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Chirurgie des malformations du thorax JP Chavoin JL Grolleau B Lavigne D Darbas M Dahan P Pomard R é s u m é. Les malformations congénitales de la paroi thoracique sont dominées par la fréquence du thorax en entonnoir, le thorax en carène venant en deuxième position. L’absence de troubles fonctionnels cardiaques ou respiratoires, l’aggravation progressive de la malformation au cours de la croissance, sont les raisons qui font choisir de plus en plus au chirurgien, qu’il soit plasticien, pédiatre ou thoracique, la solution du comblement par endoprothèse sur mesure. Cette technique semble préférable et moins agressive que les techniques radicales d’ostéochondroplastie modelante ou de résection du plastron sternochondral avec remplacement par plaque prothétique. Les différentes formes cliniques des malformations thoraciques sont décrites et illustrées ainsi que leur retentissement psychologique parfois très important et seule indication véritable de cette correction, purement morphologique. Les modalités techniques de réalisation de l’endoprothèse sur mesure sont détaillées ainsi que les techniques de mise en place en position rétromusculaire selon la forme clinique et le sexe. La mise en place en position rétropectorale et la qualité de l’endoprothèse sont à l’origine de l’amélioration des résultats cosmétiques. Dans un avenir proche, la réalisation de maquettes par prototypage rapide à partir d’image scanner 3D apportera une précision que ne peut donner le moulage externe. La simplicité de cette intervention, la facilité de sa réalisation grâce à un travail multidisciplinaire apportent des résultats presque constamment satisfaisants en l’absence de morbidité, les seuls inconvénients postopératoires étant les épanchements de Morel-Lavallée assez fréquents et une gêne mécanique dans les efforts extrêmes du fait de la largeur ou de la lourdeur de l’endoprothèse. Introduction Les malformations congénitales du thorax sont largement dominées par le thorax en entonnoir également appelé pectus excavatum. Il s’agit d’une malformation complexe intéressant le plastron Jean-Pierre Chavoin : Professeur des Universités, chirurgien des Hôpitaux. Jean-Louis Grolleau : Praticien hospitalier universitaire. Bruno Lavigne : Chef de clinique, assistant des Hôpitaux. Didier Darbas : Kinésithérapeute. Service de chirurgie plastique, centre hospitalier universitaire de Rangueil, 1, avenue Jean-Poulhès, 31054 Toulouse cedex, France. Marcel Dahan : Professeur des Universités, chirurgien des Hôpitaux, service de chirurgie thoracique, centre hospitalier universitaire de Purpan, Place du Docteur- Baylac, 31059 Toulouse cedex, France. Philippe Pomard : Praticien hospitalier universitaire, laboratoire de prothèses, faculté de chirurgie dentaire, 35, chemin des Maraîchers, 31400 Toulouse, France. Toute référence à cet article doit porter la mention : Chavoin JP, Grolleau JL, Lavigne B, Darbas D, Dahan M et Pomard P. Chirurgie des malformations du thorax. Encycl Méd Chir (Elsevier, Paris), Techniques chirurgicales – Chirurgie plastique reconstructrice et esthétique, 45-671, 1998, 12 p. sternocostal : elle est caractérisée par une dépression médiane à grand axe vertical parfois latéralisée, touchant la deuxième partie du sternum, invaginant les cartilages de la troisième à la huitième côte. Le thorax en carène ou pectus carinatum est dix fois moins fréquent. Il se caractérise au contraire par une protrusion médiane du sternum et de la partie médiane des cartilages costaux, associée à une dépression latérale des mêmes cartilages, créant une concavité le plus souvent bilatérale et symétrique. La plupart des auteurs modernes s’accordent à dire que les malformations congénitales du thorax n’entraînent pas, le plus souvent, de gêne fonctionnelle. En cela elles se distinguent fondamentalement des malformations congénitales de la face et des membres. Ainsi le plus souvent attendra-t-on la fin de la croissance pour corriger ces malformations de façon à éviter le retentissement psychologique et les troubles de la statique dorsale. S’agissant d’une correction morphologique, voire esthétique, la tendance est de préférer les techniques de comblement par endoprothèse sur mesure aux techniques radicales modifiant ou supprimant le plastron sternocostal malformé. 45-671 ENCYCLOPÉDIE MÉDICO-CHIRURGICALE 45-671 © Elsevier, Paris

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Chirurgie des malformationsdu thorax

JP ChavoinJL Grolleau

B LavigneD DarbasM Dahan

P Pomard

R é s u m é. – Les malformations congénitales de la paroi thoracique sont dominéespar la fréquence du thorax en entonnoir, le thorax en carène venant en deuxièmeposition.L’absence de troubles fonctionnels cardiaques ou respiratoires, l’aggravationprogressive de la malformation au cours de la croissance, sont les raisons qui fontchoisir de plus en plus au chirurgien, qu’il soit plasticien, pédiatre ou thoracique, lasolution du comblement par endoprothèse sur mesure. Cette technique semblepréférable et moins agressive que les techniques radicales d’ostéochondroplastiemodelante ou de résection du plastron sternochondral avec remplacement par plaqueprothétique.Les différentes formes cliniques des malformations thoraciques sont décrites etillustrées ainsi que leur retentissement psychologique parfois très important et seuleindication véritable de cette correction, purement morphologique.Les modalités techniques de réalisation de l’endoprothèse sur mesure sont détailléesainsi que les techniques de mise en place en position rétromusculaire selon la formeclinique et le sexe. La mise en place en position rétropectorale et la qualité del’endoprothèse sont à l’origine de l’amélioration des résultats cosmétiques.Dans un avenir proche, la réalisation de maquettes par prototypage rapide à partird’image scanner 3D apportera une précision que ne peut donner le moulage externe.La simplicité de cette intervention, la facilité de sa réalisation grâce à un travailmultidisciplinaire apportent des résultats presque constamment satisfaisants enl’absence de morbidité, les seuls inconvénients postopératoires étant lesépanchements de Morel-Lavallée assez fréquents et une gêne mécanique dans lesefforts extrêmes du fait de la largeur ou de la lourdeur de l’endoprothèse.

Introduction

Les malformations congénitales du thorax sont largement dominéespar le thorax en entonnoir également appelé pectus excavatum. Ils’agit d’une malformation complexe intéressant le plastron

Jean-Pierre Chavoin : Professeur des Universités, chirurgien des Hôpitaux.Jean-Louis Grolleau : Praticien hospitalier universitaire.Bruno Lavigne : Chef de clinique, assistant des Hôpitaux.Didier Darbas : Kinésithérapeute.Service de chirurgie plastique, centre hospitalier universitaire de Rangueil, 1, avenueJean-Poulhès, 31054 Toulouse cedex, France.Marcel Dahan : Professeur des Universités, chirurgien des Hôpitaux, service dechirurgie thoracique, centre hospitalier universitaire de Purpan, Place du Docteur-Baylac, 31059 Toulouse cedex, France.Philippe Pomard : Praticien hospitalier universitaire, laboratoire de prothèses, facultéde chirurgie dentaire, 35, chemin des Maraîchers, 31400 Toulouse, France.

Toute référence à cet article doit porter la mention : Chavoin JP, Grolleau JL,Lavigne B, Darbas D, Dahan M et Pomard P. Chirurgie des malformations duthorax. Encycl Méd Chir (Elsevier, Paris), Techniques chirurgicales – Chirurgieplastique reconstructrice et esthétique, 45-671, 1998, 12 p.

sternocostal : elle est caractérisée par une dépression médiane àgrand axe vertical parfois latéralisée, touchant la deuxième partiedu sternum, invaginant les cartilages de la troisième à la huitièmecôte.

Le thorax en carène ou pectus carinatum est dix fois moins fréquent. Ilse caractérise au contraire par une protrusion médiane du sternum et dela partie médiane des cartilages costaux, associée à une dépressionlatérale des mêmes cartilages, créant une concavité le plus souventbilatérale et symétrique.

La plupart des auteurs modernes s’accordent à dire que lesmalformations congénitales du thorax n’entraînent pas, le plussouvent, de gêne fonctionnelle. En cela elles se distinguentfondamentalement des malformations congénitales de la face et desmembres. Ainsi le plus souvent attendra-t-on la fin de la croissancepour corriger ces malformations de façon à éviter le retentissementpsychologique et les troubles de la statique dorsale. S’agissant d’unecorrection morphologique, voire esthétique, la tendance est de préférerles techniques de comblement par endoprothèse sur mesure auxtechniques radicales modifiant ou supprimant le plastron sternocostalmalformé.

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Historique

Les malformations thoraciques seraient connues depuis Hippocrate maisc’est Bauhinus, en 1594[1], qui publia en latin la première observationd’un pectus excavatum chez un enfant de 7 ans, notant déjà le caractèrefamilial de cette malformation.

En 1860, un auteur anonyme décrit, dans laGazette des hôpitaux deParis, le cas d’un étudiant étranger et compare pour la première foiscette anomalie à un entonnoir. Ce terme est repris par Ebstein en1882.

Au début duXXesiècle, les hypothèses étiopathogéniques se multiplientainsi que les premières tentatives chirurgicales de Meyer[19]. Cestentatives sont grevées d’une lourde mortalité. Les années qui suivent laDeuxième Guerre mondiale, grâce aux progrès de l’anesthésie moderne,voient fleurir une multitude de techniques radicales modifiant le plastronsternocostal. Chaque auteur insiste toujours sur la qualité des résultatsfonctionnels autant qu’esthétiques. L’apparition des implants desilicone est favorisée par l’essor des prothèses mammaires pourhypotrophie. S’agissant chez l’adulte d’une malformation purementesthétique, Murray, en 1965[20], fut le premier à utiliser une prothèsepréformée de silicone placée en sous-cutané pour le comblement d’unthorax en entonnoir.

Bases anatomocliniques

Anatomie normale– La face antérieure de la cage thoracique est limitée de chaque côté parles angles antérieurs des côtes. Inclinée de haut en bas et d’arrière enavant, cette face antérieure s’élargit graduellement de haut en bas. Elleprésente au milieu le sternum, composé de trois éléments : lemanubrium, le corps ou gladiolus et l’appendice xiphoïde. Sur les côtés,on trouve les cartilages costaux et la partie antérieure des huit à neufpremières côtes.

– Les insertions du muscle grand pectoral s’entrecroisent sur la facemédiane du sternum avec celles du muscle controlatéral. Les autresinsertions se font sur la face antérieure des troisième, quatrième,cinquième et sixième cartilages costaux, sur la partie osseuse de laseptième côte ainsi que sur le feuillet antérieur de la gaine des musclesgrands droits de l’abdomen.

– Le recouvrement cutané de cette région est caractérisé sur la lignemédiane par la faible épaisseur du plan hypodermique et une absence deréserve et d’élasticité dermique, sources de risque cicatriciel.

Aspect anatomoclinique du thorax en entonnoir

Le thorax en entonnoir (pectus excavatum,funnel chest, Trichterbrust,thorax embudo) est la plus fréquente des malformations congénitales dela paroi thoracique. Il s’agit d’une malformation complexe intéressantle plastron sternocostal. Elle est caractérisée par une dépression à grandaxe vertical, généralement médiane, plus ou moins profonde etsymétrique. Elle touche la deuxième partie du sternum (corps ougladiolus), invaginant les cartilages depuis la troisième jusqu’à lahuitième côte. Les auvents costaux se trouvent surélevés.

L’entonnoir est ainsi caractérisé par l’enfoncement du sternum,entraînant avec lui des cartilages costaux vers l’intérieur de la cagethoracique (fig 1).

On lui décrit :

– un fond formé par le mésosternum à la jonction sternoxiphoïdienne ;

– une berge supérieure représentée par la jonction entre le manubriumet la deuxième pièce sternale ;

– une berge inférieure formée par la paroi abdominale antérieure ;

– des berges latérales : plus ou moins écartées selon les types demalformations.

La rétropulsion sternale entraînant les cartilages costaux détermine unéperon intrathoracique. Le sternum, dans certaines formes trèsmarquées, peut aller jusqu’au contact du rachis dorsal.

Les formes cliniques ont fait l’objet de plusieurs classifications : laclassification de Chin[6], établie à partir d’une série de 54 patients, estproche de celle de Garnier[9]. Elle a pour avantage d’être simple et deprendre en compte le degré d’asymétrie que peut présenter le thorax enentonnoir.

– Type I : il réalise une déformation étroite et symétrique. L’angulationdes cartilages costaux est aiguë mais ne dépasse pas la ligne mammaire(fig 2).

– Type 2 : la déformation, toujours symétrique, est plus large que laprécédente et franchit la ligne mammaire. L’inclinaison des cartilagesse fait en pente douce jusqu’au sternum (fig 3).

– Type 3 : il s’agit des formations asymétriques ou unilatérales. Ladépression peut être étendue ou localisée, s’accompagnant d’unerotation sternale (fig 4).

1 Aspect anatomoclinique du thorax en entonnoir.1. Cyphose ; 2. épaule en antépulsion ; 3. berge supérieure (angle de Louis) ; 4. fond ;5. berge inférieure ; 6. protrusion abdominale.

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2 Thorax en entonnoir du type I de Chin : étroit et symétrique.

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A B3 Thorax en entonnoir de type II de Chin : large et symétrique.

A B4 A. Thorax en entonnoir de type III de Chin : asymétrique. B. Correction avec double implant thoracique et mammaire.

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Aspect anatomoclinique du thorax en carène

Le thorax en carène (pectus carinatum, thorax en bréchet,pigeon breast,chicken breast) est dix fois moins fréquent que le pectus excavatum. Ilest caractérisé par une protrusion thoracique antérieure médiane centréepar le sternum et associée à deux dépressions latérales.

Brodkin [4] décrit deux types de thorax en carène :

– la forme chondrogladiolaire (fig 5) avec projection antérieure de lapartie basse du thorax correspondant au corps du sternum. La xiphoïdeest alors le point le plus proéminent du thorax. La dépression latéraleassociée peut être à l’origine d’une perte de capacité pulmonaire. C’estla forme la plus fréquente ;

– la forme chondromanubriale (fig 6) correspond à une projectionantérieure du manubrium et des premier et deuxième cartilages costauxadjacents. Le corps du sternum est vertical ou parfois dirigé en arrière.

Étiopathogénie

La pathogénie exacte des malformations thoraciques congénitales, et enparticulier du thorax en entonnoir et en carène, est encore mal élucidée.De nombreuses hypothèses ont été avancées mais aucune n’a pu êtreprouvée.

– La théorie des troubles de la mécanique ventilatoire est basée sur larétraction sternale paradoxale chez les nourrissons lors de l’inspiration,due à la flexibilité de la cage thoracique : le modelage anormal de la cagethoracique se ferait progressivement avec la croissance[8, 25].

– La théorie de la traction diaphragmatique par un ligament rétrosternal,émise par Brown[5], est également abandonnée.

– La théorie de l’hyperplasie chondrocostale, émise en 1937 parOmbredanne, est à l’heure actuelle la plus communément admise par denombreux auteurs[8, 9, 15, 16, 23, 35].

Ombredanne fut le premier à considérer qu’une croissance excessive descôtes et des cartilages puisse être à l’origine des déformations duplastron sternochondrocostal. Les cartilages trop longs repousseraientle sternum. Un excès de croissance de la partie antérieure des cartilagesrepousserait le sternum en arrière (thorax en entonnoir) (fig 7), alorsqu’un excès de croissance postérieure des cartilages repousserait lesternum en avant (thorax en carène) (fig 8). Plusieurs arguments plaidenten faveur de cette théorie :

– la coexistence de thorax en entonnoir et de thorax en carène dans lamême famille, voire chez le même patient ;

– l’aggravation de la déformation au cours de la croissance, et enparticulier au moment de la poussée pubertaire ;– la récidive postopératoire, lorsque l’intervention a été pratiquée chezles enfants avant la puberté ;– la présence de déformation du plastron sternochondrocostal chez lespatients atteints du syndrome de Marfan. Cette constatation permetd’extrapoler à l’arc costal le processus qui atteint les os longs ;– un nombre important d’auteurs accréditent cette théorie.Cependant, rien à ce jour ne peut expliquer cette hypercroissance descartilages costaux.

5 Thorax en carène : forme chondrogladiolaire (basse) avec dépression en cuvettede l’auvent costal.

6 Thorax en carène : forme chondromanubriale (haute).

7 L’excès de croissance de la partie antérieure des cartilages costaux repousse lethorax en arrière (thorax en entonnoir).

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8 L’excès de croissance de la partie postérieure des cartilages costaux repousse lesternum en avant (thorax en carène).

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Retentissement fonctionnelet psychologique

Les malformations thoraciques constituent le plus souvent une disgrâcephysique sans manifestations fonctionnelles associées. Néanmoins, ilest incontestable que le thorax en entonnoir peut entraîner des troublesdu développement, des signes fonctionnels cardiaques et respiratoires,quoique sans conséquences, et que sa répercussion sur le comportementest quasi constante.

Troubles du développement

Les patients sont plutôt grands et ne présentent jamais d’excès pondéral.Ils ont souvent une attitude voûtée, cyphotique, les épaules sont déjetéesen avant et en bas, les omoplates sont saillantes, la sangle abdominaleest relâchée. Cette attitude d’« enroulement » autour de la déformation apour but inconscient de la cacher : il ne s’agit pas d’une déformationfixée, elle doit être corrigée par l’exercice physique et sportif sansrestriction, voire par la rééducation fonctionnelle.La glande mammaire est souvent déformée par la malformationsous-jacente :– fausse hypoplasie dans les formes latérales (fig 9) ;– strabisme convergent dans les thorax en entonnoir (fig 10) ;– divergence dans les thorax en carène.

Retentissement cardiaque

Selon Tourniaire[32], la dépression sternale peut ne pas modifiersensiblement l’espace sternorachidien : la position du cœur etl’électrocardiogramme sont peu modifiés et l’hémodynamique demeurenormale.Si la dépression sternale rétrécit l’espace sternorachidien :– ou bien le cœur effectue un déplacement vers la gauche : il échappe àl’étreinte sternale. Il existe des signes radiologiques etélectrocardiographiques mais l’hémodynamique droite est normale.C’est la situation la plus fréquente selon Vetillard[33] ;

– ou bien le cœur est pris dans la pince sternale et la compression peutentraîner des modifications hémodynamiques droites.S’il existe une symptomatologie propre, c’est en raison d’une positionanatomique anormale et non d’une fonction insuffisante.

Retentissement respiratoire

Les dépressions sternales n’entraînent que dans de rares cas unehypoventilation alvéolaire et n’aboutissent pas au cœur pulmonairechronique[8].

L’exploration fonctionnelle respiratoire montre une capacité vitaleproche de la normale[33].

Le rapport volume expiratoire maximal-seconde/capacité vitale(VEMS/CV) est normal ainsi que la ventilation totale, le volume courantet la gazométrie[32].

Retentissement psychologique

Si le retentissement fonctionnel sur le cœur et le poumon est considérécomme négligeable par tous les auteurs modernes, les conséquencespsychologiques du thorax en entonnoir sont, en revanche, trèsimportantes.

Cette anomalie physique profondément ressentie dès la deuxièmeenfance peut entraîner une inhibition, un sentiment d’angoisse, demalaise intérieur.

Ainsi s’explique le ralentissement « vital » de cet enfant qui limite sonactivité physique, se replie sur lui-même au sens propre et au sens figuré.Cette limitation accentue la déformation thoracique.

Ces troubles prénévrotiques peuvent être renforcés par les réactions del’entourage : l’hyperprotection et la commisération des parents lui fontmieux sentir sa différence autant que l’attitude moqueuse des camaradesde classe.

La suppression chirurgicale de ce facteur névrotisant de base paraît donccapitale.

Les efforts conjugués des cardiologues et des pneumologues ontdémontré que le préjudice essentiel de cette déformation tenait à sonretentissement psychologique. Les désordres cardiorespiratoires ne sontpratiquement jamais le fait du thorax en entonnoir ; ils justifientexceptionnellement à eux seuls une intervention correctrice avant la finde la croissance.

Traitements chirurgicaux

Nous passerons rapidement sur les techniques mineures pratiquementabandonnées chez le nourrisson. Nous ferons un rappel des techniquesradicales de sternochondroplastie modelante, classiques enchirurgiethoracique, puis nous développerons dans un troisième chapitreles techniques de comblement, en particulier à l’aide d’un implantd’élastomère de silicone réalisé sur mesure et mis en place en positionsous-cutanée, ou mieux, rétropectorale.

9 Fausse hypoplasie mammaire droite en relation avec une forme latérale (type III)de thorax en entonnoir.

10 Avec le thorax en entonnoir, les seins peuvent être affligés d’un strabismeconvergent.

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Techniques mineures

Ce sont les techniques de traitement du thorax en entonnoir de l’enfant.Les résultats sont insuffisants, les échecs fréquents[9]. De plus, beaucoupde thorax en entonnoir chez le jeune enfant ne sont pas évolutifsultérieurement : 50 % disparaissent spontanément avant l’âge de6 ans[11, 26].Nous citerons pour mémoire :– la libération sous-sternale de Brown[2] ;– la laparoplastie de Garnier ou cure de diastasis[9] ;– la résection du sommet de l’entonnoir ;– l’association des deux dernières interventions.Toutes ces techniques de chirurgie néonatale sont fort heureusementabandonnées.

Interventions radicalesCe sont les sternochondroplasties. Elles permettent un remodelagechirurgical du plastron sternocostal, afin de lui donner une forme aussiproche que possible de la normale. Elles sont réalisées par un chirurgienthoracique, pour le pectus excavatum ou le pectus carinatum dans leursformes majeures.

Interventions sur le thorax en entonnoirOn classe les sternochondroplasties en trois groupes :– par retournement du sternum ;– par relèvement du plastron ;– par résection du plastron sternocostal.

Sternochondroplastie par retournement

Lexer (rapporté par Hoffmeister en 1927[10]) réalisa les premiersretournements dont la technique fut bien précisée par Ochsner et DeBakey en 1939[21]. Cette technique fut diffusée en France par Judet[13] etreprise par Santy dans les années 1950[28].D’abord pratiquée en extrapériosté, l’intervention est simplifiée pourcomporter des résections sous-périostées et sous-périchondrales.Le sternum est totalement libéré de la xiphoïde, des cartilages costaux etdu manubrium.Il est retourné à 180° et peut être remodelé si nécessaire pour éviter unedéformation saillante en carène.Il est fixé dans sa nouvelle position, par des fils non résorbables, auxcôtes et au manubrium. La lame périostée antérieure ainsi que lesmuscles pectoraux sont suturés au plastron.Les complications sont en relation avec la dévascularisation totale ducorps du sternum : pseudarthrose, ostéite chronique, ostéonécrosemassive.Jung[14] perfectionne donc la technique en proposant un retournementsternal pédiculé sur les muscles grands droits de l’abdomen qui subissentune forte torsion.Tagushi[30] et Ishikawa[12] arrivent à conserver les deux pédiculesmammaires internes au cours de cette torsion.

Sternochondroplastie par relèvement

Elle est à la base de la plupart des techniques actuelles : décrite parRavitch[24], elle a fait l’objet de nombreuses variantes, notamment enmatière de moyens de fixation.L’incision cutanée est verticale chez l’homme, bi-sous-mammaire chezla femme.Après avoir désinséré tous les muscles de la partie antérieure du thorax,on expose le plastron jusqu’au bord de la cuvette (côtes latéralement,sternum en haut et xiphoïde en bas). La table antérieure du sternum estcreusée par une tranchée en T. Latéralement, les côtes sont réséquées aubord de la cuvette avec résection cunéiforme. En fin de mobilisation, leplastron est mou et maintenu en haut par la barre horizontale du T etlatéralement par les espaces intercostaux[7].L’ostéosynthèse est assurée par au moins deux tiges avec agrafes àglissières de Borrelly[3]. Elles sont fixées latéralement et passent sous le

plastron sternal. Les rebords cartilagineux costaux sont fixés au sternumpar des fils transfixiants non résorbables.La fermeture se fait sur un drain rétrosternal et un ou deux drainspleuraux, après couverture du plastron par les muscles désinsérés.

Sternochondroplastie par résection

Elle consiste à enlever totalement le plastron sternocostal déprimé. C’estla première technique utilisée par Meyer en 1911[19]. La régénération sefaisait spontanément puisque le périoste et le périchondre étaientsoigneusement conservés. Ces interventions étaient grevées d’unelourde mortalité en l’absence, à l’époque, des moyens actuelsd’anesthésie et de réanimation.

Dahan a proposé la résection suivie, comme pour les tumorectomiespariétales, d’une reconstruction par prothèse[7].

Toute la cuvette sternocostale est réséquée jusqu’au bord et en bloc.

Après avoir baissé le billot, on reconstitue l’arche thoracique antérieurepar une série d’agrafes à glissières de Borrelly reliant les côteshomologues. Une toile de polytétrafluoroéthylène (Gore-text) de 1 mmd’épaisseur est tendue sur les bords de l’exérèse et fixée par une série depoints aux côtes, aux espaces intercostaux, au sternum et aux agrafes.Du ciment (méthylméthacrylate) est enfin coulé au niveau du plastronréséqué en respectant les espaces intercostaux.

Interventions sur le thorax en carène

Il existe de très nombreuses variantes des techniques de sternochon-droplastie pour thorax en carène. Nous les séparerons en deux groupessuivant le type de malformations :

– correction des malformations chondrogladiolaires ;

– correction des malformations chondromanubriales.

Malformations chondrogladiolaires

– On résèque les cartilages costaux déformés en cupule en sous-périchondral. Selon Ravitch[23], les gaines périchondrales sont suturéesde façon à recréer une rectitude (fig 11).

– Robicsek[27] réalise une ostéotomie transverse du sternum au niveaude la deuxième côte, laissant intact le périoste postérieur.

– On résèque l’extrémité saillante du corps du sternum. Le boutproximal est fixé à la xiphoïde par des sutures au fil d’acier.

– Une cale osseuse est encastrée pour maintenir l’angulationpostérieure au niveau de l’ostéotomie haute (fig 12).

Malformations chondromanubriales

Selon la technique de Ravitch[23] :

– on résèque les cartilages costaux en sous-périchondral ;

– on sectionne la xiphoïde ;

11 Résection des cartilages costaux et plicature de la gaine périchondrale dans lethorax en carène (d’après Ravitch).

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– on réalise une ostéotomie cunéiforme au sommet de la protrusion etune ostéotomie simple en dessous au niveau le plus déprimé ;– l’axe sternal est redressé, l’angle de l’ostéotomie supérieure se fermealors que l’ostéotomie inférieure s’ouvre : une cale osseuse est inséréepour maintenir l’alignement. L’ensemble est stabilisé par des sutures aufil d’acier (fig 13).

Interventions de comblement

Les techniques radicales de sternochondroplastie sont lourdes, lamorbidité n’est pas négligeable, les résultats sont inconstants et lesrécidives fréquentes, en particulier chez l’enfant.Toutes les études modernes convergent et tendent à prouver que leretentissement fonctionnel du thorax en entonnoir est nul ou minimedans la très grande majorité des cas : les bilans comparatifs pratiqués enper- et postopératoire n’ont pas montré d’améliorations significatives etil semblerait même que l’augmentation de la rigidité thoraciquepostopératoire ait un effet néfaste sur la fonction respiratoire[36].Le but de l’intervention étant donc purement morphologique oucosmétique, il devenait logique de corriger les thorax en entonnoir parcomblement. Tel était le challenge pour les chirurgiens plasticiens maisaussi pour certains chirurgiens thoraciques avisés.Après quelques essais peu fructueux de greffes autogènes et delambeaux, l’unanimité des partisans du comblement devait se faire surl’utilisation du silicone.Pourquoi faire compliqué quand on peut faire simple ? l’adage bienconnu était enfin respecté.

Comblements autogènes– Les greffes libres, dermiques, cutanéograisseuses ou épiploïques[9, 13]

et plus encore les greffes non vascularisées de fragments osseux etcartilagineux associés[2], étaient inévitablement vouées à la nécroseétant donné le volume nécessaire et l’environnement tissulairedéfavorable et peu vascularisé.– Les lambeaux de muscle grand pectoral retourné[9, 18, 34] ontl’avantage d’être bien vascularisés mais leur transposition ou leur

translation entraîne inévitablement une perte de fonction et commecorollaire une atrophie à moyen terme.– Le grand épiploon transposé sur son pédicule gastroépiploïque[35] estune solution astucieuse, mais chez ces sujets jeunes, minces etlongilignes, la matière peut être insuffisante en cas de vaste dépressionet disproportionnée en cas de dépression modérée. De plus, la morbiditén’est pas négligeable.

Comblements de silicone

Murray [20] fut le premier, en 1965, à utiliser une prothèse préformée desilicone, suivi dans les années 1970 par de nombreux auteurs[15, 17, 18, 29].En France, c’est un chirurgien thoracique renommé, Toty[31], qui lepremier essaya de changer les habitudes radicales de ses collègues avantmême les chirurgiens plasticiens[22].– La fabrication extemporanée à l’aide de RTV (vulcanisation àtempérature ambiante) Silastict 382, proposée par la firme DowCorning, était rendue possible par la polymérisation sur place dupolymère de base (diméthylpolysiloxane) et d’un catalyseur à base dezinc [18, 31]. Mais depuis 1980, la polymérisation de silicone in vivo a étéinterdite par la Food and Drug Administration (FDA) en raison de latoxicité des émanations produites par la réaction chimique.– Nous décrirons donc les différentes étapes du comblement du thoraxen entonnoir par prothèse préfabriquée en élastomère de silicone, depuisle moulage jusqu’à la mise en place en passant par la confection del’implant au laboratoire.

Moulage

Les empreintes peuvent être prises à la consultation par un technicien oupar le praticien lui-même.Le patient est installé en décubitus dorsal strictement horizontal. La peauest vaselinée puis on coule dans la dépression sternale du plâtre de Paris.Chez la femme, les seins doivent être réclinés le plus latéralementpossible jusqu’au durcissement du plâtre (fig 14).La pièce obtenue est ensuite minutieusement travaillée (fig 15) :– les bords sont affinés ;

12 Correction du thorax en carène dans sa forme basse : résection inférieure,ostéotomie et cale supérieure.

A B13 Correction du thorax en carène dans sa forme haute : résection supérieure encoin, ostéotomie et cale sous-jacente.

BA

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– l’épaisseur est diminuée pour éviter une hypercorrection ; unedépression sternale et un creux épigastrique sont sculptés à la cuillère auniveau de la face antérieure de l’empreinte, de façon à donner à laprothèse un aspect plus naturel ;– le moulage est soigneusement affiné et poli au papier abrasif.Malgré toutes ces précautions, la technique est parasitée parl’épaisseur du plan cutané et sous-cutané, des muscles et surtout desseins chez la femme. La prise d’empreinte est difficile dans lesformes latéralisées.Des études sont en cours pour réaliser des maquettes exactes parprototypage rapide (stéréolithographie) à partir d’images scanner3D.

Fabrication de l’implant(fig 16)

Le positif en plâtre est confié au laboratoire qui va réaliser, à l’aide d’unepresse, un coffrage de l’empreinte pour obtenir un négatif en plâtre duret en deux parties.Dans la cavité ainsi formée, on coule le SilastictMD X 4 - 44 210(Dow-Corning). La polymérisation est permise par l’adjonction decatalyseur. Afin d’éviter la formation de bulles d’air au cours dumélange base-catalyseur, celui-ci est réalisé sous vide. Saproportion de catalyseur déterminera la consistance de l’implant quine doit être ni trop dur ni trop souple et fragile. La proportion de 8 %donne un bon compromis.Bien que le SilastictMD X 4 soit RTV, le moule est mis au four durant2 heures à une température de 80 °C : l’action de la chaleur permet deparfaire et d’accélérer la polymérisation.La prothèse semi-rigide ainsi obtenue est alors ébarbée et frossée. Lastérilisation s’effectue à l’autoclave à 120 °C durant 1 heure 30 minutes.Des artifices complémentaires peuvent être utilisés :

– collage d’une toile non résorbable de Mersilènet à l’aide d’une colleimplantable pour amarrage musculaire sur la face antérieure del’implant ;– forage de 20 à 30 tunnels transfixiants pour alléger la prothèse etsurtout permettre la pénétration du tissu conjonctif.

Technique chirurgicale

L’intervention se pratique sous anesthésie générale avec intubation. Lepatient est placé en décubitus dorsal sans billot.– La prothèse est mise en position sur le thorax du patient et ses contoursexacts tracés au bleu patent sur la peau pour délimiter les limites exactesdu décollement et donc de la loge périprothétique (fig 17).– La longueur de l’incision est fonction de la taille de l’implant. Elle esten général verticale et médiane sur la moitié inférieure du sternum,dépassant rarement le niveau de la xiphoïde. Chez la femme, elle seravolontiers sous-mammaire, uni- ou bilatérale.– Le muscle grand pectoral est désinséré au bistouri électrique et séparédu plan costal jusqu’aux limites du tracé préétabli. L’hémostase est biensûr soigneuse et peut être aidée par une valve éclairante ou unmédiastinoscope. Ce procédé est indispensable dans les pectuslatéralisés et les voies sous-mammaires (fig 18).– La prothèse semi-rigide peut être introduite par l’orifice relativementétroit. Elle se redéploie spontanément après son passage et se positionnetrès exactement dans sa loge (fig 19).– Le pôle inférieur aplati de la prothèse est fendu verticalement et vientse caler à cheval de part et d’autre de la ligne blanche après ouverture dufeuillet antérieur de la gaine du côté droit. Cet artifice permet

14 Réalisation du moule par coulage du plâtre de Paris dans la cuvette sternale.

15 Quelques exemplaires de moules de plâtre après finition.

16 Trois types de prothèses internes en élastomère de silicone semi-rigides : formelisse classique, forme multiperforée, forme tapissée d’un feuillet de MersilèneT pouramarrage musculaire sur la face antérieure.

17 En peropératoire, on dispose la prothèse dans la cuvette sternale et l’on marqueson contour exact au bleu patent.

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d’augmenter la stabilité latérale et d’éviter le glissement vers le bas, touten masquant le relief du bord de la prothèse sous l’aponévrosemusculaire (fig 20).– Quand leur amplitude le permet (type I de Chin), les musclespectoraux sont suturés sur la ligne médiane ; ils recouvrent ainsitotalement l’implant (fig 21).– Dans les formes larges (type II de Chin), les muscles désinsérés nepeuvent être rapprochés. Pour éviter leur rétraction latérale, ils peuventêtre amarrés à la prothèse armée de Dacront ou de Mersilènet sur saface antérieure (fig 22).– Deux drains aspiratifs sont mis en place de part et d’autre de l’implant.Au-dessus du plan musculaire, on réalise un plan sous-cutané à pointsséparés au fil résorbable. La peau est rapprochée de façon parfaite, grâceà un surjet intradermique.– Une contention élastique est mise en place pour limiter lesépanchements sérolymphatiques.

Suites opératoires et résultats

Le temps d’hospitalisation est fonction de la production du drainaspiratif qui est maintenu de 3 à 8jours.La tolérance de l’implant est le plus souvent excellente. Les seulescomplications sont les épanchements de Morel-Lavallée qui nécessitentparfois plusieurs ponctions. Leur survenue est probablement due à desphénomènes de frottement en raison de la mobilité permanente de laparoi thoracique.Les gênes mécaniques sont en rapport avec des prothèses d’une grandelargeur et d’une grande épaisseur dont le poids peut être important.L’allègement des prothèses par utilisation d’élastomère composé estdonc une perspective d’avenir intéressante.À long terme, aucune modification, déformation ou usure n’est àcraindre, ces implants étant quasiment inaltérables.Curieusement, le risque cicatriciel est faible et contrairement à lasternotomie classique, les évolutions chéloïdiennes sont rarissimes,probablement en raison de l’excédent cutané (expansion à l’envers) etde l’absence de tension au moment de la suture.

18 Correction d’un pectus latéralisé chez la femme par voie sous-mammaire avec l’appoint d’une valve éclairante et d’un médiastinoscope.

A B

19 A. Positionnement de la prothèse sousles muscles pectoraux et sous le feuilletantérieur de la gaine des droits.B. Positionnement classique en sous-cutané avec risque de débords visibles.

A

B

20 Le pôle inférieur de la prothèse est divisé en deux et se positionne de part etd’autre de l’éperon supérieur de la ligne blanche.

A

B

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Les résultats sont excellents dans les types I (fig 23) et III de Chin,souvent bons dans les types II (fig 24) et les reprises aprèssternochondroplasties radicales (fig 25, 26).La visibilité des bords de l’implant, qui est l’inconvénient en cas de miseen place en position sous-cutanée, est beaucoup plus discrète en positionrétropectorale et rétroaponévrotique. Mais cette discrétion et la qualité

des résultats sont aussi dues en très grande partie à la qualité de laconfection manuelle de l’implant, de la finesse de ses bords, notammentau niveau sous-manubrial et latéroépigastrique.Cette technique semble à ce jour la mieux à même de corriger sans risquele thorax en entonnoir : la preuve est qu’elle a même séduit certainschirurgiens thoraciques avisés !

21 Les muscles pectoraux peuvent être suturés l’un et l’autre sur la ligne médiane dans les formes profondes et étroites (type I).

A B

22 Dans les formes larges, l’amarrage des muscles, grâce à la présence d’une armature de MersilèneT, évite leur rétraction latérale.

A B

23 A. Thorax en entonnoir de type I.B. Résultat après correction par endopro-thèse de silicone.A B

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Figure 26 et Références ➤

24 A. Thorax en entonnoirde type II.B. Résultat après cor-rection par endopro-thèse de silicone.A B

25 A. Résultat insuffisant après sternochondroplastie radicale.B. Résultat après correction secondaire par endoprothèse de silicone.A

B

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26 A. Résultat d’une sternochondroplastie par retournement dans l’enfance avec conten-tion externe : récidive et séquelles cutanées.B. Mise en place d’expandeurs.C. Résultat après ablation des expandeurs et mise en place d’une endoprothèsede silicone.

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