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www.metrofrance.com 23 lundi 21 mars 2011 Michaël Jérémiasz, 29 ans, est handicapé depuis dix ans suite à une mauvaise chute de ski. Un accident qui ne l’a pas empêché de devenir joueur de tennis professionnel en fauteuil. Aujourd’hui, il milite pour que les personnes en situa- tion de handicap soient plus autonomes, y compris au travail. Il a créé une asso- ciation “Comme les autres” et a co-écrit un livre : Tant d’histoires pour un fauteuil, (Michel Lafon). Rencontre. Pour vous, quelle sont les rai- sons qui peuvent empêcher une personne en situation de handicap de trouver sa place dans le monde du travail ? Ce sont les problèmes d’accessibilité. Les per- sonnes en situation de han- dicap on peu d’accès à l’emploi car l’accès à la plupart des entreprises est compliqué et les postes de travail sont rarement amé- nagé. L’autre problème c’est la sous-qualification des personnes en situation de handicap. Vous parlez de sous-qualifica- tion, pensez-vous que les personnes en situation de handicap ont du mal à accéder à l’éducation ? Oui. Dès l’enfance, ces personnes sont rassem- blées dans des établisse- ments spécialisés, elles n’ont pas accès à la société. Dès l’école, elles sont dis- criminées. Si on mettait des valides et des handica- pés dans les mêmes classes, ils seraient capa- bles plus tard, de travailler efficacement ensemble dans les entreprises. Au travail, quels sont les principaux problèmes que rencontre un salarié en situation de handicap ? Souvent, les autres sala- riés ne savent pas com- ment réagir. Ils sont mal à l’aise car ils ont du mal à comprendre la différence. Le problème vient aussi du manque d’informations. Il faudrait des conférences sur le handicap en entre- prise, de la sensibilisation dans les écoles … Certaines actions sont déjà menées dans ce sens mais elles sont minimes. Il faut mon- trer que le handicap est aussi synonyme de mala- die, de souffrance. Il y a des comportements à adop- ter face à ça. Etes-vous souvent discriminés en tant que personne en situa- tion de handicap ? Malgré mon statut de sportif professionnel où je suis reconnu comme handicapé, la discrimina- tion, j’y fais face chaque jours. Parfois, j’ai des fa- veurs comme le jour où un policier ne m’a pas verba- lisé quand il a vu mon fau- teuil, d’autre fois, les personnes adoptent des comportements gênants pour moi, en me touchant la tête par exemple. Pensez-vous que la lutte contre les discriminations au travail est encore un long combat ? Oui, beaucoup de personnes en situation de handicap sont au chômage. La loi handicap de 2005 n’est pas assez forte pour changer les choses. Et beaucoup de salariés n’osent pas se déclarer travailleur handicapé par peur de perdre leur boulot ou de ne plus être traités normalement. NOéMIE D.-DUCLOYER WWW.METROFRANCE.COM Il a écrit Tant d’histoires pour un fauteuil “La discrimation, j’y fais face tous les jours” MICHEL LAFON Michaël Jérémiasz.

Dossier discrimation 2 metro paris

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www.metrofrance.com 23lundi 21 mars 2011

Michaël Jérémiasz, 29 ans,est handicapé depuis dixans suite à une mauvaisechute de ski. Un accidentqui ne l’a pas empêché dedevenir joueur de tennisprofessionnel en fauteuil.Aujourd’hui, il milite pourque les personnes en situa-tion de handicap soientplus autonomes, y comprisau travail. Il a créé une asso-ciation “Comme les autres”et a co-écrit un livre : Tantd’histoires pour un fauteuil,(Michel Lafon). Rencontre.

Pour vous, quelle sont les rai-sons qui peuvent empêcherune personne en situation dehandicap de trouver sa placedans le monde du travail ?Ce sont les problèmes

d’accessibilité. Les per-sonnes en situation de han-dicap on peu d’accès àl’emploi car l’accès à laplupart des entreprises estcompliqué et les postes de

travail sont rarement amé-nagé. L’autre problèmec’est la sous-qualificationdes personnes en situationde handicap.

Vous parlez de sous-qualifica-tion, pensez-vous que lespersonnes en situation dehandicap ont du mal à accéderà l’éducation ?Oui. Dès l’enfance, ces

personnes sont rassem-blées dans des établisse-ments spécialisés, ellesn’ont pas accès à la société.Dès l’école, elles sont dis-criminées. Si on mettaitdes valides et des handica-pés dans les mêmesclasses, ils seraient capa-bles plus tard, de travaillerefficacement ensembledans les entreprises.

Au travail, quels sont lesprincipaux problèmes querencontre un salarié ensituation de handicap ?

Souvent, les autres sala-riés ne savent pas com-ment réagir. Ils sont mal àl’aise car ils ont du mal àcomprendre la différence.Le problème vient aussi dumanque d’informations. Ilfaudrait des conférencessur le handicap en entre-prise, de la sensibilisationdans les écoles … Certainesactions sont déjà menéesdans ce sens mais ellessont minimes. Il faut mon-trer que le handicap estaussi synonyme de mala-die, de souffrance. Il y ades comportements à adop-ter face à ça.

Etes-vous souvent discriminésen tant que personne en situa-tion de handicap ?Malgré mon statut de

sportif professionnel oùje suis reconnu commehandicapé, la discrimina-tion, j’y fais face chaquejours. Parfois, j’ai des fa-

veurs comme le jour où unpolicier ne m’a pas verba-lisé quand il a vu mon fau-teuil, d’autre fois, lespersonnes adoptent descomportements gênantspour moi, en me touchantla tête par exemple.

Pensez-vous que la luttecontre les discriminations autravail est encore un longcombat ?Oui, beaucoup de

personnes en situation dehandicap sont au chômage.La loi handicap de 2005n’est pas assez forte pourchanger les choses. Etbeaucoup de salariésn’osent pas se déclarertravailleur handicapé parpeur de perdre leur boulotou de ne plus être traitésnormalement.

noémie d.-ducloyerwww.meTRofRance.com

Il a écrit Tant d’histoires pour un fauteuil“Ladiscrimation, j’y fais face tous les jours”

michel lafon

Michaël Jérémiasz.

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zOé duCOuRNAu /METRO

Sur les bords du canal Saint-Martin à Paris, La Ruche est un espace collaboratif où les entrepreneurs sociauxviennent résider. Metro les a rencontrés à l’occasion de leur déjeuner du vendredi.

À La Ruche,

les idéesbourdonnent

omme tous les ven-dredis à midi, laplupart des rési-dents de La Rucheviennent “buzzer”

pendant le déjeuner. Dansla cuisine, lieu convivial oùles idées fusent à longueur

de journée, chacun apportesa bonne nouvelle de la se-maine en faisant retentirune petite sonnette. Autourde la table : que des entre-preneurs sociaux. “Le par-tage est très important,commente Charlotte Hoch-

man, la créatrice de LaRuche. Les entrepreneursdoivent se sentir commechez eux.” Elle a importé ceconcept des pays anglo-saxons. “En revenant enFrance il y a trois ans, jetrouvais qu’il manquait un

espace pour les innovationssociales. Je voulais lier lesgens aux initiatives sépa-rées”, explique-t-elle.

Café dans une main etportable dans l’autre, Gil-berte Caron semble à sonaise. Elle est la créatrice deFil rouge conseil et média-tion, une entreprise deressources humaines “lu-diques”. Elle a rejoint LaRuche en juin dernier avec16 autres entrepreneurs so-ciaux. Aujourd’hui, LaRuche compte plus de 80 ré-sidents. “Malgré des critèrestrès sélectifs, on est tou-jours plein”, continue Char-lotte Hochman. Pour êtreadmissible, il faut avoir unprojet social innovant quirépond à un défi de société.C’est le cas de Malik Badsi,26 ans, qui a créé L’entre-prise Yoola afin de rendreaccessibles les évÉnementssportifs aux personnes ensituation de handicap. Pourson premier projet, il a or-ganisé un voyage en Afriquedu Sud pour la Coupe dumonde de football. Un évé-

nement qui fut un réel suc-cès. Pour ce jeune entrepre-neur, travailler à La Ruchelui a permis d’agrandir sonréseau. “Le fait d’être ici ou-vre des portes, on partagenos savoir-faire”, s’enthou-siasme-t-il.

Dans l’open space de600 mètres carrés au décorde bois et de verdure,beaucoup d’entreprises tra-vaillent sur le thème de ladiversité. Certaines ont pristellement d’importancequ’elles ont dû partir de LaRuche. Comme Mozaïk RH,un cabinet de recrutementspécialisé créé par SaïdHammouche. Son objectif :dénicher “les vrais talents”dans les quartiers de ban-

lieues. Ceux qui ont fait desétudes mais qui n’ont au-cun réseau. “Ces jeunessont souvent confrontésaux préjugés, explique Ma-riam Khattab, la responsa-ble du recrutement deMozaÏk RH, nous les accom-pagnons dans leur dé-marche pour trouver unemploi et les recruteurssont souvent épatés par lavariété des profils.” Au-jourd’hui, le modèle écono-mique sociale et solidairede La Ruche a prouvé qu’ilfonctionne et d’autres struc-tures semblables devraientnaître en France avec desentrepreneurs tout aussi en-thousiastes qu’à Paris.Comme autour de cette ta-ble du déjeuner où l’assem-blée a grossi et où lesbonnes nouvelles ne s’arrê-tent plus.

Passer une journée à LaRuche c’est comme avoirbutiné des idées toute lajournée.

C

noéMie d.-ducloyerwww.METROFRANCE.COM

Comment lancer son en-treprise solidaire ? Cathe-rine Leroy -Jay, membred’Ashoka, une organisa-tion internationale quiparticipe à la structura-tion et au développementdu secteur de l’entrepre-neuriat social, donne iciquelques conseils.• Qu’est-ce qu’un entrepre-neur social ?

Il intervient dans desdomaines variés comme lasanté, l’éducation, la luttecontre les discriminationsetc. Son objectif premier

n’est pas le profit mais larésolution d’un problèmesociétal.• Quel profil faut-il avoirpour être un bon entrepre-neur social ?

Les études importentpeu. Le plus important,c’est d’être novateur etavoir envie de changer leschoses.• Quelles compétences parti-culières doit avoir un entre-preneur social ?

Il doit avoir les mêmescompétences que tout en-trepreneur, comme la vi-

sion à long terme, la téna-cité, etc. Mais il doit aussifaire preuve de désintéres-sement et d’altruisme.• Faut-il un budget consé-quent pour se lancer dansl’entrepreneuriat social ?

Il faut surtout y consa-crer beaucoup de temps etd’énergie. Il existe de plusen plus de fonds de sou-tien pour les entrepre-neurs sociaux quidémarrent, notammentau niveau régional.Plus d’infos surwww.ashoka.asso.fr

Des clés pour allervers l’entrepreneuriat social

“Grâce à La Ruche,je peux donnervie à mon projeten faveur despersonnesen situationde handicap.”Malik Badsi

A l’heure du déjeuner, les résidents de La Ruche échangent leurs bonnes pratiques .

spécial diversité