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La Lettre buissonnière Projet Valorisation de la langue 28 septembre Année 2015, n o 18 Version numérique en couleur sur le site du CAF caf.clg.qc.ca Page 1 Le français, notre accent commun Philippe Nasr, directeur des études La langue française occupe une place de choix dans une instuon d’enseignement supérieur comme le Collège Lionel-Groulx. Au quodien, chacun pose des gestes qui ont pour effet de la mere en valeur, de la chérir, de la diffuser et de la protéger. Ainsi, l’an dernier, un Comité instuonnel de valorisaon de la langue française a été créé. Ce comité s’est doté d’un plan d’acon qui fait actuellement l’objet d’une consultaon dans la communauté. Cee année, la direcon du Collège a accordé un dégagement à trois enseignants – Sylvie Plante et Renée-Claude Lorimier, de Français et André Naud, de Théâtre – en plus de dégager la conseillère péda- gogique Agnès Grimaud, afin qu’ils s’emploient à élaborer des acvités et à concevoir des mesures visant l’amélioraon des compétences du personnel en maère de communicaon orale et écrite, mais aussi en ce qui a trait à l’évaluaon du français. Ces acons s’inscrivent dans la foulée d’une orientaon du ministère de l’Éducaon, de l’Enseignement supérieur et de la Recherche qui souhaite améliorer la maitrise de la langue partout au Québec. Le français, notre accent commun 1 La page des polémiques Pour ou contre le français québécois ? 2 Jeu : les registres de langue 4 Dans ce numéro : Les différentes mesures d’aide et acvités mises en place seront annoncées dans cee Lere buissonnière, qui fait peau neuve dans son nouveau format numérique; le CLG étant un précurseur, nous devançons même le plus grand quodien français d’Amérique… Je vous invite à visiter le site Web « Le français, notre accent commun » dédié à la valorisaon du français au Collège Lionel-Groulx (valorisaonclg.wordpress.com). Vous y découvrirez des ressources ules, de même qu’une animaon constante autour de notre langue. À cee même adresse se trouve le nouveau Service de référence linguisque (SRL), un service d’aide et d’accompagnement offert à tout le personnel du Collège. Vous souhaitez valider une tournure de phrase, mieux saisir le sens d’une expression ou peut-être confirmer le choix d’un mot? Sylvie Plante, enseignante de français, saura vous guider vers les meilleures ressources ou répondre elle-même à votre quesonnement. Dans les prochains mois se déclenchera une consultaon des départements et programmes, par et pour le personnel enseignant, afin d’idenfier les praques et de déterminer les besoins de souen et d’accompagnement, comme la diffusion de grilles de correcon. La direcon du Collège met en place les ouls pour vous soutenir, vous accompagner et vous aider dans l’amélioraon de la maitrise de la langue. Et vous, quelle sera votre contribuon à la valorisaon du français au CLG? Commençons par écrire et parler notre langue dans toute sa beauté!

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Page 1: Année 2015, no 18 La Lettre buissonnière...La Lettre buissonnière a e 28 septembre Année 2015, no 18 ite du a 1Le français, notre accent commun Philippe Nasr, directeur des études

La Lettre buissonnière

Projet Valorisation de la

langue

28 septembre

Année 2015, no 18

Version numérique en couleur sur le site du CAF caf.clg.qc.ca Page 1

Le français, notre accent commun

Philippe Nasr, directeur des études

La langue française occupe une place de choix dans une institution d’enseignement supérieur comme le Collège Lionel-Groulx. Au quotidien, chacun pose des gestes qui ont pour effet de la mettre en valeur, de la chérir, de la diffuser et de la protéger. Ainsi, l’an dernier, un Comité institutionnel de valorisation de la langue française a été créé. Ce comité s’est doté d’un plan d’action qui fait actuellement l’objet d’une consultation dans la communauté. Cette année, la direction du Collège a accordé un dégagement à trois enseignants – Sylvie Plante et Renée-Claude Lorimier, de Français et André Naud, de Théâtre – en plus de dégager la conseillère péda-gogique Agnès Grimaud, afin qu’ils s’emploient à élaborer des activités et à concevoir des mesures visant l’amélioration des compétences du personnel en matière de communication orale et écrite, mais aussi en ce qui a trait à l’évaluation du français. Ces actions s’inscrivent dans la foulée d’une orientation du ministère de l’Éducation, de l’Enseignement supérieur et de la Recherche qui souhaite améliorer la maitrise de la langue partout au Québec.

Le français, notre accent commun 1

La page des polémiques

Pour ou contre le français

québécois ?

2

Jeu : les registres de langue 4

Dans ce numéro :

Les différentes mesures d’aide et activités mises en place seront annoncées dans cette Lettre buissonnière, qui fait peau neuve dans son nouveau format numérique; le CLG étant un précurseur, nous devançons même le plus grand quotidien français d’Amérique… Je vous invite à visiter le site Web « Le français, notre accent commun » dédié à la valorisation du français au Collège Lionel-Groulx (valorisationclg.wordpress.com). Vous y découvrirez des ressources utiles, de même qu’une animation constante autour de notre langue. À cette même adresse se trouve le nouveau Service de référence linguistique (SRL), un service d’aide et d’accompagnement offert à tout le personnel du Collège. Vous souhaitez valider une tournure de phrase, mieux saisir le sens d’une expression ou peut-être confirmer le choix d’un mot? Sylvie Plante, enseignante de français, saura vous guider vers les meilleures ressources ou répondre elle-même à votre questionnement. Dans les prochains mois se déclenchera une consultation des départements et programmes, par et pour le personnel enseignant, afin

d’identifier les pratiques et de déterminer les besoins de soutien et d’accompagnement, comme la diffusion de grilles de correction. La direction du Collège met en

place les outils pour vous soutenir,

vous accompagner et vous aider

dans l’amélioration de la maitrise

de la langue. Et vous, quelle sera

votre contribution à la valorisation

du français au CLG? Commençons

par écrire et parler notre langue

dans toute sa beauté!

Page 2: Année 2015, no 18 La Lettre buissonnière...La Lettre buissonnière a e 28 septembre Année 2015, no 18 ite du a 1Le français, notre accent commun Philippe Nasr, directeur des études

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L’actualité québécoise est régulièrement agitée par des controverses linguistiques. Tantôt on se demande si la langue, malmenée par les textos qui répondent à une exigence continuelle de rapidité, est en voie de dégénérescence ; tantôt encore on s’en prend aux anglicismes qui, sous diverses formes, envahissent la langue française. Parfois aussi, des voix s’élèvent pour critiquer des modes ou des tics de langage : il suffit de penser à la féminisation des noms et à la tendance au « politiquement correct » et à l’utilisation systématique du vocabulaire administratif dans tous les domaines (ainsi les « clients » ont remplacé les « patients » et les « ressources humaines », les travailleurs »). Cette année, dans chaque numéro de la Lettre buissonnière, nous aborderons une polémique en particulier .

Pour ou contre le français québécois ? Renée-Claude Lorimier

Récemment, Anne-Marie Beaudoin-Bégin relançait le débat sur le « français québécois standard » en publiant un essai intitulé La langue rapaillée. Combattre l’insécurité linguistique des Québécois1. Au point de départ, l’ouvrage constitue un pamphlet contre l’hégémonie de la France en matière linguistique et contre sa tendance à nier les variétés régionales du français. Tous les Québécois qui sont allés en France ont certainement fait l’expérience de se sentir jugés pour les termes qu’ils employaient dans diverses circonstances. Cette attitude supérieure des Français, selon elle, remonte au 18e siècle quand les révolutionnaires ont entrepris d’uniformiser la langue parlée sur l’ensemble du territoire français.

Anne-Marie Beaudoin-Bégin déplore que le français soit plus rigide que les autres langues (par exemple, la création des néologismes est beaucoup plus règlementée que dans d’autres idiomes comme l’anglais). Elle plaide en faveur d’une approche moins prescriptive afin que tout écart à la norme hexagonale (soit française) ne soit pas considéré comme fautif. Cette approche plus descriptive reconnaitrait également que, selon les contextes

sociaux, les formes peuvent varier. Selon elle, les dictionnaires ne considèrent que le registre soigné alors qu’il est tout à fait justifié d’avoir recours au registre familier dans la langue parlée.

L’auteure donne quelques exemples pour illustrer son point de vue. Ainsi, plutôt que de condamner l’emploi du mot « brocheuse » comme synonyme d’agrafeuse2, l’auteure réclame que les ouvrages acceptent ce terme dans un contexte familier. Il en va de même pour l’expression « performer ».

Souhaitant vérifier ces affirmations, j’ai constaté que le nom « brocheuse » au sens d’agrafeuse est effectivement considéré comme une « forme inexistante » dans le Multidictionnaire. Cependant, le correcteur Antidote envisage le mot comme un québécisme familier. Quant au verbe « performer », le Multidictionnaire l’analyse comme une impropriété lorsqu’il est utilisé au sens de « briller » ou de « faire bonne figure ». Encore une fois, cependant, Antidote classe le mot parmi les québécismes de bon aloi. Il faut donc conclure qu’Anne-Marie Beaudoin-Bégin s’en prend à certains ouvrages ou à cette manie assez répandue

1 Essai publié aux éditions Somme toute, 2015, 112 pages.

2 En effet, en langage soigné, une brocheuse est un appareil d’imprimerie utilisé pour brocher des livres.

La page des polémiques Renée-Claude Lorimier

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dans la population de chercher constamment des fautes dans le langage d’autrui. Plus loin, l’auteure accuse directement Marie-Eva de Villers, Guy Bertrand et tous les commentateurs linguistiques d’être des puristes trop tournés vers la norme de France.

Dans les faits, l’auteure croit que cette obsession de la correction grammaticale prend sa source dans notre insécurité linguistique. Celle-ci se serait développée au 19e siècle, quand les Québécois, pour se défendre contre l’assimilation à l’anglais, ont cru qu’ils devaient s’aligner sur le modèle hexagonal et bannir tous les « canadianismes » susceptibles de nous détourner de la norme. C’est aussi à cette époque que se serait répandue cette manie de pourchasser les anglicismes pernicieux si fréquents au Québec (calques, faux amis, etc.). Cependant, l’essayiste estime qu’il faut combattre notre propension à l’intolérance linguistique pour éviter que les gens, par découragement, ne se tournent vers une langue jugée plus souple et plus simple : l’anglais. Curieusement, toutefois, la linguiste n’a pas cru bon d’appliquer les recommandations de la nouvelle orthographe, dont l’objectif visait également à simplifier quelques règles complexes.

Même si elle reconnait la nécessité, dans certains contextes, de maitriser le registre soigné, Anne-Marie Beaudoin-Bégin plaide en faveur d’une attitude plus souple par rapport à la langue. À cet

égard, son pamphlet constitue une « défense et illustration » du niveau familier3 : l’essayiste veut redonner à la langue parlée québécoise toute la considération qui lui est due. Pendant les différentes époques de son histoire, le peuple québécois a trouvé différentes stratégies pour communiquer dans sa langue. Ainsi, après la Conquête, il a francisé des termes issus du colonisateur; privé d’une classe bourgeoise, il a intégré des mots de la langue populaire, des coureurs des bois et des paysans. Reprenant le mot du célèbre recueil du poète Gaston Miron, Anne-Marie Beaudoin-Bégin affirme que nous devons être fiers de notre langue « rapaillée »4.

Cette volonté de défendre la spécificité de la langue parlée au Québec s’inscrit dans un mouvement amorcé depuis déjà plusieurs années au Québec et qui cherche à inverser la tradition suivie par les dictionnaires traditionnels en identifiant les régionalismes propres à la France et non ceux du Québec (appelés « québécismes » ou « canadianismes »). Le Dictionnaire québécois d’aujourd’hui (Jean-Claude Boulanger, 1992) et le Grand dictionnaire terminologique de l’OQLF (en ligne) relevaient déjà de cette tendance. Plus récemment, le gouvernement québécois a lancé officiellement le dictionnaire Usito (en ligne), qui est le fruit d’un projet de recherche de l’université de Sherbrooke. Gageons que le débat sera relancé lors de la publication prochaine d’une version papier…

Prolongement

Il est possible d’écouter, sur le site de Radio-Canada radio, un débat entre Anne-Marie Beaudoin-Bégin et Guy Bertrand intitulé « Pour ou contre bon matin et des autres anglicismes? ». Cette discussion a eu lieu lors de l’émission du 8 juin 2015 de Catherine Perrin, Médium large.

3 L’expression est empruntée à l’écrivain Joachim du Bellay qui, en 1549, avait écrit un manifeste en faveur du français.

4 L’Homme rapaillé est le titre complet du livre de Gaston Miron. Contrairement au dictionnaire Robert, le dictionnaire Antidote consacre un article au québécisme « rapailler » …

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Projet Valorisation de la langue

Rédaction : Renée-Claude Lorimier (poste 2863-1)

Sylvie Plante (poste 2362-1) Mise en page : Anne Bouchard (poste 2322)

La Lettre buissonnière, bulletin réalisé dans le cadre du projet Valorisation de la langue, est publié par la Direction des affaires corporatives et des communications du Collège Lionel-Groulx, grâce au soutien de la Direction des études.

Les registres de langue correspondent aux différents usages de la langue selon les contextes d’utilisation. Par exemple, la langue écrite employée dans un travail sera plus soignée que la langue utilisée dans les conversations entre amis. Par convention, on emploie un registre familier dans un contexte relâché, et un registre neutre voire soutenu dans les situations où la familiarité est absente (par exemple, dans une production scolaire).

Comme le souligne Mme Beaudoin-Bégin dans La langue rapaillée, ce sont des normes sociales qui déterminent les registres de langue. Autrement dit, selon les sociétés, les termes considérés familiers peuvent différer. C’est pourquoi il faut faire preuve de circonspection lorsqu’on cherche le niveau de langue d’un mot dans les dictionnaires français, qui reflètent davantage l’usage du français utilisé en France que celui de la langue parlée au Québec.

Jeu : les registres de langue

Renée-Claude Lorimier

Parmi les termes suivants, relevez ceux qui appartiennent à la langue parlée (niveaux familier ou populaire) et ceux qui sont réservés à la langue soutenue.

a) ordi, ordinateur, laptop, portable

b) lab, labo, laboratoire

c) cell., cellulaire, mobile, GSM

d) bedon, ventre, abdomen, bedaine, panse

e) Jasette, causette, pourparlers, tête-à-tête, conversation

f) Piquer (au sens de voler), chaparder, chiper, faucher, dérober, taxer

g) Claquer (au sens de mourir), trépasser, mourir, lever les pattes, périr, s’éteindre, rendre l’âme

h) Fouiner, fureter, fourrager, farfouiller, fouiller

i) Gamin, enfant, bambin, marmot, mousse, flo

Réponses :

a) L’abréviation «ordi» et l’anglicisme «laptop» doivent être proscrits en langage soigné.

b) Les abréviations «lab.» et «labo» sont toutes deux familières.

c) L’abréviation «cell.» et l’acronyme «GSM» (en usage en France) sont de niveau familier.

d) Les mots «bedon», «bedaine» et «panse» sont tous de niveau familier.

e) «Jasette» et «causette» sont de niveau familier.

f ) À l’exception du terme soutenu «dérober», tous ces synonymes sont considérés comme familiers.

g) «Claquer» et «lever les pattes» sont familiers. «Trépasser» et «périr» sont de niveau soutenu.

h) «Fouiner» et «farfouiller» sont considérés comme familiers.

i ) À l’exception du mot «enfant», tous ces termes sont familiers.