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1 1- TYPES ET COMPOSANTES DE COMMUNICATION I- Comprendre les relations professionnelles. 1-Entrer dans le monde professionnel, même au niveau d'un premier stage, c'est découvrir un nouveau réseau de relations. Un être humain est d'abord un être social qui se constitue, se définit, évolue dans et par ses relations avec les autres. On connaît l'importance du premier réseau de relations - celui de la famille - dans la constitution de la personnalité. L'absence dans les premières années « d'associés, d'alliés » (c'est le sens du mot « socius » qui a donné le mot société] suffisamment présents et attentifs est un véritable handicap dans la constitution de cette personnalité. L'enfant ensuite est pris dans un deuxième réseau, celui de l'école. Il y apprend d'autres règles de la vie sociale que celles (normalement) très protectrices de son milieu familial. Mais l'école comme le lycée ou l'université restent des milieux très protégés. Avec la vie professionnelle, on entre dans un troisième réseau dont les règles très codifiées, ne sont pas les mêmes que celles de l'école ou de la famille. Un supérieur hiérarchique n'est pas un professeur, un collègue n'est pas un frère, un client n'est pas un camarade ! Encore faut-il en avoir conscience, savoir ce qu'on attend d'un jeune professionnel, comprendre comment se situer. Cette capacité à « être avec », à savoir agir avec les autres est une capacité essentielle dans la vie professionnelle actuelle. Les changements technologiques aussi ont introduit des changements dans les organisations en modifiant les méthodes et les habitudes. L'utilisation des ordinateurs a fait évoluer les métiers de la comptabilité en déchargeant les comptables d'un grand nombre de tâches matérielles. Les technologies de l'information et de la communication [TIC] ont modifié, plus ou moins profondément, plus ou moins subtilement, les rapports entre les gens et avec la hiérarchie, en transformant entre autres la circulation de l'information dans les organisations. Ces dernières années ont donc vu une évolution importante des conditions du travail lui-même. Les compétences et les connaissances techniques bien sûr restent fondamentales. Un professionnel est d'abord celui qui possède un savoir et un savoir faire. Mais, de plus en plus, l'évolution des méthodes de travail comme les conditions d'exercice de la plupart des métiers lui impose de « savoir être ». Ce savoir être « une capacité non seulement à agir comme il faut, mais aussi à maintenir une sorte de lien cognitivo-affectif dont l'organisation a besoin » est considéré comme une compétence dans l'entreprise. « Cela signifie aussi que l'on peut être jugé sur son comportement relationnel... » Le professionnel en effet est au cœur d'un réseau de relations qu'il lui faut savoir gérer et dans lequel il doit pouvoir se situer avec toute sa personnalité. Plus que jamais on demande donc aux professionnels des qualités d'adaptation, d'ouverture et de communication. II- Qu'est-ce que la communication ? 2-S'il est un terme polysémique au XX ème siècle, c'est bien celui de « communication ». Ainsi tous les discours suivants utilisent les mots « communication » ou « communiquer » mais dans des acceptions très différentes : Cet homme politique communique bien. L'entreprise Y a créé un pôle de communication qui sera chargé de la communication interne et externe. Lors du festival, le service de communication a été très présent. Ce yaourt se vend mal : il faudrait repenser la stratégie de communication. Nous devons apprendre à nous servir des technologies de l'information et de la communication (TIC). Cette région souffre d'un réseau de communications dégradé. Qu'ont en commun le yaourt, l'homme politique, l'ordinateur, les routes ? La communication... Il est donc nécessaire de commencer par définir les principaux concepts utilisés en communication ou sous le couvert du terme « communication ». Ensuite, nous présenterons les moyens et les supports utilisés par l'être humain pour communiquer, c'est-à- dire pour se livrer aux trois principales activités de communication : s'exprimer, informer, argumenter. 3-Le monde de la communication : définitions

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    1- TYPES ET COMPOSANTES DE COMMUNICATION I- Comprendre les relations professionnelles.

    1- Entrer dans le monde professionnel, mme au niveau d'un premier stage, c'est dcouvrir un nouveau rseau de relations. Un tre humain est d'abord un tre social qui se constitue, se dfinit, volue dans et par ses relations avec les autres. On connat l'importance du premier rseau de relations - celui de la famille - dans la constitution de la personnalit. L'absence dans les premires annes d'associs, d'allis (c'est le sens du mot socius qui a donn le mot socit] suffisamment prsents et attentifs est un vritable handicap dans la constitution de cette personnalit. L'enfant ensuite est pris dans un deuxime rseau, celui de l'cole. Il y apprend d'autres rgles de la vie sociale que celles (normalement) trs protectrices de son milieu familial. Mais l'cole comme le lyce ou l'universit restent des milieux trs protgs. Avec la vie professionnelle, on entre dans un troisime rseau dont les rgles trs codifies, ne sont pas les mmes que celles de l'cole ou de la famille. Un suprieur hirarchique n'est pas un professeur, un collgue n'est pas un frre, un client n'est pas un camarade ! Encore faut-il en avoir conscience, savoir ce qu'on attend d'un jeune professionnel, comprendre comment se situer. Cette capacit tre avec , savoir agir avec les autres est une capacit essentielle dans la vie professionnelle actuelle. Les changements technologiques aussi ont introduit des changements dans les organisations en modifiant les mthodes et les habitudes. L'utilisation des ordinateurs a fait voluer les mtiers de la comptabilit en dchargeant les comptables d'un grand nombre de tches matrielles. Les technologies de l'information et de la communication [TIC] ont modifi, plus ou moins profondment, plus ou moins subtilement, les rapports entre les gens et avec la hirarchie, en transformant entre autres la circulation de l'information dans les organisations. Ces dernires annes ont donc vu une volution importante des conditions du travail lui-mme. Les comptences et les connaissances techniques bien sr restent fondamentales.

    Un professionnel est d'abord celui qui possde un savoir et un savoir faire. Mais, de plus en plus, l'volution des mthodes de travail comme les conditions d'exercice de la plupart des mtiers lui impose de savoir tre . Ce savoir tre une capacit non seulement agir comme il faut, mais aussi maintenir une sorte de lien cognitivo-affectif dont l'organisation a besoin est considr comme une comptence dans l'entreprise. Cela signifie aussi que l'on peut tre jug sur son comportement relationnel... Le professionnel en effet est au cur d'un rseau de relations qu'il lui faut savoir grer et dans lequel il doit pouvoir se situer avec toute sa personnalit. Plus que jamais on demande donc aux professionnels des qualits d'adaptation, d'ouverture et de communication. II- Qu'est-ce que la communication ?

    2- S'il est un terme polysmique au XXme sicle, c'est bien celui de communication . Ainsi tous les discours suivants utilisent les mots communication ou communiquer mais dans des acceptions trs diffrentes :

    Cet homme politique communique bien. L'entreprise Y a cr un ple de communication qui sera charg de la communication interne et externe. Lors du festival, le service de communication a t trs prsent. Ce yaourt se vend mal : il faudrait repenser la stratgie de communication. Nous devons apprendre nous servir des technologies de l'information et de la communication (TIC). Cette rgion souffre d'un rseau de communications dgrad.

    Qu'ont en commun le yaourt, l'homme politique, l'ordinateur, les routes ? La communication... Il est donc ncessaire de commencer par dfinir les principaux concepts utiliss en communication ou sous le couvert du terme communication . Ensuite, nous prsenterons les moyens et les supports utiliss par l'tre humain pour communiquer, c'est--dire pour se livrer aux trois principales activits de communication : s'exprimer, informer, argumenter. 3- Le monde de la communication : dfinitions

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    Communiquer signifie, au sens tymologique, partager , puis participer , puis tre en rapport, en communion avec quelqu'un . C'est un verbe intransitif. Au XVme sicle, il devient transitif : communiquer signifie alors transmettre , une maladie, un sentiment. Puis au XVIme sicle, avec Descartes, il prend une acception scientifique : communiquer la chaleur, le mouvement. Enfin, au XVIIIme, il s'emploie en parlant de lieux qui sont relis par des routes, des voies, qui sont en rseau .

    C'est dans ce sens physique, qu'il faut entendre les rseaux de communications , c'est--dire les infrastructures de communication (routes, rseau ferr) s'il s'agit d'amnagement du territoire, mais aussi dans les technologies de la communication qui s'appuient sur des rseaux, tlphoniques au dpart, lesquels vont transmettre des informations via Internet, le web, en franais la toile (d'araigne), mtaphore traduisant bien l'ide de rseau. Il y a donc, dans ces emplois de communiquer et communication une relative cohrence : il s'agit de transmission de quelque chose (l'information, les personnes) entre des personnes qui sont en relation (virtuelle) ou relle, sinon en communion . Voil pour les routes et les ordinateurs...

    Nous avons dj employ un second terme qu'il convient de dfinir lui aussi : information . On parle en effet des infos au JT de 20 heures , de l'information donne un passant qui cherche un immeuble, d'ouvrir une information judiciaire, du stockage de l'information sur DVD (les mgas sont des mgabits, le bit, abrviation de binary digit ou donne binaire -0 ou 1-, tant l'unit d'information de base). 4-L'INFORMATION Qu'est-ce donc que l'information ? L encore, l'tymologie nous permet de comprendre le lien entre ces trois acceptions. In-former signifie au sens propre donner une forme et au sens figur reprsenter, former dans l'esprit . Il s'agit d'abord de mettre quelqu'un au courant de quelque chose , de lui permettre de se reprsenter mentalement un fait, une ide. Puis le substantif s'est spcialis dans le domaine judiciaire : une information judiciaire est une enqute en vue d'obtenir des renseignements au sujet de faits condamnables : il s'agit, pour le juge d'tre mis au courant . Ultrieurement le sens s'est largi tout renseignement obtenu. Au XIXme sicle, avec le dveloppement de la presse, l'information prend alors les deux sens courants que nous lui connaissons : - les informations c'est--dire les renseignements, les nouvelles politiques, conomiques, etc., - et l'information , l'activit de recherche de ces nouvelles (la presse d'information) ou de renseignements collecter et mettre en forme (une mission d'information). Au milieu du XXe sicle, le terme prend un autre sens sous l'influence de l'anglais scientifique information qui dsigne un lment ou un systme qui peut tre transmis par un signal ou une combinaison de signaux. C'est le sens qu'il a dans les techniques de l'information et de la communication (TIC) o l'information n'est pas un renseignement mais un lment de connaissance susceptible d'tre reprsent l'aide de conventions pour tre conserv, trait ou communiqu. Sur un ordinateur, ou plus exactement sur le disque dur ou le disque amovible, l'information n'est pas analogique, c'est--dire qu'elle n'a aucune ressemblance avec les connaissances, les textes, les documents, les images qui sont stocks, elle est digitale ou numrique, c'est--dire transforme, reprsente, en signes (le 0 et le 1), qui permettent de traiter ces connaissances de manire mathmatique (l'informatique en anglais se dit computer science, science de calculateur).

    Mais le yaourt et la stratgie de communication ? Certes, il s'agit encore de transmettre quelque chose des consommateurs ventuels mais non une information ni un renseignement. Il s'agit de ce que les professionnels de la publicit appellent la communication de marque , la marque d'un produit tant son signe commercial distinctif, gnralement compos

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    d'un nom, d'un logo, d'une image relle (photo, film) ou symbolique (produit naturel ou rustique ou sain, etc.). Ce qui est communiqu au consommateur, c'est davantage un contenu symbolique qu'une information sur un produit : communiquer sur la marque revient alors crer un ensemble de messages signifiants (symboliques, culturels) plus importants que ce qu'ils signifient (un produit laitier).

    Est-ce dire que le ministre qui communique bien est une sorte de produit politique ? On dit galement qu'il est mdiatique . Or qu'est-ce que le mdia ? tymologiquement, c'est le moyen, l'intermdiaire. Les mdias , traduction de l'anglais mass mdia, dsignent l'ensemble des moyens humains, professionnels, institutionnels (journalistes, presse, chanes de radio et de tlvision) et des supports (papier, tlvision analogique et numrique, radio, Internet, supports numriques -CD, DVD, etc.) permettant de diffuser massivement (et non plus de transmettre) l'information (la nouvelle, le renseignement) et la culture. Notre ministre, bon communicant , sait utiliser les mdias pour diffuser largement ses opinions, son action, mais surtout, s'il est mdiatique, c'est que son image symbolique passe bien dans les mdias, qu'il communique un message qui plat au public (les mass). On parle de la mdiatisation de l'information et des acteurs politiques.

    Pour ce faire, le ministre a besoin d'auxiliaires : les conseillers en communication, les chargs de relations publiques , francisation de public relations, chargs de mettre en relation (de faire communiquer au sens propre) la personne ou l'vnement mdiatiser et les mdiateurs : journalistes, producteurs de tlvision, etc. Est-il plus important aujourd'hui de faire savoir que de faire, de passer la tl , d'tre mdiatique, que de raliser une uvre politique ou artistique ? Dans une formule clbre, Mac Luhan avait dit : Le mdia est le message , entendant par l que le mdia influence notre perception (sensorielle) du message et notre vie psychique, par l mme toute la culture dans laquelle nous baignons. La communication mdiatique semble lui donner en partie raison. 5 Les moyens et les supports de la communication

    Nous avons dj voqu les moyens et les supports de la communication en dfinissant les termes du champ de la communication. Cependant, il nous faut y revenir afin d'avoir clairement l'esprit tout ce qui concourt communiquer dans la vie quotidienne et professionnelle. Au pralable, distinguons ce que l'on nomme langage , parole et langue . A. Langage, langue, parole

    Le langage Le langage est la facult d'utiliser un ensemble de signes conventionnels pour communiquer (le langage humain, les troubles du langage). La double articulation du langage : des signes de base (lettres, sons) se combinent entre eux pour donner des units de sens premires (mots ou signifiants exprimant des concepts ou signifis ) qui se combinent nouveau entre elles, en respectant une syntaxe, une grammaire, pour produire une infinit d'noncs (phrases, discours).

    La langue La langue est le systme de signes vocaux et/ou graphiques utilis par un groupe d'individus (une communaut linguistique) pour s'exprimer et communiquer. Cette dfinition, proche de celle du langage entrane des usages parfois ambigus ou impropres des deux mots, selon qu'ils sont employs dans leur acception linguistique, philosophique ou avec leur sens courant. Nous emploierons langage pour la facult d'utiliser un ensemble de signes conventionnels et langue pour dsigner l'ensemble de signes utilis par un groupe linguistique.

    La parole La parole a trois sens principaux : un sens culturel, l'expression crite ou parle de la pense (la parole donne, les paroles d'un grand homme), un sens linguistique, l'acte par lequel un

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    individu utilise la langue pour exprimer sa pense et un sens physique, la capacit de parler grce l'appareil phonatoire. C'est dans ce dernier sens que nous l'emploierons ici. B. Les moyens Les moyens notre disposition pour communiquer sont, si on suit la chronologie de l'histoire humaine : le geste, la parole, l'image, l'criture et leurs variantes combines grce de nouveaux supports.

    Le geste Le geste semble le premier moyen utilis par l'tre humain pour communiquer. Il conviendrait plutt de parler des gestes et de leur combinatoire : un message compos d'un seul geste s'apparente plutt l'expression d'une motion, d'un besoin (comme chez les animaux qui communiquent leur colre, leur faim, leur bien-tre par un geste, une posture). L'association de quelques gestes successifs en discours gestuel pourrait donc constituer notre premier moyen de communication. Il sert encore aujourd'hui, de manire trs labore, dans la langue des signes utilise par les dficients auditifs. II s'agit d'une langue part entire, avec une grammaire et une syntaxe. Par ailleurs, nous verrons dans la partie consacre l'oral que nous utilisons couramment le geste pour ponctuer, accompagner nos propos. Lorsque l'on apprend une langue, il est des gestes conventionnels qu'il faut connatre pour comprendre le sens d'une rponse : pour dire non , les Europens tournent gnralement la tte latralement, mais ce geste signifie oui chez les Grecs...

    L'image L'image doit tre comprise ici comme la reprsentation graphique ou iconique d'un message. Les plus anciennes, dcouvertes en 2002 en Afrique du Sud dateraient de 77 000 ans. On connat bien celles de Lascaux, par exemple, mais leur signification est encore hypothtique. On dit volontiers que nous vivons dans une civilisation de l'image, qu'elle soit anime ou fixe, expose sur des crans ou dans nos rues. Il peut s'agir de photographies naturellement, de dessins, de schmas, de symboles, d'images virtuelles, d'images de synthse. Plus prosaquement, un tableau est une variante de l'image : il dispose de manire structure, non linaire mais globale (ce n'est donc pas un texte), un ensemble d'informations. Il est compos de lignes et de colonnes qui ne peuvent tre choisies au hasard, de couleurs, etc. Pour saisir la valeur iconique d'un tableau et ses limites, en termes de communication, il n'est que de comparer les deux images suivantes portant sur le mme sujet : le tableau ( droite) est certes trs lisible mais toutes ses donnes ont le mme statut, la mme visibilit graphique. L'auteur du schma ( gauche) a extrait d'un tableau certaines informations (les prvisions pour 2015), transform les donnes brutes en pour-centages qu'il a prsents par ordre dcroissant. Il est ainsi plus ais, en lisant la liste des mtiers gauche, de savoir quels sont les mtiers porteurs et les mtiers en dclin.

    La parole Moyen de l'oral par excellence, la parole n'est pas seulement la production de sons par la voix ; certes, elle exige un appareil phonatoire en bonne sant mais elle est module par l'intonation : un mme nonc, comme vous partez , sera compris comme une question, un regret, un soulagement, un ordre, selon l'intonation du locuteur. Par ailleurs, elle est naturellement associe la gestuelle et elle peut s'appuyer sur l'image, le visuel lorsque l'on fait une prsentation orale. C'est le moyen le plus complet de la communication quand on est en prsence du locuteur, soit rellement, soit virtuellement aujourd'hui par la vido-transmission (webcam, visioconfrence, etc.). Les relations professionnelles utilisent trs majoritairement la parole qui semble si naturelle que l'on oublie parfois d'tre attentif aux conditions d'une bonne communication par la parole : le dbit, le volume de la voix, l'intonation expressive, le timbre, ajouts la communication gestuelle et la proxmique ou position des interlocuteurs dans l'espace (distance respecter, gestes et contacts autoriss ou non, comme la poigne de main), tous ces paramtres qui accompagnent la parole ont leur importance.

    L'criture

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    L'criture marque l'tape suivante dans l'histoire de la communication humaine. Autant la parole semble tre le moyen naturel de la communication, autant l'criture pose souvent des problmes. L'crit est un moyen qui peut ventuellement s'enrichir d'images mais le texte obit des rgles de langue, de lisibilit, de prcision : une expression ambigu, une erreur de ponctuation peuvent altrer considrablement la communication, crer des quiproquos voire des conflits ... C'est pourquoi, de l'crivain l'tudiant, tous prouvent une certaine apprhension devant la page blanche . Cependant, l'crit tout comme la parole, a des auxiliaires . Aujourd'hui, le traitement de textes permet une mise en page et en forme qui aide la comprhension : la taille, l'paisseur, la couleur des caractres, le soulignement, les puces et les numros peuvent faciliter la lecture, c'est--dire la communication entre l'auteur et le lecteur. De plus, le pritexte est constitu des prfaces, titres, notes de bas de page, qui peuvent expliciter le texte ou le situer dans une dmarche intellectuelle plus lisible . Enfin, les images peuvent tre insres dans le texte, selon des rgles de lisibilit et d'esthtique, mais aussi en respectant des conventions pour les crits universitaires et professionnels. C. Les supports de communication On vient de voir comment le traitement de texte peut aider l'criture. Nous avons ainsi abord le thme des supports de la communication : entre l'criture sur papier avec un stylo et l'criture sur ordinateur, il existe une diffrence de nature, pas seulement de support, ou plus exactement le support a modifi la nature de l'acte d'criture. Les comptables du dbut du XXme sicle qui traaient des tableaux et les remplissaient d'critures comptables ne procdaient pas de la mme manire que ceux d'aujourd'hui qui utilisent le logiciel EXCEL. Ils ne pouvaient commencer crire que lorsqu'ils s'taient assurs, sur des brouillons prparatoires, de l'exactitude de leurs calculs et analyses, lorsqu'ils en avaient vrifi la sincrit, etc. Aujourd'hui, les tableurs et les logiciels comptables permettent de travailler en utilisant la mthode des essais-erreurs , en faisant des simulations, des projections : le travail s'en est trouv simplifi et les services rendus au client se sont multiplis. Les supports de l'oral se sont considrablement dvelopps : quasiment inexistants il y a 150 ans (en dehors du porte-voix), ils font partie de notre vie quotidienne. Par exemple, avec le tlphone portable, le livreur dcharge des paquets pendant que son patron lui indique par tlphone un changement dans l'ordre des livraisons. Notre livreur pourra couter la radio entre deux livraisons et apprendre, de la voix d'un journaliste en direct de Chine, les dernires nouvelles sur la prparation des Jeux Olympiques... Quant aux supports de l'image, il devenu trivial d'en souligner les innovations depuis la photographie jusqu' la tlvision numrique. Ce qu'il est important de souligner, c'est que le changement de support entrane le changement de nature de la communication : communiquer, il y a deux sicles, c'tait se rencontrer dans un mme lieu, recevoir une lettre que l'auteur avait crite de sa main, sur sa table. Il existait une dimension physique, sensorielle, de la communication, une dimension spatiale et temporelle aussi qui la situait dans une exprience personnelle, celle du dplacement du corps en un lieu donn, du temps de la rencontre ou du temps ncessaire au dplacement de la personne ou au transport de sa lettre, etc. Envoyer un message de rupture un(e) ami(e) qui habite 5 000 kilomtres, par courriel, c'est anantir le temps et l'espace, le temps de la rencontre avec celui ou celle que l'on veut quitter, le temps de l'aveu, le temps de l'motion, le temps de l'adieu, etc. C'est le thme du travail d'une artiste plasticienne, photographe, crivaine, Sophie Calle, qui crit en marge de son exposition :

    J'ai reu un mail de rupture. Je n'ai pas su rpondre. C'tait comme s'il ne m'tait pas destin. 11 se terminait par les mots : Prenez soin de vous. J'ai pris cette recommandation au pied de la lettre. J'ai demand 107 femmes, choisies pour leur mtier, d'interprter la lettre sous un angle

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    professionnel. L'analyser, la commenter, la jouer, la danser, la chanter. La dissquer. L'puiser. Comprendre pour moi. Rpondre ma place. Une faon de prendre le temps de rompre. A mon rythme. Prendre soin de moi.

    Nous pourrions ajouter notre propos prendre le temps de se souvenir et nous aborderions ainsi la dernire partie de cette introduction : la mmoire. En effet, ce qui est communiqu est aujourd'hui enregistr sur plusieurs supports : le papier bien sr mais surtout les nouveaux supports numriques qui permettent de conserver le texte, le son, l'image, le geste quand il est film. Les capacits de mmoire de nos ordinateurs et des disques, nous dispensent d'exercer notre mmoire artificielle (la mmoire de travail, par opposition la mmoire dite naturelle qui nous fait retenir les lieux, les faits, les motions de notre vie prive), celle qui a prvalu depuis la Grce antique jusqu' la Renaissance, comme mthode pour mmoriser des discours, des dmonstrations, voire des connaissances. Avec l'imprimerie, on a commenc ngliger la mmoire au profit du raisonnement, le support imprim permettant de combler les oublis. Avec la mmoire numrique et le stockage d'informations indexes sur Internet, notre travail intellectuel se modifie une fois encore : les moteurs de recherche nous dispensent apparemment de faire un travail de rflexion sur ce que nous cherchons, pour faire quoi, avec quel objectif, etc. : pour employer un nologisme la mode, on googlelise ! On tape un ou deux mots et on attend les rsultats qui ne sont pas toujours pertinents. Le professionnel, l'tudiant, qui ont acquis des mthodes de recherche, se doteront vite de nouveaux outils (signets ou favoris , abonnements, mode de formulation des requtes) qui permettent de s'orienter efficacement dans le rseau de communication qu'est Internet.

    Les genres de la communication Nous voquions plus haut la ncessaire rflexion pralable la recherche d'information sur Internet. Parmi les questions se poser lorsque l'on cherche un texte, un document, l'une d'entre elles porte sur le genre : de quel genre de document ai-je besoin ? Ce qui peut se dcliner en Quel genre de communication veux-je tablir ? On en distingue trois principalement : informatif, expressif, argumentatif. Si nous appliquons ces catgories la presse crite, on distinguera l'ditorial et le billet qui sont expressifs (l'ditorialiste et le billettiste expriment leurs opinions - sans ncessairement les argumenter -, leur humeur du jour), la dpche qui est informative et la tribune qui est argumentative.

    La communication informative La communication informative semble facilement identifiable : elle comprend des informations objectives. Un manuel de physique, une liste de dpartements, le code civil sont des documents informatifs objectifs. Et pourtant... ce sont uvres humaines et par consquent il y entre ncessairement de la subjectivit, celle du dput, rapporteur du projet de loi, dont l'opinion a influenc les dbats, la rdaction du texte. La liste des dpartements est objectivement alphabtique mais le nom de certains dpartements a t dcid un jour par des lus qui ont prfr Ctes d'Armor Ctes du Nord . Reconnaissons toutefois qu'il n'y a dans ces informations ou ces documents que des traces de subjectivit. En revanche, la communication sur la science est strictement informative : l'argumentation s'y nomme dmonstration et rpond des normes de rigueur intellectuelle.

    La communication argumentative La communication argumentative met en perspective ou en scne une information en vue de

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    convaincre. Le genre est reprsent par la publicit, le discours politique, la plaidoirie, le dbat. Les moyens de la communication argumentative comprennent naturellement les arguments 7, mais aussi le choix des informations, l'importance accorde aux unes par rapport aux autres, l'ordre dans lequel elles sont exposes, la construction du discours qui les nonce, ce qui constitue proprement la rhtorique argumentative. Il faut y ajouter aujourd'hui tous les procds de mise en valeur offerts par l'image, le son et le mouvement dans les documents numriques.

    La communication expressive La communication expressive a pour but de communiquer sur soi . La littrature abonde de textes expressifs : la posie lyrique, l'autobiographie, les confessions, les mmoires sont des textes essentiellement expressifs. Mais le discours du prsident directeur gnral en ouverture d'une assemble gnrale d'actionnaires, si le prsident manque de modestie, sera minemment expressif: entre l'autosatisfaction et l'optimisme personnel (pour l'entreprise, bien sr), ce responsable valorisera son action, sa politique, sa conception du management et du dveloppement de la socit. Dans la ralit, il est rare que la communication soit exclusivement informative ou argumentative ou expressive : les trois genres sont mls. On peut dire que la communication est bonne lorsque l'auteur, ou l'orateur, et le lecteur, ou l'auditoire, sont clairement conscients de ce qui ressortit l'information, l'argumentation et l'expression. Ainsi pour les informations diffuses par la presse crite, parle, tlvise. L'article, le sujet procdent gnralement des trois genres : partir d'une information objective, le journaliste commente, analyse en fonction de sa subjectivit, de son opinion (mme s'il est tenu l'honntet intellectuelle) et il appuie ses propos sur une argumentation. Si le propos semble trs objectif, dnu de commentaires, le texte ou le discours sont construits partir d'informations, d'images, qui ont t choisies : tout ce qui est dit ou crit est exact, incontestable, mais on a peut-tre omis des informations qui donnent un autre sens, une autre porte au fait relat. Il en va de mme dans le monde professionnel. En communication interne, on peut crire dans une note Notre client, M. X, a pay sa facture n 111 d'un montant de 345 le 15 janvier 2007 . C'est une phrase informative. Mais elle peut devenir argumentative si elle est communique en rponse une question du service contentieux qui propose d'entamer une procdure de recouvrement de crance : elle quivaut Non, il ne faut pas lancer cette procdure parce que notre client... . On pourrait schmatiser les trois genres de la communication en crivant ce qui suit propos de l'embauche de deux techniciens handicaps par une entreprise.

    ExempleGenreinformatifLa socit DUVAL a embauch deux salaris en situation de handicap moteur pour occuper deux postes de techniciens de maintenance.

    Genre argumentatif Comme la Socit DUVAL dispose aujourd'hui de locaux accessibles et de moyens techniques qui permettent tout salari handicap de se dplacer et d'intervenir sur les machines, elle a pu embaucher deux techniciens de maintenance en situation de handicap.

    Genre expressif La socit DUVAL est exemplaire en matire d'insertion de travailleurs handicaps : elle a fait les investissements ncessaires pour rendre ses locaux accessibles et pour faciliter les dplacements et le travail sur les machines. On ne peut donc que l'applaudir pour l'embauche de deux techniciens de maintenance en situation de handicap.