est un secret de polichinelle, mais soyez tout de même conscient que vous violerez au passage les termes des conditions d’utilisation . Par cette pseudo-restriction, Google se protège et veut tout simplement rassurer l’industrie du disque . Celle-ci, inquiète, guette tel le lait sur le feu, la moindre initiative du site américain . D’autres, on le sait désormais, se sont laissés surprendre . L’exemple le plus comparable est assurément le cas Google Books, qui fut pour le monde de l’édition et son réseau de distribution, le début de gros tracas .L’étape de l’inscription étant franchie, la restriction

géographique disparaît, il reste donc à tester la solution tant attendue . Tout d’abord le site est en révision «Beta», ce qui revendique, dans le langage web 2 .0, le premier signe d’un projet considéré comme non-abouti par l’éditeur . D’ailleurs Google se garantit de toutes éventualités pour ses futurs choix, de maintenir ou non le contenu en l’état et que l’accès demeure gratuit, en partie ou globalement . Google Music en quelques lignes, c’est la promesse de stocker dans son cloud votre propre musique (légalement acquise), dans un espace de 100 Go dans la limite de 20 000 titres, soit un potentiel de quelques dizaines de milliers d’heures d’écoute . Côté look, on retrouve bien la patte du leader, design épuré et sobre, bref, efficace . Quatre zones découpent l’interface . La plus haute avec logiquement son champ de recherche, pour

fouiner dans votre audiothèque . Celle de gauche pour naviguer par catégories telles que vos dernières acquisitions, les titres, les artistes, les albums et bien sûr vos playlists . Votre préférence à l’un de ces critères modifiera le contenu de la zone de droite . Celle-ci étant aussi la plus grande, elle vous permettra d’affiner votre recherche par de simples clics sur les pochettes ou autres liens . Puis, dans la partie basse de la fenêtre, vous trouverez la série de boutons classiques d’un lecteur audio, qui permettront enfin l’écoute en streaming de vos choix . Quelques secondes vous suffiront à mesurer le potentiel de l’offre, la philosophie de Music est d’ailleurs tout autant respectée pour l’interface plus «light» affichable par un smartphone .

La source principale pour alimenter votre espace sera avant tout, comme indiqué plus haut, vos fichiers audios personnels . Ils se devront d’être aux formats MP3, AAC (M4A), OGG, WMA, FLAC et l’upload ne leur fera subir aucune re-compression . Ils conserveront donc leur qualité lors de la lecture . Avant tout, vous devrez installer le logiciel Music Manager, normalement fourni via le site, mais à cause de la limitation que l’on sait, une petite recherche sur Google s’imposera pour le dénicher facilement . Sa mise en œuvre rapide vous conduira ensuite à choisir le(s) dossier(s) contenant les fichiers que vous souhaitez émettre, de façon automatique ou sur ordre . Ces fichiers ainsi reçus par votre Google Music, seront automatiquement classifiés dans le respect des tags dûment renseignés au préalable, sinon une édition de ceux-ci sera toujours possible par l’interface .

L’autre source proviendra de Google Music lui-même qui, par l’intermédiaire de son blog Magnifier et certainement en partenariat avec les labels, vous proposera régulièrement des titres gratuits, en respect de vos goûts (modifiables), exprimés à l’inscription . Il n’est pas admis de les télécharger, encore moins de les partager avec un tiers, seul une redirection vers les sites marchands est possible . Cela montre bien que Google avance à petits pas, pour ne pas froisser le milieu du disque déjà à cran, avant d’étendre son service au reste de la planète .

http://music.google.com

Par Denis DréanPhotos : DR

TOHU BOHU N°21 AUTOMNE 2011 17TOHU BOHU N°21 AUTOMNE 2011 17

THE NEXT BIG THING

YRIROADDUO POST FOLK, DÉCOUVERT LORS DE LA DERNIÈRE ÉDITION DU TREMPLIN LES ÉMERGENCES (LAVAL)« La commercialisation de la nouvelle loopstation de Boss : Lle RC 300 yeah !!!! »

BRUNO LEROYPRÉSIDENT/PROGRAMMATEUR DE BEBOP, 25E ÉDITION DU FESTIVAL CETTE ANNÉE (LE MANS)« La 1e chose très attendue, c’est évidemment le 25e anniversaire du festival qui se déroulera du 15 au 19 nov 2011 au Mans . La 2e est la renaissance du projet de L’Oasis que Bebop reprend en gestion, avec nous l’espérons la possibilité de développer des projets avec tous les acteurs du 72 . »

THOMAS CHÂTEAUPROGRAMMATEUR PÉNICHE EXCELSIOR (ALLONNES)Dominique A jouera en avant-première son prochain spectacle fêtant ses 20 ans de carrière le 23 janvier 2012 à la salle Jean Carmet . Au printemps 2012, La Péniche rouvrira après 18 mois de travaux . 4 jours de programmation, en partenariat avec des associations locales, célèbreront cette seconde naissance .

VAL ET MAX ARRIVÉ(EX-FILMS DU RÉEL) - LA LUNE RECORD, ASSOCIATION QUI A POUR BUT LA CRÉATION AUDIOVISUELLE (LA ROCHE-SUR-YON)« La renaissance du rock vendéen ! Après l’éclosion des fontenaysiens de Von Pariahs, la sensibilité de l’un des chanteurs de Ride The Arch (Angers) risque d’en envoûter plus d’un . . . Nouvelle scène prometteuse qui donne l’envie et des idées à de tous jeunes projets comme Kulbuto ou The Black Glawis ! Affaires à suivre . . .»

BENOÎT BENAZETDIRECTEUR/PROGRAMMATEUR DU FUZZ’YON (LA ROCHE-SUR-YON)« Bon beh je m’y colle . . . je pense que Lana Del Rey va faire parler d’elle en 2012 avec un album très attendu car calibré pour fonctionner (elle risque aussi d’en énerver plus d’un !) . J’aimerais quand même citer d’autres groupes car c’est hyper réducteur comme rubrique votre truc : Cabadzi, Hanni El Khatib, Juveniles, Hollie Cook, Dillon… »

GHOST IN SATURN?GROUPE QUI SORT UN MAXI DIGITAL SUR WHITE LABEL MUSIC,LE LABEL ANGLAIS FONDÉ PAR UNE EX-ADD N TO X (ANGERS)« On attend avec une impatience non-feinte, et sans ordre de préférence, l’album de David Lynch, le déclin de l’UMP, la sortie du « Gang des Lyonnais » d’Olivier Marchal, de chopper une bonne version de final cut et de savoir s’en servir . »

ROBIN GODICHEAURESPONSABLE ASSO CHAOU BAOU QUI VIENT DE FÊTER SES 5 ANS (SEGRÉ) « Si je dois formuler trois souhaits pour 2012, j’opterais pour récupérer un clignotant arrière gauche, affronter Étienne Jaumet au ping pong et faire les chœurs sur le prochain disque de Gablé . Ah, et je me rajoute en quatrième souhait d’aller voir le prochain film de Riad Sattouf . »

DAVID DAUNISLE HAUT PARLEUR, NOUVELLE FORMULE POUR LE MAG (SAINT-NAZAIRE)« Rodolphe Burger au LIFE de Saint-Nazaire, le 6 décembre 2011, avec les illustrateurs Dupuy & Berberian ! Je suis particulièrement sensible à l’artiste, à sa musique et à sa voix . . . bref à son œuvre depuis Kat Onoma jusqu’à sa carrière solo . Le voir, dans l’immensité du LIFE, en soit, c’est excitant . »

THIERRY VIAUDLE VIOLON DINGUE, UNE ÉNIÈME SAISON QUI COMMENCE (NANTES)«J’attends . . . J’attends un heureux événement, de pied ferme, au tournant .Un club . . . pas de foot, pas de golf, ou façon Drouot .J’attends . . . J’attends que les banquiers, les notai–res foutent le camp .Et qu’avec les amis, du bastringue plein les ouïes, on ouvre notre bistrot .»

JEFF FOULONPROGRAMMATEUR DU 6PAR4 ET DU FESTIVAL 3 ÉLÉPHANTS (LAVAL)« Attend impatiemment la prochaine opération de chirurgie esthétique de Lana Del Rey, et la reformation de Sonic Youth . »

UN CASTING D’ACTEURS DE LA RÉGION QUI NOUS CONFIENT CE QU’ILS ATTENDENT IMPATIEMMENT

POUR CES PROCHAINES SEMAINES…

PAROLES D’ACTEURS

TOHU BOHU N°21 AUTOMNE 201118

DOSSIER

COMMENT S’EN SORTIR QUAND ON NE S’APPELLE

PAS LADY GAGA ?MUSICIEN, UNE NÉCESSITÉ DE DIVERSIFIER SON ACTIVITÉ ?

AVEC L’EFFONDREMENT DU MARCHE DU DISQUE ET LES MODIFICATIONS PLUS RESTRICTIVES DES RÈGLES D’INDEM-NISATION POUR LES INTERMITTENTS DU SPECTACLE, IL FAUT ÊTRE AUJOURD’HUI BIEN TÉMÉRAIRE POUR VOULOIR SE LANCER DANS LA MUSIQUE, OU TOUT DU MOINS POUR ESPÉRER EN VIVRE. EN PARALLÈLE DE LEUR CARRIÈRE ARTIS-TIQUE, LES MUSICIENS TROUVENT DONC DE NOMBREUSES PARADES POUR JOINDRE LES DEUX BOUTS, OU LES TROIS BOUTS, OU LES QUATRE BOUTS... BACKLINER, ROADIE, RUNNER, ASSISTANTS SON OU LUMIÈRE, RÉGISSEUR GÉNÉRAL, COACH, FORMATEUR, IL ARRIVE FRÉQUEMMENT DÉSORMAIS QUE LES MUSICIENS SE METTENT A EXERCER L’UN DE CES MÉTIERS, EN SUS DE LEUR OCCUPATION PREMIÈRE. TOHU BOHU A INTERROGÉ QUELQUES ACTEURS DU MILIEU MUSICAL POUR FAIRE LE POINT.Par Sylvain Chantal.Illustrations : Pich.

MATHIAS DELPLANQUE« L’ACTION CULTURELLE, J’AI HORREUR DE CE MOT »Musicien connu notamment pour le projet Lena, Mathias Delplanque intervient également pour Trempolino et Stereolux depuis son arrivée à Nantes il y a six ans.

« Je n’avais jamais travaillé dans l’action culturelle avant de m’établir à Nantes . Venant des Beaux-Arts, j’avais participé à quelques résidences d’artistes plasticiens liées à l’action culturelle, mais ça ne m’intéressait vraiment pas . Et, quand j’ai commen-cé mes projets musicaux en 2007, L’Olympic m’a proposé d’intervenir, mais je n’étais pas du tout là-dedans . J’ai dit «oui», mais ça ne me parlait pas . Je ne savais pas comment m’y prendre . Depuis, je n’ai pas arrêté d’en faire ! Maintenant, c’est même moi qui arrive avec des idées ! Au début, j’avais fait ça avec des élèves d’école primaire et j’avais l’impression de faire de l’animation . Mais avec un public plus «adulte», je m’y suis vraiment retrouvé . Je sens que les gens sont embarqués dedans . Je ne suis pas un enseignant . Jamais je ne me mettrais dans une approche de pédagogue . Et ce n’est pas juste une attitude : «l’action culturelle», j’ai horreur de ce mot . Par contre, la création c’est important .

Quand je travaille avec des jeunes, je demande à ce qu’il y ait les mêmes conditions que pour une créa-tion : une scène, un catering . Avant, j’étais travail-leur indépendant, avec un numéro de Siret . Cette année, pour la première fois de ma vie, je devrais avoir le statut d’intermittent . Comme je ne donne pas assez de concerts, les ressources liées aux in-terventions pédagogiques représentent une grosse partie de mes revenus . »

TOHU BOHU N°21 AUTOMNE 2011 19

DOSSIER

En 2003, les règles d’indem-nisation des intermittents du spectacle ont changé. Une étude conduite par l’Inspection géné-rale des finances, l’Inspection générale des affaires sociales et l’Inspection générale des affaires culturelles, a été réalisée en 2008 à partir des données de l’Unedic pour le compte du Ministère de la culture et de la communication.

Le bilan du plan de profession-nalisation et de structuration du secteur du spectacle vivant révèle notamment, selon l’Unedic, que la situation des intermittents indemnisés au titre des annexes VIII (techniciens) et X (artistes) de l’assurance chômage ne s’est pas dégradée sur la période 2003-2007 . Pour rappel, sont désignées par le terme « intermittents » les personnes ayant travaillé dans le champ du spectacle vivant ou enregistré . On distingue les inter-mittents non indemnisés au titre des annexes VIII et X de l’assu-rance chômage, c’est-à-dire ayant travaillé moins de 507 heures sur la période de référence, et les intermittents indemnisés au titre des annexes VIII et X, c’est-à-dire

les allocataires ayant justifié d’au moins 507 heures travaillées dans le secteur pour pouvoir ouvrir leurs droits .Si l’année 2004 accuse une chute dans les effectifs, ces derniers se redressent à partir de 2005 pour retrouver en 2007 un niveau proche de 2003 . Ce phénomène de décrochage observé entre 2004 et 2005 au sein des effectifs intermittents ne concerne que la catégorie des artistes, là où la catégorie des techniciens affiche une augmentation régulière . Sur la période 2003-2007, le revenu moyen global des intermittents indemnisés progresse de 18%, notamment du fait des nouvelles modalités de calcul des indem-nisations . Le public considéré concerne trois catégories : 500 000 personnes ayant travaillé en tant que salariés, au moins une heure dans l’année dans le secteur du spectacle, qu’il s’agisse d’un poste permanent ou non perma-nent, 130 000 professionnels du spectacle, entendus comme ac-tifs salariés et non salariés, tous métiers confondus, qui se consi-dèrent comme exerçant à titre principal un métier du spectacle,

et 100 000 allocataires se répar-tissant entre les annexes VIII et X de l’assurance chômage, c’est-à-dire des salariés intermittents ayant justifié d’au moins 507 heures travaillées dans le secteur pour ouvrir leurs droits auprès de l’Unedic . En 2008, la catégorie des intermittents, c’est-à-dire des salariés techniciens ou artistes en contrat à durée déterminée (CDD ou CDD d’usage) dans le secteur du spectacle et potentiellement bénéficiaires des annexes VIII et X, représentait 125 000 personnes .

NB : Il est possible d’assimiler 55 heures par an de travail effec-tuées dans le domaine de l’action culturelle (interventions péda-gogiques, coaching, formation), c’est-à-dire rémunérées dans le cadre du régime général, dans le cadre des 507 heures nécessaires à l’ouverture de droits . Le taux de rémunération n’est en revanche pas le même . Ce chiffre peut même monter jusqu’à 120 heures en cas de réouverture des froits via le fond de professionnalisa-tion et de solidarité (APS) .

INTERMITTENTS : LE MINISTÈRE FAIT LE POINT

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OLIVIER CONGAR« LE COACHING, UN VRAI CHOIX »Musicien au sein de Mukta ou du Blue Note Groove, Olivier Congar est par ailleurs interve-nant-formateur pour le dispositif Artistes en Scène coordonné par Trempolino en partenariat avec les SMAC de la région. Une activité qu’il ne voit pas seulement comme un complément de rémunération.

« Parallèlement à ma carrière de musicien, je suis intervenant en coaching . Bien sûr, cela me permet de compléter mes revenus car la formation repré-sente aujourd’hui 30% de mon activité, mais c’est un vrai choix que d’enseigner . J’ai en effet commen-cé à m’intéresser à la pédagogie dès l’âge de 15 ans . Vers 17-18 ans, j’ai pris des cours de percus, puis j’ai suivi un cursus de tambour bata en France et à Cuba . J’en ai tiré une méthode pour transmettre . Dans cette chapelle, quand vous recevez un ensei-gnement, vous gagnez en responsabilité . Je participe donc au dispositif Artistes en Scène depuis sa créa-tion en 1996 . Je fais du coaching de groupes . Je suis également devenu consultant sur des colloques, je prodigue mes conseils . Je suis aussi professeur au Cefedem de Nantes et je travaille pour l’ADDM de Saint-Brieuc . Bref, cette activité a pris beaucoup de places ces dernières années . Pour toutes ces acti-vités, je suis au régime général, sauf si je participe à la création d’un live où là je suis payé en cachet . Quand il s’agit de production, vous pouvez en effet recevoir des cachets . Sur scène, ce qui m’intéresse c’est de partager avec les gens . C’est très ponctuel, éphémère, jouissif . En tant que pédagogue, j’aime sentir que j’aide les gens à amplifier leur point de vue . Depuis que j’ai commencé, je travaille avec un éventail très large d’esthétiques, qui va du métal à la chanson . Je considère en tout cas que pour don-ner des cours il vaut mieux être artiste soi-même . »

VINCENT DUPAS« JE M’ESTIME ULTRA-CHANCEUX, MAIS JE BOSSE COMME UN OUF ! »My Name is Nobody, Fordamage, Les Volleyeurs... Le stakhanoviste Vincent Dupas enchaîne les pro-jets musicaux. Mais il accepte également d’autres missions.

« Je suis intermittent depuis 2007 . J’ai toujours eu trois ou quatre groupes au minimum . Pour complé-ter mon intermittence, j’ai fait du booking, des pe-tits boulots payés en tant que technicien et la régie de Peace and Lobe jusqu’à il y a un an et demi . C’est la deuxième année d’intermittence où 80% de mes revenus proviennent de la musique . Pour le compte de L’Olympic-Stereolux, je participe également au projet «Les Volleyeurs» qui consiste à reprendre des tubes actuels de différentes manières pour un pu-blic scolaire . J’y prends du plaisir parce que l’équipe est chouette, mais au début, je pensais avant tout au 103 euros bruts que ça me rapportait ! J’ai égale-ment bossé pour Dark Dark Dark sur une tournée . J’ai d’abord remplacé un musicien, puis je leur ai servi de chauffeur . J’aurais pu bosser l’an dernier pour Agnès Obel, mais il y a certains trucs que je refuse parce que ce n’est pas assez bien payé . On me demandait de payer mon billet de train pour me rendre au départ de la tournée !Les Volleyeurs représentent entre 10 et 15 cachets par an . Fordamage pareil (l’an prochain un peu plus car on sera tous disponibles pour tourner davan-tage) . Le reste vient de My Name is Nobody et de l’accumulation de mes piges pour Faustine Seilman et Dark Dark Dark . Depuis que j’ai aménagé il y a un an, j’ai passé très peu de temps chez moi . Le fait d’être en tournée me permet de dépenser moins d’argent . Ça réduit les frais fixes .Je ne suis pas très politisé, mais certains intermit-tents me saoulent . J’ai beaucoup tourné avec des

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Ricains qui finissaient de bosser en fin de journée, qui arrivaient pour faire leur concert et qui, à trois heures du matin, allaient se coucher pour retour-ner au boulot le lendemain matin . Je m’estime ul-tra-chanceux et ultra-privilégié de bénéficier de ce système . Mais on s’arrache comme des « oufs » pour avoir nos 43 cachets .J’ai par ailleurs acheté un camion pour minimiser les frais de tournée . L’accumulation de groupes, l’achat d’un camion et la vie en tournée font que je gagne entre 1 400 et 1 500 euros nets par mois . Et puis je touche un peu de droits Sacem en fin d’année . Je considère ça comme mon treizième mois . . . »

CYRIL BILBEAUD« JE N’ESPÈRE PLUS GAGNER MA VIE COMME MUSICIEN »Ancien batteur de Sloy, Cyril Bilbeaud sillonne désormais la France avec Zone Libre, le groupe monté par Serge Teyssot-Gay. Pour boucler son intermittence, il est également régisseur général de nombreux groupes.

« Je ne me prédestinais pas à faire de la régie générale . À l’époque où je jouais dans Sloy, nous n’avions pas les moyens d’avoir un régisseur . Du coup, je mettais les mains dans le cambouis . Nous tournions beau-coup et croisions souvent le boss de 3C, Christophe Bosq . Un mois après le split de Sloy, j’ai essayé de rebondir et j’ai demandé à Christophe s’il n’avait pas des plans comme batteur . Il m’a répondu : « Comme batteur non, mais comme régisseur oui » . Christophe m’avait observé et avait remarqué que j’avais les compétences pour le faire . J’ai donc com-mencé en 1999 avec le groupe Tue-Loup . Depuis je n’ai jamais eu de trou . C’est en le faisant que je me suis dit que c’était un bon compromis car je ne considère pas la régie comme de l’alimentaire, ça reste dans la musique . C’est en faisant de la régie que j’ai connu Serge (Teyssot-Gay de Zone Libre, NDLR) par exemple .Autant en musique je ne veux pas être un merce-naire, autant pour la régie, je n’ai aucun souci . On m’a proposé plein de trucs en tant que batteur que j’ai refusés car je ne me sentais pas à l’aise musica-lement avec le style des groupes . Ça fait dix-sept ans que je suis intermittent . Je suis un vieux combattant . Je me dis que c’est déjà bien . Chaque année qui passe est une victoire supplémentaire . Mais

Alors que la vente de disques chute inexorablement, une source de revenus très prisée des maisons de disques fait aujourd’hui son apparition : la synchronisation, à savoir le pla-cement d’une musique dans un film, une publicité, une série, un jeu vidéo. Une nouvelle poule aux œufs d’or ?

En plus de donner de la visibilité à un morceau, la synchronisation permet de valoriser les droits d’auteur, de représentation et de

diffusion . Pour exemple, le seul disque « rentable » dans le cata-logue du label de Cyril Bilbeaud (voir par ailleurs) a bénéficié d’un placement dans un film . Autrefois décriée par le milieu musical, la « synchro » est aujourd’hui très recherchée par les labels et autres maisons d’édition . Elle ne « grille » plus un artiste, comme on pouvait le penser il y a ne serait-ce que cinq ans . Plus personne n’en vou-dra en effet à Étienne Jaumet par exemple d’avoir « placé » une de ses compositions, « Mental Vor-

tex », dans la huitième saison des Experts à Miami . « Je ne sais pas comment ma musique est arrivée aux producteurs !, s’interroge le musicien . Certainement à l’ini-tiative de Domino, mon label aux États-Unis . Ou alors parce qu’ils ont lu l’article sur moi dans Pitch-fork . . . En tout cas, c’est un peu comme si Mathématiques Mo-dernes avait eu un morceau dans Starsky et Hutch à l’époque ! » Et comme si le DJ producteur tou-chait quelques milliers de dollars, au lieu de 103 euros bruts…

LA SYNCHRO : LE NOUVEL ELDORADO ?

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Émission de radio en public qui dévelop-pera la thématique de ce dossier.

Intervenants : Pierre Lebas (musicien, La Ruda) / Fabrice Nau, (responsable de l’accompagnement des pratiques mu-sicales, Le Chabada) / Cyril Coupé (ad-ministrateur, 6PAR4) / Sylvain Chantal (rédacteur du dossier central) .

Modérateurs : Pascal Massiot, jour-naliste (Jet FM), Mathieu Audebeau (Radio Campus Angers) .En partenariat avec Jet FM, La Frap, et Radio Campus Angers .

TOHU BOHU SUR LES ONDESJEUDI 15 DÉCEMBREStudio Tostaky, Le Chabada (Angers) – de 18h30 à 20h .

je ne considère pas l’intermittence comme un statut . C’est juste une indem-nisation . C’est un super outil, mais ce n’est pas une fin en soi . Aujourd’hui, je démarche . J’ai mon réseau . Sur la route, je croise d’autres groupes, tourneurs, manageurs . Au dé-tour d’une conversation, je trouve des plans . J’habite désormais à Angers et il est clair qu’à Paris, j’en trouvais davan-tage, rien qu’en allant à un concert par exemple .Aujourd’hui, c’est devenu plus compli-qué pour tout le monde . Des nouveaux régisseurs, j’en croise plein . Il y a un turn-over énorme, même si d’autres, plus anciens sont bien implantés sur le marché . Il faut de l’énergie pour faire de la régie générale, une certaine endu-rance . En ce moment, je n’ai pas de plan . Je ne sais même pas si je vais pouvoir continuer à vivre de la musique . De toute façon, je n’espère plus gagner ma vie comme musicien .Je perçois un petit complément de la Sa-cem depuis que Zone Libre marche bien, mais ça me paie juste les dettes de mon label T-Rec (monté en 2005 avec Jean-Charles Versari, NDLR) . »

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PATRICK BONNET« IL FAUT BIEN DIFFÉRENCIER LA PRATIQUE AMATEUR DE LA PRATIQUE PROFESSIONNELLE »Responsable du département événementiel chez Abalone, Patrick Bonnet emploie, depuis janvier 2009, entre 100 et 150 personnes par an, ce qui représente 40 000 heures de travail sur une qua-rantaine de métiers différents.

« Sur le nombre de personnes employées en intérim via Abalone, très peu sont artistes (5%) . Je pensais que j’allais avoir plus de musiciens . Il faut dire que les métiers techniques se sont professionnalisés . Et puis la rémunération entre dans le cadre du régime général, donc ça n’intéresse pas forcément ceux qui recherchent des cachets d’intermittents . En intérim, on ne peut faire que du régime général . En fait, il faut bien différencier la pratique amateur de la pratique professionnelle . Pour beaucoup, l’am-bition ultime est de faire connaître son art et pas nécessairement d’en vivre . Ceux qui développent une pratique amateur savent que c’est compliqué de vivre correctement de la musique . Pat’s, le sono-risateur d’Elmer Food Beat, ou Dom, leur ingénieur du son retour, étaient à la base des musiciens . En voyant qu’ils n’y arrivaient plus, ils sont passés à la technique . D’autres, comme Gweltaz Adeux (ex-EV), sont devenus professeurs . Même s’il sort un al-bum tous les deux ans et qu’il donne des concerts, c’est en enseignant le breton qu’il gagne désormais sa vie . Jean-Michel Daniau (ex-Ticket) bosse à la librairie Durance, même si c’est un choix qu’il a fait depuis longtemps . Je pourrais également citer Manou, le chanteur d’Elmer, qui fait le guide pour des visites de sites industriels ou qui accepte des missions de comptable durant l’hiver . Avec Elmer, il ne fait plus qu’entre 20 et 25 dates par an, alors qu’il lui en faudrait 50 pour avoir l’intermittence . Je pense que ça a dû être dur au départ, mais ça fait quinze ans qu’il fonctionne comme ça, donc c’est acté . Ce n’est pas évident quand on te demande si tu es toujours musicien . Il faut mettre son ego de côté . »

CYRIL COUPÉ« LUTTER CONTRE L’EXIL DE NOS MUSICIENS »Co-directeur du 6PAR4 à Laval, Cyril Coupé fait régulièrement intervenir des musiciens locaux dans le cadre des projets d’action culturelle de la SMAC lavalloise.

« Embaucher des musiciens locaux nourrit nos projets d’action culturelle . Malheureusement, ce domaine ne représente que 10% de notre budget . Nous nous sommes donné pour mission de stabi-liser les musiciens . C’est primordial sur un dépar-tement comme le nôtre pour lutter contre l’exil de nos musiciens vers Nantes ou Rennes . Des groupes

comme La Casa font notamment de la formation auprès de lycéens . Cette année, nos artistes asso-ciés sont les membres du groupe Archimède . Par ce biais, ils vont compléter leurs revenus . Au-delà de l’aspect financier, c’est bien qu’ils se confrontent aux lycéens . Ils se rendent ainsi compte des modes actuelles de consommation de la musique : les ly-céens n’ont même pas de lecteurs CD ! »

DENIS TALLÉDEC« IL FAUT RECRÉER UN CERCLE VERTUEUX »Directeur de la fédération nationale Bar-Bars, Denis Talledec insiste sur l’importance des cafés-culture en matière de professionnalisation des artistes et la nécessité d’une prise de conscience de cette réalité par les pouvoirs publics.

« Les cafés-culture ont toujours entretenu des liens étroits avec les musiciens . Ils constituent pour les artistes une « première marche » et il arrive même fréquemment que certains reviennent vers les ca-fés au cours de leur carrière . Mais les cafés-culture sont des TPE (Très Petites Entreprises) fragilisées qui ont à la fois un pied dans la filière culturelle et un pied dans le secteur de l’hôtellerie-restauration . Les cafés-culture œuvrent à la professionnalisation des artistes, mais ces lieux non-subventionnés sont confrontés à beaucoup de difficultés . Il est compli-qué pour eux d’organiser des concerts, notamment pour des problèmes économiques . Si vous prenez un « groupe classique » de quatre musiciens, cela repré-sente en masse salariale 600 euros . Vous ajoutez des frais d’hôtel et de restauration, des frais de location de matériel son, et vous obtenez une enveloppe nécessaire de 1 000 euros . Comment voulez-vous que ce type de petits établissements puisse déga-ger 1 000 euros de bénéfices ? Si vous y ajoutez les problèmes de voisinage car ces lieux sont davan-tage susceptibles de recevoir une descente de po-lice que les scènes labellisées, c’est très difficile… Est-ce que les pouvoirs publics ont conscience que les cafés-culture œuvrent à la professionnalisation des artistes ? Il n’y a jamais de dispositif d’aide à l’emploi artistique ! Nous ne voulons pas de label-lisation « café-culture » . Mais nous sommes un bas-sin de 7 000 structures et cinq d’entre elles ferment tous les jours ! Nous sommes donc actuellement en train de monter un dispositif pour les cafés-culture car il faut recréer un cercle vertueux . Ce dispositif est dans sa phase opératoire et il sécurisera l’ar-tiste, notamment en lui permettant de toucher des cachets . Il faut savoir qu’en Pays-de-la-Loire par exemple, il y a eu une baisse de 30 % des musiciens indemnisés en trois ans ! L’idée c’est de savoir com-ment inventer de nouveaux possibles… »

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RAMONES : 18 NOUVELLES PUNK ET NOIRESJean-Noël Levavasseur, Éditions Buchet-Chastel, 2011 - par Eric FagnotPassionné par le rock, Jean-Noël Levavasseur, continue son exploration des méandres sulfureux de l’histoire du rock’n’roll . Après un premier essai consacré aux Clash, le journaliste publie un second ouvrage entièrement dédié à ceux qui mirent le feu au boucan binaire dans le milieu des années 70 : Les Ramones . Reprenant le même concept que London Calling, Jean-Noël Levavasseur réunit à nouveau 18 auteurs de polar et les invite à écrire une nouvelle prenant pour point de départ un des albums des Ramones . Autant de petites histoires noires dans lesquelles chaque auteur imprime une part de lui-même . Certains font le choix de l’anecdote personnelle basée sur un souvenir émotionnel ou auditif en lien avec une chanson des Ramones (« Acid Eaters » de Thierry Crifo, « Rock’n’Roll High School » de Caroline Sers) pendant que d’autres s’emparent de faits réels liés à l’existence musicale du

groupe pour les mettre en scène directement (« Too Tough Die » de Max Obione , « Mondo Bizarro » de Jan Thirion) . Captivant d’un bout à l’autre, ce livre illustré par les dessins d’Hervé Bourhis, est un fulgurant hommage à ceux qui remirent au goût du jour le jean’s troué, les baskets élimées et le riff supersonique .

LE CHANT DE LA MACHINEDavid Blot & Mathias Cousin, Manolosanctis, 2011 - par KalchaDavid Blot et le regretté Mathias Cousin ont signé une histoire des musiques électroniques en bande-dessinée tellement excellente que nous la conseillerions avant tout aux personnes qui associent encore techno et teufeurs édentés . Les deux auteurs s’y montrent drôles, pédagogues, passionnés, critiques, passionnants et inventifs . Dans une première partie – au dessin très inspiré par Robert Crumb – le duo met en scène une formidable rétrospective musicale des cinquante dernières années qui explique de façon limpide comment on est passé de la disco à la house et à la techno . Tout y est : les nights-clubs légendaires, les DJ’s pionniers, les morceaux cultes, les villes marquantes, etc . Cette première partie est une lecture obligatoire pour quiconque s’intéresse un minimum à l’histoire des musiques du 20e siècle (sans forcément être un fana d’électro donc) . La seconde partie est plus originale, comme

cette idée de créer des personnages de fiction (DJ’s, producteurs . . .) à base de divers acteurs de la scène electro finalement plus parlante que des interviews authentiques .

MA PETITE ENTREPRISE PUNK, SOCIOLOGIE DU SYSTÈME DFabien Hein, Kicking Books & Kérosène spécial issues, juin 2011 - par Emmanuel BoisFabien Hein, sociologue, a endossé le rôle d’ethnographe pour se plonger au cœur du système D . Une philosophie inspirée de l’expression dite du Do It Yourself (DIY), en français « fais-le toi-même » . Une formule issue de la scène musicale punk-rock pour caractériser un mode de développement d’un groupe, d’une entreprise culturelle . Une notion pleine de sens, qui part de l’expérience acquise dans l’accomplissement des choses par soi, pour soi, dans une logique de réseau(x), à la fois désirée et subie . Imprégné du quotidien du groupe français Flying Donuts, F . Hein nous livre une belle tranche de vie d’un de ces groupes qui est tombé dedans étant jeune et qui ne s’est pas rendu compte à quoi il touchait : se passionner pour le punk-rock et en faire une raison de vivre . Une lecture recommandée, pleine d’enseignements, tant pour les rockeurs et autres passionnés de musique qui ont un projet de groupe, que pour leur entourage et le

grand public . Un livre/guide qui donne les clefs de compréhension de ce que peut donner une passion menée à son paroxysme et de toutes les valeurs qu’engendre une telle manière d’envisager la réalisation de ses envies .

TRACES ET IMPRESSIONS

TRACES & IMPRESSIONS

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TROIS PREMIERS MORCEAUX SANS FLASH N°2STEFMEL & LUZ - Stefmel&Luz 2011 - www .stefmeluz .com - par Ben DevillersVoir Almquist des Hives figé, le micro dans les airs tel un gamin retenant son ballon de baudruche, sauter partout, s’asperger de bière, haranguer un magma de public sous la pluie les bras en l’air aux Eurockéennes… Se rendre compte de la fureur électro-punk de Kap Bambino et de sa furieuse chanteuse « comme un ressort qui hurle à la mort » au Paléo… Vivre l’ambiance déchainée de la dernière tournée de LCD Soundsystem, admirer le contorsionniste Iggy croqué dans sa divagation permanente et son buste grimaçant fixé dans un instantané à la carnation parfaite… Voilà quelques extraits de ce superbe ouvrage signé Stefmel, photographe suisse, et son compagnon Luz, fameux dessinateur politique et amoureux de musique (à qui l’on doit « Claudiquant sur le dancefloor », « J’aime pas la chanson française »…) . Là où la photo de Stefmel suspend le mouvement, le trait de Luz libère sa dynamique, nous donnant une vraie vue d’ensemble des lives contés, leur ambiance, parachevée par des commentaires drôles et singuliers .

LUZ, NOTRE DESSINATEUR CHÉRI DE CHARLIE HEBDO EST INVITÉ AU FUZZ’YON AVEC STEFMEL POUR UNE EXPO DES PLANCHES DE LEUR LIVRE « 3 PREMIERS MORCEAUX SANS FLASH », VISIBLE JUSQU’EN NOVEMBRE.

C’EST QUOI « 3 PREMIERS MORCEAUX SANS FLASH » ? C’est la phrase que tout photographe de concert s’entend dire avant d’entrer dans la fosse faire son travail . Trois morceaux pas plus, que les morceaux durent 10 ou deux minutes chacun . Telle est la règle imposée par les managers des groupes et artistes . D’où vient ce rituel? Aucune idée, mais une chose est sûre, cela empêche désormais sur toutes les photos d’avoir un chanteur totalement en sueur . Stefmel et moi nous plions à la règle . Sauf qu’une fois viré par la sécu, on retourne dans le public et moi je ressors le carnet et le crayon . Stefmel photographie les moments d’absence du leader, ces instants fragiles où l’énergie se contrôle . Et moi, je croque l’énergie, la sueur que les managers confisquent aux photographes .

COMMENT EST VENUE CETTE IDÉE D’ASSOCIER DANS LA MISE EN PAGE DESSINS & PHOTOS ?Tout naturellement . À force de travailler l’un à côté de l’autre pendant les concerts, il était inévitable d’unir nos visions du live . La première fois, c’était lors d’un concert bouleversant de Bashung en

Suisse en 2008 . Stefmel shootait pour un journal helvète et moi pour mon plaisir . Une fois ces fameux trois premiers morceaux terminés, nous nous sommes retrouvés dans le public et avons comparé ce que nous venions de récolter . Nous avions notamment respectivement une photo et un dessin restituant la même pose, la même intensité, mais chacun semblait raconter une histoire différente, la photo évoquant une douce sérénité quand le dessin transpirait la puissance . Devant cette complémentarité qui nous a bluffée, on a décidé de continuer à nous entrelacer artistiquement . Il faut bien au moins deux arts pour s’approcher de la magie que porte en soit la musique .

D’AUTRES PROJETS COMMUNS OU RESPECTIFS AUTOUR DE LA MUSIQUE DANS LES MOIS À VENIR ?Nous préparons tranquillement le tome 3 de « Trois premiers morceaux sans flash » : au menu cette année pas mal de vieux briscards encore comme les Swans, Pulp ou Nick Cave ou mais aussi quelques claques toutes neuves comme Dirty Beaches ou Piano Chat, sans oublier Katerine en mode bien plus profond que déluré . Pour une fois qu’on défend un chanteur français, on va pas se gêner de lui offrir une belle place dans notre bouquin . . .

3 PREMIERS MORCEAUX SANS FLASH OU COMMENT FAIRE UN ATOUT D’UNE CONTRAINTE

Par Ben DevillersPhotos : DR

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Portés par la voix suave de Mauikai et le flow groovy de Boogie Monsta, les Back Pack Jax n’ont rien à envier à leurs aînés The Fugees ou même Busta Rhymes . Entre hip-hop old-school et soul jazz des années 60, à l’écoute de cet EP, on a une impression de « déjà vu », mais dans le bon sens du terme . À l’heure où le rap hardcore est roi, il fait bon de retrouver cette atmosphère feutrée de cinéma . Parlons-en d’ailleurs de cinéma, car il est bien question de film sur ces titres tant dans la structure des morceaux que dans les samples uti-lisés rappelant des dialogues ou même une bande originale de film… En Une de Deezer en octobre et programmés à Rennes dans le cadre des Trans Musicales (scène Focus soutenue par la Région Pays de la Loire – NDLR), gageons que Back Pack Jax ira loin… et ce des deux côtés de l’Atlantique .

Chloé Nataf

BACK PACK JAXTHE ART OF TRAVEL

Is that jazz records, 2011www .myspace .com/backpackjax

DISQUES

Avec ce nouvel album, Idem continue la construc-tion de l’empire du ternaire . Le paysage dessiné par le groupe ne présente pas des angles bien arrondis et s’apparente plutôt à une chaîne de montagnes accidentées sur laquelle il n’est pas toujours aisé de randonner . Un paysage qui pour les non initiés paraîtra d’abord un peu austère, un peu . . . bancal : « Mais ce n’est pas dans le rythme ! », glosera-t-on chez les néophytes . Ces derniers de-vront revenir admirer la vue pour y saisir les sub-tilités et ainsi ne plus se perdre parmi ce dédale de contretemps . Idem a bien comme objectif de composer une musique d’ambiance et non pas de faire un catalogage de leur virtuosité . Un album qui démarre fort, haletant sur toute la longueur et qui s’éteint comme un feu moribond .

Mickaël Auffray

IDEMGOOD SIDE OF THE RAIN

Yotanka, 2011www .idem-kzfp .com

Un disque d’auteur-compositeur-interprète . Auteur pour ses textes ciselés, riches de mots rares et de sensations justes - pas de place pour le factuel mais un monde centré sur l’expérience sensible et l’imaginaire ; compositeur pour une forme musicale classique qui s’aventure dans des formats amples (de 3 à 8 min) permettant de vrais développements musicaux, et un son im-peccable avec une belle intégration des timbres de la guitare acoustique, des boucles rythmiques, synthés, accordéon, etc . ; interprète enfin pour la séduction de cette voix légère et grave à la fois qui parle ou chante . Sensations fugitives de Mé-lodie Nelson, proximités avec Dominique A ou les tensions légères de Florent Marchet . Savoureux ! Une autoproduction rigoureuse qui donne toutes leurs couleurs à des chansons ambitieuses .

Georges Fischer

BENJAMIN DURANDPROJET EXTRAT SYSTOLELE LONG DE LA GRÈVEAP, 2011 www .myspace .com/projetextrasystole

Une sérénité certaine se dégage de cette ren-contre magique et troublante . Lovés dans des or-chestrations délicates majoritairement de piano et guitare, la voix de Faustine s’affirme, contras-tant avec une fragilité latente, le timbre grave et caverneux de Benjamin rassure, tout en mena-çant de s’effondrer à la moindre émotion . Les deux complices s’accompagnent délicatement, s’effacent, se laissant respectueusement la place à tour de rôle et finissent par effleurer l’accord parfait d’un songwriting mélancolique et géné-reux . Cette harmonie saisissante pourra vous bercer puis vous faire frissonner (le frangin Jona-than n’est jamais très loin) . Comme si l’automne était là depuis des mois déjà… qui s’en plaindra ?

Cédric Huchet

FAUSTINE SEILMAN & THE HEALTHY BOYTHE LONG LIFE’S JOURNEYArbouse Recordings, 2011 www .myspace .com/faustiboy

DISQUES

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Brillant 9e essai que ce recueil de 11 titres, qui dépasse à peine la demi-heure .Trop rapidement classé en électronica ou abs-tract quelque chose, le bien nommé Outsider présente à la fois le sens du détail et du vagabon-dage . Ciselées d’une multitude de rythmiques, de micro samples, les compositions sont souvent agrémentées de batterie plus lourde, de piano, ou guitares et violons aériens, évoquant certaines musiques qualifiées de cinématographiques . Voilà qui se détache singulièrement d’une succes-sion prolifique (trop rapide ?) de huit albums en trois ans, et promet un bel avenir pour ce jeune et talentueux manceau .

Cédric Huchet

Les racines de Discloser viennent d’un autre temps, et d’un autre continent . Le quatuor na-zairien puise son inspiration de l’autre côté de l’Atlantique, dans la deuxième mi-temps des 90’s . Les 12 titres de ce 1er album mixent allègre-ment le post-grunge d’un Pearl Jam en beaucoup plus teigneux et le néo métal d’un Korn en moins geignard . Discloser se permet même parfois quelques petites souplesses « reggaeïsantes », sur «Political» notamment . On sent à l’écoute de t .o .y . TV que le groupe a profité de cette 1e expérience de long format pour expérimenter dans plu-sieurs directions : des envolées symphoniques, des mélodies apaisées, en passant par les caval-cades saccadées de «On may way home» . Enfin on notera au passage le bon son de cet album, et tout spécialement la voix . Preuve que le Do It Yourself n’est plus obligatoirement synonyme de production rachitique .

Manu Legrand

La dernière fois que j’ai écouté Depht Affect, le morceau s’appelait Else’s vision (sur l’EP Chorea en 2010) et était indispensable . En 2011, un nou-vel album, Draft Battle, sort, toujours chez Autres Directions in Music . Ici, Depht Affect recherche la synthèse parfaite entre pop et electronica (Dam-merung) et s’immiscent vers des sonorités plus sombres, presque mélancoliques (Master of Tem-po) . Plus loin de longues montées énigmatiques se déploient dans des mélodies 8bits (Sugar Honey Iced Tea) . Mais n’y voir qu’un exercice de style, ce serait nier la qualité d’une écriture musicale déli-cate, entre éclat orchestral et panache conceptuel (écoutez l’enchaînement Oil Rig Hell Pad/Draft Battle) . Seul manque à l’appel un hit pour hoche-ments de tête nerveux . Un disque qui semble au départ parfait pour conduire des heures durant sur les autobahn, pour tout à coup se muer en machine à faire pleurer les filles sur le dancefloor .

Olivier Tura

Preuve s’il en faut que le jazz nantais se porte bien, Bonobo Trio distille une sévère énergie et une musique de très bonne facture . Le groupe annonce sans pudeur des influences allant de Zappa à Bach en passant par E .S .T . C’est en effet bien le style, l’ambiance et la mouvance d’Esbjörn Svenson qui sautent aux oreilles à la 1re écoute . Le risque avec les innombrables trios piano-contrebasse-batterie est de donner plus envie de (ré)écouter les grands clas-sique du genre, que les dernières parutions . Ce n’est pas le cas ici ; on se laisse volontiers transporter par la diversité des compositions, la richesse du propos et l’incontestable talent des musiciens . Si l’on peut regretter parfois quelques formules assez conve-nues et peu inventives sur le pan harmonique, l’en-semble du disque promet néanmoins des concerts envoûtants ! Surtout si l’électrisant Mederic Colli-gnon vient, sur scène comme sur le disque, donner la réplique au fameux singe en voie de disparition .

Sébastien Bertho

CYESMOUTSIDER

Good Citizen Factory, 2011 www .myspace .com/cyesm

DISCLOSERT.O.Y. TV

AP, 2011 www .myspace .com/discloserofficial

DEPTH AFFECT DRAFT BATTLEAutres Directions, 2011www .myspace .com/depthaffect

BONOBO TRIO FEAT. MEDERIC COLLIGNONTOGETHERNeuklang Records, 2011www .myspace .com/bonobotrio

DISQUES

TOHU BOHU N°21 AUTOMNE 201128

Avant d’exposer les ingrédients de la recette d’Electroplume, je préfère écarter les malen-tendus et préciser ce que cet album n’est pas . Il ne s’agit pas là d’un album-concept, cérébral, expérimental, réalisé par un illuminé . Bien que, lorsqu’on vous dit qu’un musicien accompagne avec sa batterie, des chants d’oiseaux, il y a de quoi, légitimement, passer son chemin en es-quissant un petit sourire narquois . Il s’agit en réalité d’un projet sincère, et étonnant . Rares sont les occasions, reconnaissons-le, d’entendre un merle « groover » ou une pie donner la réplique à une grosse caisse . Nul besoin d’être un adhé-rent à la LPO pour apprécier ce projet, la musique coule si naturellement qu’on se laisse prendre au jeu . Difficile de caser ce disque dans la chapelle d’un style : un plumage électro, un bec groovy, et des ailes pop-world . Voici le pedigré métissé de ce disque surprenant .

Sébastien Bertho

A contrario des blockbusters qui s’imposent à nos oreilles dans un format sans nuances, tels des coton-tiges format rondin, Glucoz nous donne à entendre une pop électro plus soft, aci-dulée mais sans être amère . Ceci dit la recette est sensiblement la même : des claviers sonnant 80’s, des rythmiques disco, des cocottes noyées dans les reverbs, des gimmicks de guitare accro-cheurs… Mais on sent bien la différence entre l’artisanat soigné et l’industrie de masse ! Les références viennent vite en tête à l’écoute de ce 7 titres : un genre de Two Door Cinema Club plus posé ? Un Phœnix à peine sorti de ses cendres ? Ces références sont-elles les bonnes ? J’ignore de le savoir . Mais ce que je n’ignore pas de le savoir, c’est que Glucoz sait faire de bonnes chansons pour faire danser les filles . Un tempo un peu plus rapide à l’avenir doublé d’une production plus musclée et les garçons suivront !

Ben Devillers

Bruits de clés, grincements de portes et démar-rage de bagnoles : Grigri a le blues . Le chanteur à la voix de forgeron écorchée par les braises de sa vie aurait pu intituler son disque : sac de survie et y mettre ses envies de départ et ses besoins de revenir, la vie qui court et les bonheurs à côté desquels on passe . Des textes très bien mis en valeur grâce à une musique toute en consis-tance et délicatesse donnent à cette œuvre une atmosphère blues, sincère et partageuse, amère et prometteuse . Daniel Givone (à la guitare), dans toute sa discrétion, habille les chansons de dentelle, pendant que les violoncelles donnent profondeur et gravité allant jusqu’à prendre la forme ronde dans un « Luna » slamé par un Grigri Blue baigné de poésie . Une poésie à la frange du conteur d’histoires… de routards . Allez, monte dans la bagnole .

Gilles Lebreton

ÉLECTROPLUME BIRDS & GROOVE

AP, 2011 www .myspace .com/electroplume

GLUCOZS/t, AP 2011

www .myspace .com/glucoz2

GRI GRI BLUE COEUR CRONNERAutres Rives Produxions, 2011www .grigri-blue .com

L’histoire d’un homme, un homme qui quitte son pays, la Roumanie, sans le courage de participer à sa reconstruction, parce que, comme il dit, « il a trop entendu cette langue de bois des politiques, ces dis-cours qui donnaient envie de vomir » . Iacob, installé à Nantes depuis près de 20 ans, va multiplier les col-laborations . Mais ce disque est le 1er sous son propre nom . Des compositions, des morceaux traditionnels, le répertoire a somnolé dans ses valises ou est né de souvenirs humains et musicaux . Un violon qui mène le bal, le cymbalum, le piano et la contrebasse qui suivent le mouvement, ces cordes manifestent des sentiments qui vont du noir au blanc, comme les couleurs des notes . Les rythmes s’accélèrent, les so-los s’enchaînent, l’intention est vive . Bien difficile en tous cas de rester indifférent à cette musique si poi-gnante et expressive, celle d’un peuple pour lequel la musique s’écrit avec un grand M .

Cécile Arnoux

IACOB MACIUCA PAIDUSCA DU DIMANCHEAP/Mosaic Distribution, 2011www .myspace .com/iacobmaciuca4

DISQUES

TOHU BOHU N°21 AUTOMNE 2011 29

La dématérialisation de la musique a fait beau-coup de mal . À cause d’elle, vous ne pourrez pas exhiber fièrement devant tous vos potes ce qui aurait fait une magnifique pochette de 45-T ! Surtout, vous allez avoir beaucoup plus de mal à retourner votre écran pour lire le sens caché du titre de cet EP digital (comment ça, une image, ça se pivote ?) . Le gang vendéen ne se prend à l’évidence pas trop au sérieux et sa musique ose donc des rapprochements culottés . La produc-tion (notamment les effets sur la voix) rappelle les grands noms de l’indus façon Nine Inch Nails ou encore nos toulousains de Punish Yourself . Les compositions sentent en revanche davantage le fun des groupes de surf garage des 60’s . Diffi-cile donc d’étiqueter la musique de Kulbuto . On la conseillera à tous ceux qui aiment sauter dans tous les sens avec un sourire niais sur le visage . Ça fait beaucoup de monde, ça, non ?

Kalcha

Troisième album de l’inclassable duo nantais, Nyx fait référence à la déesse de la nuit dans la mytho-logie grecque . L’analogie est évidente tant les cli-mats nocturnes hantent ce disque qui contient la rage sèche parfois libérée sur les premiers albums, pour explorer toutes les facettes du spleen à travers un nuancier des sombres affects . Outre les deux morceaux inauguraux (« Logic coco » et « Des coups des cœurs »), on entrevoit peu la lumière dans l’écrin bleu nuit de ce cauchemar éveillé, où s’en-trechoquent les langueurs du violon, les chœurs fantômes et les voix doublées/triturées, les boucles synthétiques, les mots répétés jusqu’à l’hypnose, comme sur l’obsédant « An island in an island » . Mansfield .TYA a étoffé le minimalisme brut des débuts pour atteindre une plénitude musicale dont l’intensité peut à la fois prendre aux tripes ou gla-cer les sens . La nuit leur va si bien qu’on se prend à souhaiter que le soleil ne se lève plus .

Yoan Le Blévec

KULBUTO35383773AP 2011

Sortie numérique, en écoute là : http://kulbuto .bandcamp .com/

MANSFIELD.TYANYXVicious Circle/Wagram 2011www .mansfieldtya .com

Témoigner honnêtement de cette fascinante facul-té humaine qu’est l’épreuve des sentiments . C’est ce que réussit avec talent le psychédélisme-indie d’A Few My Nephew . Car si l’on parle de psyché-délisme, ici pas d’interminables improvisations mais des mélodies et des arpèges délicats («So Long»), au service d’un lyrisme raffiné . Chant et harmonies vocales, calmes et détachés, créent un climat intimiste (le splendide «Spring»), prolongés par des passages instrumentaux où se diffusent avec élégance élans de plénitude et de nostalgie . La richesse des arrangements («Bossa», «Endless night»…) lorgne du côté des Anglais Pale Fountains, le foisonnement des influences finement accor-dées donnant corps à l’émotion . Tout est fort bien exécuté, mais le soin apporté aux compositions prend effet dans une sobriété d’ensemble . L’éner-gie brute n’est pas exclue : en témoigne le final héroïque de Glencoe, amené – et cela semble être la marque de fabrique de ce groupe – avec subtilité .

François Delotte

Dans ce second volet studio, After Blowdown propose une évolution de son trip hop un brin post-rock, un tantinet électro dub, où l’on voyage autant vers Portishead que Mogwaï ou Ez3kiel . Si l’on ajoute à cette recette une voix à la douce froideur nordique, on pensera aussi aux ex-Miss-trip . Ce nouvel EP plus chiadé que le précédent dévoile même des accents tierseniens dans Alone et sa mélodie faussement enfantine, qui s’étire tout au long de cet instrumental . «Victory» et ses couplets à la tension retenue amène dou-cement vers de subites montées en puissance . De même que «Coma», errance pleine de spleen, aux légers trébuchements éthyliques des petites touches électro, qui nous transporte vers un ail-leurs empli d’énergie, voire de rage . Et là est peut-être l’essence du quatuor vendéen, qui la décrit bien lui-même : « Quand After Blowdown n’est pas triste, c’est qu’il est en colère » .

Ben Devillers

A FEW MY NEPHEWS/t, AP, 2011

www .afewmynephew .bandcamp .com

AFTER BLOWDOWNIN THE SHADE OF THE TREEAP, 2011 www .afterblowdown .com

DISQUES

TOHU BOHU N°21 AUTOMNE 201130

Armé Oscar Matzerath ? À moins qu’il ne vénère la cité anglaise, la ville canadienne ou celles des Amériques . Il y a bien quelque chose d’anglo-saxon dans ces 9 coups de feu dont les détona-tions rappellent Calexico, Sixteen Horsepower, ou encore Mister Morricone . Des guitares, du banjo, de l’harmonica, du glockenspiel, un hé-licon… La batterie d’instruments fait briller les arrangements . Le chant peut parfois trancher, on imaginerait mieux la langue de Shakespeare . Mais, finalement, les textes sortent du lot, et à la façon de Mano Solo, les mots s’étirent, et la voix écorchée vibre . On passe du désert au cirque, d’ambiances lynchiennes à celles de Jeunet . Oscar sait mêler le branque au mélodique, et se créer un personnage souvent meurtri mais plein de convictions .

Cécile Arnoux

Quand on a découvert la voix de Sylvain Giraud dans le répertoire des chants traditionnels de Haute-Bretagne (La Dame Blanche) avec cette petite pointe d’humour derrière des textes par-fois austères, on ne peut être surpris par l’inven-tivité de ce nouvel album . Notre trublion trouba-dour s’offre là un véritable opéra rock gallo qui se termine au grand galop dans un « Grand Défilé » digne d’un saltimbanque électro colporteur de légendes . Mais d’aujourd’hui . Car l’écriture tra-duit des thèmes d’actualité sensibles à un Syl-vain Giro entouré d’une formation au son résolu-ment rock . Sa voix demeure toujours aussi belle, enveloppante et souple, et ne se boit que mieux lorsqu’elle s’entoure des chœurs assurés par ses deux complices Jean-Marie Nivaigne (percus) et Julien Padovani (claviers) . Le Batteur de Grève nous promène avec jubilation ou gravité à la re-cherche de ses cultures enracinées .

Gilles Lebreton

Découvrir le quatrième album des Vilains Clowns, c’est entendre au loin, bien loin, quelques rimes de Du Bellay ; c’est de la poésie . Superbe, légère, affriolante même, quand ils se font crooners et composent des chansons d’amour . La beauté de la pochette n’a d’égal que leur respect de l’ortho-graphe, de la syntaxe et du Français tel qu’on le parle dans les cours d’école des fameux coteaux de l’Aubance . D’ailleurs, bien qu’ils n’avouent qu’un penchant pour certains spiritueux et autres boissons gazeuses alcoolisées, je suis sûr qu’ils en raffolent, de ce petit vin moelleux ! Tout ça pour dire que «Baston Générale», ah oui ! de la poésie, c’est un délicieux mélange de punk à la française sans «idées à la con» associé à un bon rock’n’roll dans l’esprit d’un Electric Frankens-tein bon teint, voire d’un Peter Pan Speedrock mangeant du camembert . Et pis en plus, ça met de bonne humeur ‘tain ! Allez hop, j’m’en remets un godet et j’relance le CD !

Mr Flatulens

« Pilotes d’oreiller » . Le nom pouvait légitime-ment faire craindre une dégoulinade de post-rock léthargique, il n’en est rien . Avec cet EP gravi-tant entre indie, post-punk, électro et psyché, le duo nantais composé de J-F Le Coq (Margo) et J-C Baudouin (Gong Gong) provoquera peut-être des réactions incontrôlées, mais certainement pas l’endormissement . Du pyromane « Brand New Car » qui ouvre le disque au roublard Idle Man qui le clôt, les deux compères font une jolie démons-tration de leur savoir-faire en matière de tissage d’ambiances, de mélodies insidieuses et de ryth-miques sans pitié (à ce sujet, on met au défi tout individu non paraplégique de ne pas taper du pied sur « I’m Not There ») . Seul bémol : une cer-taine tendance à en faire un peu beaucoup dans les effets . Qu’importe, Pillow Pilots est un groupe à suivre de près cette année, ce qui tombe très bien puisque leur premier LP sortira début 2012 .

Damien Le Berre

OSCAR MATZERATHWINCHESTER

AP, 2011 www .myspace .com/oscarmatzerath

SYLVAIN GIROLE BATTEUR DE GRÈVE

AP/Coop Breizh, 2011 http://sylvaingiro .com

LES VILAINS CLOWNSBASTON GÉNÉRALESkalopards Prod’z, 2011 http://vclowns .free .fr

PILLOW PILOTSS/t, AP, 2011 www .pillowpilots .com

DISQUES

TOHU BOHU N°21 AUTOMNE 2011 31

Si par hasard, vous êtes tombés sur la pochette de ce disque, vous vous en souvenez forcément . Si par chance, vous avez écouté cet album, nul doute que le second opus de cette formation nantaise vous aura également marqué . La guitare (et la plume !) de Manu Adnot, incisive, mature, sensuelle, est le fer de lance du groupe . Le moteur V12 du trio, en la personne d’Arthur Narcy est d’une grande richesse dans les nuances de jeu et la réactivité . Le son déjà si personnel, et le phrasé subtil d’Elie Dabibert met un point final à l’incroyable talent de nos trois jazz-stars locales . Quand la virtuosité se met au service de la musique (et non l’inverse), tout le monde s’en délecte ! Pink Paradise s’écoute comme on regarde un grand film d’auteur, avec son parfum de suspens et d’angoisse (« Wilson »), ses cascades de haute vol-tige (« TMNT », « Suédois »), et ses grands instants de romance (« Pink Paradise », « Ultimate Pop Song ») . Un album méchant, décomplexé, subtil et sensible, à déguster sur scène de toute urgence .

Sébastien Bertho

Dans le manga Gunnm de Yukito Kishiro, Zalem est une cité volante qui déverse ses ordures dans une décharge sauvage où règnent la violence et la misère . Dans la jolie cité d’Angers, Zalem est un groupe formé en 2006, qui déverse son post-rock instrumental dans une scène française et interna-tionale pas mal atrophié ces derniers temps . On a connu les Angevins, il y a 4 ans, avec un concert classieux et prometteur au Ferrailleur en 1re partie de Mothertrucker . Pari réussi car aujourd’hui, ils réalisent, avec Pandemonium Redux, un album ef-ficace, long (prêt de 109 minutes) et abouti . Tout en puisant dans les influences des ainés (Bossk, Peli-can…), la musique s’est affinée et c’est une bande-sonore cinématographique qui est offert à l’audi-teur . Des voix parlées jalonnent le disque, des violons débarquent soudain, les guitares se font calmes et c’est toute une histoire qui convient d’inventer au gré de son imagination . Brillant !

Tod

À la fin des années 90, des musiciens souvent issus du rock, dans sa tendance la plus dure – comme en témoignent leurs labels - proposent des enregis-trements aux sons dub roots . Ils sont de Bordeaux, Lyon ou Angers… Zenzile constitue l’un des fers de lance du mouvement en signant ses 1ers albums chez Crash Disques ou Small Axe . La singularité et la pertinence du courant viennent des formations live, du feeling émanent des instruments et du travail sur les sonorités . Le charisme de Zenzile se confirme avec la radicalité de ses choix, notamment ses envolées instrumentales profilées autour de riffs mélodiques . Mais entre ses albums, le groupe a proposé une série de maxis rassemblés ici . On y retrouve des chanteurs invités (Sir Jean, échappé de Meï Teï Shô ou l’incroyable Jamika), puis le violon-celle de Vincent Segal . Louons Zenzile pour ce cof-fret qui renferme aussi le premier EP du groupe, du pur dub aux réminiscences kraut/psychedelic ainsi qu’un cinquième disque d’inédits historiques .

Gérôme Guibert

SIDONY BOXPINK PARADISENaïve, 2011

www .myspace .com/sidonybox

ZALEMSTIGMA

AP, 2011 www .myspace .com/zalem49

ZENZILE5 + 1 BOX SETYotanka/Differ-Ant, 2011 www .zenzile .com

Quelle jolie progression pour ce groupe ! Se déta-chant d’un rock français trop emprunt à des réfé-rences comme Dolly, 21 Cigarettes a complexifié les morceaux, soigné les interprétations, a pioché dans ce que le rock plutôt anglo-saxon a de bon, joue da-vantage sur des nuances . La production y est aussi sans doute pour quelque chose ; enregistré chez Peter Deimel au Studio Black Box où sont passés quelques beaux projets (Deus, Shellac, Les Thugs pour ne citer qu’eux), ce tout 1er album sonne ! Les morceaux conservent des formats très pop, assez classiques, on sent une certaine application tant dans la rythmique basse/batterie (superbe son de basse), les deux guitares, que la voix féminine . Les schémas de chansons méritent encore de s’alam-biquer, de surprendre un peu plus, mais pour un tout premier disque, l’essai est plutôt réussi . On attend la suite .

Cécile Arnoux

TWENTY ONE CIGARETTES STEADY AVALANCHEAP, 2011www .21cigarettes .com

INFOS

TOHU BOHU N°21 AUTOMNE 201132

PLAYLISTS

VON PARIAHS, GREEN EP, AP, 2011 (ROCK)Un groupe qui pourrait faire danser Ian Curtis au bout de sa corde et donner envie à Julian Casablancas des Strokes de se pendre ne peut qu’avoir de l’avenir .

LCD SOUNDSYSTEM, SOUND OF SILVER, DFA/CAPITOL, 2007 (ELECTRO)L’amour c’est comme se rencontrer sur « Someone Great », partager sur « All my Friends », et pleurer sur « New York, I love you But You’re Bringing me Down » .

PULP, DIFFERENT CLASS, POLYGRAM, 1995 (POP)Quand on voit des milliers d’indignados chanter « Common People » au Primavera 2011, on se dit que l’on avait tout aussi raison de le hurler tout seul dans sa chambre à 20 ans .

SÉBASTIEN ROUSSELET – MUSICIEN BABEL QUARTET

JIMMY AFOSEA & JB BOUTET - RESPONSABLES OVVK RECORDINGS

LUZ & STEFMEL - DESSINATEUR/DJ & PHOTOGRAPHE

LABRADFORD, S/T, KRANKY, 1996 (AMBIENT-ROCK)Un classique incontournable de l’ambient-rock, moins « drone » que leur deux albums précédents mais tout aussi fascinant .

TALK TALK, LAUGHING STOCK, POLYDOR, 1991 (POST-ROCK)C’est un autre grand classique . Trois ans après Spirit Of Eden considéré avec le Spiderland de Slint comme précurseur du mouvement post-rock . Un album incroyable qui a nécessité 8 mois d’enregistrement . À la fois acoustique, minimal et progressif, « Laughing Stock » réunit une instrumentation très riche : guitares, batterie, basse, piano, harmonium, orgue, harmonica, altos, violoncelles, trompette, cor, clarinette basse, percussions .

MATHIAS DELPLANQUE, PARCELLES 1-10, BRUIT CLAIR, 2010 (ELECTRO-ACOUSTIQUE)Un album electro-acoustique de haute précision . Mathias Delplanque renouvelle notre perception des sons du quotidien, décèle en toute source sonore son potentiel de beauté et nous la révèle .

BRIGITTE FONTAINE, PROHIBITION, POLYDOR, 2009 (CHANSON)Nonchalante, la dame en robe rouge retient d’une main son homme objet dans l’ombre . De l’autre, elle dresse un fume-cigarettes comme un doigt d’honneur à la mort et à ce nouveau siècle aseptisé . Le son est énorme, le studio est anglais . La seule vraie rockeuse française est une vioque qui fornique et qui clope .

DEGIHEUGI, THE BROKEN SYMPHONY, AP, 2010 (ABSTRAKT HIP HOP)Un piano git en morceaux dans une rue aux volets fermés, la nuit . Attention, hip-hop abstrait . Ça peut me gaver . Pas là . Ça pulse et c’est sensible . Les beatmakers passent pour des pillards . Sampler, sans reproche ? Quelques featurings avec des cadors de la tchatche dont le flow fout le vertige . Difficile à trouver sur internet, c’est vrai que l’homme est mayennais .

TOM WAITS, SWORDFISHTROMBONES, ISLAND, 1983 (INCLASSABLE)Y a tout un monde dans cet album . À croire que les suivants sont contenus là .Percus bizarroïdes faites maison, banjo à peine juste, grattes désarticulées, espadons trombones et voix d’outre-tombe . Ça sent le Jack Daniels et le tabac qui pique les yeux . Roman noir . Rock ? Folk ? On s’en fout ? La palme à l’envoûtant « Shore leave » en 2 . Ou à « Soldier’s things » en 12 .