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LA SPOLIATION SOUS L’OCCUPATION NAZIE
Comment la spoliation influence-t-elle les organisations économiques et sociales d’un pays et participe-t-elle à une volonté de déshumanisation des victimes ?
SOMMAIREINTRODUCTION..........................................................................2I. Une spoliation pensée et organisée.............................................4
A. Le nerf de la guerre : l’or................................................................................4
B. Un pillage systématique, un blanchiment étatique.......................................5
II. De la spoliation sous l’occupation nazie à la déshumanisation... .8A. Spoliation des biens privés : l’exemple de Paris.............................................8
B. Spoliation & déshumanisation : Les Camps de Concentration.....................10
C. Une organisation économique au service de cette déshumanisation d'Etat : de la spoliation économique et culturelle...............................................................12
III. La restitution de biens comme devoir de mémoire....................15A. Une prise de conscience réelle....................................................................15
B. Une « restitution » toujours d’actualité.......................................................16
C. Un combat contre l’oubli et la déshumanisation.........................................19
CONCLUSION............................................................................21Synthèses personnelles............................................................22Glossaire ..................................................................................30Bibliographie............................................................................31ANNEXE : Interview D’Iris Knobolch.............................................33
1
INTRODUCTION
Comment réagiriez-vous si des commandos spéciaux pénétraient chez vous et
expropriaient chaque chose que vous possédez en raison de votre religion ? de
votre ethnie ? de votre sexualité ?
Dès 1933, Adolf Hitler, chef du NSDAP (Parti national-socialiste des
travailleurs allemands), est nommé chancelier et devient rapidement le chef du
gouvernement. Il expose sa vision du monde dans « Mein Kampf », ouvrage publié
en 1925 et qui met en exergue son idéologie antisémite. Selon lui, les hommes
appartiennent à des races différentes : la race aryenne, celle des allemands, est
supérieure à toute autre. Pour Hitler, le juif est responsable de tous les problèmes de
l’Allemagne : défaite de 1918, crise économique de 1930... Aussi, l’État nazi mène-t-
il une politique antisémite à grand renfort de propagande : boycott de leurs
magasins, lois de Nuremberg qui, en 1935 les privent de la nationalité allemande et
leur interdit de nombreuses professions. Appauvrie aux suites de la Première Guerre
mondiale, l’Allemagne met tout en œuvre afin de retrouver sa grandeur économique,
et pille des milliers tonnes d’or à plusieurs pays.
Le 1er septembre 1939, l’Allemagne envahit la Pologne. La France puis le
Royaume-Uni lui déclare la guerre : c’est le début de la Seconde Guerre mondiale.
L’Europe se retrouve envahie par l’Allemagne nazie de par l’occupation militaire ou
politique ainsi que par l’occupation physique de certains pays tels que la France.
Dès le début de la guerre, la persécution des juifs commence. On « définit » tout
d’abord le juif : toute personne ayant au moins trois grands parents d’origine
israélite. Ensuite, les nazis procèdent à l’expropriation des biens de ces derniers.
L’humiliation se perpétue par la suite dès 1942, lorsqu’Hitler ordonne la déportation
massive des juifs en zone occupée. La dernière étape est l’extermination en
chambres à gaz, dans les camps de la mort.
2
Durant et même avant la guerre, les nazis procèdent alors à une réelle aryanisation
économique des pays occupés constituant leur nouvel “espace vital”, l’aryanisation
se définissant elle-même comme l’expropriation totale des juifs au profit de la “race
aryenne”, “race puissante et supérieure”, selon Hitler. De cette aryanisation
économique découle alors une réelle spoliation des habitants des pays annexés
touchant principalement les juifs. La spoliation de ces juifs révèle d’une
déshumanisation puisque les nazis leur exproprient chaque chose qu’ils possèdent,
même la plus insignifiante.
Comme le définit Jean Mattéoli dans La Mission d’étude sur la spoliation des Juifs
de France : « une spoliation est une atteinte à la propriété privée et, plus
généralement, aux droits des citoyens, qui enfreint directement les principes même
sur lesquels repose l’ordre social. C’est donc bien au-delà̀ des dommages de guerre
ou des pillages. » Ainsi la spoliation se définit comme « l’action de dépouiller
quelqu’un d’un bien, d’un droit ».
Dans le contexte historique de l’Allemagne hitlérienne, il faut comprendre
l’importance de la spoliation dans la définition de l’économie de guerre et la structure
sociale et idéologique de l’État nazi, qui avait la volonté d’une déshumanisation des
victimes. Pour ce faire, il convient dans un premier temps d’analyser l’impact d’une
spoliation pensée et organisée sur les facteurs économiques et sociaux du pays
pour étudier ensuite le passage de la spoliation à la déshumanisation d’une certaine
catégorie d’individus à savoir les juifs pour enfin aborder le sujet de la restitution des
biens spoliés comme devoir de mémoire
3
I. Une spoliation pensée et organisée
A. Le nerf de la guerre : l’or
Depuis le 1er janvier 1938 en Allemagne, toute activité commerciale (commerce
de détail, artisanat, toute offre de biens et de services) est interdite aux Juifs.
Jusqu’à l’automne de cette même année, plus de la moitié des quelque 100 000
entreprises appartenant à des juifs sont saisies. L’ « aryanisation » de l’économie
qui résulte d’un ensemble de mesures de spoliation visant à transférer la propriété
d'entreprises détenues par des personnes de confession juive à des personnes
considérées « aryennes », est enclenchée mais cela n’est pas suffisant.
Affiche apposée dès 1940 sur les
devantures des magasins juif,
conformément à la politique
d’aryanisation
En janvier 1939, Adolf Hitler prépare activement la guerre. Pour satisfaire son
idéologie pangermaniste, il veut réunir toutes les populations de langue allemande
dans un seul et même Etat allemand, le Reich. Il se lance alors dans une politique
d’expansion agressive afin de conquérir un « espace vital » ou « Lebensraum »
explicitée dans son ouvrage « Mein Kampf » publié en 1945. Il prend connaissance
d'une note confidentielle, datée du 7 janvier, préparée par le président de la
Reichsbank, Hjalmar Schacht. Le IIIe Reich, explique Schacht, est au bord de la
banqueroute : « Il n'y a plus de réserves ni de devises à la Reichsbank ».
Les réserves constituées par l'annexion de l'Autriche, l’aryanisation et l'appel aux
valeurs étrangères, sont épuisées.
4
Les finances de l'Etat sont au bord du gouffre. Faire une guerre de conquête
territoriale au sein de l’Europe est l’unique solution de redresser les finances
publiques et d’atteindre l’autosuffisance nazie. Hitler sait que l’or est le nerf de la
guerre moderne. C’est la valeur refuge, plus forte que les monnaies nationales
soumises à l’inflation. L’or permet d'acheter les matériaux stratégiques nécessaires
aux forces armées du Reich. C’est cet or aussi qui rend possible la transformation
de Berlin en « Germania », une capitale à l’image de l’utopie de l’Allemagne nazie.
Le coût de cette édification conçue par l’architecte Albert Speer s’élève à 6 milliards
de Reichsmarks.
Un pillage systématique ainsi qu’un blanchiment étatique résulte du besoin d’or pour
réaliser les projets ambitieux d’Hitler et pour continuer d’entreprendre une guerre
efficace.
B. Un pillage systématique, un blanchiment étatique
A l’aryanisation de l’économie et des commerces, Adolf Hitler ajoute une dimension
urbaine et immobilière. Le Führer promet de créer le « Grand Berlin” dès 1940. Pour
ce faire, des milliers de logements sont détruits. 70 000 Juifs sont chassés de leurs
habitations afin de reloger les Allemands qui avaient été expulsés des leurs. Les
grands appartements des Juifs, spacieux, luxueux et richement meublés sont
prioritairement réquisitionnés.
Afin de renflouer ses caisses, Hitler donne l’ordre de piller systématiquement les
pays conquis. Il confie cette mission aux SS, qui créent une unité spécialisée,
chargée d’agir sur le terrain : le Devisen Schutz Kommando (DSK) « les commandos
de protection des devises ». Leur pouvoir est illimité : ils fouillent les caisses
d'épargne, les banques privées, collectent l'or des bijoutiers, des joailliers, écument
le marché noir, et forcent les coffres de certains clients de banque.
Cette stratégie de confiscation des richesses du pays occupé est extrêmement
profitable, la Tchécoslovaquie va contribuer à hauteur de 30 millions de dollars en
or, la Pologne à 85 millions de dollars d’or et les Pays-Bas pour cent tonnes d’or.
5
L'or de la Banque nationale belge, mis à l'abri au Sénégal, devient alors un intérêt
majeur pour les nazis. Les autorités pétainistes françaises proposent leur aide pour
récupérer les 221 730 tonnes d’or belges, Vichy ordonnant à la colonie française de
livrer la totalité de l'or belge aux Allemands. Le butin arrivera à Berlin à l’issue d’un
voyage de 18 mois. Cependant le 3 février 1945, plus de 900 bombardiers alliés
lâchent 2300 tonnes de bombes sur Berlin. La ville est réduite à l’état de cendres, la
Reichsbank est pratiquement détruite. Les réserves d’or restantes de la Reichsbank
sont acheminées jusqu’aux mines de sel de Merkers. Lorsque les soldats américains
de la 9ème division d’infanterie entrent en Allemagne au printemps 1945, ils y
découvrent un butin colossal caché par les nazis à des centaines de mètres sous
terre : des centaines de caisses remplies de peintures, de sculptures et d'objets
d'art, plus de 8000 lingots d’or, 2000 sacs de pièces d’or, des reichsmarks, des
souverains anglais, des napoléons, des pièces américaines et des centaines de
sacs de pièces d’or provenant d’autres pays du monde. Ces monnaies, d’origines
différentes, révèlent une spoliation internationale. Cette cave abrite également des
milliers de biens pillés aux victimes. Un empilement de valises remplies d’argenterie,
d’alliances, de dents en or est répertorié méthodiquement, inventorié
méticuleusement et doté d’une étiquette libellée Melmer.
Les Alliés découvrant la
mine de Merkers, 1945
À la fin de la guerre, on estime que les Allemands ont pillé pour environ 580 millions
de dollars en or à travers les pays envahis, ainsi que près de 450 millions de dollars
or ont ensuite été transférés à l’étranger notamment vers un pays pourtant considéré
comme neutre : la Suisse.
6
Chaque période de guerre est l’objet de trafic, de rationnement, mais là encore
l’échelle de ces pratiques est sans équivalent dans l’histoire. Il s’agit d’un trafic
organisé d’État à État et ce, en toute impunité. C’est également grâce à un
blanchiment étatique qui consiste à dissimuler des fonds de provenance illicite en les
réinvestissant dans des activités légales, qu’Hitler va pouvoir continuer à financer la
guerre car en 1942, l’Allemagne est parvenue à l’épuisement de ses réserves
financières. Face à cette spoliation nazie, Paul Rosny, directeur de la Banque
Nationale Suisse, a décidé de blanchir l’or pillé par les Allemands contre des francs
suisses et des dollars utiles pour l’achat des matières premières (livraisons d'acier,
de tungstène, de pétrole, du wolfram en provenance des pays neutres) pour
l’armement et le commerce extérieur allemand.
Les banques suisses sont également montrées du doigt pour spoliation directe des
biens placés dans leurs coffres par des juifs qui furent par la suite déportés. Leurs
héritiers n'ont pas pu récupérer les avoirs, et les comptes sont tombés en
déshérence.
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II. De la spoliation sous l’occupation nazie à la déshumanisation
A. Spoliation des biens privés : l’exemple de Paris
Dés les années 1940, une saisie du mobilier des familles juives est ordonnée. En
effet l’opération Möbelaktion mise en œuvre selon les ordres d’Hitler en janvier 1942,
consiste à confisquer les biens des appartements abandonnés par les Juifs. Sont
notamment saisis les espèces, bijoux, argenterie, des horloges, mais également les
meubles de collection en matériaux nobles. Dans le cadre d’une spoliation visant à
exproprier les Juifs de tous leurs biens, le mobilier, la vaisselle ou encore des objets
modestes du quotidien, tel que le linge de maison sont pillés. Confisquer chaque
chose qu’ils possèdent c’est aussi les priver de tout semblant d’humanité. Tout est
confisqué même les objets les plus insignifiants comme des morceaux de papiers
peints, des boutons de porte, des ampoules, des timbres sans aucune valeur autre
que symbolique, tout ce qui permet de personnaliser un lieu, de le rendre plus
humain, plus chaleureux, de le faire sien, tout est spolié par les nazis dont le seul
objectif est d’éliminer les Juifs et de les priver de leur humanité.
Les nazis durant le pillage des biens des Juifs à Paris, s’emparent d'œuvres d'art
prestigieuses comme des Cézanne, des Braque, appartenant entre autres à des
familles juives françaises, tels que les Rothschild ou les Dreyfus. On estime à 400
000 le nombre d’objets d’art subtilisés aux Juifs pendant l’occupation. Parmi eux,
certains sont repérés par les dirigeants nazis dans des magasins, afin d’enrichir leur
collection personnelle, comme le décrit le film « La femme au tableau », de Simon
Curtis. Dès février 1941, plusieurs convois acheminent jusqu’à Linz en Autriche, ville
natale d’Hitler, des œuvres d’art en vue d’un futur musée à l’effigie d’Hitler, le
« Führer muséum » dont il dessine lui-même les plans. Paris apparaît alors tel un
carrefour majeur pour la spoliation des musées et collections privées.
Paris sous l’occupation est l’exemple criant de la façon dont cette confiscation d’Etat
vise à déshumaniser les victimes. Si le Reich fait en premier lieu appel aux
déménageurs français lors de la spoliation des familles juives françaises déportées,
les pillages deviennent ensuite si colossaux que la tâche est alors confiée à des juifs
internés.
8
Ouvriers du camp de
Drancy, travaillant dans
l’immeuble Lévitan
Ainsi, en 1943, l’immeuble Lévitan, à Paris, devient l’annexe parisienne de Drancy et
le centre de tri des biens spoliés. Plus d’une centaine d’internés sont transférés à
Paris afin de trier les biens juifs volés dans les immeubles parisiens, mais également
pillés dans le camp de Drancy. Ils sont chargés de vider les caisses, de les nettoyer
et de ranger méthodiquement le butin. Certains d’entre eux sont en contact direct
avec des objets appartenant à leur famille ou à leurs proches : une humiliation pour
ces juifs contraints de participer à ce pillage. L’attribution du rangement à ces juifs
révèle un réel désir de déshumanisation de la part des nazis.
Cette spoliation des
biens privés se double
alors d’une spoliation de l’âme et de la mémoire. En effet, outre les biens matériaux
de valeur marchande comme les œuvres d’art ou les biens précieux, les objets d’une
valeur sentimentale n’échappent pas au pillage. Les photographies, les lettres
intimes, les souvenirs personnels, tout ce à quoi les futures générations peuvent se
rattacher sont éliminés, pillés par les nazis pendant leur absence, après leur
déportation ou leur fuite. Les nazis n’ont pas seulement tué, ils ont également
essayé d’effacer leur passé afin d’ajouter l’humiliation à la mort.Cependant les nazis
n’avaient, pour la plupart, pas de réelle volonté de piller ou de déshumaniser ces
victimes. Ainsi leur motivation est extrinsèque, c’est à dire provoquée par des
circonstances extérieures à l’individu. Ce dernier, soumis à l’autorité, ne peut que
continuer d’entreprendre la déshumanisation de ces victimes, dictée par Hitler et les
hauts dignitaires nazis.
De par leur attachement au groupe nazi, qui est le plus souvent leur groupe de
référence, ces derniers ont été embrigadés dans une politique de répression. Tout
9
comportement n’étant pas conforme est considéré comme déviant et donc
sanctionné négativement par la suite. En effet plusieurs lettres de SS retrouvées
après la guerre retranscrivent leur malheur et désespoir face à l’obligation de tuer
sans cesse.
Ces populations sont spoliées en vue d’être déshumanisées, comme si l’on voulait
leur ôter leurs droits inaliénables et nier leur existence en tant qu'être humain. La
spoliation de biens privés transparaît alors telle la première étape des atrocités,
puisqu’elle allait se perpétuer dès 1942 dans les camps de concentration et
d’extermination, où les juifs étaient massivement déportés.
B. Spoliation & déshumanisation : Les Camps de Concentration
Le degré ultime de cette déshumanisation se produit dans les camps de
concentration. A partir du début de l’année 1942, Adolf Hitler ordonne l’arrestation et
la déportation massive de juifs en zone occupée. Dès l’été de la même année, il
ordonne la confiscation des biens à l’entrée des camps. Heinrich Himmler, haut
dignitaire du IIIème Reich, est le chef d’opération de ces pillages dans les camps de
concentration. Il est alors chargé avec le soldat SS, Bruno Melmer, de faire un
inventaire de tous ces biens volés, puis transférés, soit à la Reichsbank ou
dissimulés notamment à Merkers. Avant leur déportation, les juifs avaient également
des valises remplies de vivres et de certains biens précieux, la plupart ne seront
jamais acheminées aux camps de concentration avec leurs propriétaires, mais
seront fouillées et vidées de leur contenu. A leur arrivée dans les camps, argenterie
et alliances, notamment en or, sont confisquées à l’entrée, ainsi que leurs vêtements
et chaussures. Les détenus sont alors amenés à user de stratagèmes humiliants
pour préserver leurs biens précieux, comme avaler leurs alliances afin de les
déféquer, dans le but de les cacher par la suite. Outre le pillage à l’entrée des
camps de concentration, les nazis sont également chargés de subtiliser aux juifs des
biens plus physiques. A l’entrée, les déportés sont tout d’abord rasés, ils sont ainsi
privés de leurs chevelures, les femmes sont également privées de leur féminité.
Les cheveux de tous les détenus sont transformés en immenses bobines de fil
textile, dont les photographies sont encore visibles au Musée du camp d’Auschwitz.
10
De même, les prisonniers se voient faire arracher leurs dents en or de leur vivant ou
après leur extermination en chambre à gaz. L’or récolté dans les camps de
concentration est par la suite refondu en lingots, cela enrichissant les nazis d’un
butin qui sera exporté et masqué de sa véritable origine. Toutes les archives de la
Reichsbank concernant la provenance de l’or nazi depuis les camps, ont disparu ou
ont été volontairement cachées ou détruites, privant les futurs survivants de toute
explication, et en les laissant sans aucune légitimation de ces vols.
Alliances en or retrouvées à Buchenwald, 1944
Lorsque ces victimes juives n’ont plus ni famille, ni biens, ni culture, ni identité, ni
mémoire, c’est dans leur chair d’être humain que la spoliation se manifeste. Les
nazis qui les considéraient comme des « sous-hommes », comme de simple
numéros, sont allés jusqu’à confisquer leur dernier bien : la vie.
Dès 1944 mais surtout à partir de 1945,
les détenus sortent enfin des camps
lors de la libération de ces derniers. Les
détenus quittent les camps démunis
des rares biens personnels avec
lesquels ils sont arrivés. A leur sortie
c’est non seulement leurs biens qui
leur ont été spoliés, mais leur identité
toute entière.
C. Une organisation économique au service de cette déshumanisation d'Etat : de la spoliation économique et culturelle
Chaussures volées aux victimes du camp,
musée du camp d’extermination d’Auschwitz
11
Comme évoqué dans la première partie, la vision nazie fait de l’aryanisation de
l’économie une priorité. En France, le régime de Vichy va accompagner cette
politique à travers la collaboration. Dès 1940, 50 % de la communauté juive est
privée des moyens d’existence normaux, en vertu des lois de Vichy qui interdisent
de nombreux métiers aux Juifs. Fin 1941, les Allemands sanctionnent la
communauté juive française avec une amende exorbitante d'1 milliard de francs, à
payer entre autres sur la vente de biens juifs, et cela est géré par une banque d’Etat:
la Caisse des dépôts et consignations.
L'historien Henry Rousso, estime à 10 000 le nombre d'entreprises aryanisées.
Parmi les entreprises françaises aryanisées, on trouve notamment les Galeries
Lafayette, les éditions Nathan et d’autres noms français. L'aryanisation touche aussi
la presse, le cinéma, les théâtres... Les cinémas UGC, par exemple, résultent d’un
rassemblement des salles de cinémas de propriétaires juifs, qui durent céder leurs
salles, impuissants. A la fin de la guerre, les propriétaires, pour la plupart décédés,
ne peuvent se manifester pour récupérer ces salles, qui sont regroupées en une
même enseigne appartenant à l’État. Le film de François Truffaut « Le dernier métro
», évoque le destin d’un théâtre « aryanisé » tandis que les précédents propriétaires
se réfugient dans la cave du théâtre pour y vivre.
Entre 1940 et 1944, une unité spéciale appelée Einsatzstab Reichsleiter Rosenberg
(ERR) est créée et chargée de collecter minutieusement les objets d’art susceptibles
d’intéresser les nazis puis de les rapatrier en Allemagne. La brigade de l'ERR réalise
des catalogues d'objets d'art pour les présenter à Adolf Hitler qui pouvait ensuite
sélectionner parmi ces catalogues, des œuvres d’art pour son futur musée de Linz
ou pour sa collection personnelle. Les objets sont rangés dans des caisses en bois,
étiquetées selon leur destination. Celles destinées à Hitler sont étiquetées de la
lettre « H », tandis que celles destinées à Goering grand amateur d’art, commandant
de la Luftwaffe (aviation de guerre allemande) et organisateur du pillage
économique, étiquetées de la lettre « G ».
La Galerie nationale du Jeu de Paume à Paris, se transforme temporairement en
musée pour entreposer les œuvres d’art et tableaux volés par les Nazis dès leur
arrivée à Paris en juin 1940. Elle devient également une « gare de triage » des
trésors culturels qui sont envoyés en Allemagne de février 1941 à août 1944. On
12
estime à 20 000 le nombre d’œuvres d’art volées aux Juifs et entreposées au Jeu de
Paume.
Plusieurs autres lieux emblématiques parisiens sont utilisés pour entreposer ces
œuvres volées tels que le Palais de Tokyo, le sous-sol du Musée du Louvre, la Gare
du Nord, les Entrepôts ainsi que les Magasins Généraux d'Aubervilliers. Ce tri
résulte alors d’une véritable organisation économique et logistique, dont certains
dirigeants nazis sont accusés de profiter. En effet Hermann Goering a, entre 1940 et
1944, réquisitionné une salle du Jeu de Paume, la « Salle de martyrs », afin d’y
entreposer des œuvres volées qui étaient uniquement visibles par ce dernier.
Goering a subtilisé à lui seul 900 œuvres d’art au Jeu de Paume. Ces œuvres
modernes mises en quarantaine, considérées comme de l’ « art dégénéré » faisait
l’objet de trafic qui a fait la fortune du Reich et du marché de l’art corrompu. Le 23
juillet 1943, sur la terrasse du Jeu de Paume, L’ERR commet l’irréparable : 600
tableaux d’art dégénéré sont lacérés et brûlés dans un autodafé (des Picasso, des
Miro, des Dali, des Masson).
Le 2 août 1944, cinq wagons quittent Paris, c'est le dernier voyage vers l'Allemagne
d'objets spoliés aux familles juives françaises. Arrêté par la Résistance française, ce
convoi ne franchira jamais la frontière française.
La plupart des directeurs
de musées
réquisitionnés à Paris
sont opposés à ces pillages intempestifs d’œuvres d’art par les nazis, tel que le
directeur du Musée du Louvre, Jacques Jaujard. Il est considéré comme le sauveur
Empillage et répertoriassions de caisses remplies d’œuvres d’art spoliées, sous-sol du musée du Louvre, 1943
13
du musée du Louvre. En effet, il va à l’encontre des ordres du gouvernement de
Vichy et joue, avec Rose Valland, conservatrice du Musée du Jeu de Paume qui
espionna le trafic des Allemands, un réel rôle dans la préservation des œuvres.
Jaujard, tout comme d’autres conservateurs de musées, va jusqu’à transgresser la
loi en organisant le transfert de quatre milliers œuvres d’art en zone libre, afin de les
protéger de la convoitise des nazis et de leurs vols intempestifs de grands tableaux.
Plusieurs œuvres furent exilées à travers la France afin d’être protégées notamment
la Joconde, de Leonard de Vinci, l’un des plus grands chefs d’œuvres de l’histoire
qui connut un parcours atypique. En effet, cette dernière est transportée à travers
toute la France afin d’être préservée. Cette toile débute son périple au château de
Chambord, où de nombreuses œuvres furent cachées par des conservateurs de
musées de la Résistance. Le fameux tableau achève son périple dans la demeure
d’un autre conservateur du Louvre, en exil dans un château dans le Lot. La Joconde
est replacée dans le musée du Louvre dès la fin de la guerre, ainsi que plusieurs
œuvres également exilées tel que Le Scribe Accroupi datant de l’Ancien Empire.
Dès la libération de France, Jaujard et Valland, qui avaient secrètement répertorié
chaque objet ou œuvre d’art spolié par les nazis, se sont battus afin de les restituer
à leurs propriétaires après la guerre.
III. La restitution de biens comme devoir de mémoire
A. Une prise de conscience réelle
La grande galerie du Louvre vidée de ses collections
14
Dès les lois du 16 juin 1948 et du 23 avril 1949, les divers meubles et objets pillés
par les nazis et laissés à l’abandon en France sont entreposés dans différents
gardes meubles en attendant leur restitution. De nombreux meubles, objets ou
œuvres d’art sont alors entreposés dans les locaux de la Foire de Paris ainsi qu’au
Palais de Tokyo. Ces derniers sont divisés en deux catégories. Les objets non
identifiables ou d’usage domestique, sont redistribués grâce à une commission aux
familles dans le besoin. On distingue également une deuxième catégorie, celle des
objets identifiables et pouvant être réclamés par leur propriétaire au ministère des
Finances ou encore revendiqués devant le juge de paix en cas de désaccord. Le
Gouvernement provisoire atteste une nouvelle ordonnance le 21 avril 1945 qui
promulgue l’annulation des dépossessions accomplies par les nazis et le
gouvernement de Vichy. Les lois du 16 juin 1948 et du 23 avril 1949 organisent
également l’indemnisation par l’État des personnes spoliées. De nombreuses
ordonnances et lois existent alors sur les restitutions d’après guerre. Selon le recueil
publié par la Mission Mattéoli, il existe depuis 1943 environ 630 textes concernant
les restitutions. Durant la Seconde Guerre mondiale, environ 400 000 œuvres d’art
sont pillées par les nazis. La récupération de ces œuvres d'art ainsi que leur
restitution est prise en main part le gouvernement américain dès 1943 (soit avant la
fin du conflit mondial) notamment grâce à la création de la Roberts Commission.
Une unité de l'OSS, Art Lofting Investigation Unit (Unité d'enquête sur les spoliations
d'œuvres d'art) est également chargée de récupérer les œuvres d’art volées en
France. Des interrogatoires sont menés et des dépôts sont créés le 20 mai 1945 par
un ordre du Supreme Headquarters Allied Expeditionary Force (SHAEF).
En France, l'ordonnance du 21 avril 1945 déclare « la nullité des actes de spoliation
accomplis par l'ennemi ou sous son contrôle ». Après la guerre, une commission des
alliés est chargée de faire restituer l'or volé à chaque pays (dont le total est d’environ
4 milliards de dollars or). En 1998, le Crédit Suisse et l'Union des Banques Suisses
remboursent 1,25 milliard de dollars aux survivants de la Shoah « pour solde de tout
compte ».
B. Une « restitution » toujours d’actualité
Après la guerre, la Commission de récupération artistique a restitué en France 45
000 œuvres et objets d'art spoliés. Pour certains, leurs propriétaires n'ont jamais été
15
identifiés et on estime au total à 100 000 le nombre de pièces qui n’ont pas été
rendues à leurs propriétaires d’origine.
Prenons l’exemple du film « La femme au tableau » avec Helen Mirren qui retrace
l’histoire authentique et passionnante de Maria Altman, une autrichienne d’origine
juive ayant fui l’Autriche et qui, à 70 ans, devenue citoyenne américaine, décide de
récupérer le célèbre « Portrait d'Adèle Bloch-Bauer » de Gustav Klimt. Le chef-
d’œuvre, considéré par plusieurs comme la « Joconde de l’Autriche » avait en effet
appartenu à sa famille. De plus en 2008, « Le Mur rose » de Matisse a été restitué
aux héritiers d'Harry Fuld Jr, propriétaire allemand spolié par les Nazis en 1941 ce
qui souligne cette idée d’un combat toujours d’actualité.
Le Mur Rose, d’Henri Matisse
Décidée par le Premier Ministre Alain Juppé, la Mission Mattéoli démarre en 1997 et
s’achève le 17 avril 2000. Jean Mattéoli présente alors à Lionel Jospin les
conclusions de cette mission d'étude, contenues dans un rapport général. Ce rapport
officiel de l’Etat français met en lumière pour la première fois l'ampleur de la
Portrait d’Adele Bloch-Bauer I, Gustav Klimt
16
spoliation qui a frappé la population juive en France, avec une comptabilité jamais
effectuée depuis la guerre. La commission a estimé à environ 330 000 personnes en
1940, une spoliation lancée en zone Nord dès le début de l'Occupation, assumée
par Vichy et étendue par lui à l'ensemble du territoire national à partir de juillet 1941.
Ils révèlent la multiplicité et la complexité des mécanismes de la spoliation qui ont
touché tous les secteurs de l'économie à l'exception du secteur primaire, toutes les
branches de la fonction publique, de l'industrie, du commerce et des services, public
et privé confondus. Le rapport évalue à environ de 8,5 milliards de francs actuels le
montant de l’ensemble des biens saisis (immeubles, entreprises, comptes). Cette
somme comprend notamment : les prélèvements sur les comptes bancaires, les
contrats d’assurance-vie, l’aryanisation des biens, les sommes confisquées aux
internés juifs dans les camps français (80 000 comptes bancaires et environ 6 000
coffres bloqués, 50 000 procédures d'aryanisation engagées, plus de 100 000 objets
d'art ainsi que plusieurs millions de livres pillés, 38 000 appartements vidés). Selon
les conclusions de la Mission, l’importance des restitutions opérées par le
Gouvernement provisoire à partir de 1944 peut être évaluée entre 90 et 95 %.
Le rapport recommande que, lorsque la spoliation d'un bien est établie,
l'indemnisation soit de droit, quels que soient les délais de prescription en vigueur, le
premier ministre Juppé déclare en effet « Quand un bien dont l’existence en 1940
est établie a fait l’objet d’une spoliation et n’a pas été restitué ou indemnisé,
l’indemnisation est de droit quels que soient les délais de prescription en vigueur ».
En septembre 2000, la Caisse des dépôts et consignations a pris l’initiative de
diffuser très largement une brochure intitulée Spoliations antisémites menées par le
régime de Vichy : les engagements de la Caisse des dépôts envers les victimes et
leurs ayants droit. Il y était notamment exposé les procédures de restitutions mises
en œuvre au sortir de l’Occupation. Chaque famille victime de ces mesures est
invitée à contacter l’institution afin de savoir si celle-ci est en possession de
quelques informations la concernant.
Après examen du millier de réponses parvenues à la Caisse des dépôts, une
centaine de familles sont ainsi informées de l’existence, dans les archives, d’une
consignation ayant appartenu à l’un de leurs membres, fondant ainsi leur droit à
réparation.
17
Le 5 mai 2011, les Archives Nationales des États Unis établissent un portail internet
commun (www.archives.gov/research/holocaust/international-resources) permettant
l’accès aux archives américaines, françaises, britanniques, allemandes, belges ou
ukrainiennes ainsi qu’à des millions de pages de documents et d’images numérisées
illustrant les biens culturels spoliés aux juifs par les nazis durant la Seconde Guerre
mondiale. James Hastings, l’homme à l’origine de ce projet a dit : « Ce projet fait de
l’histoire un instrument de justice », en effet ce projet réunissant onze organisations
de sept pays différents, vise à redonner justice aux personnes spoliées et démunies
de leurs biens.
Plus récemment, en mars 2014, Aurélie Filippetti, ministre française de la Culture,
prononce un discours à l’occasion de la cérémonie de restitution de trois tableaux
volés durant la Seconde Guerre mondiale. Ces tableaux, révélant trois différentes
histoires, sont restitués aux descendants des propriétaires légitimes. Ces restitutions
sont un préambule au film Monuments Men, de George Clooney, film traitant de la
spoliation. Ces restitutions toujours présentes et la sortie de tels films, prouvent que
les vols et spoliations durant la Seconde Guerre mondiale ne sont pas oubliés.
La restitution des biens juifs représente bien plus qu’une simple restitution, c’est un
symbole. Pour les nazis, les juifs étaient inférieur à l’être humain et ne méritaient pas
de vivre ou encore moins de pouvoir posséder des biens précieux, comme des
œuvres d’art. Restituer ces biens aux familles c’est donc aussi restituer cette part
d’humanité qu’on leur avait retirée, voila pourquoi, 70 ans après, le sujet est toujours
d’actualité.
C. Un combat contre l’oubli et la déshumanisation
D’après Mattéoli, « la spoliation, qui viole les principes mêmes du droit, exige donc
une restitution pour être corrigée. Parler ici de réparation est une commodité de
18
langage à laquelle nous n’avons pas toujours échappé, mais dont nous ne devons
pas être dupes : en toute rigueur, restituer un bien à son légitime propriétaire n’est
pas seulement réparer un préjudice matériel ; c’est aussi, et d’abord, rétablir un de
droit qui n’aurait jamais dû être violé. On n’est pas ici dans l’ordre des
compensations et des intérêts légitimes, même s’ils sont importants c’est une
question de justice ».
Restituer c’est redonné de la dignité, c’est aussi un geste d’humanité. Tandis
qu’oublier c’est accepté, le silence devient alors coupable. De tels actes ne peuvent
pas être acceptés. A mesure que les survivants de cette période de l’histoire
disparaissent, il est important de se souvenir de ce « crime contre l’humanité »
contre la culture, contre la mémoire. A l’occasion de la cérémonie de restitution de
trois tableaux spoliés, à Paris, Aurélie Filippeti, a tenu un discours sur l’importance
de perpétuer ce combat de restitution essentiel au devoir de mémoire et de justice.
Elle dit :
« Il y a presque un an, jour pour jour, je procédais ici même à la restitution de sept
œuvres spoliées par les Nazis à leurs légitimes propriétaires. Je suis heureuse et
émue de pouvoir, une fois encore, faire ce geste de réparation et de justice en
remettant solennellement trois tableaux aux ayants droit des familles auxquelles ils
furent volés. Ces restitutions sont très importantes : elles sont, pour les familles, une
véritable reconnaissance des atrocités subies pendant la seconde guerre mondiale.
Elles n’effacent pas la douleur et son souvenir qui court de génération en génération,
mais elles témoignent d’un indispensable travail de mémoire, soixante-dix ans après
les horreurs de la barbarie nazie. En remettant aujourd’hui trois œuvres spoliées, j’ai
conscience de la vertu pédagogique de cet acte. Je veux qu’il soit l’occasion de ne
pas oublier ce que fut cette page de notre histoire et qu’il manifeste la détermination
de l’Etat à restituer des œuvres, dont il n’est que le gardien provisoire. On pourrait
penser qu’il n’est plus possible de progresser dans le domaine des restitutions. Les
dix œuvres restituées en un an prouvent le contraire. Les restitutions continuent
d’être possibles et le devoir de mémoire est toujours d’actualité. »
Oublier, c’est pardonner l’acte inhumain auquel les juifs ont dû faire face. Restituer,
c’est rendre aux familles une partie de leur identité qui leur à été spoliée.
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Iris Knobloch, juive allemande dont les parents ont connu l’expérience des camps
ainsi que celle de la spoliation raconte :
« Les photos de famille, meubles ou tout objet permettant de se rattacher au passé,
au vécu des familles assassinées, ont été volés. Il ne reste plus rien pour les
générations futures, c’est comme si des familles ou des identités entières avaient été
effacées, plus aucune photos ou aucune trace de leur existence. Quand mon père
ou ma mère me racontaient ce à quoi ressemblaient mes oncles, mes tantes ou mon
grand-père, je ne pouvais qu’essayer de les imaginer, n’ayant rien d’autre que leurs
paroles comme portraits, et mes parents ne pouvaient se rattacher qu’à leurs
souvenirs qui s'effaçaient au fil des années ».
En effet, comment combattre l’oubli quand tous les supports matériaux auxquels les
familles pouvaient se rattacher leurs ont été arrachés ? Elle explique cependant :
« Selon moi, l’utilisation du cinéma à travers des images pour raconter et illustrer
cette histoire contribue à perpétuer la mémoire ainsi que le souvenir car l’art ne
disparaît pas il est conservé et se transmet à travers les âges et les générations,
luttant de cette manière contre l’oubli. »
CONCLUSION
La spoliation a influencé les organisations économiques et sociales des pays
occupés et a participé également à une volonté de déshumaniser chaque victime.
Iris Knobloch
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En effet, l’Allemagne ayant été appauvrie aux suites de la guerre et du traité de
Versailles, met tout en place dès l’arrivée d’Hitler au pouvoir, afin de réaffirmer sa
puissance notamment économiquement. Pour ce faire, il met en place la politique
d’aryanisation et pille à chaque pays occupé ses réserves d’or. Son besoin d’or
grandissant, Hitler décide de piller les populations juives en spoliant tous leurs biens
privés. Dans leurs appartements comme dans les camps, tout leur était pris. Le
moindre souvenir était effacé, laissant les survivants sans aucune trace de leur
passé. Les nazis, amateurs d’œuvres d’art, ont également pillé les tableaux et objets
de collections dans les grands appartements juifs mais également ceux des musées
nationaux. C’est grâce à des conservateurs de musée, résistants, que plusieurs
œuvres ont été cachées ou restituées à leurs propriétaires après la guerre. Dès
1945, plusieurs commissions ont été établies afin de restituer aux victimes ce qu’il
leur avait été injustement spolié par les nazis. Certains objets ne peuvent cependant
pas être restitués, puisqu’il est impossible de différencier les réels propriétaires des
simples opportunistes. On estime à 100 000 le nombre d’œuvres et objets d’art non
restitués à ce jour. Par ailleurs, plusieurs associations se battent toujours pour que
justice soit faite et que des familles puissent retrouver dans des archives mondiales
ce qui leur avait été spolié durant cette guerre d’anéantissement. La Seconde guerre
mondiale a fait 60 millions de morts, dont 6 millions de juifs, pour la plupart spoliés
chez eux ou dans les camps de la mort. Aujourd’hui encore, plusieurs familles ou
personnes engagées dans la restitution des objets spoliés, se battent pour éviter
l’oubli de ces pillages consentis par le gouvernement. Se battre pour la restitution,
comme se battre contre l’oubli, c’est ne pas légitimer ces pillages et spoliations
d’œuvres d’art, de biens, mais surtout, d’identités.
SYNTHÈSES PERSONNELLES
SYNTHÈSE PERSONNELLE : DELPORT Jeanne
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Nous avons choisi d’étudier la spoliation sous l’occupation nazie car pour nous ce
thème n’est pas assez abordé à l’école et est complètement absent de nos manuels
scolaires alors qu’il constitue pourtant un épisode majeur de l’Histoire. Ainsi ce
travail personnel encadré permet de lutter contre l’oubli des évènements et donc de
perpétuer le souvenir.
Ce sujet défini ensemble, regroupe les matières suivantes : le français et les
sciences économiques et sociales. En effet nous avons appris que le pillage ainsi
que la spoliation résultaient d’un réel besoin d’or et de toute une dimension
économique afin d’entreprendre une guerre efficace et de ce fait satisfaire l’idéologie
pangermaniste d’Hitler. De plus l’aspect social se retrouve notamment à travers la
déshumanisation provoquée par la spoliation puisque tous les biens des victimes
juives leur sont pris. En outre la littérature tout comme la peinture servent le devoir
de mémoire et le combat contre l’oubli, cette idée qui constitue une des parties de
notre TPE inclut de cette manière le français. Notre étude sert à démontrer comment
la spoliation influence les organisations économiques et sociales d’un pays et
participe d’une volonté de déshumanisation des victimes.
Nous avons mis un certain temps à trouver une problématique qui couvrait
l’ensemble de notre TPE de manière précise et concise. Après de nombreuses
modifications et l’aide de nos professeurs référents, nous nous sommes mis
d’accord sur la problématique annoncée ci-dessus. Afin de répondre à cette dernière
nous avons tout d’abord effectué de nombreuses recherches sur Internet puis le
manque d’informations sur certains évènements et chiffres précis nous incita à nous
rendre sur des sites d’archives, à nous orienter vers des œuvres littéraires rédigées
par des historiens. De plus nous avons eu la chance de rencontrer Iris Knobolch,
une juive allemande qui nous a raconté l’histoire de ses parents qui ont vécu
l’expérience des camps et de la spoliation et ainsi apporter une dimension plus réelle
et concrète à nos recherches. Nous avons rencontré quelques problèmes de
répartition des taches auxquels nous avons su y remédier rapidement par le simple
biais de la conversation. De plus nous avons eu un peu de mal à trouver des chiffres
précis puisqu’il est très compliqué d’estimer le montant auquel s’élève la spoliation,
ce ne sont que des approximations.
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Je suis satisfaite du résultat obtenu, je pense que nous avons bien réussi à expliquer
tout d’abord en quoi consiste la spoliation puis ensuite en quoi elle relève de la
déshumanisation. Je trouve également que nous avons réussi à faire passer le
message selon lequel la mémoire permet de ne pas légitimer les événements
passés. De plus la réalisation de ce TPE s’est faite dans la joie et la bonne humeur
ce qui est une satisfaction supplémentaire. Ce sujet m’a permis de découvrir cet
aspect de la Seconde Guerre mondiale que j’ignorais. Il n’y avait pas seulement les
camps de concentration mais également une spoliation de toute une identité. J’ai
appris également de nombreuses anecdotes sur cette période qui me permettent
d’enrichir ma culture personnelle. Ce travail collectif m’a appris comment réellement
fonctionner à plusieurs, être quatre ce n’est pas évident mais une réelle solidarité
s’est créée ainsi qu’un très grand plaisir à faire quelque chose qui nous intéresse. Il
m’a également permis d’améliorer ma façon d’écrire puisque mes camarades me
fournissaient des remarques constructives pour rendre mon travail meilleur et m’a
également permis d’acquérir une certaine aisance à l’oral.
Pour conclure, la spoliation a influencé les organisations économiques et sociales
d’un pays et participe d’une volonté de déshumanisation car elle constitue un pillage
systématique et un blanchiment étatique ainsi qu’une saisie de tous les biens
pouvant créer une identité, une personne et donc nie l’existence des populations
juives en tant qu’êtres humains. Il est donc après la guerre nécessaire de restituer
les biens comme devoir de mémoire. C’est ce message que nous avons réussi à
faire passer : oublier c’est pardonner l’acte inhumain auquel les juifs ont dû faire face
tandis que restituer, c’est rendre aux familles une partie de leur identité qui leur a été
spoliée.
SYNTHÈSE PERSONNELLE : MINICONI Chiara
J’ai toujours été une grande passionnée de cinéma. L’été dernier, je suis allée
voir le film de Simon Curtis La Femme au Tableau. Ce film m’a profondément
bouleversée, choquée et en quelque sorte ouvert les yeux sur le monde et sur
23
l’Histoire. Comment avais-je pu ignorer ces atrocités et ces actions abominables
qu’on avait fait subir à des milliers d’êtres humains ? Certes on parle de la Shoah
dans les manuels scolaires et des camps de concentrations mais sans jamais
évoquer la spoliation qui a été infligée aux juifs. C’est devant cette ignorance totale à
laquelle je faisais face que pour moi il fut évident que nous devions choisir ce sujet
pour notre TPE. Je l’ai mentionné au reste du groupe, et le sujet fut choisi
àl’unanimité. En découvrant à la rentrée que nos deux matières encadrant le TPE
étaient le Français et les SES. Nous nous rendîmes compte que notre sujet devait
avoir une dimension autre qu’historique et que nous devions le documenter de
chiffres précis afin d’illustrer la spoliation des juifs sous l’occupation nazie dans son
aspect économique et social.
Le but de notre étude est de montrer comment un pays en temps de guerre peut en
arriver à la spoliation de milliers de personnes dans le but de générer des réserves,
allant jusqu’à déshumaniser les victimes. Nous avons pour objectif de montrer
comment et pourquoi cette spoliation a été opérée et de rappeler le devoir que nous
avons, nouvelles générations, de perpétuer la mémoire de ces populations et de ne
jamais oublier.
Nous avons mis beaucoup de temps à trouver une problématique qui nous semblait
adéquate. Non pas que l’idée ne fut pas claire mais nous n’arrivions pas à trouver
les mots justes afin d’expliquer au mieux le processus de déshumanisation jusqu’à
ce que nous trouvions la problématique représentant parfaitement notre point de
vue : Comment la spoliation influence-t-elle les organisations économiques et
sociales d’un pays et participe-t-elle d’une volonté de déshumanisation des
victimes? Au début de notre étude, nous avons rencontré une difficulté majeure, à
savoir le problème de documentation à laquelle nous pouvions accéder dans nos
recherches.
En effet, cet aspect de la Shoah étant peu abordé, nous dûmes nous renseigner à la
Bibliothèque Nationale d’Information dans des Encyclopédies ou encore interviewer
une personne afin d’obtenir le plus d’informations possible. Nous avons donc
rencontré Iris Knobloch, une juive allemande qui nous a raconté l’histoire de ses
parents qui ont vécu l’expérience des camps et de la spoliation.
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Je suis satisfaite du résultat obtenu car je pense que malgré la difficulté que nous
avons rencontrée à acquérir de l’information, nous avons pu enquêter et apporter le
plus d’informations possible à notre devoir. Ce travail m’a permis de vivre une réelle
cohésion de groupe et à ne pas me limiter à ce que je pensais pouvoir trouver
facilement et m’a appris à toujours chercher plus. Il a amélioré ma capacité à
travailler en groupe et à effectuer des recherches sur un sujet précis et également à
travailler sous la contrainte du temps.
Pour conclure, je pense que notre groupe a réussi à bien retransmettre le processus
de déshumanisation ayant eu lieu à cause de la spoliation et donc par conséquent à
remplir se devoir qu’a la nouvelle génération de perpétuer la mémoire.
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SYNTHESE PERSONNELLE : SILVA Axel
Tout d’abord, bien qu’un très grand nombre de personnes connaissent le
contexte et les événements qui se sont déroulés durant la Seconde Guerre
Mondiale, nous avons voulu évoquer à travers notre travail personnel encadré, la
spoliation qui a touché les populations juives sous l’occupation nazie afin d’apporter
un éclairage supplémentaire. En effet, ce sujet n’est pas étudié à l’école et très peu
abordé. Les matières encadrant ce TPE sont le français et les sciences
économiques et sociales. La spoliation possède en effet un réel contexte social étant
donné la déshumanisation des victimes, mais également économique puisque tout
l’or pillé et les objets des victimes apparaissent comme une source de richesses
pour le gouvernement nazi.
Les recherches se sont effectuées essentiellement à travers la lecture de livres, le
visionnage de reportages ainsi qu’à travers les différents sites internet et notamment
les archives. Par ailleurs, nous avons eu l’opportunité d’interviewer Iris Knobloch,
une juive allemande dont les parents ont vécu l’expérience des camps et de la
spoliation. Cependant, certaines difficultés se sont présentées à nous, du fait d’un
certain manque d’informations, par exemple, le nombre de biens et d’objets d’art
volés sont des approximations et non des nombres exacts puisqu’il est impossible
de savoir réellement tout ce qui a été spolié car tout n’a pas été reporté
méthodiquement. Malgré cela, nous étions un groupe où l’entente était très présente
tout comme la coopération.
Le temps n’a pas réellement été un obstacle puisque nous avions choisi notre sujet
dès les premiers cours. De ce fait, nous avons réussi à travailler dans de bonnes
conditions et atteindre le résultat que nous espérions. De plus, ce sujet m’a, pour ma
part, beaucoup appris dans la mesure où je ne possédais pas toutes les
connaissances nécessaires pour la réalisation de ce travail.
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Au-delà de l’apprentissage acquis, j’ai aussi appris une nouvelle manière de
travailler un tel travail de groupe, avec un contenu si développé, ne m’avait jamais
été demandé auparavant. Je pense par ailleurs que ce travail m’a permis d’être plus
à l’écoute des autres sur un projet commun.
Pour conclure, la spoliation faite aux juifs durant l’occupation des nazis relevait d’une
réelle soif d’or mais était surtout l’expression d’une volonté acharnée visant à
déshumaniser les populations juives mais également les populations des territoires
occupés par l’Allemagne nazie d’Adolf Hitler.
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SYNTHÈSE PERSONNELLE : SIMON Pauline
La Spoliation sous l’Occupation nazie est liée au thème de l’argent et du
pouvoir. Nous avons fait ce choix car il semblait intéressant d’aborder la spoliation,
aspect de la Shoah souvent insuffisamment abordé dans notre programme
d’histoire. Ce dernier ne nous a cependant pas été imposé. Plus personnellement, le
choix de ce sujet me paraissait évident puisque l’histoire d’Anne Frank m’a
profondément touchée, et me passionne depuis la lecture de son journal.
Notre sujet est en cohérence avec les sciences économiques et sociales car cette
spoliation et deshumanisation relevèrent de la soumission à l’autorité, où tout
comportement déviant du nazisme était banni. Notre sujet est en cohérence avec le
français car la spoliation se manifeste notamment dans le domaine de l’Art. De plus,
la spoliation et plus globalement la Shoah ont été des sujets sur lesquels beaucoup
d’auteurs ont écrit : poètes, écrivains ou dramaturges.
Nous avons de plus choisi d’orienter notre sujet vers un aspect davantage social en
construisant la problématique autour de la notion de déshumanisation. Ces atrocités,
bien qu’ayant une visée économique, ont notamment été commises à cause d’une
idéologie antisémite, cruelle et raciste. De ce fait, les nazis, monstres de cruauté, ont
tout mis en œuvre afin d’humilier les juifs, victimes impuissantes, dans le but de les
éliminer. Ces derniers ont été déshumanisés, de par ces pillages mais également de
par leur expérience traumatisante dans les camps de la mort.
Nous avons réussi à développer notre problématique en nous intéressant davantage
aux procédés de spoliation. En effet, outre le pillage de biens matériels, des
souvenirs sentimentaux étaient également spoliés. La spoliation, bien qu’elle révèle
d’un vol et d’une mutilation internationale, déshumanise et prive les survivants et
descendants de tout souvenir ou légitimation. Notre problématique était au début
axé sur un aspect historique, et notre plan était de ce fait plus linéaire et
chronologique. Nous voulions donc à tout prix éviter de tomber dans un récit
historique, puisqu’il ne s’agissait pas d’une des matières encadrantes de notre TPE.
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Afin de répondre à notre problématique, nous avons dès le début commencé à nous
documenter sur le sujet, à nous intéresser davantage aux émissions et reportages
traitant de la spoliation et à rechercher tout type de support, notamment
cinématographiques, afin d’avoir une idée plus imagée du sujet. De plus, nous avons
pu rencontrer une dame dont le père et la mère ont vécu la spoliation, tant chez eux
que dans les camps. Afin de nous documenter, nous avons également visité
l’immeuble Lévitan à Paris, centre de tri et annexe du camp de Drancy. Nous nous
sommes équitablement réparti le travail, en faisant en sorte que chacun travaille sur
l’aspect de la spoliation qui l’intéressait le plus.
Nous avons cependant rencontré quelques difficultés. Premièrement, la
prononciation des termes allemands fut très compliquée pour nous. Ensuite, les
données sur les quantités pillées à chaque pays étaient calculées en tonnes d’or,
impossibles à convertir en dollars ou en euros actuels. Enfin, les recherches sur la
spoliation dans les camps de concentration furent compliquées, puisque ces
dernières font davantage partie de témoignages et de récits de vie que de faits
historiques.
Je suis assez satisfaite du résultat obtenu, puisque ce TPE est le fruit de
nombreuses heures de travail et de recherches approfondies. Le voir abouti est alors
un réel accomplissement de cette année de première. Ce sujet m’a fait acquérir
davantage de culture générale et m’a fait prendre conscience que la Shoah ne se
résumait pas seulement aux camps de la mort. Ce travail collectif m’a notamment
appris l’entraide, et m’a prouvé que les groupes de travail pouvaient être d’un réel
soutien, notamment pour la préparation d’oraux ou de moments de stress
passagers.
En conclusion, il est possible d’affirmer que la Seconde Guerre mondiale fut une
guerre d’anéantissement, qui passa notamment par l’élimination des juifs. Avant leur
extermination en chambres à gaz, un réel processus de déshumanisation touchait
ces victimes, impuissantes. La spoliation se manifesta alors dans les biens publics
tels que l’or des pays, dans les biens privés mais également dans l’art. Je pense que
notre principal objectif a été atteint puisqu’à travers ce TPE, nous avons réussi à
aborder un passage fondamental de l’histoire, trop oublié de nos jours.
29
GLOSSAIRE
Aryanisation : est un néologisme désignant l'expropriation totale des juifs en Allemagne ainsi qu'en Autriche pendant la période du nazisme et par extension les spoliations endurées par les juifs de toute l'Europe occupée pendant la Shoah.
Blanchiment : infraction consistant à dissimuler des fonds de provenance illicite en les réinvestissant dans des activités légales.
Confiscation : la saisie ou le fait de prendre quelque chose a quelqu'un par un acte d'autorité
Déshumaniser : faire perdre son caractère humain a quelqu'un ou a un groupe de personnes, en leur enlevant toute sensibilité.
DSK (Devisen Schütz Kommando ou détachement pour la mise en sûreté des devises) : unité spécifique créée par les SS, chargée d’agir sur le terrain. Ils pillaient alors les coffres des banques publiques comme privées, lingots, pièces d’or ou encore bijoux.
ERR (Einsatzstab Reichsleiter Rosenberg) : équipe d'intervention du Reichsleiter Rosenberg. Il s’agissait d’une section du bureau de la NDSAP qui a effectué d'importantes confiscations de biens appartenant aux juifs dans les territoires occupés de la Wehrmacht.
Espace vital : concept géopolitique suivant l'idée d'un territoire assurant la survie culturelle d'un peuple et de favoriser sa croissance via l'influence territoriale
Möbel Aktion : unité spéciale chargée du pillage des appartements
Nazi : partisan du NSDAP qui promouvait la supériorité de la race aryenne au détriment des autres.
NSDAP (Parti National-Socialiste des Travailleurs Allemands ou parti nazi) : parti politique allemand de l'extrême droite rattachée à la famille politique du fascisme.
OSS (Office de Services Stratégiques) : agence formée durant la seconde guerre mondiale et considérée comme le prédécesseur de la CIA. L'OSS a été formée pour coordonner l'espionnage derrières les lignes ennemies.
Pillage : vol par la violence, notamment en temps de guerre
Spoliation : l'action de déposséder quelqu'un ou un groupe de personnes légalement, par la violence ou par la ruse
SS (Schutzstaffel) : organisation paramilitaire nazie créée en 1925 pour assurer la protection d’Adolf Hitler et qui devint une des principales organisations du régime nazi.
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BIBLIOGRAPHIE
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Jean-Jacques NEUER, Éclairage sur le découverte récente des tableaux volés ; Le Huffington Post [en ligne], mis à jour le 08/11/2013, disponible sur : http://www.huffingtonpost.fr/jeanjacques-neuer/tableaux-juifs-spolies-restitution_b_4235062.html
31
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LIVRES :
Collectif d’auteurs, Œuvres volées, destins brisés ; L’histoire des collections juives, 2013
Jean-Marc DREYFUSS, Le pillage des biens juifs dans l’Europe occidentale occupée ; Autrement, 2007
GENSBURGER Sarah, Images d’un pillage : Album de la Spoliation des Juifs à Paris, 1940-1944 ; ÉditionsTextuel, 2010
REVUES, MAGAZINES, JOURNAUX :
Annette WIEVIORKA, Des spoliations aux restitutions ; Persécutions et spoliations des Juifs pendant la Seconde Guerre mondiale, presse universitaire de Grenoble, 2004
Véronique SALES, La Suisse, les juifs et l’or des nazis ; L’Histoire, mensuel n°209, avril 1997, page 78
Emmanuelle POLACK, Le peintre, la danseuse, le nazi ; L’Histoire, mensuel n°386, avril 2013, page 18
Jan HEIDTMANN, Allemagne. L’extrême droite s’enracine dans l’immobilier ; Courrier international, n°1284, juin 2015
ILLUSTRATIONS :
Aryanisation économique et restitutions ; La documentation française [en ligne], disponible sur : http://www.ladocumentationfrancaise.fr/var/storage/rapports-publics/004001396.pdf
Les objets français volés par les nazis ; L’internaute [en ligne], mis à jour le 03/11/2006, disponible sur : http://www.linternaute.com/actualite/magazine/
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INTERVIEW D’IRIS KNOBOLCH
Iris Knobolch n’a pas directement vécu la Spoliation. En effet, ce sont ses parents qui ont réellement vécu ce traumatisme et cette déshumanisation. Ses deux parents ont vécu différemment la guerre et la Spoliation, dans deux pays différents, et ont été impactés de manière différente. Iris nous raconte alors l’histoire de ses parents, qui lui ont raconté toutes les atrocités dont ils ont été victimes durant la guerre.
Nous : Pouvez vous tout d’abord nous expliquer quels sont vos liens avec la spoliation ?
Je vais vous raconter un peu, en premier lieu, les deux histoires très différentes de
mes parents, qui ont vécu la spoliation différemment. Je crois que cela vous donnera
un aperçu de ce qu’il s’est passé à cette époque, car il est différent de l’entendre que
de le lire, ou voir dans des films ou des documentaires.
Ma mère est née à Munich, elle était enfant unique. Mon grand-père, son papa, était
tout d’abord allemand. La religion lui importait peu, il n’était pas très religieux. Sa
médaille de combattant de la Première Guerre mondiale trônait dans le salon, c’était
sa fierté : il était fier d’être Allemand. C’était un avocat très connu à Munich. Munich,
c’est là où tout a commencé, c’est là où Hitler est arrivé au pouvoir. Le jour de la
Kristallnacht (Nuit de cristal, 1938), ma mère devait avoir 8 ans, mais elle s’en
rappelle toujours vivement. Elle avait très peur, elle voyait des synagogues brûler.
Elle se rappelle toujours de ce moment où s’arrête un monde et où un autre
commence, c’était un moment traumatisant. Ma grand-mère, sa mère, était une
femme non juive, qui s’était convertie pour se marier avec lui. Quand le fait d’être juif
devint compliqué, sa mère se sauva sans explication, préférant se sauver elle
même. Ma mère était très attachée à sa grand-mère, c’était presque sa deuxième
mère. Un jour les Nazis sont venus chez mon grand-père afin de déterminer qui de
la famille partirait dans les camps de travail. Ma grand-mère s’est portée volontaire,
elle ne voulait pas que son fils et son enfant partent travailler. C’était comme si elle
avait perdu sa deuxième maman.
Plusieurs amis de mon père lui ont conseillé de s’enfuir, la situation des juifs
empirant de jour en jour. Il a pris ces conseils très au sérieux, mais uniquement pour
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ma mère, qui avait 8 ans à ce moment là. Il l’a donc emmené chez une dame très
pieuse, catholique, qui était notre ancienne femme de ménage. Elle habitait dans un
petit village en Allemagne, pas très loin de Munich. Elle avait fait comme un deal
avec Dieu. Deux de ses frères se battaient pour Hitler en Russie, et elle s’est dit :
« je vais sauver cet enfant, et Dieu me rendra mes deux frères ». Cette dame a alors
prétendu que ma mère était un enfant hors mariage. Quand mon père a emmené ma
mère dans ce bled, il ne pouvait pas lui expliquer pourquoi, il ne pouvait pas lui dire
qu’elle était en danger parce que les juifs étaient menacés. Comme elle avait huit
ans, il ne put rien lui dire de peur qu’elle parle et se compromette auprès des gens
du village. Elle croyait alors qu’il l’avait à son tour abandonnée. Vous vous imaginez
le traumatisme pour un enfant qui, a cet âge, à perdu sa mère, sa grand-mère et son
père ?
Cette femme avait très peur que l’enfant ne parle. Elle ne la laissait pas jouer avec
d’autres enfants. Ses seuls amis étaient les animaux de la ferme, ça doit être pour
ça que je suis cinglée avec les animaux (rires). Ma mère avait des affinités fortes
avec eux.
Ma mère vécut pendant toute la guerre dans cette ferme, mo grand-père est mort
dans un camp. A la fin de la guerre, cette dame ramena ma mère à Munich, elles ne
savaient rien de ce qu’il était arrivé à mon père et à nos affaires. Dans l’appartement
de mon grand-père, dans son appartement, il n’y avait plus rien. Un ami de mon
grand-père les informa que mon grand-père était mort, et que tout nous avait été
volé par les Nazis pendant la guerre.
Nous : Dans les appartements il ne restait plus rien. Les draps, les ampoules avaient été volés. Tout était vraiment spolié ?
I : Il ne restait plus rien, je ne sais pas si ils ont volé, si ils ont juste brulé ou détruit
mais il ne restait rien. A mon sens le pire est qu’il ne restait même pas des objets
personnels : des lettres, des photos, des souvenirs qui sont plus importants que tout
le reste.
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Pour finir sur l’histoire de cette femme et ma mère, autour de la fin des années 90’
en Allemagne, ma mère a fait tout les efforts possibles pour que cette femme qui l’a
sauvée de la déportation soit honorée pour avoir risqué sa vie afin de la sauver. En
Allemagne après la guerre il y avait une clause dans la Constitution qui disait qu’on
ne pouvait donner des médailles aux personnes avant 1945, ma mère s’est donc
battue très longtemps pour que cette femme vivant toujours dans le même village
soit honorée. Un jour, un représentant du gouvernement est donc venu la voir pour
lui dire que le ministre allait donc venir dans le village pour l’honorer mais elle a
refusé car elle craignait de se faire rejeter pour avoir aidé un juif. C’est pour ça que
la mémoire est si importante. L’Allemagne a fait un réel travail de restitution que la
France a moins fait.
Mon père est né en Pologne d’une famille religieuse et a été déporté à 17 ans. Son
père a été tué devant ses yeux. Il était le plus jeune de la famille à être au camp, ce
qui lui a permis de survivre car il pouvait travailler. Les Américains l’ont par la suite
libéré de Auschwitz. Il est par la suite retourné en Pologne pour retrouver sa famille
restante et a cherché à retrouver la maison familiale spoliée par des allemands le
menaçant de mort si il ne partait pas sur les champs. Tout le monde s’était fait
assassiner durant la guerre. Je n’ai jamais vu de photos de ma famille, il n’avait rien,
il ne restait rien, je ne sais pas à quoi ressemblent mes grands parents et mes
oncles. Mes seuls repères étaient leurs paroles. Il n’avait rien, et cela pour moi, c’est
vraiment la spoliation de l’âme qui est pire que tout ce qui est matériel. C’est toute
une identité effacée. Ma mère avait fait tout un processus pour récupérer sa maison
et ce qu’il y avait dedans, elle n’a jamais rien pu retrouver. Mes parents se sont
rencontrés à Munich quand ma mère avait 16 ans et mon père 26 ans et se sont
mariés un an plus tard sans famille sans argent. Ils sont restés en Allemagne où ma
mère dirige aujourd’hui la présidente de la communauté juive en Allemagne.
Je pense que ce sera encore plus difficile aujourd’hui de perpétuer la mémoire
puisque les personnes au fil du temps disparaissent avec leurs histoires sans les
avoirs forcément racontées à leurs enfants car c’était trop douloureux d’en parler.
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Nous : En ce moment même des restitutions d’œuvres d’art ou de biens ont lieu. Que savez vous de cela ?
I : Des cas de restitution que je connais sachez que ça ne fut jamais « offert » par
l’Etat ce fut toujours des processus très compliqués des familles qui n’avaient rien à
ce moment là, pas de quoi payer les avocats ou de quoi faire les recherches. La
priorité fut de survivre, c’est plus tard que des recherches ont eu lieu non pas par
valeur économique mais par valeur sentimentale. Les processus furent toujours
compliqués surtout pour les personnes qui ne pouvaient pas être assistés. La
démarche était néanmoins plus facile en Allemagne que dans les autres pays
comme la Pologne.
Les objets les plus faciles à récupérer étaient les immeubles, l’immobilier car c’est
beaucoup plus facile à tracer et à retrouver sur le marché. Pour ce qui est de
l’intérieur des appartements c’était impossible à prouver.
On ne parle pas assez de la spoliation et de la Shoah dans les manuels scolaires et
d’année en année ce passage se raccourcit dans le programme. On ne montre pas
assez d’images sur cette époque de l’histoire. Il y a pourtant des documentaires, des
images ou des témoignages qui ne sont pas assez évoqués. On ne peut pas
comprendre si on ne le voit pas. Même moi je n’arrive pas à me l’imaginer car c’est
tellement abominable et je trouve ça triste que les écoles ne montrent pas plus
d’images pour marquer et préserver la mémoire. Les visages des survivants
disparaissent au fur et à mesure du temps.
Les films comme la Liste de Schindler sont très importants afin de préserver la
mémoire. Ce film a touché beaucoup de gens et l’a rendu accessible à tous et à
permis aux gens de mieux comprendre cette période.
On peut à mon sens dire que l’art touchera toute les générations et préservera la
mémoire comme la fondation de Spielberg qui a filmé des milliers de personnes qui
ont raconté leur histoire qui seront marqués dans le temps grâce à la vidéo et
immortalisés.
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REMERCIEMENTS
Nous souhaiterions remercier toutes les personnes qui nous ont apporté leur soutien
tout au long de l’élaboration de notre TPE.
Nos familles ou nos proches ont facilité certaines de nos démarches et nous ont
apporté leurs précieux conseils.
Nos remerciements vont aussi aux personnes avec lesquelles nous avons eu la
chance d’échanger, notamment Iris Knobolch qui nous a fait l’honneur et l’amitié de
nous offrir son témoignage mais aussi Tal Bruttmann, dont les connaissances
immenses sur le sujet de la spoliation nous ont été là encore très précieuses.
Nous avons été par ailleurs très sensibles au soutien que nous ont apporté plusieurs
professeurs et membres de l’équipe pédagogique de l’EIB, qui nous ont aidé dans
nos recherches et la documentation de nos travaux.
Enfin, nous souhaitons adresser nos remerciements les plus sincères à Mme
Boujeant et M. Chaulier, nos professeurs encadrants. Ce TPE passionnant et
enrichissant n’aurait jamais pu voir le jour sans leur soutien attentif et leurs conseils
avisés.
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