33

Univers : les théories de la cosmologie contemporaineexcerpts.numilog.com/books/9782903951238.pdfJe tiens à remercier tous mes collègues et amis chercheurs de l'Institut d'Astrophysique

  • Upload
    others

  • View
    1

  • Download
    0

Embed Size (px)

Citation preview

Page 1: Univers : les théories de la cosmologie contemporaineexcerpts.numilog.com/books/9782903951238.pdfJe tiens à remercier tous mes collègues et amis chercheurs de l'Institut d'Astrophysique
Page 2: Univers : les théories de la cosmologie contemporaineexcerpts.numilog.com/books/9782903951238.pdfJe tiens à remercier tous mes collègues et amis chercheurs de l'Institut d'Astrophysique
Page 3: Univers : les théories de la cosmologie contemporaineexcerpts.numilog.com/books/9782903951238.pdfJe tiens à remercier tous mes collègues et amis chercheurs de l'Institut d'Astrophysique

Collection

« Science et Conscience »

Page 4: Univers : les théories de la cosmologie contemporaineexcerpts.numilog.com/books/9782903951238.pdfJe tiens à remercier tous mes collègues et amis chercheurs de l'Institut d'Astrophysique
Page 5: Univers : les théories de la cosmologie contemporaineexcerpts.numilog.com/books/9782903951238.pdfJe tiens à remercier tous mes collègues et amis chercheurs de l'Institut d'Astrophysique

J A C Q U E S D E M A R E T

U N I V E R S

Les théories de la cosmologie contemporaine

ÉDITIONS LE MAIL

Page 6: Univers : les théories de la cosmologie contemporaineexcerpts.numilog.com/books/9782903951238.pdfJe tiens à remercier tous mes collègues et amis chercheurs de l'Institut d'Astrophysique

@ Le Mail, 1991. Tous droits réservés pour tous pays.

ISBN 2-903951-23-3 Éditions Le Mail - 6, allée Fontaine Gianotti

13100 Aix-en-Provence

Page 7: Univers : les théories de la cosmologie contemporaineexcerpts.numilog.com/books/9782903951238.pdfJe tiens à remercier tous mes collègues et amis chercheurs de l'Institut d'Astrophysique

A la mémoire de mes parents.

Page 8: Univers : les théories de la cosmologie contemporaineexcerpts.numilog.com/books/9782903951238.pdfJe tiens à remercier tous mes collègues et amis chercheurs de l'Institut d'Astrophysique
Page 9: Univers : les théories de la cosmologie contemporaineexcerpts.numilog.com/books/9782903951238.pdfJe tiens à remercier tous mes collègues et amis chercheurs de l'Institut d'Astrophysique

SOMMAIRE

I n t r o d u c t i o n 13

P R E M I È R E P A R T I E

C h a p i t r e I . — LA COSMOLOGIE AVANT EINSTEIN 21

C h a p i t r e I I . — LES FONDEMENTS DE LA COSMOLOGIE RELATIVISTE 3 8

Le c a d r e t h é o r i q u e : l a r e l a t i v i t é géné ra l e . - F r i ed - m a n n , R o b e r t s o n , W a l k e r e t les p r e m i e r s m o d è l e s évolut i fs . - E i n s t e i n , l 'Un ive r s s t a t i q u e e t la c o n s t a n t e c o s m o l o g i q u e . - L e m a î t r e , H u b b l e e t l ' e x p a n s i o n d e l 'Un ive r s . - S i n g u l a r i t é i n i t i a l e e t B ig B a n g . - Décélé- r a t i o n e t d e s t i n des U n i v e r s F L R W . - Age d ' u n m o d è l e F L R W .

C h a p i t r e I I I . — LA COSMOLOGIE RELATIVISTE FACE À L'OBSERVATION 6 2

L ' h o m o g é n é i t é s p a t i a l e de l 'Un ive r s . - L ' i so t rop ie de l 'Un ive r s e t le r a y o n n e m e n t fossile à 2,7 Kelv ins . - T r o i s n o m b r e s q u i c a r a c t é r i s e n t l ' U n i v e r s a c t u e l : Ho,qo et Qo. - La m a s s e c a c h é e de l 'Un ive r s . - O u v e r t o u

f e r m é ?. - L ' a b o n d a n c e de l ' h é l i u m c o s m o l o g i q u e . - La m e i l l e u r e t h é o r i e de la g r a v i t a t i o n ? - Des m o d è l e s à p a s s é inf ini . - E t la c o n s t a n t e c o s m o l o g i q u e ? - B o n d i , Gold , Hoy le e t la c r é a t i o n c o n t i n u e d e m a t i è r e .

Page 10: Univers : les théories de la cosmologie contemporaineexcerpts.numilog.com/books/9782903951238.pdfJe tiens à remercier tous mes collègues et amis chercheurs de l'Institut d'Astrophysique

10 UNIVERS

Chapitre IV. — UNE RECONSTITUTION DE L'HISTOIRE DE L'UNIVERS : LE MODÈLE STANDARD DU BIG BANG 100

La physique des particules élémentaires à la rescousse de la cosmologie. - La fournaise primordiale. - Des conditions physiques initiales pour l'Univers. - Y a-t-il de l'antimatière dans l'Univers? - Les grandes périodes de l'histoire de l'Univers. - L'ère quantique et l'origine de la matière. - L'ère hadronique et la composition baryonique de l'Univers. - L'ère leptoni- que et le destin des neutrinos. — L'ère radiative et la nucléosynthèse cosmologique. - L'ère stellaire et la formation des galaxies. - De nouvelles possibilités d'expliquer l'architecture à grande échelle de l'Uni- vers. - L'apparition des étoiles et des planètes.

DEUXIÈME PARTIE

Chapitre V. — LA MATIÈRE DE L'UNIVERS ET LA GRANDE UNIFICATION 148

La grande unification. - Le proton est-il instable ? - Des défauts topologiques dans l'Univers primordial.

Chapitre VI. — L'ISOTROPIE DE L'UNIVERS ET L'INFLATION COSMIQUE 159

L'horizon cosmologique. - La cosmologie chaotique de Misner et le modèle « Mixmaster ». - Le caractère extrêmement particulier de notre Univers. - Le modèle inflationnaire original de Guth. - De nouveaux scéna- rios inflationnaires. - Critiques du concept d'inflation cosmique. - Des univers multiples ?

Chapitre VII. — LA SINGULARITÉ INITIALE DE L'UNIVERS .. 198 Une singularité de l'espace-temps. - Les théorèmes d'existence des singularités relativistes. - Une grande variété de singularités. - Une grande diversité d'opi- nions face aux singularités. - Comment éliminer les singularités ? - La mécanique quantique détient-elle la solution du problème des singularités ? L'Univers a-t-il été créé « de rien » ? - Est-il possible de créer un univers au laboratoire? - Les Univers cycliques de

Page 11: Univers : les théories de la cosmologie contemporaineexcerpts.numilog.com/books/9782903951238.pdfJe tiens à remercier tous mes collègues et amis chercheurs de l'Institut d'Astrophysique

SOMMAIRE 11

Lemaître, Gold, Davies et Wheeler. - La singularité cosmologique constitue-t-elle un commencement absolu de l'Univers ?

Chapitre VIII. — SUPERTHÉORIES ET UNIVERS MULTIDI- MENSIONNELS 256

Le concept de supersymétrie. - La supergravité. - Notre Univers possédait-il à ses débuts plus de trois dimensions spatiales ? - La théorie ultime : les super- cordes ?

TROISIÈME PARTIE

Chapitre IX. — L'EXISTENCE HUMAINE, FACTEUR EXPLICA- TIF ULTIME DE L'UNIVERS 271

La nature de l'explication en cosmologie. - Le premier argument cosmologique de type anthropique. - La formulation de Carter des Principes Anthropiques fai- ble et fort. - L'extraordinaire ajustement des paramè- tres de l'Univers.

Chapitre X. — QUELLE INTERPRÉTATION ET QUEL STATUT POUR LE PRINCIPE ANTHROPIQUE 284

Une interprétation téléologique du Principe Anthropi- que. - Variations sur le thème des univers multiples. - La cosmologie « auto-référentielle » de Wheeler. - La forme finale du Principe Anthropique de Barrow et Tipler. - Critiques des arguments anthropiques. - Un principe d'intelligibilité et de cohérence de l'Univers.

Epilogue. — LA DIMENSION MÉTAPHYSIQUE DE LA COSMO- LOGIE CONTEMPORAINE . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 309

Page 12: Univers : les théories de la cosmologie contemporaineexcerpts.numilog.com/books/9782903951238.pdfJe tiens à remercier tous mes collègues et amis chercheurs de l'Institut d'Astrophysique
Page 13: Univers : les théories de la cosmologie contemporaineexcerpts.numilog.com/books/9782903951238.pdfJe tiens à remercier tous mes collègues et amis chercheurs de l'Institut d'Astrophysique

INTRODUCTION

« Ce qui m'intéresse réellement, c'est de savoir si Dieu disposait d'un certain choix en vue de la création de l'Univers »

A. EINSTEIN.

Profondément ancrées au sein de l'inconscient humain, les grandes interrogations concernant l'Univers ont, à toute époque, sollicité la curiosité et l'intelligence de l 'homme, avec ce mélange étrange d'une fascination extrême, du désir impatient de savoir, mais aussi de l'angoisse d'ignorer. Aujourd'hui, plus que jamais, les problèmes cosmologiques sont à la une de l 'actualité scientifique. En effet, grâce aux progrès conjugués de l 'observation astronomique, des théo- ries cosmologiques et de la physique des hautes énergies, nous sommes capables de mesurer l'Univers avec de plus en plus de précision, d'analyser tous les rayonnements qui nous arrivent du cosmos, de faire l 'inventaire de ses constituants, depuis les particules infimes jusqu'aux monstrueux amas de galaxies et même de reconstituer une histoire de l'Univers, qui semble en bon accord avec la plupart des observations.

Et pourtant, les questions cosmologiques essentielles res- tent encore, en grande partie, sans réponse, bien qu'elles soient maintenant posées dans un cadre scientifique précis

Page 14: Univers : les théories de la cosmologie contemporaineexcerpts.numilog.com/books/9782903951238.pdfJe tiens à remercier tous mes collègues et amis chercheurs de l'Institut d'Astrophysique

et que certaines réponses nous paraissent, en quelque sorte, à portée de main, puisque liées au verdict d'observations que nous savons comment réaliser en principe, mais dont les résultats sont encore malheureusement ambigus.

Notre Univers est-il limité dans l'espace ou bien s'étend-il jusqu 'à l'infini ? A-t-il commencé ou a-t-il existé de toute éternité ? A-t-il toujours été le même ou est-il en évolution ? - Dans ce dernier cas, l 'écoulement du temps entraîne-t-il l 'Univers dans un écrasement catastrophique ou bien dans un état de dilution totale ? Ce gigantesque ensemble de galaxies que nous appelons « notre Univers » ne serait-il pas, en réalité, qu'une sous-structure élémentaire de la totalité de l'Univers matériel, qu 'un « mini-univers » parmi un très grand nombre, voire une infinité de systèmes semblables? Pourrait-il y avoir perpétuellement dans un espace infini création et destruction de tels « mini-uni- vers » ?

Toutes ces questions sont au cœur des recherches actuelles en cosmologie; les plus récentes et les plus ambitieuses parmi celles-ci font appel aux théories physiques les plus avancées, celles qui essaient d'intégrer dans un même schéma unificateur toutes les interactions physiques con- nues. Elles débouchent sur les spéculations les plus folles — mais le sont-elles réellement assez? — rejoignant, bien souvent, les grands thèmes de la science-fiction : univers parallèles, dimensions spatiales en excès de trois, voyages dans le temps.

Mais, toutes ces interrogations, aujourd'hui du ressort de la science, suscitent tout naturellement des prolongements sur le plan métaphysique. D'aucuns voudraient interdire cette intrusion de la science, voire de la raison, sur le terrain philosophique, mais pourtant , il est manifeste que la cosmo- logie est grosse de métaphysique et ce serait châtrer la raison que de l 'empêcher de s'exercer à tenter de résoudre les problèmes métaphysiques qui s'imposent à l'intelligence humaine lorsqu'elle réfléchit sur l'Univers : l'Univers est-il seul ou bien doit-il son existence à l 'Etre absolu distinct de

Page 15: Univers : les théories de la cosmologie contemporaineexcerpts.numilog.com/books/9782903951238.pdfJe tiens à remercier tous mes collègues et amis chercheurs de l'Institut d'Astrophysique

la matière ? Quant à nous, êtres humains, avec notre taille infime par rapport aux dimensions cosmiques qui se chif- frent en milliards d'années-lumière, perdus sur une petite planète dans la banlieue d'une banale galaxie parmi des milliards d'autres, avons-nous un quelconque rôle à jouer au niveau cosmique, dans une épopée qui semble, a priori, ne pas nous concerner ? Se pourrait-il que les êtres vivants et pensants constituent le moteur de la genèse de l'Univers, le but ultime de son existence ?

Mais, ces incursions des scientifiques dans le domaine philosophique ne sont malheureusement pas sans risques : que de conclusions métaphysiques hâtives et injustifiées dans la li t térature cosmologique d'hier et d 'aujourd'hui, que d'erreurs et de paralogismes causés par la confusion extrê- mement fréquente entre des concepts fondamentalement distincts, tels que création et commencement de l'Univers, néant et espace vide.

Cet ouvrage voudrait présenter la vision de l'Univers qui se dégage de la cosmologie d'aujourd'hui, basée sur la théorie de la relativité générale d'Einstein. Un modèle, décrit dans la première partie, s'est dégagé : il est popularisé sous le nom de modèle du Big Bang. En très bon accord avec la plupart des observations astronomiques de portée cosmo- logique, il permet de reconstituer l'histoire de l'Univers, à l'exception des tout premiers moments de la phase d'expan- sion actuelle, où il paraî t se heurter à un certain nombre de difficultés fondamentales.

Ce sont d'ailleurs les tentatives de résolution de ces

difficultés qui sont à la base du renouveau de la cosmologie théorique, caractérisé par l 'apparition d'une foule de nou- veaux concepts : inflation, cosmologie quantique, univers multidimensionnels, ..., qui font l'objet de la deuxième partie.

Il ne m'a pas paru possible de passer sous silence cette tentative originale d'explication de l'Univers, qui porte le nom de Principe Anthropique et qui constitue la troisième partie de cet ouvrage. Ce principe, dans sa version faible,

Page 16: Univers : les théories de la cosmologie contemporaineexcerpts.numilog.com/books/9782903951238.pdfJe tiens à remercier tous mes collègues et amis chercheurs de l'Institut d'Astrophysique

propose de rendre compte des caractéristiques physiques de l'Univers à partir du seul fait de l'existence d'observateurs humains. Dans sa version forte, résolument téléologique, il postule que l'Univers est nécessairement adapté à l'appari- tion d'êtres vivants et intelligents, capables de lui donner un sens. Principe ultime, explication finale de l'Univers ou bien résurgence d'idées finalistes archaïques et haïssables, à • éliminer au plus vite du discours de la science ? Les opinions sont partagées, les polémiques toujours aussi vives.

Tout au long de cet ouvrage, j'ai essayé, dans la mesure du - possible, de dégager les implications métaphysiques des travaux cosmologiques récents, à la lumière des écrits des philosophes et métaphysiciens qui se sont penchés sur les problèmes de l'Univers.

Le niveau adopté est celui de la vulgarisation, telle que la souhaite, par exemple B. d'Espagnat, c'est-à-dire, qui s'ap- proche le plus près possible du lecteur en éliminant toutes les technicités du formalisme mathématique, mais qui demande, de sa part, un certain effort de réflexion, inévita- ble si on ne veut pas travestir le discours scientifique en le dissolvant dans de vagues analogies, bien souvent trom- peuses. Les encadrés, pour la plupart, ne sont pas indispen- sables à la compréhension du texte principal : pour le lecteur plus exigeant, ils peuvent cependant constituer une source d'informations complémentaires d'un certain intérêt.

Page 17: Univers : les théories de la cosmologie contemporaineexcerpts.numilog.com/books/9782903951238.pdfJe tiens à remercier tous mes collègues et amis chercheurs de l'Institut d'Astrophysique

REMERCIEMENTS

Je tiens à remercier tous mes collègues et amis chercheurs de l'Institut d'Astrophysique de l'Université de Liège avec qui j'ai eu de nombreuses discussions concernant divers aspects de la cosmologie : ils sont trop nombreux pour que je les cite individuellement.

Je voudrais évoquer tout particulièrement la mémoire du Professeur P. Swings, qui m'a accueilli à l'Institut d'Astro- physique, celle du Professeur P. Ledoux qui m'a initié à l'astrophysique théorique, enfin celle d'A. Boury, avec qui j'ai eu le privilège d'avoir de fréquents échanges de vue sur les implications métaphysiques de la cosmologie.

J'aimerais remercier tout spécialement C. Barbier, H. Ca- prasse, Y. De Rop, J. L. Hanquin, M. Henneaux, A. Mous- siaux, A. Ronveaux, P. Spindel, P. Tombal et J. Vandermeu- len, avec qui j'ai eu le plaisir de collaborer au cours de divers travaux de recherche en cosmologie théorique. J'exprime également mes plus vifs remerciements au Fonds National de la Recherche Scientifique qui a bien voulu financer à plusieurs reprises certains de ces travaux.

J'ai aussi bénéficié de discussions extrêmement utiles avec quelques-uns des meilleurs spécialistes en cosmologie et/ou en philosophie et, notamment : J. Barrow, O. Godart, M. Gotay, M. Heller, J. Ladrière, J. Leslie, F. Tipler et C. Tresmontant.

Page 18: Univers : les théories de la cosmologie contemporaineexcerpts.numilog.com/books/9782903951238.pdfJe tiens à remercier tous mes collègues et amis chercheurs de l'Institut d'Astrophysique

Les conférences d'intérêt général constituent indéniable- ment un excellent tremplin pour la réalisation d'une mono- graphie : aussi, je tiens à remercier chaleureusement F. Boi- tel, C. Castiau, C. d'Armagnac, T. Dejong, A. Lausberg, A. Léonard, H. Miessen, L. Morren, A. Motte, P. Valadier et L. Van Gehuchten qui ont bien voulu m'inviter à donner, dans le cadre des activités de leurs sociétés ou groupés d'études, des exposés sur la cosmologie et le Principe Anthropique.

C'est à M. Cazenave que je dois l'invitation à écrire cet ouvrage sur la cosmologie : je lui exprime toute ma grati- tude. Mes remerciements les plus vifs vont aussi à B. Ponia- towski, directeur des Editions du Mail, pour avoir accepté ce texte et pour le soin apporté à son édition.

J'ai bénéficié de la collaboration précieuse de D. Fraipont et de C. Schroeder qui ont bien voulu se charger de la dactylographie et de la mise en page d'un manuscrit particulièrement touffu, ainsi que des conseils compétents de R. Papy et de R. Sip dans l'utilisation de TEX. J. Beonkens et A. Kransvelt ont réalisé, avec beaucoup de compétence, respectivement les photographies et les graphiques.

Enfin, sans le soutien permanent et la patience de mon épouse, Danielle, et de mes enfants, Muriel et David, cet ouvrage n'aurait probablement jamais vu le jour.

Page 19: Univers : les théories de la cosmologie contemporaineexcerpts.numilog.com/books/9782903951238.pdfJe tiens à remercier tous mes collègues et amis chercheurs de l'Institut d'Astrophysique

PREMIÈRE PARTIE

DES MYTHES COSMOGONIQUES AU MODÈLE STANDARD

DU BIG BANG

Page 20: Univers : les théories de la cosmologie contemporaineexcerpts.numilog.com/books/9782903951238.pdfJe tiens à remercier tous mes collègues et amis chercheurs de l'Institut d'Astrophysique
Page 21: Univers : les théories de la cosmologie contemporaineexcerpts.numilog.com/books/9782903951238.pdfJe tiens à remercier tous mes collègues et amis chercheurs de l'Institut d'Astrophysique

CHAPITRE 1

LA COSMOLOGIE AVANT EINSTEIN

L'idée d'une évolution cosmique, c'est-à-dire d'une évolu- tion de l'Univers dans sa totalité, est une idée récente. En effet, jusque vers 1925, il était acquis que l'Univers dans son ensemble ne pouvait être qu'intemporel, c'est-à-dire sta- tique et ne pouvait donc présenter aucune modification globale : tout au plus, trouve-t-on dans les écrits d'un franciscain anglais de la fin du XIIIe siècle, Richard de Middleton, une mention à la possibilité pour Dieu de produire « une grandeur ou une dimension qui croisse sans fin » 1.

Ce préjugé, d'ailleurs commun à tous les grands systèmes philosophiques, était toujours profondément enraciné au début du xxe siècle, au moment où Einstein développait la théorie de la relativité générale qui allait servir de cadre à toute la cosmologie contemporaine.

Pour pouvoir apprécier pleinement la révolution fonda- mentale que constituèrent les premiers modèles évolutifs d'Univers dus au météorologiste russe, Friedmann, et au chanoine belge, Lemaître, il convient de faire un bref historique des idées cosmologiques pré-einsteiniennes.

En fait, l'interrogation de l'homme sur le cosmos qui

1. E. Gilson, La philosophie au Moyen-Age, Editions Payot, Paris, 1976, tome 2, p. 459.

Page 22: Univers : les théories de la cosmologie contemporaineexcerpts.numilog.com/books/9782903951238.pdfJe tiens à remercier tous mes collègues et amis chercheurs de l'Institut d'Astrophysique

l 'entoure est aussi vieille que l 'humanité elle-même, mais, au cours des siècles passés, cette interrogation était plus ph i losoph ique que scientif ique : en effet, depuis que l 'homme pense, il s'est forgé une idée de l'Univers, à l ' intérieur d 'un ensemble de mythes et de doctrines philoso- phiques et religieuses. Chaque civilisation a ainsi essayé d 'apporter une réponse au problème fondamental par excel- lence : celui de la naissance du Monde. D'où vient le Monde auquel appart ient notre humani té? A-t-il existé de tout temps ou naquit-il un jour sous l 'impulsion d'un Etre supérieur ?

La notion de commencement du Monde, du moins dans le sens d 'une organisation à par t i r d'une réalité préexistante, tel qu 'un immense chaos (et non pas dans le sens plus élaboré — apparu ultérieurement — de création ex nihilo) est présente dans toutes les doctrines cosmologiques orien- tales anciennes. On trouvera dans l'ouvrage collectif : « La Naissance du monde » 2 une remarquable synthèse des mythes et doctrines dans lesquels les civilisations orientales (l'Egypte, Israël, l 'Islam, le Tibet, la Chine,...) ont trouvé ou trouvent encore une réponse au problème de l'origine du Monde.

La conclusion de M. Eliade3 dans son essai « Structure et fonction du mythe cosmogonique » peut nous paraître quel- que peu surprenante : ce ne serait pas un sentiment de curiosité rationnelle de connaître les causes premières qui serait à l 'origine des premières réflexions ontologiques (c'est-à-dire por tant sur la nature de l'Etre) et des grandes métaphysiques orientales, mais bien le fait qu'on croyait pouvoir rejoindre réellement, existentiellement, le commen- cement du Monde et ce, à l 'aide de méthodes thérapeutiques et sotériologiques (comme, par exemple, « ... des techniques

2. La naissance du Monde, Sources orientales, I, Editions du Seuil, Paris, 1959.

3. M. Eliade, Structure et fonction du mythe cosmogonique, dans : La naissance du Monde, op. cit., p. 469.

Page 23: Univers : les théories de la cosmologie contemporaineexcerpts.numilog.com/books/9782903951238.pdfJe tiens à remercier tous mes collègues et amis chercheurs de l'Institut d'Astrophysique

ch ino i ses d u " r e t o u r à l ' o r ig ine à l ' é t a t p r i m o r d i a l qu i

p r é c é d a i t l a Créa t ion , e t les t e c h n i q u e s i n d i e n n e s de " r e t o u r à la m a t r i c e " ou de " r e v e n i r e n a r r i è r e ", c ' e s t -à -d i re d e

p a r c o u r i r le t e m p s à r e b o u r s p o u r r e j o i n d r e l ' i n s t a n t p a r a d o x a l a u - d e l à d u q u e l le T e m p s n ' e x i s t a i t pas . . . ») Le c o m m e n c e m e n t d u M o n d e a p p a r a i s s a i t c o m m e l ' ins- t a n t p r iv i l ég ié o ù l ' E t r e s ' é t a i t révélé p o u r la p r e m i è r e fois.

Une d o c t r i n e se d é t a c h e de l ' e n s e m b l e des a u t r e s réc i t s

c o s m o g o n i q u e s o r i e n t a u x : c ' e s t cel le d ' I s raë l , d o n t les t ex tes c o s m o g o n i q u e s p r i n c i p a u x son t r ep r i s d a n s le p re - m i e r l ivre de la Bible , c ' e s t -à -d i re la Genèse . C o n t r a i r e m e n t

a u x a u t r e s c o s m o g o n i e s de l ' O r i e n t anc ien , où il y a u n e genèse des d i e u x s ' o p é r a n t à p a r t i r d u chaos in i t ia l , qu i es t p r e m i e r e t q u i es t l 'Absolu d o n t t o u t p rocède , se lon la théo log ie b ib l i que , ce lu i qu i es t p r e m i e r , c ' es t le C r é a t e u r , qu i ne fai t p a s p a r t i e de l 'Un ive r s m a t é r i e l e t qu i n ' e s t p a s s o u m i s a u deven i r , c ' e s t l 'Absolu é t e r n e l l e m e n t p r é e x i s t a n t . L a théo log ie b i b l i q u e m a n i f e s t e a ins i u n p u i s s a n t effort de « d é m y t h o l o g i s a t i o n » à l ' e n c o n t r e des m y t h e s o r i e n t a u x , ef for t d o n t la p o r t é e s ' e s t r évé lée f o n d a m e n t a l e p o u r l 'his- to i re f u t u r e de la m é t a p h y s i q u e .

Le c o n c e p t o r ig ina l de c r é a t i o n d u M o n d e ex n ih i lo (c 'est- à -d i r e d e r ien) a p p a r a î t m a n i f e s t e m e n t d a n s ce t ex te d u s e c o n d l ivre des M a c c a b é e s : « J e t ' e n con ju re , m o n en fan t , r e g a r d e le ciel e t la t e r r e et vois t o u t ce qu i es t en eux et s a c h e q u e ce n ' e s t p a s à p a r t i r de choses e x i s t a n t e s q u e Dieu les a créés , e t q u e l ' espèce h u m a i n e e s t fa i te de l a m ê m e m a n i è r e » (II. Macc. , 7, 28).

Le j u d a ï s m e e t le c h r i s t i a n i s m e p ro fe s sen t n o n s e u l e m e n t q u e l 'Un ive r s c o m p o r t e u n c o m m e n c e m e n t m a i s auss i qu ' i l f i n i r a p a s s ' u s e r e t a u r a d o n c u n e fin (« Le ciel e t la t e r r e passe ron t . . . »).

Les p h i l o s o p h e s grecs pu is , p lu s t a r d , les p h i l o s o p h e s e t les théo log iens c h r é t i e n s o n t p o r t é les p r o b l è m e s t o u c h a n t l 'Un ive r s d a n s son e n s e m b l e s u r le p l a n de la d i s cus s ion r a t i onne l l e . L e u r s d o c t r i n e s c o s m o l o g i q u e s o n t é té exce l lem-

Page 24: Univers : les théories de la cosmologie contemporaineexcerpts.numilog.com/books/9782903951238.pdfJe tiens à remercier tous mes collègues et amis chercheurs de l'Institut d'Astrophysique

ment décrites dans le monumental ouvrage de P. Duhem : « Le système du Monde » 4.

L'image du cosmos qui a prévalu jusqu'à l'avènement de la science moderne est essentiellement celle qu'avait déjà Aristote au ive siècle avant Jésus-Christ : elle s'est perpétuée durant toute la période médiévale et c'est elle qui est- adoptée, au XIIIe siècle, par saint Thomas d'Aquin, dans ses travaux de théologie : le Monde, qui est unique, est conçu comme une immense sphère de dimensions finies : il est constitué de sphères solides concentriques, centrées sur la terre et se superposant autour d'elle comme les couches successives d'un oignon. On y distingue deux zones radicale- ment différentes : le monde sublunaire comprenant la terre qui est le centre immobile de l'Univers, ainsi que la région allant jusqu'à la lune. Le monde supralunaire, composé de sphères s'emboîtant les unes dans les autres, contient les planètes, le soleil et les étoiles et s'étend de la sphère de la lune jusqu'à la limite du cosmos.

C'est essentiellement la question de la création de l'Uni- vers qui différencie Aristote des théologiens chrétiens. En effet, pour Aristote, la création de l'Univers est impensable : la matière première de l'Univers est éternelle, nécessaire et incréée. L'Univers est éternel et n'a pas eu de commence- . ment.

De même, les autres doctrines cosmogoniques des philo- sophes grecs, malgré leurs différences, s'accordent cepen- dant toutes pour nier, contrairement à la doctrine juive reprise par les philosophes chrétiens, le commencement de l'Univers et pour considérer le Monde comme éternel. Ainsi, selon Hésiode et la cosmogonie orphique, c'est, comme dans la cosmogonie babylonienne, le chaos qui est premier, éternel et dont tout est sorti. Par contre, pour Platon et les Néo-Platoniciens, le Monde est créé, mais est éternel et périodique : il y a toujours eu du mouvement, mais le Monde

4. P. Duhem, Le système du Monde, 10 volumes, Hermann, Paris, 1958- 1959.

Page 25: Univers : les théories de la cosmologie contemporaineexcerpts.numilog.com/books/9782903951238.pdfJe tiens à remercier tous mes collègues et amis chercheurs de l'Institut d'Astrophysique

revient périodiquement dans le même état après une durée appelée la Grande Année et qui est le véritable étalon du temps (voir en fin de Chapitre, l'Annexe, pour une discussion des problèmes soulevés par les notions de commencement et création de l'Univers).

Une étape capitale dans le développement de l'astronomie et de la cosmologie est, évidemment, le remplacement du système du Monde géocentrique de Ptolémée par le système du Monde héliocentrique de l'astronomie classique, suite aux travaux de Copernic puis, plus tard, de Galilée et de Kepler. Tout comme l'Univers médiéval, l'Univers de Coper- nic est une sphère finie. Mais, en 1576, l'astronome et mathématicien Digges introduisait dans son ouvrage : « A Perfit Description of the Caelestiall Orbes », un nouveau développement important du système héliocentrique : il éliminait la borne extérieure et dispersait les étoiles au travers d'un espace illimité.

Autre développement capital, le fondement par Newton, à la fin du XVIIe siècle, à la suite des travaux de Kepler, d'une nouvelle dynamique régissant le monde matériel. Le cœur de la théorie newtoniennne est la description de la gravita- tion en termes d'une force agissant de manière instantanée entre deux corps : cette force est universelle, elle agit de la même façon sur tous les types de matière ; de plus, elle est toujours attractive et augmente avec la masse des corps impliqués. Toutes ces propriétés expliquent la prédomi- nance de la force de gravitation sur les autres forces physiques, à l'échelle cosmique, et donc, l'importance capi- tale de la gravitation en cosmologie. Cette force, comme l'a montré Newton, varie comme l'inverse du carré de la distance, si bien que si on augmente la distance entre deux corps d'un certain facteur, la force de gravitation diminue du carré de ce facteur (voir fig. 1.1). Cette loi de la gravitation newtonienne, qui débouche sur la mécanique céleste, permet ainsi de décrire le mouvement des planètes et de prédire leur position au cours du temps, avec une précision remarquable.

Page 26: Univers : les théories de la cosmologie contemporaineexcerpts.numilog.com/books/9782903951238.pdfJe tiens à remercier tous mes collègues et amis chercheurs de l'Institut d'Astrophysique

Fig. 1.1 : Illustration de la loi de la gravitation newtonienne dans le cas du système solaire. A la distance terrestre (considérée comme unité sur l'axe des abscisses), correspond en ordonnée la force gravitationnelle exercée par le Soleil. Celle-ci varie comme l'inverse du carré de la distance.

L'Univers newtonien est spatialement infini : plus précisé- ment, son cadre ou contenant (l'espace absolu, préexistant, en quelque sorte, aux corps matériels et indépendant d'eux) est infini de droit. L'Univers est supposé créé, en accord avec la conception biblique et, en 1658, l'évêque Ussher5 dédui- sait de la succession des générations telle qu'elle apparaît dans la Bible, la date précise de la création du Monde : le dimanche 23 octobre de l 'an 4004 avant Jésus-Christ, ce qui donnerait alors 5 994 années pour l'âge actuel de l'Uni vers... Leibniz, pour sa part , soutenait qu 'un Univers spatialement infini d'une durée limitée était illogique. Ainsi, pour Leib- niz, le Monde devait-il être infini, à la fois dans l'espace et dans le temps... L'ouvrage de Koyré6 : « Du monde clos à

5. J. Ussher, The Annals of the World Deduced from the Origin of Time, Londres, 1658, I.

6. A. Koyre, Du Monde clos à l'Univers infini, Gallimard, Paris, 1973.

Page 27: Univers : les théories de la cosmologie contemporaineexcerpts.numilog.com/books/9782903951238.pdfJe tiens à remercier tous mes collègues et amis chercheurs de l'Institut d'Astrophysique

l 'Un ive r s inf ini » c o n t i e n t u n e d e s c r i p t i o n t rès dé ta i l l ée de ce t t e r é v o l u t i o n d e la pensée p h i l o s o p h i q u e e t sc i en t i f ique aux xvie et xviie siècles.

Un progrès majeur dans la lente prise de conscience par les astronomes de l'étendue véritable de l'Univers a été réalisé avec la construction de télescopes de plus en plus puissants, qui ont permis de reculer de plus en plus les limites de l'Univers observable. Ce fut d'abord la mise en é v i d e n c e p a r H e r s c h e l , d a n s l a s e c o n d e m o i t i é d u XVIIIe s i è -

cle, de la structure de notre galaxie, celle-ci étant constituée d'un noyau central, énorme condensation d'étoiles, d'où se détachent des bras en forme de spirale, composés d'étoiles et de matière gazeuse interstellaire, se développant dans le plan « équatorial » du noyau, l'ensemble étant en rotation très lente autour d'un axe perpendiculaire à ce plan.

Au début du xixe siècle, les observations de Herschel et de, Messier avaient, de plus, révélé l'existence de plusieurs centaines de nébuleuses, certaines ayant la forme de dis- ques, d'autres étant elliptiques. La nature de ces nébuleuses est restée très longtemps — pendant près d'un siècle — une énigme : déjà, vers 1750, Swedenborg, Lambert, Wright et Kant avaient émis la conjecture qu'il pût exister d'autres systèmes stellaires semblables à notre galaxie et situés très loin d'elle (les « Univers-îles » de Kant, l'Univers hiérarchi- que de Kant et Lambert). La démonstration irréfutable de l'existence, parmi les nébuleuses observées jusqu'alors, de certaines situées en dehors de notre galaxie, dut cependant attendre 1924, et ce, après les discussions extrêmement vives entre partisans et opposants de cette hypothèse.

C'est grâce au plus grand télescope de l'époque, le téles- cope de 2,5 mètres de diamètre du Mont Wilson, que l'astronome Hubble devait déceler dans trois de ces nébu- leuses, et notamment, dans la nébuleuse Andromède, des étoiles de type Céphéide. Ces étoiles, qui sont de précieux indicateurs de distance, permirent à Hubble de montrer que ces nébuleuses étaient bien situées au-delà de notre galaxie : il s'agit, en fait, d'autres galaxies semblables à la nôtre. Pour

Page 28: Univers : les théories de la cosmologie contemporaineexcerpts.numilog.com/books/9782903951238.pdfJe tiens à remercier tous mes collègues et amis chercheurs de l'Institut d'Astrophysique

situer l'échelle des distances, disons que le diamètre de notre galaxie est de l'ordre de 100000 années-lumière (une année-lumière équivaut à 10000 milliards de km), alors que la distance entre notre galaxie et Andromède est de plus de deux millions d'années-lumière, soit plus de vingt fois le diamètre galactique.

Les conséquences de cette découverte allaient évidem- ment se révéler extrêmement importantes : pour la pre- mière fois, en effet, le regard de l'homme pouvait sortir de sa galaxie et s'étendre même virtuellement bien au-delà. Ainsi donc, avec la reconnaissance potentielle de l'étendue spa- tiale réelle de l'Univers matériel découlant des observations de Hubble, la cosmologie scientifique allait pouvoir prendre naissance. Depuis, grâce aux grands télescopes, tels que celui de 5 m du Mont Palomar, aux Etats-Unis, celui de 3,6 m de l'ESO au Chili ou encore, celui de 6 m de Zelenchuk, en Union Soviétique, c'est par milliards que les galaxies sont apparues sur les clichés photographiques. Aujourd'hui, avec le développement de détecteurs très per- formants du rayonnement électromagnétique, souvent placés à bord de fusées et de satellites artificiels, l'Univers nous est accessible sur la presque totalité du spectre électro- magnétique, allant des ondes radio et des micro-ondes au rayonnement gamma, en passant par l'infrarouge, l'ultra- violet et les rayons X.

D'autre part, sur le plan théorique, avec la découverte, en 1915, par Einstein, de la théorie de la relativité générale, le problème de la structure globale de l'Univers allait pouvoir être abordé de manière théorique et ce, pour la première fois dans l'histoire de la pensée humaine. En fait, l'interpré- tation géométrique du phénomène de la gravitation, qui constitue la caractéristique essentielle de la relativité géné- rale, débouche sur une véritable définition scientifique de l'Univers, en termes de géométrie globale d'espace-temps : c'est cette définition qui est à la base de la cosmologie théorique moderne.

Cette convergence inattendue et fortuite de deux itiné-

Page 29: Univers : les théories de la cosmologie contemporaineexcerpts.numilog.com/books/9782903951238.pdfJe tiens à remercier tous mes collègues et amis chercheurs de l'Institut d'Astrophysique

raires a priori distincts, celui de la théorie physique et celui de l'observation astronomique, permettait ainsi, dans les années vingt, de poser pour la première fois le problème cosmologique de manière scientifique. La science prenait ainsi le relais de la philosophie pour essayer d'apporter une réponse objective à ces grandes questions concernant l'Uni- vers qui, depuis des millénaires, n'ont cessé de préoccuper l'homme, à savoir :

e Etendue spatiale de l'Univers : L'Univers est-il fini ou infini ?

a Evolution : Est-il statique ou stationnaire ou en évolution ? Dans ce

dernier cas, cette évolution est-elle cyclique ?

e Commencement : A-t-il connu un commencement absolu dans le temps ou

est-il de durée infinie dans le passé ?

a Quelle est l'origine de la matière dont sont faits tous les constituants de l'Univers, depuis les galaxies jusqu'aux êtres vivants ?

e Le problème cosmogonique : Quelle est l'origine des structures à grande échelle qui

emplissent l'Univers, c'est-à-dire les galaxies et les groupe- ments de galaxies, qu'on appelle amas de galaxies ?

Page 30: Univers : les théories de la cosmologie contemporaineexcerpts.numilog.com/books/9782903951238.pdfJe tiens à remercier tous mes collègues et amis chercheurs de l'Institut d'Astrophysique

CHAPITRE 1

ANNEXE

COMMENCEMENT ET CRÉATION DE L'UNIVERS : QUELQUES CONSIDÉRATIONS MÉTAPHYSIQUES

Les considérations qui suivent sont basées en grande part ie sur les remarquables travaux, d'une part, de C. Tres- montant 7 sur la métaphysique du christianisme et, d 'autre part , de P. Duhem 8 sur l 'histoire des doctrines cosmologi- ques.

Ce n'est que progressivement que la différence existant entre les concepts de commencement et création de l'Uni- vers s'est faite jour parmi les philosophes chrétiens; il a fallu, en fait, at tendre le XIIIe siècle et, tout spécialement, l 'œuvre de saint Thomas d'Aquin pour voir établir claire- ment cette distinction capitale.

Auparavant, au cours des premiers siècles de notre ère, les philosophes chrétiens avaient essayé de défendre l'origina- lité de la doctrine hébraïque de la création et, en particulier, la thèse du commencement de l'Univers contre les critiques

7. C. Tresmontant, La métaphysique du christianisme et la naissance de la philosophie chrétienne, Editions du Seuil, Paris, 1961 ;

La métaphysique du christianisme et la crise du treizième siècle, Editions du Seuil, Paris, 1964 ;

Sciences de l'Univers et problèmes métaphysiques, Editions du Seuil, Paris, 1976.

8. Cf. note 4.

Page 31: Univers : les théories de la cosmologie contemporaineexcerpts.numilog.com/books/9782903951238.pdfJe tiens à remercier tous mes collègues et amis chercheurs de l'Institut d'Astrophysique

des métaphysiciens néo-platoniciens tels que Plotin et, plus tard, Proclus. Ces critiques portaient sur une création du Monde par Dieu, qui aurait commencé à un instant défini d'un temps infini (sans début ni fin), de telle sorte que durant la période infinie précédant cet instant, le Monde n'existait pas, un type de raisonnement attribué à nombre de philosophes chrétiens et qui conduit à certaines diffi- cultés, voire absurdités.

Ces objections ont été réfutées au cours des siècles par différents penseurs chrétiens, le point essentiel de leur réflexion étant la prise de conscience très nette que la création du Monde n'a pas pu s'opérer dans le temps « Comment la création aurait-elle pu être faite dans le temps, puisque le temps a été fait avec les êtres » (Clément d'Alexandrie, Stromates VI) ; « C'est au commencement du temps que Dieu a créé le Ciel et la Terre. Car le temps existe depuis qu'existe ce Monde, il n'existait pas avant le Monde » (Ambroise de Milan, Hexaéméron, I).

C'est à saint Augustin, au début du ive siècle, que l'on doit, cependant, le réfutation décisive des arguments des Néo- platoniciens et le premier exposé réellement autoritaire de l'idée que le temps est une mesure des choses existantes et qu'en l'absence d'objets pouvant subir des modifications physiques, il n'existerait pas de temps. Cette « théorie relationnelle » du temps, selon laquelle celui-ci ne peut exister que lorsque l'Univers est, présente un caractère étonnamment moderne, puisque dans certaines formula- tions de la théorie de la relativité générale (voir Chapitre II), la définition du temps est directement liée au changement de la géométrie spatiale de l'Univers.

C'est dans « La Cité de Dieu » que l'on trouve l'exposé le plus clair et le plus achevé de la doctrine de saint Augustin concernant la création : « ... il n'y a pas de temps avant que le Monde ne fût. », « Le temps n'existe pas sans un change- ment qui s'opère par le mouvement, tandis que dans l'éternité, il n'y a aucun changement ». « Proculdubio, non est Mondus factus in tempore, sed cum tempore », c'est-à- dire : « Dès lors, il n'est point douteux que le Monde n'a pas été créé dans le temps, mais avec le temps », « Le Monde a été créé avec le temps, si le mouvement, producteur du changement, a été créé lors de la fondation du Monde ».

Page 32: Univers : les théories de la cosmologie contemporaineexcerpts.numilog.com/books/9782903951238.pdfJe tiens à remercier tous mes collègues et amis chercheurs de l'Institut d'Astrophysique

lorsqu'on pousse l'analyse scientifique jusqu'à ses limites extrêmes. Mais, notre manière de voir l'Univers s'est com- plètement modifiée ces dernières années : son unité, depuis les structures microscopiques les plus infimes jusqu'aux gigantesques architectures cosmiques, est perçue aujour- d 'hui au travers des théories unifiées prometteuses, qui permettent de jeter un pont entre l'infiniment petit et l ' infiniment grand.

Notre place dans l'Univers et le rôle de l'Univers dans notre genèse sont aujourd'hui aussi différemment appréciés de ce qu'ils l 'étaient dans le passé, avant les récents développements de la cosmologie scientifique : pendant long- temps, l ' immensité de l'Univers, la profusion des grandes structures cosmiques ont été considérées comme un décor dont la majesté reflétait la grandeur de leur Créateur, « qui répand les merveilles de l'être à profusion, avec une superbe insouciance de la mesure » ; ainsi, les étoiles ne doivent manifestement servir à rien, « sinon à témoigner de leur auteur 2 . . .

Aujourd'hui, avec l 'avènement des idées anthropiques, l'Univers acquiert un rôle de « machine » à fabriquer des êtres vivants et pensants, chargés de sens parce que confé- rant un sens à cet Univers. On ne peut manquer de penser, à ce propos, que le Principe Anthropique constitue le premier pas vers cette vraie physique à laquelle aspirait Teilhard de Chardin lorsqu'il écrivait : « La vraie physique est celle qui parviendra, quelque jour, à intégrer l 'homme total dans une représentation cohérente du monde »3.

Avec le Principe Anthropique, la métaphysique fait de nouveau irruption dans le langage scientifique. Toute la physique et, en particulier, la cosmologie, aspirent à une dimension métaphysique qu 'un rationalisme étroit vise à leur refuser. L'Univers ne nous a jamais été connu avec au tan t d ' ampleur et de profondeur qu'en cette fin du xxe siècle et, comme l'écrit Claude Tresmontant : « Jamais,

2. J. Leclercq, Publication de l'Abbaye d'Orval. 3. P. Teilhard de Chardin, Le phénomène humain, op. cit., p. 30.

Page 33: Univers : les théories de la cosmologie contemporaineexcerpts.numilog.com/books/9782903951238.pdfJe tiens à remercier tous mes collègues et amis chercheurs de l'Institut d'Astrophysique

les problèmes métaphysiques n'ont été aussi clairement posés à l'intelligence humaine. [...] Il existe des problèmes philosophiques, des problèmes métaphysiques qui s'impo- sent objectivement à l'intelligence humaine lorsqu'elle réflé- chit sur tout ce qui existe dans l'Univers, et d'abord à l'existence même de l'Univers. Les problèmes métaphysi- ques sont aussi vivants aujourd'hui qu'au temps d'Aristote. Ils sont même encore plus urgents et criants, parce que nous connaissons mieux qu'Aristote l'Univers, son histoire et tout ce qu'il contient [...]. Paradoxalement, le sens des authenti- ques problèmes métaphysiques se conserve là, parmi les savants qui scrutent l'Univers et la nature, alors qu'il s'est perdu parmi les professionnels de la philosophie. Le renou- veau de la métaphysique viendra de la part des scientifiques parce que eux au moins ont le point de départ correct : la réalité elle-même. Ils savent que le point de départ de la pensée rationnelle, c'est l'expérience. Ils aperçoivent les problèmes [...]. Aujourd'hui, en cette fin du xxe siècle, tout est à reprendre, tout est à repenser, en métaphysique, sur la base expérimentale nouvelle, à nouveaux frais [...]. Le point de départ de l'analyse métaphysique, ce ne sont pas des t e x t e s , m a i s l a r é a l i t é e l l e - m ê m e , d a n s s a s p l e n d e u r . . . » 4.

C e t t e t â c h e e s t à m e n e r à b i e n c o n j o i n t e m e n t p a r l e s

s c i e n t i f i q u e s a y a n t l e g o û t e t l e s e n s d e l a p e n s é e c o n d u i t e

j u s q u ' a u t e r m e d e s e s e x i g e n c e s i n t e r n e s , e t l e s p h i l o s o p h e s

i n i t i é s a u x s c i e n c e s e x p é r i m e n t a l e s . E l l e c o n s t i t u e u n d e s

g r a n d s d é f i s p o s é s à l ' i n t e l l i g e n c e h u m a i n e p o u r l e s a n n é e s à

v e n i r . L ' e n j e u e s t a s s u r é m e n t d e t a i l l e e t i l n o u s c o n c e r n e

t o u s c a r , c o m m e l ' é c r i t S i r K a r l P o p p e r : « [ . . . ] i l y a a u

m o i n s u n p r o b l è m e p h i l o s o p h i q u e q u i i n t é r e s s e t o u s l e s

h o m m e s q u i p e n s e n t . C ' e s t l e p r o b l è m e d e l a c o s m o l o g i e : l e

p r o b l è m e d e c o m p r e n d r e l e m o n d e , n o u s - m ê m e s , e t n o t r e

c o n n a i s s a n c e e n t a n t q u ' e l l e f a i t p a r t i e d u m o n d e » 5 .

4. C. Tresmontant, Sciences de l'Univers et problèmes métaphysiques, op. cit., p. 213-215.

5. K. Popper, La logique de la découverte scientifique, Payot, Paris, 1973, p. 12.