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du mardi 14 au jeudi 16 mai 2013 ESEN - POITIERS école supérieure de l’éducation nationale, de l’enseignement supérieur et de la recherche Colloque international e-éducation Place des apprenants et repositionnement des enseignants à l’ère des réseaux sociaux de formation Les actes numériques Articles, émissions, interviews, conférences et 30 propositions pour agir...

Actes numériques du colloque international e-éducation "Place des apprenants et repositionnement des enseignants à l'ère des réseaux sociaux de formation", ESENESR, mai 2013

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du mardi 14 au jeudi 16 mai 2013 ESEN - POITIERS

école supérieure de l’éducationnationale, de l’enseignementsupérieur et de la recherche

école supérieure de l’éducationnationale, de l’enseignementsupérieur et de la recherche

Colloque international e-éducation

Place des apprenants et repositionnementdes enseignantsà l’ère des réseaux sociaux de formation

Les actes numériques

Articles, émissions, interviews, conférences

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UN DOCUMENT multimodal pour...

P2 - © ESEN, Colloque international e-éducation, 2013

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Les émissions de webradio sont accessibles au format mp3 ; les interviews vous sont proposées au format mp4 compatible IOS et Android.

Lire • les articles préparatoires aux interventions des conférenciers, • les synthèses des réflexions conduites pendant les quatre séquences d’ateliers du colloque.

Écouter sur ESEN webradio, • les trois émissions d’«Échafaudages » enregistrées pendant le colloque.

Visionnersur ESEN TV,• les interviews des conférenciers réalisées au cours du colloque sur leurs domaines d’expertise, • les conférences prononcées dans l’amphithéâtre de l’ESEN.

Agir• sur votre terrain professionnel, à partir des propositions émises au cours des ateliers et synthétisées à la fin de ce document.

Colloque international e-éducation

© ESEN, Colloque international e-éducation, 2013 - P3

Les ressources audio et vidéo En complément des QR Codes présents dans le document, vous trouverez ci-dessous les liens vers l’ensemble des ressources.

« Échafaudages », le magazine radio de l’ESEN dédié à l’ingénierie de la formation des adultes et aux nouvelles modalités de formation...

Le lien social à l’ère du web 2.0 - http://streaming.cndp.fr/vod/esen/fad/webradio/Echafaudages2.mp3Apprendre et enseigner à l’ère du numérique - http://streaming.cndp.fr/vod/esen/fad/webradio/Echafaudages3.mp3Apprendre en réseau et à distance - http://streaming.cndp.fr/vod/esen/fad/webradio/Echafaudages4.mp3

Pourquoi « Échafaudages » ? Écoutez la première émission... http://streaming.cndp.fr/vod/esen/fad/webradio/Echafaudages1.mp3

Remerciements

Les interviews des conférenciers...

Milad DOUEIHI - http://streaming.cndp.fr/vod/esen/fad/e-education/doueihi.mp4Antonio CASILLI - http://streaming.cndp.fr/vod/esen/fad/e-education/casilli.mp4Francis JAURÉGUIBERRY - http://streaming.cndp.fr/vod/esen/fad/e-education/jaureguiberry.mp4Bernadette CHARLIER - http://streaming.cndp.fr/vod/esen/fad/e-education/charlier.mp4France HENRI - http://streaming.cndp.fr/vod/esen/fad/e-education/henri.mp4Terry ANDERSON - http://streaming.cndp.fr/vod/esen/fad/e-education/anderson.mp4Jérôme ENEAU - http://streaming.cndp.fr/vod/esen/fad/e-education/eneau.mp4Annie JÉZÉGOU - http://streaming.cndp.fr/vod/esen/fad/jezegou.mp4Sébastien MOREAU - http://streaming.cndp.fr/vod/esen/fad/moreau.mp4

Retrouvez également les conférences chapitrées de ce colloque sur le site de l’ESEN http://www.esen.education.fr/fr/ressources-par-type/conferences-en-ligne/

L’équipe d’organisation du colloque tient à remercier vivement :• l’ensemble des conférenciers pour la qualité de leurs productions et de leurs prestations, • les animateurs d’ateliers (Stéphane AYMARD, Thierry BLASQUEZ, Anne-Cécile FRANC, Cyril MAUGÉ, Malika MEZIA-DI, Jacques RODET, Jean-François TAVERNIER, Sylvain VACARESSE et Mickaël VILBENOIT),• les participants ayant accepté d’assurer la prise de notes en vue de la production collaborative,• les différentes équipes de l’ESEN pour la préparation et l’organisation de la manifestation.

Remerciements à Jean-Paul MOIRAUD et Sébastien MOREAU pour la qualité de leurs synthèses et pour le temps qu’il y ont consacré. Remerciements particuliers à Christophe JEUNESSE pour nous avoir accompagnés pendant plus d’un an dans l’élaboration de ce colloque.

Entre le plan « Faire entrer l’école dans l’ère du numé-rique » proposé par le ministre de l’éducation nationale, et le plan « France Université Numérique » (FUN) lancé par la ministre de l’enseignement supérieur et la recherche,

force est de constater que le numérique occupe désormais une place cen-trale dans les actions en faveur de l’amélioration de notre système éducatif. Ces deux plans ont en commun la volonté d’inscrire le numérique au cœur des pratiques d’enseignement, d’en faire un outil d’usage aussi fréquent que le tableau noir au service de l’acte pédagogique et de la réussite des élèves comme des étudiants. Cette volonté a des conséquences importantes pour tous les acteurs du système éducatif, et principalement pour les enseignants qui doivent désormais repenser leurs approches pédagogiques.

Le numérique maîtrisé et bien pensé permet de développer des pratiques pédagogiques attrac-tives, innovantes et efficaces. Il doit renforcer le plaisir d’apprendre et d’aller à l’école. Il permet également de diversifier les parcours et de s’adap-ter à des rythmes d’apprentissage différents. Qu’ils soient d’ordre éducatifs, économiques, sociaux ou sociétaux, les enjeux sont évidemment d’enver-gure. Former des citoyens capables d’agir de fa-çon responsable et autonome dans ces contrées numériques parfois encore inexplorées, favoriser l’employabilité par la maîtrise de compétences transversales, développer la compétitivité et l’at-tractivité des universités dans un système mon-dialisé d’accès à la connaissance et aux savoirs, préparer l’économie de demain… sont autant de raisons qui plaident pour une généralisation des usages du numérique dans le système scolaire et universitaire.

Généraliser oui mais comment ? Il est désormais acquis que l’entrée techniciste a montré ses li-mites. Pas moins de 15 plans en faveur du numé-rique ont été déployés depuis 1970. Certes maté-

riels et réseaux doivent être présents, maintenus et évoluer pour permettre les usages ; cette condition première est nécessaire mais pas suffisante. C’est bien l’approche pédagogique et la conception même de l’acte d’apprendre que bouleverse le nu-mérique. À l’heure où la formation en face à face et à distance (formation hybride) entre progres-sivement dans les plans de formation de certains personnels, où les usages des ENT se généralisent pour les élèves et leurs parents , il y a urgence à penser, voire inventer, des modèles pédagogiques intégrant le numérique en lien avec la réalité de la société actuelle ; mais aussi, certainement, dans l’optique de préparer celle de demain. C’est pourquoi ce colloque vous invite à appré-hender la problématique du repositionnement des élèves, des étudiants et des enseignants au travers d’une approche qui place le sujet, l’individu et son environnement, au cœur de la réflexion.

Dans cette société « connectée » en permanence, peuplée d’élèves et d’étudiants entretenant un rapport différent au savoir et au temps, l’ESEN souhaite apporter sa contribution à la réflexion sur l’évolution du système éducatif. La formation des cadres des deux ministères intègrera désormais systématiquement des modalités pédagogiques numériques (parcours hybrides scénarisés, es-paces collaboratifs, parcours de professionna-lisation liant espaces numérique, professionnel et de formation…). L’investissement dans cette nouvelle ingénierie est indispensable pour former les cadres de demain qui devront accompagner ces évolutions. C’est bien par la pratique effec-tive du numérique qu’ils pourront ainsi porter un regard critique sur les usages réels des acteurs de l’école. Ce colloque, réunissant des collègues de tous horizons, veut ainsi poursuivre le travail de sensibilisation et de réflexion engagé depuis plu-sieurs années dans cette école.

Jean-Marie PANAZOL Inspecteur général de l’éducation nationale

Directeur de l’ESEN

ÉditorialLe numérique au service de l’apprentissage

« C’est bien l’approche

pédagogiqueet la conception même de l’acte

d’apprendre que bouleverse le numérique. »

P4 - © ESEN, Colloque international e-éducation, 2013

 

Enjeux sociétaux à l’ère du numérique L’humanisme numérique Milad DOUEIHI, université de Laval - Québec page 7 Le lien social à l’ère du web 2.0 Antonio CASILLI, Télécom Paris Tech - France page 11Francis JAURÉGUIBERRY, université de Pau - France page 15 Écoutez Échafaudages n°2 sur ESEN webradio Antonio CASILLI, Milad DOUEIHI et Francis JAURÉGUIBERRY page 18

Apprendre et enseigner à l’ère du numérique La distance dans le processus de formation Bernadette CHARLIER, université de Fribourg - Suisse page 21France HENRI, télé-université - Québec page 25 Des campus virtuels aux environnements personnels dapprentissage Daniel PERAYA, université de Genève - Suisse page 29France HENRI, télé-université - Québec page 33

Écoutez Échafaudages n°3 sur ESEN webradio Bernadette CHARLIER, France HENRI, Sébastien MOREAU et Jean-François TAVERNIER page 36

Apprendre en réseau et à distance Trouver sa place dans le nouvel univers de l’enseignement et des apprentissages en réseau Terry ANDERSON, université d’Athabasca - Canada page 39 La distance transactionnelle : les deux variables de « l’ouverture » et du « dialogue » ...Annie JÉZÉGOU, école des Mines de Nantes - France page 43Jérôme ENEAU, université de Rennes 2 - France page 45

Écoutez Échafaudages n°4 sur ESEN webradio Jérome ENEAU, Annie JÉZÉGOU et Christophe JEUNESSE page 48 Plateforme pédagogique, les points de vue de quatre acteurs Sébastien MOREAU, université de Tours - France page 51

30 propositions pour agir... page 61

Au programme...

Colloque international e-éducation

© ESEN, Colloque international e-éducation, 2013 - P5

La machine fait rêver mais c’est l’homme qui rêve.

Milad Doueihi, historien des religions et titulaire de la Chaire de recherches sur les cultures numériques, université de Laval (Québec).

Milad Doueihi est l’auteur de plusieurs ouvrages : Une histoire perverse du cœur humain, Le paradis terrestre. Mythes et philosophies. Solitude de l’incomparable. Augustin et Spinoza, La grande conversion numérique, suivie de Rêveries d’un promeneur numé-rique ([2007] 2011), Pour un humanisme numérique (2011), Qu’est-ce que le numérique (2013), L’Homme et l’Oiseau. La Fauconnerie (Octobre 2013). En 2014 paraîtra Un imaginaire de l’intelligence. En préparation : La rage secrète de l’étranger. Nietzsche.

À propos deMilad

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© ESEN, Colloque international e-éducation, 2013 - P7

Milad DOUEIHI

L’humanisme numérique est le résultat d’une convergence inédite entre notre héritage culturel complexe et une tech-nique devenue un lieu de sociabilité sans précédent. Une convergence qui, au lieu de tout simplement renouer l’an-tique et l’actuel, redistribue les concepts, les catégories et les objets, tout comme les comportements et les pratiques qui leur sont associés, dans un environnement nouveau. L’huma-nisme numérique est l’affirmation que la technique actuelle, dans sa dimension globale, est une culture, dans le sens où elle met en place un nouveau contexte, à l’échelle mondiale.

Une culture car le numérique, et ce malgré une forte compo-sante technique qu’il faut toujours interroger et sans cesse surveiller (car elle est l’agent d’une volonté économique), est en train de devenir une civilisation qui se distingue par la ma-nière dont elle modifie nos regards sur les objets, les relations et les valeurs, et qui se caractérise par les nouvelles pers-pectives qu’elle introduit dans le champ de l’activité humaine.

Le numérique est un mot qui est passé rapidement dans notre vocabulaire. Mais que désigne-t-il proprement ? Comment com-prendre et définir cet objet, ce phénomène qui semble destiné à transformer notre quotidien et à re-configurer notre réalité ?

Colloque international e-éducation

La technique actuelle dans sa dimen-sion globale est une culture.

L’humanisme numérique

P8 - © ESEN, Colloque international e-éducation, 2013

Les dictionnaires restent un peu perplexes devant le numérique et dans leurs définitions, ils ne désignent souvent que l’aspect étymologique et technique, un secteur associé au calcul, au nombre et surtout aux dispositifs opposés à l’analogique. Mais dans notre usage, le numérique recouvre bien autre chose. Si je me pose la question, c’est qu’il me semble qu’elle soulève une difficulté particulière et, à mon avis, inédite, et qui est inhérente au numérique dans son déploiement actuel, mais une difficulté éclairante car elle est capable de nous permettre de mieux cerner cette complexité. Une difficulté à la fois épistémolo-gique, institutionnelle et sociale, voire économique et politique. Si toutes les disciplines académiques traditionnelles sont tou-chées par le numérique et sont contraintes de repenser leurs méthodes et surtout leurs valeurs, ce n’est qu’un symptôme de la mutation globale portée par le numérique et qui est en effet l’objet premier de nos travaux.

Il va de soi qu’on n’a point l’intention de pro-poser une quelconque définition programma-tique du numérique. Par contre, la notion d’hu-manisme numérique1, en partie à cause de sa fluidité et de sa spécificité historique, son ancrage dans la longue durée, est ca-pable de nous permettre de mieux apprécier la trans-formation culturelle induite par le numérique, surtout dans un contexte dans lequel il est de plus en plus difficile de trouver un point de repère grâce auquel un regard à la fois prospectif et vigilant bénéficiera d’un contexte privilégié. En fait, cette difficulté est constitutive de la culture numérique. Elle reflète le fait que le numérique, de par sa nature même, opère des ruptures dans une continuité apparente, portant sur des valeurs, des objets et des pratiques culturelles, à la fois nous offrant ce qui semble de simples reprises ou de modestes modifications ou transpositions de formes ou de formats (le cas du livre imprimé est ici

1 Je me permets de renvoyer ici à mon ouvrage Pour un huma-nisme numérique (Seuil, 2011).

exemplaire de cette propriété du numérique à dou-bler, en tout cas dans un premier temps, tout ce qu’il convertit). Une telle conversion est continue et, par le fait de la socialisation des pratiques numériques, elle émane en grande partie du statut complexe du code informatique dans l’état actuel de notre civilisation.

Le code, agent et vecteur de cette nouvelle civilisation, on l’a bien dit, constitue une rupture avec certaines de nos pratiques lettrées ; il fragilise radicalement nos traditions juridiques, nos modèles économiques et notre rapport avec l’écriture et tout ce qu’elle a au-torisé et rendu possible. L’humanisme numérique est,

dans ce contexte, l’ef-fort de penser la trans-formation culturelle du calcul et de l’informa-tique en général en ce que l’on a choisi de dé-signer en français par le nom de « numérique ».

C’est dire qu’il se démarque nette-ment des ambitions d’une « science » du Net (comme la Web Science voulue par Tim Berners-Lee) ou d’une science de la culture (comme celle formulée jadis par les néo-kan-tiens et leurs héritiers

et aujourd’hui par certains tenants d’une sémantique généralisée et largement confortée par le forma-lisme inhérent à l’informatique actuelle) dont le projet consisterait à formaliser et à saisir, par le calcul infor-matique et ses abstractions, les gestes et les vécus culturels de nos sociétés. Car l’informatique a cette propriété d’encourager (pour ne pas dire de forcer) le passage et l’expression de toute activité en ses propres termes. Une tendance qui accompagne et éclaircit son histoire. C’est l’une des raisons pour lesquelles il faut revisiter et relire les textes fondateurs de l’infor-matique afin d’en dégager leurs spécificités et surtout de montrer leurs valorisations culturelles au-delà des usages qui en ont été faits par les sciences dites dures.

Si l’on cherche un regard philosophique sur cet hu-manisme, il nous faut relire, dans le contexte actuel,

Colloque international e-éducation

La notion d’humanisme numérique [...] est capable de nous permettre de mieux apprécier la transformation culturelle induite par le numérique.

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© ESEN, Colloque international e-éducation, 2013 - P9

Colloque international e-éducation

le texte de Husserl prononcé en 1935 sous le titre (français) de « La crise de l’humanité européenne et la philosophie ». L’argument de la « Krisis » s’arti-cule sur une problématique de trois humanismes : un humanisme fondateur, abstrait et théorique, et issu du savoir et de la philosophie grecs ; un huma-nisme abstrait et théorique développé à partir de la Renaissance et de ses savoir-faire ; et finalement, un humanisme européen (mais il faut entendre ici occidental), celui de la crise de la première moi-tié du XXe siècle, une sorte de positivisme généra-lisé. Mais Husserl, à sa manière, pose le problème fondamental qui est le nôtre aujourd’hui avec la culture numérique et ses ambitions universelles : les trois humanismes de Husserl2 identifient la crise comme le clivage de plus en plus prononcé entre les

2 Pour une traduction française du texte en question, tra-duit par Nathalie Depraz sous le titre La crise de l’humanité européenne et la philosophie, voir http://www.ac-grenoble.fr/PhiloSophie/file/husserl_depraz.pdf

sciences dites exactes et les sciences de l’esprit. En d’autres mots, l’écart entre des paradigmes d’exactitude et de mesurabilité et leurs formes de rationalité, et des valorisations d’ordre culturel.

Les analyses de Husserl mettent en question l’uni-versalité de la rationalité scientifique et technique, et nous ajouterons, de nos jours, informatique, en rappelant le rôle fondateur de la communauté dans la production et le partage du savoir. Ce qui explique sa conclusion, renvoyant à la Paideia grecque, dans son sens le plus simple mais le plus éloquent et pour nous le plus pertinent : une trans-mission du savoir qui élimine, théoriquement, le non-savoir. Une pédagogie qui est une responsabi-lité collective, inscrite dans la structure même de la polis. Une pédagogie nous invitant à revisiter les liens entre sciences et cultures et à considérer ce que j’ai choisi de nommer humanisme numérique.

Milad DOUEIHI lors de sa conférence.

Retrouvez cette conférence sur le site de l’ESENhttp://www.esen.education.fr/fr/ressources-par-type/conferences-en-ligne/

Si nous nous devons de garder une dis-tance critique vis-à-vis des utopies du numérique, ce serait toutefois erroné de ne pas reconnaître les attentes et les aspirations sociales qu’elles traduisent.

Antonio Casilli, sociologue, maître de conférences en digital humanities à Telecom ParisTech et chercheur au centre Edgar Morin (EHESS). Ses recherches portent principalement sur les cultures technologiques, le corps et la dimension politique des usages du Web.

Il est l’auteur de : Les Liaisons numé-riques. Vers une nouvelle sociabilité ? (Ed. du Seuil, 2010), Stop Mobbing (DeriveApprodi, 2001), La Fabbrica libertina (Manifesto Libri, 2000).

Chroniqueur sur France Culture, il anime le blog de recherche Bodys-pacesociety.eu et la veille Twitter @bodyspacesoc.

À propos d’Antonio

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© ESEN, Colloque international e-éducation, 2013 - P11

Antonio CASILLI

Colloque international e-éducation

Les communica-tions en réseaux reconfigurent certains équilibres entre liens forts et liens faibles.

Le lien social à l’ère du web 2.0

La question de savoir s’il existe une nouvelle sociabilité entiè-rement façonnée par les usages numériques des dernières décennies risque de se heurter à une réponse négative. C’est plutôt en faisant venir à la surface nos valeurs et nos attentes que le numérique outille notre vie commune. Les communi-cations en réseaux, surtout quand elles se laissent affubler du qualificatif « social », reconfigurent certains équilibres – entre personnel et collectif, entre isolement et inclusion, entre liens forts et liens faibles.

Ce faisant, elles semblent apporter à leurs usagers une meil-leure emprise sur leur vie en société. Pour autant, cet espoir achoppe sur une réalité complexe, dans laquelle les compor-tements pro-sociaux sont encore difficiles à reconnaître, et une prolifération de nouveaux codes de comportement, de nouvelles pratiques, de nouvelles modalités d’interaction mettent en cause nos cadres d’interprétation classiques.

Nous devons partir d’un constat simple, à savoir que les technologies numériques se sont installées dans notre quoti-dien et dans notre intimité à l’issue d’un processus historique et technologique de miniaturisation des dispositifs de traite-ment et de transmission de l’information.

P12 - © ESEN, Colloque international e-éducation, 2013

Colloque international e-éducation

Notre imaginaire technologique et notre langage en témoignent. À partir de la seconde moitié du XXe siècle, nous sommes passés des grands serveurs (big irons) et des « méga-cerveaux électroniques » des années 1950, aux mini- et micro-ordinateurs des décennies successives, pour en venir aux disposi-tifs mobiles et portables d’aujourd’hui. Ces derniers collent aux corps des usagers, vibrent sous leurs mains, engagent leurs gestes, les obligent à une vigi-lance portée autant sur leur présence (« mon smart-phone est-il encore là où je l’avais laissé ? ») que sur leur fonctionnement (« un tweet vient d’arriver : dois-je répondre tout de suite ou bien puis-je attendre ? »).

Si le dispositif arrive à pénétrer l’intimité des usagers, c’est parce que la reterritorialisation des usages informatiques a emboîté le pas de cette miniaturisation. Les grands calculateurs du deuxième après-guerre étaient installés dans des bases militaires, dans des usines, mais ils ont vite intégré les bureaux et les foyers des particuliers. Une fois ce seuil franchi, la sphère domestique s’est adaptée pour accueil-lir les machines à com-muniquer. Les salons, les cuisines et les chambres hébergent une pléthore d’écrans, de consoles, de claviers. De là à l’installation dans les sacs et en-fin dans les poches des usagers, il n’y a qu’un pas. C’est à ce moment-là que les usages informa-tiques interrogent notre notion de corporéité.

Si nous avons longtemps cru au mythe de l’« adieu au corps » dans le monde en réseaux, nous devons aujourd’hui admettre que les TIC ne nous ont pas as-pirés dans un « cyberespace » désincarné d’informa-tion pure. Le monde de la communication humaine est avant tout notre univers tangible, doublé d’une infras-tructure qui transporte, traite et sauvegarde nos don-nées. Historiquement, le corps n’a pas été mis entre parenthèses depuis l’arrivée des ordinateurs : il est la précondition même de l’échange numérisé. Qui plus

est, il endosse l’information – soit au sens propre d’être revêtu de ses dispositifs, soit au sens figuré de prendre sur soi le sens social et personnel de cette dernière.Parce que l’intimité des individus contemporains est traversée par les usages informatiques, les frontières entre l’espace public et l’espace privé se brouillent véritablement. Ce phénomène, qui semble être ca-ractéristique de la modernité au sens large, impose dans le contexte des usages des TIC, une renégo-ciation constante des bornes entre personnel et collectif. Notre condition actuelle peut être définie comme une coexistence assistée par ordinateur, dans la mesure où le vivre ensemble est médiatisé, reconfiguré par ces dispositifs de communication et

d’information. L’opportu-nité d’être connectés bas-cule dans l’exigence, voire dans l’injonction, de « res-ter en contact avec les personnes qui comptent dans notre vie » - pour reprendre le slogan qui trône sur la page d’accueil d’un célèbre média social.

Mais quel est donc le lieu même de notre communi-cation ?

Les interactions un-à-un sont de moins en moins le trait distinctif de la sphère privée, tandis que le public

n’est plus l’espace consacré aux interactions un-à-plusieurs. Le fait est que les échanges médiatisés par TIC, avec nos proches ou avec d’autres personnes faisant partie de notre cercle de connaissances, ne se réalisent plus exclusivement dans des espaces privés. Depuis les transports en commun, depuis leurs bureaux, depuis les établissements publics, les usagers partagent des contenus avec leurs par-tenaires, les membres de leur famille. De même, leurs prises de paroles publiques ne se font pas exclusivement dans les espaces officiels. Moyen-nant un smartphone, chacun peut aisément signer une pétition électronique sans sortir de son lit. Les caractéristiques de la sphère privée sont désormais transposées dans la sphère publique – et vice versa.

Ceci nous impose de négocier constamment un « es-

Nous devons partir d’un constat simple, à savoir que les technologies nu-mériques se sont instal-lées dans notre quotidien et dans notre intimité.

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© ESEN, Colloque international e-éducation, 2013 - P13

Colloque international e-éducation

pace propre » dans nos échanges en ligne, de définir au cas par cas (avec l’aide des autres ou, parfois, en se heurtant à leur malice) ce qui est privé et ce qui ne l’est pas. Et l’exposition publique, avec la circonspection et le caractère officiel qui y sont liés, gouverne aussi nos conduites en ligne les plus intimes. D’un point de vue historique, nous assistons à une double rupture : la sphère privée a été reconfigurée par la miniaturisation des TIC, tandis que la sphère publique a été boulever-sée par leur socialisation.

Des outils, initialement conçus pour équiper le travail, sont devenus des technologies de la relation humaine, voire de la chaleur humaine, qui permettent et même parfois imposent de mobiliser notre affectivité, nos ha-biletés relationnelles, notre capacité de créer du lien social – pour « optimiser » notre existence en société.

Voilà la promesse sous-jacente aux usages sociaux du Web et de ses technologies sœurs.

La promesse de faire coexister nos vies professionnelles et nos exigences personnelles. La promesse de pouvoir activer à merci nos « liens faibles » sans pour autant nous faire étouffer par nos « liens forts ». La promesse de re-trouver la liberté et l’abondance des sociétés issues de la modernité industrielle, sans renoncer aux formes de solidarité et de loyauté propres aux groupes tradition-nels. La promesse que le conflit et la solitude qui sont le propre de l’existence humaine ne prennent plus le pas sur la coopération harmonieuse et la communication.

En se mettant en résonance avec nos émotions, nos plaisirs et nos dégoûts, l’expérience numérique – trop longtemps associée à des notions de déperdi-tion de réalité, d’illusion, d’aliénation – finit par se faire porteuse de l’engagement à réaliser notre vie en société. Et cela non seulement sur le plan per-sonnel, mais aussi sur le plan collectif, en pros-pectant la possibilité de faire (re)vivre certaines aspirations politiques que l’on croyait dépassées : la communauté « pure », la participation « ouverte » à la vie politique, la transparence du fonctionnement étatique, la fin des totalitarismes de toute obédience.

Certes, les utopies politiques qui se sont fédérées, au cours des trente dernières années, autour des usages restent inévitablement de l’ordre de la projectualité. Et l’on peut légitimement se méfier d’un certain techno-déterminisme qui ferait du numérique non seulement

une manière de faire société, mais la meilleure des manières possibles. Si nous nous devons de garder une distance et une vigilance critique vis-à-vis de ces utopies, ce serait toutefois injuste et erroné de ne pas faire l’effort de reconnaître les attentes et les aspirations sociales qu’elles traduisent. En effet, elles interpellent nos priorités politiques, et indiquent des directions pour l’activité publique. En ce sens, les expériences d’« action connective » peuvent être reconnues comme des vecteurs de valeurs de liberté et d’inclusion portées par la société civile.

Conférence d’Antonio Casilli et de Francis JAURÉGUIBERRY retrans-mise en direct durant le colloque sur le site de l’ESEN

Retrouvez cette conférence sur le site de l’ESENhttp://www.esen.education.fr/fr/ressources-par-type/conferences-

en-ligne/

L’innovation technologique a été plus vite que le social, le droit ou l’éducation.

Francis Jauréguiberry est socio-logue, professeur à l’université de Pau et directeur du laboratoire SET (Société Environnement Territoire) au CNRS. Ses recherches portent sur les nouvelles formes d’iden-tité et de sociabilité générées par l’extension des technologies de l’information et de la communica-tion.

Sur ce thème, il a notamment publié : Les branchés du portable. Sociologie des usages, Paris, PUF, et (avec Serge Proulx) : Usages et enjeux des technologies de commu-nication, Toulouse, Érès, ainsi que : Internet, nouvel espace citoyen ? Paris, l’Harmattan.

À propos deFrancis

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© ESEN, Colloque international e-éducation, 2013 - P15

Francis JAURÉGUIBERRY

Pour au moins une génération et en matière d’usages des tech-nologies de communication, la chaîne du savoir semble s’être inversée : les adolescents en savent souvent plus que leurs parents, éducateurs ou enseignants. De la même façon que les règles de politesse ne sont pas encore fixées quant à l’usage des portables dans les lieux publics et que chacun agit avant tout selon ses intérêts (ne pas rater un appel), les adolescents expérimentent Internet la plupart du temps sans repères en y cherchant ce qui leur paraît le plus agréable et immédiat.

L’innovation technologique a été plus vite que le social, le droit ou l’éducation. La première chose à faire est donc de recon-naître cet état de fait. Il y a beaucoup d’inconnu et d’incertitude en la matière : des champs inédits de possibles s’ouvrent sans qu’ils ne soient en rien balisés, le meilleur comme le pire pou-vant y advenir. Il faut en prendre conscience et en discuter.

Il faut ensuite se poser la question : à quels arts de faire et de vivre avec ces technologies formons-nous les adolescents et comment procéder ? Les technologies de communication conduisent spontanément vers l’immédiateté, l’ubiquité et l’évasion : seront donc abordés les thèmes du temps, des lieux et de l’identité.

Colloque international e-éducation

Le lien social à l’ère du web 2.0

Les technologies de communica-tion conduisent spontanément vers l’immédia-teté, l’ubiquité et l’évasion entre liens forts et liens faibles.

P16 - © ESEN, Colloque international e-éducation, 2013

Colloque international e-éducation

Temps

On sait que l’adolescence est le temps du présent, d’une forme de refus du passé (en ce qu’il est syno-nyme de détermination et de non-choix : découverte de soi comme produit de la socialisation), mais aussi du futur (trop souvent synonyme de doute et de crainte, surtout dans le monde instable qui est le nôtre). Les adolescents s’accommodent donc particulièrement bien de ces technologies du présent et de l’immédiat. Mais il relève de la responsabilité des éducateurs de leur parler d’une autre forme d’être au temps. Un temps qui réintro-duit l’épaisseur de la maturation, de la réflexion et de la méditation là où le heurt de l’immé-diat et de l’urgence oblige à réagir trop souvent sous le mode de l’impul-sion.

Ce temps est celui du passé, du sou-venir et du retour sur soi. C’est aussi le temps de l’anti-cipation, de la crainte ou de l’es-poir. Ce temps se donne à vivre dans l’arrêt, l’attente, le différé et la mise à distance. Face à l’entrée mas-sive de nos sociétés dans une culture de l’immédiat, de l’impulsion et de l’urgence généralisée, il y a des moments qui résistent à l’accélération, des durées qui ne sauraient être brusquées, et des instants qui échappent à la logique du gain et de la vitesse.

Ces moments, ces durées et ces instants sont indis-pensables à la formation de soi comme sujet, c’est-à-dire comme acteur capable de construire sa vie de façon autonome. La question est donc : comment apprend-on aux adolescents à vivre cette distance réflexive et, application concrète, à mettre leurs por-tables sur off ? Pas continuellement, bien sûr, mais au moins de temps en temps...

Lieux

De plus en plus souvent, l’ailleurs médiatique fait ir-ruption dans l’ici physique par la voix, l’écoute et la vue. Comme le développement de ces technologies a été extrêmement rapide, nous ne sommes pas dans des cultures qui nous habituent à vivre cette double appartenance. C’est sur la gestion de cette « double présence », où l’une peut pâtir de l’autre, qu’il s’agit de travailler avec les adolescents en ayant en tête la question : existe-t-il des lieux où la présence doit être

totale, où l’attention ne saurait être distraite par un appel intempestif et où donc, finalement, les portables doivent être éteints ? Quel est le critère pour interdire les portables ? La salle de classe est-elle un de ces lieux ? Les biblio-thèques le sont-elles ?

L’actuel débat dans certaines universités américaines (doit-on interdire le WiFi dans les salles de cours et les amphis ?) montre bien la difficulté à établir des règles en la matière. La ques-tion de savoir pour-

quoi certains lieux ne sauraient être « troués » par des appels téléphoniques ou pourquoi certaines situations nécessitent une pleine présence doit être débattue. Dans un monde où l’espace phy-sique est de plus en plus hybride (réalité augmen-tée), peut-on encore être pleinement quelque part ?

Identité

Une foule d’emprunts identitaires est désormais possible sur Internet. L’adolescent peut s’essayer à différentes formes de soi qu’il teste avec l’intention d’expérimenter « l’effet que ça fait ». Contrairement à ce qui se passe off line, le milieu d’appartenance de l’adolescent n’est pas là pour le dissuader, le li-

Il n’est évidemment pas ques-tion d’avoir un discours de censure à l’égard des tech-nologies de communication, mais de créer un ensemble de débats sur leur appropriation raisonnée et responsable.

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© ESEN, Colloque international e-éducation, 2013 - P17

Colloque international e-éducation

miter ou le censurer dans l’essai de nouveaux soi : l’adolescent peut expérimenter autant de nouvelles identités qu’il veut, sans grand risque de sanction de la part de son entourage. Lorsque l’on cherche à sa-voir quels sont, concrètement, les soi fictifs expéri-mentés, on s’aperçoit qu’il s’agit la plupart du temps de soi focalisant la réalisation de fantasmes, de pul-sions et des désirs contrariés. Tant que la distinc-tion entre soi fictifs et soi réels est bien opérée par l’adolescent, il n’y a aucune raison de s’inquiéter.

On peut même penser qu’il s’agit là pour lui d’une façon d’échapper aux images de lui-même que son milieu lui impose et révèle, sans doute mala-droitement, son désir d’exister « autrement ». Non pas pour s’y perdre et pour fuir la réalité, mais pour mieux y tester son autonomie, ses capa-cités créatrices et son aspiration à la liberté.

Mais, à l’inverse, un danger existe aussi : celui de son enfermement et de sa dissolution progressive dans sa réalité virtuelle. Goûtant sans retenue les

délices de la reconnaissance de ses fantasmes et attentes par le réseau, l’adolescent court le risque de s’enfermer dans une pratique compul-sive d’Internet. D’où la nécessité, mais aussi diffi-culté, de définir des critères et des seuils d’alerte.

Il n’est évidemment pas question d’avoir un discours de censure à l’égard des technologies de commu-nication, mais de créer un ensemble de débats sur leur appropriation raisonnée et responsable. Dé-bats au cours desquels il semble important de rap-peler que la création et les projets nécessitent du temps, que la réflexion et la méditation imposent du silence, qu’il est des lieux inaccessibles si l’on n’y contient pas tout entier, et qu’il est des choses et des êtres que l’on risque de ne pas connaître et ap-précier parce que l’on aura zappé trop vite sur eux.

Francis JAURÉGUIBERRY lors de sa conférence.

Retrouvez cette conférence sur le site de l’ESENhttp://www.esen.education.fr/fr/ressources-par-

type/conferences-en-ligne/

Échafaudages, le magazine radio de l’ESEN dédié à l’ingénierie de la for-mation des adultes et aux nouvelles modalités de formation questionne :

Le lien social à l’ère du web 2.0Olivier DULAC reçoit : Antonio CASILLI, Milad DOUEIHI, et Francis JAURÉGUIBERRY

Réalisation technique : Yannick BERNARD et Cécile PIRES

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Les changements de posture et de pratique exigés de l’enseignant sont des processus lents qui doivent prendre en compte et valoriser ses pratiques actuelles.

Dans le cadre du centre Did@cTIC de l’université de Fribourg (Suisse), mes recherches portent sur l’apprentis-sage et le changement. Ces proces-sus sont étudiés particulièrement chez les enseignants et chez les adultes impliqués dans des disposi-tifs de formation à distance, hybrides ou des environnements personnels d’apprentissage.

Les recherches menées le sont dans une intention de réponse à des besoins portés par des groupes d’acteurs avec lesquels je collabore. Elles sont réalisées à un niveau international.

À propos deBernadette

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Bernadette CHARLIER

L’introduction de la distance dans le processus de for-mation exige de l’enseignant un changement radical de posture associé plus largement à un changement au niveau de sa pratique d’enseignement. Changer sa pos-ture signifie déplacer ce sur quoi il porte l’attention dans son activité d’enseignement, modifier ce qui est impor-tant pour lui, ce qu’il a l’intention de faire (Lameul, 2006).

La pratique englobe la posture. Un changement à ce ni-veau s’observera dans ses comportements et ses routines, dans et en dehors de son interaction avec ses étudiants. Face à cette exigence de transformation, quelle forma-tion ou quel accompagnement offrir aux enseignants ? Ces questions, si elles sont pertinentes, sont peut-être mal posées. En effet, parler d’accompagnement ou de for-mation peut laisser entendre que l’enseignant n’est pas compétent et qu’il doit être « accompagné» ou « formé ».

Colloque international e-éducation

Il ne s’agit pas de « changer pour changer » mais de changer de pos-ture et de pratique pour répondre à un besoin reconnu.

La distance dans le processus de formationNouveau paradigme d’apprentissage et transformation de l’activité de l’enseignant

P22 - © ESEN, Colloque international e-éducation, 2013

Colloque international e-éducation

Ainsi, cette approche peut renvoyer à une vision de la formation comme devant combler un déficit. Surtout si l’approche est individualiste, considé-rant la formation de l’enseignant comme une res-ponsabilité et un bien individuels et ignorant tout le déterminisme et la responsabilité institutionnels.

Or, une approche alternative existe. Une ap-proche plus cohérente avec les valeurs véhicu-lées par une vision de la e-éducation, considé-rant les étudiants comme des acteurs de leurs apprentissages et les enseignants comme des acteurs de leur développement professionnel.

Pour soutenir une telle démarche autodirigée, il s’agi-rait d’abord de décrire et de comprendre les processus de transforma-tion de l’intérieur.

Comment et dans quelles conditions un e n s e i g n a n t change-t-il de posture ?

Même si diffé-rents cadres théoriques ont été convoqués, plusieurs re-cherches ont rap-pelé l’importance et les exigences associées au pro-cessus bien connu d’assimilation-accommodation. Par exemple, l’enseignant intègre d’abord des usages des TIC dans ses pratiques traditionnelles sans les modifier et enrichit ces usages progressivement (assimilation).

Ainsi, il continue à proposer les mêmes tâches et les mêmes évaluations. Il transformera éventuelle-ment sa pratique (accommodation) suite à un désé-quilibre entre sa planification (ce qu’il a l’intention de faire) et ce qui se passe (la réaction des étu-diants, par exemple) ou au ressenti d’un besoin.

Ce besoin peut être suscité par la technolo-gie elle-même ou par les interactions avec les étudiants et avec les collègues. Souvent, ce processus prend du temps et peut caractéri-ser les étapes d’une carrière (Huberman, 1989).

Face à ce processus, quel(s) dispositif(s) de for-mation ou d’accompagnement proposer ?

En premier lieu, il faut préciser les voies d’actions pos-sibles. Souvent, la réponse offerte par les institutions a été l’offre de formations courtes sous forme d’ateliers de prise en main des nouveaux outils technologiques considérés comme des outils « complémentaires », occultant de la sorte la nécessité de tout changement de posture. Selon nous, tout dispositif d’accompagne-ment devrait prendre en compte la complexité des déterminants de l’innovation et adopter une approche systémique (Charlier, Daele, & Deschryver, 2002) intégrant notamment des actions aux niveaux des institutions, de l’infrastructure et des programmes.

Dans l’enseigne-ment supérieur, une telle approche systémique n’a malheureusement pas été réalisée partout, se limitant ainsi à un inves-tissement et à un accompagne-ment uniquement technologiques.

Mais, plus concrè-tement, que pour-rait-on faire ?

En premier lieu, il nous semble important de connaître et, pourquoi pas, de valoriser les pratiques exis-tantes. Peu de recherches décrivent en détail les pratiques réelles, les confondant souvent avec des pratiques prescrites ou souhaitées. Il serait alors possible de faire connaître la diversité des pratiques.

L’enseignant pourrait alors, en prenant conscience de la diversité de ces pratiques, changer de pos-ture « avec et contre » une posture ancienne.

Les leviers de changement émergent de besoins éducatifs portés par un enseignant, ou mieux, par une collectivité, une institution. Il ne s’agit pas de « changer pour changer » mais de chan-ger de posture et de pratique pour répondre à un besoin reconnu : améliorer la qualité d’un cours,

Un changement de posture tel qu’il est souhaité [pour les enseignants] doit être soutenu par l’institution.

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© ESEN, Colloque international e-éducation, 2013 - P23

Colloque international e-éducation

réduire les échecs, augmenter l’accessibilité de la formation pour une population donnée, etc.

C’est à ce niveau que la formation et l’accompagne-ment peuvent être pertinents tout en reconnaissant les besoins, les pratiques et les compétences des enseignants. Ces démarches, pour être efficientes, pourraient exploiter plusieurs processus qui sont au cœur du développement professionnel des en-seignants : la réflexion, l’échange et le partage de pratiques, ainsi que l’expérimentation dans l’action.

Enfin, un élément essentiel doit être rappelé : un changement de posture tel qu’il est souhaité doit être soutenu par l’institution. Si l’enseignant est acteur de son développement professionnel, l’institution doit être également actrice de ce développement pour reconnaître les activités mises en place et fa-voriser leur partage en son sein. Les recherches en sciences de l’éducation peuvent également aider les acteurs à comprendre la complexité des dispo-sitifs d’enseignement et de formation et à les piloter.

Références

Charlier, B., Daele, A. et Deschryver, N. (2002). Introduire les TICE dans une pratique d’ensei-gnement, une question de formation ?, Revue des Sciences de l’Education, Sherbrooke, Canada.

Huberman, M. (1989). La vie des ensei-gnants : évolution et bilan d’une profes-sion. Lausanne : Delachaux et Niestlé.

Lameul, G. (2006). Former des enseignants à distance ? Étude des effets de la médiatisation de la re-lation pédagogique sur la construction des postures professionnelles (Thèse de docto-rat). Université Paris Ouest La Défense, Paris.

Bernadette CHARLIER (premier plan) et France HENRI lors de leur conférence à deux voix.

Retrouvez cette conférence sur le site de l’ESENhttp://www.esen.education.fr/fr/ressources-par-type/conferences-en-ligne/

Mes recherches portent sur l’apprentissage et le travail colla-boratif à distance, la conception d’environnements d’apprentissage, les communautés de pratique et les forums de discussion.

Je m’intéresse également aux nou-velles pratiques de recherche et à la formation de la relève scientifique. Dans mon enseignement comme dans mes recherches, ma principale préoccupation est de proposer des environnements d’apprentissage qui invitent les apprenants à vivre une expérience authentique de partage et de collaboration.

À propos deFrance

L’enseignant amené à exercer son mé-tier à distance ne se demande plus « que vais-je enseigner? » mais plutôt « qu’ont-ils besoin d’apprendre? » et « comment vont-ils apprendre? »

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France HENRI

Afin de mettre en perspective les approches actuelles de la formation à distance, il importe de connaître l’évo-lution et les grandes motivations qui ont impulsé les mutations qu’elle a connues. Dans ce qui suit, on note-ra que les transformations qui ont marqué l’histoire de la formation à distance se sont produites à la suite de l’apparition de nouveaux vecteurs de l’enseignement.

C’est en 1840, l’année même de la mise en usage du timbre-poste, qu’Isaac Pitman lance sur une base commerciale les premiers cours d’enseignement par correspondance. Rapidement, la formule donne lieu dans les pays indus-trialisés à la création d’instituts d’enseignement par cor-respondance qui vendent des services répondant à une demande de formation. Dès 1856, la formule se voit recon-nue légalement alors que l’Université de Londres accepte à ses examens des étudiants ayant étudié ailleurs. Cette décision officialisait la séparation de la préparation à un examen, de la collation des grades (Dieuzeide, 1985).

Colloque international e-éducation

La formation à distance peut être décrite comme une approche qui fait vivre à l’appre-nant une nouvelle expérience d’ap-prentissage.

La distance dans le processus de formationNouveau paradigme d’apprentissage et transformation de l’activité de l’enseignant

P26 - © ESEN, Colloque international e-éducation, 2013

Colloque international e-éducation

Au début du XXe siècle, l’enseignement par cor-respondance à des fins d’enseignement public voit le jour aux États-Unis, au Canada, en Australie et en Nouvelle-Zélande pour donner accès à l’édu-cation aux jeunes enfants de familles éloignées.

Dans les années 60, de grands changements s’opèrent. La généralisation des médias de masse rend l’infor-mation disponible à grande échelle et suscite la floraison de nouvelles formules médiatiques pour véhiculer des enseignements à de grands nombres. Destinée aux adultes surtout, la formation à distance est mise au service des États pour soutenir les valeurs démocratiques des sociétés modernes qui reven-diquent l’égalité des chances et l’éducation pour tous.

Dans ce contexte, l’intérêt pour la formation à distance était d’abord économique. La structure des coûts ne reposait plus sur le prin-cipe d’un enseignant pour un nombre donné d’appre-nants, mais sur la produc-tion de méthodes et de matériels indépendants du nombre d’apprenants. Des économies d’échelle pou-vaient ainsi être réalisées et offrir la possibilité de former des masses à moindre coût.

C’est sur cette base que, dans les années 70, on assiste à la création des grandes universités à dis-tance autonomes à l’initiative des gouvernements dans de nombreux pays (Grande-Bretagne, États-Unis, Canada, Espagne, Israël, Pakistan, Iran, Ve-nezuela, Brésil, etc.). Si, d’un point de vue politique, la formation à distance a été envisagée d’abord comme une modalité de formation moins onéreuse répondant à l’objectif de l’éducation pour tous, les praticiens ont très vite réalisé les potentiali-tés pédagogiques de ce nouveau modèle éducatif.

Moins hiérarchique, moins livresque et moins transmissif, il repose sur l’autonomie de l’appre-nant, le développement de sa capacité à ap-prendre et l’accompagnement des apprentissages.La formation à distance peut être décrite

comme une approche qui fait vivre à l’appre-nant une nouvelle expérience d’apprentissage et qui inspire un nouveau rapport au savoir.

Avec la médiatisation des enseignements et l’ab-sence physique de l’enseignant, une nouvelle rela-tion pédagogique se met en place. L’enseignant ne détient plus le statut d’acteur principal du processus d’apprentissage. L’initiative passe aux mains de l’ap-prenant qui se voit attribuer une place centrale. Pour apprendre, il est invité à accéder aux différentes res-sources mises à disposition, à réaliser des activités individuelles et collectives, à interagir avec des pairs et avec un tuteur-accompagnateur selon un scé-nario soigneusement orchestré par un concepteur.

Grâce à l’intégration d’activités basées sur les réseaux, les tech-nologies d’internet et le Web, l’apprentissage à distance peut être envi-sagé comme un proces-sus de construction de connaissances socia-lement inscrit, actif, participatif et collectif.

En outre, la flexibilité qu’apporte la médiatisa-tion des enseignements permet de répondre

au besoin d’individualisation, une priorité pour plu-sieurs universités à distance, c’est-à-dire rejoindre l’apprenant où il est, au moment qui lui convient en lui proposant une démarche souple et adaptable.

Dans ce contexte, l’enseignant ne se demande plus « que vais-je enseigner ? » mais plutôt « qu’ont-ils besoin d’apprendre ? » et « comment vont-ils ap-prendre ? ». Pour l’enseignant amené à exercer son métier « à distance », le défi doit être bien évalué. Il s’agira pour lui de repenser sa pratique et d’apprendre à s’acquitter différemment de ses responsabilités.

Il aura à s’initier à l’ingénierie pédagogique pour concevoir des scénarios pédagogiques centrés sur l’apprenant. Dans une nouvelle organisation du travail,

L’initiative passe aux mains de l’ap-prenant qui se voit attribuer une place centrale.

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© ESEN, Colloque international e-éducation, 2013 - P27

Colloque international e-éducation

il aura à collaborer avec différents corps profes-sionnels pour la médiatisation des environnements d’apprentissage et leur mise en exécution. La dé-marche dans laquelle l’enseignant s’engagera exige de rompre avec ses pratiques présentielles afin de permettre aux nouvelles pratiques d’émerger.

Référence

Dieuzeide, H. (1985). Les enjeux politiques. Dans F. Henri et A. Kaye (dir.), Le savoir à do-micile. Pédagogie et problématique de la for-mation à distance. Québec, Presses de l’uni-versité du Québec et Télé-université, p. 29-59.

France HENRI, Bernadette CHARLIER et Stéphane AYMARD. Lancement de la conférence à deux voix sur la distance dans le processus de formation

Retrouvez cette conférence sur le site de l’ESENhttp://www.esen.education.fr/fr/ressources-par-type/conferences-en-ligne/

Les dispositifs de formation entiè-rement ou partiel-lement à distance offrent un terrain privilégié pour le développement d’un cadre théorique dans le domaine de la communication et de la formation médiatisée.

Docteur en communication, Daniel Pe-raya est professeur ordinaire à TECFA, l’unité des technologies éducatives de la faculté de psychologie et des sciences de l’éducation de l’univer-sité de Genève (Suisse). Il y enseigne depuis 1986 après avoir dirigé le centre audiovisuel pédagogique de l’école normale supérieure de l’université de Dakar (Sénégal) de 1975 à 1985.

Ses recherches et ses enseignements portent sur la communication édu-cative médiatisée, plus particulière-ment dans le cadre des systèmes de formation entièrement ou partiellement à distance aux niveaux supérieur et universitaire. Il a coordonné la par-ticipation de TECFA à de nombreux projets européens dans le domaine de la formation à distance.

Suite de la présentation de Daniel en fin d’article

À propos deDaniel

© ESEN, Colloque international e-éducation, 2013 - P29

Daniel PERAYA

Les nouveaux environne-ments que se construisent les étudiants sont le produit de leur usage individuel ainsi que de leur expérience.

“L’observation depuis près de vingt ans (le premier serveur Web éducatif date de 1994) des environnements technopé-dagogiques au sein des universités montre une évolution ra-pide des technologies mais aussi de leur potentiel d’usage.

Le Web de la première génération était un Web statique destiné à « servir » des fichiers : il s’est inscrit dans la tradition de la dif-fusion massive de ressources et de documents pédagogiques. Avec MySql, PHP et les langages de script, le Web est de-venu dynamique, les pages pouvant être modifiées et l’in-formation traitée en temps réel : les premiers campus vir-tuels se sont alors développés comme des environnements fermés intégrant dans une interface unique l’ensemble des fonctions indispensables à la mise en œuvre d’une formation.

Les plateformes et les environnements technopédago-giques se sont multipliés tandis que fleurissaient des dis-cours prescrivant leurs usages et vantant leurs avantages : économie cognitive pour l’apprenant disposant enfin d’une interface unique intégrant tous les outils nécessaires, pos-sibilité de scénariser les activités des apprenants y compris

Colloque international e-éducation

Des campus virtuels aux environnements personnels d’apprentissage L’évolution des usages d’étudiants en ingénierie multimédia

P30 - © ESEN, Colloque international e-éducation, 2013

Colloque international e-éducation

celles menées à distance, opportunité pour l’enseignant de suivre au plus près l’acti-vité de l’apprenant grâce au recueil automa-tique de traces, etc. Le contrôle de l’appre-nant par l’institution semblait quasiment total.

Progressivement, on a vu se développer de nom-breux dispositifs de type « réseaux sociaux » (Fa-cebook, Twitter, etc.), des dispositifs « collabora-tifs » ouverts (Google Docs, Google Wave, Dropbox, etc.) à partir desquels les apprenants construisent leurs environnements personnels d’apprentissage.

L’institution a perdu ce contrôle au fur et à mesure que l’apprenant gagnait, grâce à ses nouveaux dis-positifs, de l’auto-nomie et une ca-pacité personnelle de gestion de ses environnements. Les campus vir-tuels, les environ-nements techno-p é d a g o g i q u e s , concrétisent une vision centralisa-trice, voire panop-tique, de l’institu-tion tandis que les nouveaux envi-ronnements que se construisent les étudiants sont le produit de leur usage indi-viduel ainsi que de leur expé-rience et ils semblent mieux adaptés à une conception de l’apprentissage autodirigé, sous un plus grand contrôle de l’apprenant.

Notre contribution s’appuie sur une recherche em-pirique et descriptive que P. Bonfils et moi-même menons depuis trois ans : afin de documenter le plus finement possible cette évolution, nous sui-vons l’évolution des usages que font des étudiants de l’UFR Ingémédia1 et des environnements ins-titutionnels et de ceux dont ils de dotent dans le cadre des projets qu’ils mènent durant leurs études.1 Université du Sud Toulon Var, http://www.ingemedia.net/

Cette recherche vise dans un premier temps à iden-tifier les choix d’outils de travail et de communi-cation effectués par les étudiants de cette UFR à l’occasion d’un projet de groupe. Nos premières observations (2009-2010) montrent que bon nombre des outils retenus remplacent progressivement les dispositifs médiatiques proposés par leur uni-versité. Ceux-ci sont en effet considérés comme trop lourds, non personnalisables et, de plus, leur gestion échappe complètement aux étudiants.

Pour réaliser leur projet de groupe, les étudiants se créent des environnements d’apprentissage et de tra-vail plus proches, voire même intégrés à leurs environ-nements personnels, et construits selon une logique

de besoins et d’usages per-sonnalisés. Ils importent donc au sein de la sphère aca-démique des usages routi-niers ancrés au sein de leur sphère d’acti-vités person-nelles et de loisir. Dans cer-tains contextes particuliers, les environnements p e r s o n n e l s des étudiants p o u r r a i e n t être considé-rés comme des

« objets-ponts » facilitant le transfert des usages des sphères personnelles vers la sphère académique. Le téléphone portable en est un bon exemple dans la mesure où il accompagne l’étudiant dans chacune de ses activités, dans chacune de ces deux sphères.

Dans la seconde phase de la recherche (2010-2011), les observations ont confirmé cette tendance et son accélération. Elles ont permis de recen-ser les dispositifs qu’abandonnent les apprenants et ceux qu’ils adoptent. Nous analyserons aussi les raisons de ces choix et la dynamique qui les amènent à ces décisions d’adoption ou de rejet.

Progressivement, on a vu se développer de nombreux dis-positifs de type « réseaux so-ciaux » [...] à partir desquels les apprenants construisent leurs environnements person-nels d’apprentissage.

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© ESEN, Colloque international e-éducation, 2013 - P31

Colloque international e-éducation

La généralisation de ces observations est difficile dans la mesure où les étudiants d’Ingémédia, de par leur inscription disciplinaire, possèdent, pour la plupart d’entre eux, une expertise et un degré de maîtrise des technologies plus importants que la majorité des étudiants. Cependant, ils utilisent des technologies largement diffusées et peu spécialisées. Nous pourrions donc penser qu’ils construisent, sur la base d’outils grand public, des usages nouveaux qui préfigurent ceux que construi-ra demain un plus grand nombre d’apprenants.

Enfin, nous pensons que l’observation de ces environnements personnels d’apprentis-sage permettra de mieux comprendre les ef-fets de ces nouveaux environnements sur les comportements cognitif et relationnel des apprenants mais aussi des enseignants.

Dans quelle mesure le développement de ces environnements remet-il en cause non seule-ment les modèles pédagogiques, les concep-tions de production, de diffusion et d’appropria-tion des connaissances, mais également les relations entre les apprenants, entre ceux-ci et les enseignants et donc, la posture comme le rôle des apprenants et des enseignants ?2

2 Peraya, D. (2008). Technologies, mutations des connais-sances et de l’apprentissage : impact sur les métiers d’ensei-gnant et d’étudiant. In M. Bergadaà, P. Dell’Ambrogio,G. Falquet, D. McAdam, D. Peraya, D. & R. Scariati R. (2008). La relation éthique-plagiat dans la réalisation des travaux personnels par les étudiants. (pp. 19-31. Rapport 2008, Com-mission Ethique-Plagiat, Université de Genève.

À propos de Daniel (suite) ...

Depuis 1990, il a participé activement au dé-veloppement de la formation à distance en Suisse notamment, par ses études préalables, à la mise en œuvre du programme fédéral Cam-pus virtuel suisse ; depuis 2000, il assume la coordination de l’apport de TECFA à de nom-breux programmes (Campus virtuel suisse, 2000-2007, Programme CoseLearn, 2005-2011).

Il est actuellement responsable du Master MALTT (Master of Science in Learning and Teaching Technologies, TECFA) et directeur du Certificat de formation continue en conception et développe-ment de projets en e-learning, ainsi que respon-sable de la participation de TECFA au programme ACREDITE (AUF, Université Mons, Université de Cergy-Pontoise et Université de Genève).

Il est chercheur associé au Centre interuniver-sitaire sur la profession enseignante (CRIFPE, Québec) en tant que chercheur international et membre du Groupe d’études sur la Médiation du savoir (GReMS, Université catholique de Louvain).

... un nouveau modèle éducatif fondé sur l’autono-mie de l’apprenant et l’apprentissage autodirigé.

Mes recherches portent sur l’apprentissage et le travail colla-boratif à distance, la conception d’environnements d’apprentissage, les communautés de pratique et les forums de discussion.

Je m’intéresse également aux nou-velles pratiques de recherche et à la formation de la relève scientifique. Dans mon enseignement comme dans mes recherches, ma principale préoccupation est de proposer des environnements d’apprentissage qui invitent les apprenants à vivre une expérience authentique de partage et de collaboration.

À propos deFrance

© ESEN, Colloque international e-éducation, 2013 - P33

France HENRI

Qu’est-ce au juste qu’un environnement personnel d’ap-prentissage? Dans la littérature scientifique, les environ-nements personnels d’apprentissage sont conceptuali-sés de diverses façons selon l’identité professionnelle et l’orientation disciplinaire des auteurs. Les différents points de vue développés sur les EPA ne sont pas contra-dictoires. Ils présentent des regards complémentaires sur la réalité des EPA et proposent des cadres d’inter-prétation pour comprendre les caractéristiques, les usages et les potentialités de ce type d’environnement.

Certains auteurs voient dans les EPA un concept fort qui permet de faire le passage vers de nouvelles approches pédagogiques adhérant à un nouveau modèle éducatif fondé sur l’autonomie de l’apprenant et l’apprentissage autodirigé. Dans ce modèle, l’EPA est considéré comme un vecteur fécond d’apprentissage qui facilite la réflexion de l’apprenant sur son propre apprentissage et qui favorise le développement de sa capacité à gérer ses apprentissages.

Colloque international e-éducation

Environnement personnel d’apprentissage (EPA)Un concept, une technologie, un système d’activité, un instrument ?

[L’EPA] favorise le développe-ment de la capa-cité [de l’appre-nant] à gérer ses apprentissages.

P34 - © ESEN, Colloque international e-éducation, 2013

Colloque international e-éducation

L’EPA s’avère un moyen dont l’apprenant a la pleine maîtrise et qui lui permet d’exercer un réel pouvoir sur ses apprentissages. L’usage intentionnel d’un EPA aurait pour effet d’augmenter la capacité à faire des choix et à élaborer des stratégies pour apprendre.

D’autres abordent les EPA comme une solution technologique qui caractérise une forme d’appren-tissage en ligne plus personnelle et plus collective.

L’EPA, associé aux technologies du web social, est alors décrit comme un assemblage personnel de différentes applications, de services informa-tiques et autres types de ressources d’appren-tissage. Il est composé des mêmes technologies que l’apprenant utilise dans différents contextes de vie : le travail, la maison, les loisirs, l’école.

Ainsi, l’apprentissage peut être soutenu de manière continue à travers le temps et l’es-pace, presque partout grâce aux réseaux sans fil et aux appareils de communication mobile.

D’autres encore tentent de mettre en évidence l’ancrage social de l’apprentissage en s’appuyant sur la théorie de l’activité (Engeström, 1987) pour conceptualiser l’EPA comme un système d’acti-vité complexe. Selon cette théorie, les interac-tions humaines médiées à travers l’usage d’outils sont source de médiations multiples, par exemple, des médiations épistémiques, réflexives ou inter-personnelles. Les outils et les ressources compo-sant l’EPA et les médiations qu’ils génèrent consti-tuent des facteurs déterminants de l’apprentissage.

Dans les écrits scientifiques, tous s’entendent sur le fait qu’un EPA n’est pas quelque chose qui peut être imposé, mais plutôt quelque chose qui est conçu et construit par l’apprenant lui-même, de manière autonome, pour répondre à ses propres besoins.

Peu d’auteurs se sont penchés de manière appro-fondie sur cette caractéristique de l’EPA qui fait de l’apprenant à la fois le concepteur, le développeur et l’utilisateur de son EPA. Qu’il soit conçu comme une approche pédagogique, comme un système technologique ou un système d’activité complexe, la conception, le développement et l’usage d’un EPA requièrent des compétences. Les bases de l’ingénierie pédagogique font généralement réfé-

rence à différents spécialistes pour concevoir et développer les environnements d’apprentissage.

Dans le cas des EPA, l’apprenant, seul artisan possible, possède-t-il les compétences pour me-ner à bien la conception de son EPA, pour choi-sir les ressources et les technologies les mieux adaptées à ses besoins pour ensuite les assem-bler dans un tout cohérent et efficace, ergono-miquement et technologiquement performant ?

L’assemblage par l’apprenant de ressources et de technologies du web social ne constitue pas auto-matiquement un EPA efficace. L’utilisation de ces technologies assemblées d’une quelconque manière n’assure pas non plus un apprentissage efficace.

Comment soutenir l’apprenant dans la construction de son EPA ? Comment l’aider à évaluer l’efficacité de son EPA ? Comment l’aider à faire évoluer son EPA ? Pour traiter ces questions, l’approche instrumentale offre un cadre théorique fécond en faisant de l’utilisa-teur l’artisan de son instrument à travers un processus de genèse instrumentale qui allie activités construc-tives et activités productives dans deux sous-pro-cessus d’instrumentation et d’instrumentalisation.

L’activité constructive (instrumentation) porte sur le développement d’organisateurs de l’activité que sont les schèmes alors que l’activité productive (instru-mentalisation) est celle par laquelle l’apprenant rend l’EPA conforme à ces intentions. Selon cette approche, la genèse instrumentale permettrait à l’apprenant de s’engager dans une dynamique qui l’amènerait à une pleine possession de son EPA et de son apprentissage.

© ESEN, Colloque international e-éducation, 2013 - P35

Colloque international e-éducation

Intervention conjointe sur les EPA de France HENRI (à l’ESEN ) et Daniel PERAYA (en visio conférence depuis Genève)

Retrouvez cette conférence sur le site de l’ESENhttp://www.esen.education.fr/fr/ressources-par-type/conferences-en-ligne/

Échafaudages, le magazine radio de l’ESEN questionne :

Apprendre et en-seigner à l’ère du numériqueOlivier DULAC reçoit : Bernadette CHARLIER, France HENRI, Sébastien MOREAU, et Jean-François TAVERNIER. Réalisation technique : Yannick BERNARD et Cécile PIRES

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L’apprentissage en réseau offre des opportunités d’amélioration de l’enseignement et de l’apprentis-sage sans précé-dent, mais il en-traîne aussi des bouleversements qui peuvent sus-citer de terribles angoisses !

Terry Anderson est professeur et cher-cheur auprès du Centre for Distance Education et du Technology Enhanced Knowledge Research Centre de l’université Athabasca, université ouverte du Canada. Titulaire d’un doctorat, Terry Anderson est, depuis 1985, très impliqué dans le développement et la mise à disposition de l’enseignement à distance, l’enseignement proprement dit et la recherche.

Il a beaucoup publié dans ce domaine de l’enseignement à distance et des technolo-gies éducatives et est coauteur ou coédi-teur de neuf livres et de nombreux articles. Ses travaux les plus récents ont fait l’objet de publications sous licence Creative Com-mons, et ces textes ainsi que les travaux d’autres auteurs spécialisés dans l’ensei-gnement à distance sont publiés dans la revue « Issues in Distance Education » de l’Athabasca University Press.

Suite de la présentation de Terry en fin d’article

À propos deTerry

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Terry ANDERSON

Il y a là une chance à saisir pour les édu-cateurs : celle de se muer en chercheurs.

“Nous vivons dans des sociétés de plus en plus complexes et de plus en plus technologiques dans lesquelles les organisations structurées en réseau sont en position dominante. Les réseaux, en tant qu’en-tités sociales, économiques et politiques, jouent un rôle de plus en plus important dans toutes les instanciations et institutions écono-miques, dans l’organisation sociale, et bien entendu dans l’éducation.

Les modèles éducatifs en réseau présentent une forte capacité d’amélioration des modalités de production et de reproduction des connaissances, mais ils imposent, au passage, une transfor-mation des activités des enseignants, des apprenants et des insti-tutions. Si ces transformations sont durables (c’est-à-dire si elles génèrent des améliorations progressives), elles créent aussi des bouleversements en établissant de nouveaux modèles d’éduca-tion moins coûteux et plus accessibles que l’enseignement tra-ditionnel en classe. Ces bouleversements constituent une me-nace pour les emplois traditionnels des enseignants et imposent aux apprenants un surcroît d’autonomie et d’autodiscipline.

Pour bien appréhender ces transformations, on étudiera avec profit les trois types d’interactions éducatives qui structurent

Colloque international e-éducation

Trouver sa place dans le nouvel univers de l’enseignement et des apprentissages en réseau

P40 - © ESEN, Colloque international e-éducation, 2013

l’éducation : l’interaction apprenant-enseignant, l’interaction apprenant-apprenant, et l’interac-tion apprenant-contenu. J’ai avancé par ailleurs que pour permettre une expérience éducative de qualité, il fallait qu’au moins l’une de ces trois interactions soit présente à des niveaux élevés.

Le coût de production et de diffusion des contenus éducatifs ne cesse de baisser, à tel point que des enseignants, voire des étudiants peuvent aujourd’hui produire des contenus multimédia de qualité et les diffuser sur internet pour un coût extrêmement faible.

Or, la production de ces contenus permet d’opérer le remplacement de l’interaction étudiant-apprenant par une interaction é tud iant -contenu renforcée, comme le démontrent les cours en ligne ouverts et massifs (MOOC, Massive Open Online Courses) qui s’adressent le plus souvent à des dizaines de mil-liers d’étudiants.

L’interaction étu-diant-étudiant est également renfor-cée par la possi-bilité d’établir un dialogue et une collaboration par-delà les frontières géographiques et temporelles. Les étudiants peuvent se rencontrer, s’organiser et coordonner leurs interactions éducatives en utili-sant toute une palette d’outils de réseautage social. Au bout du compte, les réseaux permettent aux enseignants d’échanger avec les étudiants à très bas coût mais aussi de se livrer, entre enseignants, à toute une série de pratiques communautaires.

Cependant, étudiants et enseignants doivent, pour pouvoir bénéficier de ces modalités d’interactions privilégiées, améliorer et cultiver leurs compétences et leur efficacité en matière de réseautage. Pour être véritablement efficaces, ils doivent notamment être en mesure de créer et d’alimenter des réseaux de

personnes et de ressources en constante évolution. Cela impose d’assurer une présence dynamique sur le net et de créer et d’administrer les contenus diffusés.

Les enseignants sont ainsi en train de passer du statut de dispensateurs de contenus à celui de créateurs, d’organisateurs, de filtres et d’agrégateurs de conte-nus. De consommateurs passifs, les étudiants de-viennent, de leur côté, des consommateurs avertis de services éducatifs, capables de créer leurs propres interactions éducatives à partir du choix extrême-ment riche que leur offre le réseau. Les institutions sont, quant à elles, en train de passer de la gestion de salles de cours à la création d’espaces, de nœuds et de ressources virtuels et axés sur les communautés

au sein desquelles des formes variées d ’ i n t e r a c t i o n s éducatives pour-ront prospérer.

Les réseaux trans-forment en profon-deur les échanges entre étudiants, enseignants et institutions. Or, ces bouleverse-ments sont extrê-mement difficiles à prédire, et à plus forte raison à maî-triser. Il y a là une chance à saisir pour les éduca-

teurs : celle de se muer en chercheurs. En conce-vant, en mettant en œuvre et en testant de nouvelles formes d’intervention en réseau tout en approfon-dissant les modalités d’enseignement, de créa-tion de contenu et d’activités d’apprentissage à l’ère des réseaux, les enseignants pourront se for-ger des carrières gratifiantes basées sur les com-pétences qu’ils ont acquises dans leur discipline.

Colloque international e-éducation

Les enseignants sont ainsi en train de passer du statut de dispensateurs de conte-nus à celui de créateurs, d’organisateurs, de filtres et d’agrégateurs de contenus.

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© ESEN, Colloque international e-éducation, 2013 - P41

Colloque international e-éducation

L’article original complet en anglais est disponible à l’adresse suivante ou par le QR Code http://www.esen.education.fr/fileadmin/user_upload/fad/e-education/anderson_t_en.pdf

L’article complet traduit en français est disponible à l’adresse suivante ou par le QR Code http://www.esen.education.fr/fileadmin/user_upload/fad/e-education/anderson_t_fr.pdf

À propos de Terry (suite)...

Les travaux de recherche de Terry Anderson s’ar-ticulent essentiellement autour des questions d’interaction entre étudiants, enseignants et contenus. Sa collaboration avec Randy Garrison sur le modèle de « communauté de recherche » portant sur l’étude de la présence sociale, en-seignante et cognitive, a reçu un accueil très positif et sert depuis de base théorique à la plu-part des études traitant de la pratique et de la re-cherche en matière d’enseignement à distance.

Terry Anderson a publié en 2004 un théorème d’équivalence des interactions dans lequel il avance qu’il est possible d’assurer un appren-tissage de grande qualité en garantissant une interaction étudiant-étudiant, étudiant-ensei-gnant ou - et cela intéressera tout particuliè-rement les acteurs de l’enseignement à dis-tance - étudiant-contenu. Ce théorème des équivalences est aujourd’hui appliqué dans le domaine des cours en ligne ouverts et mas-sifs (MOOC, Massive Open Online Courses) et des ressources éducatives libres (REL).

Plus récemment, Terry Anderson a collabo-ré avec son collègue Jon Dron autour de la conception et de l’exploitation d’une « boîte à outils des réseaux sociaux » (« boutique social network »), réservée exclusivement à la communauté de l’université d’Athabasca au sens large (voir landing.athabascau.ca).

Terry Anderson est actif au sein de différentes associations d’éducation à distance au niveau provincial, national et international, et il inter-vient régulièrement en tant qu’invité de marque dans des conférences professionnelles et uni-versitaires. La plupart de ses diaporamas sont accessibles sur SlideShare à l’adresse suivante :

http://www.slideshare.net/search/slideshow?searchfrom=header&q=%22terry+anderson%22

Terry Anderson enseigne les technologies et la recherche éducatives dans le cadre des mas-ters et doctorats en sciences de l’éducation de l’université d’Athabasca dédiés à la recherche et à la formation pour l’enseignement à distance.

Il a aussi été éditeur, au cours des dix dernières années, de l’International Review of Research on Distance and Open Learning (IRRODL www.irrodl.org). L’IRRODL est, à ce jour, la revue scien-tifique consacrée à l’enseignement à distance la plus lue et la plus citée et elle bénéficie d’une licence Creative Commons. Les articles de l’IR-RODL sont systématiquement révisés en aveugle par les pairs et, après acceptation, publiés au format HTML, PDF, MP3 (audio) et EPUB (mobile).

La page d’accueil de Terry Ander-son est accessible à l’adresse suivante : https://landing.athabascau.ca/pg/profile/terrya et l’adresse de son blog « Virtual Ca-nuck » est la suivante : terrya.edublogs.org

Ouvrir la for-mation et créer de la présence à distance pour favoriser l’au-tonomie de l’apprenant.

Annie Jézégou est enseignant-cher-cheur habilité à diriger des recherches (HDR) en sciences de l’éducation à l’Institut Mines-Télécom (école des Mines de Nantes). Son laboratoire de rattachement est le centre de recherche sur l’éducation, les apprentissages et la didactique (CREAD) de l’université de Rennes 2.

Avant d’intégrer l’enseignement supé-rieur, elle a exercé pendant plus de dix ans dans le domaine du conseil en ingénierie de la FOAD en entreprises (grands groupes) et en organismes de formation.

À propos d’Annie

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© ESEN, Colloque international e-éducation, 2013 - P43

Annie JÉZÉGOU

Substituer le « dialogue » par

la « présence ».

“À propos d’Annie (suite) ...

Depuis près de 15 ans, ses travaux portent sur la modé-lisation des environnements éducatifs médiatisés favo-rables à l’exercice et au développement de l’autonomie des adultes en formation.

À ce jour, une telle modélisation articule deux dimensions : • l’ouverture des environnements d’apprentissage à distance, • la présence en e-learning. Les résultats de ces tra-vaux montrent que « l’ouverture » et « la présence », telles que définies et caractérisées par l’auteur, sont deux dimensions favorables à l’autodirection de l’ap-prenant.

Les travaux d’Annie Jézégou font l’objet de nombreuses publications scientifiques tant au niveau national qu’au niveau international.

Colloque international e-éducation

La distance transactionnelle : les deux variables de « l’ouverture » et du « dialogue » vues sous l’angle de sa dimension sociale

et Jérôme ENEAU

La part d’autrui dans la forma-tion de soi.

Titulaire d’un PhD en andragogie de l’université de Montréal et docteur en sciences de l’éducation de l’univer-sité de Strasbourg, Jérôme Eneau est actuellement maître de conférences habilité à diriger des recherches (HDR), à l’université Rennes 2.

Il était auparavant maître de confé-rences à l’institut des sciences et pratiques d’éducation et de formation (IPSEF) de l’université Lyon 2, où il était notamment responsable du campus numérique FORSE (forma-tion et ressources en sciences de l’éducation).

Ses recherches portent sur les dimensions sociales de l’autonomie, en formation d’adultes.

À propos deJérôme

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Jérôme ENEAU

Avec le dia-logue, l’ouver-ture du dispo-sitif devient alors aussi une forme d’ouverture et de présence… à autrui.

“La théorie de la distance transactionnelle, élaborée par Moore (1993) aux États-Unis, s’appuie sur le principe selon lequel la distance, en formation, est principalement « tran-sactionnelle » et non pas uniquement « spatiotemporelle ». Cette distance peut s’appliquer à tout type de dispositif de formation, mais elle prend toute sa dimension interpré-tative dans un contexte soumis à un éclatement spatio-temporel et notamment dans les dispositifs de e-learning.

Cependant, les recherches empiriques menées de-puis 20 ans n’ont pas permis de valider cette « théo-rie ». Une de ses principales fragilités tient au faible ancrage théorique de deux des variables-clés asso-ciées à la distance transactionnelle (Corsky & Caspi, 2005 ; Jézégou, 2007) : la « structure » et le « dialogue ».

La « structure » correspond à la flexibilité ou au niveau d’in-dividualisation du dispositif (Moore, 1993). Jézégou (2007) associe cette variable au degré de liberté de choix offert

Colloque international e-éducation

La distance transactionnelle : les deux variables de « l’ouverture » et du « dialogue » vues sous l’angle de sa dimension sociale

et Annie JÉZÉGOU

P46 - © ESEN, Colloque international e-éducation, 2013

à l’apprenant pour qu’il puisse structu-rer lui-même ses situations d’apprentissage.

Dès lors, la flexibilité de la structure, évoquée par Moore, correspond au de-gré d’ouverture du dispositif (Jézégou, 2010). Selon Moore (1993), le « dialogue » renvoie aux interactions sociales entre le formateur et l’apprenant via des outils de communication à distance.

La définition attribuée à cette variable s’avère toutefois peu opérationnelle et exclut, de plus, la dimension sociale ou collective liée aux interactions à dis-tance entre les apprenants eux-mêmes.

Une telle dimension sociale conférée au « dialogue », en lien avec la distance transactionnelle, est plus particulièrement mise en débat dans la conférence, à partir d’un regard croisé des travaux d’Annie Jézégou et de Jérôme Eneau.

Du « dialogue » à la « présence »

Annie Jézégou propose de substituer le « dialogue » par la « présence » tel que modélisée dans ses tra-vaux sur la formation à distance (e-learning). Le modèle de la présence (Jézégou, 2012) mobilise les travaux anglophones américains sur les communi-ties of inquiry in e-learning, les recherches franco-phones sur la collaboration à distance, la théorie du conflit socio-cognitif et la perspective transac-tionnelle de l’action. La présence résulte de cer-taines formes d’interactions sociales verbales entre le formateur et les apprenants mais aussi entre les apprenants au sein d’un espace numérique de com-munication, cela malgré la séparation physique. La présence est déclinée en trois dimensions dispo-sant chacune d’une définition étayée au plan théo-rique : la présence socio-cognitive (1), la présence socio-affective (2) et la présence pédagogique (3).

Une des deux formalisations schématiques du modèle est tridimensionnelle : elle s’appuie sur la proposition selon laquelle plus le degré de présence de chacune des trois dimensions augmente, plus le degré de pré-sence globale augmente et plus ce dernier favorise l’émergence et le développement d’une commu-

nauté d’apprentissage en ligne et donc la construc-tion individuelle et collective de connaissances :

Représentation tridimensionnelle de la pré-sence en e-learning (Jézégou, 2012)

Par ailleurs, Jézégou défend également l’hypothèse selon laquelle un degré élevé de présence asso-cié à un degré élevé d’ouverture traduit une faible distance transactionnelle ou ce qu’elle préfère nommer une forte « proximité transactionnelle ».

Présence, dialogue et ouverture

Jérôme Eneau, quant à lui, propose d’examiner les équivoques du terme de « dialogue », dans les travaux sur la formation à distance, en revenant à la place de ce terme dans le champ de la formation des adultes. À ce propos, les traditions françaises et nord-américaines de la formation et de l’autoformation soulèvent des questions théoriques et méthodologiques importantes.

Les perspectives dialogiques nord-américaines, is-sues des travaux portant sur le Dialogue de Bohm, sur le codéveloppement professionnel ou encore sur les communautés de pratique, rejoignent les travaux sur la formation recommandant la mise en place d’appren-tissages fondés sur le contrat, la coopération et la ré-ciprocité (Knowles, 1990 ; Labelle, 1996 ; Eneau, 2005, 2007). Issus d’approches théoriques variées (philoso-phie de l’éducation, psychologie sociale, anthropolo-gie), ces travaux mettent l’accent sur les relations in-terpersonnelles, dans le processus d’apprentissage, et

Colloque international e-éducation

© ESEN, Colloque international e-éducation, 2013 - P47

Colloque international e-éducation

renouvellent aujourd’hui, dans les recherches sur la coopération et la collaboration à distance, les ques-tions « d’apprentissage réflexif avec et par autrui ».

Au-delà de « l’ouverture » du dispositif, reflétant l’autonomie (la liberté, le choix, l’initiative, la res-ponsabilité) de l’apprenant, l’exploration des pos-sibilités offertes par ce « dialogue » offre ainsi de nouvelles voies pour examiner la place de « caté-gories affectives » de l’apprentissage, notam-ment dans la formation à distance, telles que la réciprocité, la confiance ou la reconnaissance.

Différents exemples de recherches sur ces caté-gories peuvent illustrer la place de cette approche dialogique dans les échanges en ligne : les travaux sur le « scénario collaboratif », la « confiance à dis-tance » ou la « mémoire transactive », dans l’ensei-gnement supérieur en particulier, développent ainsi l’étude des « dimensions sociales » de la formation et de l’autoformation (Eneau, 2012). Avec le dia-logue, l’ouverture du dispositif devient alors aussi une forme d’ouverture et de présence… à autrui.

Références

Gorsky, P., & Caspi, A. (2005). A critical analysis of transactional distance theory. The Quarterly Review of Distance Education, USA, 6 (1), 1-11.

Eneau, J. (2005). La part d’autrui dans la formation de soi. Autonomie, autoformation et réciprocité en contexte organisationnel. Paris : L’Harmattan.

Eneau, J. (2007). Construire la confiance à dis-tance : autoformation et nouveaux dispositifs de formation en situation de travail. In E. Tri-by & E. Heilmann (dir.). A distance : apprendre, travailler, communiquer (pp. 187-200). Stras-bourg : Presses de l’Université de Strasbourg.

Eneau, J. (2012). Apprenant adulte et proces-sus d’autoformation. Les dimensions sociales de l’autonomie en formation. Note de Syn-thèse présentée pour l’Habilitation à Diriger des Recherches. Rennes : Université Rennes 2.

Eneau, J., Bertrand, E. & Lameul, G. (2012). Se former et se transformer : perspective cri-

tique et formation universitaire aux métiers de la formation. Revue Internationale de Péda-gogie de l’Enseignement Supérieur, 28-1/2012.

Jézégou, A. (2007). La distance en formation : premier jalon d’opérationnalisation de la théo-rie de la distance transactionnelle. Distances et Savoirs, 5(3). Paris, Hermès - Lavoisier, 342-366.

Jézégou, A. (2010). Le dispositif GEODE pour éva-luer l’ouverture d’un environnement éducatif. Journal of Distance Education / Revue de l’Edu-cation à Distance, 24(2). Vancouver, Canada, 83-108. http://www.jofde.ca/index.php/jde/a...

Jézégou, A. (2012). La présence en e-learning : modèle théorique et perspectives pour la re-cherche. Journal of Distance Education / Revue de l’Education à Distance. Vancouver, Canada, 26(1), http://www.jofde.ca/index.php/jde/a...

Knowles, M. (1990). L’apprenant adulte. Paris : Édi-tions d’Organisation.

Labelle, J.M. (1996). La réciprocité éducative. Pa-ris : PUF.

Moore, M.G. (1993). Theory of transactional distance. In : Keegan, D (eds). Theoretical Principles of Dis-tance Education. New York, USA : Routledge, 22-38. h t t p : / / w w w . u n i - o l d e n b e r g . d e / z e f /c d e / f o u n d / r e a d i n g s / m o o r e 9 3 . p d f

Échafaudages, le magazine radio de l’ESEN questionne :

Apprendre en réseau et à distanceOlivier DULAC reçoit : Jérôme ENEAU, Christophe JEUNESSE, et Annie JÉZÉGOU. Réalisation technique : Yannick BERNARD et Cécile PIRES

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Sept années d’utilisation d’une plateforme péda-gogique : l’apport d’un autodidacte à l’écoute des spécialistes.

Sébastien Moreau est maître de confé-rences à l’université François Rabelais depuis 2004. Enseignant-chercheur en biologie animale, il coordonne le parcours d’unités d’enseignement d’ouverture «Développement Durable» et préside le jury de validation des acquis de l’expé-rience de l’UFR sciences et techniques de Tours. Il intervient également en licence de biologie et dans le master 2 écologie comportementale, évolution et biodi-versité. Depuis 2007, il est l’un des deux correspondants CELENE de l’UFR sciences et techniques. Il assiste et forme les utili-sateurs de la plateforme pédagogique au sein de l’UFR Sciences et Techniques (389 cours en ligne, soit 10% des cours de la plateforme) et administre directement une dizaine de cours en ligne pour ses propres enseignements.

Il effectue sa recherche au sein de l’institut de recherche sur la biologie de l’insecte (IRBI, UMR 7261 CNRS/Université François Rabelais), dans l’équipe évolution des virus libres et intégrés dirigée par Jean-Michel Drezen et Elisabeth Herniou. Ses thématiques de recherche concernent l’étude des venins et des virus symbio-tiques produits par des guêpes parasites (18 publications depuis 2000).

À propos deSébastien

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© ESEN, Colloque international e-éducation, 2013 - P51

Sébastien MOREAU

J’ai pris le parti de commencer

à mûrir mes projets péda-gogiques avec un semestre d’avance.

“Les enseignants et enseignants-chercheurs du « Supérieur » français sont de sacrés petits veinards ! Certes les condi-tions sociales et matérielles dans lesquelles nous exerçons se dégradent d’année en année et nous serons probablement un jour moins nombreux que les gagnants de l’Euromillion…

Mais nous possédons une liberté dans l’exercice de nos fonctions de pédagogues à nulle autre pareille. Liberté dans les thèmes abor-dés au cours de nos enseignements, dans les limites raisonnables d’une maquette pédagogique grossièrement ficelée tous les cinq ans. Liberté d’expression, dans les bornes établies par la bien-séance, la déontologie et quelques jurisprudences piquantes. Mais surtout, liberté pratiquement totale dans le choix et la mise en œuvre des formes de transmission de nos savoirs et de nos compétences.

Ce n’est que la conséquence heureuse d’une quasi ab-sence de formation initiale académique au métier d’ensei-gnant qui nous oblige à apprendre sur le tas, selon un mode « essais-erreurs » parfois douloureux mais toujours utile.

Colloque international e-éducation

Plateforme pédagogique : les points de vue de…

Sébastien Moreau, maître de conférences en biologie animale Claude Hoinard, maître de conférences, correspondant CELENE

Lionel Fandeur, ingénieur pédagogique

Brice Courtin, ingénieur technique.

P52 - © ESEN, Colloque international e-éducation, 2013

« L’expérience est le nom que chacun donne à ses er-reurs » a écrit Oscar Wilde1 , auquel nous pourrions opposer Konrad Adenauer, pour qui « l’oubli de ses propres fautes est la plus sûre des absolutions ». Lors de mes premières années d’e-enseignant, j’avoue avoir accumulé beaucoup, beaucoup d’expérience… mais je n’ai rien oublié ! Depuis 7 ans, j’explore les nombreuses possibilités offertes par la plateforme pédagogique com-mune aux universités d’Orléans et de Tours tandis que certains, de plus en plus minoritaires, hésitent encore à investir ce nouveau cyberespace de liberté. « Trop com-pliqué ! Trop chronophage ! Trop superficiel ! » zinzi-nulent-ils2 . « Apprenez ! Gérez ! Faites évoluer ! » piaule-je3 avec à l’appui quelques conseils issus de l’analyse d’essais plus ou moins heureux… Tour d’horizon.

1. De la messagerie au cours en ligne

La première question qui mérite toute l’attention, qu’on soit geek ou allergeek aux technologies numériques est de savoir si l’atteinte de ses objectifs pédagogiques doit passer obligatoirement par l’utilisation de technologies sophistiquées. La réponse est : ça dépend ! C’est ce qu’ont compris depuis longtemps déjà les utilisateurs de ta-bleaux blancs interactifs (TBI) et que je propose d’appeler « principe de Chamayou4 » . Ce principe s’applique aussi aux plateformes pédagogiques sur lesquelles les ensei-gnants déposent des ressources et créent des activités dans des espaces partagés, ou cours en ligne. Je connais des collègues qui, intervenant dans des formations aux effectifs réduits (Licences Professionnelles, Master), pré-fèrent diffuser leurs supports de cours par courriel plutôt que d’investir du temps dans l’apprentissage de la créa-tion et de l’administration d’un cours en ligne. Dans une démarche de diffusion des connaissances unidirection-nelle et verticale, cette réponse technologique est res-pectable car parfaitement adaptée à des besoins simples.Lorsqu’ils franchissent le pas et créent un cours en 1 « Experience is the name everyone gives to their mistakes.» Lady Windermere’s Fan, Acte III, 1892.2 Le zinzinulement est le cri du roitelet.3 Le piaulement est le cri de l‘albatros, de l’épervier mais aussi du chacal et du poulet ! Allez comprendre…4 Gilles Chamayou, Professeur d’Histoire-Géographie, écrivait fort justement en 2010 : « Lorsque je prépare une séquence où je compte utiliser le TBI, j’ai pris l’habitude de me poser cette question : Est-ce que je peux faire la même chose avec mes feutres ? Si la réponse est oui, alors l’utilisation du TBI n’est pas pertinente et risque de faire passer le coté technique devant les aspects pédagogiques.»http://www.youscribe.com/catalogue/ressources-pedagogiques/education/college-lycee/retour-au-site-academique-aix-mar-seille-histoire-et-geographie-1660904

ligne, j’observe qu’une majorité de nos collègues agit par simple mimétisme, sans réel besoin nouveau à satis-faire. Reproduisant souvent leur familière démarche de transmission verticale des connaissances, leur cours en ligne ne sert qu’à la diffusion de supports pédagogiques classiques et est clairement sous-exploité au regard des possibilités offertes. La mise à disposition d’une plateforme pédagogique pour ces utilisateurs pourrait même apparaître comme une solution honteusement surdimensionnée voire dispendieuse en ces temps de raréfaction des deniers publics... Toutefois, il est pri-mordial de leur donner accès à ce palier technologique afin que soient réunies les conditions propices à une évolution ultérieure de leurs pratiques. Cette évolution sera grandement encouragée par l’organisation de ren-contres avec des utilisateurs plus avancés sous la forme de séminaires ou de formations auxquels participent les correspondants CELENE5 et l’ingénieur pédagogique de notre université (voir points de vue de Claude Hoinard et Lionel Fandeur en fin d’article). Ensemble, ils aident les utilisateurs de base à prendre conscience d’un nou-veau champ des possibles et leur apportent conseils et solutions concrètes. Les demandes les plus courantes concernent la facilitation des échanges de documents volumineux (dépôts de ressources ou rendus de devoirs) et l’évaluation automatisée des contrôles continus (tests en ligne). De manière plus marginale, certains cherchent aussi à gagner en interactivité (forums, messagerie ins-tantanée, bases de données, sondages) ou à proposer des activités pédagogiques collaboratives (wikis, ate-liers) voire conditionnelles (leçons). Autant de fonction-nalités qui ne sont pas offertes par une messagerie élec-tronique et qui justifient la création d’un cours en ligne. L’existence d’un nouveau besoin à satisfaire n’est pas un prérequis indispensable mais semble agir positivement sur la motivation de l’e-enseignant à s’approprier l’outil plateforme pédagogique au-delà du service recherché.

En effet, les utilisateurs les plus actifs cherchent moins à imiter qu’à innover. Ils contribuent à repousser toujours plus loin les limites des possibilités proposées par notre ingénieur technique (voir point de vue de Brice Courtin en fin d’article). Plus ils connaissent l’outil et mieux ils iden-tifient les besoins qu’il est susceptible de satisfaire. En retour, plus ils satisfont de besoins et plus ils cherchent à tester les fonctionnalités de l’outil. Une fois qu’on a goûté à cette boucle vertueuse, il devient très difficile de s’en détourner ! Les espaces de cours s’enrichissent alors pour devenir de réels portails pédagogiques où activi-

5 CELENE : Cours En Ligne et Enseignement Numérique pour les Etudiants des universités d’Orléans et de Tours. Nom donné à notre plateforme pédagogique actuellement basée sur l’appli-cation web sous licence libre MOODLE 2.3.4.

Colloque international e-éducation

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tés et ressources se complètent, où la pédagogie se différencie aisément et où la part d’autoformation et d’enseignement à distance prend de plus en plus d’ampleur. Plus transversaux dans leur conception, ces cours sont très ouverts sur le monde extérieur (fils RSS, intégration de vidéos), assouplissent les conditions de suivi de l’enseignement (podcasting audio et vidéo, diffusion des conférences en direct) et redonnent aux étudiants un rôle actif dans leur for-mation en partageant le leadership (co-animation de forum, management de groupes, auto-évaluations de travaux collectifs). Cette évolution ultime de l’utilisa-teur enseignant questionne inévitablement son rôle, ses fonctions et la plus-value de ses interventions en présentiel… Pour en revenir au principe de Cha-mayou, plus je m’investis dans la plateforme pédago-gique, plus je réfléchis avant de prendre un feutre…

2. Remettre les étudiants à leur place !

Je répète souvent à mes étudiants que leur travail à l’université consiste à « apprendre pour connaître, comprendre pour agir », ce qui paraphrase un peu Na-rada6 , mais bon. L’utilisation de la plateforme pédago-gique permet de les accompagner tout au long de ce parcours, de l’acquisition de leurs premières connais-sances à la validation de la maîtrise de compétences professionnelles. Je veille à ce que cet accompa-gnement numérique puisse toucher tous les étu-diants, sans distinction de niveau, d’origine ou de res-sources. Ainsi mes tests en ligne comportent toujours quelques questions très faciles, qui feront sourire le premier quartile de la promotion mais qui permettront au quatrième d’obtenir une note-plancher. Cette note permet de ne pas se démotiver et incite à poursuivre ses efforts malgré les difficultés rencontrées. Lorsque ces tests se déroulent en temps limité, j’accorde aux étudiants au moins le double de mon meilleur temps pour réaliser l’exercice, afin que ceux qui peinent à lire le français aient le temps de lire tous les énon-cés. L’intégralité de mes notes de cours est dispo-nible pour les étudiants étrangers, salariés, grands sportifs ou en situation de handicap sous la forme de documents électroniques (textes ou diaporamas commentés). Enfin, la plupart de mes cours en ligne comportent un sondage grâce auquel les étudiants qui souhaitent une version papier de mes supports pé-dagogiques peuvent se faire connaître. En effet, une enquête menée auprès des étudiants tourangeaux en 2006 avait montré que moins de 80% d’entre eux 6 Narada ou Nârada, disciple de Bouddha: « Il faut ap-prendre pour connaître, connaître pour comprendre, com-prendre pour juger. »

possédaient un ordinateur7 . Certes, c’était avant le lancement de notre plateforme pédagogique et avant que l’Université Numérique en Région Centre (UNRC) ne soit réellement opérationnelle. Mais la proportion d’étudiants en situation de précarité n’a pas baissé pour autant et certains peuvent avoir des difficultés à accéder régulièrement à un ordinateur ou à une impri-mante. En moyenne, 1 étudiant sur cinq me demande ce service si je le propose tandis qu’aucun n’osera le faire spontanément. Ceci confirme l’existence d’un besoin cryptique et montre que les tendances de 2006 sont toujours d’actualité bien que le taux d’équipe-ment en matériel informatique ait probablement aug-menté… Ces différentes précautions me permettent de remettre les étudiants à leur place, évidemment centrale au sein de mes projets pédagogiques !

3. Construire son projet pédagogique loin du tumulte des amphis

Après avoir goûté lors de mes deux premières années d’exercice aux joies des cours magistraux (CM) pré-parés entre 18h et 6h du matin pour un cours commen-çant à 8h , j’ai pris le parti de commencer à mûrir mes projets pédagogiques avec un semestre d’avance. Je concède que la conférence en amphi est encore pré-parée dans l’urgence pour garder de la spontanéité et coller à l’actualité des sujets, au moins la première fois. Ce qui a changé, c’est que ce cours n’est plus qu’un moment au sein d’un processus plus large, le projet pé-dagogique, et ne constitue plus un but en soi. Le cours peut initier le processus, le compléter ou l’achever.Ainsi, il m’arrive d’aborder un sujet par le biais de la présentation de l’œuvre majeure d’un auteur (c’est une pratique devenue trop rare dans les UFR scien-tifiques et qui mériterait d’être encouragée). Le cours en ligne permet de prolonger la présentation faite en présentiel par la mise à disposition de sources mul-timédias. Chaque étudiant peut aussi renseigner des bases de données pour signaler à tous l’existence d’un ouvrage ou d’un site web intéressant. Plus classi-quement, je profite des sessions en présentiel (CM ou TD) pour faire le point avec les étudiants sur les pro-jets collaboratifs qu’ils doivent mener dans le cours en ligne (rédaction de wikis par exemple). Chaque groupe s’est organisé autour d’un responsable (grâce à une activité de type sondage) avec qui je commu-

7 Selon OVE Tours Actu’ n°3 « Étudiantes et étudiants face à l’informatique », les pourcentages d’étudiants possédant un ordinateur en 2005 étaient de 64.2% en première et deu-xième années, 74.3% en troisième et quatrième années et 80% en cinquième année.

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nique de manière privilégiée. Enfin, je peux demander aux étudiants de lire certains textes téléchargés à partir du cours en ligne et de venir présenter et com-menter leur contenu au début du CM. L’attribution de points bonus permet de motiver les plus réticents à passer au tableau. Je rectifie si nécessaire et valide les commentaires sur ce qui était autrefois une partie de mes notes de cours ! Les mêmes connaissances sont ainsi transmises mais le leadership est alors partagé et l’apprentissage se fait de manière plus participative.Une anticipation de six mois sur le lancement d’un pro-jet pédagogique est un délai raisonnable pour fixer ses objectifs, explorer les fonctionnalités de la plateforme et déterminer celles qui seront les mieux adaptées, se former ou s’informer sur leur fonctionnement, mettre en œuvre des tests préliminaires et planifier le projet (date de lancement, jalons, date de rendu, critères d’éva-luation des étudiants et indicateurs de succès pour la démarche pédagogique). N’oublions pas que dans cer-tains modules d’enseignement les CM s’accompagnent aussi de travaux dirigés et de travaux pratiques qui peuvent eux-mêmes bénéficier des fonctionnalités d’un cours en ligne... Faute d’anticipation, certains collègues sont rapidement débordés par l’ampleur de la tâche et négligent les tests préliminaires, ce qui peut conduire à des bugs à grande échelle. D’autres peuvent avoir le sentiment qu’un trop faible béné-fice pédagogique a été obtenu au regard des efforts consentis bien qu’aucun indicateur de succès n’ait été clairement défini en dehors de la moyenne générale… Évidemment, ce sera toujours la faute de la plateforme !

4. Ze prouf of concept

Une fois le projet correctement dimensionné et balisé, il est préférable de tester à petite échelle les options technologiques qui seront mobilisées. Dans l’idéal, toute activité en ligne devrait faire l’objet d’un beta test approfondi préalablement à son lancement. Nous avons la possibilité d’utiliser pour cela les identifiants d’un étudiant fictif peu brillant mais très serviable. Une autre solution consiste à se constituer un cours « bac à sable », ancien cours en ligne n’ayant pas survécu aux modifications de maquettes pédagogiques et qui trouve là une nouvelle utilité. C’est l’endroit idéal pour se livrer aux pires essais pouvant aller jusqu’au crash-test pur et simple ! Le travail en petites promotions (12 à 40 étudiants) permet d’apporter la preuve du concept, testant la faisabilité de tout le projet pédagogique en cours d’élaboration à une échelle plus réduite que le projet définitif. En effet, l’une des caractéristiques du système universitaire français est le dimensionnement

callipyge de ses promotions d’étudiants de Licence. Les récalcitrants auront beau jeu de prétendre que votre projet « ne peut pas marcher avec 400 étudiants », sauf si vous réussissez à prouver que ça peut marcher pour 10 groupes de 40 avec un minimum de maintenance. Pour favoriser le recours à des activités complexes y compris avec des effectifs pléthoriques se connectant de manière simultanée, l’université de Tours songe ac-tuellement à mettre en place une plateforme de posi-tionnement. Les ressources de celle-ci seront principa-lement allouées au passage de tests en ligne à grande échelle incluant ressources textuelles, audio ou vidéo.

Paradoxalement, les enseignants-chercheurs consti-tuent la catégorie de personnels qui a le moins recours à la formation continue alors que son manque de for-mation pédagogique initiale devrait l’y destiner tout particulièrement. De nombreux facteurs, que nous ne détaille-rons pas, expliquent ce comportement qui conduit à la re-cherche d’une ren-tabilité maximale du temps investi dans un apprentissage, une formation. J’ai déjà vu des collègues partir au bout de quelques dizaines de minutes, estimant qu’ils ne « pouvaient pas » res-ter plus longtemps, bien qu’ils aient accepté de manière libre et éclairée et plusieurs semaines à l’avance, de s’inscrire à une formation de 3 heures... C’est dommage pour eux, car la maîtrise de certaines compétences permet de gagner beaucoup plus de temps. Il y a cinq ans j’ai investi 3 heures pour apprendre à faire un QCM en ligne, créer une banque de 60 questions à choix mul-tiples et beta tester cet exercice dans lequel 20 ques-tions sont tirées aléatoirement. Chaque année, environ 400 étudiants passent ce test. S’il avait fallu corriger ce test manuellement, j’aurais déjà consacré 11 fois plus de temps à cette activité (plus de 33 heures), sans compter le temps nécessaire à l’impression et à la distribution des copies et à la saisie des notes (15 heures supplé-mentaires). Soit un bénéfice net de 45 heures de travail en cinq ans… Si j’avais appris à faire des tests au cours d’une formation et non pas seul comme ce fut le cas, j’au-

Les mêmes connaissances sont ainsi transmises mais le leadership est alors partagé et l’apprentissage se fait de ma-nière plus participative.

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rais réduit de moitié mon investissement en temps initial.La valorisation des compétences acquises dans l’usage d’une plateforme pédagogique doit donc être recherchée et encouragée à l’échelle d’une équipe pédagogique. Elle permet d’une part aux projets péda-gogiques objectivement réussis de se faire connaître pour servir de source d’inspiration et d’autre part aux porteurs de ces projets d’être identifiés localement pour leur expertise dans certaines fonctionnalités. Ainsi, certains pionniers de la plateforme se sont spé-cialisés avec le temps et sont régulièrement sollici-tés pour leurs compétences spécifiques. Un des rôles des correspondants CELENE de notre établissement est d’identifier et d’entretenir ce réseau d’experts.

5. À la recherche du point E

Le point E est le point d’équilibre du cours en ligne qui permet de satis-faire aux objectifs fixés sans perte de temps pour l’étudiant et l’enseignant, d’informer sans noyer, de détendre sans dis-traire. Lorsque j’ai décou-vert la procédure pour placer des liens hyper-textes dans mon cours, je me suis transformé en véritable moteur de recherche humain. Or, trop de ressources tuent la ressource... J’avais oublié que les étudiants adoptent eux aussi une

posture d’économe, recherchant eux aussi une ren-tabilité maximale du temps investi dans un apprentis-sage, une formation ! Cette réalité me fut révélée le jour où, demandant à un étudiant s’il avait consulté tel site, il me répondit : « bah non, c’était pas noté… » Quelle désillusion ! Bâtir un mur d’URL qui n’intéressera qu’une infime minorité d’étudiants est une perte de temps mu-tuelle. Il en va de même des murs d’articles, de réfé-rences bibliographiques ou de vidéos pédagogiques. Désormais averti de cette réalité, je veille à limiter le nombre de ressources mises à disposition et surtout à valider par une évaluation l’usage qui sera fait de cette ressource. Je considère ainsi qu’un de mes CM est une ressource parmi d’autres. Des tests en ligne après chaque CM encouragent les étudiants à venir régulièrement en amphi et à télécharger les supports

pédagogiques correspondants. Certaines questions portent sur des détails que l’on ne peut retenir que par une observation attentive du diaporama-support, d’autres sur des anecdotes que je ne donne qu’à l’oral. Du point de vue étudiant, il y a donc un gain de renta-bilité à espérer de la consultation des deux ressources, cours et diaporama. Le nombre et la difficulté des éva-luations en ligne doivent être modérés pour encoura-ger la progression et j’essaie d’être attentif à la charge de travail personnel globale demandée aux étudiants.Lorsque le volume de ressources et d’activités évaluées s’amplifie, il est important de travailler sur l’attractivité du cours en ligne. La motivation est en effet primor-diale dans tout processus d’apprentissage. Quelques ressources « fun » renouvelées périodiquement aide-ront à la marge les étudiants à s’y mettre ou à s’en re-mettre ! Comme personne n’a décrété qu’il était interdit d’apprendre et d’être évalué en s’amusant, on peut en profiter pour proposer quelques activités pédagogiques ludiques. J’ai ainsi mis en place un cycle de chasses au trésor dont les réponses aux énigmes devaient être postées sur le cours via une activité de type « devoir en ligne ». L’avantage était d’avoir un enregistrement de l’heure de soumission de la réponse, précis à la minute, permettant de classer les réponses des étudiants par ordre d’arrivée. De la célérité de la réponse dépendait la moitié de la note afin d’éviter que certains attendent que d’autres trouvent pour eux. L’autre moitié de la note por-tait sur la qualité de la réponse. Ce petit exercice fut un franc succès et permit même de les envoyer fréquenter sérieusement le service commun de documentation !

6. De la difficulté d’évoluer dans sa fonction d’enseignant

Loin d’être une barrière technique ou intellectuelle, le vrai plafond de verre qui limite actuellement l’usage de notre plateforme pédagogique est avant tout d’ordre psychologique. Certains refusent de diffuser leur sup-port au format électronique de peur d’être jugés… par leurs pairs ou d’être remplacés par une vidéo d’eux-mêmes. D’autres parce qu’ils sautent à pieds-joints sur le droit d’auteur et qu’ils estiment qu’il serait trop fastidieux de le respecter, en citant les sources ou en demandant les autorisations nécessaires de reproduc-tion, de modification ou de diffusion d’œuvres proté-gées. L’acceptation de cette conception très répandue équivaudrait à considérer le respect de la loi comme fastidieux et parfaitement dispensable et à dédouaner les enseignants-chercheurs de leurs obligations de citoyens sous les yeux de leurs étudiants. On imagine l’impact de ce non-sens moral érigé en norme vis-à-vis

Les mêmes connaissances sont ainsi transmises mais le leadership est alors partagé et l’apprentissage se fait de ma-nière plus participative.“

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de citoyens en devenir ! Pourtant des solutions tech-niques existent pour concilier production de docu-ments pédagogiques numériques et respect du droit d’auteur8 . Désormais, à chaque fois qu’un fichier est déposé sur la plateforme par un enseignant, celui-ci voit apparaître un menu déroulant lui proposant divers types de licences. Par défaut, la mention « Tous droits réservés » au bénéfice de l’enseignant est assignée au fichier, ce qui le rappelle à ses responsabilités.D’autres aspects de la plateforme pédagogique bous-culent l’enseignant dans ses représentations. La posture dominante classique cède le pas à mesure que la communication multilatérale est encouragée par le biais des forums de discussion, des messa-geries instantanées et de l’ouverture vers le monde extra-universitaire. Toutes les actions formatrices ne passent plus forcément par un référent unique et c’est heureux. Ainsi, je délègue la fonction de pâtre aux étudiants responsables de groupe, chargés de motiver leurs camarades pour qu’ils atteignent un but commun. J’abandonne bien volontiers celle d’as-sistant technique au réseau d’anciens étudiants qui dépannent leurs jeunes congénères via le forum. Je ne prétends pas non plus être un puits de science, comme pouvaient l’être mes prédécesseurs car désormais l’important n’est plus de connaître une information, mais de savoir où la trouver et comment évaluer sa pertinence. Je peux me recentrer à tra-vers mes enseignements sur une fonction de guide. Elle consiste à reconnaitre le terrain pour évaluer ses difficultés (préparation et bornage du projet péda-gogique), proposer un itinéraire adapté à tous (pla-nification des étapes du projet) et surveiller la pro-gression du groupe (contrôle continu, consultation des statistiques d’accès aux ressources). En cas de grandes difficultés, je sais que je pourrai porter assis-tance à un membre du groupe, mais mes capacités sont limitées et tout le monde ne peut pas grimper sur mon dos ! Mon approche est donc de ralentir le pas si nécessaire pour que tout le monde puisse suivre. Le cours en présentiel est alors beaucoup plus inter actif et permet un approfondissement des notions abordées. Plus de contraintes horaires : ce qui n’a pas été dit en présentiel pourra s’auto-acquérir via les ressources du cours en ligne. Les étudiants les plus en avance pourront aussi y puiser matière à réfléchir en attendant que les autres les rejoignent.Le plus difficile est peut-être d’accepter l’obsoles-cence programmée de ses compétences. Le monde numérique évolue vite, aussi vite que celui de la recherche dont il est issu. Quand arrive une nou-8 On citera par exemple le système de licences Creative Commons (http://creativecommons.fr)

velle version de la plateforme, mon premier réflexe est généralement d’ordre conservateur : « C’était mieux avant ! Pourquoi ça a changé de place ? Ce n’est pas logique ! ». Puis, au bout de quelques mois, je m’inter-roge : « C’était comment avant ? ». C’est le signe que l’installation de ma mise à jour est terminée ! Partager l’expérience acquise, faire remonter rapidement les premiers bugs, demander des ajustements en termes d’ergonomie auprès des correspondants CELENE et des ingénieurs pédagogiques et techniques est un travail in-dispensable en parallèle à la gestion des cours en ligne. Ce n’est jamais du temps perdu car il y a toujours au bout de la démarche un bénéfice personnel et collectif.

Le point de vue de… Claude Hoinard, maître de conférences, correspon-dant CELENE de l’UFR sciences pharmaceutiques

En tant que correspondant CELENE de mon UFR (1 000 étudiants, 70 enseignants), je suis chargé de créer des cours MOODLE (160 à ce jour) à la demande de mes collègues en m’appuyant sur la maquette des enseignements. Je fais également quotidien-nement du conseil sur l’utilisation de MOODLE et j’anime régulièrement dans nos locaux avec l’ingé-nieur pédagogique des formations pour les ensei-gnants débutants ou plus expérimentés. L’initiation des nouveaux étudiants fait aussi partie de mon rôle.

L’aspect « proximité » est très apprécié des collègues qui ont un interlocuteur bien identifié et joignable, si-non visible très rapidement. Ils n’hésitent pas à m’in-terpeller, se sentent beaucoup plus à l’aise pour leur demande que s’ils devaient remplir un formulaire en ligne sans connaître le destinataire. Par ailleurs, j’ai vu au fil des mois l’utilisation de l’outil se propager dans

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la communauté et se banaliser, dans le bon sens du terme. Précisons que les étudiants sont très demandeurs et poussent les enseignants à en faire plus. La grande majorité des enseignants utilise donc MOODLE mainte-nant et même si beaucoup se limitent au simple dépôt de ressources, un groupe de plus en plus important s’est initié à d’autres activités ou ressources (forum, tests, devoirs, etc.) et découvre ce que la plateforme peut ap-porter comme plus-value dans la pratique pédagogique.

Finalement, en tant que correspondant CE-LENE auprès des usagers, j’ai la conviction de contribuer utilement à l’usage du numérique pour la pédagogie, rôle valorisant s’il en est.

Le point de vue de… Lionel Fandeur, ingénieur pédagogique

En tant qu’ingénieur pédagogique (ou ingénieur en tech-nologie de la formation), mon rôle est de conseiller et d’ac-compagner les enseignants, enseignants-chercheurs à la pédagogie numérique. Je fais partie du pôle de pro-duction pédagogique qui est intégré à la DTIC (Direction des technologies de l’information et de la communica-tion), service central de l’université et relié directement à la présidence par son vice-président délégué aux TIC.

Le pôle de production pédagogique garantit la cohé-rence des productions de ressources audiovisuelles et numériques en fonction des orientations stratégiques de l’université. Il développe des projets inter-établissements autour des TICE. Il propose un accompagnement aussi bien général que personnalisé selon les demandes des composantes, des départements, des enseignants dans leurs projets pédagogiques numériques. Il assure une veille constante sur l’émergence de nouvelles pratiques, grâce à son réseau national, et les adapte, le cas échéant, à l’enseignement dispensé au sein de l’université.

Je suis le responsable de la plateforme d’enseigne-ment de l’université d’architecture MOODLE, plateforme mutualisée avec l’université d’Orléans concernant plus de 40 000 étudiants et 3 600 personnels. Pour une meil-leure remontée d’information autour de la plateforme, j’ai mis en place un réseau de 28 correspondants répar-tis sur l’ensemble des sites de l’université (1 enseignant et 1 technicien, tous bénévoles) afin de mieux répondre aux attentes des utilisateurs. Les correspondants sont la clé de réussite de notre plateforme. L’université de-vrait valoriser leur investissement. À titre d’exemple, grâce à leurs remontées, la plateforme possède main-tenant une solution de podcasting totalement intégrée.

Je participe à la mise en place de formations spécifiques (PAO, bureautique, audiovisuel) à destination des per-sonnels (bureau des formations), des doctorants (CIMES) et des étudiants primo-arrivants (SEVE), d’enquêtes TIC auprès des étudiants pour préparer les besoins futurs. Au niveau national, je participe également aux réflexions nationales sur l’ingénierie pédagogique organisée par le ministère (DGESIP-MINES) ou lors de colloques et confé-rences (CIUEN, MOODLEMOOT, VIVALDI ou ANSTIA).

Le point de vue de… Brice Courtin, ingénieur technique

Depuis début 2013, l’équipe technique se compose de deux personnes rattachées à la DTIC (Direction des Technologies de l’Information et de la Communica-tion) de l’université de Tours. Nous sommes affectés au développement, à la maintenance et à l’assistance de niveau 2. J’y assure la gestion technique de la pla-teforme pédagogique des deux établissements (Tours et Orléans) pour les 50 000 utilisateurs. À ce jour, 2 000 enseignants ont au moins 1 cours sur la plateforme. Nous gérons plus de 5 500 cours comprenant 550 000 ressources déposées et générant 550 000 inscriptions/an. En moyenne en 2013, 1 000 000 d’opérations ont lieu par mois. Un défi technique de tous les jours !!!

Nous effectuons des développements complémen-taires et des adaptations locales pour répondre aux demandes exprimées par les ingénieurs pédagogiques. 25 000 lignes de code sont maintenues en interne pour la version actuellement en production (MOODLE 2.3).

L’ensemble des projets reliés aux plateformes péda-gogiques est piloté par un comité composé des vice-présidents délégués aux TIC, des directions informa-tiques, des ingénieurs pédagogiques et de moi-même. J’y exerce le rôle de chef de projets (4 projets en 2013). Cette organisation permet de coordonner les projets entre les équipes des établissements, d’amé-liorer la qualité et l’attractivité de notre plateforme. Le prochain objectif de l’équipe est la mise à jour vers la version 2.4 de MOODLE, planifiée pour juillet 2013.

Une réflexion sur le e-learning qui envisage les perturbations causées aux repères clas-siques de temps et d’espace.

Jean-Paul Moiraud est professeur de gestion en BTS design de mode et en DSAA (diplôme supérieur d’art appliqué) au lycée la Martinière-Diderot de Lyon. Il intègre et analyse le numérique dans ses enseignements depuis plusieurs années.

S’il fallait qualifier son travail il faudrait probablement choisir le terme de prati-cien réflexif. Il est à la fois inscrit dans une pratique quotidienne de l’enseigne-ment tout en prenant le temps nécessaire à l’analyse de cette dernière.

Son parcours professionnel s’est construit dans un aller retour entre la recherche et l’usage. Il a participé pendant trois ans aux travaux de l’équipe Eductice de l’INRP (actuel ifé) comme chargé d’études et de recherche.

À propos deJean-Paul

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Jean-Paul MOIRAUD

Un travail en forme de para-doxe puisque qu’il en est au stade de la formalisation étayée de ses pratiques de bricoleur.

“À propos de Jean-Paul (suite) ...

Ses travaux se sont orientés vers une analyse des scénarios de pédagogie em-barquée (SPE) « une représentation formalisée de l’organisation et du déroule-ment d’une situation d’apprentissage dans laquelle l’usage des fonctionnalités nomades des technologies numériques fait que l’enseignement-apprentissage s’exerce dans et hors les murs de la classe ».

Il intervient depuis deux ans à l’école supérieure de l’éducation nationale, de l’enseignement supérieur et de la recherche pour la formation IFD (ingénierie de la formation à distance). Il est le concepteur d’un module de formation sur le temps et l’espace dans les dispositifs de formation à distance.

Depuis cinq ans, son travail est orienté autour de la pratique et de l’analyse des questions de formation dans les mondes virtuels. Il participe aux travaux de la faculté de droit virtuelle (FDV) de l’université de Lyon 3 Jean Moulin dans le monde Second Life. Il est le co-concepteur d’un scénario de simulation de procédure pénale immersive. Il intervient dans la conception du module de droit des affaires canadien mis en place par la faculté de droit virtuelle. Il tient des chroniques régulières sur la e-éducation sur deux blogs « un blog pour apprendre, apprendre avec un blog » et « le tutorat en monde immersif » co-rédigé avec Jacques Rodet.

Son métier, bien qu’inscrit dans l’enseignement secondaire, l’a amené à exer-cer une réflexion orientée vers l’enseignement supérieur. Il a participé à la co-rédaction d’ouvrages, aux éditions de l’ENS « L’éducation à l’heure du numé-rique. État des lieux, enjeux et perspectives », sous la direction de Christine Develotte et Françoise Poyet, (2011) et chez Larcier « Droit et mondes virtuels », (2013). Il a publié dans des revues papier comme Les dossiers de l’ingénierie éducative, (2009), L’école numérique, sceren (2013) et diverses revues en ligne.

Jean-Paul MOIRAUD rejoint l’université Lyon 3 en septembre 2013.

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et Sébastien MOREAU

Synthèse et rédaction des propositions

Quatre séances d’ateliers ont été conduites sur la base des quatre entrées thématiques du colloque. Ces séances ont permis à des collègues de l’enseignement scolaire, supérieur, de l’interministériel et de l’international de croiser leurs regards. Des groupes restreints ont été constitués afin de faciliter la prise de parole, les témoignages, les échanges d’expérience et finalement l’émergence de propositions.

4 thèmes :• Enjeux sociétaux et lien numérique à l’ère du web 2.0• Repositionnement des enseignants• Profil et place des apprenants• Apprentissage collaboratif en réseau

L’organisation des ateliers

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Une réflexion, DES PROPOSITIONS

30 propositions pour agir...

“Jean-Paul MOIRAUD et Sébastien MOREAU ont réalisé les synthèses des réflexions, avec l’aide des animateurs d’ateliers et de quelques collè-gues volontaires.

Une consigne commune au sein de ces ateliers :

« En partant des articles et des conférences tenues par les universitaires, visiter les contextes professionnels divers des partici-pants et dégager des propositions concrètes possibles et réalistes. »

Un conducteur d’atelier identique pour tous, et• 9 animateurs, praticiens de l’ingénierie de la formation à distance,• 9 participants volontaires pour assurer la prise de notes et leur mutualisation,une première séance de synthèse pendant le colloque,• 2 superviseurs parcourant les ateliers, puis en charge de synthétiser les différentes contributions selon le plan suivant : problé-matique, structuration des échanges illus-trés par des idées fortes, et préconisations.

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« Je pense donc j’ai une page sur Internet » (Web 1.0)« Je blogue donc je suis » (Web 2.0)

Les technologies numériques ont profondément modi-fié le jeu des acteurs du système éducatif, en France comme à l’étranger, et de nombreuses incertitudes de-meurent sur les voies qui se dessinent actuellement.Le concept de Web 2.0 se caractérise par le développe-ment d’outils, d’usages et de services simples et interac-tifs au service d’un principe stratégique central : « faire du Web une plateforme ». Il implique que l’utilisateur d’un service hébergé par la plateforme lui ajoute de la « valeur ». Sous l’ère du Web 2.0, un utilisateur important est donc un utilisateur apportant beaucoup de valeur au service.

Parce qu’elle désigne implicitement des utilisateurs importants sans considération d’âge, de rôle social ou de position hiérarchique, la « valeurocratie » imposée par le Web 2.0 est à l’origine d’un malaise diffus au sein de la communauté éducative. Comment être crédible lorsqu’on est moins « important » que ses élèves, ses collègues, sur le Web ?Les participants ont été invités à s’exprimer et à par-tager leurs expériences afin de mieux comprendre les enjeux (1) et les impacts liés à la généralisation de l’uti-lisation pédagogique du Web 2.0 et des autres techno-logies numériques pour l’institution (2), les éducateurs (3-5) et vis-à-vis du contexte de classe (6).

1. Des enjeux de société« Créer du lien social entre les différents

acteurs de l’éducation. »

Les acteurs de terrain évoquent largement l’apport du Web 2.0 en tant qu’outil de renforcement et d’élargisse-ment de la communauté éducative. Le lien numérique est un levier pour rompre l’isolement des enseignants exerçant en milieu rural et gommer les inégalités inhé-rentes à la structuration socio-culturelle des territoires. Introduire massivement la culture numérique dans les établissements, c’est donner corps à des valeurs édu-catives fondamentales. Elle contribue à la construction du savoir-être et à l’apprentissage de la citoyenneté.

2. L’institution face au numérique« Où placer le curseur dans « éteindre ou

allumer » les outils numériques ? »

Comment concilier usages personnels et usages péda-gogiques des outils numériques, cadrage vertical des activités et collaborations transversales ? L’usage du numérique peut être source de conflits dans un établis-sement ; l’institution s’épuiserait à réguler les usages du numérique et à tenter d’imposer ses outils. Il serait plus parcimonieux d’autoriser le choix des usages, d’obser-ver comment un support est investi puis de trouver un moyen de l’importer dans les apprentissages.

Une mise en cohérence des textes règlementaires avec les orientations politiques prises en faveur du numé-rique s’impose à tous les niveaux de l’institution. Le principal enjeu institutionnel résiderait dans la capacité de l’éducation nationale à s’appuyer sur la souplesse, la flexibilité et la motivation des acteurs de terrain et à adapter sa boîte à outils aux problématiques locales.

3. Vaincre les peurs« Il est impératif de réduire la fracture

numérique chez les enseignants. »

L’usage des TICE n’est pas encore établi chez tous les enseignants, même s’il est en progression. Leur utilisa-tion est encore fréquemment ressentie comme une prise de risques vis-à-vis de la hiérarchie, des collègues, des apprenants.Un renforcement de la formation théorique et pratique des enseignants en matière de TICE devrait contribuer à agir sur l’anxiété des éducateurs et ne pourra qu’avoir des répercussions positives sur un enjeu sociétal de rang supérieur : l’attractivité du métier d’enseignant.

4. Changer son rapport au temps« Perdre du temps pour en gagner ? »

Certains proposent une séparation radicale entre temps avec ou sans numérique afin d’éviter les errances et les vagabondages intellectuels des apprenants. D’autres considèrent l’errance comme nécessaire à un appren-tissage de qualité. La position adoptée dépend étroite-ment du contexte pédagogique et du degré d’autonomie des apprenants.L’appropriation des outils numériques est globalement considérée comme chronophage. Des indicateurs manquent encore pour évaluer objectivement les plus-values des outils numériques investis.

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Enjeux sociétaux et lien NUMÉRIQUE À L’ÈRE DU WEB 2.0S

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9 propositions pour agir...• Intégrer l’usage du numérique dans la formation du citoyen.

• Sensibiliser tous les corps de métier à la culture de l’information et des médias numériques afin de mettre en cohérence les objectifs et les moyens.

• Penser la diffusion de cette culture selon un vrai continuum entre les niveaux et entre les formations. Accorder plus de temps à la pédagogie de projet s’appuyant sur des outils numériques.

• Mettre en place les conditions permettant à l’enseignant d’observer, de se former, d’expérimenter puis de partager entre pairs. Reconnaître et valoriser le temps et l’engagement dans la formation et l’élaboration de ressources collectives.

• Apporter des réponses institutionnelles sur les questions déontologiques et juridiques liées à l’utilisa-tion des technologies numériques dans un contexte pédagogique.

• Accompagner la réflexion des enseignants pour une utilisation pertinente et raisonnée du Web 2.0. Donner des pistes de mise en œuvre transférables. Mettre en place des formations adaptées aux be-soins des acteurs.

• Examiner objectivement les plus-values des médias sociaux dans les apprentissages. Former les enseignants aux usages pédagogiques des médias sociaux.

• Encourager la co-construction du savoir, autoriser le choix des usages, accepter d’être surpris par les apports des élèves.

• Penser le renouvellement de l’espace classe. Faire en sorte que l’environnement numérique de l’ap-prenant soit fonctionnel et appétant. Explorer les différentes dimensions (oralité, toucher, mobilité, accessibilité…) offertes par les technologies numériques les plus récentes.

La version longue de cette synthèse est disponible à l’adresse suivante ou par le QR Codehttp://www.esen.education.fr/fileadmin/user_upload/fad/e-education/atelier_1.pdf

5. Composer avec l’expérience des apprenants en matière de numérique« Il n’existe pas d’antinomie entre la culture noble,

littéraire, et le numérique. »

Le numérique impose une remise en question de la relation à l’apprenant, qui peut devenir plus directe et spontanée. Les enseignants se trouvent parfois dépas-sés par les compétences technologiques des élèves. La posture des enseignants devrait être plus flexible pour être encore crédible et tendre davantage vers l’arbitrage ou l’accompagnement. Accompagner les apprenants dans leurs usages des outils numériques ne peut que les aider à maîtriser les outils de la langue.Il devient tout aussi important de faire acquérir une culture de l’information et des médias numériques que de dispenser des connaissances académiques.

6. Intégrer les outils du Web 2.0 dans un contexte de classe« Le WEB 2.0 a une capacité à développer un travail

collaboratif, à sortir de l’espace classe traditionnel. »

Plusieurs pistes très innovantes ont été proposées pour développer une pédagogie de détour s’appuyant sur le Web 2.0. L’utilisation de différents médias sociaux pose des questions juridiques et conduit parfois les ensei-gnants à restructurer leur espace classe.Travailler avec des outils numériques institutionnels permet d’accéder à d’autres dimensions du travail col-laboratif : les plateformes pédagogiques et les environ-nements numériques de travail (ENT) démultiplient ainsi les possibilités de travailler en mode projet et de bâtir à plusieurs les compétences de chacun.

P64 - © ESEN, Colloque international e-éducation, 2013

Notre histoire techno-pédagogique est remplie de fantasmes liés aux pouvoirs réels ou suppo-sés des machines. Chaque tournant technologique s’accompagne de son lot d’envies, de projections vers un champ des possibles où le technologique le dispute à l’humain. Le numérique en général n’échappe pas à ce travers, l’éducation en particulier.

Les participants au colloque se sont réunis en ate-liers pour débattre d’une question sensible : le repositionnement des enseignants à l’heure de la e-éducation. Le métier doit s’adapter à la nou-velle donne technologique qui fait bouger les lignes de fracture habituellement acceptées.

Les participants ont articulé leurs propositions autour de la définition et des contours du mé-tier d’enseignant ainsi que de la e-éducation. Six points leur ont paru particulièrement significatifs :

1. Définir les contours du métier d’enseignant

« Comment aider l’enseignant à devenir e-enseignant ? »

Il ressort de ces riches et intenses débats que le repositionnement du métier d’enseignant passe par le besoin de partager un vocabulaire commun. Il est besoin d’élaborer une définition qui soit acceptée par l’ensemble de la communauté scolaire, enten-due dans son acception large, c’est-à-dire de la maternelle au supérieur. Si les enseignants peuvent (veulent ?) se repositionner, il faut répondre à la ques-tion suivante : « Qu’est-ce qu’être enseignant en ce début du XXIe siècle ? ». Il semble nécessaire, si l’on souhaite répondre à cet objectif terminologique, de produire un document de cadrage, type fiche de poste.

2. Définir la e-éducation

« Ne va t-elle pas supprimer le présentiel ? »

De la définition du métier d’enseignant à celle de la e-éducation, il y a un rubicon que les participants ont décidé de franchir. Les exigences du métier sont dé-sormais assises sur un socle, fait de coopération et

de collaboration, qui rassemble dans un même creu-set les technophiles et les technophobes. L’œuvre de balisage des contours du métier aidera à lutter contre des visions stéréotypées contreproductives. La e-éducation ne supprime pas un modèle ancien, elle le modifie et peut lui donner une plus-value.

3. Enseigner dans le cadre d’une chaîne d’édito-rialisation pédagogique

« Le rôle des personnels d’encadrement est important pour impulser les actions. »

Les concepts de coopération et de collabora-tion sont durablement inscrits dans les usages de l’enseignement et de l’apprentissage. Il faut, en conséquence, apprendre à travailler avec une communauté élargie, celle qui englobe les ensei-gnants, les apprenants mais aussi les personnels de direction, les corps d’inspection et les corps techniques comme les ingénieurs pédagogiques.

4. Une nouvelle chaîne, de nouvelles interactions

« Comment amener les enseignants à travailler en équipe ? »

Apprendre à collaborer, c’est pour chacun intégrer l’idée que le changement par l’innovation ne s’ins-crit plus dans un cadre spatial et temporel où l’in-jonction est un mode de gouvernance. Il faut insuf-fler de nouveaux modes d’action où le numérique est un instrument d’accompagnement du reposi-tionnement des gouvernances locales. Ce change-ment de paradigme, c’est donc savoir enseigner au sein d’une chaîne d’éditorialisation pédagogique instrumentée où l’homme reste un maillon central.La e-éducation est ainsi inscrite dans une chaîne d’édi-torialisation qui croise intimement les compétences d’une multitude de métiers. Les méthodes de travail réticulaires doivent se mélanger et s’articuler avec les habitudes de gouvernance hiérarchique linéaire.

Le repositionnement du métier d’enseignant au sein de réseaux multiples réoriente la définition de nouvelles gouvernances, plus souples, plus collaboratives.

Colloque international e-éducation

Repositionnement des ENSEIGNANTSS

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© ESEN, Colloque international e-éducation, 2013 - P65

Colloque international e-éducation

La structure nodale des réseaux contraint les ensei-gnants, au sein de cette gouvernance, à changer leurs postures professionnelles. Il revient aux pro-fesseurs du primaire et du secondaire d’adopter une posture réflexive et il incombe aux enseignants du su-périeur d’inscrire la pédagogie dans leurs missions.

5. Prévoir une nouvelle gouvernance

5. 1. Formation initiale et continueCette nouvelle gouvernance induite par le repo-sitionnement du métier d’enseignant obligera à penser les enjeux de la e-éducation dans le cadre d’un continuum. Il faudra penser la for-mation au sein d’un segment qui débutera au sein de la formation initiale en Espé et se prolon-gera dans le processus de formation continuée.

5. 2. Définir de nouveaux tempsCe continuum qui lie la formation initiale à la for-mation continue inscrit le temps comme un élément

phare de la e-éducation. Les technologies font émer-ger un temps recomposé qui permet de se former, comme disent les anglo-saxons, « everytime ». Ce temps ne s’additionne pas aux autres temps, il n’est pas neutre, il est devenu un temps spécifique, digne d’être reconnu et validé comme tel par l’institution.

6. Repositionner les enseignants, une démarche à risque ?

« Être innovant, c’est prendre le risque d’exercer en milieu hostile. »

Au regard de tout ce qui a été évoqué dans cet ate-lier, il est indispensable que le repositionnement du métier d’enseignant puisse être sécurisé. Si les pionniers, les enseignants innovants, acceptent le risque, il faut que la généralisation puisse se réa-liser dans un cadre le plus sécurisant possible.

7 propositions pour agir...• Engager la réflexion sur le statut du savoir : l’enseignant est-il encore un dispensateur ou un facili-tateur ?

• Engager une réflexion sur les métiers de l’enseignement à l’ère du numérique en redéfinissant les compétences à acquérir, les liens fonctionnels à engager, les évolutions prévisibles des métiers.

• Définir le champ de la e-éducation pour permettre aux acteurs de travailler sur une base commune et d’identifier les compétences spécifiques de la formation à distance.

• Encourager les pratiques réflexives chez les enseignants en commençant par une formation dans les Espé.

• Permettre aux enseignants du secondaire de participer aux travaux d’équipes universitaires et les inci-ter à publier sur leurs pratiques et usages.

• Encourager les universités à mieux valoriser les pratiques pédagogiques des enseignants chercheurs. Intégrer des formations à la pédagogie numérique à l’université.

• Reconnaître et intégrer le temps numérique dans le temps de travail des enseignants en prenant en compte temps présentiel et temps distanciel.

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P66 - © ESEN, Colloque international e-éducation, 2013

Le profil de l’apprenant d’aujourd’hui semble com-plexe voire paradoxal. Exigeant et rejetant tout for-malisme, autocentré et ouvert à la collaboration, il apparaît comme autonome et pourtant totalement dépendant des autres pour pouvoir progresser. Le dé-veloppement des technologies numériques interroge avec acuité la définition du positionnement des ap-prenants, face à des fonctions d’enseignant en plein redimensionnement.

Trois axes de réflexion principaux ont émergé des discussions. Le premier fait le constat de l’hétéro-généité des profils d’apprenants et propose des pré-conisations permettant de la prendre en compte (1). Le deuxième a évoqué la modification du rapport de l’apprenant au savoir et son changement de position-nement à l’égard des moyens pédagogiques proposés (2). Enfin, les modifications des interactions sociales entre apprenants et enseignants ont été abordées sous l’angle de l’apport de l’apprenant en tant que moteur de l’évolution des rôles de l’enseignant (3).

1. L’hétérogénéité des profils d’apprenants

« Les apprenants, ce sont aussi ces milliers d’élèves qui sortent

du système éducatif, qui n’apprennent pas. »

Les participants ont identifié plusieurs publics vis-à-vis desquels les technologies numériques peuvent ap-porter des réponses pertinentes : élèves décrocheurs, empêchés, éloignés géographiquement, étudiants sa-lariés… Pour ces apprenants, faute de solution adap-tée et personnalisée, la classe n’est plus un cadre de référence, mais devient un problème. Or l’adaptation des approches pédagogiques est souvent l’occasion de mettre en œuvre des procédures d’enseignement plus interactives et conviviales (classes « inversées », Task-based Learning). La question du profil de l’appre-nant adulte (« usager ou apprenant ? ») a été débattue et il a été suggéré de recourir à l’élaboration d’arbres des compétences.

Les différentes modalités de formation ouverte et à distance (FOAD) permettent de prendre en compte l’hétérogénéité des publics et d’apporter des réponses

adaptées. Les outils numériques permettent une sim-plification et un approfondissement de la phase de positionnement de l’apprenant, indispensable à la personnalisation de son parcours d’apprentissage.La prise en charge de la diversité des difficultés ren-contrées par l’apprenant doit être envisagée comme un objectif et non un frein à la démarche pédagogique mise en œuvre.

2. Positionnement des apprenants par rapport aux méthodes, outils et ressources éducatives numé-riques

« Avec les smartphones, le savoir est dans nos poches ! »

« Il ne faut pas oublier que l’être humain se caracté-rise par le plaisir et la paresse. L’usage du numérique répond à ces deux aspects. »Certains participants ont évoqué l’influence grandis-sante de la culture numérique sur la dynamique d’ap-prentissage. Des pédagogues relaient le question-nement de leurs élèves sur le sens et le contenu du savoir transmis : « apprendre quoi, pour quoi faire ? » D’autres craignent que les outils numériques séden-tarisent un peu plus des élèves « qu’on assoit pour la journée ».

L’articulation entre approches pédagogiques tradi-tionnelles et recours aux technologies numériques pose question. Le présentiel peut être plus efficace pour obliger l’apprenant à se conformer à des injonc-tions. Les outils numériques permettent une meilleure individualisation du parcours des apprenants tout en respectant davantage leur rythme d’activité. En don-nant une dimension sociale aux activités proposées, la réussite de chacun conditionne la réussite de tous. Le e-portfolio peut accompagner l’élève de façon pérenne mais soulève la question du droit à l’oubli, à l’erreur. Les outils numériques renforcent la mise en activité des apprenants qui sont davantage associés à la construction de leur apprentissage.

L’autonomie des apprenants vis-à-vis des technolo-gies numériques serait relative. Une médiation vers les outils et l’usage que l’on peut en faire reste tou-jours nécessaire d’autant que les outils institutionnels

Colloque international e-éducation

Profil et place des APPRENANTSS

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Colloque international e-éducation

8 propositions pour agir...• Positionner les apprenants à partir d’évaluations diagnostiques en s’appuyant sur des usages exis-tants pour aller plus loin.

• Reconnaître les particularités de chaque apprenant en lui permettant de choisir des contenus de formation adaptés à ses besoins et en concertation avec l’enseignant.

• Associer activités facultatives et obligatoires pour faciliter l’individualisation en permettant un choix raisonné des activités dans le parcours de formation.

• Individualiser le rythme en dimensionnant le temps d’apprentissage. Donner des périodes de réalisation plus larges que le temps strictement nécessaire. Apprendre à gérer son temps, à se donner des priorités et à les gérer seul et en groupe.

• Construire un e-portfolio qui accompagne l’apprenant tout au long de la vie.

• Reconnaître et organiser la diversification des lieux d’apprentissage en veillant à la complexité des outils numériques proposés.

• Diversifier les services de tutorat et les modalités d’accompagnement.

• Mettre en place, évaluer et reconnaître le travail de l’apprenant. Mesurer sa progression. Aider à la construction d’un arbre de compétences.

La version longue de cette synthèse est disponible à l’adresse suivante ou par le QR Codehttp:// www.esen.education.fr/fileadmin/user_upload/fad/e-education/atelier_3.pdf

sont souvent délaissés. L’acceptabilité de la sur-veillance de données d’utilisateurs a été débattue (« suivi ou intrusion ? » ).

3. Positionnement des apprenants par rapport aux enseignants

« L’apprenant peut être un levier pour faire évoluer l’enseignant. »

Si le périmètre d’apprentissage est toujours cadré par l’enseignant, il doit s’adapter davantage aux caractéristiques des apprenants pour atteindre les objectifs d’individualisation et de prise en compte des prérequis. En parallèle, les apprenants mani-festent de plus en plus une posture de consomma-teurs et certains remettent en cause le statut de

l’enseignant, qui ne serait plus détenteur du savoir. La nécessité d’une véritable démarche d’ingénierie pédagogique apparaît comme une évidence pour tous les acteurs de terrain car il est urgent de conti-nuer à donner l’envie d’apprendre. La problématique de l’évaluation a notamment mobilisé la parole de nombreux participants à l’atelier.

De nombreuses fonctions nouvelles ont été confiées aux apprenants à l’occasion du développement de l’éducation numérique : autorégulation, autoévalua-tion, co-construction des ressources, choix du par-cours et des usages, travail collaboratif en autono-mie, etc. Il importe peut-être d’expliciter la nature et les attendus des responsabilités inédites qui carac-térisent « l’apprenant 2.0 » afin qu’elles soient plei-nement comprises et assumées par celui-ci.

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Il serait probablement réducteur d’imaginer que le nu-mérique n’a eu d’effet que dans le monde de l’éducation. L’histoire nous enseigne que le XIXe siècle s’est caracté-risé par les bouleversements occasionnés par la révolu-tion industrielle et les changements profonds intervenus dans toute la société. Le numérique est-il de l’ordre de la révolution ? Le temps nous le dira, mais on peut prendre le risque de répondre par l’affirmative.

1. Collaboratif, coopératif, un besoin de cadrage conceptuel

Les termes collaboratif et coopératif sont abondamment utilisés depuis que le numérique a envahi nos usages. Les contours de cet alpha et oméga de la pédagogie moderne restent cependant flous : sommes-nous en capacité de les définir précisément ? Il sera nécessaire de définir et d’inscrire durablement ces pratiques dans le paysage pédagogique. La réussite s’opérera plus pro-bablement par construction de stratégies scénarisées inscrites dans le modèle de la conviction plus que par injonction.

1.1. Coopérer ou collaborer, une culture ou une injonction ?

« Il est difficile de demander à des apprenants (ensei-gnants) de collaborer alors qu’ils sont peu amenés à

collaborer dans le cadre professionnel ».

Nous devons nous interroger sur les enjeux des nou-veaux modes de travail collectif. Sont-ils le résultat d’une envie ou d’une contrainte ? La réponse n’est pas tranchée et dépend largement du contexte de forma-tion. Si les enseignants du supérieur et du primaire sont engagés depuis longtemps dans des pratiques colla-boratives, les enseignants du secondaire semblent s’y engager plutôt par la voie contrainte des réformes.

1.2.. Coopérer et collaborer, acquérir une com-pétence sociale

Travailler au sein d’une communauté de pratique, constituée de façon plus ou moins formelle, est une compétence sociale avérée. Le chemin à parcourir pour son acquisition est cependant long, il est pavé de résistances et de conflits prévisibles car « la réelle col-

laboration est très difficile ». Il convient aux différents acteurs du monde éducatif d’opérer la transition entre le monde 1.0 et le monde 2.0 ; le chemin est long.

1.3. Coopérer et collaborer, une question de temps.

« Dégager un temps pédagogique en dehors de son temps de travail pour éviter d’imaginer que l’on va se

former de 22 heures à 24 heures par exemple. Cela pose la question du temps de travail. »

Changer de méthode de travail est un processus lent, il faut donner tout d’abord le temps de l’expérimentation et de l’analyse notamment en passant par la démarche réflexive des acteurs. Passée la période de défrichage, il faut savoir trouver les articulations entre l’ancien et le nouveau modèle. Le travail collaboratif nécessite d’intégrer dans l’organisation du travail des enseignants des tâches spécifiques liées à l’individualisation, à l’ac-compagnement, à la motivation, à la remédiation. Ces tâches, notamment en ligne, prennent du temps « la ré-gulation, l’accompagnement demandent du temps pour les enseignants ». Il appartient aux décideurs de cali-brer la nature du passage entre l’ancien et le nouveau modèle de formation, additionner ou soustraire ?

2. Des outils aux fonctionnalités pédagogiques

« La partie de la formation aux outils ne doit pas être négligée. »

Si l’apprentissage collaboratif en réseau oblige les ac-teurs à développer des stratégies spécifiques, il ne faut pas pour autant négliger les aspects technologiques des outils. Les enseignants et les apprenants doivent être formés aux aspects manipulatoires des solutions mises à disposition. Ce temps de formation est incon-tournable même si les « digital natives » ont, pour la plupart, acquis ces compétences de façon informelle en dehors de l’école.

3. Apprendre à apprendre, des méthodes au-delà des outils

« La formation est une activité sociale » ; « où met-on le curseur entre collaboratif et coopératif ? »

Colloque international e-éducation

Apprentissage collaboratif EN RÉSEAUS

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© ESEN, Colloque international e-éducation, 2013 - P69

Colloque international e-éducation

6 propositions pour agir...• Engager une réflexion sur la production et la mutualisation de ressources collaboratives.

• Former les enseignants au mode de travail collaboratif dans le but de faire évoluer les pratiques tout en rassurant et en donnant confiance au corps enseignant.

• Engager un travail de repérage et de valorisation des travaux des enseignants pionniers afin de les utili-ser auprès de la communauté enseignante.

• Sensibiliser les cadres aux enjeux des méthodes collaboratives via une formation spécifique.

• Penser de nouvelles méthodes d’évaluation, notamment la prise en compte de la ressource collective.

• Penser les outils numériques institutionnels en imaginant une interopérabilité avec les instruments des EPA (environnement personnel d’apprentissage).

La version longue de cette synthèse est disponible à l’adresse suivante ou par le QR Codehttp:// www.esen.education.fr/fileadmin/user_upload/fad/e-education/atelier_4.pdf

Il convient de résoudre cette question car la méthode collaborative transforme le rapport d’enseignement/ap-prentissage en provoquant « une diversité de la qualité des messages et des usages ».

4. Évaluer la collaboration : de l’individuel au col-lectif

Les travaux collectifs débouchent sur la production de ressources pédagogiques construites collectivement. Ce changement de statut amène la communauté en-seignante à poser un ensemble de questions : peut-on valider individuellement un travail collectif ? Comment valider un travail collectif ? Le collectif peut-il s’inscrire comme instrument de validation des activités des pairs enseignants ?

5. Coopérer et collaborer, une culture ou une injonc-tion ?

« Parfois l’injonction peut être contreproductive et freiner les bonnes volontés. »

Les modifications des postures d’enseignement et d’ap-prentissage s’exercent à l’évidence dans le contexte formel du cadre administratif. Il ne faut pas que ce tra-vail s’inscrive uniquement dans le format de « l’injonc-tion à ... » mais soit accompagné et soutenu. Il est donc nécessaire que, dans ce cadre, on puisse déter-miner les modifications des postures d’enseignement

et d’apprentissage qui s’exercent à l’évidence dans le contexte formel du cadre administratif.

6. Est-ce que la distance facilite la collaboration ?

La question de la collaboration à distance s’est invitée dans les débats sur la e-éducation. Les enseignants et les apprenants travaillent au sein de dispositifs instru-mentés via les réseaux. Le sentiment de distance et de solitude numérique peut s’installer chez les apprenants, entraînant des risques de décrochage. Tout l’enjeu des constructions, qu’elles soient institutionnelles ou de type environnement personnel d’apprentissage (EPA), est de lutter contre le sentiment de solitude numérique.

7. Finalement, quelle est la plus-value de la collabo-ration ? Quels usages ?

Les méthodes coopératives et collaboratives au sein des réseaux se diffusent grâce aux expérimentations sur le terrain faisant évoluer les usages vers des mé-thodes moins rigides, plus fluides. Le collaboratif s’ins-crit dans le paysage éducatif, c’est ce qu’ont rappelé de nombreux participants en citant la formation des nouveaux enseignants au sein des Espé et la formation continue en ligne des professeurs des écoles. Le chan-gement est en cours ; le développement du travail en réseau y participe.

P70 - © ESEN, Colloque international e-éducation, 2013

Colloque international e-éducation

Participant :« Félicitations... pour la haute tenue de ce colloque et la pertinence des échanges auxquels il a donné lieu. Merci à vous pour ces moments rares de félicité intellectuelle dont je vous suis redevable. »

Intervenant :

« Je tenais à vous remercier de m’avoir invitée à

cette conférence. Je vous félicite pour l’organi-

sation, l’ambiance créée. Je vous remercie éga-

lement de m’avoir permis de vivre une toute pre-

Intervenant : « Je tenais à vous remercier pour m’avoir donné l’occasion de par-ticiper au colloque que vous avez organisé de main de maître : 3 jours denses et vraiment intéressants. »

Participant :

« Ce seront des res-

sources particulière-

ment utiles pour pour-

suivre la réflexion. »

mière expérience de web radio. »

Quelques RETOURS...

© ESEN, Colloque international e-éducation, 2013 - P71

Colloque international e-éducation

Participant : « Grâce au programme que vous nous

avez proposé et à la qualité des interve-

nants, j’ai pu consolider grandement mes

connaissances et ouvrir largement mon

horizon en la matière. Bravo, également,

pour la partie logistique qui a été d’un

haut niveau de qualité. »

Intervenant : « J’en retire beaucoup plus qu’une présence classique à un colloque. Ce fut un bel exercice intellectuel. »

Participant : « Encore félicitations pour ce colloque qui n’a pas fini de faire «phosphorer» les participants. »

Participant :

« Lors de ce colloque, nous étions environ

200 participants, et je n’ai pas eu l’impres-

sion d’être «une participante anonyme»

du fait d’avoir pu échanger avec un bon

nombre des personnes lors des ateliers. »

Quelques RETOURS...

du mardi 14 au jeudi 16 mai 2013 ESEN - POITIERS

école supérieure de l’éducationnationale, de l’enseignementsupérieur et de la recherche

école supérieure de l’éducationnationale, de l’enseignementsupérieur et de la recherche

Colloque international e-éducation

Place des apprenants

et repositionnementdes enseignants

à l’ère des réseaux

sociaux de formation

Réalisation

Yannick BERNARD, responsable de formation [email protected]

Olivier DULAC, chef de projet [email protected]

© ESEN, pôle innovation, 2013sur une maquette «Liner Communication»

Jean-Marie PANAZOLDirecteur de publication

 

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