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STC 176 STC 16 F rév.1 fin Original : anglais Assemblée parlementaire de l’OTAN COMMISSION DES SCIENCES ET DES TECHNOLOGIES LE PROGRAMME NUCLÉAIRE IRANIEN : COMMENT METTRE L’ACCORD À PROFIT ? RAPPORT SPÉCIAL Osman Askin BAK (Turquie) Rapporteur spécial

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STC176 STC 16 F rév.1 finOriginal : anglais

Assemblée parlementaire de l’OTAN

COMMISSION DES SCIENCES ET DES TECHNOLOGIES

LE PROGRAMME NUCLÉAIRE IRANIEN : COMMENT METTRE L’ACCORD À

PROFIT ?

RAPPORT SPÉCIAL

Osman Askin BAK (Turquie)Rapporteur spécial

www.nato-pa.int 20 novembre 2016

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TABLE DES MATIÈRES

I. INTRODUCTION................................................................................................................1

II. ÉLÉMENTS DE L’ACCORD NUCLÉAIRE IRANIEN : POINTS FORTS ET POINTS FAIBLES..............................................................................................................2A. RESTRICTIONS IMPOSÉES À LA PRODUCTION ET ÉLIMINATION DE

LA MATIÈRE FISSILE EXISTANTE.........................................................................31. Uranium...........................................................................................................32. Plutonium.........................................................................................................4

B. CONTRÔLE, VÉRIFICATION, ET TRANSPARENCE.............................................41. Régime de vérification.....................................................................................42. Règlement de la question d’une « possible dimension militaire »...................63. Filière d’approvisionnement.............................................................................7

C. LEVÉE DES SANCTIONS........................................................................................8

III. PROGRAMME DE MISSILES BALISTIQUES IRANIENS ET PROGRAMME SPATIAL............................................................................................................................9A. PROGRAMME DE MISSILES BALISTIQUES : ÉTAT D’AVANCEMENT................9B. PROGRAMME SPATIAL : ÉTAT D’AVANCEMENT..............................................11

IV. L’ACCORD NUCLÉAIRE IRANIEN : OÙ EN SOMMES-NOUS AU BOUT D’UN AN?.........................................................................................................................11A. RESPECT PAR L’IRAN DE SES ENGAGEMENTS PRIS AU TITRE DU

PLAN D’ACTION GLOBAL COMMUN (PAGC) ET DE LA RÉSOLUTION 2231 DU CONSEIL DE SÉCURITÉ DE L’ONU......................................................11

B. LEVÉE DES SANCTIONS ET ÉCONOMIE IRANIENNE.......................................13

IV. OBSERVATIONS FINALES : COMMENT TIRER PARTI DE L’ACCORD ?...................15A. RENFORCER LE CONTRÔLE ET LA VÉRIFICATION EN IRAN..........................17B. RENFORCER LE RÉGIME MONDIAL DE NON-PROLIFÉRATION

NUCLÉAIRE...........................................................................................................17C. DÉFENSE ANTIMISSILE BALISTIQUE DE L’OTAN.............................................18

BIBLIOGRAPHIE CHOISIE...........................................................................................19

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I. INTRODUCTION1

1. Après des années de négociations intenses à l’échelle internationale, le groupe E3/UE+3 (Chine, États-Unis, Russie, Allemagne, France, Royaume-Uni et le haut représentant de l’Union européenne pour les affaires étrangères et la politique de sécurité)2 sont parvenus avec l’Iran, le 14 juillet 2015, à un accord sur un Plan d’action global commun (PAGC). Dans une résolution de 2012 sur le programme nucléaire iranien3, proposée par la commission des sciences et des technologies (STC), l’Assemblée parlementaire de l’OTAN (AP-OTAN) demandait qu’une solution globale, négociée et à long terme soit apportée au différend avec l’Iran sur la question du nucléaire. Avec le PAGC, cet objectif a été atteint. Le respect par l’Iran de ses engagements met le pays sur la voie – certes longue – lui permettant de regagner la confiance de la communauté internationale dans la nature exclusivement pacifique de son programme nucléaire, conformément aux dispositions du Traité sur la non-prolifération des armes nucléaires (TNP). En d’autres termes, le PAGC marque un tournant dans la façon dont la communauté internationale envisage le programme nucléaire iranien.

2. Le différend nucléaire avec l’Iran remonte à 2002 lorsque des installations nucléaires clandestines ont été découvertes sur son territoire. Une solution diplomatique à ce problème est dans l’intérêt de la sécurité à long terme de l’Iran ainsi que dans l’intérêt du peuple iranien. Grâce au PAGC, pour les 10 à 15 prochaines années, le risque que l’Iran, pour autant qu’il le souhaite, parvienne à mettre au point des armes nucléaires dans un laps de temps très court est minime. Qui plus est, la communauté internationale restera en mesure de surveiller le programme nucléaire iranien au-delà de 2025 à 2030, de nombreuses dispositions étant applicables jusqu’en 2035 et 2040.

3. Si l’Iran était capable de produire rapidement des armes nucléaires, cela constituerait une menace pour la stabilité régionale, la sécurité mondiale, le régime de non-prolifération nucléaire, ainsi que pour les intérêts vitaux de certains États. Ce risque est aujourd’hui fortement atténué. L’accord, au contraire, ouvre la voie à une relation plus stable et plus constructive entre l’Iran et la communauté internationale. Reste à savoir toutefois si l’Iran va choisir de saisir cette occasion. Nombre de défis se profilent à l’horizon, en plus de la question nucléaire. Et surtout, l’Iran continue à jouer un rôle déstabilisant, par alliés interposés, dans sa propre région.

4. En 2010, en vue de résoudre la question du nucléaire iranien, la Turquie et le Brésil ont signé avec l’Iran la « Déclaration de Téhéran » qui, certes de portée moins générale, n’en proposait pas moins un accord dont certains éléments étaient semblables à ceux du PAGC. Toutefois, l’accord n’ayant pas été soutenu par certains des partenaires du processus de négociation, il n’a pu être mis en œuvre.

5. L’accord nucléaire, de toute évidence, est une solution négociée où les deux parties ont été amenées à faire des concessions. Il en va ainsi de tout accord transactionnel entre des parties souvent diamétralement opposées. Si le PAGC n’est pas parfait, il est dans l’ensemble réaliste et les avantages qu’il présente pour la sécurité internationale l’emportent sur ses inconvénients. Le Plan d’action a mis en place des mesures plus strictes que celles que renfermaient les accords de garanties généralisées et les Protocoles additionnels de l’Agence internationale de l’énergie atomique (AIEA), ainsi que celles figurant dans le plan d’action commun provisoire de 2013 conclu entre le groupe E3/UE+3 et l’Iran. En 2013, l’Iran était sur le point de devenir un État nucléaire

1 Ce rapport a été rédigé avant que ne se tienne l’élection présidentielle du 8 novembre 2016 aux États-Unis. Au moment de l’adoption de celui-ci, il est difficile de savoir si le résultat de cette élection aura ou non des incidences sur l’accord nucléaire iranien.

2 Le groupe E3/UE+3 est aussi appelé P5+1, indiquant que cinq des six pays sont des membres permanents du Conseil de sécurité des Nations unies. Ce rapport utilise l’expression E3/UE+3 pour rendre compte du rôle clé du ou de la haut(e) représentant(e) de l’UE pour les affaires étrangères et la politique de sécurité.

3 Voir la résolution 400 de l’AP-OTAN sur le Programme nucléaire iranien [187 STC 12 F rév. 1 bis]

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virtuel ; aujourd’hui, l’Iran a la possibilité de poursuivre un programme nucléaire exclusivement pacifique et la communauté internationale est en mesure de le vérifier.

6. Plus généralement, l’accord permet à la communauté internationale de mieux gérer les risques émanant du programme nucléaire iranien. Selon ses détracteurs, lorsque nombre de restrictions prendront fin dans les dernières années du Plan d’action, l’Iran deviendra un État nucléaire virtuel qui pourrait passer outre pour se doter, à bref délai, d’armes nucléaires. Dans le cadre du PAGC, l’Iran a réaffirmé « qu’il ne chercherait en aucun cas à se procurer ou élaborer ou acquérir des armes nucléaires ». Toutefois, même si des craintes se font jour sur le fait que l’Iran puisse revenir sur son engagement, la communauté internationale aura toujours à sa disposition les instruments qu’elle avait au départ pour amener l’Iran à la table des négociations.

7. Ce rapport n’a pas la prétention d’être exhaustif, étant donné la précision et la complexité de l’accord nucléaire ainsi que l’intensité des débats politiques qui ont entouré les négociations. Cela étant :

- Il expose les paramètres de l’accord nucléaire iranien, notamment ses points forts et ses points faibles ;

- Il examine le programme spatial et le programme de missiles balistiques iraniens, qui sont au cœur de toute discussion sur les possibles dimensions militaires d’un programme nucléaire ;

- Il fait le point sur l’accord nucléaire iranien depuis son adoption au cours de l’été 2015 ; - Et il envisage différentes manières de mettre cet accord à profit.

8. Ce rapport ne traite pas des implications plus larges en matière de sécurité de l’accord nucléaire iranien, qui est l’un des thèmes d’un rapport établi par la commission politique en 20164. Un premier projet de ce rapport a été examiné par la commission des sciences et des technologies lors de la session de printemps de l’AP-OTAN, qui s’est tenue le 29 mai 2016. Le présent rapport, mis à jour, révisé et complété, a été adopté après discussion par la commission des sciences et des technologies à la session annuelle de l’AP-OTAN, qui s’est tenu le 20 novembre 2016.

II. ÉLÉMENTS DE L’ACCORD NUCLÉAIRE IRANIEN : POINTS FORTS ET POINTS FAIBLES

9. Le plan d’action global commun a pour objectif de bloquer, de manière vérifiable, toutes les voies permettant à l’Iran de développer une arme nucléaire dans les installations déclarées, dans le cadre du cycle complet du combustible nucléaire. Cela, au moyen de contraintes matérielles strictes et de mesures de contrôle et de vérification, de sorte qu’il soit très difficile pour l’Iran d’entreprendre des activités nucléaires clandestines. Même après la disparition de nombreuses dispositions au cours des dernières années du PAGC, la communauté internationale sera mieux à même de déterminer si le programme nucléaire iranien est destiné à des fins exclusivement pacifiques par rapport à la situation qui prévalait avant la mise en œuvre du PAGC. Si l’Iran se conforme à ces strictes mesures imposées par le PAGC et par la résolution 2231 du Conseil de sécurité des Nations unies, l’isolement économique et politique du pays sera progressivement levé.

10. L’accord est conçu de façon à favoriser sa conformité en fournissant à l’Iran des incitations positives et négatives pour qu’il respecte ses engagements. Plus important encore, le groupe E3/UE+3 et le Conseil de sécurité des Nations unies n’ont accordé la levée de la première série de sanctions que le 16 janvier 2016 – ce qu’il est convenu d’appeler la Date d’application – lorsque l’AIEA a exprimé sa satisfaction face à plusieurs mesures clés que l’Iran a prises pour limiter son programme nucléaire et pour mettre en œuvre de nouvelles mesures de transparence. Qui plus est, les sanctions se « remettront automatiquement en place » si un pays, quel qu’il soit, estime

4 Voir le rapport de la sous-commission sur les relations transatlantiques (PCTR) «La sécurité dans le Golfe » [172   PCTR 16 F]

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que l’Iran est revenu, à un moment donné, sur ses engagements. Du côté positif, l’Iran a atteint ses principaux objectifs : s’engager sur la voie d’une levée complète de toutes les sanctions liées au programme nucléaire et poursuivre un programme nucléaire pacifique avec des activités d’enrichissement de l’uranium.

A. RESTRICTIONS IMPOSÉES À LA PRODUCTION ET ÉLIMINATION DE LA MATIÈRE FISSILE EXISTANTE

11. Les restrictions imposées à la production par l’Iran d’uranium et de plutonium et les dispositions relatives à l’élimination des stocks existants de matière fissile du pays constituent la clé de voûte de l’accord.

1. Uranium

12. Le « break-out time », soit le temps dont l’Iran aurait besoin pour produire suffisamment d’uranium hautement enrichi pour fabriquer une ogive nucléaire, est un critère essentiel pour le groupe E3/UE+3. Avant l’entrée en vigueur, en 2013, du Plan d’action commun intérimaire, ce temps était estimé être deux à trois mois. Avec les limites que le PAGC impose à la capacité d’enrichissement de l’uranium et aux stocks d’uranium faiblement enrichi, le groupe E3/UE+3 estime que ce temps est désormais de plus d’un an, pendant au moins 13 ans.

13. Plus particulièrement, les principales restrictions sont notamment :

- Réduire de moitié la capacité d’enrichissement de l’Iran ;- Réduire pendant 10 ans le nombre de centrifugeuses installées, le nombre de machines de

première génération IR-1 passant de 20 000 à 6 100 (dont 5 060 seront opérationnelles) ; - Interdire l’enrichissement de l’uranium à un niveau supérieur à 3,67 % (uranium faiblement

enrichi, c’est-à-dire au-dessus de la qualité normale de combustible de réacteur) ; - Éliminer 97 % du stock iranien d’uranium faiblement enrichi (à un niveau inférieur à 3.67 %)

et le plafonner à 300 kg pendant 15 ans ;- Limiter le test de centrifugeuses avancées pendant 10 ans ; - Limiter le déploiement de centrifugeuses avancées de 2026 à 2028, afin de maintenir la

même capacité limitée d’enrichissement ; - Interdire pendant 10 ans les activités de recherche-développement de nouvelles formes de

séparation de l’uranium.

14. L’enrichissement de l’uranium et les activités de recherche-développement liées à l’enrichissement de l’uranium à l’usine d’enrichissement de combustible de Fordow cesseront totalement pendant 15 ans. L’installation, enfouie dans un contrefort montagneux, est difficile à surveiller. Elle sera convertie en un centre de recherche nucléaire, physique et technologique. Un tiers des 1 044 centrifugeuses présentes sur le site serviront à la production de radio-isotopes stables à des fins médicales, agricoles, industrielles et scientifiques ; les deux tiers restants serviront à remplacer les centrifugeuses défectueuses. Pendant 15 ans, aucune autre installation d’enrichissement de l’uranium ou installation susceptible de transformer des plaques de combustible ou leurs déchets en uranium faiblement enrichi (enrichi à un niveau inférieur à 3.67 %) ne pourra être construite.

15. Les restrictions imposées à l’uranium font l’objet d’un certain nombre de critiques. En effet, ces restrictions ne répondent pas aux exigences que formulait la résolution 400 adoptée en 2012 par l’AP-OTAN. La résolution faisait valoir que l’enrichissement ne devrait être autorisé qu’une fois que l’AIEA aurait éclairci tous les points en suspens et serait parvenue à la conclusion élargie que le programme nucléaire iranien est de nature entièrement civile. Toutefois, vu l’importance que le gouvernement iranien attache à l’enrichissement de l’uranium, un abandon complet de l’enrichissement n’aurait peut-être jamais été réaliste. Certains ont aussi fait valoir que le « break-out time » pourrait n’être que de sept mois si l’Iran réinstallait environ 1 200 centrifugeuses

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IR-2m placées dans un lieu de stockage surveillé. Qui plus est, selon les détracteurs, les délais pourraient se resserrer rapidement entre les années 2028 et 2035, les principales restrictions en matière de technologies, niveaux d’enrichissement et installations prenant fin et l’Iran étant de nouveau traité comme n’importe quel autre État non doté d'armes nucléaires au titre du Traité de non-prolifération : de quatre à six mois en 2028 à quelques jours en 2035. Il est évident que toute mesure prise par l’Iran pour augmenter sa capacité d’enrichissement au-delà de ses besoins pacifiques pratiques au cours des dernières années du PAGC susciterait de nouveau des inquiétudes quant à ses intentions de produire de la matière fissile pour des armes nucléaires.

2. Plutonium

16. En substance, le PAGC bloque toute voie vers le plutonium qui permettrait à l’Iran de fabriquer une ogive nucléaire dans un avenir proche. Ce qui représente une concession importante et lourde de conséquences pour l’Iran. Sur les quelque 15 000 ogives nucléaires qui existent dans le monde, plus de 95 % sont à base de plutonium car, beaucoup plus efficaces, elles sont aussi plus faciles et moins chères à produire en grand nombre.

17. Depuis 2006, l’Iran ne respecte pas plusieurs résolutions du Conseil de sécurité des Nations unies imposant la suspension de la construction du réacteur IR-40 à Arak: un réacteur de recherche à eau lourde capable de produire du plutonium de qualité militaire. Avec l’aide d’un groupe de travail composé de représentants du groupe E3/UE+3, le réacteur d’Arak sera reconfiguré de façon à ne produire que de très petites quantités de plutonium. Il faudra au moins quatre ans à ce réacteur reconfiguré pour produire suffisamment de plutonium pour la fabrication d’une seule ogive. Avant même la Date d’application du Plan d’action, l’Iran avait mis hors service le cœur du réacteur d’Arak non terminé en le perforant pour y injecter du béton. Un cœur modifié sera installé qui produira uniquement de faibles quantités de plutonium. L’Iran expédiera par ailleurs à l’étranger tout le combustible usé pour toute la durée de vie du réacteur et vendra sur le marché international l’eau lourde produite dans la centrale nucléaire d’Arak, qui n’est pas nécessaire au fonctionnement du réacteur. S’il est vrai que le réacteur d’Arak ne sera pas démantelé, plusieurs années seraient toutefois nécessaires pour reconvertir le réacteur et lui redonner ses caractéristiques originelles et toute activité serait facilement détectée.

18. L’Iran a accepté de ne construire aucun nouveau réacteur à eau lourde pendant 15 ans. De même, pendant le même nombre d’années, le pays ne se livrera à aucune activité de retraitement du combustible usé (y compris des activités de recherche-développement), à l’exception de cibles d’uranium enrichi irradié à des fins médicales ou industrielles. Également pendant 15 ans, Il ne construira pas d’installation de séparation du combustible, à l’exception d’une petite unité à Arak. Ces restrictions imposées par le PAGC disparaitront au bout de 15 ans, mais l’Iran a déclaré qu’il n’a ni le projet ni l’intention d’entreprendre l’une de ces activités à l’avenir. Il précise qu’il prévoit d’utiliser des réacteurs à eau légère pour ses réacteurs de puissance et de recherche et qu’il a l’intention d’expédier à l’étranger le combustible usé de tous les réacteurs. Certains détracteurs ont souligné que ces projets et intentions ne sont pas des engagements juridiquement contraignants.

B. CONTRÔLE, VÉRIFICATION, ET TRANSPARENCE

1. Régime de vérification

19. Les fonctions de contrôle et de vérification de l’AIEA sont essentielles à l’application des dispositions du Plan d’action global commun et autres obligations de l’Iran en matière de garanties ainsi que pour faciliter la détection d’activités clandestines. L’un des principaux objectifs est de savoir si l’AIEA peut parvenir à ce qu’il est convenu d’appeler « la Conclusion élargie » selon laquelle toutes les matières nucléaires en Iran sont utilisées à des fins pacifiques. L’AIEA entend achever ce processus dans un délai de huit ans.

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20. Le régime global de contrôle et de vérification comporte trois volets : l’accord de garanties généralisées que l’Iran a conclu avec l’AIEA, le Protocole additionnel, et d’autres mesures de vérification propres au PAGC.21. L’accord de garanties généralisées est la pierre angulaire des efforts déployés par l’AIEA pour vérifier que les programmes nucléaires sont de nature exclusivement pacifique. Il a toujours été appliqué en Iran, mais le pays doit désormais également appliquer le Code 3.1 modifié. Ce Code modifié exige que l’Iran informe l’AIEA au moment où il décide de construire une nouvelle installation nucléaire. Sans cela, les pays se contentent d’informer l’AIEA six mois avant l’introduction de matériel nucléaire au sein de toute nouvelle installation, créant une faille pour d’éventuels proliférateurs.

22. L’Iran commencera à appliquer le Protocole additionnel qu’il a signé en 2003, mais n’a appliqué de son plein gré qu’entre 2003 et 2006. A la « Date de transition », soit 8 ans après la Date d’adoption ou lorsque l’AIEA sera parvenue à la Conclusion élargie, suivant ce qui se produit en premier, l’Iran proposera au parlement la ratification du Protocole additionnel. Le Protocole additionnel donne à l’AIEA la possibilité de réaliser des inspections de grande envergure, notamment dans des sites non déclarés.

23. Alors que l’Iran est tenu de respecter l’accord de garanties généralisées et le Protocole additionnel aussi longtemps que le pays est partie au Traité de non-prolifération nucléaire, la durée des dispositions propres au PAGC varie de 10 ans à une durée indéterminée. Dans l’ensemble, le régime actuel de contrôle et vérification de l’Iran représente le régime de vérification le plus inquisiteur de toute l’histoire de l’AIEA. Plus particulièrement, les mesures propres au PAGC sont notamment :

- Inspections aléatoires : Si l’AIEA est préoccupée par d’éventuelles activités ou matières nucléaires non déclarées ou autres activités non compatibles avec le Plan d’action sur des sites non déclarés, dont des installations militaires, l’agence peut exiger des éclaircissements. Si les inquiétudes de l’AIEA ne sont pas dissipées, le délai maximum pendant lequel l’Iran peut légalement empêcher des inspecteurs d’accéder à l’installation en question est de 24 jours. Cette disposition reste en vigueur pendant 15 ans. Il convient toutefois de souligner que le droit permanent de l’AIEA de réaliser une inspection aléatoire sur un site au sujet de matières nucléaires non déclarées constitue un élément fondamental de l’accord de garanties généralisées et qu’il a été renforcé par l’accès complémentaire que prévoit le Protocole additionnel. Ce droit n’est pas limité dans le temps. Étant donné que le Plan d’action interdit également toutes activités pouvant contribuer à la conception et au développement d’un dispositif nucléaire explosif, les installations soupçonnées de telles activités rentrent également dans le champ d’application de la disposition relative aux inspections aléatoires.

- Usines et mines d’uranium : L’AIEA pourra vérifier les installations de production de concentré de minerai d’uranium pendant 25 ans.

- Production de centrifugeuses : l’AIEA procédera à des mesures de confinement et de surveillance des rotors et des soufflets de centrifugeuses pendant 20 ans.

- Présence à long terme de l’AIEA en Iran : L’agence augmentera considérablement le nombre d’inspecteurs : de 130 à 150 inspecteurs dans les neuf mois suivant la Date d’application.

- Utilisation de technologies de pointe : L’AIEA sera en mesure d’utiliser des technologies modernes pour contrôler et vérifier que l’Iran respecte bien ses engagements. Ceci comprend les moyens de mesure en ligne de l’enrichissement et les scellés électroniques qui fournissent directement à l’AIEA des mesures en continu.

24. Ce nouveau régime permet à l’AIEA de contrôler et de surveiller les installations nucléaires déclarées de l’Iran ainsi que les infrastructures qui y sont liées durant le cycle complet du combustible nucléaire – de l’extraction et la fabrication de l’uranium jusqu’au traitement des déchets nucléaires. Pour déroger au Traité de non-prolifération nucléaire et développer des armes

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nucléaires, il faudrait à l’Iran bien plus qu’une ou même plusieurs installations clandestines : il lui faudrait mettre au point un programme nucléaire clandestin complet, du début à la fin. Ce qui est quasiment impossible à faire sans que l’AIEA ou des moyens de renseignement nationaux ne le détectent assez rapidement.

25. Le fait que l’Iran puisse retarder, pour une période maximum de 24 jours, des inspections de sites, lui donnant le temps de dissimuler des activités susceptibles d’intéresser les inspecteurs, donne lieu à des inquiétudes. Aucune disposition ne prévoit un accès « en tout lieu, et à tout moment », comme certains l’avaient demandé. À noter toutefois qu’il est quasiment impossible de désinfecter des installations qui ont utilisé des matières nucléaires ainsi que des installations liées au nucléaire de grande ampleur dans un délai de 24 jours. Cela étant, il ne serait pas impossible de faire disparaître, à temps, les preuves d’activités interdites de petite envergure ne faisant pas intervenir des matières nucléaires. Il est important toutefois de noter qu’un délai maximal de 24 jours est une amélioration par rapport aux dispositions normales du Protocol additionnel qui ne prévoit pas une telle limite.

2. Règlement de la question d’une « possible dimension militaire »

26. Un aspect important de l’accord nucléaire avec l’Iran était de savoir si le programme nucléaire iranien comportait une dimension militaire. Fin 2011, l’AIEA a pour la première fois exposée, en détail, ses inquiétudes concernant des activités iraniennes liées au développement d’un dispositif nucléaire explosif. En signant le plan d’action global commun, l’AIEA et l’Iran ont également convenu d’une « Feuille de route pour la clarification des questions passées et présentes restées en suspens », basée sur le Cadre de coopération de 2013 qui n’a jamais pleinement été mis en œuvre.

27. La Feuille de route avait pour objectif de régler, avant la fin de l’année 2015, toutes les questions passées et présentes restées en suspens. La réalisation des activités prévues dans la Feuille de route, telles que vérifiées par l’AIEA, était une condition préalable à la Date d’application et à la levée des sanctions qui y sont associées. Les douze domaines critiques, tels que décrits par l’AIEA en 2011, figurent au tableau 1. La Feuille de route prévoyait des réunions d’experts, des mesures techniques et des discussions. L’AIEA et l’Iran ont signé un accord séparé concernant le problème de Parchin. L’Iran est soupçonné d’avoir construit, sur le site du complexe militaire de Parchin, une vaste enceinte de confinement d’explosifs pour réaliser des expériences hydrodynamiques, un indicateur fort que le pays cherche à mettre au point des armes nucléaires. Depuis que ces allégations ont été formulées, l’Iran a entrepris de vastes travaux de reconstruction, ce qui pour la plupart des experts n’est rien d’autre qu’une aseptisation du site.

28. Dans sa dernière évaluation, datant du 2 décembre 2015, l’AIEA « estime qu’un certain nombre d’activités en rapport avec la mise au point d’un dispositif nucléaire explosif ont été menées en Iran avant la fin de 2003 de manière coordonnée et que certaines activités ont eu lieu après 2003. L’Agence estime aussi que ces activités n’ont pas été au-delà du stade des études de faisabilité, des études scientifiques et de l’acquisition de certaines compétences et capacités techniques pertinentes. L’Agence n’a pas d’indices crédibles de l’existence en Iran d’activités se rapportant à la mise au point d’un dispositif nucléaire explosif après 2009 ». Ultérieurement, le Conseil des gouverneurs de l’AIEA a indiqué « que toutes les activités figurant dans la feuille de route [pour la clarification des questions passées et présentes restées en suspens concernant le programme nucléaire iranien] ont été mises en œuvre conformément au calendrier convenu, précisant que cela met fin à l’examen de cette question par le Conseil ».

29. En 2012, l’AP-OTAN a reconnu l’intérêt que peut présenter un délai de grâce au cours duquel l’Iran ne serait pas sanctionné s’il reconnaissait avoir mené dans le passé d’autres activités illicites liées au nucléaire. Ce dispositif malheureusement n’a jamais vu le jour. Selon certains critiques, la décision de clore la question d’une possible dimension militaire a été une erreur, l’Iran n’ayant pas expliqué toutes les activités entreprises dans les domaines suscitant des

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préoccupations et se montrant souvent peu disposé à collaborer sur ces sujets. Bien que cela soit vrai, il est plus important toutefois que la communauté internationale soit plus sûre que toutes les activités nucléaires actuelles et futures en Iran sont de nature exclusivement pacifique. La question peut néanmoins resurgir lorsque l’AIEA délibèrera au sujet de la Conclusion élargie. Une Conclusion élargie ne signifie pas nécessairement que l’État en question n’a jamais été doté d’un programme d’armements nucléaires. Quoi qu’il en soit, si la poursuite de certaines activités soulève à nouveau des doutes, le processus lié à la Conclusion élargie en sera bien évidemment affecté.

Tableau 1 : DOMAINES CRITIQUES – POSSIBLE DIMENSION MILITAIRE1. Structure de gestion du programme

2. Activités d’acquisition

3. Acquisition de matière nucléaire

4. Composants nucléaires pour un dispositif explosif

5. Mise au point d’un détonateur

6. Amorçage d’explosifs détonants et expériences associées

7. Expériences hydrodynamiques

8. Modélisation et calcul

9. Initiateur de neutrons

10. Réalisation d’un test

11. Intégration dans un missile vecteur

12. Système d’armement, d’allumage et de mise à feu

3. Filière d’approvisionnement

30. Le Plan d’action global commun règlemente aussi, pour une période de dix ans, le flux de biens destinés aux activités nucléaires autorisées conformément au Plan d’action ainsi que les biens à double usage qui peuvent être utilisés pour des activités non-autorisées liées au nucléaire. Une commission conjointe a été établie dans le cadre du PAGC, composée du groupe E3/UE+3 et de l’Iran, pour suivre l’application de l’accord. La Commission conjointe a créé un groupe de travail permanent sur la filière d’approvisionnement. Celui-ci peut communiquer au Conseil de sécurité des Nations unies l’approbation d’une proposition de vente. En cas de divergence au sein du groupe de travail, la commission conjointe se saisira de la question. Aspect important : le groupe de travail peut réaliser des contrôles auprès des utilisateurs finals pour déterminer si les biens finissent bien entre les mains de ceux à qui ils étaient destinés. S’il est bien appliqué, l’accord devrait contribuer à détecter toute activité clandestine de développement nucléaire en Iran et empêcher les activités d’approvisionnement illicites compte tenu du risque de retour automatique des sanctions.

31. Selon certains critiques, le mécanisme de la filière d’approvisionnement est très compliqué et peut poser plusieurs problèmes. Le délai fixé pour examiner les propositions – 30 jours maximum – est trop court, d’après eux, pour assurer un examen efficace, avec le risque de blocages, de décisions hâtives ou d’enquêtes superficielles concernant l’utilisation finale. La filière d’approvisionnement peut facilement être saturée étant donné l’essor du commerce mondial de biens qui peuvent être utiles aux activités nucléaires illicites. Saturer la filière peut aussi être une tactique délibérée de l’Iran. Outre la filière d’approvisionnement, l’Iran peut tenter d’utiliser des intermédiaires pour acquérir des biens illicites, ce qui bien évidemment constituerait une violation du PAGC, et néanmoins clamer son innocence en cas de découverte. De même, l’Iran est passé maître dans l’art d’acquérir des biens qui pourraient être propices à des activités nucléaires illicites mais qui ne figurent pas sur les listes internationales de contrôle. Enfin, l’ONU manque sérieusement de moyens pour mener des activités d’information auprès de ses États membres sur

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la façon dont fonctionne la filière. Ce qui peut vouloir dire que les États membres n’ont peut-être pas une connaissance pleine et entière de leurs obligations.

C. LEVÉE DES SANCTIONS

32. Les principaux points de friction des négociations relatives au Plan d’action global commun concernaient la question de savoir quelles sanctions devaient être levées et quand. Finalement, le Plan d’action a stipulé que la levée des sanctions liées au programme nucléaire iranien se ferait en trois étapes : la Date d’application (16 janvier 2016), la Date de transition, qui interviendra en 2023 ou lorsque l’AIEA parvient à la Conclusion élargie, si cette date est antérieure ; et la Date d’extinction en 2025. Les restrictions imposées par le Conseil de sécurité des Nations unies sur les importations et les exportations de matières liées aux armes conventionnelles et aux missiles balistiques demeureront en vigueur, respectivement, jusqu’en 2020 et 2023 ou jusqu’à ce que l’AIEA parvienne à la Conclusion élargie – suivant ce qui se produit en premier.

33. Date d’application : Toutes les sanctions prévues par l’ONU concernant le programme nucléaire iranien seront levées. Cela dit, un ensemble de restrictions spécifiques à durée limitée, ont été inclues dans la résolution 2231 du Conseil de sécurité des Nations unies. Pour l’essentiel, elles stipulent que l’approbation du Conseil de sécurité est nécessaire pour que les États puissent entreprendre certaines activités avec l’Iran, par exemple des échanges de biens liés au nucléaire. Pour autant, le gel des avoirs applicable à des personnes et des entités restera en vigueur et de nouvelles mesures de ce type peuvent être imposées. Les États-Unis pourront lever ou suspendre nombre de sanctions états-uniennes liées au domaine nucléaire. Fait plus important : ils lèveront la plupart des sanctions extraterritoriales (ou secondaires), c’est-à-dire celles qui sont applicables aux non-ressortissants états-uniens. Certaines sanctions primaires, soit celles applicables aux ressortissants états-uniens, seront aussi levées ou suspendues, mais la grande majorité demeurera en vigueur. L’UE lèvera nombre des sanctions européennes liées au nucléaire, le gel des avoirs, et autres mesures et restrictions.

34. Date de transition : Les États-Unis feront adopter les mesures législatives permettant de mettre fin aux sanctions liées au nucléaire de façon que l’Iran bénéficie du même traitement que celui que les États-Unis accordent aux autres États non dotés de l’arme nucléaire au titre du Traité de non-prolifération. L’UE mettra fin à toutes les autres sanctions liées au nucléaire imposées à l’Iran.

35. Date d’extinction : Les restrictions et dispositions encore en vigueur que renferme la résolution 2231 du Conseil de sécurité prendront fin. Les sanctions restantes imposées par l’UE prendront également fin.

36. La commission conjointe est chargée de suivre l’état d’avancement de la levée des sanctions. Si les efforts déployés pour régler un différend échouent, tout membre de la commission peut saisir le Conseil de sécurité des Nations unies, s’il estime que l’Iran ne respecte pas ses engagements au titre du PAGC. Le Conseil de sécurité procédera alors à un vote sur une résolution demandant le maintien de la levée des sanctions. Si la résolution en question n’est pas adoptée dans les 30 jours, l’ensemble des sanctions prévues dans les résolutions antérieures du Conseil de sécurité seront « rétablies automatiquement ». Cette procédure donne au membre qui estime que l’Iran ne respecte pas ses engagements un droit de veto, qui entraîne automatiquement le rétablissement des sanctions. Cette disposition relative au rétablissement des sanctions expire en 2025. Certains observateurs pensent toutefois que les membres permanents du Conseil de sécurité des Nations unies ont convenu de façon informelle de prolonger le mécanisme de cinq ans lorsqu’il expirera.

37. Ce mécanisme de levée des sanctions a été critiqué. Certains font valoir qu’il donne accès trop rapidement, sans que cela soit utile, aux avoirs gelés et à de nouvelles possibilités économiques. Seuls seront libérés les avoirs qui ont été gelés en raison d’un différend au sujet du

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programme nucléaire iranien. Toutefois, les experts divergent sur la valeur totale des avoirs gelés pouvant être débloqués dans le cadre du PAGC. Le département du Trésor des États-Unis estime que l’Iran sera en mesure d’avoir accès à quelque 56 milliards de dollars de réserves de change. L’Iran lui-même avance le chiffre de 35 milliards de dollars. L’Iran n’a pas obtenu l’accès immédiat aux avoirs gelés, la plupart étant liés à des contrats ou à des prêts non productifs. Si certains des fonds débloqués sont mis au service d’accords commerciaux lucratifs, cela peut inciter d’autres pays – dont des pays parties au PAGC – à ne pas rétablir les sanctions au cas où l’Iran n’applique pas le Plan d’action. Qui plus est, le seuil de saisie du Conseil de sécurité des Nations unies n'est pas clair : jusqu’à quel point l’Iran doit-il manquer à ses obligations pour que l’un des pays du groupe E3/UE+3 mette en péril le PAGC ? D’autre part, le renforcement de l’économie iranienne dû à la levée des sanctions peut réduire la portée punitive si les sanctions sont imposées de nouveau. Certains détracteurs ont avancé que la levée des sanctions libère des fonds que l’Iran pourrait utiliser pour financer ses supplétifs à l’étranger. La communauté internationale doit donc être extrêmement vigilante sur la façon dont l’Iran utilise l’argent. Veiller à ce que cet argent serve à financer les efforts de développement économique au lieu de se lancer dans des aventures extérieures est dans l’intérêt même de sa population.

III. PROGRAMME DE MISSILES BALISTIQUES IRANIENS ET PROGRAMME SPATIAL

A. PROGRAMME DE MISSILES BALISTIQUES : ÉTAT D’AVANCEMENT

38. Le programme iranien de missiles balistiques, qui résulte d’un programme rudimentaire datant du Chah, était suffisamment bien rodé au milieu des années 80 pour contrer les missiles iraquiens et compenser la dégradation de ses forces aériennes après la révolution islamique. Aujourd’hui, l’Iran possède le plus important stock de missiles balistiques du Moyen-Orient, et le pays s’emploie activement à accroître le perfectionnement, l’ampleur et la portée de ses missiles. Tout missile balistique doté d’une charge utile suffisante peut transporter une ogive nucléaire s’il est conçu à cette fin, raison pour laquelle ce programme inquiète tout particulièrement une grande partie de la communauté internationale5. L’Iran est le seul pays qui a mis au point des missiles d’une portée de plus de 2 000 km sans avoir, dans un premier temps, fabriqué des ogives nucléaires. Le gouvernement iranien a déclaré à maintes reprises qu’il n’a pas besoin de missiles balistiques de plus longue portée.

39. Les missiles balistiques iraniens sont encore aujourd’hui de piètre qualité, notamment en matière de précision. Dans les années à venir, les missiles balistiques iraniens seront donc peu utiles sur le plan militaire, mais serviront principalement d’instrument politique. Cela dit, le programme devrait progresser à grands pas dans les années à venir. En particulier, améliorer la précision de ses plus gros missiles est une priorité de l’armée iranienne. La capacité du pays à mettre au point et à produire de manière indépendante des missiles balistiques s’est renforcée. Il semblerait que l’Iran dépasse peu à peu la Corée du Nord dans certains domaines. Pour autant, le pays demeure tributaire de fournisseurs étrangers pour ce qui est des technologies et des composants clés. Par exemple, il semble que le pays ne soit pas en mesure de produire les moteurs à propergol liquide nécessaires pour ses missiles. L’Iran s’emploie activement à développer de nouveaux missiles balistiques de longue portée et de portée intermédiaire. Il aura toutefois du mal à mettre au point ces nouveaux systèmes et est connu pour former des plans beaucoup trop ambitieux et pour exagérer ses réussites. Ceci devrait donner le temps à la communauté internationale de réagir en cas de développements inquiétants. Toutefois, l’Iran garde le cap et sera en mesure, le temps venu, de fabriquer s’il le souhaite des missiles balistiques de longue portée et surtout un missile balistique intercontinental (ICBM). Si les missiles balistiques iraniens peuvent déjà atteindre le territoire de l’OTAN de l’Europe du Sud-Est, la plupart des experts ne pensent pas que des missiles capables de menacer l’Europe occidentale ou les États-Unis seront mis au point avant, respectivement, 2017 et 2020.

5 L’Iran dispose aussi de programmes actifs de missiles de croisière et de véhicules aériens sans pilote pouvant transporter des armes nucléaires.

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40. Vu la nature sensible des programmes de missiles, toutes les évaluations émanant de sources ouvertes concernant les capacités de l’Iran en matière de missiles se fondent nécessairement sur des avis d’experts. Aucun consensus n’existe sur les spécifications techniques, les performances des systèmes et même sur le nombre de systèmes différents. Le tableau 2 donne toutefois un aperçu des missiles balistiques iraniens, selon l’avis d’un expert de premier plan.

Tableau 2 : EXEMPLES DE MISSILES BALISTIQUES IRANIENSPortée est. Charge utile est.

Shahab-1 300 km 900 kg

Shahab-2 500 km 720 kg

Qiam 600 km 720 kg

Shahab-3 900 km 1000 kg

Ghadr-1 1600 km 750 kg

Emad inconnue inconnue

Sajjil-2 2000 km 750 kgSur la base du témoignage fourni par Michel Elleman aux membres de la commission sénatoriale états-unienne des affaires bancaires du logement et de l'urbanisme, le 24 mai 2016

41. Durant les négociations relatives au PAGC, les États-Unis, en particulier, voulaient imposer des limites au programme de missiles balistiques, mais l’Iran n’a pas cédé. En fait, l’Iran n’a jamais accepté que le Conseil de sécurité des Nations unies impose des restrictions au programme de missiles balistiques. D’où l’une des principales critiques de la résolution 2231 du Conseil de sécurité des Nations unies : les termes servant à décrire les missiles balistiques sont flous et créent une faille majeure. À noter toutefois que l’interdiction antérieure des missiles balistiques avait pour but d’accroître la pression sur l’Iran pour l’amener à engager un processus de négociation concernant son programme nucléaire.

42. Aux termes de la résolution, « L’Iran est tenu de ne mener aucune activité liée aux missiles balistiques conçus pour pouvoir emporter des armes nucléaires, y compris les tirs recourant à la technologie des missiles balistiques, jusqu’au huitième anniversaire de la Date d’adoption du Plan d’action ou jusqu’à la date de la présentation par l’AIEA d’un rapport confirmant la Conclusion élargie, si elle est antérieure ». Deux principaux problèmes se posent concernant cette disposition. Tout d’abord, la résolution utilise l’expression peu contraignante « est tenu » et non « ne doit pas », ce qui serait contraignant sur le plan juridique. Deuxièmement, l’Iran fait valoir que ses missiles balistiques ne sont pas « conçus pour pouvoir » porter des ogives nucléaires. La formulation légèrement différente de la résolution 2231 n’est pas sans importance par rapport aux termes utilisés dans les résolutions antérieures, parlant de missiles balistiques « conçus pour pouvoir emporter des armes nucléaires ». Parmi les pays du groupe E3/UE+3, la France, l’Allemagne, le Royaume-Uni et les États-Unis soutiennent que tous les systèmes qui peuvent porter au moins une charge utile de 500 kg avec une portée minimum de 300 km sont capables, par nature, d’emporter une ogive nucléaire. L’Iran possède actuellement, selon les estimations, 300 missiles balistiques qui relèvent de cette catégorie (Catégorie 1 Régime de contrôle de la technologie des missiles)

43. Les restrictions imposées aux ventes à l’Iran de technologies liées aux missiles balistiques ont été prolongées de huit ans aux termes de la résolution 2231. Cela étant, au titre de la résolution 2231, les ventes potentielles liées aux missiles seront contrôlées moins strictement que les ventes nucléaires, et les sanctions contre l’Iran pour importations illicites sont moindres et moins sévères comparées à celles associées aux technologies nucléaires ou liées au nucléaire. De même, il a été souligné que les sanctions imposées à plusieurs banques ayant facilité des acquisitions illicites ont été levées très tôt. À noter toutefois que même lorsque les restrictions sont

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levées, pour la plupart des pays capables d’exporter ce type de technologies, les ventes ne sont pas conformes aux restrictions imposées par le Régime de contrôle de la technologie des missiles auquel ils ont souscrit. Cela étant, plusieurs producteurs importants de la technologie des missiles balistiques ne sont pas parties prenantes au Régime de contrôle de la technologie des missiles.

B. PROGRAMME SPATIAL : ÉTAT D’AVANCEMENT

44. Les technologies développées et testées dans le cadre du programme spatial iranien, lancé pour la première fois dans les années 90, peuvent servir à la mise au point d’un programme ICBM, fournissant des informations précieuses en matière de technologies relatives aux lanceurs et autres techniques utiles propres aux programmes de missiles balistiques. En 2005, l’Iran a envoyé pour la première fois un satellite commercial sur un lanceur russe dans le cadre d’un projet conjoint. Les progrès accomplis par le programme spatial de l’Iran dans les années qui ont suivi sont impressionnants. En 2008, l’Iran a lancé pour la première fois son propre lanceur Safir à deux étages, très probablement un dérivé du Shahab-3. En février 2009, l’Iran a réussi à placer sur orbite le satellite Omid à l’aide d’un lanceur Safir. Deux autres lancements ont suivi en 2011 et 2012, envoyant dans l’espace les satellites Rasad-1 et Navid. Tous les satellites étaient officiellement destinés à un usage civil. Omid comme Rasad-1 sont revenus sur terre, comme prévu. Début 2015, l’Iran a placé en orbite le satellite Fajr au moyen d’un autre lanceur Safir. L’Iran a par ailleurs présenté en 2010 un nouveau modèle de fusée appelé Simorgh, dont le premier test pourrait avoir lieu en 2016. L’Iran a également envoyé dans l’espace des fusées plus petites avec des animaux à bord. L’Iran a autrefois nourri de grandes ambitions pour son programme spatial, notamment en ce qui concerne des vols habités. Après la fermeture, début 2015, de l’Agence spatiale iranienne, le programme spatial iranien aurait été finalement transféré sous l’autorité du ministère des Communications et des Technologies de l’information.

IV. L’ACCORD NUCLÉAIRE IRANIEN : OÙ EN SOMMES-NOUS AU BOUT D’UN AN ?

45. Cette section fait le point sur le statut de l’accord nucléaire iranien depuis son adoption au cours de l’été 2015, et notamment la période écoulée depuis la Date d’application.

A. RESPECT PAR L’IRAN DE SES ENGAGEMENTS PRIS AU TITRE DU PLAN D’ACTION GLOBAL COMMUN (PAGC) ET DE LA RÉSOLUTION 2231 DU CONSEIL DE SÉCURITÉ DE L’ONU

46. Dans le premier rapport qu’il a présenté, en juillet 2016, au Conseil de sécurité de l’ONU sur l’application du Plan d’action global commun et de la résolution 2231, le secrétaire général de l’ONU, Ban Ki-moon, estimait que les efforts réalisés par l’Iran relatif à l’application du Plan d’action durant les six premiers mois étaient encourageants. En effet, la mise en œuvre par l’Iran de ce plan, certes loin d’être parfaite, est meilleure que prévu. Par exemple, l’AIEA a pu annoncer la Date d’application à peine trois mois après la Date d’adoption, ce qui est à tout à l’honneur de l’Iran. La plupart des observateurs pensaient que l’Iran aurait besoin de plus de temps pour répondre aux conditions requises.

47. Depuis la Date d’application, l’AIEA a présenté à son Conseil des gouverneurs deux rapports sur l’application du PAGC. L’Agence a pu confirmer que l’Iran s’acquittait de ses obligations, à une exception près, à laquelle il a été remédié sans délai. En février 2016, l’AIEA s’est aperçue que l’Iran détenait des stocks de 130,9 tonnes d’eau lourde, soit 0,9 tonne de plus que ce qu’autorise le PAGC, dépassant la limite fixée de 0,69 %. En moins d’une semaine, toutefois, l’Iran avait expédié 20 tonnes d’eau lourde à Oman. Par la suite, les États-Unis ont acheté 32 tonnes d’eau lourde à l’Iran, celui-ci respectant ainsi de nouveau le PAGC. Pour la plupart des experts, il ne s’est agi que d’un manquement léger et de nature technique. Pour autant, des voix critiques font valoir que la vente crée un précédent regrettable. Si le Plan d’action n’interdit pas à l’Iran de produire de l’eau lourde, sous réserve de ne pas dépasser la limite de 130 tonnes, il convient de préciser clairement

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à l’Iran qu'il ne peut pas sciemment produire de l’eau lourde en quantité excessive pour en forcer l’acquisition sur le marché international.

48. Les deux rapports de l’AIEA ont fait l’objet de critiques car n’y figuraient pas des éléments d’information essentiels qui avaient été fournis auparavant au Conseil des gouverneurs. Depuis la reprise par l’Iran de l’enrichissement de l’uranium en 2007, les rapports de l’Agence contenaient un grand nombre d’informations détaillées, soit le gage d’évaluations de grande qualité par des experts indépendants. Les rapports en question, par exemple, ne contiennent que très peu d’informations sur les efforts de vérification en matière d’armement. L’année dernière, les inspecteurs ont trouvé des particules d’uranium naturel manipulé par l’homme, certes en quantités infimes et peu concluantes, sur le site du complexe militaire de Parchin. Certains experts soutiennent que cette découverte devrait donner lieu à un nouveau prélèvement, notamment en raison de la reconfiguration en cours du complexe. Or les rapports n’indiquent pas si l’Agence est retournée sur le complexe pour procéder à une nouvelle vérification. En outre, le programme d’enrichissement par centrifugation à long terme de l’Iran n’a pas été communiqué au public. Après sa divulgation au cours de l’été 2016, des experts indépendants ont conclu qu’il ne contenait pas d’éléments plus sensibles que n’importe quel élément révélé dans le PAGC et donc qu’il aurait pu être publié. Les experts qui ont eu accès à ce programme estiment désormais que le « break-out time » à la fin de la treizième année du PAGC serait de quatre mois – au lieu des six mois prévus précédemment, ce qui est un résultat important. Il faut souligner que le manque de précisions ne signifie pas que l’AIEA n’a pas rempli sa mission ou que l’Iran n’a pas respecté ses obligations. Cela signifie toutefois que les évaluations basées sur des sources publiques, dont ce rapport, deviennent de plus en plus difficiles. La France, l’Allemagne, le Royaume-Uni et les États-Unis ont d’ores et déjà demandé des rapports plus détaillés. Une plus grande transparence serait également dans l’intérêt de l’Iran, car cela renforcerait la confiance du public dans le comportement de ce pays.

49. En juillet, le secrétaire général Ban Ki-moon, dans son rapport au Conseil de sécurité, a également déclaré que « il n’a été signalé aucun cas de fourniture, de vente, de transfert ou d’exportation vers la République islamique d’Iran d’articles liés au nucléaire qui aurait été effectué en violation des dispositions du Plan d’action et de la résolution 2231 (2015) ». Si c’est probablement vrai, il faut néanmoins signaler que les services de renseignement allemands ont relevé que l’Iran a essayé d’acquérir en secret des matières liées au nucléaire après la signature du PAGC mais avant la Date d’application. Cet épisode démontre clairement que les activités d’approvisionnement de l’Iran doivent être suivies de très près en utilisant tous les moyens disponibles.

50. Il est encore impossible de dire si la filière d’approvisionnement du Plan d’action fonctionnera comme prévu. Les détracteurs et les partisans de la filière d’approvisionnement peuvent s’en tenir à leur position initiale. La principale raison étant que, jusqu'en septembre 2016, l’Iran n’avait formulé aucune demande. Une proposition avait été adressée par l’Iran, mais retirée par la suite. Des problèmes de compétences bureaucratiques internes à l’Iran concernant les procédures d’approbation de l’utilisation finale expliqueraient en partie l’absence de demandes. Pour autant, des informations indiquent que l’Iran s’est renseigné auprès d’un fournisseur pour acquérir un matériau en fibres de carbone contrôlé. La demande a été refusée tant par le fournisseur que par son gouvernement. Par conséquent, la demande n’a jamais été soumise au groupe de travail sur les achats qui l’aurait probablement rejetée.

51. Avant même la Date d’application, l’Iran avait tiré parti de la faille de la résolution 2231 du Conseil de sécurité en termes de missiles balistiques. Le 10 octobre 2015, l’Iran a procédé à un essai de missile balistique Emad. Un autre tir d’un missile Ghadr-110 a suivi le 21 novembre. Après la Date d’application, l’Iran a procédé à cinq tirs en deux fois (mars et mai 2016). À titre de comparaison, alors que les tensions entre l’Iran et la communauté internationale étaient à leur paroxysme au sujet du programme nucléaire (entre 2006 et 2012), l’Iran procédait en moyenne à cinq tirs par an. Dans son premier rapport présenté au Conseil de sécurité, le secrétaire général de

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l’ONU, Ban Ki-moon, s’est dit par conséquent préoccupé par ces tirs. Selon lui, « ces tirs ne sont pas conformes à l’esprit constructif qui a présidé à la signature du Plan d’action global commun ». La France, l’Allemagne, le Royaume-Uni et les États-Unis ont déclaré publiquement que ces tirs ont été réalisés au mépris de la résolution 2231 du Conseil de sécurité. La Chine et la Russie ne sont pas de cet avis.

52. Le secrétaire général Ban Ki-moon était également préoccupé par les informations faisant état de la saisie d’une cargaison d’armes, en mars 2016, à destination du Yémen. L’Iran nie avoir envoyé des armes au Yémen. Le secrétaire général a en outre fait état de plusieurs questions ouvertes concernant la participation d’entités iraniennes et d’une société au cinquième salon iraquien de la défense, qui s’est tenu en mars 2016, et le voyage en Iraq d’un général iranien dont le nom figure sur la liste d’interdiction de voyager dans ce pays.

B. LEVÉE DES SANCTIONS ET ÉCONOMIE IRANIENNE

53. L’espoir que la levée des sanctions permettrait à l’économie iranienne de redémarrer a, de toute évidence, joué un rôle majeur dans la volonté des dirigeants de négocier le Plan d’action global commun. Depuis la Date d’application, les pays du groupe E3/UE+3 ont suivi pas à pas toutes les étapes prévues pour la levée des sanctions. En fait, ils se sont montrés plus conciliants que certains critiques de l’accord auraient souhaité.

54. Fait important, la chute libre de l’économie iranienne a été enrayée : elle continue de se stabiliser et se redresse même légèrement. Pour autant, l’économie demeure beaucoup plus faible qu’avant que les sanctions soient imposées. Durant l’année qui a suivi la signature du Plan d’action, l’économie iranienne a progressé de 0,7 %. Pour l’année 2016, la Banque mondiale prévoit un taux de croissance de 4,2 %. Le gouvernement iranien, quant à lui, vise une croissance annuelle de 8 %. L’inflation a culminé en 2014, atteignant des niveaux proches de 40 %, selon le Fonds monétaire international. Au cours de l’été 2016, le taux d’inflation a chuté à moins de 10 % pour la première fois en un quart de siècle. La monnaie iranienne s’est aussi stabilisée. Le taux de chômage officiel, actuellement de 11 %, se situe juste au-dessous du taux moyen enregistré de 2001 à 2016. D’autre part, il y a des signes, certes encore modestes, indiquant que le secteur bancaire iranien se redresse. Des établissements bancaires européens de petite et moyenne taille recommencent à faire des opérations en Iran, quoiqu’avec beaucoup de prudence. Cela dit, aucune grande banque européenne n’a encore mené des activités avec l’Iran. En outre, le Groupe d’action financière recommande toujours d’exercer des contrôles rigoureux sur les transactions avec l’Iran, le financement du terrorisme et le blanchiment de capitaux demeurant les problèmes les plus graves auxquels il est confronté. Dans une décision surprenante, résultant de certaines mesures concrètes et d’une volonté politique renouvelée, le Groupe d’action financière a suspendu, pour un an, l’appel lancé aux États membres d’appliquer des contremesures spéciales.

55. L’économie iranienne est dans une situation dramatique depuis des années. Il était donc tout à fait irréaliste de penser qu’un véritable boom économique puisse survenir en quelques mois. Quoi qu’il en soit, la République islamique d'Iran fait valoir auprès de l’ONU qu’elle n’a pas encore bénéficié pleinement de la levée des sanctions. Quatre raisons majeures, selon les experts, peuvent expliquer pourquoi l’économie iranienne n’est pas à la hauteur des espoirs que nourrissaient les dirigeants du pays. Premièrement, depuis la révolution de 1979, l’Iran a toujours été un pays où il est difficile de mener des affaires. La levée des sanctions dans le cadre de l’accord nucléaire n’a aucun effet automatique à cet égard. L’Iran, par exemple, occupe actuellement le 118e rang de l’indice sur la « facilité à faire des affaires ». Deuxièmement, l’Iran fait encore l’objet de sanctions – sanctions résiduelles liées au nucléaire et autres sanctions, dont celles dues au soutien qu’il apporte à des organisations terroristes, à la situation des droits humains dans le pays, aux missiles balistiques et à la prolifération des armes conventionnelles. Troisièmement, et dans le même ordre d’idée, la menace d’un rétablissement automatique des sanctions pèse également lourd sur les investisseurs extérieurs. Quatrièmement, le faible prix du

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pétrole signifie que l’Iran ne peut espérer, comme il y a quelques années, tirer autant de recettes de ses exportations pétrolières.

56. Quoi qu’il en soit, malgré ces obstacles majeurs, depuis la signature du PAGC, l’Iran a attiré 3,4 milliards de dollars d’investissements étrangers directs, avec plusieurs transactions de valeur élevée à l’horizon. Le département du Trésor états-unien a récemment autorisé les géants de l’aviation, Airbus et Boeing, à vendre à l’Iran des avions civils de transport de passagers. En conséquence, Boeing prévoit de vendre 80 avions pour un montant total de 17,6 milliards de dollars ; Airbus a convenu de vendre 118 avions pour un total de 27 milliards de dollars ; ATR, une société franco-italienne, prévoit aussi de vendre 40 avions turbopropulseurs à l’Iran pour 1 milliard d’euros. Le feu vert donné à la vente d’avions va permettre à l’Iran de commencer à renouveler sa flotte vieillissante. De plus, Peugeot-Citroën se réimplante dans le pays, via une entreprise de partenariat de 400 millions EUR avec un fabriquant automobile iranien. Cette décision est une aubaine, non seulement pour ces entreprises mais aussi pour les hommes politiques iraniens qui se réjouissent à la perspective de développer les relations de l’Iran avec le reste du monde, maintenant que les sanctions liées au programme nucléaire iranien ont été levées.

57. Les exportations pétrolières iraniennes ont atteint 2,3 millions de barils par jour, soit plus du double de la quantité exportée avant la signature du PAGC. Ainsi, en août 2016, l’Iran produisait de nouveau 3,85 millions de barils par jour, soit un nombre tout juste inférieur aux niveaux d’avant les sanctions. Cela étant, il est difficile de voir comment l’Iran peut maintenir le niveau de ses exportations, voire les augmenter. Actuellement, il puise très probablement dans ses réserves pétrolières pour réaliser l’objectif qu’il s’est fixé : exporter, en moyenne, 2 millions de barils par jour. À long terme, l’Iran entend produire 4,6 millions de barils par jour. Or, pour atteindre cet objectif, l’Iran a besoin d’investissements massifs dans son secteur pétrolier. Le gouvernement iranien lui-même a déclaré que le pays a besoin de quelque 50 milliards de dollars d’investissements extérieurs par an pour atteindre ses objectifs. Des investissements dans 28 projets d’exploitation du pétrole et 21 projets d’exploitation du gaz naturel sont nécessaires, de l’aveu même du pays. Si le gouvernement s’efforce de réformer les lois très restrictives en matière d’investissement étranger dans le secteur du pétrole et du gaz, celles-ci constituent toujours un véritable frein aux investissements.

58. Les États-Unis continuent d’imposer des restrictions sévères aux transactions financières en Iran. L’Iran par exemple ne peut avoir accès au système financier états-unien ou utiliser le dollar pour des transactions commerciales, de quelque nature que ce soit. Par ailleurs, les banques qui comptent parmi leurs cadres supérieurs des ressortissants états-uniens ne peuvent pas traiter avec l’Iran. Il serait judicieux que les États-Unis publient des orientations plus claires concernant les sanctions qu’ils maintiennent en vigueur et la façon dont elles sont opérées pour indiquer au système financier international quelle est la position des États-Unis en matière d’application de la loi et quelles sont les règles que doivent respecter les entreprises et les banques.

59. Enfin, c’est au gouvernement iranien qu’il revient d’engager les réformes nécessaires de son secteur économique pour permettre l’investissement, notamment s’agissant des opérations bancaires et des procédures bureaucratiques. Il y a peu de chances que les entreprises, notamment européennes et nord-américaines, fassent des investissements qui demeurent à haut risque en l’absence de telles réformes. Bien que peu probable, une attitude plus positive au sein du pays et sur la scène internationale serait de toute évidence une véritable aubaine pour la santé économique de l'Iran.

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IV. OBSERVATIONS FINALES : COMMENT TIRER PARTI DE L’ACCORD ?

60. En matière de politique internationale, peu de questions ont autant divisé les esprits que l’accord nucléaire iranien. Les fortes pressions exercées pour ou contre l’accord – pendant les négociations et après la signature du PAGC – témoignent de la profonde division que suscite cette question, sur le double plan national et international. Le Plan d’action est loin d’être parfait, mais le résultat obtenu est plus efficace que toute autre solution réaliste et certainement préférable au recours à la force militaire.

61. Plus d’un an après sa signature, l’accord n’a ni répondu aux plus grands espoirs des optimistes, ni réalisé les pires craintes annoncées par ses détracteurs. Cela étant, il est clair que le PAGC a produit des effets largement positifs pour la sécurité internationale. Avant les limites provisoires que le Plan d’action commun de 2013 imposait à l’Iran, le pays possédait plus de 19 000 centrifugeuses (dont plus de 1 000 centrifugeuses de deuxième génération) ; un stock de plus de 9 700 kg d’uranium faiblement enrichi ; plus de 370 kg d’uranium hautement enrichi à 20 % ; un réacteur à eau lourde en voie d’achèvement ; et un programme de recherche-développement avancé en matière de centrifugeuses. Soit bien loin de ce que l’Iran est autorisé à détenir dans le cadre du PAGC. Le rapporteur espère que les détracteurs de l’accord nucléaire dans deux pays clés – l’Iran et les États-Unis – ne le feront pas échouer et ne compromettront pas ce succès important de la diplomatie internationale.

62. L’accord part du principe que l’Iran doit constamment faire la preuve que son programme nucléaire est exclusivement pacifique – dès le début et tout au long de la mise en œuvre du Plan d’action. Les garanties du PAGC et de l’AIEA sont les principaux instruments qui permettent de le contrôler et de le vérifier. Par ailleurs, les services nationaux de renseignement resteront d’une importance cruciale, tout comme ils l’étaient lorsque les activités nucléaires clandestines de l’Iran ont été découvertes pour la première fois. Si l’Iran revient sur ses engagements, la communauté internationale aura toujours à sa disposition les options qui existaient avant le PAGC. Qui plus est, les possibilités offertes par la levée des sanctions sont des mesures positives qui encouragent l’Iran à s’engager pleinement dans la poursuite d’un programme nucléaire exclusivement pacifique. C’est au gouvernement iranien qu’il revient de tirer le meilleur parti de ces nouvelles possibilités. Avec le temps, la communauté internationale devrait devenir plus confiante dans le fait que l’Iran ne cherchera pas à développer des armes nucléaires, permettant ainsi d’éviter d’autres options dont les conséquences pourraient être désastreuses comme la reprise d’activités nucléaires inquiétantes, voire une nouvelle guerre au Moyen-Orient. D’un autre côté, les pays du groupe E3/UE+3 devraient s’acquitter rigoureusement de leurs obligations pour ne pas offrir à l’Iran le moindre prétexte pour violer une quelconque de ses obligations.

63. Il est clair que l’accord nucléaire iranien ne règlera pas tous les problèmes de sécurité dans la région du Golfe et au-delà. En fait, il peut créer d’autres problèmes. Il convient notamment de rassurer les pays inquiets à l’idée que l’Iran peut désormais mener des politiques régionales néfastes. En effet, l’attitude de l’Iran dans la région n’a pas changé de manière notable après la signature de l’accord nucléaire. Pour autant, l’accord nucléaire devrait, pendant au moins dix ans, éloigner le spectre d’un État doté de l’arme nucléaire et présenter aux pays de la région et au-delà une série d’options susceptibles de déboucher sur une dynamique régionale plus stable et plus pacifique.

64. Étant donné l’existence, des deux côtés, de milieux opposés à l’accord nucléaire, il faut, pour en assurer le bon déroulement, faire preuve d’une détermination politique implacable et mettre en avant les bienfaits économiques que peuvent retirer toutes les parties concernées. Le ralentissement de l’économie mondiale est un facteur déterminant pour la recherche de nouveaux marchés. Par conséquent, à moins d’incidents significatifs et intentionnels dans la mise en œuvre de l’accord nucléaire, les gains commerciaux et économiques, à eux seuls, devraient constituer une incitation suffisamment forte pour que l’ensemble des parties prenantes en assurent la mise en œuvre.

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65. Le volume des échanges et des investissements dans les projets d’infrastructures et l’aviation civile – soit des milliards de dollars – devraient permettre à l’Iran, pays ayant fait l’objet de sanctions pendant plusieurs années, de revenir rapidement sur la scène internationale.

66. Dans ce contexte, le retour de l’Iran sur les marchés commerciaux et financiers et les vastes besoins et possibilités que représente ce pays dans divers secteurs pour la reconstruction des infrastructures ainsi que dans le domaine des investissements, notamment des projets de développement dans le secteur du pétrole et du gaz, peut offrir de nouvelles opportunités pour des voisins tels que la Turquie, membre de l’OTAN, et d’autres pays de la région et au-delà, comme en témoigne le flux de délégations qui se sont rendues en Iran ces derniers mois.

67. En outre, l’accord commercial préférentiel conclu entre la Turquie et l’Iran pourrait contribuer à faciliter les échanges et les investissements de pays tiers en Iran. L’environnement favorable aux investissements et sûr du point de vue financier de la Turquie, ainsi que sa fonction de plaque tournante commerciale et de transit pour l’Iran, notamment par rapport à l’hémisphère occidental, pourrait contribuer à minimiser les risques potentiels que représente un investissement direct en Iran vu le climat politique et économique instable qui règne dans ce pays. De tels investissements destinés à l’Iran mais basés en Turquie faciliteraient par ailleurs l’accès au marché turc et autres marchés de la région.

68. Depuis que l’AIEA a fait part de ses inquiétudes quant à une possible dimension militaire du programme nucléaire iranien, la commission des sciences et des technologies est devenue la principale instance parlementaire transatlantique permettant de débattre de la question et d’en suivre l’évolution. Entre 2012 et 2016, la commission a tenu au total huit réunions et adopté un rapport et une résolution sur ce thème. Les travaux de la commission ont contribué à conforter et à renforcer la détermination de la communauté transatlantique de s’opposer à un Iran capable de fabriquer des armes nucléaires et, a fortiori, détenteur de l’arme nucléaire. À mesure que la communauté internationale progresse vers la phase de mise en œuvre du PAGC et de la résolution 2231 du Conseil de sécurité, la commission et l’AP-OTAN continueront à favoriser l’unité transatlantique sur la question du nucléaire iranien.

69. L’avenir du Plan d’action dépendra, dans une large mesure, des résultats des élections présidentielle et législatives qui se dérouleront aux États-Unis, en novembre 2016, et de l’élection présidentielle en Iran, en mai 2017. Absolument rien ne garantit que le consensus international sur le PAGC se maintienne, ses détracteurs dans les deux pays pouvant l’emporter. Le candidat républicain à l'élection présidentielle, Donald Trump, est opposé à l’accord avec l’Iran dans sa forme actuelle, mais reste à savoir s'il l’annulerait ou chercherait à le renégocier dans le cas où il serait élu. En Iran, le guide suprême, l’ayatollah Ali Khamenei, a récemment accusé les États-Unis de ne pas respecter leurs engagements, soulignant la futilité des négociations avec le pays en question. Si un opposant conservateur au Président Hassan Rohani l’emporte, le PAGC pourrait être encore plus menacé.

70. Si le Plan d’action résiste aux élections états-uniennes et iraniennes, il semble moins probable que l’accord soit menacé à brève échéance. Pour autant, la communauté internationale ne doit pas se bercer d’illusions. Les enjeux sont trop élevés. Le PAGC doit continuer à bénéficier de la volonté politique et de l’attention qui s’imposent. Toute tentative de renégocier en profondeur l’accord doit être écartée. La communauté internationale doit aussi veiller à ce que l’Iran ne cherche pas à assouplir les restrictions ou à obtenir des exemptions qui, à la longue, videraient de sa substance le PAGC. Enfin, la communauté internationale doit surveiller de près le comportement de l’Iran. On ne saurait permettre que le PAGC soit pour l’Iran un élément d’une stratégie à long terme de couverture nucléaire.

71. La communauté internationale ayant franchi l’étape de la Date d’application, le temps est venu de tirer parti du processus du PAGC. Le rapporteur souhaite par conséquent présenter une série de recommandations pour mettre à profit l’accord nucléaire.

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A. RENFORCER LE CONTRÔLE ET LA VÉRIFICATION EN IRAN

72. Le Plan d’action global commun et la résolution 2231 du Conseil de sécurité des Nations unies marquent le début d’un dispositif approfondi de contrôle et de vérification. Toutefois, de nouvelles mesures destinées à le rendre plus pérenne doivent être mises en œuvre.

- Financement accru et fourniture de technologies pour l’AIEA : les activités de contrôle et de vérification de l’AIEA en Iran devront s’accompagner du financement et des technologies que nécessitent ces nouvelles responsabilités. La communauté internationale, en particulier le groupe E3/UE+3, devra par conséquent accroître le budget de l’agence ; fournir les technologies de pointe nécessaires ; et convaincre l’Iran d’autoriser l’utilisation de ces technologies.

- Activités rigoureuses de renseignement au niveau national : pour compléter le système de contrôle et de vérification de l’AIEA, les États devront assurer le financement des activités de renseignement menées au niveau national permettant de contrôler d’éventuelles installations nucléaires clandestines ou liées au domaine nucléaire.

- Assurer l’unité de la communauté internationale : la communauté internationale entamant la phase de mise en œuvre pleine et entière des dispositions du PAGC, l’unité deviendra extrêmement importante. La communauté internationale doit exiger de l’Iran qu’il respecte à la fois la lettre et l’esprit du PAGC et de la résolution du Conseil de sécurité 2231. Les dispositions du Plan d’action et de la résolution du Conseil de sécurité ont déjà donné lieu à des divergences de vues et d’autres surgiront immanquablement. Les mécanismes de règlement des différends en vigueur, le bon fonctionnement de la commission conjointe et la Filière d’approvisionnement seront certainement, à un moment ou à un autre, mis à rude épreuve, mais la communauté internationale doit garder à l’esprit l’objectif plus large qui est de veiller à ce que le programme nucléaire iranien demeure pacifique. Il s’agit notamment de discerner les violations techniques et substantielles de l’accord nucléaire. L’unité transatlantique sur les sanctions deviendra alors d’une importance cruciale, l’Europe et l’Amérique du Nord ayant souvent des manières différentes d’envisager les sanctions internationales. Il ne faut pas permettre à l’Iran de tirer parti de ces divergences de vue.

- Entamer des discussions préliminaires sur les mesures de suivi durant les dernières années du PAGC : les membres du groupe E3/UE+3 doivent engager des discussions entre eux mais aussi avec l’Iran, pour assurer la mise en place de nouvelles dispositions permettant de garantir à la communauté internationale que le programme nucléaire iranien restera exclusivement pacifique durant les dernières années du Plan d’action.

B. RENFORCER LE RÉGIME MONDIAL DE NON-PROLIFÉRATION NUCLÉAIRE

73. Après l’échec total de la Conférence d’examen du TNP de 2015, dû aux désaccords insurmontables concernant une zone exempte d’armes de destruction massive au Moyen-Orient, le régime mondial de non-prolifération nucléaire doit absolument être renforcé chaque fois que cela est possible. Grâce au PAGC, plusieurs mesures pourraient y contribuer. Ces mesures pourraient, en partie, également dissiper les craintes que d’autres pays du Moyen-Orient cherchent à mener des programmes nucléaires illicites.

- Accroître le nombre d’États qui appliquent le Protocole additionnel de l’AIEA : Actuellement, 126 États et Euratom appliquent le Protocole additionnel. Vingt pays ont signé un Protocole additionnel mais doivent encore le mettre en vigueur. Si l’Iran avait conclu un Protocole additionnel avant 2002, l’AIEA aurait beaucoup plus facilement détecté des activités non conformes aux obligations de l’Iran au titre du TNP. C’est là un argument que peut invoquer la communauté internationale pour convaincre d’autres États de le signer. En particulier, il faudrait convaincre les nouveaux États nucléaires de le signer et de l’appliquer pour dissiper la crainte qu’ils soient tentés de développer des armes nucléaires.

- Encourager les nouveaux États nucléaires à renoncer à produire de l’uranium hautement enrichi (niveaux supérieurs á 3.67 %) et du plutonium : l’accord conclu avec

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l’Iran montre que les pays seront en mesure de développer des programmes nucléaires avancés sans recourir à la production d’uranium hautement enrichi et de plutonium. Les nouveaux venus dans le club nucléaire, notamment au Moyen-Orient, devraient être encouragés à renoncer à cette production. Du reste, l’Iran a déclaré qu’il était prêt à le faire une fois que les restrictions imposées par le PAGC auront pris fin si d’autres pays de la région s’engagent à en faire autant.

- Encourager les nouveaux États nucléaires à signer des garanties en matière d’approvisionnement en combustible et de reprise du combustible irradié : le principal argument avancé par l’Iran pour construire des installations d’enrichissement de l’uranium est qu’il a besoin de produire du combustible pour ses réacteurs à l'échelle nationale. Les États qui fournissent des réacteurs nucléaires aux nouveaux venus devraient garantir l’approvisionnement en combustible pour toute la durée de vie des réacteurs et assurer la reprise du combustible irradié.

- Encourager les nouveaux États nucléaires à renoncer aux expériences liées aux armes nucléaires : l’Iran a fait valoir qu’un grand nombre des expériences qui ont fait naître des doutes quant à la nature pacifique de son programme nucléaire ont été menées à des fins civiles. Pour éviter toute ambiguïté concernant les programmes des nouveaux venus à l’énergie nucléaire, la communauté internationale devrait encourager les États à déclarer, sur une base volontaire, ces expériences à l’AIEA avant qu’elles ne soient réalisées ou, de préférence, à signer un mémorandum avec l’agence précisant que de telles expériences violeraient l’accord de garanties.

- Indiquer clairement que quitter le TNP entraînera de fortes pénalités : certains ont fait valoir que le fait de renoncer au régime du TNP n’est pas suffisamment pénalisé. La communauté internationale devrait indiquer clairement à tous les États parties que le fait de renoncer aux engagements qu’ils ont pris au titre du TNP entraînera des sanctions rapides et sévères, augmentant ainsi les chances de les en dissuader.

- Obtenir l’entrée en vigueur du Traité d’interdiction complète des essais nucléaires (TICE) : ce traité, adopté en 1996, interdit à tous les États de procéder à des tests d’explosions nucléaires, dans quelque environnement que ce soit. Il n’est toujours pas entré en vigueur étant donné que huit pays n’ont toujours pas ratifié le traité (alors que certains l’ont signé). Le régime de non-prolifération nucléaire recevrait une impulsion considérable si le TICE entrait en vigueur.

C. DÉFENSE ANTIMISSILE BALISTIQUE DE L’OTAN

74. Le Plan d’action global commun réduit considérablement le risque que l’Iran devienne un État doté d’armes nucléaires susceptibles de menacer le territoire des pays membres de l’OTAN. Pour autant, le programme iranien de missiles balistiques se poursuit sans trop d’obstacles. L’OTAN a pour obligation de dissuader et de protéger contre toutes menaces émanant de l’extérieur. Par conséquent, l’OTAN a décidé de mettre au point une capacité de défense antimissile balistique pour protéger les populations, le territoire et les forces des pays européens de l’OTAN. La réalisation rapide de la capacité de défense antimissile balistique de l’OTAN doit demeurer une priorité absolue pour l’Alliance.

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veuillez contacter le directeur de la commission)

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