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$*!ffiil{$$$ Un havre dans la tempête Le Centre Enfantsdu monde, au Kremlin-Bicêtre (Val-de-Marne), fournit aux jeunes mineurs étrangersisolésqui arrivent en France un lieu d'écouteet d'accueil temporaire, i"' ainsi qtl'un accès ori savoiis fondamentaux. N P A G E 34 ,$ Bien vieittir dans les quartiers défavorisés Population silencieuse et peu visible, lespersonnes âgées n'ont que tardivement vu leur situation particulière prise en compte par les acteursde la politique de la ville. Mais les choses changent. CAHIER JURIDIOUE N P A G E 43 LE W professlon rvice social 5e Haccès desétrangers à d'assistant de la La refonte du diplômed'Etat en 2004 et de nozyelles règles européennes en matière de reconnaissance desquatifications professionnelles ont quelque peu bouleverséies modalités d'accèsà la profession pour les étrangers. i N P A G E 3O

Un havre dans la tempete ASH No 2633 2009

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Un havre dans la tempête La refonte du diplôme d'Etat en 2004 et de nozyelles règles européennes en matière de reconnaissance desquatifications professionnelles ont quelque peu bouleverséies modalités d'accès à la profession pour les étrangers. CAHIERJURIDIOUE Le CentreEnfantsdu monde, au Kremlin-Bicêtre (Val-de-Marne), fournit auxjeunes mineurs étrangersisolés qui arrivent en France un lieu d'écouteet d'accueil temporaire, i"' ainsi qtl'un accèsori savoiis fondamentaux. LE ,$ i

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Un havre dansla tempête

Le Centre Enfants du monde,au Kremlin-Bicêtre (Val-de-Marne),

fournit aux jeunes mineursétrangers isolés qui arrivent en France

un lieu d'écoute et d'accueil temporaire,i"' ainsi qtl'un accès ori savoiis

fondamentaux.N P A G E 3 4

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Bien vieit t i rdans les quartiers

défavorisésPopulation silencieuse et peu visible,

les personnes âgées n'ontque tardivement vu leur situationparticulière prise en compte par

les acteurs de la politique de la ville.Mais les choses changent.

C A H I E R J U R I D I O U E

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professlonrvice social5e

Haccès des étrangers àd'assistant de

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La refonte du diplôme d'Etat en 2004 et de nozyelles règleseuropéennes en matière de reconnaissance des quatifications

professionnelles ont quelque peu bouleverséies modalitésd'accès à la profession pour les étrangers.

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w & f f i p m é . , T * & u Ê s

ENzAGAMEL

uN cENTRE pouR MINEURs lsot-És ÉrnaNGERs

Un havredans [a tempête

Fuyant la guerce et la misère, parfois exploités ou prostitués,les jeunes migrants qui arrivent en France sont souvent

en grande détresse. Le Centre Enfants du monde, au Kremlin-Bicêtre (Vat-de-Marne), leur fournit un lieu d'écoute et d'accueil

temporaire, ainsi qu'un accès aux savoirs fondamentaux.

I-l association Enfants du monde-Droits de I'Homme,qui intervient depuis 1 986 dans 12 pays en faveur dela protection des enfants en dangeq a ouvert le CEMen novembre 2002. Jusque-là, il n'existait aucunevéritable solutionpour ces adolescents, dont lapré-sence ne cessaitpourtant de croîfe dans les rues dela capitale, <La Cimade recevait des mineurs quisollicitaient des domiciliations et des demandesd'asile, qui ne powaient leur être accordées sansadministrateur adhoc ou référent parental>, sesouvientZubairTahir. Ouvert à l'origine entant queprojet-pilote avec deux lits, le CEM apour objectifsl'écoute et la protection des mineurs isolés, et le faitde les considérer avant tout pour ce qu'ils sont: desenfants. Doté d'un budget de I,298 million d'euros,le cenûTe est gâé parune convention cadre passee entrela direction des affaires sanitaires et sociales (DASS)

de Paris et les differentes associations du diqpositifVer-sini demise àl'abri et d'orientationdesmineurs iso-lés étrangers mis en place en 2003 (3). Lléquipe duCEM comprend dix professionnels (sept éducateursspécialisés et trois médiateurs). Tous ont d'excel=lenûes connaissances de la géopolitique, de la cultureet des traditions des populations accueillies, et plu-siews d'enfre eux maîfrisent une langue rare (unevingtaine de langues sont parlées par l'équipe). < Ici,un professionnel doit pouvoir détecter le mensonged'unjeune quinous dirait, par exemple, que sonpèrea été assassiné voilà deux ans par le Hizb-e-islamidans laville de Bayan, au Pakistan, alors que ça nepeut pas coller à la réalitén, indique le responsablede la structure, Dominique Habiyaremye, juriste deformation, lui-même recruté en 2003 sur labase desa connaissance de la région des Grands Lacs (il a ûa-vaitlé dans les camps de réfugiés et aupres des enfantssoldats) et de plusieurs dialectes du Rwanda.Les mineurs isolés étangen sont loin de pÉsenûer tousle même profil. On fouve d'abord les exilés, o.igt=naires de régionsravagéesparla guerre et les conflitsethniques, qui qurttent leurpays en raison des activi-tés politiques de leurs proches ou de leur appmtenanceethnique. Puis viennent les mandatés, incités par leursproches à partir afin d' échapper à la misère, chargésde favailler et d'envoyer de I'argent à ceux qui sontrestés au pays. Pour leur part, les exploités, sous lacoupe de trafiquants, sont pris dans des réseaux deprostitution ou conduits à participer à des activités dedélinquance ou de mendicité. Enfin, les errants, déjàen situation de vagabondage dans leurpays d'origine,occupent des petits emplois de fortune ou glissent dansla délinquance, éventuellement dans la prostitution.< Certains jeunes sont en transit, comme les Afghansqui veulent se rendre en Angleterre ou en Suède.Cew-là ne restent au Centre Enfants du monde quequelques jours. Pour d'eutres,,la France est le pointde chute détaille ZtfuanTahtr.Actuellement, tous les

zrz(l)vientd'Afghanistan, ila 14 ans. C'estun mineur isolé étranger. Ce matin, un planà la main, il frappe à la porte du Centre

Enfants du monde (CEM) (2), au Kremlin-Bicêtre,dans le Val-de-Marne . Zubair Tahir, chef de ser-vice, lui demande en persan qui l'envoie. < (Jn

homme m'a donné ce plant>, repond l'adolescent.On n'en saura pas plus. <C'est sans doute un desmaraudeurs qui travaillentprès de la gare de I'Est,à Paris, qui I'a orienté vers nous D, décode ZubairTahiA d' origine pakistanaise, qui prop ose ù Azn deprendre ses aises et de rester déjeuner.Dans les quarante-huit heures, un éducateur réfe-rent sera désigné pour s'occuper d'Aziz et pourcollecter auprès de I'enfant les informations qui

aideront à déterminer unproj et socio-éducatif ainsique les moyens à mettreen æuvre. < Dans unpremier temps, nous luiexpl iquons qui noussommes et lui demandonsqui il est. Quand il se seraposé, nous le question-nerons davantage sur sonparcours, en lui expli-q u a n t q u e n o u s n esommes pas lapolice, quenous sommes là pourl'aider.n Pour I'heure, Aziz rcjoint les 19 autresjeunes hébergés dans ce centre de mise à I'abri.Tous les lits de l'établissement étant déjà occu-pés, il ne bénéficiera pas immédiatement d'unhébergement. < Dès qu'uneplace se libérera,Azizpoulva intégrer la structure à temps plein, ptêciseZubatrTahr. En attendant, il peut prendre ses repn"sici et participer aux cours de français. Mais leséducateurs ne le laisseront pas partir sans s'êtreassurés qu'il a un toit pour dormir ce soir t>

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Ci-dessous, Audrey

Barreau lau centrel et

Christ iane Gomis,

éducatrices spéciatiséesdu CEM, accueil lentun arrivant. Et, à droite,

les cours de françaisassurés par

des bénévotes, donl

lsabelle Berthier.

L E M A G A Z I N E

V * S P R A T I f i U Ë $

jeunes accueillis sont arrivés dans I'Hexagonequelques jours, voire quelques semaines avant quenous les mettions à I'abri. De temps en temps, noushébergeons aussi desfilles et des garçons prostitu,lr,qui vivent ici depuis deux-trois ans> (Ike encadrépage 37). Cinq pays totalisent la moitié des effectifs :la Roumanie, I'Afghanistan, le Mali, la Guinée-Cona-lcy et I'Inde. Ce sont en maj oriûe des gançons ( 1 9 1 gar-

çons étaient hébergés en 2008, pour 26 filles) avec rnemoyenne d'âge de 15 ans.

Démêter [e vrai du fauxEn théorie, la prise en charge des résidents par les ta-vailleurs sociaux du CEM est fixée à quinze jours, aucours desquels doivent être organisés un bilan desanté (en partenariat avec le Comité médical pour lesexilés de I'hôpital Bicêtre ou l'Espace santéjeune deI'Hôtel-Dieu, à Paris) et une orientation vers dessfructures de droit commun. Pour cela, il faut d'abordrégler la question des papiers et, certiains n'en ayantaucun, rétablirle contactavec les familles dans lepaysd'origine. Si ces demières ontaccès àunnuméro detéléphone, les travailleurs sociaux les appellent. Ilspeuvent ainsi les rassurer sur le sort de leur enfant etleur expliquer ce qu'ils font pour lui. Mais avant, ilfaut parvenir à dénouer les fils de l'histoire dujeune.

Orlesmineurs isolés étangersne se confientpas aisé-msnt. < Certains enfants ont apprk à se méfier de touset de tout. D'autres ont été'formatés" pour ne lais-ser échapper que des bribes d'informations, poursurvivre tout au long de leur parcozrs, souligneAudrey Barreau, éducafrice spécialisée . Beaucoupdisent la vérité, mais les histoires sont padois siincroyables qu' on ne peut s' ernpêcher d' m douter Leplus gros denotretravail est d'établirune confiancepour qu'ils puissent se liwer. C'est d'autant plus dif-

ficile quenow travaillons dnns I'urgence. >Commerfi,alors, démêler le vrai du faux? <<Parfois, on ne saitmême pas de quel pays ils viennent. Actuellement,nous accueillons un jeuneAfghan qui ne parle pas

farsi et un lranien qui parlefarsi. Des Afghans qui sontnés dans des camps de réfugiés au Pakistan s'expri-ment en ourdou. Et des enfants parlant le penj âbi, unelangue utilisée aussi bien en Inde qu'au Pakistan.C'est un casse-tête ! Vers quelle ambassade se tour-ner? Obtenir une preuve de leur identité et de leurminorité est primordial pour evancer D, expliqueZubarTahtr.Defait,certainssefontpasserpourdesmineurs, dans I'espoir de rester en France. D'autrescachent qu'ils ont des contacts téléphoniques avecleurs parents pour metfre en avant leur isolement,croyant ainsi être mieux pris en charge. La barrière

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LE MAGAZI

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de la langue est une autre difficulté à laquelle seheurte Audrey Barreaq bien qu'elle maîtrise l'anglais,l'espagnol et le portugais. < Soit je demande à uncollègue de faire I'interprète, soit je communiqueavec les gestes et le regard, tout en ayant parfoisI'impression de passer à côté de certaines choses. >Une fois les pièces d'état civil obtenues, (noLtsessayons d' établir le proj et duj eune, tout en vffifiantque celui-ci estfavorable à son bien-être. S'il désires'établir en France et risque de se retrouver en situa-tion de prostitution ou d'esclavagisme, on en discutewec lui. S'ilpréfere êtrerapatrié aussi>,affirme lechef de service. Lévaluation terminée, une syrthèsesocio-éducative est envoyée à l'aide sociale à l'enfance(ASE). Laquelle saisit le parquet des mineurs, quiprend la décision d'accorder ou non une protectionen prononçant une ordonnance provisoire de place-ment (OPP), directement ou paf, le biais du tribunalporn enfants. Si les travailleurs sociaux du centreestiment que le jeune est en danger, la procédure peutêfre accéléré e via unsignalement direct au procureur.C'est le cas pour des jeunes prostitués qui acceptentde dénoncer leur proxénète, des mineures enceintesou des enfants de moins de 10 ans. Une fois le pla-cement en foyer ou en famille d'accueil finalisé, lelien avec le CEM estthéoriquementrompu. <Danslesfoits, nos médiateurs peuvent être contactés pour

foire des traductions, résoudreun conflit ouunmal-entendu, commente Zubak Tahtr. Réc emment, j e mesuis déplacé dans une ferme en Dordogne, où estplacé un jeune Pakistanais. Le couple âgé qui l'ac-cueille n' a j amais voyagé et ne comprend pas toutesses problématiques. >

Les bases du françaisCe matin, c'est l'effervescence dans le centre. Walids'est brûlé le bras, etAudrey Barreau le panse, tan-dis que Christiane Gomis, éducafrice spécialisée, dis-tribue les traitements prescrits par le médecin à l'is-sue du bilan de santé (notamment des médicamentset des crèmes contre lagale ou des comprimés pourles froubles du sommeil). Les résidents, qui viennentde terminer leur petit déjeuner, s'affairent à rangerleurs charnbres. A partir de 10 heures, celles-ci sont

Dans les chambrescomme lors des repas,

t'équipe du centrefavorise un brassagedes national i tés.

fermées à clé et les 19 résidents rejoignent leur coursde français langue étrangère (FLE). Leurprofesseur,Aline Bouvagnet, coordonne une équipe de béné-voles qui interviennent pendant deux heures. Ellefait passer aux nouveaux arrivants tnls qu' Azuun testpour déterminer le niveau de lecture, de graphie et deconnaissance de l'alphabet latin. A f issue de cette éva-luation, ils sont orientés dans I'un des frois groupesde niveaux . < Je m'appelle Sogo, je viens du Mali > ;<<Je m'appelle Ning, je viens de Chine>... Dans leniveau l, les six élèves apprennent à dire et à écrireleur prénom et leur nationalité. Puis Chantal Tassin,bénévole, leur fait reconnaître une pomme, unebanane, etc. Totalement débutant, Aziz sejoint augroupe. <l{ous accueillons sans cesse de nouveatuéleves, et ilfaut leur accorder du temps pour qu'ilsacquièrent les savoirs de base, témoigne ChantalTassin. C' est un travail d' adaptation permanent. Cequi estvalorisant, c'est que les jeunes sont très moti-vés etfont des progrès rapides. Les nouveaux arri-vants sont tirés par les autres.n De son côté, GuyPédané s'occupe du niûeau 3, destiné aux franco-phones: des Congolais, des Mauritaniens et des Gui-néens, âgés de 12 à 16 ans. <Ils savent tous lire etécrire. Avec eLtx, on aborde des problèmes de société.Aujourd'hui on a travaillé sur les poésies de PierreRonsard et deVictor Hugo.n Pour que les résidentsprogressent rapidement en fiançais, l'équipe s'efforcede procéder à un brassage de nationalités,. dans leschambres comme à table. Le but est aussi qu'ilspuissent s'exprimer au mieux en français devant unj.rge, démontrant ainsi leurmotivation et leur aapa-cité à développer un projet de vie en France.Le temps durepas comporte égalementune dimen-sion éducative: il permet aux résidents de s'ouwir àune nourriture variée et nouvelle . < Ils ne connais-sent pas beaucoup devinndes ni de légumes et aimentsurtout les plats en sauce, témoigne Nassera Meb-toul, la rnaîtresse de maison, qui organise une fois parsemaine un atelierpâtisserie. Je leur apprends à êtreplus souples,>Après le déjeuner, tandis que quelquesjeunes sont chargés de faire la vaisselle, Chadli etMoussa entament une partie d'échecs, les fillesjouent aux petits chevaux et Aziz se défoule sur le

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Afin d'organiserles cours de français,

Atine Bouvagnet (à

droitel évatue [e niveaudes arrivants.

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baby-foot. C'est la pause avant la réunion hebdoma-daire des jeunes, temps de parole privilégié sur la viequotidienne dans la structure. < Ils peuvent parler deleurs erwies, alimentaires ou occupationnelles, ou deproblèmes relationnels >, ajoute Audrey Barreau.Dans le salon, au milieu d'un bourdonnement delangues diverses, Aline Bouvagnet liste les rendez-vous médicaux des uns et des autres, puis cède laparole aux résidents. ( Qui veut participer à la sor-tiepiscine? >, <Quelles sontles activités quivous ten-tent? > < La danse ! LefootbalMnternet ! Rester iciet dormir !n, répondent-ils enfrançais ouenanglais.Encadrées soit par des éducateurs spécialisés soitpar des bénévoles, les activités ludiques sont nom-breuses: piscine, sports, ateliers dessin et cuisine,balades dans Paris, ou encore visite du Centre d'in-formation et de documentationjeunesse (CIDI), oùils peuvent se renseigner sur les métiers . < En cemomenf c'est dfficile de les motiver pour les sor-ties de I'après-midi, déplore Renaud Mandel, édu-cateur spécialisé en cours deVAE, qui accompagnerm groupe de six garçons jouer au football sur un ter-rain près de la porte d'Italie. Avec la baisse des tem-pératures et les durées de séjour qui se prolongent,les résidents sont plus moroses. C'est ànous d'im-pulser une dynamique, car ils ne peuvent pas restertous les jours à tourner en rond..rr Au centre, lesobligations sont peu nombreuses - < être rentré pour18 heures, ne pas boire, ne pasfumer >Lesprofes-sionnels de la structure s'accordent d'ailleurs sur lefait que ces adolescents sont, pour laplupart, facilesà viwe et respectueux du fonctionnement du centre.< Ces jetmes ont tous traversé des sih,mtions dfficiles.Pour arriver j us qu' en France, s euls, ils ont dû mûrirplus vite que les autres enfants. Ils ressentent unmal-être qui n' est pas forcément visible, mais qui peutéclater de temps en temps, viades scarifications oLt

des crises d'angoisse. Mais dans I'ensemble, auregard de ce qu'ils ont subi, je suis étonné qu'ils nesoient pas plus fracassés >,témoigne Renaud Man-del. Sans doute ont-ils tendance, dans une logrque desuruie, à occulter leurs angoisses et difficulûes intimestant que leur situation reste instable.Après le dîner, pris aux alentours de 20 heures, lesrésidents peuvent regarder la télé. < Auparavant,nous leur laissions des DVD, mais il a failu mettreaupoint des règles, car lesIndiens passaient leurtemps devant des Bolly-wood, et les autres étaientlassés. Désormais, lesfilms ne sont difiisés qu' enprésence d'un éducateurLe reste du temps, ilsregardent les chaînes fran-çaises, qui les aident à per-

fectionner leur langue >,commente ZubatrTahn. A22heures, chacun doit avoirrejoint sa chambre, lesgarçons d'un côté, les filles de I'autre, et le sur-veillant de nuit entre les deux. Les portes du centresont fermées pour la nuig un vigile stationnant devantl' entrée jus qu' à 23 heures.< Le nombre de mineurs dans la rue ne cesse d'aug-menter A Paris, mais aussi en Seine-Saint-Denis,dans le Nord-Pas-de-Calais ou dans les Bouches-du- Rhône, constate Zubatr Tahtr. Nous s ommes tousdébordés - la direction de I'action sociale, deI'enfance et de la santé, à Paris, lapranière.r C'estpourquoi les adolescents, qui ne devraient êfe héber-gés au CEM qu'une quinzaine de jours, y restentparfois bloqués plusieurs mois. < Or ils ne peuvent pasposer leur valise, puisqu'on leur explique dès ledépart que notre structure est un tremplin en wed'un départ vers unfoyer ou unefamille d'accueil,déplore le chefde service. La lenteur des procéduresadministratives et judiciaires, qui entraîneun allon-gement de la durée moyenne de leur séjouri rend ledépart de l'établissement, dans lequel ils se sontconstruits des rqtères, d'autantplus dur lls sontunenouvelle fois déracinés. > Certains conserventd'ailleurs des contacts avec le CEM. <Mais seulsceux qui s'en sont sortis viennent nous voi4 regretteRenaud Mandel. On ignore ce qu'il advient desautres unefois leur majorité atteinte.> DominiqueHabiyaremye a néanmoins la satisfaction de rappe-ler que, <depuis 2003, sur les 1500 mineurs quenous avons accueillis, les trois quarts ont pu êtreorientés vers le droit commun. Sans le CEM, queseraient-ils devenus ? >> r ELEONOREVARINI

PHOTOS MOHAMED KHALFI(l) Les prénoms des mineurs ont été changés.(2) Centre Enfants du monde: 21, place Victor-Hugo - 94210 LeKremlin-Bicêtre - Té1. 01 43904770. Association Enfants duMonde-Droits de l'Homme: 5, rue des Haudriettes - 75003 paris -Té1. 0l 42727 I 78 - wwwemdh.org(3) Le dispositif Versini a été modifié à la fin 2004. plusieursassociations y collaborent, dont Hors la rue et France terre d'asile.Après des inquiétudes ces derniers mois sur la pérennité dudispositif, son financement semble assuré au moins iusqu'à la fin2010 - Voir ASH no2631 du 6-l 1-09, p. 17.

PROSTITUTION DES MINEURsEtabtir ta confiance sur le terrainEducatr ice spécial isée au CentreEnfants du monde, Christ ianeGomis est cfargée des mineursisolés vict imes de la traite. Autravers de nombreux partenariats

avec des maraudeurs (Médecins dumonde, Aides, les Amis du busdes femmes, etc.), el le va au-devantdes jeunes dans la rue af in de leurproposer une mise à l 'abri . <Jetravaille de 22 heures à 3 heures dumatin. Les associations de terrainrepèrent des mineurs isolés endanger'- actuellement, surtout desfilles originaires d'Afrique deI'Ouest anglophone et d'Europe del'Est - et m'appellent pour interveniren tant que soutien. Il ne suffit pasde leur proposer de l'aide. Mon

objectif est d'être identifiée commepersonne ressource, bien que je

ne me présente pas auprès d'ellescomme éducatrice. Il y a un longtravail de confiance à mettre enplace, d'autant qu'on vient les voirsur leur lieu de travail. Cesmineures, qui d'ailleurs cachent leurâge, sont dans des réseaux, ellessont surveillées et ont souvent desdettes. Les liens se fissenf au fur età mesure du temps et desbesoins. r En 2008, dix jeunes fillesont pu être extraites de la rueet mises à l 'abri au CEM. tt El les ontrapidement été prises en chargepar la protection de I'enfance etenvoyées dans des lieux d'accueilen province. rl

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