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1 Comment lit-on à l’ère numérique ? Comment lit-on à l’ère numérique ? Laura POISBEAU-PINIER

Comment lit-on à l’ère numérique - DoYouBuzz

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Comment lit-on à l’ère numérique ?Comment lit-on à
l’ère numérique ?
La lecture, un loisir en
perpétuelle évolution a lecture et ses pratiques semblent
actuellement être en mutation. Il se développe
de nombreuses manières de lire, sur de
multiples supports. Tout cela est dû à
l’omniprésence numérique, qui, depuis le
début des années 2000, touche au domaine de
l’édition. Lire… qu’est-ce que cela veut dire aujourd’hui ? A l’ère
numérique, ce n’est plus seulement tourner les pages d’un livre
relié.
La lecture numérique est une pratique assez vaste de lecture,
incontestablement liée à Internet et aux outils informatiques
ou technologiques. C’est en fait une lecture qui contient
plusieurs types de lecture : celle sur écran, celle sur livre
électronique ou encore la lecture hypertextuelle, qui permet
une navigation constante. Dans tous les cas, on trouve dans
cette nouvelle façon de lire l’idée d’une interaction entre le
support de lecture numérique et le lecteur. La lecture
numérique est ludique, mouvementée. Elle fait
participer le lecteur à sa propre lecture : en plus
de lire, il peut modifier, choisir, relier tout ce qu’il
a sous les yeux. Celui qui lit n’est pas un simple
récepteur d’information, il devient actif.
La lecture numérique, sous toutes ses formes, se
veut alternative à la lecture classique sur papier et
non pas remplaçante. Leurs usages ne sont pas
les mêmes et dépendent d’un contexte, d’un lieu,
d’un besoin. « Il existera quelque chose qui ressemblera à ce
que le livre n’a jamais cessé d’être […]. Le livre est comme la
cuillère, le marteau, la roue ou le ciseau. Une fois que vous les
avez inventés, vous ne pouvez pas faire mieux. Vous ne pouvez
pas faire une cuillère qui soit mieux qu’une cuillère » 1 . Comme
l’affirme Umberto Eco, lors de sa conversation avec Jean-
Claude Carrière, les supports permettant la lecture numérique
ressemblent au livre papier mais ne le remplacent pas. Ce sont
des outils différents, complémentaires, par leur aspect et leur
but.
qui est celle du caractère pratique et de l’« ultra-possession »
de tout. En effet, les supports de lecture numérique permettent
un incontestable gain de place (comme le vantent François Bon
dans Après le livre 2 ou Gordon Bell dans Total Recall
3 ), ainsi
miniaturisation – l’iPhone d’Apple par exemple, qui permet la
lecture sur un petit écran – font de la lecture numérique une
lecture pratique (pas de livre encombrant dans les
sacs). Et elle est aussi ludique, notamment grâce
aux liens hypertextes possibles : prendre des
notes sur le support numérique lui-même,
chercher une définition en quelques secondes,
évitant le dictionnaire lourd et volumineux, se
renseigner sur un thème, une idée, un
personnage, un contexte historique…
On ne peut nier tous ces avantages. Ils facilitent la
lecture et peuvent sans doute attirer le lecteur par ce qu’ils lui
apportent. Toutefois, la lecture numérique est aussi à l’origine
de nombreuses problématiques, notamment en termes de
pratique. Ce sont celles-ci qu’on étudiera ici : si la lecture
numérique est si ludique, comment l’invente-t-on ? Comment
la pratique-t-on ? Elle peut bien sûr aussi poser problème, au
niveau cognitif et attentionnel : que cela génère-t-il alors ? On
verra enfin comment la lecture devient industrialisée,
marchandisée, quelles confusions en naissent et que faire pour
s’y retrouver.
1 Jean-Claude Carrière et Umberto Eco, N'espérez pas vous
débarrasser des livres, éditions Grasset, 2009, p.19 2 François Bon, Après le livre, « mémorisation et spatialisation,
si vous avez la solution », livre numérique publié sur
www.publie.net, 2011, p. 43 3 Gordon Bell et Jim Gemmell, Total Recall, éditions
Flammarion, 2009, traduit de l'anglais (Etats-Unis) par
Christophe Rosson en 2011
SOMMAIRE
en perpétuelle évolution
La lecture numérique pose problème
La marchandisation de la lecture
Un autre bouleversement dans le monde du livre : le livre de poche
Bibliographie
Indexation
Annexe
Mémoire universitaire
Université Paris Ouest Nanterre La Défense
43 rue Roque de Fillol
92800 Puteaux
Laura Poisbeau-Pinier
92974 Paris La Défense
Le lecteur
invente sa
La lecture numérique :
une autre manière de lire a lecture numérique définit un usage
particulier que l’on fait de l’acte de lecture sur
un support numérique. Elle a donc ses
particularités, qui la différencient nettement
de la lecture classique sur un support papier
et permettent une liberté de choix chez le
lecteur. On ne lui impose plus un ouvrage dont le contenu a
été choisi par l’auteur et l’éditeur, mais une gigantesque mine
d’informations qu’il doit déblayer lui-même. Le lecteur
intervient dans sa lecture, au cœur du texte, et c’est cela qui
particularise la lecture numérique. Michel de Certeau, en 1990,
s’intéressait déjà aux manières de lire des individus. Il affirme :
« Le livre est un effet du lecteur » 4 . Même si bien sûr cette
affirmation s’applique à la manière dont les individus
perçoivent différemment ce qui est écrit, elle correspond
également à la lecture numérique. On pourrait dire : « La
lecture numérique est un effet du lecteur », car le lecteur
invente sa lecture, et ce notamment grâce à l’hypertexte.
Le site Internet www.larousse.fr
définit l’hypertexte – ou
l’hyperlien – comme une
selon des chemins préétablis » 5 .
On retrouve donc là l’idée d’un
lien, au cœur d’un texte.
Ce concept du lien a d’abord été pensé par Vannevar Bush, un
ingénieur et chercheur américain né en 1890 et mort en 1974.
C’est dans un article intitulé « As We May Think », publié en
1945 (et toujours disponible en ligne 6 ) dans The Atlantic
Monthly (connu aujourd’hui sous le nom de The Atlantic), qu’il
parle pour la première fois du Memex (MEMory EXtender, ce
qui sous-entend un prolongement de la mémoire).
Ressemblant à un bureau, il s’agit d’un appareil électronique
permettant la consultation rapide de livres et documents, reliés
entre eux, stockés sous la forme de microfilms. Le lecteur
n’aurait qu’à taper sur un petit clavier le numéro du microfilm
recherché, et aussitôt, celui-ci s’afficherait à l’écran. Il pourrait
4 Michel de Certeau, L'invention du quotidien, vol. 1 arts de
faire, "Usages de la langue" - "Lire : un braconnage", édition
Gallimard, coll. Folio essais, 1990, p. 245 5 Larousse.fr, « hypertexte »,
http://www.larousse.fr/dictionnaires/francais/hypertexte,
consulté le 19 avril 2011 6 theatlantic.com, "As we may think", Vannevar Bush, juillet
1945, http://www.theatlantic.com/magazine/archive/1945/07/a
s-we-may-think/3881/, consulté le 19 avril 2011
par la suite naviguer de pages en pages, de microfilms en
microfilms.
Il lui serait également possible de relier, grâce à un système de
codes, deux documents qu’il juge complémentaires, afin de les
retrouver tous les deux plus tard. L’ancêtre de l’ordinateur, en
quelque sorte, où l’on peut naviguer et profiter des liens
existant (ou en créer) entre les informations. Alain Giffard parle
du Memex comme d’une « machine à lire contemporaine » et
précise que selon Vannevar Bush, « pour pouvoir éviter de lire
n’importe quoi, il faut précisément tout avoir sous la main et
zigzaguer efficacement » 7 . Déjà, donc, l’idée d’une profusion
d’informations disponibles dans un seul appareil était l’objet
de recherches.
7 Alain Giffard, Pour en finir avec la mécroissance, quelques
réflexions d'Ars Industrialis, "Des lectures industrielles", éditions
Flammarion, 2009, p. 134
http://newmedia.wikia.com/wiki/Memex
4
Comment lit-on à l’ère numérique ?
Le Memex, toutefois, n’est qu’un concept et ne prévoit aucune
automatisation. La navigation par liens est faite manuellement,
par le biais de codes tapés sur des
boutons. C’est en 1965 que le terme
d’« hypertexte » devient officiel,
américain né en 1937. C’est ainsi
qu’il nomme un ensemble de
documents informatiques liés entre
eux. Il n’existe pas d’ordre séquentiel
qui impose une seule manière linéaire de lire ; il s’agit
simplement pour lui d’un « texte qui bifurque et autorise le
lecteur à choisir » 8 . Toutes les informations sont reliées entre
elles et chacun peut définir, à sa façon, un chemin de lecture.
Ted Nelson a d’ailleurs réfléchi au projet Xanadu, dès 1960, qui
applique cette idée d’hypertexte au sein d’un stockage
d’informations – projet qui sera sans cesse soumis à de
nombreuses contraintes (notamment technologiques) et,
trente ans plus tard, dominé par l’HyperText Transfer
8 Ted Nelson, cité par Alain Giffard, ibid. p. 140
Protocol (HTTP), après avoir inspiré le World Wide Web (ce
qu’on appelle communément le Web).
L’hypertexte sous-entend donc une forme d’autonomie et un
moyen d’expression, puisque le lecteur dispose d’un véritable
pouvoir d’intervention, dans ses choix de lecture et dans la
lecture elle-même. Alain Giffard donne l’index, les tables, les
notes comme exemples rattachés à l’hypertexte 9 . Le lecteur qui
prend des notes sur un document numérique, ou qui crée un
lien au sein de ce document rapportant l’information à un
autre document, est en effet à l’initiative d’un lien hypertexte.
Comme l’a bien compris Ted Nelson, la lecture numérique ne
se veut pas similaire à la lecture classique, ce serait de toute
manière inutile. Elle répond à une nouvelle logique, non-
linéaire, qui permet la rapidité et l’autonomie de recherche
d’informations. Dans ce cas, l’imprimé n’est plus la référence, le
dispositif en lui-même est autonome. La lecture numérique
passe bien évidemment par des outils de lecture, certains étant
quotidiennement utilisés par un grand nombre de lecteurs –
peut-être l’ignorent-ils encore, mais
ils lisent, en vérité.
permettant l’accès au Web et
activant tous les liens hypertextuels
qui y sont présents. Le moteur de
recherche, bien sûr, est un autre outil. En l’utilisant, un lecteur
repère les documents qui correspondent à sa requête et se
base sur l’indexation automatique générée par le moteur de
recherche. Il s’agit en réalité d’une forme de pré-lecture (que
l’on expliquera plus précisément dans le quatrième article). Le
blog, ou weblog, est également un outil particulièrement
prisé : c’est en fait un journal de lecture sur le Web, qui donne
directement accès à du contenu.
Enfin, on trouve, dans les outils de lecture principaux, les
9 Alain Giffard, ibid., p. 141
Bush’s Memex concept, publié par Chigacogreen sur
http://newmedia.wikia.com/wiki/Memex
recherche d’informations. ”
contenus.
pour le MEMEX de Vannevar Bush
Indexation
significatifs (mots-clefs, expressions) permettant la création
d’un index qui répertorie tous ces éléments.
HyperText Transfer Protocol (HTTP)
conçu par Tim Berners-Lee, il s’agit d’un protocole de
communication permettant, par le biais d’un serveur
(proposé, lui, par un navigateur Web), d’accéder à des
informations.
Agrégateur
Juin 2011 - 5
Ted Nelson at SuperHappyDevHouse,
logiciels lecteurs (tels que Adobe), les agrégateurs personnels
(comme Google Reader), les livres électroniques (le Kindle
d’Amazon, par exemple).
navigation, d’autonomie. C’est pourquoi elle diffère
essentiellement de la lecture classique sur papier. L’hypertexte,
défini et étudié par deux hommes en avance sur les possibilités
technologiques de leurs époques, est à l’origine de ces
caractéristiques qui rendent la lecture numérique ludique. Aux
lecteurs désormais d’inventer leur lecture numérique et de la
pratiquer, en utilisant les outils de lecture à leur façon, en
sachant faire des choix de lecture, en sachant lire autrement.
1073 mots
Pratiquer la lecture
réalité, d’une activité
instrument, un sport, une activité
quelconque. La lecture numérique, elle
aussi, a ses spécificités. Elle se
caractérise notamment par six points,
développés ci-après, d’abord énoncés
avec précision par Alain Giffard dans
Pour en finir avec la mécroissance,
quelques réflexions d’Ars Industrialis 10
.
générale de lire
« collecte d’indices », trie, fait le
ménage dans l’immense quantité
d’informations disponibles. La
avant la « vraie » lecture.
marquage. Cela concerne tout ce qui a
pour but une mémorisation de la
lecture : l’habillage d’un texte, grâce
aux polices de caractère, aux couleurs,
etc. ; les marque-pages (existant sur
des supports numériques tels que le
smartphone, la tablette numérique ou
le livre électronique) ; le glissement
des informations dans ce qu’on
appelle « les favoris », qui permet, à
chaque nouvelle connexion ou lecture,
de retrouver ce qui nous avait
intéressé. Il s’agit finalement d’une
« opération de mémoire ».
copie. Un texte numérique,
10
diffusé en pièce jointe par mail ou
directement en ligne, compressé, son
format peut être converti, adapté à
différents supports (un smartphone ou
un livre électronique ne liront pas du
format PDF mais EPUB). Le texte existe
en différentes versions, il est copié,
recopié. C’est un point très
caractéristique de l’écriture numérique
qui est, rappelons-le, ultra-disponible
Giffard, est un autre point
caractéristique de la lecture
recherche qui se fait toute seule. Elle
peut donc être très utile mais
attention toutefois à ne pas inverser
les rôles : une recherche
un moteur de recherche serait une
forme d’addiction et entraînerait la
perte d’un regard critique,
capable, lui, de faire un
choix final et de
lecture numérique. Elle fait référence,
par exemple, aux commentaires sur les
blogs, aux tags, aux mots-clefs. En plus
de mener le lecteur là où il peut
trouver de l’information susceptible de
l’intéresser, comme le ferait un lien
hypertexte, les annotations lui
regard extérieur lorsqu’il est
producteur de contenu (commentaires
son point de vue.
mémoire, dont il retrace rapidement
l’historique du terme. Il reprend
l’expression « palais de mémoire » de
Frances Yates et Paolo Rossi 11
, en
conservant tout ce qui a trait à
l’usager, et par la même occasion, à
tous ses trajets de lecture.
Voilà, de manière théorique, par quels
moyens les individus peuvent
pratiquer une lecture numérique.
et adoptée par les lecteurs – ou
potentiels lecteurs. Lire
seulement naviguer sur Internet. C’est
aussi, bien sûr, lire des livres, des
magazines, des actualités sous forme
numérique, et ce par le biais de
multiples supports : ordinateur (fixe ou
portable), smartphone, tablette
numérique, livre électronique,
jeux… Pour comprendre aujourd’hui ce
qui se dit et se fait à propos de ce type
de lecture, il s’agit là de
consulter les résultats
ligne, de manière
autonome et personnelle,
.
cadres, de profession intellectuelle
11
par Alain Giffard, ibid., p. 178 12
« Vos habitudes de lecture »,
Poisbeau-Pinier,
http://habitudesdelecture.chez.com
25 ans et de 36 à 55 ans 13
. La diffusion
connaissances et de relations plutôt
restreint (cadre universitaire, amical et
familial), ce pourcentage n’est peut-
être pas à l’image de toute une
population, mais il encadre les
résultats suivants.
Certains entendent par là la navigation
sur Internet, d’autres la lecture de
livres numériques exclusivement,
sur smartphone… toujours est-il que
les 95 autres, qui déclarent n’avoir
jamais lu sur écran ou qui ne
répondent pas à la question, ont déjà
des aprioris. Ce sont 93 participants,
qui n’ont jamais lu sur écran, qui
déclarent préférer la lecture classique
sur papier.
avaient fait ce choix par dépit… la
plupart a donc un avis tranché sur la
question et justifie ce choix : il leur
manquerait le contact avec l’objet
livre, le confort à la fois visuel et
postural, et le transport facile. Et puis
pour beaucoup, « l’ordinateur, c’est
pour le travail ».
le toucher, l’odeur, le bruit du papier,
l’admiration pour la beauté de l’objet.
La lecture sur papier permettrait donc
13
le lecteur, une relation sensuelle,
réveillant chez celui qui lit un
ravissement certain. On apprécie aussi
le feuilletage, qui revient souvent
comme argument pour la lecture sur
papier. Une « intelligence du geste »
inimitable… Toute cette
les résultats et semble primer sur les
aspects positifs du numérique.
pour la lecture numérique (presque 40
%), même si le smartphone émerge
tout doucement chez les étudiants et
les cadres (15 % chez les premiers,
environ 10 % chez les deuxièmes).
Les avantages de la lecture sur écran ?
Le marquage, le zoom possible des
caractères, l’efficacité, la rapidité, la
recherche d’informations, la
gratuité et l’économie de papier.
Les supports numériques se révèlent
idéaux pour des lectures passagères,
en survol, rapides… l’actualité,
l’information précise sur un sujet
précis.
trouvent aussi des inconvénients au
numérique : fatigue oculaire, mal de
tête, déconcentration, inconfort de
sentiment de liberté » ni de rêverie
possible… Deux constats, donc :
support numérique, surtout lorsque
« support numérique », on entend
smartphones ou livres électroniques).
vraiment fait pour ça (si l’on ne tient
pas compte des autres supports).
93 participants [sur 235],
déclarent préférer la lecture
Corbis Images
Frustrated woman staring at computer screen, Tom Grill, Getty Images
Et puis de manière symbolique et philosophique, il ne
correspond pas à l’idée qu’on se fait de l’activité de lecture.
Certains se sentent enchaînés, « scotchés » à l’écran et
n’apprécient pas ce type de relation.
En réalité, tout cela est édifiant : l’habitude et les aprioris sont
encore bien ancrés dans la conscience collective, même si une
minorité accepte et utilise les nouveaux supports et possibilités
de lecture. Le livre électronique et la tablette numérique
restent très minoritaires (12 personnes, au total, possèdent
l’un, l’autre ou les deux) et ne sont donc pas très connus du
grand public (même s’ils tendent à le devenir avec les années à
venir et les nouvelles générations). On préfère lire de la
littérature, des ouvrages
plus facilement
numérique.
Expérience : j’ai lu un livre numérique
ar un concours de circonstances, me voilà en
possession d’un roman sous la forme
numérique. Je ne l’ai pas acheté, pas choisi…
on m’a demandé d’en faire la critique en
échange du livre, gratuit.
Au premier abord, je reste sceptique. Je n’ai jamais longtemps
lu sur écran, jamais un véritable livre, avec un certain nombre
de pages, des chapitres, du texte à perte de vue… Je le vois
bien : sur la toile, lorsqu’un article me semble trop long, je finis
par l’abandonner. Je zappe, je ferme les pages, en ouvre
d’autres. Je suis (naturellement ?) attirée par ce qui bouge, la
vidéo, l’image, la couleur…
Me voilà donc face à ce fameux livre de 131 pages PDF. Je me
lance : je me cale, au creux de coussins, assise contre un mur,
mon ordinateur portable sur les genoux. Une page, deux
pages… le texte ne me facilite pas la tâche, il est assez
compliqué. Et rapidement, je décroche. Je ne cesse de vérifier
où j’en suis, dans ce fameux document PDF. Ma souris glisse
de bas en haut… page 4… c’est tout ? Je me sens loin du texte.
Je ne peux pas le toucher, le caresser. Je ne peux pas lire
allongée, les bras en l’air, ou sur le ventre. L’ordinateur est
encombrant, lourd, chaud et son écran m’assomme.
J’abandonne.
Cette première expérience commence mal. Comment vais-je
faire… ? Si rien ne m’y obligeait, je ne le reprendrais pas. Mais
quelques jours plus tard, dans un élan de motivation, je
m’apprête à tester la lecture sur écran une seconde fois. C’est
alors qu’un proche, à l’humeur prêteuse, me conseille : « et si
tu essayais sur mon smartphone ? Il existe bien une application
qui propose des ebooks, ça devrait donc pouvoir se faire ! ».
J’attrape le fameux support. Je connais un peu la bête, donc
niveau débrouillardise, ça devrait aller. Je charge le roman en
format EPUB (qui me permettra la lecture du livre) et l’ouvre.
Me voilà maintenant
avec 674 pages.
Evidemment, l’écran
du livre aussi, donc.
à peu près où j’en suis
dans le roman grâce à
des petits repères : en
m’indique le numéro
en train de lire. Il y a
aussi une ligne
lis. Je comprends alors
que les repères du lecteur, dans un long texte, sont essentiels.
Je ne peux pas lire sans savoir où j’en suis, où je vais, ce que j’ai
déjà lu, ce qu’il me reste encore à lire. Les pages PDF ne
m’aidaient absolument pas (ou alors je devais sans cesse
manipuler le logiciel). En revanche, je constate quelques
progrès sur un support qui prévoit, entre autres, une lecture
plutôt longue.
contact direct avec
l’objet puisque
pages défilent et je
ne m’ennuie pas.
Parfois, l’outil ne
recharge le smartphone tous les soirs mais qu’importe, puisque
je ne lis pas en continu pendant des jours ! L’objet est léger, il
se glisse plus facilement dans mon sac que mes lourds et épais
romans. Et il se présente à moi quelques fonctionnalités qui
sont à la fois pratiques et amusantes : je peux gérer la
luminosité de l’écran, choisir la taille des caractères, la police,
préférer la couleur sépia au fond blanc de la « page », pour
une lecture moins fatigante et une imitation de vieux papier. Et
surtout, surtout, je peux marquer la page ! Un simple
effleurement de l’écran du bout des doigts, en haut à droite, et
une étiquette rouge s’affiche, marquant ma page et se
substituant à ma mémoire.
Finalement, le roman (plutôt petit, il faut l’avouer) est facile à
lire. La lecture est plus ludique qu’avec un livre en papier, parce
que plein de petites fonctionnalités se présentent à nous.
L’expérience de ce type de lecture a modifié mon avis sur la
question : plutôt réticente à l’origine, me voilà séduite et prête,
pourquoi pas, à essayer le livre électronique.
732 mots
format EPUB, sur smartphone
effleurement…
10
1 – Le réglage de la luminosité permet d’améliorer le
confort de lecture.
rôle de marque-pages.
couleur de fond, taille des caractères).
4 - Les appareils de lecture peuvent contenir
l’équivalent de milliers de gros volumes.
5 - Les ebooks prendront-ils l’apparence des livres
traditionnels ?
Définition
capsules contenant des microparticules noires et blanches
chargées électriquement (négativement pour les noires,
positivement pour les blanches) » sensibles à des champs
électriques, permettant l’affichage d’un texte.
http://www.ecranflexible.com/encre-electronique-e-paper
incontestablement des avantages, comme on
a pu le voir précédemment, elle pose aussi
problème, notamment à cause d’absence de
moyens technologiques permettant de
meilleures conditions de lecture. Dans
l’enquête sur les habitudes de lecture (réalisée en ligne en avril
2011) et en règle générale, les lecteurs donnent de
l’importance à la visibilité, au contraste, à la typographie, la
mise en page, la luminosité, l’unité du texte… tous ces
éléments ont un rôle décisif dans la pratique de la lecture
parce qu’ils cadrent le mouvement des yeux, la fluidité de la
lecture et donnent des repères visuels non-négligeables. La
progression technologique des supports numériques est si
rapide que la question ne se posera sans doute plus dans
quelques années. Déjà, l’encre électronique utilisée dans
certains ebooks facilite incontestablement la lecture. Plus de
rétro-éclairage à l’origine de fatigues oculaires… Toutefois, ce
type de support est encore trop peu connu, ou du moins trop
peu utilisé (sans doute à cause de l’habitude et du coût
conséquent de l’objet).
Selon Alain Giffard, la lecture est une activité de perception et
de compréhension 14
permettant ensuite l’assimilation des informations. La lecture
numérique, elle, dépend du support. La phase de déchiffrage
est plus lente, moins immédiate - puisque le support n’est pas
totalement adapté – et génère donc une plus grande difficulté
de compréhension. Alain Giffard oppose alors la lecture de
scrutation à la lecture soutenue, la première aillant pour but
d’informer avec simplicité, l’autre
d’entraîner la réflexion. Il considère
que la lecture numérique, se faisant
sur un temps long destiné à la
navigation (ici lié à la lecture de
scrutation), consacre moins de temps
à la lecture soutenue, approfondie,
synonyme de concentration. C’est là
sa principale différence, négative, avec la lecture sur papier. En
effet, de nombreuses personnes encore impriment ce qu’elles
ont sélectionné numériquement auparavant pour le lire sous
forme papier. Ce retour à la lecture classique leur permet de
retrouver une qualité de concentration.
La concentration… voilà en réalité ce qui pose principalement
problème à la lecture numérique – et à tous les supports écran
d’ailleurs. Cela n’est pas lié au progrès technologique mais à
quelque chose de véritablement humain, et concerne tous les
domaines qui touchent, de près ou de loin, à l’écran. Le lecteur,
en lisant sur ce support, ressent rapidement une fatigue
oculaire. L’écran lui demande une trop grande concentration,
14
ce qui le fatigue plus rapidement. Les contenus rédigés, publiés
en ligne, accessibles par supports mobiles ou ordinateur, sont
ponctués de liens hypertextes, d’images, de mouvements…
Une lecture ludique, certes, mais alors peu adaptée à la
concentration. Qui n’a jamais été tenté, alors occupé à faire des
recherches sur Internet, de cliquer sur des liens et d’en profiter
pour se renseigner sur des sujets totalement différents du sujet
initial, jusqu’à en oublier le but premier de ses recherches ? Les
écrans diffusent en fait constamment un flux. Rien n’est figé.
Les usagers sont donc de plus en plus habitués à ce type de
communication, ce qui réduit petit à petit leur capacité de
concentration. C’est ce que Katherine Hayles, citée et critiquée
par Alain Giffard 15
, appelle le phénomène de l’hyper-attention.
Il s’agit plus précisément de la multiplication des occasions de
se déconcentrer de son activité principale, la rendant
forcément plus difficile. Hayles accuse les médias de faire des
jeunes une génération hyper-attentive. Alain Giffard, lui,
comprend plutôt l’hyper-attention,
concentration, mais comme une forte
attention. Les deux points de vue
mettent de toute manière en
évidence le fait que la lecture sur
écran a un rôle, plutôt négatif, sur
l’idée même d’être attentif et
concentré sur un texte, un sujet, sans se perdre dans une
multitude d’informations gravitant autour du lecteur.
En plus de ce problème majeur qu’est la concentration, la
lecture numérique est à l’origine d’autres bouleversements.
Parce que le livre est un objet ancien, à l’origine tout à fait
luxueux car fastidieux à imprimer, il est encore aujourd’hui
considéré comme quelque chose de sacré. Les plus
hermétiques au numérique crient au scandale : comment peut-
on toucher au livre, à ce qu’il inspire, à ce qu’il provoque chez
l’homme ? On comprend d’ailleurs, sans être extrême, que le
15
Generational Divide in Cognitives Modes, 2007, reprise par Alain
Giffard, ibid., pp. 185-186
concentration [des lecteurs]. ”
La sensualité
l’habitude. ”
livre en tant qu’objet a son importance. La sensualité qu’il dégage
grâce à la matière papier, le bruit des pages qui tournent, l’odeur du
papier neuf ou ancien, vierge ou abîmé, le fait que l’auteur lui-même
semble alors plus présent parce que ses mots sont comme posés
(imprimés en réalité) sur les pages… tout cela a su charmer les
lecteurs et créer l’habitude.
Le numérique, même s’il sait par exemple imiter les pages qui
tournent, ne permet pas un tel contact et il semble que ceci soit un
problème à l’heure actuelle, pour un grand nombre de lecteurs. Cela
retourne peut-être en fait d’une simple habitude historique… Considérons
que dans plusieurs dizaines d’années, la lecture numérique aura laissé son
empreinte dans la société et qu’elle ne sera plus autant au centre des
préoccupations. L’habitude de l’écran (dans le but de lire) viendra
alors peut-être, sachant
installée pour d’autres
technologie du livre n’évolue pas tant que
ça et l’objet ne nécessitera jamais
d’électricité, comme l’affirme Umberto
Eco 16
. Le numérique, lui, ne cesse de se répandre et fait évoluer les
technologies d’année en année. Le livre électronique que nous connaissons
aujourd’hui, même s’il est encore peu utilisé, est sans doute très différent de
celui qui existera dans vingt ans (ou même avant). L’objet n’est donc pas
durable. Il faut le recharger en batterie, le renouveler lorsqu’il est trop
vieux pour répondre aux besoins. Et c’est sans doute cela qui agace
Umberto Eco. Un aspect du numérique qui n’a pas que ses bons côtés,
donc.
La lecture sur écran et celle sur papier sont en fait deux mondes différents
avec leurs spécificités propres. La culture numérique émergente doit prendre
en compte le fait que la dématérialisation a ses limites. Imiter ne mène nulle part :
mieux vaut adapter le modèle du livre aux nouveaux supports et mettre l’accent sur le
contenu, plus que sur le support (ce qui n’est pas encore le cas). Florent
Taillandier, sur cnetfrance.fr, affirme : « L'ebook [pour ne prendre que cet
exemple] doit donc proposer plus, et arrêter d'être une copie du livre papier,
afin de sortir de ce dilemme » 17
qu’est l’auto-concurrence (qu’une maison
d’édition vende des livres numériques moins chers que ses livres papier).
De ce fait, la lecture numérique peut être problématique, notamment en terme
de concentration, primordiale si l’on veut correctement déchiffrer et assimiler
les informations. C’est en vérité l’une de ses plus grandes faiblesses. D’autres
préoccupations (l’habitude par exemple) ne facilitent pas l’intégration de ce
mode de lecture. Du reste, la marchandisation progressive de la lecture elle-
même ne permet pas à l’acte de lecture sur écran un quelconque changement.
1253 mots
des livres, éditions Grasset, 2009, p. 36 17
cnetfrance.fr, “Lecture : l’écran rattrape le papier », Florent Taillandier, 11 mai
2011, http://www.cnetfrance.fr/blog/lecture-l-ecran-rattrape-le-papier-
Juin 2011 - 13
La marchandisation de
la lecture l existe deux types de lecture qui, comme on
l’a dit auparavant, s’opposent et réclament
différents types d’attention. La lecture de
scrutation est une lecture d’information, une
lecture de navigation, de « survolement ». Il
s’agit donc d’une lecture « mobile », en
mouvement, plutôt rapide. La lecture soutenue, elle, se
rattache à l’approfondissement des informations, à une étude,
une assimilation. Elle est source de connaissances et demande
une forte concentration.
Cette opposition est essentielle car elle est prise en compte
dans la façon dont la lecture numérique s’industrialise
aujourd’hui. Il existe incontestablement une logique de l’accès,
qui joue son rôle dans l’industrialisation de la lecture : les
entreprises n’échangent plus de biens mais régulent l’accès à
ces biens. On ne vend plus, on propose l’accès à quelque
chose. On n’achète plus, on profite de l’accès qui nous est
proposé. Le but est d’orienter la lecture numérique et d’en tirer
des bénéfices, évidemment économiques.
Alain Giffard considère les
réseaux sociaux comme de
En effet, ils régulent la manière
dont les individus vont avoir
accès à telle ou telle
information, à la manière dont
ils vont communiquer entre
automatique […] qui pratique
textes et lecture des
surprenant : ce qui permet
l’accès enregistre également le chemin de lecture de
l’utilisateur, la manière dont il a eu accès à quelque chose.
Permettre l’accès et le surveiller à la fois. « Grâce aux cookies
implantés sur les ordinateurs des internautes, [le moteur de
recherche] peut enregistrer les parcours de lecture et
constituer automatiquement des profils individualisés qu’il
peut revendre aux annonceurs. […] Aujourd’hui, la lecture
commercialisée devient elle aussi le support d’orientation du
temps de cerveau disponible. Mieux : elle vend du temps de
18
cerveau actif. ». 19
La « lecture des lectures » n’a qu’un seul
objectif : connaître les lecteurs, savoir ce qui les attire, ce qui
oriente leurs choix et, finalement, mettre toutes ces
informations en pratique. Parce que bien sûr, l’attention
rapporte. C’est d’ailleurs ce qui motive tous les médias
aujourd’hui.
d’un site, particulièrement lorsqu’il est commercial. Les mots-
clefs sont même vendus, par des
moteurs de recherche comme
Google, à des entreprises,
donne priorité. AdWords, le
service proposé par Google,
« s'adresse aux annonceurs et
d'acheter le mot clé qui renverra
sur leur propre site. Les
annonces liées aux mots clé
figurent en marge de la liste de
sites affichés comme résultat
d'une requête dans Google.
annonceurs deux fois : la
première fois, directement, la
cible est le lecteur individuel qui
fait sa recherche ; la deuxième fois, parce que c'est un sous-
ensemble du lectorat du web qui est constituée en audience
de la publicité » 20
.
Les statistiques, eux, ont plutôt un rôle en aval : ils permettent
de savoir d’où viennent les lecteurs (géographiquement mais
19
23 juillet 2009, http://www.telerama.fr/techno/internet-rend-il-
alaingiffard.blogs.com, « Lectures industrielles », Alain
Giffard, 10 septembre 2007,
indust.html, consulté le 16 février 2011
Mysterious person looking at man’s computer, Troy Aossey, Getty Images
Il existe incontestablement
l’industrialisation
Comment lit-on à l’ère numérique ?
aussi « hypertextuellement »), ce qu’ils ont lu, ce qui a retenu
leur attention… Connaître la manière de lire numériquement
des individus, c’est donc s’adapter à eux et en faire des cibles
marketing. Voilà comment Alain Giffard résume tout cela : le
marché de Google correspond à un « échange d’informations
sur les lectures contre des informations sur les lecteurs,
échange d’informations sur les lecteurs contre de la
publicité » 21
logique de marketing et de consommation.
Mais revenons à la lecture de scrutation et à la lecture
soutenue. La « lecture-consommation » est, par définition,
incompatible avec la lecture soutenue. L’intérêt commercial est
moindre : comment industrialiser une lecture qui prend du
temps, de la concentration, qui n’est pas sans cesse en
mouvement comme la lecture de scrutation ? Une faible
navigation génère peu d’informations sur les chemins de
lecture choisis, donc peu d’informations sur les lecteurs et leurs
habitudes, donc peu de recettes économiques. Ne pas
connaître ou ignorer ses « lecteurs » (ici consommateurs) ne
permet absolument pas de croissance.
Le lecteur, lui, a bien sûr son rôle à jouer. Mais pour cela, il ne
doit pas confondre la lecture et la pré-lecture. Cette dernière
est une simple préparation à la lecture. Elle fait partie de la
lecture numérique parce que le lecteur a besoin de chercher
son texte, de le choisir, de naviguer. La lecture commence, elle,
lorsque le lecteur s’applique à lire un texte et à le comprendre.
Cela demande donc une compétence de dissociation entre le
« survolement » (via l’hypertexte), la sélection, l’adaptation à la
lecture et enfin la lecture elle-même. Comme l’explique Alain
Giffard, un individu qui ne saurait dissocier ces éléments
croirait lire alors qu’il ne fait que « pré-lire ».
Ce qu’on appelle l’illectronisme – c’est-à dire l’absence d’une
culture informatique, un « illettrisme informatique » – serait-il à
l’origine de ce type d’incompétence ? Toujours est-il que « le
risque est grand alors […] d’une lecture sans savoir-lire […],
lecture illettrée qui ne serait rien d’autre qu’une catastrophe
21
confiance en un robot qui sélectionne les informations pour
nous. Développer un « savoir-lire » et un « savoir-écrire » (pour
restituer des informations), savoir trier dans une lecture non-
linéaire hypertextuelle… tout cela forge un esprit critique tout à
fait utile. Le lecteur ne doit pas confondre information et
connaissance. Il doit savoir se concentrer sur un texte en
arrêtant la navigation pour un temps (en espérant, aujourd’hui,
que les outils numériques se développent dans ce sens,
puisqu’ils n’y sont pas encore tout à fait adaptés).
Selon Alain Giffard, le plus inquiétant dans le développement
constant des industries de lecture serait d’arriver à une
modification de la définition de la lecture, en la liant
automatiquement au marketing, ce qui nuirait bien
évidemment à « la lecture de la connaissance », en tant
qu’apport culturel et intellectuel. Peut-être que « les [lecteurs]
les plus jeunes, qui ont grandi devant un ordinateur, risquent
de prendre la lecture industrielle comme lecture de référence,
ce qui devrait entrer directement en conflit avec les exigences
de l’école » 23
Sophie Lherm, op. cit.
la lecture et la pré-lecture. ”
Schoolgirl using computer in lab, Michael Prince, Corbis Images
Five money books worth a penny - Droits Réservés
Juin 2011 - 15
Collection Pourpre, 1943
poche.
livre : le livre de poche
-t-il existé des révolutions technologiques ou pratiques similaires à
celle que nous vivons actuellement, à l’ère du numérique ? Certes.
Toutes les grandes inventions, sans doute. Mais au cours du XX e siècle,
un petit objet tout simple a eu l’effet d’une bombe : le livre de poche.
Ce livre, censé tenir dans une poche de pantalon, au prix bas et de
qualité moindre (la couverture est très souple, le papier fin et fragile),
est à l’origine d’un véritable bouleversement culturel.
Cette idée s’est développée dès les années 1930, en Angleterre. En 1935, la maison
d’édition The Bodley Head réédite des titres bon marché sous la forme d’un petit livre.
Allen Lane, qui en a eu l’idée, fonde l’éditeur Penguin Books une année plus tard, qui
aura un franc succès grâce à ses livres de poche. Aux Etats-Unis, la maison Simon &
Schuster en est inspirée et lance sa collection « Pocket Books » en 1939. Le livre de
poche est en expansion. Son but premier, qui est celui de la démocratisation de la
lecture (notamment d’œuvres littéraires), lui assure petit à petit un développement
mondial.
En France, la Librairie des Champs-Elysées lance, dès 1927, la collection « le Masque »,
spécialisée dans le roman policier, en petit format et bon marché. Toutefois, cette
initiative est trop peu remarquée, car trop spécialisée. Ce sera aussi le cas pour les
« Que sais-je ? » des Presses Universitaires de France, lancés en 1941, dans la lignée du
livre de poche.
C’est la collection « Livre de Poche » de Hachette qui permettra le succès de ce format,
parce qu’elle est ouverte à la littérature générale et n’est pas spécialisée comme ses
prédécesseurs. Henri Filipacchi, secrétaire général de la Librairie Hachette, est à l’origine
du projet. Son but ? Appliquer des techniques d’impression et de diffusion d’habitude
réservées au roman populaire à la littérature classique et moderne. Tout cela induit un
coût bas pour le lecteur et un accès facile aux « grandes œuvres ».
Le projet voit le jour grâce à l’association de Hachette avec les maisons d’édition Albin
Michel, Calmann-Lévy, Grasset et Gallimard, qui permettent le financement. En février
1953 sort le premier « Livre de Poche », édité par la Librairie générale française (filiale
d’Hachette) : Kænigsmark, de Pierre Benoit. Il vaut alors 2 francs (un peu plus qu’un
quotidien).
L’accueil est réticent : comment peut-on brader la littérature ? On ne lui prédit pas un
long avenir. Les plus hermétiques affirment que le format poche fait de la littérature un
simple produit de consommation, une simple marchandise. Et c’est justement ce qu’ils
déplorent. Ce nouveau format n’est qu’ « "une manipulation qui fait du livre un produit
et du lecteur un consommateur", s'insurge, en novembre 1964, le philosophe et
).
Le succès de cette nouvelle collection est pourtant fou. Il existe désormais une
« nouvelle manière de lire, démocratique et décontractée » (livredepoche.com 25
). La
première raison : la littérature « cesse d'être […] le quasi monopole de la caste des
lettrés » (bbf.enssib.fr 26
). Le livre est pratique à transporter et lisible partout. Et puis les
24
liberation.fr, « Au fond des poches », Edouard Launet, 6 février 2003,
http://www.liberation.fr/livres/0104439422-au-fond-des-poches, consulté le 16 mai
propos/historique.html, consulté le 16 mai 2011 26
Gilbert Nigay, « Le livre de poche et son évolution », BBF, 1967, n° 7, p. 257-270,
http://bbf.enssib.fr/consulter/bbf-1967-07-0257-001, consulté le 16 mai 2011
Kænigsmark, de Pierre Benoit : le premier
« Livre de Poche », édité en 1953,
http://bricabrac.perso.sfr.fr/PierreBenoit.html
16
Comment lit-on à l’ère numérique ?
textes des grands auteurs sont très peu chers et donc, très
accessibles. Le livre de poche touche tous les domaines : la
littérature bien sûr, mais aussi les manuels pratiques (cuisine,
bricolage), les recueils de poèmes… En 1969, on compte 28
millions d’exemplaires vendus. Il s’agit bien d’une véritable
révolution culturelle. A cette époque, le « Livre de Poche » fait
désormais partie de l’indice des prix, dit des « 259 articles »
indiquant les produits de consommation de base
(livredepoche.com 27
), ce qui lui donne une légitimité.
Et puis l’avantage, c’est que le « Livre de Poche » se vend à
tous les coins de rue : boutiques, épiceries, kiosques… il est
accessible partout physiquement. Pas besoin de passer devant
une librairie pour se procurer de la lecture, commerce souvent
situé dans des quartiers habités par les plus lettrés. Le
« Poche » donne aussi un second souffle aux œuvres sorties
depuis un certain temps en librairie.
Malgré tous ces bons points, on constate tout de même que le
livre de poche touche particulièrement le domaine de
l’enseignement : universitaires, professeurs et étudiants, bien
sûr, sont les premiers acheteurs de ce nouveau format.
Vont suivre de nombreuses maisons d’édition, lançant chacune
leur collection poche : « J’ai lu », initiée par Flammarion,
« 10/18 » de Plon, « Points » des Editions du Seuil, « Folio » de
Gallimard… De nos jours, c’est Agatha Christie qui est l’auteur
le plus vendu en livre de poche (plus de 40 millions
d’exemplaires).
op. cit.
Le livre de poche a donc bien été révolutionnaire car il a
proposé une autre façon de lire, grâce à un nouveau support.
Le transport, le coût, l’accès… tout était plus simple et facile. Le
numérique, aujourd’hui, propose entre autres, lui aussi, une
nouvelle manière de lire. Celle-ci est toutefois plus complexe :
elle remet en cause le support de lecture mais aussi un
nouveau comportement de lecture, différent de la linéarité du
livre que l’on connait tous. Peut-être que la lecture numérique
trouvera ses lecteurs de façon massive, une fois les critiques et
appréhensions actuelles dépassées.
Bibliographie
ARS INDUSTRIALIS, « Lecture (numérique) », http://arsindustrialis.org/lecture-num%C3%A9rique, consulté le 16 février 2011
Ars Industrialis est une association à l’initiative de Bernard Stiegler, qui propose des débats et des réflexions sur les médias,
l’enseignement, les industries culturelles, la science, l’art, les technologies de l’information et de la communication. Le site offre un index
contenant de nombreux termes plus ou moins techniques, dont fait partie la lecture numérique.
HYPERTEXTE, groupe de recherche sur les écritures hypertextuelles, « Le MEMEX de Vannevar Bush », Luc Dall'Armellina, 3 janvier 2009,
http://www.hypertexte.org/blog/?p=125, consulté le 19 avril 2011
Ce site, alimenté par les recherches d’étudiants et d’enseignants chercheurs issus de l’Université Paris 8, propose une page complète sur
l’invention de Vannevar Bush, avec de nombreuses images et une traduction de l’article de 1945, où l’américain exposait ses idées.
SKHOLÈ, penser et repenser l’école, « Lecture numérique et culture écrite », Alain Giffard, publié dans le n°7 de janvier 2010,
http://skhole.fr/node/215, consulté le 16 février 2011
Par le biais de ce site tourné vers l’enseignement, Alain Giffard réexplique son point de vue à propos de la lecture numérique et précise
ce qu’il a précédemment publié.
TELERAMA.FR, « Internet rend-il bête ? », Sophie Lherm, 23 juillet 2009, telerama.fr, http://www.telerama.fr/techno/internet-rend-il-
bete,45457.php, consulté le 16 février 2011
L’article se base principalement sur les avis de Alain Giffard ; il illustre très bien la manière dont les habitudes de lecture se modifient,
notamment en termes de concentration. L’auteur oriente une partie de l’article vers la marchandisation de la lecture et ses conséquences
plausibles.
WIKIPEDIA, « Lecture numérique », http://fr.wikipedia.org/wiki/Lecture_num%C3%A9rique, consulté le 16 février 2011
La page Wikipédia destinée à la lecture numérique donne une première définition du sujet.
Sites web suivis quotidiennement :
AKA REUP : tenu par Pierre, qui travaille dans une bibliothèque universitaire et s’empresse de donner son avis sur les transformations du
livre, les nouvelles technologies, les problématiques en bibliothèque…
http://akareup.wordpress.com/
ALAIN GIFFARD : blog d’Alain Giffard, abandonné depuis fin 2010, mais proposant des articles liés aux problématiques dont l’auteur ne
cesse de s’emparer (lecture numérique, lecture sur écran, habitudes, hypertexte, industrialisation de la lecture).
http://alaingiffard.blogs.com/
ALDUS 2006 : blog tenu par Hervé Bienvault, consultant indépendant, qui informe très régulièrement sur les actualités technologiques,
juridiques ou numériques liés au livre et à la lecture.
http://aldus2006.typepad.fr/
BIBLIOBSESSION : blog tenu par Silvère Mercier, bibliothécaire, qui propose une réflexion sur les bibliothèques et le numérique.
http://www.bibliobsession.net/
L’EPEE DU SOLEIL : blog tenu par René Audet, enseignant-chercheur en littérature contemporaine, qui propose de nombreux articles sur
la culture numérique, avec quelques interrogations sur la lecture, l’édition et les lieux du livre.
http://carnets.contemporain.info/audet/
LE TIERS LIVRE : blog tenu par François Bon qui propose régulièrement des articles sur l’écriture en défendant l’édition numérique.
http://www.tierslivre.net/
S.I.LEX : tenu par Lionel Maurel, conservateur des bibliothèques à la Bibliothèque Nationale de France, le blog interroge principalement
les questions juridiques et les nouvelles technologies liées à l’univers du livre.
http://scinfolex.wordpress.com/
18
Livres / revues :
BELISLE Claire (coordonné par), La lecture numérique : réalités, enjeux et perspectives, Presses de l'ENSSIB, Collection Référence, 2004
L’ouvrage interroge sur la transformation des pratiques de lecture : quelles problématiques cela pose en termes d'habitude ? Qu'est-ce
qu'un livre électronique ? Quelle est son origine ? Que modifie-t-il profondément dans l’acte de lecture ?
CARRIERE Jean-Claude et ECO Umberto, N'espérez pas vous débarrasser des livres, Editions Grasset, 2009
Notes, réflexions sur le livre et la littérature, tirées de conversations entre deux bibliophiles, Jean-Claude Carrière et Umberto Eco.
CERTEAU (de) Michel, L'invention du quotidien, vol. 1 arts de faire, "Usages de la langue" - "Lire : un braconnage", Editions Gallimard, coll.
Folio essais, 1990
Dans ce court chapitre, l’auteur s’intéresse à la pratique de la lecture. Ses réflexions semblent parfois pouvoir s’appliquer à l’essor de la
lecture numérique.
GARCIA Daniel, "Sondages : les livres numériques", Livres Hebdo n°857, 18 mars 2011
Le magazine propose un long dossier décryptant de nombreux sondages effectués pour la revue, à propos des habitudes de lecture
numérique d’individus et de leurs choix de supports ou de contenus.
GIFFARD Alain, Pour en finir avec la mécroissance, quelques réflexions d'Ars Industrialis, "Des lectures industrielles", Editions Flammarion,
2009
L’auteur analyse avec profondeur ce que la lecture numérique implique de nos jours, son fonctionnement, ses travers, les critiques qui lui
sont faites, la manière dont elle est de plus en plus marchandisée.
TESTARD-VAILLANT Philippe et BETTAYEB Kheira, « La lecture change, nos cerveaux aussi » Science & Vie, sept. 2009, pp. 42-57
Le dossier consacré à la lecture sur écran met en avant les changements cognitifs provoqués par la lecture numérique mais aussi les
progrès technologiques actuels qui permettent une meilleurs adaptation, tout cela de manière ludique, descriptive, schématisée.
THOREL Christian (sous la direction de), Le livre à l'ère du numérique, Les Cahiers de la librairie, n° 5, novembre 2006
De nombreux auteurs sont réunis pour réfléchir, par le biais de plusieurs articles, sur le poids du numérique sur la filière du livre (les
usagers, les bibliothèques, les librairies, la naissance du papier électronique, l’émergence de nouveaux métiers…).
Les sources plus personnelles
Articles en ligne :
BBF.ENSSIB, « Le livre de poche et son évolution » Gilbert Nigay, BBF, 1967, n° 7, p. 257-270
http://bbf.enssib.fr/consulter/bbf-1967-07-0257-001, consulté en ligne le 16 mai 2011
Un long article, tiré d’un ouvrage publié par le BBF, sur l’histoire du livre de poche, les bouleversements et critiques qu’il a provoqués.
CNETFRANCE.FR, « Lecture : l’écran rattrape le papier », Florent Taillandier, 11 mai 2011, http://www.cnetfrance.fr/blog/lecture-l-ecran-
rattrape-le-papier-39760707.htm, consulté le 12 mai 2011
L’auteur de l’article résume l’état actuel de la lecture, sur écran ou sur papier. Il émet également quelques réserves à l’égard des supports
numériques actuels.
ENSSIB, « Temps de lecture : numérique vs papier », Anne-Laurence Margérard, 11 mai 2011,
http://www.enssib.fr/breves/2011/05/11/temps-de-lecture-numerique-vs-papier, consulté le 12 mai 2011
L’auteur décrit les résultats d’une enquête sur la lecture numérique réalisée par Gartner.
INTERASSOCIATION ARCHIVES BIBLIOTHEQUES DOCUMENTATION, « Proposition de loi sur le Prix unique du livre numérique (PULN) :
position de l’IABD », publié le 30 janvier 2011, http://www.iabd.fr/2011/01/30/proposition-de-loi-sur-le-prix-unique-du-livre-numerique-
puln-position-de-l%E2%80%99iabd/, consulté le 3 février 2011
L’IABD se prononce favorablement à l’égard du prix unique du livre numérique, mais nuance ses propos en refusant obstinément les
DRM, qui empêchent les usagers de modifier la forme du livre à leur guise et qui ralentissent le prêt numérique en bibliothèque.
LA FEUILLE, blog rattaché à lemonde.fr, « A chaque support son lecteur », Hubert Guillaud, 16 mars 2011,
http://lafeuille.blog.lemonde.fr/2011/03/16/a-chaque-support-son-lecteur/, consulté le 6 mai 2011
L’auteur de l’article énumère les différents types de lecteurs, tous liés à un support numérique particulier.
LEJDD.FR, « Le livre vaut bien une fête », publié le 16 mars 2009, http://www.lejdd.fr/Chroniques/Le-livre-vaut-bien-une-fete-76341/,
consulté le 1er mai 2011
L’article défend le livre papier à travers plusieurs arguments et ne croit pas à l’avenir que l’on réserve au livre, qu’il critique de manière
cynique par le biais du Salon du Livre et de ses préoccupations.
Juin 2011 - 19
Comment lit-on à l’ère numérique ?
LEMONDE.FR, « On est en pleine révolution », Sylvain Cypel, 5 mai 2011, http://www.lemonde.fr/livres/article/2011/05/05/on-est-en-
pleine-revolution_1517163_3260.html, consulté le 6 mai 2011
Ce court article met en avant l’explosion de l’ebook et de l’édition numérique dans un futur proche, en s’axant sur les bénéfices
financiers que cela sous-entend.
LEMONDE.FR, « La France adopte un prix unique du livre numérique », Alain Beuve-Méry, 5 mai 2011,
http://www.lemonde.fr/livres/article/2011/05/05/la-france-adopte-un-prix-unique-du-livre-numerique_1517410_3260.html, consulté le 6
mai 2011
Un article sur l’adoption de cette nouvelle loi, permettant une meilleure maîtrise du prix du livre numérique, notamment à travers les
grands distributeurs en ligne.
LE POINT CULTUREL , « Le livre de poche fait sa révolution », Mathieu G., 14 avril 2011, http://lepointculturel.blogspot.com/2011/04/le-
livre-de-poche-fait-sa-revolution.html, consulté le 16 mai 2011
Article de blog sur le nouveau format poche publié par les Editions Point2.
LIBERATION .FR, « Au fond des poches », Edouard Launet, 6 février 2003, http://www.liberation.fr/livres/0104439422-au-fond-des-
poches, consulté le 16 mai 2011
Rapide historique du Livre de Poche de Hachette, à l’occasion de son cinquantième anniversaire.
WIKIPEDIA ? « Vannevar Bush », http://fr.wikipedia.org/wiki/Vannevar_Bush, consulté le 19 avril 2011
La page Wikipédia destinée à Vannevar Bush dresse une biographie précise de l’inventeur du Memex.
Livres / revues :
AUTIE Dominique, De la page à l'écran, 2000 pour la première édition, Editions InTexte, 2003
L’auteur s’attèle à la définition de la page, de l’écran, de ce qui les lie (symboles, smileys…). Il s’intéresse également aux mutations de
l'écrit.
BELL Gordon et GEMMELL Jim, Total Recall, Editions Flammarion, 2009, traduit de l'anglais (Etats-Unis) par Christophe Rosson en 2011.
Les deux auteurs proposent le développement d’une e-mémoire qui répertorierait tous nos souvenirs et permettrait de nous faciliter la
vie (dossier médical numérique…).
BLASSELLE Bruno, Histoire du livre, A pleines pages, volume 1, Editions Gallimard, collection Découvertes Gallimard Histoire, 1997, réed.
2005
Un premier volume qui retrace l’histoire du livre depuis les volumen et les premiers codex.
BLASSELLE Bruno, Histoire du livre, Le triomphe de l'édition, volume 2, Editions Gallimard, collection Découvertes Gallimard Histoire, 1991,
réed. 2006
Le deuxième volume retraçant l’histoire du livre, du 19 e siècle à aujourd’hui.
BON François, Après le livre, livre numérique publié sur www.publie.net, 2011
L’auteur présente de nombreuses réflexions qui tournent autour du livre, de l’écriture, de la lecture, des outils technologiques et
informatiques.
BROCAS Alexis, "L'édition française est-elle prête pour le numérique ?", Le Magazine Littéraire, n°491, novembre 2009
Sur Google Books et les différents publics du livre numérique.
CHARONNAT Cécile, "La librairie embauche son animateur Web", Livres Hebdo n° 841, 12 nov. 2010
Sur les nouveaux métiers émergents grâce au numérique, notamment en librairie.
FOURMENTAL-LAM Catherine et GUERRY Philippe, « Librairies indépendantes : un vent mauvais ? », Expressions, magazine gratuit
bimestriel de Charente-Maritime, n° 16, nov.-déc. 2010
L’article s’intéresse à l’avenir des librairies indépendantes à l’ère du numérique.
GRANDMAISON Pascal et DARY Thibaut, "Le beau mariage de l'Ipad et de la BD", Le Figaro Magazine, 29 janvier 2011
Sur l’avenir des bandes-dessinées numériques et les supports qui permettent leur lecture.
SMITH Lane, C'est un livre, Editions Gallimard Jeunesse, 2010
Un livre jeunesse humoristique sur ce qu’est un livre, par rapport à un ordinateur.
ZAID Gabriel, Bien trop de livres ? Lire et publier à l'ère de l'abondance, 2003 pour l'édition originale, traduit de l'espagnol par Christine
Defoin, Société d'édition Les Belles Lettres, 2005
L’auteur s’intéresse à l’abondance et à la surproduction constante de livres. Il en fait la comparaison avec les autres médias.
20
Autres supports :
DAILYMOTION, six vidéos, « Les mutations du livre : entretien avec Roger Chartier », publié par laviedesidees le 25 septembre 2008,
http://www.dailymotion.com/video/x6v80k_les-mutations-du-livre-entretien-av_creation, consulté le 16 février 2011
Roger Chartier redéfinit le livre, pose des questions sur les mutations du livre (juridique, légitimité…), la durabilité face à l’éphémère, la
bibliothèque, l’acte de lecture, la relation à l’objet livre.
DELOULE Madeleine, rapport, Le numérique dans les médiathèques de Seine-Saint-Denis, états des lieux et enjeux, Association
Bibliothèques en Seine-Saint-Denis, 2008
Sur les futurs enjeux des médiathèques par rapport au numérique.
FRANCE INFO, chronique radio, « La lecture sur écran sollicite davantage le cerveau », Jérôme Colombain, 3 septembre 2009,
http://www.france-info.com/chroniques-nouveau-monde-2009-09-03-la-lecture-sur-ecran-sollicite-davantage-le-cerveau-337389-81-
109.html, consulté le 16 février 2011
Sur la trop grande interactivité possible sur écran, la désorientation cognitive qui demande trop de concentration.
Références des images :
http://www.iphonedevelopmenttalk.com/2011/04/14/best-iphone-game-development-books/
p. 11 : image ebook vs livres – Electronic books, Justin Hutchinson, Getty Images
p. 11 : image livre ouvert – Trends Updates
http://trendsupdates.com/presenting-the-all-new-revolutionary-library-e-book-reader/
http://hartpurylrc.wordpress.com/2010/03/01/getting-the-shelves-straight/
http://www.financetrails.com/blog/five-money-books-worth-every-penny
Indexation
Résumé
Ce mémoire s’intéresse à la manière dont l’acte de lecture est bouleversé par le numérique, notamment par les nouveaux supports. La
lecture, au premier abord, se fait naturellement sur un support papier. Pourtant, face à l’écran, un lecteur agit et réagit de façon
différente. Le numérique n’implique plus une lecture linéaire. Elle est désormais hypertextuelle, elle fuse dans tous les sens, elle implique
des trajets de lecture infinis et une liberté de lecture totale. Il s’agit donc ici d’observer ces nouveaux bouleversements et de réagir à ce
qu’ils impliquent : pourquoi les livres numériques font-ils si polémique ? Quelles sont les limites des supports numériques ? Comment la
lecture devient une marchandise en ligne, particulièrement par le biais des moteurs de recherche ? Toute cette réflexion sera en partie
épaulée par les publications d’Alain Giffard, qui étudie les pratiques de lecture numérique.
142 mots
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Annexe
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6%
19%
15%
21%
23%
13%
3%
de 11 à 15 ans
de 16 à 20 ans
de 21 à 25 ans
de 26 à 35 ans
de 36 à 45 ans
de 46 à 55 ans
de 56 à 65 ans
de 66 ans et plus