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Guy L. Coté INTRODUCTION 1. Générique Réalisation Scénario Images Montage Musique Commentaire français Direction générale Année Durée Prix 2. Le réalisateur 11 LES MAÎTRES-SONDEURS (Roughnecks) Je veux servir le sujet que je regarde, être honnête envers ce que je tourne. Guy L. Coté Guy L. Coté Eugene Boyko Guy L. Coté Victor Fleming Jacques Godbout Tom Daly 1960 21 minutes Noir et blanc 1 960 : San Francisco, San Sebastian 1961 : Colombus, Turin 1962 : Yorkton Guy L. Coté à Ottawa le 30 août 1925, Guy L. Coté poursuit des études de chimie jusqu'à l'université d'Oxford. Alors qu'il est étudiant, il découvre vraiment le cinéma en montant Sestrieres (1949), puis en tournant un film expérimental sur le ballet, Between Two Worlds (1951). Cette découverte déterminera l'orientation de sa carrière. Il entrera à l'Office national du film en 1952 comme assistant de Stanley Jackson pour Timidité, tournera deux films didactiques, puis repartira représenter l'O.N.F. à Londres (distribution) jusqu'en 1956. De retour au pays, il réalise une courte séquence 1

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Guy L. Coté

INTRODUCTION

1. Générique

Réalisation Scénario Images Montage Musique Commentaire

français Direction générale Année Durée

Prix

2. Le réalisateur

11

LES MAÎTRES-SONDEURS

(Roughnecks)

Je veux servir le sujet que je regarde, être honnête envers ce que je tourne.

Guy L. Coté Guy L. Coté Eugene Boyko Guy L. Coté Victor Fleming

Jacques Godbout Tom Daly 1960 21 minutes Noir et blanc 1 960 : San Francisco, San Sebastian 1961 : Colombus, Turin 1962 : Yorkton

Guy L. Coté

Né à Ottawa le 30 août 1925, Guy L. Coté poursuit des études de chimie jusqu'à l'université d'Oxford. Alors qu'il est étudiant, il découvre vraiment le cinéma en montant Sestrieres (1949), puis en tournant un film expérimental sur le ballet, Between Two Worlds (1951). Cette découverte déterminera l'orientation de sa carrière.

Il entrera à l'Office national du film en 1952 comme assistant de Stanley Jackson pour Timidité, tournera deux films didactiques, puis repartira représenter l'O.N.F. à Londres (distribution) jusqu'en 1956. De retour au pays, il réalise une courte séquence

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de rêve pour Tu enfanteras dans la joie de Bernard Devlin et un film de montage sur Le Canada industriel. Coté s'affirme ensuite un documentariste soucieux des pro­blèmes humains que posent divers métiers dans Les Cheminots, Les Pêcheurs et Les Maîtres-sondeurs. Peu après, Têtes blanches illustre l'élevage des bœufs de l'Ouest au fil des saisons. Il s'intéresse également aux enfants d'une maternelle avec Kindergarten et aux scientifiques du Conseil national de recherches dans Cité savante. Trois ans plus tard, l'auteur mène, pour la télévision, une enquête de deux heures sur le spiri­tisme et l'occultisme. Depuis 1967, il est producteur à la section française de l'Office national du film.

Parallèlement à son activité de metteur en scène, Guy Coté anime la vie cinémato­graphique canadienne. En 1952 déjà, il fonde Canadian Newsreel, bulletin de liaison des ciné-clubs canadiens rattachés au Canadian Film Institute. Deux ans plus tard, il organise avec Dorothy Burritt la Fédération canadienne des ciné-clubs. Il rédige alors avec Jean Beauvais le « Handbook for Canadian Film Societies ». En 1962, il met sur pied les archives cinématographiques « Connaissance du cinéma » qui don­neront naissance à la Cinémathèque canadienne dont il demeure le principal artisan. On peut encore ajouter qu'il a été directeur du Festival international du film de Montréal et président de l'Association professionnelle des cinéastes.

3. Interview avec Guy L. Coté

Qu'est-ce qui vous fait accepter de tourner un film? Ce n'est pas un sujet qu'on accepte. Le choix d'un sujet relève davantage d'un

concours de circonstances heureux ou quelquefois malheureux. Mais cela ne veut pas dire que le choix d'un film naît dans l'abstrait. J'aime mieux penser qu'il vient d'un tout petit fait, d'un détail qui fait son bout de chemin et qui devient lente­ment riche en possibilités. Il arrive qu'on mise sur un sujet et qu'on s'aperçoive qu'un détail de ce sujet devient intéressant. Le sujet s'est choisi lui-même. Le réalisateur découvre telle particularité de la réalité et décide de la montrer. La scène de nuit des Maîtres-sondeurs fut faite comme cela.

- Comment voyez-vous le documentaire ?

- Le processus le plus simple serait de montrer la réalité. Présentement, je pense que le documentaire est devenu trop éloigné du document.

Il y a beaucoup de réalisateurs qui parlent de réalité; réalité intérieure, subjec­tive, objective, etc... Ils disent que le document sur l'écran n'est qu'un moyen de passer à la réalité intérieure. Ils élaborent des théories qui justifient tous les tour­nages de scènes.

Par contre, d'autres cinéastes croient que le sujet lui-même contient sa réalité et qu'ils ne sont en fait que les agents de cette réalité, qu'ils se doivent de montrer cette réalité telle qu'elle est. Ils sont à vrai dire spectateurs d'un événement...

J'ai vu des films très beaux faits par les tenants des deux théories opposées. Personnellement, j'éprouve de moins en moins la nécessité de rationaliser. C'est déjà assez compliqué de faire des films sans qu'il faille maintenant les expliquer.

- Quelle est votre attitude face au style d'un documentaire?

- Le réalisateur ne doit pas vouloir un style mais doit le laisser être et je crois qu'il ne doit pas penser ses raisons et ses théories mais laisser son travail devenir la raison de ce qu'il fait. Cela est encore plus vrai dans le travail que nous faisons .à l'O.N.F.

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Je veux servir le sujet que je regarde, être honnête envers ce que je tourne. Je veux servir le public. Il n'y a, à mon avis, aucune incompatibilité entre l'artiste et l'homme qui veut donner au public quelque chose dont celui-ci profitera. - . Le commentaire a dans vos films une part très importante, comment le concevez­vous? - Pour moi, le commentaire d'un film représente l'utilisation de la voix humaine au même titre que les bruits, le montage, la musique, etc. Le commentaire est peut-être l'élément du documentaire le plus difficile à créer. Le commentaire selon moi doit jouer un rôle à la fois au niveau intuitif et explicatif. Il arrive souvent qu'il doive suggérer quelque chose qui ne peut passer à l'écran. Dans le langage cinématogra­phique, le commentaire a pour moi l'importance du fondu enchaîné. Les mots peuvent agir de leur propre force, tout comme la musique agit par elle-même.

Si mes commentaires de films ne sont pas bons, cela n'est pas dû au commen­taire en soi mais à son auteur. Et c'est peut-être une tragédie qu'à l'O.N.F. il y ait si peu de gens qui sachent écrire et qui connaissent le cinéma. C'est là une des lacunes de l'équipe anglaise. - Comment ça se passe lorsque vous êtes en tournage ? - J'ai observé, et j'observe encore, qu'il y a beaucoup de hasard dans le fait de faire un film. Chaque étape du film transforme le réalisateur, et cela même s'il a un but très précis. Mon point de vue change. L'intensité des pensées et du symbo­lisme croît au fur et à mesure que je tourne. Mais c'est au montage qu'on voit vraiment ce que va devenir le film. Il prend sa véritable orientation à ce moment. Nous devons être constamment en éveil pour ne pas en rester à une idée préconçue. De cette façon de voir les choses, on se rend compte que chaque étape d'un film est d'égale importance. On aura beau entendre dire que le montage est plus important que le tournage ou que le tournage est plus important que le montage; une seule chose est certaine: toutes les ·étapes d'un film sont nécessaires. Les étapes de finition dans le documentaire sont particulièrement importantes parce qu'on est à la merci des événements. Pour moi, c'est toujours un miracle quand un film réussit à dire quelque chose. Nous sommes, tout le temps de la réalisation, un peu comme une barque, ballottés par les événements.

Extrait de l'interview accordée à Michel Brûlé, in Le Nouveau Journal du 23 décembre 1961.

4. Filmographie

1953 Winter in Canada (L'Hiver au Canada) 1954 Grain Handling in Canada 1957 Industrial Canada (Le Canada industriel) 1958 Railroaders (Les Cheminots) 1959 Fishermen (Les Pêcheurs) 1960, Roughnecks (Les Maîtres-sondeurs) 1961 Cattle Ranch (Têtes blanches) 1962 Kindergarten

An Essay on Science (Cité savante) 1965 Regards sur l'occultisme

- Première partie: Magie et miracles - Deuxième partie: Science et esprits

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5. Avant le film

Le titre anglais Roughnecks utilise un terme générique qui désigne tous ceux qui travaillent au forage. Le français n'a pas d'équivalent exact mais les termes de sondeurs et de foreurs sont commodes. Se rappeler toutefois que seul le chef d'équipe a droit au titre de maître-sondeur.

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!-ANALYSE DRAMATIQUE

1. Origine du film

Se voyant confier la réalisation d'un film d'une vingtaine de minutes sur les puits de pétrole, Guy Coté commença, selon son habitude, par se documenter. Il choisit de limiter son sujet au forage d'un seul puits et de faire connaître en même temps les hommes qui accomplissent cette tâche. Il lui fallut deux mois de tournage.

2. Résumé du scénario

Des cartes géographiques et géologiques permettent de localiser les principaux gisements de pétrole en Amérique du Nord. Des spécialistes tentent de découvrir cet or noir dans la région des Swan Hills au nord-ouest d'Edmonton. Il faut tracer une longue route à travers la forêt, puis transporter et installer un derrick. Une équipe de foreurs se met à l'œuvre, chacun accomplissant sa tâche sous la direction du maître­sondeur. Si le besoin s'en fait sentir, le maître-sondeur a recours à des géologues ou à des spécialistes de la sonde. Tous se regroupent dans un village improvisé, appelé « camp central ». Dans ce pays de boue où les familles sont rares, le restaurant du village devient le lieu de rencontre et de détente. Mais la foreuse, elle, ne se repose jamais et poursuit sa recherche par tous les temps. A percer le roc sans arrêt, le trépan, fut-il d'acier trempé, finit par s'user. Il faut alors remonter les milliers de pieds du train de sonde pour le remplacer. La tâche est certes ardue mais nécessaire si l'on veut poursuivre efficacement. Quand le pétrole suinte enfin à travers la pierre poreuse, il faut encore garder secrète la découverte et devancer les scouts, ces espions à la solde des compagnies rivales. Leur but atteint, les foreurs n'ont plus qu'à aller installer ailleurs leur derrick.

3. Divisions du film

Le commentaire à la première personne permet d'unifier quatre aspects de la vie des sondeurs qui nous sont successivement présentés. Les deux premières parties dépeignent l'installation, le travail et la vie quotidienne des foreurs, ou si l'on veut les avantages et les inconvénients de ce métier. La troisième présente la remontée du train de sonde, occasion de montrer le sondeur dans une tâche qui demande de lui le maximum de rendement. Enfin voici l'apparition du pétrole.

Divisions du film 1

Introduction: Où trouve-t-on du pétrole en Amérique du Nord?

1. On trouvera à la fin de cette fiche un plan plus détaillé.

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Première partie: A pied d'œuvre 1. l'endroit 2 . l'équipe 3. le logement

Deuxième partie: La vie d'un technicien du pétrole 1. le « camp central »

2. le restaurant 3. un village d'hommes

Troisième partie: Un changement de trépan 1. la remontée du train de sonde 2. le repos 3. la redcscente

Quatrième partie: La rivalité des compagnies 1. le scout 2. la découverte du pétrole 3. la course de vitesse 4. la vente d'un terrain

Conclusion: Il faut recommencer ailleurs.

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II- ANALYSE CINÉGRAPHIQUE

1. Les images

Si le premier plan présente une nature encore vierge, dès le deuxième, l'homme y inscrit sa marque. Tout ce court métrage montrera l'homme à l'œuvre. D'ailleurs les cadrages le mettent au cœur même des machines qu'il conduit. Ce qui frappe aussi, c'est l'équilibre des images. A l'instar du derrick dont la forme appelle la stabilité, Coté apporte beaucoup de soins aux plans pour leur garder un équilibre constant, de façon à faire naître le sentiment général d'une action continue. L'auteur sait décrire avec clarté et netteté aussi bien le travail des foreurs que le cadre dans lequel ils vivent. Une caméra mobile permet de préciser le rapport entre l'ou­vrier et la machine et d'obtenir une vue d'ensemble du village ou de suivre un scout cherchant un poste d'observation.

2. Les plans

Près de la moitié des images de ce film présentent en plans rapprochés les travailleurs ou ce qui leur est relié. Signe manifeste de l'intérêt que l'auteur porte à ces hommes et à ce qu'ils font. Les gros plans de la scène du restaurant indiquent les relations cordiales qui existent entre les personnes. Et, dans la troisième partie, la caméra capte avec beaucoup de vérité l'activité et les réactions des sondeurs. L'auteur ne va-t-il pas jusqu'à adopter le point de vue de l'un d'eux en fixant l'indicateur de pression, le trépan usé ou le pétrole qui suinte ?

Les plans généraux et les plans d'ensemble permettent de jeter un coup d'œil sur la forêt à défricher et sur les roulottes immobilisées. Mais Coté ne s'attarde pas à ce niveau car l'homme occupe la place centrale dans son film et les éléments du décor ne prennent un sens que grâce à lui. D'où évidemment les nombreux plans moyens qui soulignent les conditions de travail (du bulldozer à l'échantillonnage du sol, de l'équipe de nuit à la découverte du pétrole) ou les conditions de vie (du cuisinier sur sa roulotte au restaurant, de la boue du derrick à la jeune femme).

Grâce à cette démarche, l'auteur s'efforce de fournir par un enchaînement logique une réponse aux questions du spectateur, suscitant ainsi de l'intérêt pour les ouvriers sondeurs.

3. La lumière

Des images contrastées accompagnent l'homme à l'œuvre. Les ombres du sous­bois, la plaque rotative sous l'œil du premier sondeur, le derrick vu clandestinement par le scout aussi bien que toute la scène de nuit en offrent des exemples indéniables. C'est sans doute une manière efficace de suggérer le mystère qui s'attache à toute transformation, à toute action de l'homme sur la nature.

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La lumière par ailleurs diffère d'une partie du film à l'autre, créant divers climats psychologiques qui dramatisent la situation. La première partie baigne dans le soleil: il s'agit bien sûr de présenter en pleine lumière la tâche de chacun. Le service que rendent ces hommes en devient plus évident. Mais ce métier a aussi sa part d'ombres. Est-ce pour cela qu'un temps gris couvre la visite aux roulottes? Et que la pluie et la boue caractérisent le passage au village central ? Ce temps maussade n'entraîne-t-il pas le narrateur à rappeler qu'il a dû laisser à la ville sa femme et ses enfants ?

Ces images s'opposent à celles du rideau de pluie illuminé, des tiges du derrick qui tracent des signes dans la nuit, des casques luisants. Ici le clair-obscur nous fait communier à la magie de ce travail nocturne. Et si le temps revient au gris pour rendre plus lourde l'attente du signe révélateur du pétrole, cela ne dure pas, la découverte ramène le soleil. Les dernières images expriment par leur clarté la joie du travail accompli et appellent un recommencement.

Bien qu'on ait partout recours à la lumière naturelle - sauf dans la troisième partie, cela va de soi - on note une certaine unité de ton dans chacune des grandes divisions. N'est-ce pas là le résultat de la vision personnelle et unificatrice de l'au­teur?

4. Le rythme

Si le rythme varie d'une séquence à l'autre, l'ensemble demeure pondéré, me­suré, souple et coulant. Le début de la première partie utilise de longs plans descrip­tifs qu'enchaînent des fondus pour faire sentir le temps nécessaire à l'installation. Ce rythme ample s'accélère quelque peu avec la présentation des tâches de chacun puis se retrouve lui-même pour visiter les roulottes. L'auteur emploie une construc­tion analogue dans la deuxième partie du film mais dans l'ensemble le rythme y est légèrement plus rapide. Une succession de plans articulée selon la logique habi­tuelle du cinéma, c'est-à-dire des plans d'ensemble aux plans rapprochés fait naître des plans qui explicitent ceux qui précèdent, établissant clairement les liens entre les personnages ou entre les personnages et les lieux où ils se trouvent.

Ce rythme descriptif fait place à un rythme beaucoup plus rapide, saccadé même, lors de la scène de la remontée du trépan. Si nombre de plans demeurent longs, épousant des points de vue variés, des gros plans rapides (visages, mains, casques) s'insèrent dans cette continuité pour en heurter le rythme et l'accorder à la situation animée. Dans la quatrième partie, les plans sont généralement plus courts, le rythme plus rapide, permettant de suivre, soit les observations du scout, soit la découverte du pétrole ou la vente d'un terrain. Puis sans se presser, du même pas qu'ils sont venus, les sondeurs peuvent repartir. C'est ce que suggèrent les der­niers plans longs.

Le spectateur aura observé cette démarche qui le rapproche de l'homme au travail. C'est sans doute parce que l'intérêt va croissant que le rythme s'accélère.

5. La bande sonore

L'auteur a accordé une grande attention à la bande sonore. Le commentaire, les bruits et la musique ont été fondus en un tout qui explicite et prolonge conti­nuellement ce qui est montré. Le lien entre les diverses parties du film se trouve

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renforcé par le recours à la première personne et donc à la vision unificatrice du maître-sondeur.

Le commentaire est bien écrit, simple et souvent concis. Il a recours aux formules qui frappent, qui permettent de retenir facilement le point traité. Si le film veut enseigner, il y réussit parfaitement. A maintes reprises, l'auteur ne dé­daigne pas de présenter les faits avec une pointe d'humour. Le texte est peut-être abondant mais il sait souvent s'interrompre, laisser parler les bruits ou la musique. Un tel commentaire aide grandement à goûter le film. Les cartes géographiques, routières et géologiques utilisées dans l'introduction faisaient redouter un film didac­tique. Mais le récit et les images ont eu tôt fait de prouver que l'on peut acquérir nombre de connaissances agréablement.

Le film perdrait une part de son relief documentaire sans les bruits réels qui l'accompagnent. Ils dominent vraiment dans la troisième partie. Ils restituent l'at­mosphère du travail malaxée de pluie, de coups, d'appels, de grincements qui s'étirent en cris stridents. Psychologiquement, la scène est ressentie avec plus de vérité. Ailleurs, les bruits ne servent que de fond de scène.

La musique accompagne presque toujours le commentaire prenant la relève dans les pauses. Pour intensifier l'atmosphère, la musique se fait tour à tour imita­tive (le trépan, la pluie), évocative (les jouets) ou dramatique (retour du scout à sa jeep). Mais comme les bruits suffisent amplement à créer l'ambiance, la musique se tait dans la troisième partie, ajoutant par son absence même au caractère réaliste de la scène. Mais, en général, il semble que le compositeur ait été emporté par le mouvement des machines et qu'il ait voulu le transposer dans sa partition musi­cale. Toutefois on peut dire qu'à certains endroits la musique aurait dû laisser les images parler par elles-mêmes.

6. Le style

Ce que nous avons dit des images et du rythme laisse entrevoir que le style de Guy L. Coté relève ici de l'expressionnisme. En effet, le dualisme du noir et du blanc, si accusé dans les séquences nocturnes, et le rythme qui accentue le poids du travail, affirment la volonté de l'auteur de nous montrer les difficultés et les aléas de ce métier. Les Maîtres-sondeurs est un film qui met en valeur moins le travail des hommes que les hommes au travail. Ce sont eux que nous présente l'auteur, ces hommes avec ce que leur métier comporte de renoncement, d'éloigne­ment, d'ardeur, de précision, de coopération, de souplesse... Pour nous dire tout cela et pour nous le dire d'une façon dramatique, l'auteur a su faire appel à un expressionnisme qui traduit efficacement le dur labeur des hommes en proie aux richesses des profondeurs de la terre.

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BIBLIOGRAPillE

1. Sur le pétrole LACROIX, Pierre, Fabuleux pétrole, Coll. L'Homme et son aventure, no 4, Editions

Edicope, Paris 1960. * * * L'ouvrier sondeur, La Revue Imperial Oil, juin 1964, p. 14-17.

2. Sur Guy L. Coté BRONSTEIN, Martin, Montreal International Film Festival, Film Keeper, Guy L.

Coté, in The Montrealer, August 1966, p. 19.

DAUDELIN, Robert, Vingt ans de cinéma au Canada français, Coll. Art, Vie et Sciences au Canada français, no 8, Ministère des Affaires culturelles, Québec 1967, p. 44-45.

MARSOLAIS, Gilles, Le cinéma canadien, Coll. Les Idées du jour, no D-40, Editions du Jour, Montréal 1968, p. 46, 48.

PREDAL, René, Jeune cinéma canadien, in Premier plan, no 45, octobre 1967, p. 101-102.

EN COLLABORATION, Dix-sept artisans du cinéma canadien, in Objectif 61, no 91 10, octobre 1961, Guy L. Coté, p. 24.

3. Sur «Les Maîtres-sondeurs» AUBRY, Jean-Marie, Les Maîtres-sondeurs, in Objectif 60, no 1, octobre 1960,

p. 32-33.

MONTBRIAND, Gisèle, Les Maîtres-sondeurs, in Séquences, no 22, octobre 1960, p. 25-26 (fiche).

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