9
“tmlds-main” — // : — page —# 19 La certification des causes de décès : principe et intérêt épidémiologique Éric Jougla, Albertine Aouba, Françoise Laurent Montero, Gérard Pavillon Messages clés – Les informations rapportées dans le certificat de décès permettent l’élaboration des statistiques annuelles et exhaustives des causes médicales de décès en France, couramment utilisées pour orienter et évaluer les actions et les recherches dans le domaine de la santé publique. – Les données sur les causes de décès permettent aussi de mesurer les inégalités d’état de santé, en particulier géographiques, avec un excès de mortalité dans les régions du Nord du pays pour de nombreuses maladies. – La qualité et la précision de la certification médicale restent à améliorer. Les médecins emploient parfois des sigles ambigus. – Une grande part des cas pour lesquels la cause reste inconnue de la statistique s’explique par un manque de retour de l’information médicale de certains instituts médico-légaux. 1 Introduction Le certificat de décès est un document indis- pensable pour obtenir le permis d’inhumer et les autorisations nécessaires aux diverses opérations funéraires. Il constitue également une source impor- tante de données épidémiologiques car c’est à partir des informations rapportées dans ce document que sont élaborées les statistiques annuelles et exhaus- tives des causes médicales de décès en France. Ces données permettent de caractériser l’ampleur des problèmes de santé publique au niveau national ou à un niveau géographique plus fin : fréquence des pathologies ou des morts violentes, évolution dans le temps, disparités spatiales et socio-démographiques, etc. Elles permettent également d’évaluer l’impact des actions de santé mises en place par les pouvoirs publics. Cet article a pour objet de présenter le principe de la certification médicale en insistant sur l’évolution du mode de certification initié par le CépiDc-Inserm et la Direction générale de la santé (DGS) : la certi- fication électronique des causes médicales de décès, utilisée à partir de l’année . Une deuxième partie portera sur l’intérêt épidémiologique des données sur les causes médicales de décès. On insistera enfin sur l’importance de l’obtention de données exhaus- tives. Si la fiabilité de ces statistiques repose en premier lieu sur la qualité et la complétude de la certification médicale des médecins au moment de chaque décès, elle nécessite également l’obtention de données complètes incluant les résultats des enquêtes médico-légales. 2 Certification des causes médicales de décès 2.1 Historique Dès l’Antiquité, les grandes épidémies sont à l’origine du dénombrement des décès, mais il faut attendre la fin du xviii e siècle pour que prenne nais- sance la statistique des causes de décès en France. Dès à Paris, l’enregistrement des décès et de leurs causes devient obligatoire auprès de la mai- rie de l’arrondissement. Vers , se développe parallèlement la Classification internationale des

Traité de médecine légale

  • Upload
    vantu

  • View
    220

  • Download
    3

Embed Size (px)

Citation preview

Page 1: Traité de médecine légale

ii

“tmlds-main” — // — : — page — # ii

ii

ii

19 La certification des causesde décès : principe et intérêtépidémiologique

Éric Jougla, Albertine Aouba, Françoise Laurent Montero, Gérard Pavillon

Messages clés

– Les informations rapportées dans le certificat de décès permettent l’élaboration des statistiquesannuelles et exhaustives des causes médicales de décès en France, couramment utilisées pourorienter et évaluer les actions et les recherches dans le domaine de la santé publique.

– Les données sur les causes de décès permettent aussi de mesurer les inégalités d’état de santé,en particulier géographiques, avec un excès de mortalité dans les régions du Nord du pays pourde nombreuses maladies.

– La qualité et la précision de la certification médicale restent à améliorer. Les médecins emploientparfois des sigles ambigus.

– Une grande part des cas pour lesquels la cause reste inconnue de la statistique s’explique parun manque de retour de l’information médicale de certains instituts médico-légaux.

1 Introduction

Le certificat de décès est un document indis-pensable pour obtenir le permis d’inhumer et lesautorisations nécessaires aux diverses opérationsfunéraires. Il constitue également une source impor-tante de données épidémiologiques car c’est à partirdes informations rapportées dans ce document quesont élaborées les statistiques annuelles et exhaus-tives des causes médicales de décès en France. Cesdonnées permettent de caractériser l’ampleur desproblèmes de santé publique au niveau national ouà un niveau géographique plus fin : fréquence despathologies ou des morts violentes, évolution dans letemps, disparités spatiales et socio-démographiques,etc. Elles permettent également d’évaluer l’impactdes actions de santé mises en place par les pouvoirspublics.

Cet article a pour objet de présenter le principe dela certification médicale en insistant sur l’évolutiondu mode de certification initié par le CépiDc-Insermet la Direction générale de la santé (DGS) : la certi-fication électronique des causes médicales de décès,utilisée à partir de l’année . Une deuxième partie

portera sur l’intérêt épidémiologique des donnéessur les causes médicales de décès. On insistera enfinsur l’importance de l’obtention de données exhaus-tives. Si la fiabilité de ces statistiques repose enpremier lieu sur la qualité et la complétude de lacertification médicale des médecins au moment dechaque décès, elle nécessite également l’obtention dedonnées complètes incluant les résultats des enquêtesmédico-légales.

2 Certification des causes médicalesde décès

2.1 Historique

Dès l’Antiquité, les grandes épidémies sont àl’origine du dénombrement des décès, mais il fautattendre la fin du xviiie siècle pour que prenne nais-sance la statistique des causes de décès en France.Dès à Paris, l’enregistrement des décès et deleurs causes devient obligatoire auprès de la mai-rie de l’arrondissement. Vers , se développeparallèlement la Classification internationale des

Page 2: Traité de médecine légale

ii

“tmlds-main” — // — : — page — # ii

ii

ii

La certification des causes de décès 293

maladies. En , le recueil des causes et l’élabora-tion de la statistique deviennent systématiques sousla responsabilité du Service de la statistique géné-rale de la France. À partir de est institué uncertificat médical de décès individuel et anonyme,obligatoirement rédigé par un médecin, qui vients’adjoindre au bulletin de décès. Le codage et l’ana-lyse des informations démographiques et médicalessont réalisés au niveau départemental et national. En, le Service national des statistiques qui regroupele Service de la démographie et celui de la statis-tique générale de la France (devenu l’Insee en ),décentralise le codage des informations démogra-phiques et médicales au niveau des régions. En ,le certificat médical de décès est modifié selon lesrecommandations de l’Organisation mondiale de lasanté (OMS), qui définit un modèle de type inter-national. En , l’Institut national de la santé etde la recherche médicale (Inserm) se voit confierle codage des informations médicales et l’élabora-tion de la statistique des causes de décès redevenuscentralisés []. Le certificat médical de décès est ànouveau modifié en , en particulier par l’addi-tion de lignes supplémentaires permettant de décrireplus précisément le processus morbide ayant conduitau décès et par l’ajout de renseignements complé-mentaires concernant les grossesses, les accidents etles autopsies. Ces évolutions répondent aux recom-mandations de l’OMS visant à une harmonisationdes modèles de certificat de décès au niveau interna-tional [CIM ]. De même, a été introduit à la mêmedate, un certificat de décès spécifique à la périodenéonatale pour les enfants nés vivants et décédésavant jours (mort-nés exclus) qui comporte à lafois les causes néonatales et maternelles ainsi que desrenseignements détaillés sur les caractéristiques del’enfant, des parents et de l’accouchement. Ces deuxtypes de certificat de décès ont été introduits par lacirculaire DGS/VS no - du novembre ,avec effet au er janvier .

2.2 Le certificat de décès (annexes 1 et 2)

Les deux modèles de certificat sont délivrés parla DDASS. Leur rédaction est conforme aux dispo-sitions de l’arrêté du décembre . Ils com-prennent chacun un volet administratif identique(partie haute et publique) et un volet médical (partiebasse confidentielle). L’un et l’autre sont remplis parle médecin ayant constaté le décès.

2.3 Le volet administratif (partie haute)

Ce volet est visible, nominatif et daté. Il est auto-copiant (trois exemplaires). Le premier est destinéà la mairie du lieu d’implantation de la chambrefunéraire, le second au gestionnaire de la chambrefunéraire et le dernier est conservé par la mairiedu lieu de décès à laquelle le certificat de décès estremis en totalité. Il indique le domicile du défunt,la date et l’heure de la mort. Il mentionne un éven-tuel obstacle médico-légal à l’inhumation ainsi quecertaines informations concernant les diverses opé-rations funéraires. Le volet administratif doit êtrerempli conformément aux instructions figurant auverso du certificat de décès. Le médecin doit y appo-ser sa signature et son cachet.

2.4 Le volet médical (partie basse et cachetée)

Le volet médical ne mentionne pas l’identité dudéfunt. En dehors des renseignements médicaux,il comporte la commune et le département où estsurvenu le décès, la commune et le département dedomicile, le sexe du défunt et la date de naissance etde la mort. Les rubriques correspondant aux infor-mations médicales sont elles-mêmes divisées en deuxparties.

– La première (partie I) porte sur les causes du décès.Le médecin y décrit le processus morbide ayantconduit à la mort, de la cause initiale (maladieou cause externe étant à l’origine de la séquencedes événements morbides ayant entraîné la mort)jusqu’à la cause terminale (maladie ou affectionmorbide ayant directement entraîné la mort), avecéventuellement des causes intermédiaires. Pourchaque cause déclarée, il précise la durée de lamaladie.

– La partie II permet de déclarer des états morbidesou physiologiques ayant contribué au décès, maissans être directement à l’origine de la cause ini-tiale mentionnée dans la partie I. Des informationscomplémentaires doivent être systématiquementrapportées sur le certificat : existence d’une gros-sesse, notion d’accident et lieu de survenue, réa-lisation d’une autopsie et lieu de décès. Le voletmédical doit aussi comporter le nom et le cachetdu médecin. Il doit être cacheté pour en assurer laconfidentialité.

La différenciation entre la partie haute nominativesans information médicale et la partie basse ano-nyme avec les causes précises du décès garantit lerespect du secret médical. Le certificat de décès, pour

Page 3: Traité de médecine légale

ii

“tmlds-main” — // — : — page — # ii

ii

ii

294 II. La victime de violences

sa partie basse médicale, est un document stricte-ment confidentiel. Les causes de décès individuellesne peuvent être portées à la connaissance des tiersni à celle de tout organisme, exception faite de l’Étatet de l’Inserm (loi no - du août ;article L.- du code général des collectivitésterritoriales).

2.5 Le circuit du certificat de décès

2.5.1 Le circuit de l’information avant la certificationélectronique jusqu’à 2006 (annexe 3)

Le certificat de décès est remis à la mairie de lacommune de décès qui se charge de détacher etconserver la partie supérieure nominale (la remisedu certificat de décès est indispensable à l’obtentiondu permis d’inhumer).

Un bulletin de décès est établi par l’officier d’étatcivil à la mairie. Il indique, pour toute personnedécédée, ses nom, prénom, date et lieu de nais-sance, date et lieu de décès, commune et départementde domicile, état matrimonial, catégorie sociopro-fessionnelle déclarée par la famille. Le bulletin estdupliqué de façon à disposer de deux documents :l’un sans identification de la personne (« bulletin »),l’autre nominatif (« avis bis »). L’avis bis est trans-mis à l’Insee afin de constituer le fichier individueldes données socio-démographiques et d’actualiserle Répertoire national d’identification des personnesphysiques (RNIPP).

La partie cachetée du volet médical est agraféeavec le « bulletin » correspondant. Ces documentssont transmis au médecin de santé publique dela direction départementale des Affaires sanitaireset sociales (DDASS). Celui-ci décachette le voletmédical afin de prendre connaissance des causesde la mort. Il peut ainsi surveiller l’évolution dunombre de décès pour les causes les plus préoccu-pantes sur le plan de la santé publique. Le médecinde la DDASS transmet ensuite mensuellement l’en-semble des certificats correspondants au CépiDcde l’Inserm.

La certification des quelques décès sur-venant en France chaque année est actuellementbasée sur la circulation de documents papier dumédecin à la mairie, de la mairie aux DDASS et àl’Insee, puis des DDASS à l’Inserm []. La circula-tion et la manipulation de ces documents entraînentdes problèmes de délai, de fiabilité, de réactivité etde confidentialité. En particulier, le délai de mise àdisposition des données, actuellement de plusieursmois, a une influence sur la qualité puisqu’il est

difficile de contacter le médecin certificateur pourobtenir des informations complémentaires précisessur un décès ancien, lorsque cela est nécessaire. Deplus, ce délai ne permet pas l’utilisation des donnéessur les causes médicales de décès dans le contexted’un système d’alerte.

2.5.2 Le circuit de l’information à partir de la certificationélectronique (annexe 4)

Compte tenu des évolutions technologiques, lepassage à un mode de certification électronique descauses médicales de décès devrait permettre d’amé-liorer considérablement le circuit actuel du certificatde décès. Cette orientation est d’ailleurs recomman-dée par le groupe de travail européen sur les causesmédicales de décès piloté par Eurostat []. Le prin-cipe de ce système consiste à donner au médecinla possibilité de certifier directement le décès surun poste informatique en supprimant le documentpapier pour la partie médicale du certificat. Les prin-cipaux avantages qui en découlent sont :

– la diminution des délais de production des statis-tiques de mortalité (la transmission des donnéessaisies est presque immédiate) ;

– l’amélioration de la qualité et de la fiabilité desdonnées en utilisant, si nécessaire, les possibili-tés d’interaction avec le médecin certificateur aumoment de la certification d’un décès ;

– le renforcement de la confidentialité des donnéespar des procédures de chiffrement ;

– l’allègement du circuit actuel du certificat dedécès entraînant une réduction importante descoûts découlant de la manipulation des documentspapiers en particulier pour le CépiDc de l’Insermet pour les DDASS.

Lors de la canicule d’août , les difficultés pourétablir rapidement le niveau et les caractéristiquesde la mortalité ont mis ce projet au premier plan despriorités du ministère de la Santé []. Une étude préa-lable financée par la DGS et réalisée en a concluà la faisabilité du projet et défini son architecture.Un groupe de pilotage et un groupe de projet ontpermis d’associer l’ensemble des acteurs impliqués àdivers titres dans le processus de déclaration ou dansl’utilisation des causes médicales de décès (Inserm,DDASS, INSEE, InVS, DHOS, DRESS, DGCL, repré-sentants des départements d’information médicalede trois hôpitaux, Conseil de l’ordre des médecins,Fédération française des pompes funèbres, Syndicatdes médecins généralistes MG France).

Page 4: Traité de médecine légale

ii

“tmlds-main” — // — : — page — # ii

ii

ii

La certification des causes de décès 295

La solution proposée repose sur les principes sui-vants : interférer au minimum avec les systèmesexistants et utiliser autant que possible les solu-tions disponibles. La certification des décès peut sefaire sur un poste informatique banalisé et la véri-fication de l’identité du médecin est basée sur lacarte CPS ou sur un système équivalent lors de laconnexion (décret no - du juillet

relatif au certificat de décès et modifiant le codegénéral des collectivités territoriales). Le médecinremplit la partie haute du certificat (état civil) etla partie basse (causes médicales de décès) commeelles se présentent sur le document papier. Lorsqueles deux parties sont remplies, la partie haute peutêtre imprimée et signée par le médecin certificateurafin d’être disponible immédiatement pour les opé-rations funéraires et de suivre le circuit classique del’état civil (mairie-INSEE). L’ensemble des informa-tions saisies sont alors chiffrées puis transférées surun serveur national disponible à tout moment. Enconséquence, aucune information n’est stockée surles systèmes utilisés pour la déclaration. Les informa-tions individuelles chiffrées sont disponibles pour leCépiDc-Inserm (causes médicales de décès) et l’In-see (partie état civil). Les causes médicales de décèssont également transmises immédiatement à l’Insti-tut de veille sanitaire (InVS), aux DDASS, ainsi qu’àd’autres organismes dont la liste est fixée par le décretno - du juillet relatif au certificat dedécès et modifiant le code général des collectivitésterritoriales – article R. --). Si la disponibilité deces informations déclarées est immédiate, il est laisséaux médecins un délai de heures pour pouvoirmodifier ou corriger leur déclaration. Enfin, les don-nées agrégées issues des informations individuellessont accessibles à l’ensemble des utilisateurs.

L’objectif est un déploiement du système à partirde l’année , sachant que les deux circuits « élec-tronique » et « papier » subsisteront encore dans lesannées suivantes. Le passage à la certification élec-tronique dépend en effet du niveau d’équipementinformatique de chaque médecin certificateur et despossibilités d’accéder à une connexion au momentde la rédaction du certificat. Les difficultés de miseen place du système dépendent de l’environnementdans lequel le médecin exerce. En milieu hospitalier,le déploiement de l’authentification par système CPSdevra se caler sur les choix et le calendrier retenuspour l’authentification d’accès au Dossier médicalpersonnel (DMP). En cas d’avance du déploiementde la certification électronique par rapport à celui

du DMP, une situation transitoire par authentifica-tion non CPS sera mise en place. Pour les médecinslibéraux, le problème est la possibilité d’accéder à unposte lors de la constatation du décès. Le médecinpourra donc soit rédiger le certificat sur son propreordinateur à son cabinet, soit utiliser le certificatpapier habituel. L’évolution des technologies et la dis-ponibilité croissante de systèmes nomades devraientpermettre de résoudre ce problème à terme.

La certification électronique des causes médicalesde décès achèvera l’informatisation de la productiondes données sur les causes médicales de décès par leCépiDc, commencée en avec la numérisationdes certificats, la saisie vocale des causes de décès et lecodage automatique de ces causes. Cette informatisa-tion de la chaîne de production permet d’enregistrerl’information du niveau le plus fin (texte de l’en-semble des causes de décès) au plus synthétique(code de la cause initiale de décès) et d’assurer lacomparabilité internationale des données. La décla-ration électronique des causes médicales de décèss’inscrit dans le contexte général de la dématériali-sation des formulaires administratifs. Elle se traduitpar de multiples avancées dont la possibilité d’utiliserles informations transmises par les médecins certifi-cateurs comme une des composantes d’un systèmed’alerte en santé.

2.6 Le codage médical des causes de décès

Les causes médicales de décès mentionnées sur levolet médical du certificat sont analysées et codéespar le CépiDc de l’Inserm selon les règles de laClassification internationale des maladies (CIM)L’application de ces règles permet en particulier desélectionner, pour chaque décès, une cause initiale.Ces données codées sont ensuite couplées avec lefichier des données socio-démographiques transmispar l’INSEE. C’est à partir de ce fichier enrichi descauses médicales de décès qu’est établie annuelle-ment la statistique nationale de mortalité. Les causesde décès ont été codées selon la Classification inter-nationale des maladies, e révision de à ,e révision de à ( codes) et e révisiondepuis ( codes). Cette dernière révisionde la CIM étant plus complexe, tant au niveaudu nombre de codes et de leur structure, que desrègles de sélection de la cause initiale, le CépiDca conçu et développé un logiciel de codage auto-matique (STYX). Ce logiciel est compatible avec lelogiciel américain MMDS, développé par le National

Page 5: Traité de médecine légale

ii

“tmlds-main” — // — : — page — # ii

ii

ii

296 II. La victime de violences

Center for Health Statistics (NCHS-CDC) et uti-lisé par la plupart des pays anglophones. De plus,STYX intègre les recommandations faites dans ledomaine du codage automatique tant au niveau euro-péen (EUROSTAT) [] qu’international (OMS etNCHS) [].

Le traitement des données des certificats de décèspar le CépiDc de l’Inserm est autorisé par la loino . du er juillet relative au traitementde données indirectement nominatives ayant pourfin la recherche dans le domaine de la santé.

3 Intérêt épidémiologique des donnéessur les causes médicales de décès

Les causes de décès sont couramment utilisées pourorienter et évaluer les actions et les recherches dans ledomaine de la santé publique.

Les statistiques sont annuelles et exhaustives.Elles permettent d’analyser la fréquence des prin-cipales causes de décès, les caractéristiques socio-démographiques des personnes décédées (sexe, âge,catégorie socioprofessionnelle, etc.), l’évolution de lamortalité dans le temps, les disparités géographiquesde santé (niveau régional, départemental, commu-nal) et de comparer les niveaux de mortalité entrepays.

Les principaux indicateurs de mortalité sont les effec-tifs et les taux de décès pour la mortalité générale etselon les différentes causes. D’autres indicateurs clas-siquement utilisés sont : les taux de décès standardiséspar âge, les ratios de mortalité (ex. : hommes/femmes),la mortalité « prématurée » et la mortalité « évitable »liée aux comportements à risque.

En , on a ainsi dénombré décès, dont % concernent des hommes, un cinquième des per-sonnes de moins de ans, un tiers des personnesde plus de ans. La mortalité des moins de ansreprésente , % du total des décès. Quatre groupesde pathologies expliquent près des trois quarts de lamortalité totale : les tumeurs avec % de l’ensembledes décès, suivies par les maladies de l’appareil cir-culatoire ( %), les morts violentes ( %) et lesmaladies de l’appareil respiratoire ( %). Cette répar-tition diffère selon le sexe. Les tumeurs prédominentchez les hommes ( décès sur ) alors que, chez lesfemmes, les maladies cardiovasculaires arrivent large-ment en tête. La répartition des causes de décès variefortement selon l’âge. Avant ans, les morts vio-lentes prédominent (accidents, suicides, etc.), alorsqu’entre et ans, les tumeurs (du poumon et desvoies aéro-digestives supérieures chez l’homme, du

sein et du poumon chez la femme) sont responsablesde près d’un décès sur deux. Après ans, les mala-dies de l’appareil circulatoire constituent la premièrecause de mortalité.

Si la fréquence de nombreuses maladies diminuerégulièrement dans le temps (infarctus, maladiescérébro-vasculaires, accidents de la circulation, can-cer de l’utérus, etc.) on constate une progressionde certaines pathologies spécifiques (en particu-lier chez les femmes, cancer du poumon et desvoies aéro-digestives supérieures. . .) et l’apparitionou la résurgence de certaines maladies (Alzheimer,Chickungunya en Réunion, etc.).

Les données sur les causes de décès permettentégalement de mesurer les inégalités d’état de santé.La surmortalité masculine est particulièrement mar-quée en France (en particulier pour les morts vio-lentes). Les disparités sociales de décès selon lescatégories socioprofessionnelles sont importantespour la plupart des maladies et ces écarts ne dimi-nuent pas avec le temps. La répartition géographiquedes taux de décès est très spécifique avec un excèsde mortalité dans les régions du Nord du payspour de nombreuses maladies (cancer du poumon,alcoolisme, maladies de l’appareil circulatoire, sui-cide, etc.) ainsi que sur une transversale allant de laBourgogne à l’Auvergne.

En comparaison avec d’autres pays de niveau dedéveloppement semblable, la France se caractérisepar une mortalité « prématurée » (avant ans)élevée qui s’explique essentiellement par les com-portements à risque : accidents, suicides, causes liéesau tabagisme et à l’alcoolisme (cancer du poumon,cancers des VADS) et sida. À l’inverse, après ans,âge où le système de soins prend plus d’importance,les taux de mortalité sont relativement bas en France.

4 Importance de la qualité des donnéesde mortalité

La statistique des causes de décès peut être affec-tée par différents types de biais. Certains peuventprovenir de la codification, mais la mise en placed’un système de codification automatique à partirde l’année contribue à éliminer une grandepart des erreurs d’interprétation dans le codage etréduit la variabilité des procédures entre pays (homo-généité entre les différents systèmes de codificationautomatique) [,].

La qualité et la précision de la certification médi-cale progressent dans le temps mais restent à amé-liorer. Les médecins ne sont pas toujours précis dans

Page 6: Traité de médecine légale

ii

“tmlds-main” — // — : — page — # ii

ii

ii

La certification des causes de décès 297

les termes qu’ils utilisent et emploient parfois dessigles ambigus (ex. : IRC, insuffisance rénale ou res-piratoire, chronique ?). Le logiciel de certificationélectronique propose des aides en lignes facilementutilisables qui contribueront à l’amélioration de laqualité de la déclaration. D’autre part, en matièrede mort violente, il n’est pas toujours aisé pourle médecin, sans investigation complémentaire, dedéterminer s’il est en présence d’un accident oud’un suicide (noyade, chute d’un lieu élevé, accidentimpliquant un seul véhicule, etc.). S’il ne disposepas d’informations suffisantes, le médecin déclareune mort par traumatisme, indéterminée quant àl’intention. L’absence d’autopsie pour d’autres cir-constances de décès rend difficile la déclaration d’undiagnostic fiable []

Une autre source de biais est liée aux décès pourlesquels la cause reste inconnue de la statistique. Unegrande part de ces cas s’explique par un manque deretour de l’information médicale de certains insti-tuts médico-légaux. L’absence de connaissance deces cas par la statistique, entraîne en particulier unesous-évaluation importante de la fréquence des sui-cides et autres catégories de morts violentes. Il est

ainsi urgent de mettre en place une procédure pourl’obtention exhaustive de ces données.

5 Conclusion

Le certificat de décès n’est pas uniquement unacte d’état civil obligatoire. C’est également unoutil d’une importance capitale en matière desanté publique car les informations médicales qu’ilcontient constituent une des principales sourcesépidémiologiques pour l’orientation des actions desanté du pays. Il est essentiel que le médecin cer-tificateur ait à l’esprit ces deux notions car de laqualité de sa certification dépend en partie la fiabilitéde la statistique de mortalité. De même, l’homogé-néité des procédures de certification entre pays doitêtre améliorée car les données de mortalité sont deplus en plus utilisées pour comparer l’état de santédes pays. C’est pourquoi la Commission européenne(EUROSTAT), en collaboration avec l’OMS, déve-loppe actuellement des travaux prioritaires visantdirectement à réduire les biais de codification et decertification [].

Références

. Bouvier-Colle MH, Vallin J, Hatton F. Mortalité et causes de décès en France. INSERM-DOIN, Collection GrandesEnquêtes, Paris, : -.

. Pavillon G, Laurent F. Certification et codification des causes médicales de décès. Bull Epidémiol Hebd ; - :-.

. Jougla E, Rossolin F, Niyonsenga A et al. Comparability and quality improvement of European causes of death statistics.Final report. European Commission, DG Sanco, July .

. Hémon D, Jougla E, Clavel J et al. Surmortalité liée à la canicule d’août en France. Bull Epidémiol Hebd ;- : -.

. Pavillon G, Coleman M, Johansson LA et al. Coding of causes of death in European Community. Final report. Eurostat,Project /S -/EN, June .

. NCHS. Procedings of the International Collaborative Effort on automating mortality Statistics, Volume I, CDC –NCHS, July .

. Pavillon G. Enjeux des classifications internationales en santé. Paris : Éditions Inserm - Questions en Santé Publique,.

. Pavillon G, Johansson LA. Production of methods and tools for improving causes of death statistics at codificationlevel. Final report, European Commission, Eurostat, August , p.

. Jougla E, Péquignot F, Chappert JL et al. La qualité des données de mortalité sur le suicide. Rev Epidémiol Santé Publ ; : -.

. Jougla E, Pavillon G, Rossollin F et al. Improvement of the quality and comparability of causes of death statisticsinside the European Community. Rev Epidémiol Santé Publ ; : -.

Serveurs

www.cepidc.inserm.frwww.certdc.inserm.fr

Page 7: Traité de médecine légale

ii

“tmlds-main” — // — : — page — # ii

ii

ii

298 II. La victime de violences

Annexe 1. Certificat de décès (décès après 27 jours)

Page 8: Traité de médecine légale

ii

“tmlds-main” — // — : — page — # ii

ii

ii

La certification des causes de décès 299

Annexe 2. Certificat de décès néonatal (avant 28 jours)

Page 9: Traité de médecine légale

ii

“tmlds-main” — // — : — page — # ii

ii

ii

300 II. La victime de violences

Annexe 3. Circuit du certificat de décès (circuit « papier »)

Annexe 4. Circuit du certificat de décès (certification électronique)