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This article was downloaded by: [University of Western Ontario] On: 10 November 2014, At: 15:43 Publisher: Taylor & Francis Informa Ltd Registered in England and Wales Registered Number: 1072954 Registered office: Mortimer House, 37-41 Mortimer Street, London W1T 3JH, UK European Journal of Environmental and Civil Engineering Publication details, including instructions for authors and subscription information: http://www.tandfonline.com/loi/tece20 Vers une modélisation simple et unifiée du fluage propre, du retrait et du fluage en dessiccation du béton Alain Sellier a & Laurie Buffo-Lacarrière a a Laboratoire matériaux et Durabilité des Constructions , INSA-UPS Génie Civil , 135, avenue de Rangueil, F-31077, Toulouse Cedex 4 E-mail: Published online: 05 Oct 2011. To cite this article: Alain Sellier & Laurie Buffo-Lacarrière (2009) Vers une modélisation simple et unifiée du fluage propre, du retrait et du fluage en dessiccation du béton, European Journal of Environmental and Civil Engineering, 13:10, 1161-1182, DOI: 10.1080/19648189.2009.9693184 To link to this article: http://dx.doi.org/10.1080/19648189.2009.9693184 PLEASE SCROLL DOWN FOR ARTICLE Taylor & Francis makes every effort to ensure the accuracy of all the information (the “Content”) contained in the publications on our platform. However, Taylor & Francis, our agents, and our licensors make no representations or warranties whatsoever as to the accuracy, completeness, or suitability for any purpose of the Content. Any opinions and views expressed in this publication are the opinions and views of the authors, and are not the views of or endorsed by Taylor & Francis. The accuracy of the Content should not be relied upon and should be independently verified with primary sources of information. Taylor and Francis shall not be liable for any losses, actions, claims, proceedings, demands, costs, expenses, damages, and other liabilities whatsoever or howsoever caused arising directly or indirectly in connection with, in relation to or arising out of the use of the Content. This article may be used for research, teaching, and private study purposes. Any substantial or systematic reproduction, redistribution, reselling, loan, sub-licensing, systematic supply, or distribution in any form to anyone is expressly forbidden. Terms & Conditions of access and use can be found at http:// www.tandfonline.com/page/terms-and-conditions

Vers une modélisation simple et unifiée du fluage propre, du retrait et du fluage en dessiccation du béton

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Page 1: Vers une modélisation simple et unifiée du fluage propre, du retrait et du fluage en dessiccation du béton

This article was downloaded by: [University of Western Ontario]On: 10 November 2014, At: 15:43Publisher: Taylor & FrancisInforma Ltd Registered in England and Wales Registered Number: 1072954 Registered office: MortimerHouse, 37-41 Mortimer Street, London W1T 3JH, UK

European Journal of Environmental and CivilEngineeringPublication details, including instructions for authors and subscription information:http://www.tandfonline.com/loi/tece20

Vers une modélisation simple et unifiée du fluagepropre, du retrait et du fluage en dessiccation dubétonAlain Sellier a & Laurie Buffo-Lacarrière aa Laboratoire matériaux et Durabilité des Constructions , INSA-UPS Génie Civil , 135,avenue de Rangueil, F-31077, Toulouse Cedex 4 E-mail:Published online: 05 Oct 2011.

To cite this article: Alain Sellier & Laurie Buffo-Lacarrière (2009) Vers une modélisation simple et unifiée du fluagepropre, du retrait et du fluage en dessiccation du béton, European Journal of Environmental and Civil Engineering, 13:10,1161-1182, DOI: 10.1080/19648189.2009.9693184

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This article may be used for research, teaching, and private study purposes. Any substantial or systematicreproduction, redistribution, reselling, loan, sub-licensing, systematic supply, or distribution in anyform to anyone is expressly forbidden. Terms & Conditions of access and use can be found at http://www.tandfonline.com/page/terms-and-conditions

Page 2: Vers une modélisation simple et unifiée du fluage propre, du retrait et du fluage en dessiccation du béton

EJECE. Volume 13 – No. 10/2009, pages 1161 to 1182

Vers une modélisation simple et unifiée du fluage propre, du retrait et du fluage en dessiccation du béton Alain Sellier — Laurie Buffo-Lacarrière Laboratoire matériaux et Durabilité des Constructions INSA-UPS Génie Civil 135, avenue de Rangueil F-31077 Toulouse Cedex 4 [email protected]

RÉSUMÉ. Un modèle rhéologique tridimensionnel est proposé pour appréhender le comportement intrinsèque à très long terme du béton. Le béton y est considéré comme visco-élastique non linéaire. Les non-linéarités introduites permettent d’une part de prendre en compte un phénomène de consolidation conférant à la déformation de fluage propre un caractère non asymptotique réaliste. D’autre part la prise en compte d’une dépendance des effets de la dépression capillaire d’un béton non saturé par rapport à l’état de contrainte est proposée, cette dépendance modélise la perte d’efficacité de la matrice cimentaire à transmettre les pressions hydriques vers le squelette solide en raison l’endommagement au voisinage des pores en dépression. Cette hypothèse est étayée par un modèle numérique permettant de visualiser le cheminement des efforts depuis la cavité en dépression vers le squelette solide. La variation des effets hydriques en fonction des contraintes principales confère au modèle visco-élastique non linéaire de fluage propre la capacité de simuler les déformations de retrait et de fluage en dessiccation. ABSTRACT. A three-dimensional rheological modelling is proposed for the long term concrete mechanical behaviour. Concrete is supposed to have a non-linear visco-elastic behaviour. The non-linearity used first allows conferring a realistic non asymptotic strain to the basic creep, based on a consolidation theory. Moreover, for the non-saturated concrete, a dependence of the capillary pressure effects on the stress state is postulated. It assumed that a damage state exists around microcavities in depression, this damage depends also on the applied stresses whose can led to a closing or opening of the micro-cracking and consequently to a best or to a worst transmission of capillary effects to the solid skeleton. This dependency is highlighted using a simple numerical analysis of a composite material including in an elastic matrix both cavities in depression and rigid inclusions. The linear dependence of capillary effect on the applied stress confers to the model the capability to simulate shrinkage and drying creep strains. MOTS-CLÉS : béton, fluage, dessiccation, retrait, modélisation. KEYWORDS: concrete, creep, drying, shrinkage, modelling.

DOI:10.3166/EJECE.13.1161-1182 © 2009 Lavoisier, Paris

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1162 EJECE. Volume 13 – No. 10/2009

1. Introduction

Paul Acker (2003) dans son article sur les origines du retrait et du fluage du béton émet l’hypothèse selon laquelle la cause de la diminution de l’amplitude du fluage propre des bétons à haute performance, par rapport aux bétons ordinaires, devait être recherchée dans une « compaction » des CSH due au retrait endogène. Pour étayer cette hypothèse, il propose de comparer les amplitudes de retrait et de fluage propre de trois bétons, un BO, un BHP et un BFUP. Nous avons reporté ses résultats sous forme de graphe sur la figure 1. Sur ce graphe, les déformations de retrait et de fluage endogène sont tracées en fonction de la teneur en eau capillaire. Les courbes de tendance montrent que pour les BHP et les BFUP l’eau capillaire se raréfie, conduisant a une augmentation de l’intensité des forces capillaires et donc à un retrait important. Parallèlement, on constate que l’amplitude du fluage augmente avec la quantité d’eau capillaire. Si maintenant on trace la somme des déformations de retrait et de fluage, on a une courbe de tendance avec une pente plus faible. Tout se passe donc comme si la dépression capillaire due à l’autodessiccation réduisait l’amplitude du fluage endogène. Si l’on interprète ce résultat en s’appuyant sur la théorie d’Acker, on peut dire, en résumé, que le potentiel de « consolidation » des CSH (principaux responsables du fluage selon lui) est physiquement limité : plus les feuillets de CSH se « rapprochent », plus il sera difficile de les « rapprocher davantage ». La conséquence directe étant que si le « potentiel de consolidation » a été partiellement utilisé pour le retrait il ne restera qu’une faible amplitude de consolidation pour le fluage. C’est effectivement ce que traduit graphiquement la figure 1 : Le retrait et le fluage varient en sens opposés lorsque l’intensité de la dépression capillaire augmente mais la « somme des deux reste à peu près constante ».

Partant de cette constatation expérimentale, nous proposons par la suite un modèle relativement simple dans lequel le retrait et le fluage (qu’ils soient endogènes ou de dessiccation) sont considérés comme les déformations issues d’un seul modèle de comportement intrinsèque soumis à des chargements hydromécaniques différents. Nous présentons tout d’abord le modèle de comportement intrinsèque, il s’agit d’un modèle visco-élastique non linéaire. Bien qu’en pratique celui-ci puisse être couplé à un modèle d’endommagement permettant d’intégrer le phénomène de fluage tertiaire, nous le présentons ici sans le couplage par souci de clarté, le modèle tel qu’il est présenté ici ne couvre donc pas le fluage tertiaire. La première originalité de notre modèle réside dans le choix d’une dépendance de la viscosité à la déformation visqueuse, cette dépendance permet simultanément de prendre en considération les observations d’Acker relatives à la consolidation et de n’utiliser qu’un seul niveau rhéologique pour simuler les déformations permanentes de fluage propre, limitant d’autant le nombre de paramètres et en conséquence la difficulté du calage. La pertinence du choix de la non-linéarité pour modéliser la consolidation est éprouvée en comparant la réponse du modèle à un essai de fluage, d’une durée de 30 ans, publié en 2005 par Brooks (2005).

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Eau capillaire (l/m3)

Déf

orm

atio

n (1

e-6)

Retrait endogène

Fluage propre sous 10MPa

Fluage+retrait

Linéaire (Retrait endogène )

Linéaire (Fluage propre sous 10MPa)

Linéaire (Fluage+retrait)

BOBHPBFUP

Figure 1. Retrait et fluage endogène de trois types de béton (d’après les résultats d’Acker (2003))

En un second temps nous proposons d’utiliser une expression simple, issue des travaux de Torrenti (1997), pour modéliser les effets de la dépression capillaire en fonction de la perte de masse d’eau. Après calage du modèle visco-élastique intrinsèque sur les résultats expérimentaux de Granger (1996), nous montrons comment la loi de dépression capillaire peut être utilisée pour simuler le retrait. Cette partie du modèle est assez classique puisqu’elle permet simplement de s’assurer que le modèle intrinsèque permet de simuler le fluage propre et le retrait de dessiccation. Cet aspect du modèle est analogue à celui proposée par Benboudjema (Benboudjema, 2002 ; Benboudjema et al., 2007). La seconde originalité de notre travail réside en fait dans la façon d’aborder le problème du fluage intrinsèque de dessiccation. Celui-ci est désormais intégré au modèle (couplant déjà le retrait et le fluage propre) et non plus ajouté à celui-ci comme ce fut le cas jusqu’à récemment via l’adjonction d’un module de fluage de dessiccation basé sur les travaux de Bazant (Reviron, 2009). C’est en raison de ce traitement simultané des trois phénomènes : fluage propre, retrait de dessiccation et fluage intrinsèque de

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dessiccation, que nous qualifions notre approche d’unifiée. Pour étayer notre approche, nous nous appuyons en un premier temps sur l’analyse numérique d’un milieu modèle virtuel périodique constitué d’une matrice élastique, d’une inclusion élastique plus rigide que la matrice et d’une cavité en dépression capillaire permettant de démontrer simplement la possibilité d’un endommagement microstructurel au voisinage de la cavité susceptible d’altérer la transmission des effets de la dépression vers le reste du solide. En un second temps, on montre que la zone susceptible de s’endommager se réduit proportionnellement à la contrainte de compression appliquée sur l’une des faces du milieu modèle. Ces considérations sont traduites au niveau du modèle constitutif par une équation linéaire liant la contrainte hydrique transmise au squelette solide depuis les cavités en dépression et la contrainte totale appliquée sur le béton. Le paramètre de l’équation est calé avec succès sur les essais de Granger, montrant ainsi qu’il est possible de considérer le fluage en dessiccation simplement comme un supplément de retrait induit par la limitation de l’endommagement microstructural occasionné par la « mise en précontrainte » du béton. Il est alors inutile de rajouter un étage spécifique aux modèles viscoélastiques pour le simuler.

2. Un modèle de comportement intrinsèque viscoélastique non linéaire à potentiel de consolidation

2.1. Principe général

Les considérations proposées par Bernard et Ulm (Bernard et al., 2003) concernant les différences de mécanismes de fluage sous contrainte déviatorique d’une part (prédominance de glissements orientés sans variation de volume), et hydrostatique d’autre part (enchevêtrement aléatoire de glissements aboutissant globalement à une variation de volume par réduction de l’espace poreux), nous conduisent à retenir une partition des effets de la contrainte totale σ en partie sphérique sur le squelette solide sσ ′ , partie déviatorique dσ ′ , et contrainte hydrique wπ due aux dépressions capillaires Pw (figure 2, équation [1]).

wdsπσσσ +′+′= [1]

Des variantes de cette décomposition ont par ailleurs déjà été adoptées par Benboudjema (Benboudjema et al., 2001) ou Bernard et Ulm (Bernard et al., 2003), (Ulm et al., 1999) ; elles permettent d’affecter des modèles rhéologiques différents (notés VE et VEd sur la figure 2, (VE signifiant visco-élastique)) aux deux mécanismes de fluages décrits ci-dessus. La partition hydromécanique inspirée de (Coussy, 1995) permet quant à elle de considérer les effets de la pression hydrique intraporeuse comme un chargement interne provoquant des déformations instantanées et différées, au même titre que la contrainte σ issue du milieu extérieur.

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Modélisation des déformations différées 1165

VEs VEd

σ

sσ ′ dσ ′

Pw

Figure 2. Partition des contraintes en parties sphérique, déviatorique et contraintes hydriques

Les études expérimentales s’intéressant à la microstructure de la pâte de ciment mettent en lumière un comportement visqueux de certains composants du ciment hydraté (Acker, 2003) laissant supposer que sous chargement déviatorique, le fluage de ces composants pourrait être la principale cause du fluage du béton. Pour modéliser ces phénomènes, nous proposons d’utiliser des modèles rhéologiques extrêmement simples (figure 3) comprenant en série un corps élastique pour le comportement instantané, un solide de Kelvin Voigt linéaire pour la modélisation du fluage réversible (recouvrance), et un liquide de Maxwell avec une viscosité non linéaire pour modéliser le fluage à long terme.

Les étages élastique et de Kelvin Voigt ont une limite de déformation gérée par les modules élastiques qu’ils contiennent, la notion de limite en consolidation indépendante de la contrainte appliquée doit donc être intégrée dans la non-linéarité du corps de Maxwell. La particularité de notre modèle de fluage réside donc uniquement dans le choix de la non-linéarité affectée à la viscosité du corps de Maxwell.

ke (ou µe)

kKV (ou µKV) )( douKVsη

)( douMsη

dou σσ ′′s

( )douseε

( )dousKVε

( )dousMε

Figure 3. Décomposition de la déformation mécanique totale selon le modèle rhéologique adopté ; les exposants « s » sont utilisés pour le modèle sphérique les exposants « d » pour le modèle déviatorique

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Nous verrons par la suite que cette non-linéarité peut être choisie de telle sorte que la viscosité du corps de Maxwell augmente rapidement lorsque la déformation de ce même corps franchit une déformation caractéristique représentant le potentiel de consolidation du béton.

La déformation se décompose donc classiquement de la façon suivante :

MKVe εεεε ++= [2]

Dans cette expression, KVε est la déformation de fluage réversible, modélisée par le solide linéaire de Kelvin Voigt et Mε est la déformation permanente de fluage modélisée par le corps de Maxwell à viscosité non linéaire. La contrainte transite quant à elle sur tous les étages du modèle, et admet une partition en partie élastique et partie visqueuse au niveau du solide de Kelvin Voigt (équation [3]) :

KVvKVe ''' σσσ += [3]

2.2. Loi de consolidation

La non-linéarité introduite dans le liquide de Maxwell a pour objectif de rendre compte de la modification de la vitesse de fluage observée à long terme (Brooks, 2005). Physiquement cette non-linéarité est, de notre point de vue, due à deux phénomènes complémentaires, une « consolidation » due aux contraintes sphériques et un « écrouissage » sans doute dû à des enchevêtrements et à des blocages lors des déplacements des feuillets de CSH.

Pour modéliser cette non-linéarité, nous introduisons le coefficient de consolidation Cc tel que :

=

=0

0

Mdc

Md

Msc

Ms

C

C

ηη

ηη

[4]

où 0),( dsMη est la viscosité initiale du matériau. La plus simple expression pour le coefficient Cc compatible avec les observations expérimentales disponibles à ce jour est alors la suivante :

= Msk

Ms

Ccεε

exp

[5]

Dans cette expression εMsk est un paramètre appelé « déformation caractéristique de consolidation » gérant la vitesse de consolidation du béton ; et εMs est la

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Modélisation des déformations différées 1167

déformation de fluage dans le corps de Maxwell du schéma rhéologique associé au fluage sphérique (cf. figure 3). L’utilisation de cette variable pour calculer la consolidation revient à considérer que celle-ci est principalement gérée par la variation volumique du béton due au fluage. Peut être serons-nous amenés ultérieurement à prendre en compte un invariant du tenseur des déformations de fluage déviatorique dans ce coefficient de consolidation, cette possibilité n’ayant pas été envisagée à ce jour pour raison de simplicité. De plus, cette dépendance du coefficient de consolidation permet de rendre compte facilement de l’effet de la teneur en eau (via la contrainte hydrique Πw sur la figure 2) sur la vitesse de fluage. Une contrainte hydrique négative (retrait) entraînera une consolidation accroissant les viscosités et diminuant les vitesses de fluage, inversement une augmentation de la teneur en eau du béton diminuera le retrait et conduira à un accroissement de la vitesse de fluage.

2.3. Lois rhéologiques

Ce sont les lois classiques de la viscoélasticité dans lesquelles le coefficient de viscosité du corps de Maxwell n’est pas constant, soit pour la déformation sphérique :

=+=

=′

MsMsese

KVsKVsKVsKVese

eseS

kkk

k

εηεεηεε

εσ

[6]

avec :

– ek le module de compressibilité élastique ;

– KVk et KVsη le module de compressibilité et la viscosité de l’étage de Kelvin Voïgt associés au fluage réversible ;

– Msη la viscosité (non linéaire, cf. équation [5]) du fluide de Maxwell.

Pour les déformations déviatoriques il vient de la même façon :

=

+=

=′

Mdij

Mdedij

e

KVdij

KVdKVdij

KVedij

e

edij

edij

εηεµ

εηεµεµ

εµσ

2

22

2

[7]

avec : – eµ le module élastique en cisaillement ;

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– KVµ et KVdη le module de cisaillement et la viscosité associés au fluage déviatorique réversible ;

– Mdη la viscosité non linéaire associée au fluage déviatorique permanent.

Concernant la mise en œuvre numérique du modèle, il est possible d’intégrer analytiquement ces équations sur un pas de temps en supposant que la déformation totale évolue linéairement en fonction du temps sur le pas, et en prenant pour condition initiale celle issue de la fin du pas précédent. Ainsi, le calcul de partition des déformations entre les différents étages du modèle et le calcul des contraintes est analytique sur le pas de temps, ce qui est intéressant du point de vue de la méthode d’implémentation (inutile de recourir à un schéma de Runge Kutta), et donc du temps de calcul.

2.4. Calage du modèle sur un essai de fluage propre en compression à long terme

Brooks (2005) présente plusieurs courbes de fluage de différents bétons ordinaires suivis sur 30 ans. Il ressort de ses observations que la vitesse de fluage du béton soumis à une contrainte constante admet une décroissance par rapport au temps sans pour autant que cette vitesse s’annule. Pour généraliser cette décroissance de vitesse de fluage à des cas de chargements quelconques, nous l’avons interprétée comme étant une conséquence de l’augmentation de viscosité induite par la consolidation. Il est évident que lorsque nous simulons l’un de ces essais de fluage uni-axial à très long terme, nous retrouvons bien la décroissance de la vitesse de fluage attendue (figure 4).

L’essai de fluage effectué par Brooks est fait sur un béton de E/C = 0,5 âgé de 14 jours au moment du chargement (30 % de la résistance en compression) et conservé dans l’eau avant et pendant l’essai.

Afin de reproduire l’évolution des propriétés rhéologiques du béton au cours de ces 30 ans d’essai, nous supposons une variation du module d’Young entre la valeur donnée par Brooks à 14 jours et celle qu’il mesure à 30 ans (tableau 1). La déformation de fluage obtenue à partir des paramètres rhéologiques donnés dans le tableau 2 est comparée aux résultats donnés par Brooks (figure 4).

E 14 jours (MPa) 29 800

E 30 ans (MPa) 54 400

ν 0,21

Rc 14 jours (MPa) 36,8

Tableau 1. Caractéristiques mécaniques du béton (Brooks, 2005)

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1 10 100 1000 10000 100000Temps (j)

Déf

orm

atio

n de

flua

ge ( µ

m/m

)

BrooksCastem

Figure 4. Simulation de la déformation de fluage à long terme pour un essai uni axial (les points expérimentaux sont issus de (Brooks, 2005)

Sphérique Déviatorique

k (ou µ)KV/k (ou µ)e 6 7

ηKV/k (ou µ)e (j) 6 7

ηM0/k (ou µ)e (j) 15 15 Mskε 3,5E-5

Tableau 2. Caractéristiques rhéologiques obtenues par le calage

2.5. Calage du modèle sur un béton ordinaire

Dans la suite de cet article, nous nous intéressons aux interactions entre le retrait et le fluage en dessiccation. Nous avons choisi pour illustrer nos propos d’appliquer le modèle proposé à un béton étudié expérimentalement sous ces différents aspects, ce qui nous a conduits à choisir l’un des bétons étudiés par Granger dans sa thèse (béton de Chooz dans (Granger, 1996)). La composition de ce béton est donnée dans le tableau 3 et les caractéristiques instantanées au moment du chargement (28 j) sont données dans le tableau 4.

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Granulats 1 130 kg/m3

Sable 750 kg/m3

Ciment CPA52,5 Origny 350 kg/m3

Eau 190 kg/m3

Tableau 3. Formulation du béton

E (MPa) 38 600

ν 0,21

Tableau 4. Caractéristiques élastiques instantanées du béton à 28 j

L’essai de fluage propre est fait sur une éprouvette de diamètre 16 cm et de hauteur 32 cm isolée de tout échange hydrique avec l’extérieur. Le chargement est effectué 28 jours après le coulage par l’application d’une pression de 12 MPa (soit 27,6 % de la résistance en compression). La figure 5 permet de visualiser le calage de notre modèle sur le comportement du béton en fluage propre. Les paramètres de calage sont donnés dans le tableau 5.

0

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20

30

40

50

0 2000 4000 6000 8000 10000 12000

Temps (h)

ε ( µ

m/m

/MPa

)

Essai GrangerModèle

Figure 5. Fluage propre (données expérimentales issues de Granger (1996))

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Modélisation des déformations différées 1171

Sphérique Déviatorique

k (ou µ)KV/k (ou µ)e 3,83 2,33

ηKV/k (ou µ)e (j) 15,17 13,98

ηM0/k (ou µ)e (j) 38,3 46,6 Mskε 7E-5

Tableau 5. Caractéristiques rhéologiques obtenues par calage

Notons que le calage du modèle de fluage propre est facilité par la possibilité d’intégrer analytiquement les équations constitutives dans le cas d’un essai à contrainte constante. En effet l’équation [6] conduit alors à :

−−=

−−=

=

t

tkk

k

MskMs

SMskMs

KVs

KV

KV

SKVs

e

Ses

εησεε

ησε

σε

0

'

'

'

1ln

exp1

[8]

De même, l’intégration de l’équation [7] avec une contrainte constante conduit aux relations suivantes (équation [9]).

−−=

−−=

=

t

t

MskMs

S

S

Ms

Md

dijMskMd

ij

KVd

KV

KV

dijKVd

ij

e

dijed

ij

εησ

ση

ησ

εε

ηµ

µσ

ε

µσ

ε

0

'

'

0

0

'

'

'

1ln

exp1

[9]

Les équations [8] et [9] nécessitent la mesure des déformations radiales sur l’éprouvette de fluage propre, toutefois, si celles-ci ne sont pas accessibles, on peut adopter en 1re approximation les hypothèses simplificatrices proposées dans l’équation [10].

βυυ

µµηη

ηη =

−+====

)21(3)1(2

0

0

e

e

KV

KV

KVd

KVs

Md

Ms kk

[10]

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1172 EJECE. Volume 13 – No. 10/2009

avec 2=β , ce qui correspond à 285.0=υ .

Par ailleurs, si l’on ne dispose pas de la phase de recouvrance (permettant d’accéder à la partie réversible du fluage), on pourra utiliser les résultats de Gopolakrishnan (Gopolakrishnan et al., 1969) afin de caler le rapport des modules élastiques et des viscosités de l’étage Kelvin Voigt sur le module élastique instantané ( eKV kk / , eKV µµ / , eKVs k/η et eKVd µη / ), en supposant donc que ceux-ci restent à peu près constants d’un béton à l’autre. Enfin, si l’on décompose la contrainte uniaxiale suivant une partie déviatorique et une partie sphérique, il vient, dans le cas d’un essai de fluage propre sans dépression capillaire :

3' σσ =S

et σσ

32' =d

axial

[11]

En reportant [11] et [10] dans [9] et [8], on déduit l’expression de la déformation axiale de fluage propre irréversible :

+−= tt MskMs

MskMaxial εη

σβεε 031ln2

31)(

[12]

Il est également possible d’utiliser cette relation en y intégrant l’amplitude du fluage réversible, ce qui est envisageable si l’on supprime l’étage de Kelvin Voigt sur la figure 3. Cette dernière simplification permet de caler directement la courbe de fluage avec l’équation [12] (au détriment de la modélisation de la recouvrance qui ne peut être modélisée que par l’étage de Kelvin Voigt). L’ajustement des paramètres de l’équation [12] est alors assez simple ; la viscosité 0Msη est calée avec

la vitesse de fluage juste après le chargement, et le coefficient Mskε est ajusté ensuite par une procédure des moindres carrés pour reproduire au mieux la courbe expérimentale à long terme.

Notons que le paramètre Mskε permet de traduite le phénomène de consolidation en terme de variation de vitesse de fluage, il ne s’agit donc pas d’une limite « absolue » de consolidation mais uniquement d’un paramètre permettant de traduire la sensibilité de la vitesse de fluage à la consolidation. Par exemple lorsque la déformation sphérique de fluage irréversible atteint une intensité égale à Mskε , la viscosité est multiplié par 72.2=e , ce qui signifie que la vitesse de fluage est alors 2,72 fois plus faible qu’à l’instant du chargement. Lorsque cette intensité atteint 4 fois Mskε la vitesse n’est plus que 1/55e de la vitesse initiale, etc. Ainsi, le fluage augmente constamment mais alors sa vitesse décroît pour finalement tendre vers zéro. C’est cette décroissance importante de la vitesse de fluage qui limite le potentiel de déformation du modèle intrinsèque proposé ici, et le rend ainsi compatible avec la notion de consolidation proposée par Acker.

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Modélisation des déformations différées 1173

3. Modélisation du retrait en dessiccation

3.1. Loi d’évolution de la contrainte hydrique

Pour un béton non saturé et non chargé, la contrainte exercée par l’eau

intraporeuse sur le squelette solide est notée w

π (cf. figure 2) ; c’est une fonction de la pression capillaire associée à l’eau liquide, du degré de saturation et du coefficient de Biot (Baroghel-Bouny et al., 2003). En théorie, la pression capillaire n’est fonction que de l’humidité relative locale. Le degré de saturation peut quant à lui être relié à la pression capillaire via la combinaison des équations de « Laplace » et de l’isotherme de désorption ou d’adsorption du matériau (Baroghel-Bouny et al., 1999). La combinaison de ces relations a été utilisée dans la modélisation proposée par (Benboudjema, 2002), avec une loi linéaire reliant le coefficient de Biot effectif et le degré de saturation. Ce choix conduit à l’apparition d’un effet maximal de la pression capillaire pour une degré de saturation compris entre 25 et 35 %, en deçà et au-delà de cette zone le produit du degré de saturation par la pression capillaire diminue, conduisant par conséquent à une diminution de retrait. En pratique, le retrait s’accentue de façon monotone avec la perte de masse d’eau. Torrenti et al. (Torrenti et al., 1997 ; Benboudjema et al., 2005) ont de ce fait proposé de modéliser la déformation de retrait en la supposant globalement proportionnelle à la perte de masse. Nous reprenons ce principe pragmatique dans notre approche, mais en écrivant ici que c’est la contrainte induite par l’eau sur le squelette solide qui est proportionnelle à la perte de masse, soit :

( ) www

wBK φφπ −−= [13]

avec :

– w

B un tenseur permettant de modéliser la transmission de la dépression intraporeuse vers le squelette solide précisé dans la sous-section suivante ;

– φ la porosité ;

– wφ la teneur volumique en eau liquide du béton ;

– wK un paramètre de calage.

L’originalité de l’approche repose alors sur la possibilité qu’offre le tenseur w

B de faire dépendre la contrainte hydrique de variables d’état autres que la teneur en eau. Nous verrons en particulier, par la suite, qu’il est pertinent de considérer que celui-ci puisse dépendre de l’état de contrainte appliqué sur le béton.

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3.2. Calage de la loi d’évolution de la contrainte hydrique

Le tenseur w

B du matériau saturé non chargé est supposé connu, en adoptant une hypothèse d’isotropie de transmission des pressions capillaires pour le matériau non chargé, il est conventionnellement pris égal au tenseur identité (équation [10]).

IBw= [14]

Par la suite il dépendra du tenseur des contraintes appliquées. Cette dernière précision est d’importance car le prochain paragraphe, consacré à la modélisation du fluage en dessiccation, s’appuie justement sur la prise en compte d’une évolution

différenciée pour chacune des valeurs principales du tenseur de w

B .

Pour caler le coefficient Kw de l’équation [13], nous devons tout d’abord procéder à un calcul des champs de teneur en eau dans l’éprouvette de béton étudié. Ce béton est le « béton de Chooz » testé de la thèse de Granger sur lequel nous avons précédemment calé la loi de fluage propre. Les éprouvettes utilisées sont cylindriques de diamètre 16 cm et sont exposées sur leur surface latérale à une humidité relative de 50 %. Granger indique que cette condition revient à imposer une teneur en eau volumique à la surface de 52,6 l/m3.

50

60

70

80

90

100

110

120

130

0.00 0.01 0.02 0.03 0.04 0.05 0.06 0.07 0.08

Distance par rapport au centre (m)

Tene

ur e

n ea

u (l/

m3 )

Modèle 3j Calcul Granger 3jModèle 28j Calcul Granger 28jModèle 460j Calcul Granger 460j

Figure 6. Profils des teneurs en eau à différentes dates

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Modélisation des déformations différées 1175

La teneur en eau initiale au moment de l’essai est de 117,5 l/m3 et nous estimons la porosité du béton à 13 % (ce qui correspond à un degré de saturation au début de l’essai de 0,9).

Les profils hydriques (figure 6) sont calculés par résolution numérique de l’équation de conservation de masse d’eau, dans laquelle le coefficient de transfert hydrique non linéaire est modélisé par une loi inspirée de celle de Mensi (Mensi et al., 1988) (équation [15]), le calage donnant ici D0 = 5,3E-10 m²/s et α = 0,05 m3/l. Les calculs sont effectués à l’aide du logiciel Castem du CEA.

( ) ( )( )φφφφαφ −⋅−⋅=∂∂ ww

w

gradDdivt

)(exp0

[15]

Ensuite, nous calons la constante wK = 1040 MPa de façon à retrouver l’amplitude du retrait mesuré par Granger (figure 7).

0

100

200

300

400

500

0.0 0.5 1.0 1.5 2.0Perte de masse de l'éprouvette (%)

ε (µm/m)

Essai GrangerModèle

Figure 7. Retrait en fonction de la perte de masse (mesuré à l’axe de l’éprouvette)

Nous pouvons remarquer que, si d’une part nous connaissons les profils de teneur en eau et d’autre part la loi de fluage propre, alors seul le paramètre de Kw est à caler pour retrouver le retrait. Le retard de déformation observée dans la période initiale s’explique par le fait qu’à ce stade, la perte de masse sur la couronne de l’éprouvette crée un système d’autocontrainte qui ne permet pas une déformation globale de l’éprouvette.

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1176 EJECE. Volume 13 – No. 10/2009

4. Modélisation du fluage en dessiccation

4.1. Principe

Les lois de fluage couramment utilisées nécessitent l’adjonction d’un terme de déformation complémentaire au fluage propre et au retrait pour modéliser la déformation dite de « fluage de dessiccation intrinsèque ». Ces lois confèrent au phénomène du fluage en dessiccation un caractère relativement découplé des phénomènes de retrait et de fluage propre (Bazant et Chern, 1985 ; Benboudjema et al., 2004), nécessitant de ce fait, dans la plupart des cas, des paramètres de viscosité supplémentaires destinés à modéliser cette composante du fluage. Dans notre modèle, la contrainte hydrique modélise la répercussion de la pression capillaire sur le squelette solide. Pratiquement, cette répercussion est sensible à l’état de chargement du squelette solide (Bažant et al., 1994 ; Bažant et al., 1997).

Plan de coupe utilisé pour tracer les contraintes normales verticales

Inclusion E=60GPa

Cavité en dépression à 50MPa

Chargement 0., 25., ou 50 MPa

Figure 8. Contrainte principale de traction sous un chargement vertical 50 Mpa, dépression capillaire 50 MPa, Em = 20 GPa, Eg = 60 GPa (dimensions en mm)

Pour expliquer l’origine de cette variation, nous avons simulé numériquement, à l’aide du logiciel Comsol et dans le cadre de l’élasticité linéaire, un matériau

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Modélisation des déformations différées 1177

périodique composite poreux contenant des cavités en dépression à -50 MPa, et des inclusions de module élastique supérieur à celui de la matrice (cf. figure 8).

L’inclusion a un module d’Young de 60 GPa, elle est ellipsoïdale, la matrice a un module de 20 GPa, la dépression dans la cavité est de 50 MPa, trois chargements verticaux de compression sont appliqués successivement : 0, 25 et 50 MPa. Matrice et inclusion ont le même coefficient de Poisson égal à 0,2. Pour analyser le champ de contrainte, nous nous sommes focalisés sur l’étude des contraintes verticales normales à un plan de coupe situé sur la cavité et traversant le granulat (cf. figure 8).

En l’absence de chargement vertical de compression, nous pouvons constater sur la figure 9 que, dans ce plan, il n’existe dans la pâte que des contraintes de traction, donc des risques de fissuration élevés. Ces zones de traction sont dues aux transferts des contraintes de la cavité vers l’inclusion : l’inclusion empêche le matériau de se contracter sous l’effet de la dépression dans la cavité. De ce fonctionnement microstructurel naît un champ d’autocontrainte dont les parties en traction peuvent générer des endommagements, ces endommagements ont par ailleurs été observés expérimentalement sur des éprouvettes de béton subissant un retrait grâce à la technique de la microtomographie présentée par Burlion (2007). Ces endommagements limitent la transmission des effets de la dépression capillaire vers le reste du matériau en isolant, au moins partiellement, la zone soumise à la dépression du reste du matériau, ce qui se traduit au niveau macroscopique par une diminution du retrait.

Si par contre une contrainte de compression est appliquée (verticalement sur la figure 8), certaines zones de la matrice se retrouvent totalement comprimées et ne peuvent plus fissurer (figure 9), améliorant ainsi le transfert des effets de la dépression capillaire de la cavité vers le reste du matériau et donc l’amplitude du retrait.

Dans notre modèle phénoménologique, la transmission des effets de la dépression capillaire vers le squelette solide est modélisée par le tenseur

wB (cf.

équation [9]). L’effet de l’endommagement, dû aux contraintes de traction visualisées sur la figure 9 sur la transmission de la dépression capillaire, peut donc être modélisé par une modification des composantes de ce tenseur. Si ce tenseur est pris égal au tenseur identité pour le retrait libre, alors ses composantes doivent augmenter dans les directions chargées en compression de façon à traduire la meilleure transmission des effets de la dépression. Ce qui conduit à une augmentation du retrait dans les directions chargées en compression. Selon cette interprétation, l’accroissement de retrait ainsi obtenu est analogue à la déformation habituellement qualifiée de « fluage de dessiccation intrinsèque ».

Avec ces explications, il est intéressant de noter que l’on devrait plutôt parler de « retrait en dessiccation sous charge » que de « fluage de dessiccation intrinsèque ». Ainsi, dans notre modèle, le fluage de dessiccation n’est rien d’autre qu’un accroissement du retrait dû à une meilleure transmission des effets de la dépression capillaire vers le squelette solide.

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Figure 9. Contrainte verticale sur le plan de coupe pour trois niveaux de chargement vertical externe (mise en évidence de la réduction de la dimension de la zone en tension avec l’augmentation du chargement vertical de compression)

L’explication physique résidant simplement dans la diminution du « micro-endommagement » existant au voisinage des cavités en dépression. La loi

d’évolution proposée pour modifier les composantes du tenseur w

B est très simple, elle est donnée ci-dessous.

4.2. Lois d’évolution des composantes de w

B

L’évolution proposée pour les composantes de w

B est définie dans les directions principales du tenseur des contraintes :

+

−= B

IwIB

σσ1

[16]

Intensité du chargement vertical de compression (cf figure précédente)

Bord du granulat

Zone en tension, endommageable, à la verticale de la cavité en dépression X (mm)

Y (mm)

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Modélisation des déformations différées 1179

avec :

– wIB une valeur principale du tenseur

wB ;

– Iσ une valeur principale du tenseur des contraintes (définie positive pour une traction) ;

– Bσ le paramètre de calage du modèle traduisant les effets du « micro-endommagement intergranulaire» ;

– l’exposant « + » signifiant que le terme entre parenthèses doit rester positif. En effet cette formule conduit à une diminution du coefficient w

IB en cas de chargement externe de traction, le coefficient s’annule donc lorsque la contrainte effective de traction devient égale au paramètre de calage Bσ . Si au contraire la contrainte principale est de compression (négative avec la convention de signe adoptée ici), alors le coefficient w

IB augmente. On peut remarquer également que

ce coefficient est égal à deux lorsque la contrainte est égale à Bσ− . En d’autres termes, lorsque la contrainte de compression appliquée sur le béton est égale à

Bσ− , alors la contrainte hydrique transmise au squelette solide depuis les cavités

en dépression capillaire est doublée. Dans une direction principale de contrainte, la contrainte totale peut alors se

mettre sous la forme suivante :

−−= B

IwII σ

σσσσ 1'

[17]

Ce qui permet de calculer explicitement la valeur de la contrainte totale en fonction de la contrainte effective :

−=

B

w

wI

I

σσσσσ

1

'

[18]

On doit alors vérifier la condition BI σσ ≤ pour que w

IB soit positif. Si ce n’est pas le cas, cela signifie que la contrainte externe de traction et les pressions capillaires ont suffisamment endommagé la microstructure pour que les dépressions capillaires ne puissent plus être transmises, donc 0=w

IB .

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4.3. Calage du modèle

Nous donnons sur la figure 10, à titre d’illustration, le résultat du calage du modèle sur le béton issu de la thèse de Granger et étudié dans les deux précédents paragraphes. L’essai de fluage total est réalisé dans les mêmes conditions (éprouvettes cylindriques Ø 16 cm et chargement à 27,5 % de Rc) que le fluage propre mais les éprouvettes sont ici exposées sur leur surface latérale à une humidité relative de 50 % (identique à l’essai de retrait libre).

Le seul paramètre de calage supplémentaire nécessaire à la modélisation de la déformation différée totale est Bσ (cf. équation [16]). On obtient finalement

MPaB 7,14=σ .

0

500

1000

1500

2000

2500

0 500 1000 1500 2000 2500 3000

Temps (j)

ε (µm/m)

Essai GrangerModèle

Figure 10. Déformation différée totale (chargement à 27,6 % de Rc et HR = 50 %)

5. Conclusion

Partant d’une modélisation viscoélastique non asymptotique du fluage propre incluant un phénomène de consolidation du matériau, le modèle de déformation différée proposé permet de considérer le retrait et le fluage en dessiccation comme deux manifestations d’un phénomène unique : le chargement hydrique intraporeux. La transmission des pressions capillaires au squelette solide est modélisée par un tenseur du second ordre traduisant les effets combinés de la microfissuration intergranulaire et du chargement extérieur. Les valeurs principales de ce tenseur sont estimées avec une fonction linéaire des contraintes principales. Cette fonction permet de simuler la déformation totale à long terme d’un béton en cours de séchage, incluant implicitement le phénomène dit du « fluage en dessiccation ».

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Les perspectives de ce travail consistent à tester le modèle sur d’autres types de bétons et d’autres chemins de chargement hydromécanique. Le couplage de ce modèle avec la théorie de l’endommagement ne pose pas de problème particulier et devrait permettre d’aborder les problèmes de fluage tertiaire. Les améliorations apportées à cette première approche pourraient alors conduire, à terme, à un modèle suffisamment simple, robuste et fiable pour évaluer le comportement hydromécanique multi-axial à long terme des structures en béton, que ce soit dans le cadre d’une modélisation numérique ou d’une approche analytique simplifiée (de type réglementaire).

Remerciements

Ce travail est issu de la synthèse de projets de recherche collaboratifs entre le LMDC et plusieurs partenaires industriels parmi lesquels nous pouvons citer VINCI Construction grands projets (MM. Boutillon et Linger), l’ANDRA (MM. Bourbon et Camps) ou encore EDF-CIH (MM. Bourdarot et Grimal). Les auteurs remercient également le CEA pour la mise à disposition du code de calcul Cast3m en version « éducation et recherche ». MM. Pons et Vidal du LMDC sont également remerciés pour leurs remarques constructives.

6. Bibliographie

Acker P., « Sur les origines du retrait et du fluage du béton », Revue française de génie civil, vol. 7, n° 6, 2003, p. 761-776.

Baroghel-Bouny V., Mainguy M., Lassabatere T., Coussy O., “Characterisation and identification of equilibrium and transfer moisture properties for ordinary and high performance cementious materials”, Cement and Concrete Research, vol. 29, 1999, p. 1225-1238.

Bažant Z.P., Xi Y., “Drying creep of concrete: constitutive model and new experiments separating its mechanisms”, Materials and Structures, vol. 27, 1994, p. 3-14.

Bažant Z.P., Hauggaaed A.B., Baweja S., Ulm F.J., “Microprestress solidification theory for concrete creep. I: Aging and drying effects”, Journal of Engineering Mechanics, ASCE, vol. 123, n° 11, 1997, p. 1188-94.

Bažant, Z.P., Chern J.C., “Concrete creep at variable humidity: Constitutive law and mechanism”, Materials and Structures, vol. 18, n° 103, 1985, p. 1-20.

Bernard O., Ulm F.J., Germaine J.T., “Volume and deviator creep of calcium-leached cement-based materials”, Cement and Concrete Research, vol. 33, 2003, p. 1127-1136.

Benboudjema F., Modélisation des déformations différées du béton sous sollicitations bi-axiales. Application aux enceintes de confinement de bâtiments réacteurs des centrales nucléaires, Thèse de l’université de Marne-la-Vallée, 19 décembre 2002.

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1182 EJECE. Volume 13 – No. 10/2009

Benboudjema F., Meftah F., Sellier A., Torrenti J.M., Heinfling G., “A basic creep model for concrete subject to multiaxials loads”, FRAMCOS IV, Cachan, Balkema, June 2001, p. 161-168.

Benboudjema F., Meftah F., Torrenti J.-M., “A viscoelastic approach for the assessment of the drying shrinkage behaviour of cementitious materials”, Materials and Structures, vol. 40, 2007, p. 163-174.

Benboudjema F., Meftah F., Torrenti J.M., “Interaction between drying, shrinkage, creep and cracking phenomena in concrete”, Engineering Structures, vol. 27, 2005, p. 239-250.

Brooks J.J., “30-Year creep and shrinkage of concrete”, Magazine of Concrete Research, vol. 57, n° 9, 2005, p. 545-556.

Burlion N., Rougelot T., Bernrad D., Skocylas F., « Apport de la microtomographie pour l’étude de la fissuration des matériaux cimentaires sous lixiviation », 25e rencontre de l’AUGC, Bordeaux, 23-25 mai 2007.

Coussy O., Mechanics of Porous Continua, English (translation) by Ulm F., John Wiley & Sons; 2 Rev Ed edition, November 21, 1995.

Gopalakrishnan K. S., Neville A.M., Ghali A., “Creep Poisson’s ratio of concrete under multiaxial compression”, ACI Journal, vol. 66, n° 12, December 1969, p. 1008-1020.

Granger L., Comportement différé du béton dans les enceintes de centrales nucléaires: analyse et modélisation, Ph.D. thesis, Ecole nationale des ponts et chaussées, Marne-La-Vallée, France, 1996.

Mensi R., Acker P., Attolou A., « Séchage du béton : analyse et modélisation », Materials and Structures, vol. 21, n° 121, 1988, p. 3-12.

Torrenti J.M., Granger L., Diruy M., Genin P., « Modélisation du retrait du béton en ambiance variable », Revue française de génie civil, vol. 1, n° 4, 1997, p. 687-698.

Ulm F.-J., Le Maou F., Boulay C., “Creep and shrinkage coupling: new review of some evidence”, Revue française de génie civil, vol. 3, 1999, p. 21-37.

Commissariat à l’Energie Atomique CEA – DEN/DM2S/SEMT, Cast3m finite element code. <http://www-cast3m.cea.fr/>

Reviron N., Etude du fluage des bétons en traction. Application aux enceintes deconfinement des centrales nucléaires à eau sous pression, Thèse de doctorat de l’ENS de Cachan, soutenue le 9 mars 2009.

Received: 28 February 2009 Accepted: 9 October 2009

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