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6 RUE DARU 75379 PARIS CEDEX 08 - 01 44 15 30 00 03/09 JANV 11 Hebdomadaire Paris OJD : 927420 Surface approx. (cm²) : 1780 N° de page : 46-48 Page 1/3 FABERT 0394466200501/GPP/OTO/2 Eléments de recherche : FABERT : maison d'éditions, toutes citations Le harcèlement les touche de plus en plus jeunes : dès 6 ans. En France, s'ils sont conscients du phéno- mène, les professionnels peinent cependant à faire reconnaître cette forme d'agression. D'où le lan- cement d'une étude dont les résultats sont attendus fin 2011. Il semblerait tou- tefois que les filles et les garçons soient également concernés, même si les for- mes s'exercent différem- ment. Les garçons utilisent la force, les filles isolent du groupe. Ce qui favo- rise le harcèlement ? Une atmosphère conflictuelle entre les professionnels, du coup peu disponibles pour encadrer les élèves, les lieux peu surveillés (couloirs, cour, certaines salles de classe, toilettes, sortie du collège) et, de- puis peu, le développe- ment des réseaux sociaux, qui échappent au contrôle des adultes et où la rumeur se répand très vite ' Enquête de l'OCDE ARCEL AU COLLEGE, Ce n'est pas qu'une histoire de gosses. Au contraire. Selon la pédopsychialre Nicole Catheline, le harcèlement, fait de lâcheté, de conformisme et d'indifférence, «prospère là où l'adulte se tait». Nicole Colhelinc pédopsychiatre D es résultats scolaires en chute libre, un mal fou à sortir du lit le matin, une attitude fuyante même avec ses copains S'il est pratique d'altnbuer le change- ment de comportement de son enfant à une probable crise d'ado, le harcèlement n'est pourtant pas a exclure Insultes, racket, mo- queries, bousculades, rumeurs, menaces, coups Leschool-bul hing (harcèlement entre élèves) revêt des formes multiples mais se caractérise pourtant par des faits très précis • des sévices ré- pétés, même s'ils ne sont pas quo- tidiens, qui s'mscnvent dans la durée, une répaitition inégale des forces (un individu face à un groupe, un costaud face à un plus chétif ), et surtout la volonté délibérée de nuire. Comment ça se passe exactement? 11 s'agit toujours d'une relation a trois mettant en scène un harce- leur, une victime et un groupe de

AU COLLEGE, - fabert.com · chiatre, praticien hospitalier au CHU de Poitiers. Il s peuvent auss i être en avance sur les jeunes de leur âge, y compris scolairement. La plupart

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6 RUE DARU75379 PARIS CEDEX 08 - 01 44 15 30 00

03/09 JANV 11Hebdomadaire Paris

OJD : 927420

Surface approx. (cm²) : 1780N° de page : 46-48

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Le harcèlement les touchede plus en plus jeunes :dès 6 ans. En France, s'ilssont conscients du phéno-mène, les professionnelspeinent cependant à fairereconnaître cette formed'agression. D'où le lan-cement d'une étude dontles résultats sont attendusfin 2011. Il semblerait tou-tefois que les filles et lesgarçons soient égalementconcernés, même si les for-mes s'exercent différem-ment. Les garçons utilisentla force, les filles isolentdu groupe. Ce qui favo-rise le harcèlement ? Uneatmosphère conflictuelleentre les professionnels,du coup peu disponiblespour encadrer les élèves,les lieux peu surveillés(couloirs, cour, certainessalles de classe, toilettes,sortie du collège) et, de-puis peu, le développe-ment des réseaux sociaux,qui échappent au contrôledes adultes et où la rumeurse répand très vite' Enquête de l'OCDE

ARCELAU COLLEGE,Ce n'est pas qu'une histoire de gosses. Au contraire. Selon lapédopsychialre Nicole Catheline, le harcèlement, fait de lâcheté, deconformisme et d'indifférence, «prospère là où l'adulte se tait».

Nicole Colhelincpédopsychiatre

Des résultats scolairesen chute libre, un malfou à sortir du lit lematin, une attitudefuyante même avecses copains S'il est

pratique d'altnbuer le change-ment de comportement de sonenfant à une probable crise d'ado,le harcèlement n'est pourtant pasa exclure Insultes, racket, mo-queries, bousculades, rumeurs,menaces, coups Leschool-bulhing (harcèlement entre élèves)revêt des formes multiples mais

se caractérise pourtant par desfaits très précis • des sévices ré-pétés, même s'ils ne sont pas quo-tidiens, qui s'mscnvent dans ladurée, une répaitition inégaledes forces (un individu face à ungroupe, un costaud face à un pluschétif ), et surtout la volontédélibérée de nuire.

Comment ça se passeexactement?11 s'agit toujours d'une relation atrois mettant en scène un harce-leur, une victime et un groupe de

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pairs. Comme l'explique le philo-sophe Jean-Pierre Bellon, dansHarcèlement et brimades entreélèves - La face cachée de la vio-lence scolaire (éditions Fabert),« Le school-bullving se distinguedes autres formes de harcèlement(professionnel ou familial) parlefait qu'il est presque toujours unphénomène de groupe. [...] Legroupe semble être l'une desconditions nécessaires à son exis-tence. » Parfaitement visible parles ados, il est en revanche mas-qué aux yeux des adultes.

Est-ce qu'il y a un profiltype de victime?

« Ce sont généralement des jeunessensibles qui présentent des dif-férences : motricité, langage, com-portement, maturité... », analyseNicole Catheline, pédopsy-chiatre, praticien hospitalier auCHU de Poitiers. Ils peuvent aussiêtre en avance sur les jeunes deleur âge, y compris scolairement.La plupart du temps, ils sont plu-tôt isolés, n'ont pas beaucoupd'amis qui pourraient justement

éé J'avais peur d'aggraver ma situationen dénonçant les violences 99Benjamin, 17 ans, harcelé pendant trois ans

J'étais en 5e quand les violences ont commencé. Ça a duré trois ans,jusqu'à mon entrée au lycée. En fait, tout a démarré parce qu'un jouren tant que délégué de classe, j'ai accepté de faire ce qu'un de mesprofesseurs me demandait : accompagner un élève dissipé chez leproviseur. A partir de là, j'ai vécu l'enfer. On me traitait de balance.Et l'élève en question ne perdait pas une occasion de m'humilier. Onm'insultait publiquement ou on m'envoyait des projectiles dans le dospendant les cours. Je voyais aussi des mots circuler et tout le monderigoler. Je n'ai jamais pu en parler à mes parents. J'avais trop peurqu'ils fassent un scandale et que ça aggrave ma situation.

Etourderie, négligence... Je trouvaisque mon fils avait changéJuliette, 45 ans, mère d'un garçon harcelé pendant trois mois

Mon fils aîné n'allait pas très bien depuis quelque temps. Il multipliaitles actes d'étourderie ou de négligence. Comme j'étais peu à lamaison car je venais de changer de travail, je pensais qu'il cherchaità attirer mon attention. Mais, lors d'une dispute entre mes deuxenfants, ma fille a lancé : « De toute façon, il est nul ton fils. A l'école,on l'appelle la victime. » J'ai tout de suite compris qu'il se passaitquelque chose de grave. Mais Martin niait. Impossible de lui extirperla moindre information. Sa sœur m'a raconté les moqueries, leshumiliations, les gifles en cours. La déléguée des parents d'élèvesa organisé une réunion avec le proviseur, qui a minimisé les faits.Aussitôt, j'ai emmené Martin voir une psy pour lui permettre d'éva-cuer. Elle nous a rassurés. Au bout de trois semaines, nous avonsmalgré tout décidé de porter plainte. En confiance, Martin a toutécrit. J'étais anéantie. Comment avions-nous pu passer à côté ?Son agresseur a finalement été sanctionné par un juge. J'ai l'impres-sion que mon fils va bien et que cette expérience l'a fait mûrir.

les protéger. Alors, ils cherchentà plaire à un groupe, par désir des'intégrer, mais leur maladresse(plaisanteries pas drôles ou déca-lées) va les désigner comme vic-times potentielles. Il y a d'ailleurssouvent un déclencheur au har-cèlement : une remarque en classeou devant un groupe d'élèves, laréponse à un professeur, une at-titude perçue comme dédaigneuseou désobligeante...

Qui sont les harceleurs?Ils sont généralement charisma-tiques et à l'aise en collectivité,mais ont souvent eux-mêmes uncompte à régler. Ils ont pu être,plus jeunes, confrontés à la vio-lence. Les harceleurs sont parfoisjaloux (de bons résultats scolaires,de vêtements à la mode... ) ou dé-rangés par une personne diffé-rente qui va, selon eux, dévalori-ser le groupe s'il l'intègre (le gros,

le petit, l'efféminé... ). Autre pointcommun : l'absence d'empathieà l'égard de leur victime. En effet,ils s'avèrent incapables de consi-dérer et de prendre en compte sasouffrance. D'après Nicole Cathe-rine, cela révèle un grave problèmed'éducation, et les parents en sontles premiers responsables. Car lesentiment d'empathie se construitdès l'enfance, quel que soit le ni-veau social de la famille.

Quels signes peuventalerter les parents?Leur attention doit tout de suiteêtre retenue par des retards sys-tématiques au collège, car l'adova emprunter un chemin pluslong, faire des détours pour évi-ter son harceleur. Il peut aussi ou-blier ses affaires (en réalité ellesont peut-être été cassées), semettre en situation d'échec sco-laire (il ne va plus aller en cours

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pour éviter d être confronte a cequi le fait souffinr) et s'isoler L adopeut également perdre sa joie devivre son appétit, le sommeil Etêtre sujet a des somatisationsdiverses maux de ventre detête II devient irritable et fuyantagressif envers ses frères et sœursTout trouble ou changement d attitude récent doit inciter les pa-i ents a interroger leur enfant enposant des questions les plus di-rectes possibles « Est ce qu'ont embête a I école ' Est-ce quequelqu un te fait du mal ? »

Pourquoi le groupelaisse-t-il faire?« L'adolescent veut se différencierde ses pairs mais en même tempsressembler à son groupe d amis »explique le Dr Daniel Marcelli,psychiatre II se construit avecet pai eux, s éprouve et se mesureII craint donc que les autres semoquent de lui et I excluent s'ils oppose au harceleur « On a peurdes repi esailles qu on nous traitede balance confie Manne 1 5 ansC est vrai je plains le mec qui sefait harceler, mais je suis contenteque ça ne soit pas moi » « Le sou-tien a la victime est difficileconfirme Brigitte Cadéac, direc-

é* Je voulaisdéfendre ma sœur,mais elle a refuséque je m'en mêle $9Sabrina, 1 6 ans,

Ma sœur était tout le temps

embêtée au collège Pendant

toute une année scolaire, on

la poussait dans les couloirs,on lui piquait ses affaires Moi

dans la cour, |e voyais aussi

des choses J'avais honte pour

elle Je voulais la défendre, mais

elle ne voulait pas que |e m'enmêle A la maison, |e l'agressais

pour qu'elle réagisse Inconsciem

ment, faurais voulu qu'elle se

mette en colère et qu'elle raconte

a nos parents ce qui se passait

Heureusement, un pur, après

une bousculade dans les couloirs,

elle s'est casse le poignet Très

choquée, elle a tout avoue a ma-

man qui l'a immédiatement

changée d'école Un soulage-ment pour tout le monde, même

si j'aurais préfère qu'elle reste etque les autres soient punis

tnce de la téléphonie au Fil SantéJeunes Les jeunes confient qu'ilspeuvent la soutenir mais pasintervenir Même s ils sontconscients de la nécessité de par-ler a un adulte les élevés disentne pas trouver découle au college Selon eux, les surveillants etprofesseurs ne voient pas ou bienferment les veux » Inquiétant

Quelles conséquencespour l'ado maltraité?Beaucoup de souffrance pour lejeune mal-être msecunte pertede confiance ou d estime de soivoire dépression, fugue ou tenta-tive de suicide Mais les symptomes peuvent apparaître plu-sieui s années après notammentsi personne ne reconnaît la violence et ne sanctionne le coupablé Les auteurs de Harcèlementet brimades entre élevés décriventtrès bien les conséquences du harcelement C'est le cas de Sylvainqui au bout d'une année de mal-traitance, accepte de quitter la fi-liere qu'il a choisie pour une autrevoie moins conforme a ses vœuxafin d échapper a ses bourreauxUne double peine II est contraintde partir, le haï celeur restant dansla place Une décision qui marquera a la fois son existence et savie professionnelle S il est essen-tiel d'accompagner la victime, leharceleur adolescent, adulte endevenir doit aussi être pns encharge, afin de poser une limiteet de lui éviter un avenir de « bourreau » dans son cadre profession-nel ou familial

Comment l'aideret l'accompagner?« II faut a tout prix écouter I enfantsans a pnon ni préjuge prévientNicole Cathelme La pi ession sco-laire est de plus en plus forte etlecolesengidifie Certains adultesminimisent les faits Ceslunehistoire d'enfants , disent ils Si jem en mêle ça va aggraver leschoses C est faux II est impéra-tif de reagir car le harcèlementprospère la ou I adulte se tait »avertit elle Tl est donc vivementconseille d entreprendre une demarche individuelle pour pi otegeila victime comme le harceleur(c est le dépôt de plainte et I mstauration d un dialogue avec lesfamilles en présence d un tiers)et une démarche collective (unereflexion vis a vis du groupe)Le haï celement existe parce queles adultes ont rate quelque chosedans la démarche éducative II fautdonc ouvrir un dialogue et fairede la prévention •

J'ai réalisé que tout le monde savait.Mais personne ne disait rien...Anne, 44 ans, mère d'une fille harcelée pendant une année

Natacha est l'aînée d'une famille

de six enfants Quand elle était en

4e, l'ai reçu un coup de téléphone

de son professeur de français

Elle venait d'intercepter un mot

sur lequel des menaces de mort

étaient proférées a l'encontre de

ma fille Comme Natacha refusait

de m'expliquer, j'ai interroge ses

frères et soeurs Elle était maltraitée

et isolée depuis des mois, essuyant

des insultes pornographiques

J ai aussi découvert une véritable

omerta, orchestrée par trois

garçons de sa classe Tout le col

lege était au courant Et Natacha

s'enfermait dans le silence par

peur des représailles Le proviseur

s'est révèle méprisant, m'expli

quant que les garçons avaient des pulsions sexuelles qu'il était normal

de laisser s'exprimer Devant cette situation inacceptable, |'ai multiplie

les démarches contact avec les associations de parents d'élevés, lettre

au rectorat, dépôt de main courante au commissariat, demande de

changement d'établissement Pour rien L'année survante, ma fille s'est

retrouvée dans la même classe que ses bourreaux Le nouveau direc-

teur adjoint a heureusement accepte de la changer de classe et d'mfor

mer les parents des garçons Un seul a |uge utile de nous présenter

des excuses Natacha a bénéficie de la protection de ses professeurs,

mais elle a passe son année seule sans amis L'entrée en seconde

et le changement d'établissement ont été pour elle le début d'une

nouvelle ère Ma fille est aujourd'hui épanouie et débordante d'ener

gie Si cette affaire est classée, pour nous elle est loin d'être oubliée

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« Harcèlement et brimadesentre élèves, Jean Pierre Bellonet Bertrand Gardette éditionsFabert 2010 20€• Harcèlements à l'école, Nicole

JUUETTEV1ATTE