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EHESS Brèves remarques sur les "Messianismes" de l'Afrique Congolaise Author(s): Georges Balandier Source: Archives de sociologie des religions, 3e Année, No. 5 (Jan. - Jun., 1958), pp. 91-95 Published by: EHESS Stable URL: http://www.jstor.org/stable/30114390 . Accessed: 15/06/2014 08:16 Your use of the JSTOR archive indicates your acceptance of the Terms & Conditions of Use, available at . http://www.jstor.org/page/info/about/policies/terms.jsp . JSTOR is a not-for-profit service that helps scholars, researchers, and students discover, use, and build upon a wide range of content in a trusted digital archive. We use information technology and tools to increase productivity and facilitate new forms of scholarship. For more information about JSTOR, please contact [email protected]. . EHESS is collaborating with JSTOR to digitize, preserve and extend access to Archives de sociologie des religions. http://www.jstor.org This content downloaded from 185.2.32.58 on Sun, 15 Jun 2014 08:16:45 AM All use subject to JSTOR Terms and Conditions

Brèves remarques sur les "Messianismes" de l'Afrique Congolaise

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Brèves remarques sur les "Messianismes" de l'Afrique CongolaiseAuthor(s): Georges BalandierSource: Archives de sociologie des religions, 3e Année, No. 5 (Jan. - Jun., 1958), pp. 91-95Published by: EHESSStable URL: http://www.jstor.org/stable/30114390 .

Accessed: 15/06/2014 08:16

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Braves remarques SUR LES MESSIANISMES

DE L'AFRIQUE CONGOLAISE

QU'IL me soit permis, non de revenir sur des faits deja exposes (1), mais de

presenter a propos de ceux-ci quelques remarques compl6mentaires, de reconsid~rer certains d'entre eux sous un nouvel 6clairage.

Au d~part, une question s'impose. Pourquoi, dans la region congolaise et dans les zones voisines, des peuples proches parents ou lids par d'anciennes rela- tions, soumis i une colonisation et i une action missionnaire de m~me nature, n'ont-ils pas tous r~pondu par des mouvements de caract~re c( messianique ) aux problhmes modernes identiques que doivent affronter leur sociPt6 et leur culture ? Pourquoi le messianisme est-il contrari6 dans sa diffusion, alors que des innova- tions rituelles plus pauvres (2) franchissent les frontibres ethniques, pourquoi certains peuples adoptent-ils ce mode d'adaptation alors que d'autres recourent au syncritisme ?

Pour rechercher quelques 6l1ments de r~ponse, j'opposerai l'exemple des Fang du Gabon cr6ateurs de syncritisme - avec le Bwiti et les innovations religieuses d~rivies - A celui des Ba-Kongo des Congo frangais et belge, anima- teurs de mouvements messianiques depuis plus de trente-cinq ans. A certains 6gards, les deux entreprises sont comparables. Elles brisent d~finitivement la relation sacr~e existant entre le lignage et le culte predominant: celui rendu aux anc~tres, garants de la p~rennit6, de la ficondit6 et de la cohesion du groupe. Elles assurent, i des degris divers, l'intigration d'6l1ments chr~tiens dans un cadre religieux nouveau (6glises congolaises) ou r6nov6 (Bwiti). Par le jeu conjugub de ces deux 6volutions, elles manifestent la tendance h l'effacement du particu- larisme 6troit, apparente aussi dans les rapports iconomiques et sociaux modernes; elles expriment sur le plan du sacr6 un changement (d'extension qui associe

l'organisation de la vie religieuse a des unites plus larges : a la tribu (Fang) ou a un

(1) Of. G. BALANDIER, a Messianismes et Nationalismes en Afrique Noire ,,

Cahiers Inter- nationaux de Sociologie, XIV, 1953, Sociologie Actuelle de l'Afrique Noire, Paris, P.U.F., 1955, p. 417 as., et Afrique Ambigui, Paris, Plon, 1957, ch p. VI.

(2) Comme le Ngol, apparu dans le HBaut-Ogou6 apr~s 1945, qui s'est diffus6 darts une large partie du Gabon et du Moyen-Congo.

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ARCHIVES DB SOCIOLOGIE DES RELIGIONS

cadre historiquement valoris6 (le Congo pour les Ba-Kongo). Nous saisissons ainsi un premier aspect, mais non spdcifique, des mouvements messianiques; ceux-ci r6vilent dans l'ordre des ph~nomines religieux une evolution qui impose la degradation du systime classique - systime qui se caract~risait notamment par sa quasi fermeture et par la petite 4chelle des groupes dont il r~gissait la structure et I'organisation. Mais ce dynamisme qui manifeste, d'une certaine manii~re, une orientation vers l'universel, montre aussi comment s'ophre le passage d'un 4tat de la soci~td oii domine le souci de conformit4 (par soumission i la tradition) i un 4tat oti deviennent plus op~rantes les forces de changement et les impulsions de l'Histoire.

Ces remarques doivent nous conduire i mieux appr6hender, et mieux situer, les diff6rences. Les Fang, ancien peuple conqudrant et tris mobile, n'ont longuement 4tabli avec la terre qu'ils occupent que des relations tris distendues; ils n'ont gui~re impos6 leur empreinte sur le sol; ils n'ont pas cr&6 v~ritablement un pays fang. La situation est tout autre avec les Ba-Kongo. Ceux-ci ont conserve le souvenir prestigieux d'un Royaume qui 4tait leur oeuvre (le Royaume de San- Salvador), qui co'incidait avec un large territoire travers6 et symbolis6 par le fleuve Congo. Au centre de leur systhme social et culturel se trouve le jeu de rapports complexes existant entre le lignage, les anc~tres et la terre. Cette derniire est, sous divers aspects, une equivalence des anc~tres, en mbme temps que sa possession affirme la qualit6 d'homme n6 ( dans le clan ,, la dignit6 d'homme libre. La colonisation a, sans qu'ait intervenu une importante eviction des villageois, entrain6 un sentiment de d~possession - done de frustration en fait de dignitY. A tel point qu'un mouvement (3) (( donnant pour but le rachat du pays ba-kongo et l'obtention de la < citoyennet6 n, connut un succis incontestable dans les dis- tricts voisins de Brazzaville. Mme J. Eberhardt a justement insist6, en traitant du < Messianisme en Afrique du Sud

,, sur ce point essentiel : le Messie est d'abord

celui qui a su restituer les terres que n'affecte plus aucune servitude. La terre promise est celle revue des ancetres; celle oii le < chef couronni n, en pays ba-kongo, intervenait en tant que d~fenseur de son intigrit6 et interm~diaire des hommes du lignage auprbs de la communaut6 des anc~tres. C'est sur un tel module que purent s'6difier les dglises congolaises: la <( paroisse a se substitua aux territoires classiques disloquis et 6miettis, le chef religieux moderne i l'ancien cc chef couronn1 ,.

Les relations valorisdes, celles qui donnent son sens et sa sp~cificit6 B l'agencement social et culturel ba-kongo, se trouvent ainsi r~tablies sous une autre forme et sur la base d'un partage du pays en territoires portant h nouveau la marque du sacra. Un tel enracinement parait bien 6tre une des conditions propices h l'6closion des messianismes. A l'inverse des Congolais, les Fang ont orient4 leurs innovations religieuses dans le mdme sens que les noirs d~racinds et d~paysis: le Bwiti reste proche des manifestations syncritiques 4tudides aux Antilles et au Brisil.

Venons-en B un autre aspect. Si l'on retient le concept de <( culture B thime de culpabilit6 n (guilt-culture des anthropologues ambricains), on peut l'employer Spropos du cas ba-kongo. Les disordres graves de la soci~td sont rapport~s B

un ou plusieurs < coupables a qui reconnaissent leur responsabilit6, I'assument et sa sacrifient pour une remise en 4tat; la confession publique intervient aussi dans des circonstances bien d~termindes en vue du m~me r~sultat. Le Mu-Kongo est done sensibilis6 au fait de ses < fautes a g l'dgard de la societd, apte i les repdrer et soumis aux techniques qui visent i la restauration de l'ordre normal. La Christianisation, ancienne en cette partie de la region congolaise, a accentud cette

(3) Connu sous le nom de Mouvement Amicaliste i.

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MESSIANISMES DE L'AFRIQUE CONGOLAISE

tendance. Une culture telle que celle-ci parait singulibrement en iveil devant toute menace de perturbation; elle sensibilise I'individu 1 l'ins6curitd - rdelle oupr6sumbe. Aussi les bouleversements resultant de la colonisation et l'affaiblissement du respects des obligations coutumibres ont-ils g6n6ralis6 l'inqui6tude. Chacun se sent coupable, responsable du d6sordre resultant de la d6gradation de l'ordre ancien, et menac6 par tous; la multiplication des affaires dites de sorcellerie en t6moigne. Les thdrapeutiques capables de r6sorber I'inqui6tude ont eu alors un large succis : et les prophbtes congolais apparurent d'abord comme des donneurs de confiance. L'adhision qu'ils demandaient - et qui exigeait d'entrde la confes- sion g~ndrale du nouvel adepte - permettait une remise en ordre, une distinction grossibre entre ( bons ) et < mdchants n, entre ceux qui entendaient l'appel et ceux qui ne l'entendaient pas. Cette dichotomie sommaire semblait rem6dier i une confusion jugde dangereuse; elle localisait le mal dont paraissait souffrir le corps social.

Elle se double d'une dichotomie situant les Ba-Kongo vis-a-vis des Europdens et des groupes li6s i ceux-ci. Des couples d'expressions antagonistes la rivblent: Sauveur de la race noire et Christ, opprim6s et oppresseurs, ( enfants orphelins , et d6tenteurs de la puissance matirielle, dlus et damn6s, etc... Cette prise de conscience de l'inf6riorit6 subie, d'une mise en marge du Royaume nouveau fond6 par les Blancs alors qu'il a fallu 6tre exil6 du Royaume des anctres, s'est effectub en milieu urbain. C'est 1 - i Thysville et L6opoldville, au Congo Belge, i Brazza- ville, au Congo Frangais - que la coupure, la ligne de partage, se saisit dans toute sa nettet6. Que cette condition soit n6cessaire B I'tclosion du messianisme, nous en avons la preuve. Des groupes trbs proches parents des Ba-Kongo, mais rest6s i l'abri des grands courants d'influences modernes dans le massif montagneux du Mayombe, n'ont pas it6 r6ceptifs aux mouvements messianiques. Par contre, ces derniers se sont renforc6s i mesure que progressait I'expansion de la ville de Pointe-Noire, peupl6e elle-aussi d'h16ments ethniquement et culturellement parents. La corrl61ation s'impose dans ce dernier cas avec une sorte d'dvidence.

Max Weber, dans son rtude consacr6e au Judaisme Antique, a montr6 comment la conjonction du fait urbain r6sultant de la conqunte et de la situation de < peuple paria ) (4) contribua i l'4closion du messianisme. Le cas congolais peut s'envisager sous ces m6mes aspects : c'est dans les cit6s et it leurs abords que les Ba-Kongo saisissaient le mieux leur double exil : ils s'y trouvaient tent6s, de maniire contradictoire, par le retour i un pass6 id6alis6 et par l'accs total i une civilisation moderne dispensatrice de biens materiels d~sir~s; ils se heur- taient ainsi i une double impossibilitY. L'itude des divers messianismes nigres, et notamment dans le Sud de l'Afrique, rivile cette relation, n6cessaire mais non suffisante, entre de tels mouvements et une situation que caractdrisent un d6ve- loppement moderne plus pouss6, une christianisation intensive et une coupure marqune entre < 6trangers a pr~pond6rants et autochtones.

La vision dichotomique, a l'instant dvoque, ne diffire guire de celle qui se trouve dans de nombreux folklores et au coeur de l'id~ologie militante des rdvolu- tions populaires. Elle r6pond a des besoins de protestation, de refus et d'esp~rance qui sont essentiellement comparables. Mais sa forme chritienne reste i expliquer. Le folklore traditionnel et les mythes associ6s aux anciens rituels n'offraient pas, ou gui~re, d'616ments utilisables : ils incitaient plus i la soumission et i l'accord qu'i la rdvolte et aux actions propres i inflichir le cours de l'Histoire. En fait,

(4) Expression employee par Max Weber dans un sens purement technique - et qui peut se rapprocher de certains des concepts formules par Robert Park : statut minoritaire, situation marginale, etc.

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seul le christianisme a pu permettre la construction de l'iddologie ba-kongo; il l'a inspir~e et lui a fourni les instruments intellectuels qui lui manquaient. Ceci se comprend ais~ment si l'on rappelle le r6le jou6 par l'enseignement mission- naire, jusqu'h une date rdcente, et si l'on precise que les oeuvres sacrbes composlrent presque exclusivement le fonds litt~raire auquel acc6ddrent les premieres g~n&- rations de < lettr~s >. La Bible, traduite en ki-kongo, devint (( le )) livre t partir duquel s'exer~a la pens~e moderne. Elle a apport6 les arguments donnant une efficacit6 8 la critique; elle a permis aux Congolais de r~habiliter, a leurs propres yeux, des modes de comportement apparemment semblables i ceux d6crits par l'Ancien Testament; elle a r6v6l1 la portte rdvolutionnaire de l'action des Pro- phites. Ainsi s'impose l'exemple du messianisme juif et se retrouve la vigueur du christianisme envisag6 i son commencement. Toutes ces remarques restent valables pour les r~voltes sacries apparues en d'autres rigions de l'Afrique Noire : L. Leakey note, g propos des Kikouyou du Kenya, que les ~glises < ind~pendantes n se sont fondies et justifibes en se reportant elles aussi aux textes de l'Ancien Testament. Il ne suffit pas de montrer que le ph~nomine messianique n'apparait que grace a la rencontre de conditions nombreuses - rappel6es lors des observa- tions pr~c~dentes; ii faut insister sur son aspect de rdponse globale et ambigue i une situation ambigue pergue globalement.

L'6volution r~sultant de la colonisation ne s'est pas effectu~e au mbme rythme dans toutes les r~gions du Pays Ba-Kongo; une diversit6 moderne s'est superpos6e

l'ancienne diversit6 qui tenait au fait de migrations non contemporaines, aux incidences de l'isolement et aux rivalitis locales. Aussi peut-on comprendre que le mouvement messianique soit inflhchi de manibres diff~rentes selon les lieux. A la p~riph~rie des zones les plus progressives - c'est-i-dire les districts de Brazzaville et de Boko, du c6td frangais - il parait davantage marqu6 par les thimes et comportements traditionnels; il se pr~sente sous un aspect moins affind. Il reste plus proche du pass& et < s'accroche n aux modules l1gu6s par celui-ci : le prophbte-fondateur y apparait comme un guide r~glant une fuite hors du present pourtant accept~e comme un acheminement vers I'Age d'or. Les liens sacr~s sont r~tablis, la protection retrouv~e et le sentiment de faiblesse doming - a tel point que le fiddle se croit i l'abri de toute menace mat~rielle et immat~rielle. Le chef de l'tglise a reconstruit un ordre avec des proc6dds anciens, mais sur des bases nouvelles parce que d~bordant largement les ~troites frontibres classiques; un ordre d'autant plus valoris6 et plus prometteur qu'il a eu ses persecutes et ses martyrs. Dans les regions i dvolution plus poussde, le mouvement messianique rompt plus nettement avec le pass6 : son module d'aminagement social est l'4glise missionnaire, son champ d'action cherche a coincider avec le prestigieux Royaume de Congo, sa doctrine s'inspire de la Bible. Une soci~td nouvelle tente de se construire : une thdocratie appuyde sur une hi6rarchie politico-religieuse et sur une organisation sacr6e du territoire - recouvrant I'organisation classique d6membr6e. Le fondateur s'efforce de redonner vigueur au pouvoir indigane en le re-centralisant et en le re-sacralisant et, pour atteindre ce but, il s'appuie sur une minorit6 de fiddles au prosdlytisme conquirant. II apparait comme le cr6ateur d'un Royaume longtemps attendu. Il met en mouvement les forces du nationa- lisme sacrd.

Ces diverses < voies i t l'int6rieur du messianisme congolais rendent inefficace tout mode d'explication unique et unilat6ral. D'autant plus que le mouvement est affect6 par les incompatibilitis et les contradictions particulibres i une soci6td dont les structures se transforment radicalement. Il est nd avec la montde de la premibre g6ndration < moderniste n, celle d'aprbs la premibre guerre mondiale : ses animateurs se sont aussit6t heurtis aux puissances traditionnelles. Il se veut unitaire, mais est contrarid par l'existence de particularismes encore agissants

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MESSIANISMES DE L'AFRIQUE CONGOLAISE

et par les competitions pour le pouvoir qui se multiplient. II entreprend une remise < A jour )) de la soci~t6 ba-kongo, mais sur une base exclusivement religieuse, alors que le d6veloppement iconomique et politique et I'dducation moderne << dfsacralisent D de larges secteurs de la societY. Il donne aux <c elus a les moyens d'acc~der au lointain Royaume de Dieu - et des ancftres rassembl~s, mais il veut aussi que le Royaume soit de ce monde et riche des biens convoitis.

Les messianismes africains sont, par 1-m~me, mouvants, porteurs de multi- ples possibles. Ils peuvent se maintenir sur le plan de l'innovation essentiellement religieuse. Ils peuvent servir de refuge aux opposants c totaux )) - comme ce fut le cas en C6te-d'Ivoire apris le changement d'orientation politique du R.D.A. (5), on au contraire perdre leur combativit6 si un mouvement politique les contr6le et triomphe - comme il advint au Congo frangaise avec l'intervention et les succis blectoraux de l'abb6 Fulbert choisi en tant que nouveau symbole d'unit6 et de renaissance. Au ddpart, cependant, leur signification n'est pas 4quivoque. Ils rivilent la prise de conscience d'un peuple qui se voit sans pass6 et sans avenir, qui rtagit contre les atteintes a sa dignitY. Ils expriment un besoin passionn6 de changement; et parce qu'ils affirment le caractbre universel de la dignit6 humaine, ils acheminent vers I'universel.

Georges BALANDIER.

Ecole Pratique des Hautes Etudes (Paris).

(5) Les 4glises n4es du Harrisme, et resties sur place, out requ un nouvel apport de fiddles lorsque le R.D.A. (Rassemblement D4mocratique Africain) a normalis6 ses rapports avec l'administration.

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