ACADEMIE DE PARIS
Année 2009 / 2010
MEMOIRE
pour l’obtention du DES
d’Anesthésie-‐Réanimation
Coordonnateur : Mr le Professeur Marc SAMAMA
par
Présenté et soutenu le 15 Avril 2010
Travail effectué sous la direction de :
Pr AUSSET, Service Anesthésie Réanimation, HIA PERCY
Pr FISCHLER, Service Anesthésie, Hôpital FOCH
Impact d’un programme d’amélioration des soins sur la qualité des soins et les complications
cardiovasculaires en chirurgie orthopédique majeure.
DONAT Nicolas
2
Table des matières :
1 Introduction ..................................................................................................... 3
2 Rationnel.......................................................................................................... 4 2.1 Physiopathologie des complications ischémiques myocardiques péri-‐opératoires .4 2.2 Incidence de l’ischémie myocardique dans la période péri opératoire ..........................7 2.3 Troponine, marqueur d’ischémie myocardique ........................................................................8 2.3.1 Définition................................................................................................................................................8 2.3.2 Propriétés ...............................................................................................................................................9 2.3.3 Validation...............................................................................................................................................9 2.3.4 Causes non ischémiques d’élévation de la troponine :..................................................... 13
2.4 Qualité des soins...................................................................................................................................13 2.4.1 Définition............................................................................................................................................. 13
2.5 Spécificités de la chirurgie orthopédique majeure ...............................................................16 2.5.1 Particularités de l’arthroplastie de hanche : ....................................................................... 16 2.5.2 Particularités des interventions pour fracture du col fémoral.................................... 17 2.5.3 Particularités de l’arthroplastie de genou............................................................................ 18 2.5.4 Gestion des pertes sanguines en chirurgie orthopédique majeure ............................ 19 2.5.5 Type d’analgésie réalisée.............................................................................................................. 19
3 Matériels et méthodes ................................................................................... 20 3.1 Critères d’inclusion .............................................................................................................................20 3.2 Critères de non-‐inclusion .................................................................................................................20 3.3 Mesures ....................................................................................................................................................20 3.4 Suivi et devenir .....................................................................................................................................20 3.5 Intervention sur la qualité des soins ...........................................................................................21 3.6 Analyse statistique ..............................................................................................................................25 4 Résultats ........................................................................................................ 27 4.1 Effectifs et caractéristiques des populations étudiées : ......................................................27 4.2 Troponine................................................................................................................................................28 4.3 Complications cardiovasculaires...................................................................................................29 4.4 Mortalité ..................................................................................................................................................31 4.5 Qualité des soins...................................................................................................................................35 5 Discussion ...................................................................................................... 37 5.1 Que peut-‐on retenir ? .........................................................................................................................37 5.1.1 Qualité des soins ............................................................................................................................... 37 5.1.2 Critères cardiovasculaires ........................................................................................................... 37 5.1.3 Réflexion coût-effets ....................................................................................................................... 39
5.2 Limites ......................................................................................................................................................39 6 Conclusion...................................................................................................... 41
7 Annexes : ....................................................................................................... 42
8 Bibliographie : ................................................................................................ 49
3
1 Introduction Depuis dix ans, l’hôpital et le système de soins tout entier vivent une véritable
mutation à travers un nouvel objectif qui lui est assigné : évaluer ses
performances et améliorer son efficacité. Ce mouvement suit l’évolution des
mentalités de la société dans son ensemble. Le patient est dorénavant considéré
comme un client, comme un consommateur de l’offre de soin ; il faut donc lui
offrir le meilleur service possible. Cette démarche vient également du corps
médical prenant exemple sur les pratiques anglo-‐saxonnes. Le législateur, à son
tour, participe à ce processus en imposant des procédures spécifiques telles que
l’accréditation et la certification des établissements de soins. Le système de soins
a ainsi besoin de s’évaluer et de construire sa propre échelle de jugement, il lui
faut alors des critères objectifs et des indicateurs. Dans une étude précédente,
l’équipe d’anesthésie de l’Hôpital d’Instruction des Armées Percy a montré que
l’incidence des élévations post-‐opératoire de troponine en chirurgie
orthopédique majeure, corrélée à la mortalité cardiovasculaire, pouvait être
considérée comme un indicateur de la qualité des soins (1). Dans la continuité de
ce travail, nous avons tenté de mettre en évidence et d’évaluer l’impact d’un
programme d’amélioration des soins sur la qualité des soins dispensés et sur les
complications cardiovasculaires en chirurgie orthopédique majeure.
4
2 Rationnel
Actuellement, on estime que sur les 27 millions de patients qui bénéficient d’une
anesthésie chaque année aux États-‐Unis, 50 000 sont victimes d’une ischémie
myocardique (2, 3). Cette préoccupation ira croissante dans les années futures,
conséquence de la prévalence de la maladie cardiovasculaire qui augmente avec
l'âge et du nombre d’actes chirurgicaux effectués chez les patients âgés. Ces
événements ischémiques péri-‐opératoires ont une valeur pronostique forte : leur
mortalité est de 50% (4, 5), ils représentent un tiers des décès péri-‐opératoires
(6), ils sont associées à un allongement du séjour hospitalier (7), et à une
élévation du taux de mortalité à long terme (8). Cependant, l’incidence de ces
complications ischémiques myocardiques peut être réduite en améliorant la
prise en charge de nos patients. La survenue de complications cardiovasculaires
doit être considérée comme une complication évitable dans nos projets
d'amélioration de la qualité des soins péri-‐opératoires.
2.1 Physiopathologie des complications ischémiques myocardiques péri-‐
opératoires
La maladie coronarienne est dans sa grande majorité causée par l’athérome
coronarien. Celui ci est responsable d’une réduction du calibre des artères
coronariennes empêchant l’augmentation du débit sanguin coronaire lors des
périodes d’augmentation de la consommation en oxygène du myocarde. Les
manifestations cliniques en sont variables, allant de l’angor stable au syndrome
coronarien aigu (SCA).
Dans sa définition cardiologique, un syndrome coronarien aigu peut occasionner
différentes modifications électrocardiographiques. La classification de l’ACC /
AHA (9) distingue différents types de SCA selon la présence ou non de
modifications électriques, la présence ou non de marqueurs biochimiques de
nécrose myocardique, ces entités constituant en réalité un même continuum. Les
SCA avec sus décalage du segment ST évoluent le plus souvent vers des infarctus
du myocarde (IDM) avec onde Q et plus exceptionnellement vers des IDM sans
onde Q. Les SCA sans sus décalage du segment ST peuvent être soit des angors
5
instables (sans marqueurs biochimiques de nécrose myocardique), soit des IDM
sans onde Q (présence de marqueurs biochimiques de nécrose myocardique) (9).
Ces entités ne sont pas figées et le passage d’angor instable vers l’IDM est
possible. Les marqueurs biochimiques de la nécrose myocardique, dont la
Troponine Ic, permettent de tracer une limite nosologique entre l’angor instable
et l’IDM sans onde Q (10, 11), y compris en période post-‐opératoire (12).
La physiopathologie de l’ischémie myocardique en général, et de l’ischémie
myocardique post-‐opératoire en particulier, est complexe (9). Le primum movens
résulte toujours d’une inadéquation entre les besoins du myocarde en oxygène et
l’apport coronarien en oxygène (13-‐15). Les causes d’ischémie myocardiques
péri-‐opératoiressont multiples : diminution du débit sanguin coronaire,
élévation de la consommation d’oxygène du myocarde, ou encore élévation
insuffisante du débit sanguin coronaire en réponse à une élévation de la
consommation du myocarde (Figure 1). Les principaux facteurs responsables
d’une baisse ou d’une élévation insuffisante du débit sanguin coronaire sont, par
exemple, une hypotension, une anémie, une sténose coronarienne
athéromateuse, une thrombose coronarienne… Les principaux facteurs
responsables d’une élévation de la consommation myocardique en oxygène sont,
par exemple, une hypertension artérielle, une tachycardie, une hypoxie…
La majorité des épisodes d’ischémie myocardique post-‐opératoires sont associés
à la tachycardie (16, 17). Le maintien d’une fréquence cardiaque péri opératoire
inférieure au seuil d’ischémie myocardique défini pour chaque patient est
associé à une diminution significative de l’incidence de l’ischémie myocardique
(18, 19). Cependant, le maintien de la stabilité hémodynamique per opératoire
ne semble pas pour autant le gage de prévention de survenue d’accidents
ischémiques (20). Ainsi l’ischémie myocardique péri opératoire peut survenir en
dehors des épisodes d’instabilité tensionnelle, les épisodes de tachycardie isolés
favorisent l’apparition d’accidents ischémiques. A contrario, un contrôle trop
strict ou excessif de la fréquence cardiaque par l’introduction de béta bloquants
systématiques peut également être délétère par ses effets hémodynamiques (6,
21, 22).
6
Figure 1 : Mécanismes de l’ischémie myocardique péri-‐opératoire.
En dehors de ces facteurs hémodynamiques ou exogènes, d'autres mécanismes
peuvent être impliqués dans la survenue d'une ischémie, il s'agit de facteurs
intrinsèques liés à l'instabilité de la plaque d'athérome ou de facteurs modifiant
l'agrégabilité plaquettaire et les paramètres de la coagulation. La période péri-‐
opératoire est une période à risque de rupture des plaques instables : les
modifications de vasomotricité coronaire favorisées par la tachycardie,
l'hypertension artérielle, la stimulation adrénergique génèrent une contrainte
sur la paroi des artères. Les déséquilibres de la balance du myocarde en oxygène
(tachycardie, hypotension artérielle, anémie, hypoxémie) peuvent aggraver ce
phénomène. L'activation des phénomènes inflammatoires et la modification de la
coagulation pourraient également jouer un rôle délétère (23).
Les SCA péri-‐opératoires seraient donc le produit de l’interaction d’une
coronaropathie préexistante et de facteurs extra cardiaques déstabilisant
survenant autour de la chirurgie. Cette relation physiopathologique suggère
deux stratégies de prévention du risque coronarien dans ce contexte. La
7
première consiste à traiter la maladie coronaire avant l’intervention par des
moyens pharmacologiques ou interventionnels. Une abondante littérature est
régulièrement analysée par l’ACC/AHA qui publie annuellement le consensus se
dégageant des derniers travaux scientifiques, permettant alors de fixer des
recommendations concernant à la fois le dépistage et le traitement de l’athérome
coronaire. Cette stratégie ne doit être réservée qu’à une catégorie spécifique de
patients sous peine de devenir elle même délétère (24). L’autre stratégie
consiste à limiter la survenue en péri opératoire des facteurs déstabilisants
évoqués ci dessus.
Si les mécanismes physiopathologiques immédiats de l’ischémie myocardique
péri opératoire sont décrits par la littérature, il n’existe pas de données
concernant le déterminisme des complications à moyen et long terme des
épisodes ischémiques péri opératoire.
2.2 Incidence de l’ischémie myocardique dans la période péri opératoire
L’incidence de l’ischémie myocardique péri-‐opératoire est difficile à établir lors
de l’analyse de la littérature. Les chiffres retrouvés présentent de grandes
variations, allant de 1 à 20% (25, 26). La difficulté de la comparaison réside dans
les variations des définitions nosologiques, des populations étudiées, et des
procédures analysées. Ainsi, l’ischémie peut recouvrir une définition clinique,
électrique, ou biologique. Ces différentes définitions ont une incidence croissante
car les critères diagnostiques croissent en sensibilité. De plus, l’incidence des
phénomènes ischémiques asymptomatiques est encore plus élevée lorsqu’ils
sont recherchés de manière systématique (5, 26-‐29). La confusion augmente
lorsque les populations étudiées recouvrent aussi bien la population générale, ou
uniquement des sujets à risques. C’est le cas également lorsque les procédures
comparées regroupent des chirurgies vasculaires à risque ou des actes tout
venant. Cette variabilité est bien illustrée par le travail de Badner et col sur
l’infarctus du myocarde periopératoire qui montre que, selon les critères
employés, l’incidence de l’infarctus du myocarde varie entre 5 et 20 % et
l’incidence des infarctus fatals entre 4 et 17 % (29).
8
En réalité, ces discordances épidémiologiques s’expliquent par la difficulté de
diagnostic de la nécrose myocardique post-‐opératoire. Sa symptomatologie
clinique et électrique est fruste : seuls 15% des IDM présentent une douleur
thoracique caractéristique et uniquement 10 à 30 % présentent des
modifications électriques classiques (12, 29, 30). La compréhension de la gravité,
de l’épidémiologie, et de la physiopathologie des complications ischémiques
postopératoires se heurte donc tout d’abord à un problème de définition. On le
voit, de nombreux évènements ischémiques infracliniques échappent au simple
dépistage et à la comptabilisation des seuls phénomènes cliniques. L’évaluation
de leur incidence doit donc faire appel à des critères paracliniques. Les
manifestations électriques de l’ischémie myocardique, en particulier la présence
d’un sous décalage du segment ST, peuvent être recherchée à l’aide d’ ECG
répétés ou mieux par Holter ECG (12). Les manifestations biologiques peuvent
être détectées grâce aux dosages répétés des enzymes cardiaques, et plus
particulièrement de la Troponine Ic. Ces deux méthodes de monitorage de
l’ischémie myocardique ont prouvé leur efficacité et sont, en outre, corrélées à la
mortalité à long terme (31-‐38).
2.3 Troponine, marqueur d’ischémie myocardique
2.3.1 Définition
La Troponine est un complexe protéique qui sensibilise les cellules musculaires
au calcium. La Troponine se retrouve aussi bien dans les muscles cardiaques que
les muscles squelettiques, mais les formes spécifiques de la Troponine diffèrent
dans leur composition selon les types de muscle du fait d'une expression
différente de leurs gènes respectifs. La Troponine est composée d’une
association de plusieurs sous-‐unités distinctes parmi lesquelles on distingue :
• La Troponine C (TnC): sous-‐unités responsable de la liaison avec le calcium.
Une fois le calcium lié le complexe troponine-‐calcium se déplace et cesse
d'empêcher la liaison entre la myosine et l'actine. La TnC présente une forte
similitude entre la forme cardiaque et la forme squelettique, rendant impossible
l'obtention d'anticorps monoclonaux et excluant tout intérêt clinique.
9
• La Troponine I (TnI) : sous-‐unité responsable de l'inhibition de la liaison entre
la myosine et l'actine (en masquant le site de l'actine qui sert à la liaison avec la
myosine). Elle a une fonction inhibitrice qui a pour effet d'amorcer la
décontraction musculaire. La TnI présente 3 isoformes, spécifiques
respectivement du muscle squelettique à contraction rapide, du muscle
squelettique à contraction lente et du cœur (TnIc).
• La Troponine T (TnT) : sous-‐unité responsable de la liaison avec la
tropomyosine.
Seules la Troponine T cardiaque (TnTc) et la Troponine I cardiaque (TnIc) sont
mesurées par méthode immunoenzymatique spécifique, elles seules ont un
intérêt concret dans le diagnostic et le suivi de la nécrose myocardique.
2.3.2 Propriétés
La TnIc est absente du sérum chez l'individu sain. L'élévation de son taux sérique
signe la nécrose de cellules myocardiques. Cette élévation est précoce, sa
normalisation est lente. Sa positivation se fait en 3 à 6 heures après lyse
cellulaire, le pic plasmatique est atteint en 12 à 24 heures, sa normalisation est
constatée en 3 à 5 jours (tableau 1).
Tableau 1 : Cinétique des enzymes cardiaques (39)
CK CK-‐MB Myoglobine Troponine Ic
Positivation 4-‐6 h 3-‐6 h 2-‐3 h 3-‐6 h
Pic plasmatique 18-‐22 h 16-‐24 h 8-‐12 h 12-‐24 h
Normalisation 36-‐48 h 48-‐72 h 24-‐36 h 5-‐15 jours
2.3.3 Validation
Depuis l’utilisation en routine de la Troponine comme marqueur enzymatique de
la nécrose myocardique, il est établi qu’il existe une étroite corrélation entre
l’ischémie électrique détectable au holter et l’élévation de ce marqueur (40). En
ce qui concerne le diagnostic d’IDM avec modification du segment ST la
sensibilité et la spécificité élevée des dosages répétés de la TnIc sont
démontrées. La sensibilité de la TnIc approche 100 % 12 heures après le début
10
de la douleur, et reste voisine de 100 % dans les 5 jours suivants (41). La TnIc est
détectée dans le sang 4 à 6 heures après le début de la douleur, et sa sensibilité
est comparable à celle des marqueurs conventionnels lorsque les dosages sont
réalisés moins de 6 heures après le début de la douleur (42). Sa faible sensibilité
précoce justifie la répétition des dosages. En revanche, la spécificité des
Troponines est supérieure à celle des marqueurs conventionnels (CPK,
Myoglobine, LDH) (43). Son principal avantage réside dans sa valeur prédictive
négative, permettant d'exclure une nécrose du myocarde. Son dosage répété
permet de contrôler une extension ischémique avec reprise secondaire de la
nécrose ou d'apprécier la reperfusion du myocarde après fibrinolyse par
exemple. Il est de plus démontré que l’élévation isolée de cette enzyme est un
évènement significatif dans un contexte évocateur comme la période péri
opératoire, et ce même pour des valeurs en dessous des seuils retenus pour le
diagnostic de l’infarctus du myocarde (29, 33, 34, 44). Ainsi, en chirurgie
générale, le risque de décès à un an serait multiplié par 15 en cas d’élévation de
la Troponine en postopératoire (31). En outre, il a été démontré que les mesures
itératives de TnIc constituent le principal outil diagnostic pour détecter la
survenue ischémie post-‐opératoire(34, 45). La chronologie de son élévation est
connue, elle est maximum dans les trois premiers jours (26, 46, 47).
La recherche d’un dommage myocardique au travers d’une élévation, même
isolée, de la Troponine en postopératoire est donc une donnée pertinente quant
au devenir des patients. L’incidence précise d’un tel phénomène dans une
population non sélectionnée de chirurgie générale est inconnue car les études
d’incidence de complications cardiovasculaires sur de vastes collectifs de
malades portent sur les évènements cliniques confirmés par
l’électrocardiographie ou le dosage enzymatique et ne prennent pas en compte
les évènements asymptomatiques tels que les ischémies électriques ou les
lésions myocardiques avec libération de Troponine (48-‐53). Les rares études
portant sur l’incidence des élévations isolées de la Troponine portent sur des
populations sélectionnées (patients coronariens documentés et chirurgie
vasculaire) avec des valeurs seuils variables pour le dosage de la Troponine
(Tableau 2).
11
Tableau 2 : Incidence retrouvée dans la littérature des élévations de la troponine
en postopératoire de chirurgie non cardiaque (54).
Population étudiée Seuil Troponine (μg/l)
% patient avec élévation Troponine
Association avec complications cardiaques
Lee et al (55) 1996
1175 patients > 50 ans chirurgie non cardiaque
5 % anévrisme Ao Abdo -‐ 20 % chirurgie vasculaire majeure -‐ 33 % chirurgie ortho -‐ 12 % chirurgie thoracique -‐ 11 % chirurgie digestive -‐ 19 % autres
Tropo T > 0.1 17% OR=4.6 à 6 mois
Metzler et al (44) 1997
67 patients, risque intermédiaire
57 % chir. vasculaire – 31 % chir. digestive – 12 % chir. orthopédique
Tropo T > 0.2 Tropo I > 0.6 19.5 % Non connue
Badner et al (29) 1998 323 patients coronariens, > 50 ans Tropo T > 0.2 20.7 % Non connue
Zaugg et al (11) 1999
63 patients, > 65 ans
52 chir abdo majeure – 2 chir thoracique – 5 arthroplasties de hanche
Tropo Ic >0.4 27 % > 0.4‡ 4.8% > 1.5† Non connue
Gauss et al (56) 2001
185 patients, risque cardiovasculaire intermédiare
80 % chirurgie vasculaire 20 % chirurgie abdominale
Tropo T > 0.1 during > 48H 9 % Non connue
Jules-‐Elysee et al (57) 2001 85 patients, chirurgie orthopédique
Tropo Ic > 3.1 * 6 % Non connue
Kim et al (33) 2002 229 patients, chirurgie vasculaire Tropo Ic > 1.5
12% > 1,5† 31% 0,4-‐1,5
OR=6 à 6 mois pour la mortalité
OR=27 pour IDM péri-‐opératoire (cTnI > 1.5)
Landesberg et al (34) 2003 447 patients, chirurgie vasculaire
Tropo Ic > 0.6 ‡ 23.9%
OR=1.9 pour la mortalité à 5 ans
Higham et al (58) 2004 157 patients / 90 % chirurgie vasculaire Tropo Ic > 0.1 7.6 %
OR=4.9 pour la mortalité à 1 an
Oscarsson et al (31) 2004
546 patients de plus de 70 ans / 18 % chirurgie orthopédique
Tropo T ≥ 0,02 ‡ 9,7 %
OR=15 pour la mortalité à 1 an
Filipovic et al (59) 2005
173 patients, coronariens / chirurgie vasculaire Tropo Ic > 2 15.6%
Non-‐significatif en analyse multivariée
Le Manach et al (45) 2005
1136 patients, anévrisme Ao abdominale
Tropo Ic > 1.5 † 14% Non connue
12
Martinez et al (60) 2005
467 patients coronariens ou chirurgie vasculaire (90%)
Tropo Ic > 1.5 † 13% Non connue
Motamed et al (61) 2005
150 endarterectomies carotidiennes / 75 sous AG 75 sous anesthésie locale Tropo Ic > 0.5
13% (AG)
1% (AL) Non connue
Feringa et al (62) 2006 272 patients, chirurgie vasculaire Tropo T > 0.1 16.2%
OR=2.6 pour la mortalité à 2 ans
OR=4 pour les complications cardiaques (2ans)
Howell et al (63) 2006
65 patients, chirurgie vasculaire majeure
Tropo Ic > 0.06 § 40% Non connue
Blecha et al (64) 2007
190 patients, chirurgie vasculaire majeure Tropo Ic > 2 11% Non connue
Mouzopoulos et al (65) 2007
90 patients à risque cardio-‐vasculaire, arthroplastie de hanche
Tropo Ic > 3.1 * 8.9% Non connue
Ausset et al (46) 2008 88 patients, arthroplastie de hanche
Tropo Ic > 0.08 ‡ 12.5%
OR=41.4 pour la mortalité à 1 an
OR=17.4 pour les complications cardiaques (1 an)
Ausset et al (66) 2008 75 patients, fracture de hanche
Tropo Ic > 0.08 ‡ 26.7%
HR=3.6 pour la mortalité à 1 an
OR=6.6 pour les complications cardiaques (1 an)
Dawson-‐Bowling et al (67) 2008
108 patients, fracture de hanche Tropo T > 0.03 ‡ 39% Non connue
Fisher et al (68) 2008 238 patients, fracture de hanche
Tropo Ic > 0.06 ‡ 29% Non connue
Chong et al(69) 102 patients, fracture de hanche
Tropo Ic > 0.03 ‡ 52%
OR=12 pour la mortalité à 1 an
* Valeur seuil déterminée par une courbe ROC par rapport à une population présentant un IDM selon les critères OMS.
† 97.5ème percentile d’une population présentant un IDM, selon définition OMS.
‡ 99ème percentile d’une population d’individus en bonne santé.
§ Seuil correspondant à la limite de sensibilité de la méthode de dosage.
13
2.3.4 Causes non ischémiques d’élévation de la troponine :
Une élévation de la Troponine en l’absence de souffrance ischémique peut
survenir dans différentes situations cliniques (Tableau 3). La plupart de ces
situations correspondent cependant à une authentique souffrance myocardique
et la Troponine est alors un marqueur de gravité, corrélé à la mortalité comme
dans l’insuffisance cardiaque instable, l’embolie pulmonaire ou l’insuffisance
rénale terminale (41, 70). Dans des cas plus rares des maladies dysimmunitaires
peuvent perturber les tests basés sur l’identification d’anticorps (41, 70).
Tableau 3 : Principales situations cliniques ou la troponine peut s’élever sans
insuffisance coronarienne (41).
• Myocardite et myopéricardite • Traumatisme cardiaque
(chirurgie cardiaque, contusion, ablation, biopsie, cardioversion, stimulation, défibrillateur implantable)
• Embolie pulmonaire • Sepsis et défaillance viscérale
sévère chez des patients réanimés
• Insuffisance cardiaque sévère • Chimiothérapie
(anthracyclines) • Maladies infiltratives
(amylose, sarcoïdose, sclérodermie)
• Insuffisance rénale sévère • Rhabdomyolyse avec atteinte
cardiaque • Pathologies neurologiques
aiguës (accident vasculaire cérébral, hémorragie)
• Hypertension sévère (prééclampsie)
• Hypotension artérielle (avec arythmies)
• Effort sportif d’endurance extrême (épuisement physique)
2.4 Qualité des soins
2.4.1 Définition
Définir et évaluer la qualité des soins est une démarche essentielle si l'on veut
améliorer le système de santé (71). L’OMS définit la qualité des soins comme la
capacité à « garantir à chaque patient l’assortiment d’actes thérapeutiques lui
assurant le meilleur résultat en termes de santé, conformément à l’état actuel de
la science, au meilleur coût pour le même résultat, au moindre risque
iatrogénique, pour sa plus grande satisfaction en termes de procédures,
14
résultats, contacts humains... » (72). Mais la définition la plus largement
employée vient de l’Institut de médecine des Etats-‐Unis (Institute Of Medicine)
qui précise que la qualité est « la capacité des services de santé destinés aux
individus et aux populations d’augmenter la probabilité d’atteindre les résultats
de santé souhaités, en conformité avec les connaissances professionnelles du
moment » (73). Concrètement, il s’agit de mesurer le degré de concordance entre
les recommandations basées sur l’état actuel des connaissances scientifiques et
les soins réellement prodigués au quotidien. Etudier la qualités des soins, c’est
étudier de multiples aspects : efficacité, sécurité, réactivité, accès et efficience
des soins.
2.4.2 En France Depuis une décennie, on assiste en France à une démarche globale
d’amélioration des soins délivrés aux patients. Améliorer la façon de soigner les
patients est voulue par les patients eux même, par les médecins bien sûr, mais
aussi par les assureurs, le législateur… Cependant, malgré sa réputation « de
meilleur système de santé dans le monde », selon l’OMS, la France accuse un
retard certain dans ce domaine. A l’heure actuelle, Il existe peu de système
d’information permanent sur la qualité et la sécurité des soins dispensés en
France, les données demeurent partielles, contradictoires et difficilement
accessibles. Nous pouvons citer l’indicateur ICALIN mis en place par le ministère
de la santé comme précurseur. L’Indicateur Composite des Activités de Lutte
contre les Infections Nosocomiales (ICALIN) a pour objectif d’inciter les
établissements de santé à mesurer leurs actions dans le domaine de la lutte
contre les infections nosocomiales. Il s’agit d’un indicateur de processus et de
moyens mis en œuvre pour lutter contre les infections nosocomiales, et non une
évaluation du taux d’infection nosocomiale. Il évalue ainsi les activités de lutte
contre les infections nosocomiales d’un établissement de santé et établit un
indice composite des activités de lutte contre les infections nosocomiales
conduisant à un score sur 100. Le score est ensuite complété par une classe de
performance de A à E (suivant la taille, le nombre de lits de l'établissement).
15
2.4.3 La mortalité comme indicateur
Concrètement, pour améliorer ses performances, le praticien doit d’une part
savoir quoi faire en théorie, d’autre part savoir ce qui est fait au quotidien, et
enfin être capable d’identifier les aspects améliorables (74, 75). Pour concevoir
une amélioration, il faut donc posséder tout d’abord la capacité de s’évaluer.
Cette étape d’évaluation constitue la principale difficulté du processus
d’amélioration de la qualité des soins d’une part par la nature « abstraite » des
critères à mesurer, et d’autre part par le défaut de consensus sur la nature des
paramètres à surveiller. Ainsi, mesurer la qualités des soins dispensés fait appel,
selon l’approche, à une grande variété de paramètres : incidence des infections
nosocomiales, mortalité, ou recueil évènements indésirables par exemple. La
mortalité est un exemple d’indicateur de qualité, celui ci a pour avantage d’être
objectif et indiscutable, il est d’ailleurs utilisé dans certains domaines
chirurgicaux (76-‐83). Un des meilleurs exemples de son utilisation est le
programme NSQIP. En 1986, le congrès américain suspectant un défaut dans la
qualité des soins dispensée aux vétérans de l’armée américaine, va obliger par loi
(N°99-‐166) les hôpitaux des anciens combattants à mesurer et publier leur
morbi-‐mortalité chirurgicale. Les premiers résultats, publiés en 1991-‐93 dans le
registre National Veteran Affaires Surgical Risk Study (NVASRS), regroupent 44
hôpitaux et 117 000 interventions (84). A partir de ces constatations, ils
développèrent un modèle de risque pour la morbi-‐mortalité à 30 jours et sa
corrélation à la qualité des soins (85). Parallèlement, est mis en place un
programme d’amélioration de la qualité des soins, le National Surgery Quality
Improvement Program (NSQIP). De 1991 à 1997, 417 944 interventions furent
analysées dans le NSQIP, démontrant que les données du modèle de prédiction
comme la morbidité et la mortalité à 30 jours peuvent être « capturées » dans les
123 établissements des vétérans (86). Ce programme de qualité a permis une
diminution de la mortalité et de la morbidité de 9% et 30% respectivement sur
la période concernée. En 1999, le principe du NSQIP est testé dans 3
établissements privés pour étudier son applicabilité (87). Deux ans plus tard, le
NSQIP est adopté par l’American College of Surgeons (ACS) comme gold standard
pour mesurer et améliorer la morbi-‐mortalité des patients opérés.
16
2.4.4 Autres indicateurs
Cependant, la mortalité comme critère de qualité a pour défaut d'être complexe à
utiliser comme outil d’évaluation des performances car elle est plus influencée
par les caractéristiques des patients telles que l'âge et les comorbidités que par
la qualité des soins. De plus, pour les activités médicales à faible mortalité, il
nécessite de très larges échantillons pour permettre des comparaisons (80, 85,
86, 88-‐90).
Devant ces obstacles, nous nous sommes orientés vers d’autres méthodes
d’évaluation de la qualité issues du monde de l’entreprise ou de l’aéronautique.
Ces méthodes, appelées Total quality management (TQM) ou continuous quality
improvement (CQI), proposent une approche intégrée de l’amélioration de la
qualité des soins (91). Ces méthodes concentrent leurs actions sur les
caractéristiques organisationnelles du système de soins plutôt que le facteur
humain comme facteur décisif d’amélioration des soins délivrés aux patients.
Ainsi, dans une méthode TQM, on mesure la performance d’un système, on
implémente des modifications, puis on mesure l’impact de ces changements.
2.5 Spécificités de la chirurgie orthopédique majeure
Le terme de chirurgie orthopédique majeure désigne l’ensemble des procédures
chirurgicales orthopédiques potentiellement responsables d’une spoliation
sanguine importante (> 1 Concentré Erythrocytaire), associées à une durée
d’intervention longue ou à une morbidité péri opératoire élevée. Il s’agit
classiquement des arthroplastie de genou ou de hanche et leur reprise, ainsi que
les interventions pour fracture du col fémoral (92). Les chirurgies du rachis sur
plusieurs étages, les interventions correctrices de scoliose, la chirurgie de
métastases osseuses sont également des chirurgies orthopédiques majeures. En
France, un quart des anesthésies réalisées concernent la chirurgie orthopédique,
soit 1 500 000 actes annuels, dont 200 000 arthroplasties de genou ou de hanche
(93).
2.5.1 Particularités de l’arthroplastie de hanche :
L’âge moyen de la population cible est supérieur à 60 ans, 100 000 interventions
sont réalisées par an (94). La prise en charge anesthésique des arthroplasties de
17
hanche varie grandement selon le type de technique chirurgicale, sa complexité,
et bien sûr selon le terrain du patient (95). Les interventions comportant une
greffe osseuse, la mise en place d’une prothèse cimentée, à long fût, ou la
présence d’une protrusion du cotyle sont des facteurs de risques chirurgicaux de
saignement. Au plan anesthésique, la symptomatologie de coxarthrose
complique l’évaluation de la tolérance à l’effort du patient, masquant une
pathologie cardio-‐pulmonaire sous jacente, justifiant la mise en œuvre de tests
cardiaques dynamiques non invasifs lors de la phase d’évaluation anesthésique.
En outre, il faut noter que la position du patient, au cours de la chirurgie pour
arthroplastie de hanche, en décubitus latéral, réalise une modification du rapport
ventilation perfusion potentiellement responsable d’hypoxie, a fortiori s’il existe
une pathologie cardio-‐pulmonaire sous–jacente (95). Par ailleurs, sachant que
l’utilisation de ciment pour pose de prothèses de hanche est associée à morbidité
spécifique (complications hémodynamiques aiguës), les prothèses posées en
première intention à l’HIA Percy sont impactées et non cimentées (96-‐98).
2.5.2 Particularités des interventions pour fracture du col fémoral
La fracture du col du fémur est un problème complexe et fréquent aussi bien en
terme de santé publique qu’en terme de prise en charge anesthésique (99, 100).
Ainsi, on estime qu’au cours de la décennie précédente, 1,7 million de patients
dans le monde ont été victimes d’une fracture du col du fémur, ce nombre
s’accroissant rapidement avec le vieillissement de la population. En France, le
nombre annuel de fractures du col du fémur était de 48 000 en 1990 et 80 000
en 2008. Du fait du vieillissement de la population on estime qu'il sera de 150
000 en 2050. La population cible de cette intervention est constituée par des
sujets de plus de 70 ans, le sexe ratio est de un homme pour 4 à 5 femmes (95).
La gravité du pronostic résulte en grande partie de l’accumulation des
comorbidités chez ces patients âgés. La mortalité intra hospitalière est au moins
de 3%, variant selon les structures, la mortalité à 12 mois est de 20%, influencée
par l’âge, la démence, et le score ASA (101). En France, les mortalités à 1 mois, 3
mois et 6 mois, rapportées par l’étude ESCORTE, sont respectivement de 5,2%,
10,6%, et 14,7%. Selon ces taux, environ 8000 patients décèderaient chaque
année en France après une fracture de hanche (102). Globalement, un tiers des
18
patients décède dans l'année suivant l'accident, un tiers devient plus ou moins
dépendant et seulement un tiers récupère une fonction normale.
Les facteurs prédictifs de mortalité après fracture de hanche sont :
• l’âge et le sexe masculin (103-‐105) :
Roberts et al ont montré sur une étude menée entre 1984 et 1998 que la
mortalité à 1 mois et 1 an après fracture de hanche croît avec l’âge des patients,
et diffère selon le sexe du patient. Les hommes ont une mortalité supérieure aux
femmes après fracture de hanche (106).
• l’altération des fonctions supérieures (107)
• l’existence de comorbidités, notamment cardiovasculaires : les scores
ASA III et IV sont associés à un risque relatif entre 2 et 7 (103, 105, 107)
• une autonomie limitée avant la fracture (107, 108).
La question de l'influence de la technique anesthésique sur la morbidité et la
mortalité des patients victimes d’une fracture du col fémoral reste ouverte.
L’ALR neuraxiale n’a pas fait la preuve de sa supériorité en terme de mortalité à
long terme. Il existe certes une diminution des complications thrombo-‐
emboliques, hémorragiques, respiratoires, et de la mortalité d’un tiers par
rapport à l’anesthésie générale, mais ce bénéfice disparait 1 mois après
l’intervention (109-‐111). Plutôt que d’affirmer la supériorité d’une technique sur
l’autre, il convient plus certainement de décider de la stratégie anesthésique au
« cas par cas », en fonction des antécédents du patient (facteurs de risques
spécifiques) et des situations médico-‐chirurgicales, telles que la durée ou le type
de chirurgie.
2.5.3 Particularités de l’arthroplastie de genou
L’arthroplastie de genou concerne généralement des sujets de plus de 60 ans, la
gonarthrose est fréquemment associée au surpoids. Le sexe ratio est neutre,
l’incidence est estimée à 40 000 interventions par an en France (112). Le cadre
étiologique et physiopathologique de l’arthropathie hémophilique est
exceptionnel dans notre structure. Notre équipe réalise l’intervention sous
anesthésie générale en association avec une anesthésie loco régionale du
territoire du nerf fémoral par pose d’un cathéter périnerveux en site inguinal
sous neurostimulation.
19
2.5.4 Gestion des pertes sanguines en chirurgie orthopédique majeure
Le risque et l’importance de pertes sanguines sont caractéristiques de la
chirurgie orthopédique majeure (92). Ces pertes sanguines sont évidemment
plus élevées lors des reprises d’arthroplastie, nécessitant une planification
spécifique (113, 114). Le cas de l’arthroplastie de genou est particulier. Le site
d’intervention étant éloigné de la racine du membre, l’intervention est réalisée
sous garrot, permettant la diminution des pertes sanguines per opératoires.
Cependant, les pertes sanguines sont plus élevées lors de la période post-‐
opératoirerejoignant les niveaux des arthroplasties de hanche (115). Les pertes
sanguines moyennes par type d’intervention ont été évaluées dans le service
d’orthopédie de l’HIA Percy. Le saignement moyen pour arthroplastie hanche ou
genou réglée est de 691 (±316)mL, 909 (±661)mL lors d’une reprise
d’arthroplastie, et 512 (± 305)mL en cas de fracture du col fémoral.
2.5.5 Type d’analgésie réalisée
En accord avec les recommandations, une analgésie multimodale est réalisée
(116). Elle associe des antalgiques de pallier 1 (paracétamol, néfopam, AINS) à la
morphine en titration puis selon un mode d’administration auto-‐contrôlé intra-‐
veineux. Dans le cas particulier de l’arthroplastie de genou, une analgésie loco-‐
régionale est associée. Un cathéter périnerveux fémoral est posé avant
l’induction sous neurostimulation, il est alimenté durant 72 heure par
Ropivacaïne 0,2% permettant une réhabilitation post-‐opératoire accélérée. (117-‐
119)
20
3 Matériels et méthodes Le protocole de cette étude a été soumis au comité d’éthique de l’Hôpital
d’Instruction des Armées Percy et approuvé.
3.1 Critères d’inclusion
Durant 3 ans, tous les patients devant bénéficier d’une chirurgie orthopédique
lourde ont été inclus. Il s’agit des arthroplasties réglées de hanche, de genou, des
reprises d’arthroplasties, ainsi que des chirurgies pour fracture de l’extrémité
supérieure du fémur.
3.2 Critères de non-‐inclusion
Etaient exclus les patients ayant déjà participé à l’étude dans les douze derniers
mois ou ayant déjà une élévation de leur TnIc sérique en phase préopératoire.
3.3 Mesures
Les mesures de TnIc sériques étaient réalisées les matins des trois premiers
jours post-‐opératoires, en même temps qu’un hémogramme (Ortho-‐vitros®,
Orthoclinical, Raritan-‐New Jersey). Le seuil de TnIc considéré comme
pathologique était le 99ème percentile d’une population normale donné par le
constructeur de l’automate de mesure (120).
L’âge, le sexe, le score ASA étaient collectés. Les éléments anamnestiques
constitutifs de l’index de risque cardiovasculaire (CRI) défini par Lee et col (50)
étaient systématiquement notés. Les traitements cardiotropes (Betabloquants,
IEC, Inhibiteurs calciques) suivis par les patients ont été colligés. Ces traitements
sont poursuivis selon l’analyse de chaque anesthésiste lors de la consultation
d’anesthésie, les traitements par statines sont systématiquement poursuivis.
3.4 Suivi et devenir
Les patients ont tous été contactés par téléphone 12 mois après l’intervention
chirurgicale et répondu à un questionnaire semi-‐structuré destiné à rechercher
un évènement cardiaque grave. (Annexe 3)
21
3.5 Intervention sur la qualité des soins
L’intervention sur la qualité des soins a été étudié au travers de deux phases
successives, une phase 1 (P1) observationnelle et une phase 2 (P2)
interventionnelle.
Lors de P1, les soins périopératoires étaient laissés à la discrétion de
l’anesthésiste en charge du patient, sans modifications liées à l’étude.
Après 16 mois d’enquête (P1), un premier bilan portant sur la fréquence des
élévations de TnIc et sa corrélation avec la morbidité intra-‐hospitaliére a été
réalisé. En parallèle, la littérature portant sur le risque ischémique
postopératoire a été analysée et plusieurs éléments de risque ont été identifiés :
la douleur, l’anémie, l’hypoxémie, l’hypotension, la tachycardie, le sevrage des
béta-‐bloquants, les troubles de coagulation et l’hyperglycémie (Figure 1).
Les éléments choisis à l’issue de l’Analyse des Modes de Défaillance, de leurs
Effets, et de leur Criticité (AMDEC) ont été l’anémie, l’hypoxémie, l’hypotension,
la tachycardie, le sevrage des béta-‐bloquants, et l’hyperglycémie (Figures 2 et 3).
Ces choix ont été réalisés en prenant en compte la gravité, la fréquence, et la
détectabilité de ces évènements. Le processus de soins des patients opérés de
chirurgie orthopédique majeure a été représenté sur un logigramme afin de
déterminer les meilleures opportunités d’action sur les éléments choisis à l’issue
de l’AMDEC (Figures 4, 5, 6).
Deux phases propices aux interventions ciblées ont été identifiées. La première
était la phase d’évaluation préopératoire avec deux actions : identification des
patients sous béta-‐bloquants, engagement des anesthésistes réanimateurs à
réaliser la consultation d’anesthésie des patients victimes de fracture de hanche
dés l’admission afin d’avoir la meilleure opportunité d’interroger le patient avant
l’apparition d’une dysfonction cognitive et de rencontrer les proches. La seconde
opportunité pour les interventions destinées à agir sur le risque d’ischémie
myocardique était les prescriptions postopératoires où pouvaient être anticipées
le traitement et/ou la prévention de l’anémie, de l’hypotension, de la tachycardie,
et des hyperglycémies (Annexe 1 : protocole de prescriptions post-‐opératoires).
22
Figure 2 : Analyse des modes de défaillance et de leur criticité conduisant à la
survenue d'une ischémie myocardique postopératoire : Graphique
Gravité/fréquence.
(FC : Tachycardie ; ➘TA : hypotension artérielle ; Insul : Hyperglycémie ; Doul : Douleur postopératoire ; Coag : Hypercoagulabilité ; β-‐ : Sevrage en béta-‐
bloquants ; CGR : Anémie postopératoire)
23
Figure 3 : Analyse des modes de défaillance et de leur criticité conduisant à la
survenue d'une ischémie myocardique postopératoire : Graphique
détectabilité/fréquence.
(FC : Tachycardie ; ➘TA : hypotension artérielle ; Insul : Hyperglycémie ; Doul :
Douleur postopératoire ; Coag : Hypercoagulabilité ; β-‐ : Sevrage en béta-‐
bloquants ; CGR : Anémie postopératoire)
24
Figure 4 : Logigramme situant dans le parcours d'un patient victime d'une
fracture de hanche les opportunités d'assurer la poursuite d'un traitement béta-‐
bloquant
Figure 5 : Logigramme situant dans le parcours d'un patient victime d'une
fracture de hanche les périodes les plus à risque d'hypoxie.
25
Figure 6 : Logigramme situant dans le parcours d'un patient victime d'une
fracture de hanche les périodes les plus à risque de présenter une hypotension
artérielle non traitée.
3.6 Analyse statistique
Les caractéristiques préopératoires des patients ont été comparées entre les
groupes de patients ayant ou non présenté une élévation de la TnIc
postopératoire ainsi qu’entre les deux phases de l’étude. Les variables continues
ont été comparées en utilisant le test t de student et les variables discontinues
avec le test du chi2 ou le test exact de Fischer. Pour rechercher les facteurs
associés à la survenue d’une complication cardiovasculaire majeure ou d’un
décés, une analyse multivariée par régression logistique a été réalisée pour
vérifier l’indépendance des facteurs identifiés au cours de l’analyse univariée
comme statistiquement significatifs avec un p
26
l’élévation de TnIc au dessus du seuil de référence. Les complications
cardiovasculaires majeures regroupent : le syndrome coronarien aigu,
l’insuffisance cardiaque aigue, une procédure de revascularisation coronaire, ou
un décès d’origine cardiaque. La survenue d’un décès, toute cause confondue, est
un critère de jugement secondaire.
27
4 Résultats
4.1 Effectifs et caractéristiques des populations étudiées :
439 patients bénéficièrent d’une chirurgie orthopédique majeure au cours de la
période d’étude (octobre 2003 à octobre 2006). 61 furent exclus : 23 patients
pour une précédente inclusion au cours des 12 derniers mois et 38 pour données
manquantes (pas de dosage de TnIc). Ainsi, 378 interventions et 355 patients
furent analysées, 123 pour la phase 1 et 255 pour la phase 2 (tableau 4 et annexe
2). L’analyse statistique ne retrouve pas de différence concernant les
caractéristiques de la population (sexe, âge, score ASA, score CRI), hormis pour
le type de chirurgie. En effet, on observe plus de reprise d’arthroplastie durant la
phase 1 par rapport à la phase 2 (15,4 vs 6,2%, p=0,0178), et plus
d’arthroplasties réglées lors de la phase 2 par rapport à la phase 1 (60 vs 70%).
28
Tableau 4 :
Caractéristiques des populations
étudiées (pourcentage entre
parenthèses).
P1 n=130
P2 n=105
p
Age (ans) 73±11,8 72±13,3 ns
Sexe ratio (M/F)
55/75 112/134 ns
Type d’anesthésie :
Anesthésie générale
112 280
Anesthésie Loco-‐régionale
2 5
Antécédents
Coronaropathie 15 (12) 30 (13)
Insuffisance rénale
23 (18) 15 (6)
Insuffisance cardiaque
4 (3) 5 (2)
AVC 7 (5) 14 (6)
Dyslipidémie 37 (29) 64 (27)
Diabète 10 (8) 26 (11)
Tabagisme actif
11 (9) 22 (9)
HTA 62 (50) 112 (47)
ns
Traitements :
Beta-‐bloquants 27 (21) 48 (18)
Inhibiteurs calciques
25 (20) 44 (18)
Antagonistes Angiotensine II
9 (7) 24 (10)
Dérivés nitrés 7 (5) 11 (5)
Anti aggrégants plaquettaires
23 (18) 55 (23)
IEC 29 (22) 51 (21)
ns
ASA Classification:
ASA 1 13 (10) 26 (11)
ASA 2 76 (59) 147 (62)
ASA 3 35 (27) 63 (26)
ASA 4 5 (4) 3 (1)
ns
Cardiac Risk Index :
CRI 1 93 (72) 159 (67)
CRI 2 22 (17) 54 (23)
CRI 3 11 (9) 21 (8)
CRI 4 3 (2) 4 (2)
ns
Chirurgie:
Arthoplastie réglée
79 (61) 175 (71)
Facture du col fémoral
30 (23) 54 (22)
Reprise d’arthroplastie
20 (15.5)
17 (7)
0,02
4.2 Troponine
Une élévation de la troponine au delà du seuil pathologique a été observée dans
21 cas (5,5%) au cours des trois premiers jours post opératoires. L’incidence de
l’élévation de TnIc baisse de 8,9 à 3,9% (p=0,0458) entre la phase 1 et la phase 2
(Figure 7).
29
Figure 7 : Incidence de l’élévation de TnIc, des complications cardiovasculaires
tardives (MACE), et de la mortalité toutes causes confondues selon la phase de
l’étude.
4.3 Complications cardiovasculaires
Une complication cardiovasculaire grave a été observée chez 15 patients soit une
incidence de 3,9% (Tableau 5). L’incidence des complications cardiovasculaires
sévères sont significativement réduites après initialisation du programme
d’amélioration des soins (8,1% vs 2,0% p=0,001) (Figures 7 et 8). En analyse
univariée, les items suivant étaient associés à la survenue de complications
cardiovasculaires sévères : l’âge, le score ASA, le Cardiac Risk Index, le type de
chirurgie, et l’élévation post-‐opératoirede Troponine Ic. Après analyse selon le
model de Cox prenant en compte l’âge, le sexe, le score ASA, le Cardiac Risk
Index, le type de chirurgie, et l’élévation post-‐opératoirede Troponine Ic, seul le
sexe masculin (HR=3,6 -‐IC 95 : 1,1 – 11,1), la phase 1 (HR=4,5 -‐IC 95 : 1.4 -‐ 14, 3)
et l’élévation post-‐opératoirede Troponine Ic (HR=6,4 -‐IC 95 : 1,9 – 21,5 ) sont
des facteurs prédictifs de survenue de complications (Tableau 6).
30
Tableau 5 : Description des complications cardiovasculaires enregistrées (RCRI :
revised cardiac risk index, PH : prothèse de hanche, RPH : remplacement de
prothèse de hanche, PG : prothèse de genou, RPTG : remplacement de prothèse
de genou, SCA : syndrome coronarien aigu).
Phase Résumé clinique Type de chirurgie
TnIc positive
Type de complication cardiaque
P1 Homme, 65 ans, ASA 2, RCRI 1
PH Oui SCA, J 43
P1 Femme, 89 ans, ASA 4, RCRI 4
Fracture col fémoral
Oui Décès cardiaque, J2
P1 Homme, 97 ans, ASA 3, RCRI 3
Fracture col fémoral
Non Décès cardiaque, J 305
P1 Femme, 96 ans, ASA 3, RCRI 3
RPH Non Décès cardiaque, J49
P1 Femme, 94 ans, ASA 3, RCRI 4
Fracture col fémoral
Non Décès cardiaque, J49
P1 Femme, 92 ans, ASA 2, RCRI 2
Fracture col fémoral
Oui Décès cardiaque, J90
P1 Homme, 54 ans, ASA 3, RCRI 1
Ostéotomie genou
Oui Remplacement Valve Ao, J116
P1 Homme, 75 ans, ASA 4, RCRI 2
Fracture col fémoral
Oui SCA, J2
P1 Homme, 82 ans, ASA 4, RCRI 3
RPH Oui Décès d’origine cardiaque, J13
P1 Homme, 75 ans, ASA 3, RCRI 2
PH Non Insuffisance cardiaque, J4
P2 Femme, 93 ans, ASA 3, RCRI 2
Fracture col fémoral
Non Décés d’origine cardiaque, J24
P2 Homme, 63 ans, ASA 2, RCRI 1
RPG Non SCA, J199
P2 Femme, 80 ans, ASA 2, RCRI 2
PG Non SCA, J74
P2 Femme, 96 ans, ASA 3, RCRI 3
Fracture col fémoral
Non SCA et Insuffisance cardiaque, J252
P2 Homme, 98 ans, ASA 2, RCRI 1
PG Non SCA, J73
31
Tableau 6 : Facteurs associés à la survenue d’une complication cardiovasculaire dans l’année. (HR : hazard ratio)
Analyse Univariée (données brutes)
Analyse multivariée (ajustée selon
l’âge, le score CRI, ASA, le type de chirurgie, et
l’élévation de TnIc postop)
Incidence de complications
cardiovasculaires n (%)
HR (95%CI)
HR (95%CI)
Phase 1 10 (8,1) 4,2 (1,4-‐12,4) 4,5 (1,4-‐14,3)
2 5 (1,9) Ref Ref
Sexe Femme 7 (3,4) Ref
Homme 8 (4,7) 1,4 (0,5-‐3,8)
Type de chirurgie
Arthroplastie réglée 4 (1,6) Ref Ref
Fracture de hanche 8 (9) 6,3 (1,9-‐21) 1,4 (0,3-‐6,4)
Reprise d’arthroplastie 3 (8,8) 5,9 (1,3-‐26,4) 1,5 (0,3-‐9)
Age 1,1 (1-‐1,1) 1 (0,98-‐1,1)
Revised Cardiac Risk Index
Classe 1 4 (1,5) Ref Ref
Classe 2 5 (6,7) 4,6 (1,2-‐17) 2,7 (0,6-‐12,3)
Classe 3 4 (11,8) 8,4 (2,1-‐33,6) 3 (0,5-‐17,2)
Classe 4 2 (28,6) 24,7 (4,5-‐135) 6,6 (0,7-‐58,7)
Score ASA
1 – 2 5 (1,8) Ref Ref
3 7 (6,9) 4 (1,2-‐12,6) 1,5 (0,4-‐5,7)
4 3 (33,3) 27,8 (6,6-‐117) 5,7 (0,9-‐37,8)
Elévation postopératoire de
TnIc
6 (28,6) 13 (4,6-‐36,8) 6,4 (1,9-‐21,5)
4.4 Mortalité
A un an, 21 décès sont rapportés pour 378 procédures (5,5%). On note une
tendance nette à la diminution de la mortalité toute cause de la phase 1 à la
phase 2 qui n’atteint toutefois pas le seuil de significativité statistique: 10/123
(8,3%) pour P1 et 11/255 (4,4%) pour P2 (p=0,136). Après analyse selon un
modèle de Cox, les facteurs indépendants associés à un décès sont : le score ASA
III (HR=5.1 - CI 95% 1,3 – 19,8) et IV (HR=22 - CI 95% 4,4 – 108) et un CRI IV
(HR=4.4 - CI 95% 1 – 19) (Tableau 7 et Figures 7 et 8).
32
Tableau 7 : Facteurs associés à la survenue d’un décès, toutes causes confondues,
dans l’année. (HR : Hazard Ratio)
Analyse Univariée
(données brutes)
Analyse multivariée (ajustée selon l’âge, le score CRI, ASA, le type de chirurgie et l’élévation de TnIc postop)
Décés
n (%)
HR
(95%CI)
HR
(95%CI)
Phase 1 10 (8,3) 1,9 (0,8-‐4,5) 1,7 (0,6-‐4,4)
2 11 (4,4) Ref Ref
Sexe Femme 12 (5,9) Ref
Homme 9 (5,4) 0,9 (0,4-‐2,1)
Type de chirurgie
Arthroplastie réglée ou reprise d’arthroplastie
3 (1) Ref Ref
Fracture de hanche 18 (21,4) 22 (6,6-‐75) 1,4 (0,3-‐6,4)
Age 1,1 (1-‐1,2) 1 (0,9-‐1,1)
Revised Cardiac Risk Index
Classe 1 4 (2,3) Ref Ref
Classe 2 6 (6,9) 4,6 (1,2-‐17) 1,5 (0,4-‐5,6)
Classe 3 5 (18,8) 8,4 (2,1-‐33,6) 1 (0,3-‐3,5)
Classe 4 6 (57,1) 36 (10-‐128) 4,4 (1-‐19)
Score ASA
1 – 2 3 (1,1) Ref Ref
3 12 (12,2) 94 (23,3-‐78) 5,1 (1,3-‐19,8)
4 6 (66,7) 11,3 (3,2-‐42) 22 (4,4-‐108)
Elévation postopératoire de TnIc
4 (19) 4,4 (1,5-‐13) 1,2 (0,3-‐4)
33
Figure 8 : survie actuariée (Kaplan meyer) en fonction des phases de l’étude.
8.a : Incidence de patients sans complications cardiaques majeures (MACE) selon
l’élévation ou non de la TnIc en période post opératoire.
8.b : Survie cumulée selon l’élévation ou non de la TnIc en post opératoire.
50
60
70
80
90
100
Sur
vie
cum
ulée
(%)
0 50 100 150 200 250 300 350 400
Durée (jours)
MACE/TnIc
TnIc pos
TnIc neg
P < 0.0001 (lograng test)
50
60
70
80
90
100
Sur
vie
cum
ulée
(%)
0 50 100 150 200 250 300 350
Durée (jours)
400
TnIc pos
TnIc neg
P < 0.0036 (lograng test)
Décès/TnIc
34
8.c : Incidence de patients sans complications cardiaques majeures (MACE) selon
la phase de l’étude.
8.d : survie cumulée selon la phase de l’étude.
0 50 100 150 200 250 300 350
Durée (jours)
400
50
60
70
80
90
100
Sur
vie
cum
ulée
(%)
MACE/Phase
Phase 1
Phase 2
P = 0.0042 (lograng test)
50
60
70
80
90
100
Sur
vie
cum
ulée
(%)
0 50 100 150 200 250 300 350 Durée (jours)
400
Décès/Phase
Phase 1
Phase 2
P = 0.1301 (lograng test)
35
4.5 Qualité des soins
Sans surprise, « l’intensité de monitorage » a été améliorée entre P1 et P2
(annexe 3). Le nombre moyen de mesures s’est élevé pour l’oxymétrie de pouls
(p=0.001) et la pression artérielle (p=0.014). Un nombre supérieur de patient a
reçu de l’insuline et de l’oxygène pendant la phase 2 : 26.4% vs 6.4% (p=0.001)
et 90% vs 79% (p=0.047) pour P2 et P1 respectivement. Il n’existait pas de
différences statistiquement significatives concernant le nombre moyen de
mesure de la glycémie capillaire, ni pour la quantité de liquide de remplissage
vasculaire administré, ni pour le nombre d’hypoxémie et d’hypotension
détectées lors de la période post-‐opératoire (Tableau 8).
36
Tableau 8 : Qualité des soins pour les trois jours post opératoires.
P1 P2 p*
Prescrit :
Oxygénothérapie (%) 60 81
37
5 Discussion
5.1 Que peut-‐on retenir ?
5.1.1 Qualité des soins
Nous avons choisi d’améliorer la qualité des soins postopératoires en améliorant
différents paramètres plutôt qu’un seul, afin de tenter d’augmenter l’effet
potentiel observable et donc sa détection. Nous pensons, comme d’autres
auteurs (91), que pour améliorer le devenir de nos patients, il existe très
certainement plus de bénéfices à bien délivrer les soins déjà connus que d’en
trouver de nouveaux.
Le premier volet de cette étude a permis de valider notre critère d’évaluation de
la qualité : l’incidence de l’élévation de la Troponine post-‐opératoire en chirurgie
orthopédique majeure (1, 46, 66, 121, 122). Ainsi, sur une période de 18 mois,
l’incidence de l’ischémie myocardique péri opératoire en chirurgie orthopédique
majeure fut mesurée au moyen de dosages répétés de TnIc, avant et après un
programme d’amélioration de la qualité des soins. Une réduction de l’incidence
de l’élévation de la TnIc a été mise en évidence entre les deux phases de l’étude,
permettant de proposer le dosage répété de la TnIc en post-‐opératoire de
chirurgie orthopédique majeure comme critère d’évaluation de la qualité des
soins. Ces données sont confortées par la littérature en chirurgie vasculaire mais
également en chirurgie orthopédique (33, 34, 63, 68, 123).
5.1.2 Critères cardiovasculaires
Par ailleurs L’analyse des résultats nous permet de dégager trois points
importants concernant l’ischémie myocardique pér-‐opératoire :
Premièrement, l’incidence des complications ischémiques périopératoires est
élevée, atteignant 5,5% après chirurgie orthopédique majeure (8,9% avant
démarche qualité).
Deuxièmement, l’introduction d’un programme d’amélioration des soins post-‐
opératoiresa permis de réduire l’incidence des complications cardiovasculaires
38
précoces et tardives. Cette corrélation mise en évidence dans l’étude est
comparable, dans le principe de variation de la qualité des soins, à d’autres
études montrant une variation de la mortalité selon le jour d’intervention
(vendredi comparé au reste de la semaine, semaine comparé au weekend ou
vacances) (124, 125). Par contre, la corrélation entre la qualité des soins
postopératoires immédiats et la réduction des complications cardiovasculaires
précoces et différées est inédite.
Troisièmement, cette étude a confirmé le lien existant entre la survenue d’une
souffrance myocardique ischémique péri-‐opératoire et la survenue de
complications cardiovasculaires dans l’année. Cette relation a déjà été décrite
pour les patients à risque cardiaque élevé, pour la chirurgie vasculaire, mais
aussi récemment après chirurgie orthopédique majeure (31-‐33, 45, 46, 126,
127). Ceci pose directement la question d’une corrélation directe entre
l’ischémie péri-‐opératoire et la morbi-‐mortalité cardiovasculaire différée.
Devereaux envisage dans un éditorial récent deux explications à ce phénomène
(128). Dans le premier cas, on considère que les deux groupes de patients (avec
ou sans ischémie péri opératoire) possèdent la même incidence de maladies
cardiovasculaire et la même prédisposition à la survenue d’une complication
cardiovasculaire tardive avant chirurgie. Le déroulement péri opératoire modifie
alors le pronostic à long terme des patients. Dans l’autre cas, on considère que la
survenue d’une ischémie myocardique péri opératoire n’est que la traduction
d’une pathologie cardiovasculaire sous-‐jacente méconnue expliquant ainsi la
dégradation du pronostic associé à ces patients.