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> A la Une >>> INFORMATIONS OUVRIÈRES N 0 266 SEMAINE DU 29 AOÛT AU 4 SEPTEMBRE 2013 2 “Quand les patrons se féli- citent, il y a tout lieu de se méfier” Derniers préparatifs de la réforme des retraites La satisfaction du Medef “L’avertissement de Bruxelles” C’est sous ce titre, en « une », que Le Journal du dimanche (25 août) présente l’interview de Olli Rehn, vice-président de la Commission européenne, chargé des Affaires économiques et monétaires. Olli Rehn affirme : « Les hausses d’impôts en France ont atteint un seuil fatidique. Lever de nouvelles taxes aurait pour effet de casser la croissance et de peser sur l’emploi. La discipline budgétaire doit passer par une baisse des dépenses publiques et non par de nouveaux impôts. » Mais pour que nul n’en doute, la position du commissaire euro- péen sur les impôts a un objectif plus large, qu’il énonce ainsi : « La France a engagé des réformes structurelles qui vont dans le bon sens. Mais elle ne va pas assez loin et assez vite dans leur mise en œuvre (...). La Commission attend des résultats sur trois fronts : la compétitivité qui est encore trop faible et vous a fait perdre des parts de marché tout en pesant sur les marges de vos entreprises ; une ouverture du marché des ser- vices qui reste protégé par des bar- rières à l’entrée avec encore trop de professions réglementées ; et il faut que le transport ferroviaire et l’énergie, où la SNCF et EDF conservent un quasi-monopole, s’ouvrent à la concurrence. La France doit faire preuve de plus d’audace aussi dans la réforme en cours de son système de retraite et maintenir le cap sur la réduction de ses déficits structurels. » Un véritable programme de défense des intérêts du capital ! L’annonce surprise du lendemain faite au Medef n’y trouve-t-elle pas sa source ? D. S. Daniel Shapira L undi 26 et mardi 27 août, le Premier ministre, Jean-Marc Ayrault, accompagné de Marisol Touraine et Michel Sapin, respec- tivement ministres des Affaires sociales et du Travail, a reçu les organisations patro- nales et les confédérations syndicales. Toute la presse distille depuis plusieurs jours des informations sur ce que pour- rait proposer le gouvernement dans sa future réforme des retraites : nouvel allongement de la durée de cotisation, compte-temps pénibilité, mesures familiales… Avec encore des incerti- tudes : augmentation de la CSG, ou aug- mentation des cotisations vieillesse, ou mélange des deux… Mais subitement, lundi 26 août, en fin de journée, au sortir de la rencontre entre le gouvernement et le Medef, la nouvelle tombe par la voix de son nou- veau président, Pierre Gattaz : « Il y a une ouverture qui nous a été faite, inté- ressante, c’est la baisse du coût du tra- vail. » Pierre Gattaz ne cache pas sa satisfac- tion. Il ajoute : « Le Premier ministre nous a tendu la main sur une réflexion concernant la protection sociale et le coût du travail. » Il n’est pas inutile de citer largement les déclarations de Gattaz car, selon lui, cette ouverture a été faite « pour les semaines à venir dans le cadre du PLFSS (projet de loi de financement de la Sécurité sociale — NDLR), c’est-à-dire pour fin septembre, pour voir si, en parallèle de cette réforme des retraites, nous pourrions baisser le coût du travail de façon significative », affirmant avoir « pris l’information de façon positive ». Et Gattaz d’ajouter : « Cette ouverture est intéressante car si nous arrivons à grou- per un coût du travail qui baisse signifi- cativement (…) au-delà du CICE (crédit d’impôt compétitivité emploi — NDLR) (…), si nous arrivons à faire cela avec le gouvernement, je dirais bravo. » Et en échange ? « On pourra intégrer des dixièmes de point de cotisation supplé- mentaires s’il fallait le faire pour régler quelques problèmes de retraites. » Car pour Gattaz, l’essentiel est : « Vous savez que nous avons 50 milliards de trop de cotisations patronales et sala- riales sur le coût du travail (…). Vous savez notamment qu’il y a 5,4 % exacte- ment de cotisations liées aux allocations familiales qui sont payées par les entre- prises (…). Eh bien nous pourrions ima- giner réfléchir avec le gouvernement comment transférer ces 34 milliards du coût du travail, les enlever, de telle façon à redonner de l’air aux entreprises et financer par d’autres moyens ces alloca- tions familiales. » Ces déclarations ont le mérite de la clarté… mais ne peuvent en même temps qu’inquiéter. Tous les militants se diront : quand les patrons se félicitent, il y a tout lieu de se méfier. Raison de plus pour, dans la prépara- tion de la journée de grèves et de mani- festations du 10 septembre (appelée par la CGT, FO, la FSU et Solidaires), exiger à tous les niveaux : « Aucun nouveau recul sur les retraites ! » Photo AFP Les dirigeants du Medef, avec à leur tête le président Pierre Gattaz (à gauche), rencontrent le Premier ministre, Jean-Marc Ayrault, le 4 juillet 2013. “Mesures de justice” ? De quoi s’agit-il ? D’ici au 4 septembre, le gouvernement devrait préciser l’intégralité de sa réforme. Depuis plusieurs jours, il insiste sur des « mesures de justice » : la pénibilité (voir Informations ouvrières de la semaine dernière) et les « avantages familiaux ». Actuellement, un bonus de 10 % de retraite est réservé aux parents de trois enfants et plus. Désormais, il y aurait un bonus dès le premier enfant. Le quotidien Le Monde (25 et 26 août) précise : « Un montant compris entre 70 et 100 euros par mois et par enfant est évoqué par le rapport Moreau. » Mais… car il y a un mais : en parallèle, les huit « trimestres validés offerts aux femmes pour chaque enfant seraient progressivement supprimés ». Et voilà ! L’acquis collectif dont toutes les femmes bénéficient serait remis en cause au profit d’une somme forfaitaire… bien inférieure à la décote qui en résulterait. Nous y reviendrons.

Derniers préparatifs La satisfaction du Medef · péen sur les impôts a un objectif plus large, qu’il énonce ... mentaires s’il fallait le faire pour régler ... que c’est

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“Quand les patronsse féli-citent, il y a tout lieu de seméfier”

Derniers préparatifs de la réforme des retraites

La satisfactiondu Medef

“L’avertissement de Bruxelles”

C’est sous ce titre, en « une », que Le Journal du dimanche (25 août) présente l’interview de Olli Rehn, vice-présidentde la Commission européenne,chargé des Affaires économiques et monétaires. Olli Rehn affirme : « Les haussesd’impôts en France ont atteint un seuil fatidique. Lever de nouvellestaxes aurait pour effet de casser la croissance et de peser sur l’emploi.La discipline budgétaire doit passerpar une baisse des dépensespubliques et non par de nouveauximpôts. »Mais pour que nul n’en doute, la position du commissaire euro-péen sur les impôts a un objectifplus large, qu’il énonce ainsi :« La France a engagé des réformesstructurelles qui vont dans le bonsens. Mais elle ne va pas assez loin et assez vite dans leur mise en œuvre (...). La Commission attend des résultats sur trois fronts : la compétitivité qui est encore tropfaible et vous a fait perdre des partsde marché tout en pesant sur les marges de vos entreprises ;une ouverture du marché des ser-vices qui reste protégé par des bar-rières à l’entrée avec encore trop deprofessions réglementées ; et il fautque le transport ferroviaire et l’énergie, où la SNCF et EDFconservent un quasi-monopole,s’ouvrent à la concurrence. La France doit faire preuve de plusd’audace aussi dans la réforme en cours de son système de retraite et maintenir le cap sur la réductionde ses déficits structurels. »Un véritable programme de défensedes intérêts du capital !L’annonce surprise du lendemainfaite au Medef n’y trouve-t-elle passa source ?

D. S.

Daniel Shapira

Lund i 2 6 e t ma rd i27 août, le Premierministre, Jean-MarcAyrault, accompagnéde Marisol Touraine etMichel Sapin, respec-tivement ministresdes Affaires sociales et

du Travail, a reçu les organisations patro-nales et les confédérations syndicales. Toute la presse distille depuis plusieursjours des informations sur ce que pour-rait proposer le gouvernement dans safuture réforme des retraites : nouvelallongement de la durée de cotisation,compte-temps pénibilité, mesuresfamiliales… Avec encore des incerti-tudes : augmentation de la CSG, ou aug-mentation des cotisations vieillesse, oumélange des deux… Mais subitement, lundi 26 août, en finde journée, au sortir de la rencontreentre le gouvernement et le Medef, lanouvelle tombe par la voix de son nou-veau président, Pierre Gattaz : « Il y aune ouverture qui nous a été faite, inté-ressante, c’est la baisse du coût du tra-vail. »Pierre Gattaz ne cache pas sa satisfac-tion. Il ajoute : « Le Premier ministrenous a tendu la main sur une réflexionconcernant la protection sociale et lecoût du travail. »Il n’est pas inutile de citer largement lesdéclarations de Gattaz car, selon lui,cette ouverture a été faite « pour lessemaines à venir dans le cadre du PLFSS(projet de loi de financement de laSécurité sociale — NDLR), c’est-à-direpour fin septembre, pour voir si, en

parallèle de cette réforme des retraites,nous pourrions baisser le coût du travailde façon significative », affirmant avoir« pris l’information de façon positive ». Et Gattaz d’ajouter : « Cette ouverture estintéressante car si nous arrivons à grou-per un coût du travail qui baisse signifi-cativement (…) au-delà du CICE (créditd’impôt compétitivité emploi — NDLR)(…), si nous arrivons à faire cela avec legouvernement, je dirais bravo. »Et en échange ? « On pourra intégrer desdixièmes de point de cotisation supplé-mentaires s’il fallait le faire pour réglerquelques problèmes de retraites. »Car pour Gattaz, l’essentiel est : « Voussavez que nous avons 50 milliards detrop de cotisations patronales et sala-riales sur le coût du travail (…). Voussavez notamment qu’il y a 5,4 % exacte-ment de cotisations liées aux allocationsfamiliales qui sont payées par les entre-prises (…). Eh bien nous pourrions ima-giner réfléchir avec le gouvernementcomment transférer ces 34 milliards ducoût du travail, les enlever, de telle façonà redonner de l’air aux entreprises etfinancer par d’autres moyens ces alloca-tions familiales. »Ces déclarations ont le mérite de laclarté… mais ne peuvent en mêmetemps qu’inquiéter. Tous les militants se diront : quand lespatrons se félicitent, il y a tout lieu de seméfier.Raison de plus pour, dans la prépara-tion de la journée de grèves et de mani-festations du 10 septembre (appelée parla CGT, FO, la FSU et Solidaires), exigerà tous les niveaux : « Aucun nouveaurecul sur les retraites ! » �

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Les dirigeants du Medef, avec à leur tête le président Pierre Gattaz (à gauche), rencontrent le Premier ministre, Jean-Marc Ayrault, le 4 juillet 2013.

“Mesures de justice” ? De quoi s’agit-il ?D’ici au 4 septembre,le gouvernement devrait préciserl’intégralité de sa réforme. Depuisplusieurs jours, il insiste sur des« mesures de justice » : la pénibilité(voir Informations ouvrièresde la semaine dernière) et les « avantages familiaux ».Actuellement, un bonus de 10 % de retraite est réservé aux parents de trois enfants et plus. Désormais, il y aurait un bonus dès le premierenfant. Le quotidien Le Monde(25 et 26 août) précise :« Un montant compris entre 70 et 100 euros par mois et par enfantest évoqué par le rapport Moreau. » Mais… car il y a un mais : en parallèle,les huit « trimestres validés offertsaux femmes pour chaque enfantseraient progressivementsupprimés ». Et voilà ! L’acquis collectif donttoutes les femmes bénéficientserait remis en cause au profit d’une somme forfaitaire… bien inférieure à la décote qui en résulterait. Nous y reviendrons.

éAl’heure où il est beaucoup

question de la CSG, un rappeldes faits s’impose. Instaurée en1991 par le Premier ministre« socialiste » Michel Rocard, la

CSG était alors de 1 % ; elle taxe aujourd’huiles salariés à hauteur de 7,5 % et les retraitésà hauteur de 6,6 %. Pourquoi Rocard (1) avait-il mis en place laCSG ? Sous le prétexte de faire contribuertous les revenus, il s’agissait en fait d’ouvrirune brèche dans un système d’assurancemaladie jusque-là exclusivement financépar le salaire différé. Depuis, la CSG aug-mente en parallèle avec la croissance desexonérations patronales. C’est la fiscalisa-tion en marche, qu’à l’époque Informationsouvrières avait dénoncée, pronostiquantqu’elle se transformerait en une machine deguerre contre le système de solidaritéouvrière fondé sur le salaire différé.En 1991, cette mesure était dictée par l’im-minence de la ratification du traité de Maas-tricht, qui stipule que les comptes de laSécurité sociale sont agrégés à ceux de l’Etatet soumis à la dictature des fameux 3 % dudéficit public. Vingt-deux ans plus tard, le gouvernementenvisage d’augmenter la CSG et offre denouvelles baisses de cotisations au Medefqui se réjouit de cette « ouverture » vers « labaisse du coût du travail ». Dans le même temps, on annonce l’intro-duction d’un « compte épargne pénibilité ».Même mécanique que pour la CSG : cettefois, c’est dans le système des retraites parrépartition qu’une brèche serait ouvertepour introduire un système dit « notionnel »,brisant la solidarité ouvrière entre actifs etretraités.1991, 2013 : continuité des gouvernements« socialistes »... Dès lors qu’ils acceptentd’appliquer les exigences du traité de Maas-tricht, du FMI et de l’Union européenne, cesgouvernements n’ont qu’une politique : aunom de la compétitivité, baisser ce que lescapitalistes appellent le « coût du travail »,c’est-à-dire prendre sur la valeur de la forcede travail (Sécurité sociale, assurance mala-die, retraites, salaires, droits collectifs) pourrenflouer banquiers et spéculateurs.Hollande s’en est vanté le 19 août : « Nous nepèserons (...) que si nous retrouvons une com-pétitivité élevée et un niveau de dettepublique soutenable. »Dans cet objectif, a-t-il poursuivi, « nous avons commencé d’ytravailler ; la loi de refondation de l’école,celle sur l’enseignement supérieur, (...) le planpour la compétitivité, la modernisation dumarché du travail, la Banque publique d’in-vestissement. »Les choses sont claires. Les plus de quarantelois votées et promulguées par le gouverne-ment Hollande dans sa première annéed’exercice s’inscrivent toutes dans le cadredu TSCG qu’il a ratifié. Toutes ces lois visent à déqualifier et surex-ploiter. Elles n’ont qu’une justification, celleque donne Hollande lui-même : la compéti-tivité, la dette, l’euro.Les « arbitrages » ultimes du gouvernemententre celles des contre-réformes qu’il choi-sira et celles qu’il écartera traduiront sansdoute les crises, les tensions, les contradic-tions, et la peur du gouvernement face à lalutte de classe. Mais quelles que soient les réformes rete-nues, elles n’ont qu’une source : la défensedes intérêts de la classe capitaliste. Ellesn’appellent qu’une réponse du mouvementouvrier : ces contre-réformes doivent êtreretirées, l’unité doit se réaliser pour bloquercette politique anti-ouvrière.

(1) Rocard, qui signe ces jours-ci, en compagnie d’an-ciens responsables de la LCR passés au Front degauche, de dirigeants du PCF, de la FSU, de Solidaires,un « appel pour un débat public sur la santé »...

ÉDITORIAL

Du coup de la CSG à celui de la pénibilité

Daniel GlucksteinSecrétaire national du POI

INFORMATIONS OUVRIÈRES N0 266 SEMAINE DU 29 AOÛT AU 4 SEPTEMBRE 20133

Qu’en est-il de l’allongementde la durée de cotisation ?Dimanche soir 25 août, Jean-Marc Ayrault a réaffirmé sur France 2 qu’il n’y aurait pasde relèvement de l’âge minimum légal de départ à la retraite mais une hausse progressive de la durée de cotisations après 2020. D’où vient cette date ? C’est la limite qu’avait traitée la loi Fillon de 2003. Le tableau ci-dessous présente la situation issue de cette loi.

FO ET CGT CONTRE UN NOUVELALLONGEMENTLundi 26 août, dans une interview au Parisien,Jean-Claude Mailly, secrétaire général de Force ouvrière déclare : « Nous sommes ferme-ment opposés à l’allongement de la durée decotisations. Depuis 1993, nous en sommes à lasixième réforme et, à chaque fois, on recule ledépart. C’est stupide : on entre de plus en plustard dans le monde du travail et on veut encoreobliger les gens à travailler jusqu’à 68 ou69 ans. »Quant à la CGT, son responsable retraites, EricAubin, a répondu le 26 août à la question duNouvel Observateur « La CGT refuse un allon-gement de cotisation ? » : « Cet allongements’inscrit dans ce qu’a fait la droite dans les pré-cédentes réformes. Cela nous pose problèmepour un gouvernement de gauche, d’autantque c’est ne pas prendre en compte ce qu’est lasituation de l’emploi. Or on continue de sortirles seniors des entreprises. On a de moins enmoins de salariés qui ont le plein de leursdroits lorsqu’ils arrivent à l’âge de la retraite.Avec les décotes, on a un niveau de pension quiva chuter. » �

LES APPELS COMMUNS AU 10 SEPTEMBRE SE MULTIPLIENTDepuis une semaine, de nombreuses ins-tances syndicales étant rentrées de congés, lesrencontres entre les organisations appelant àla journée de grèves et de manifestations du10 septembre se multiplient. Citons par exemple, au niveau des branches,deux appels communs des fédérationsconcernées CGT et FO, dans les banques etdans les assurances. Dans les départements, de nombreuses rencontres entre unions départementales setiennent depuis quelques jours et aboutissentà des appels communs entre CGT, FO, FSU etSolidaires : en Charente-Maritime, dans lesCôtes-d’Armor, le Doubs, l’Indre-et-Loire, lePuy-de-Dôme, la Vienne, au niveau régionalde l’Ile-de-France.Et il y a les appels communs dans les entre-prises de toutes professions. Parmi les derniers en date : la caisse primaired’assurance maladie de Seine-Saint-Denis,l’hôpital IGR, dans le Val-de-Marne, de nom-breux centres des Télécoms, à Paris, à Rennes,etc. �

Grèves et manifestations le 10 septembre

Qu’est-ce qui se dégage de ce tableau ? � Ceux qui peuvent légalement partir cette année à la retraite sont de la génération née en 1952. Pour eux, la durée de cotisation nécessairepour avoir une retraite à taux plein est de 41 annuités.� Le tableau montre clairement que cette durée augmente ensuite à 41 annuitéset un trimestre, puis 41 annuités et demie.Tout cela en vertu de décrets d’applicationde la loi Fillon de 2003 qui a décidéun allongement progressif « en fonction de l’espérance de vie ». � Toujours en application de cette loi, le gouvernement doit promulguer, avant le 1er juillet 2016, un nouveau décret augmentantà 41 annuités et trois trimestres.Le gouvernement n’a jamais dit qu’il ne le ferait pas.Quand Jean-Marc Ayrault affirme qu’il n’y a pas de nouvel allongement d’ici à 2020, il fait comme si l’on était déjà à 41 annuités et trois trimestres, en gommant donc l’allongement prévu par la loi Fillon d’ici à 2020.� Et pour la suite, au-delà de 2020,le gouvernement semble travailler sur unehausse progressive de la durée de cotisationd’un trimestre tous les trois ou quatre ans…C’est-à-dire très exactement la continuitétotale avec la loi Fillon de 2003. D. S. �

CFDT ET CFTC ACCEPTENT 43 ANSLe président de la CFTC, PhilippeLouis, a déclaré lundi 26 août ausortir de son entretien avec Jean-Marc Ayrault : « On nous a annoncéqu’on allait augmenter la durée decotisation en n’allant pas au-delàde 43 ans à l’issue de 2035 », ou dumoins, « on ne nous a pas contreditquand on a dit 43 ans ». Quel aveu !La CFTC s’est donc prononcéepour l’allongement jusqu’à 43 ans.Quant à Laurent Berger de laCFDT, selon l’AFP, il a évoqué unedurée de « 43 ans en 2035 », maisjugé « hors de question d’aller au-delà ». La nouvelle « revendication » com-mune à la CFDT et à la CFTC estdonc l’allongement de la durée decotisation à 43 ans ! On comprendqu’aucune de ces deux organisa-tions n’appelle au 10 septembre.

> A la Une <INFORMATIONS OUVRIÈRES N0 266 SEMAINE DU 29 AOÛT AU 4 SEPTEMBRE 20134

Dans une situation tendue où laréforme des retraites s’annonce, oùdes voix discordantes se sont affir-

mées au sein même du PS, l’universitéd’été du Parti socialiste a mis en son centrele combat contre le Front national et ladroite. « Retrouvant ses accents d’ancienprésident de SOS Racisme, le premier secré-taire du PS a sonné le tocsin d’une “batailleculturelle et idéologique” contre un “blocdroitier” qui, selon lui, menace l’ordrerépublicain. D’une voix plus ferme qued’habitude, le Premier ministre a lui aussiappelé à lutter contre une “droite classique”aujourd’hui “sous l’influence d’une nou-velle extrême droite” » (Le Monde, 27 août).Même au sein de l’université d’été du PS,certains participants se sont émus que lesquestions de la rentrée soient délibérémentmises de côté. Le quotidien Le Monde noteà ce sujet : « De façon significative, ni M. Désirni M. Ayrault n’ont centré leurs propos sur lebilan de la première année du quinquennat.

Comme s’ils avaient compris que l’énuméra-tion des lois votées ne saurait mobiliser leurstroupes dans la perspective des scrutins àvenir. » C’est le moins que l’on puisse dire.Sous couvert d’anonymat, un responsabledu PS a déclaré : « On va le payer. Je ne saispas si c’est aux municipales ou aux euro-péennes, mais on va le payer. »C’est pourquoi, une nouvelle fois, HarlemDésir a appelé à l’unité de la gauche dès lepremier tour des municipales. Il s’est notam-ment adressé au PCF pour que celui-ci sedémarque de la position de Mélenchon, rap-pelant au PCF que dans de nombreusesvilles, la gestion communale est faite encommun par des majorités PS-PC-Verts.�

Des universités d’été et des estivales

A l’université d’été du PS, le bilan du gouvernement n’est pas à l’ordre du jour

Budget 2014Paris, 25 août 2013 (AFP)« Le Premier ministre, Jean-Marc Ayrault, a insisté dimanche sur l’effort que l’Etat va réaliser dans le budget 2014 (…). “Les éco-nomies pour 2014 seront sans précédent (…) :10 milliards d’économies, ça ne s’est jamais vu”,a-t-il déclaré (…).

“Je suis le Premier ministre de la détermination à redresser notre pays et nous allons y parvenir”, a-t-il dit.

Les grandes lignes du budget 2014 seront dévoi-lées fin septembre. D’ores et déjà, le gouverne-ment a prévu qu’un effort fiscal supplémentairede 6 milliards d’euros serait demandé aux Fran-çais et que 14 milliards d’économies seraientréalisées dans les dépenses publiques (10 mil-liards dans le budget de l’Etat et 4 milliards dansles collectivités locales, la Sécurité sociale…).

François Hollande avait annoncé en 2012 cet effort de 10 milliards par an pendant cinq ans pour que la France se conforme à ses engagements européens en réduisantses déficits. »

EN BREF

Droits ouvriers, conquêtes sociales, libre administration des communes

BLOQUER LA POLITIQUE ANTI-OUVRIÈRE DU GOUVERNEMENT HOLLANDE-AYRAULT, ROMPRE AVEC L’UNION EUROPÉENNEMEETING

SAMEDI 28 SEPTEMBRE 201314 H 30 - ESPACE CHARENTONPARIS Accueil à partir de 14 heures

327, rue de Charenton, Paris 12e

(Mo Porte-de-Charenton)

POI PARTI OUVRIERI N D É P E N DA N T

Le Front de gauche organisait leweek-end dernier des Estivales àSaint-Martin-d’Hères (Var). La

tension était palpable. Nous avons citédans le précédent numéro d’Informa-tions ouvrières les propos de Jean-Luc

Mélenchon refusant un accord avec le PSdès le premier tour pour les municipales.Deux jours avant les Estivales, dans uneinterview à Libération (22 août), PierreLaurent, secrétaire national du PCF, sedémarquait de Jean-Luc Mélenchon :

« L’objectif doit rester de faire élire desmajorités de gauche en rassemblant com-munistes, Front de gauche, écologistes,socialistes et forces citoyennes pour empê-cher droite et extrême droite de conquérirdes villes. »Le Monde (27 août) rapporte : « Le bras droitde M. Mélenchon, François Delapierre, citel’exemple d’Evry dont le ministre de l’Inté-rieur, Manuel Valls, fut maire de 2001 à 2012et où les communistes pourrait être tentésde repartir avec le PS. “Comment expliquerqu’on a des divergences majeures avecManuel Valls mais qu’on veut aller avec sonéquipe”, souligne M. Delapierre. » Ces contradictions et tiraillements laissentnéanmoins une question de côté : la consigneau deuxième tour. �

Avantages ? Le Parisien (27 août) annonce que des « discus-sions ont été ouvertes pour remettre en causeles tarifs préférentiels dont bénéficient les sala-riés d’EDF et d’Air France ». Loin d’être des « privilèges », ce sont des droits qui ont été acquis par les travailleurs dans le cadre des droits collectifs.

ImpôtsSelon les chiffres publiés dans la presse (Le Parisien, Le Figaro, France 2), 16 millions de foyers fiscaux verront leurs impôts augmenter de 2 %.

Gazole1,35 euro, c’était le prix du litre de gazole la semaine dernière. C’est le plus haut niveauatteint depuis la mi-avril pour ce carburant, le plus utilisé en France.

Les Estivales du Front de gauche,sous tension

Harlem Désir et Jean-Marc Ayrault à la clôture des universités d’été du PS à La Rochelle, le 25 août 2013.

Une question reste posée : quelle consigne au deuxième tour des municipales ?

Pierre Laurent et Jean-Luc Mélenchon, le 25 août.

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> L’actualité politique et sociale <INFORMATIONS OUVRIÈRES N° 266 SEMAINE DU 29 AOÛT AU 4 SEPTEMBRE 2013

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ChroniquePOLITIQUE

La rentrée de la territorialisation de l’école

Laurence Fayard

Le 22 août, le Premier ministre, Jean-Marc Ayrault, s’est adressé aux rec-teurs et aux directeurs académiques des services de l’Education nationale. Il s’est félicité d’avoir ouvert un an plustôt une « concertation nationale sur la refondation de l’école »qui s’est conclue « par l’adoption de la loi d’orientation et de programma-tion pour la refondation de l’école, promulguée le 8 juillet dernier ». C’est en effet dans le cadre de cette loide dislocation et de territorialisation de l’école de la République que va se dérouler cette rentrée scolaire 2013.Avec cette loi, impliquant largement les collectivités territoriales, l’école n’est plus, de fait, de la responsabilité de l’Etat. La volonté du gouvernementqu’elle se mette en place dès cette ren-trée s’est d’ailleurs traduite par l’adop-tion, début juillet, d’une quinzaine de décrets d’application.C’est dans cette perspective que le ministre Peillon veut désormais se consacrer à « l’acte II de la refonda-tion de l’école ». Il s’agit de démantelerles statuts des personnels pour les adapter au cadre de la loi, et notam-ment d’en finir avec les décrets de 1950qui définissent les obligations de servicedes enseignants des collèges et lycéesexclusivement en heures d’enseigne-ment dans leur discipline de recrute-ment. Le gouvernement veut aller vite.Dès le 16 juillet, Vincent Peillon a réuniles fédérations syndicales de l’Educa-tion nationale pour leur présenter les « discussions de la rentrée sur les métiers et les parcours profession-nels des personnels de l’Educationnationale ». Treize groupes de travaildevraient être mis en place. Les discus-sions seront ouvertes dès ce mois de septembre et devraient se poursuivrejusqu’en février 2014. C’est pourquoi le Premier ministre a insisté dans sondiscours du 22 août : « Je sais, Monsieurle Ministre, que vous voulez engager ce chantier dans un dialogue apaiséavec les organisations représentativesdes professions concernées ». Le « dialogue apaisé » que le gouverne-ment appelle de ses vœux, c’est la parti-cipation des organisations syndicales à l’acte II de la refondation de l’école.Mais en dépit de la volonté de certainesdirections syndicales, le vote au Conseilsupérieur de l’éducation du 10 juilletn’exprime-t-il pas le rejet de cette poli-tique par de nombreux cadres et mili-tants syndicaux ? Rejet qui prend appuisur la mobilisation qui a vu se dresserau cours de l’année scolaire précédentedes dizaines de milliers d’enseignantsavec leurs sections syndicales dans la grève et les manifestationscontre la réforme des rythmes scolaireset la loi Peillon. Rien n’est réglé.

Jack Lefebvre

La loi d’orientation Peillon de « refondationde l’école » a été adoptée par l’Assemblée natio-nale le 25 juin 2013 avec les voix des groupesPS, écologiste et Front de gauche. Désormais,toute une série de décrets d’application de laloi sont rédigés et soumis aux instances deconcertation réunissant les organisations syn-dicales.2 500 000 élèves, de 11 à 15 ans, sont scolari-sés dans 5 200 collèges publics. Le collège estsouvent présenté comme le « maillon faible »du système éducatif en France. Mais quels« remèdes » propose le ministre Peillon ?

Deux décrets concernant le collège ontété présentés au Conseil supérieur del’éducation (CSE) le 10 juillet. Deux

décrets qui vont encore plus loin que la loi etqui l’aggravent.Un décret relatif aux cycles à l’école et au collège,avec le découpage de la scolarité en cycles de troisans et notamment la création d’un cycle regrou-pant les années de CM1, CM2, de l’école primaire,et la classe de sixième du collège. Et un décret créant un conseil école-collège, pré-sidé par le principal du collège et l’inspecteur duprimaire chargé de la circonscription. Ce sonteux qui désigneront les enseignants des écoleset des collèges y participant. Notons que ce conseilécole-collège, pourra accueillir des représentants

des collectivités territoriales dans les commis-sions qu’il désignera. C’est donc un pas de plusvers la territorialisation de l’Education nationale. Ces mesures entreront peu à peu en applicationà partir de la rentrée de septembre 2013.

QUEL EST LE SENS DE CES MESURES ?Jusqu’à ce jour, il existe un enseignement dusecond degré, organisé entre le collège et le lycée(qu’il soit général, technologique ou profession-nel) et débouchant sur l’obtention du baccalau-réat. L’enseignement est organisé par disciplines(français, mathématiques, langues vivantes, his-toire et géographie…), avec des professeurs spé-cialisés pour chaque discipline.Des programmes fixent l’enseignement qui doitêtre dispensé par les enseignants aux élèves etdébouchent sur un diplôme, le baccalauréat, qui,malgré tous les coups qu’il a reçu, existe, attes-tant d’un niveau d’études et ouvrant la porte àl’enseignement supérieur. C’est cet édifice que le ministre, à la suite de sesprédécesseurs, entend saper. Le décret précised’ailleurs que « le ministre chargé de l’Educationnationale définit par arrêté, pour chaque cycle, lesobjectifs d’apprentissage, les horaires et les pro-grammes d’enseignement incluant des repèresréguliers de trois progressions ainsi que les niveauxde fin de cycle requis pour l’acquisition des connais-sances et des compétences du socle commun… »C’est une refonte totale de l’enseignement quiest programmée.

LE BACCALAURÉAT EST MENACÉPour la première fois est mis en place un cyclecommun à cheval sur ces deux ordres d’ensei-gnement.Le cycle CM1-CM2-sixième est appelé « cyclede consolidation », c’est-à-dire que la classe desixième ne serait plus une classe où un élèveprogresse et découvre de nouvelles disciplinescomme les langues vivantes et de nouvellesméthodes de travail, mais plutôt la conclusiondu cycle entamé en primaire.D’ailleurs, les redoublements en cours de cycledisparaîtraient. « Ils sont inefficaces », dit leministre, ajoutant : et trop coûteux surtout. Réunir l’enseignement primaire et la premièreclasse du collège ne vise pas à un meilleur tra-vail entre ces deux ordres d’enseignement. C’estun autre but que poursuit le ministre. Le « socle commun de connaissances, de com-pétences et de culture », issu des directives euro-péennes, inscrit dans la loi Fillon de 2005 devient,avec la loi Peillon, la base de l’organisation del’enseignement. L’enseignement devient un« parcours », ne garantissant en rien aux élèvesl’obtention d’un niveau de connaissances.Un « livret personnel de compétences », com-prenant des centaines de cases que les ensei-gnants doivent remplir, atteste de la « maîtrisedu socle commun ». Les diplômes, sanctionnant un niveau deconnaissance, garantissant des droits à la jeunegénération, ne peuvent plus exister dans un telsystème. Le diplôme national du brevet (ou cequ’il en reste) sera « revu » et, à terme, le bac-calauréat est menacé. Ce dispositif va frac-tionner le second degré et fermer la porte à lapoursuite d’études au lycée pour de nombreuxélèves.

HARO SUR LE STATUT DES ENSEIGNANTSDans une telle perspective, il n’y a plus de placepour les statuts nationaux garantissant aux pro-fesseurs de pouvoir exercer leur métier. Lesdécrets de 1950 garantissent aux professeursdes collèges et lycées, les professeurs certifiéset agrégés, un service calculé en nombred’heures de cours, dans une discipline précise,et sont la base d’un système fondé sur la trans-mission des connaissances aux élèves. Leministre a lancé le 16 juillet une concertationportant sur le métier d’enseignant. Le statutdes personnels est dans la ligne de mire duministre Peillon.

Loi Peillon : un décret créant un cycle CM1-CM2-sixième va entrer en vigueur

Dans son discours du 22 août, le Premierministre a annoncé que les 28 057 auxiliairesde vie scolaire (AVS) accompagnant les élèveshandicapés se verraient progressivement pro-poser un contrat à durée indéterminée (CDI),au terme de leurs six ans d’exercice en contratà durée déterminée (CDD), à partir de la ren-trée 2014. Il a ajouté que cette mesure feraitl’objet d’une loi dans les prochains mois etque des dispositions transitoires seraient pré-cisées pour l’année 2013-2014.

Bien entendu, nous comprenons le sou-lagement que pourrait susciter une telleannonce auprès des centaines de per-

sonnels AVS non arrivés au terme de leurcontrat et voyant peser au-dessus de leur têtel’épée de Damoclès du licenciement. Licencie-ment que des milliers de leurs collègues ont eu àsubir avant eux, y compris sous le gouverne-ment Hollande-Ayrault.Mais de quoi s’agit-il vraiment ?D’une part, le gouvernement Hollande-Ayraultpoursuit le démantèlement de l’enseignementspécialisé avec la fermeture des classes d’inté-gration scolaire (CLIS) pour enfants handica-pés et-ou en grande difficulté engagée par lesgouvernements précédents. Il poursuit la sup-pression des postes d’enseignants spécialisés,

fonctionnaires d’Etat, qui, titulaires d’undiplôme spécialisé, enseignaient dans cesclasses. Il choisit de ne pas ouvrir la voie à latitularisation des AVS (par concours) dans lecadre du statut.

“UN CDI POURRAIT REMPLACER LE STATUTDE FONCTIONNAIRE D’ÉTAT”D’autre part, et c’est là d’une gravité sans pré-cédent, il entend institutionnaliser pour la pre-mière fois le fait qu’un CDI pourra remplacerle statut dans la fonction publique d’Etat. Il s’agirait d’une mesure qui, comme cela s’estpassé à La Poste, pourrait ouvrir progressive-ment la voie à l’extinction du recrutement defonctionnaires d’Etat ! Notons, par exemple, qu’au même moment, legouvernement poursuit le recrutement d’em-plois d’avenir professeurs. Six mille, pour laplupart étudiants de licence en deuxième année,sont recrutés en CDD en cette rentrée. Sanscompter leur bourse, leur rémunération est de402 euros pour douze heures en moyenne parsemaine. Ce travail ne sera pas pris en comptepour le calcul de la retraite ; la rémunérationest inférieure au minimum du régime général. Nul doute que la défense du statut de fonc-tionnaire d’Etat va être au cœur de toute lasituation dans l’enseignement. � L. F.

Auxiliaires de vie scolaireLe gouvernement annonce une loi instituant un CDI dans la fonction publique d’Etat

ÉCLAIRAGE

Le vote au Conseil supérieur de l’éducation du 10 juilletLe ministre Peillon se flatte d’avoir réuni,lors du CSE du 10 juillet sur les projets dedécrets sur le collège, une « majorité »,avec 36 voix pour (dont les syndicats UNSAet SGEN-CFDT, la confédération CFDT et laFCPE), 18 contre (SNES et SNEP-FSU, FO,CGT, SUD). La FSU s’est cassée en deuxpuisque, parmi les sept abstentions, oncompte le SNUipp-FSU et la FSU et que leSNUEP-FSU n’a pas pris part au vote.Rappelons que la FSU s’était abstenue surle projet de loi Peillon lors du CSE endécembre 2012. Ses représentants ontd’ailleurs, à l’unanimité, approuvé les autresdécrets proposés au vote : création d’unConseil national d’évaluation et d’un Conseilsupérieur des programmes. Cela suffira-t-il au ministre pour que cestextes s’appliquent dans la réalité, sachantque les organisations SNES et SNEP-FSU,FO, CGT et SUD, représentant la très grandemajorité des personnels ont voté contre ? Malgré toutes ses habiletés, le ministre n’apas réussi à établir un « consensus » surcette question. Rien n’est joué.

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Rentrée scolaire 2013

Le ministre Peillon à l’Assemblée nationale, lors des questions au gouvernement, le 16 juillet 2013.

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> L’actualité politique et sociale <INFORMATIONS OUVRIÈRES N° 266 SEMAINE DU 29 AOÛT AU 4 SEPTEMBRE 20136

Rentrée scolaire 2013

Mardi 20 août s’est tenue devant la centrale deCruas un rassemblement à l’appel de la CGTavec la fédération de l’énergie, l’union régio-nale, l’union départementale, le syndicat de lacentrale de Cruas et ceux de nombreuses autrescentrales (Bugey, Tricastin…).Il s’agissait de protester contre la convocationce jour-là du secrétaire CGT du CHSCT à unentretien préalable et d’exiger la suppressionde toute menace contre lui.

En cause, l’alerte donnée par ce militantsur les conditions de sûreté de la cen-trale.

Au départ, il y a eu début juillet un mouvementdu personnel de Proségur, prestataire privéd’EDF, en grève contre une augmentation de laprise en charge de leur mutuelle, grève qui aabouti à la suppression de cette augmentation. Mais, au cours de cette grève, la direction deProségur a remplacé le personnel en grève pardu personnel dont les habilitations, obligatoiresen ce lieu, prouvant qu’ils avaient effectué la

formation correspondante, n’ont pu être véri-fiées. C’est dans ce contexte que le secrétairedu CHSCT est intervenu pour exiger le respectdes règles et arrêter temporairement les entréesen zone sensible. Mais pour la direction de lacentrale, la priorité est le fonctionnement coûteque coûte du site, et elle cherche bien évidem-ment à éviter toute propagation d’informationssur des défauts de sûreté du site. Ce qui prouvebien que la première des menaces concernantle nucléaire, c’est la privatisation.D’où la tentative d’intimidation de ce militant,qui vise à la fois les syndicalistes et, au-delà, lepersonnel. A ce jour, un mois et demi après, lespreuves d’habilitation n’ont toujours pas étéfournies, ni par Proségur, ni par la direction dela centrale à qui il revient de faire respecter lesrègles de sous-traitance. D’où les hésitations dela direction qui mesure en même temps l’am-pleur de la réaction que peut entraîner à nou-veau sa décision. Pour l’instant elle souffle lechaud et le froid en faisant attendre sa positionqui a varié de la menace de licenciement aublâme.Un nouveau préavis de grève a été déposé pourexiger l’abandon, rapidement, de toute pour-suite. Correspondant �

En assemblée générale, nousavons décidé la grève pour leretrait de la note car la situationest trop grave. Nous travaillonsdéjà à flux tendu, alors arrêterles remplacements, c’est prendre

des risques considérables ; une nuit, les infir-miers se sont retrouvés à deux au lieu des troisréglementaires pour s’occuper de deux étages,avec vingt patients à chaque étage ! Le directeur nous a reçus à nouveau le 20 aoûtau soir, mais maintient la « note 206 ». Il nous adit que c’est l’ARS (agence régionale de santé —NDLR) qui lui demande de “revenir à l’équilibreplus rapidement”, et l’enveloppe allouée auxremplacements doit diminuer de plus d’un tiers !La note 206 est bien le résultat de la pression del’ARS et du ministère qui veut tailler encore etencore dans les budgets des hôpitaux. D’ailleurs,loin d’abandonner la tarification à l’activité (T2A),la ministre a annoncé en mars dernier son inten-tion de lancer “l’acte III de la tarification à l’hô-pital” pour “mieux rémunérer la performance”.En psychiatrie, cela s’appelle la “valorisation del’activité”, mais elle n’a pas pu se mettre vrai-ment en place, et j’espère qu’elle ne verra jamaisle jour. La T2A, ce n’est plus l’hôpital.

“Une nouvelle assemblée générale le 27 août”

Pour en revenir à notre revendication, ce quenous voulons, c’est le retrait de la note 206 etnous demandons à Marisol Touraine de nousrecevoir. La note fait supporter aux agents lechangement intempestif, voire la suppressiondans certains cas de leurs repos hebdomadaires,de leurs jours d’ATT, ou de leurs congés annuels.Tous les jours, des collègues en subissent lesconséquences. Comme l’a dit un camarade, cettenote, c’est “la réglementation de la dérégle-mentation du temps de travail”. Il a rappelé quela loi sur les 35 heures avait été faite pour ins-taurer la flexibilité, même si nous avions pu encontrer des effets. La note 206 s’appuie sur cette

loi. Cela désorganise tout, tu ne peux plus pré-voir tes repos, tes congés, du jour au lendemainon peut te demander d’y renoncer. Cette notedoit être retirée. De toute part, sous une forme ou une autre, aunom du « réalisme » ou du cynisme, on essaiede nous décourager d’aller au ministère. Maisqui a décidé de supprimer des millions d’eurosdans les budgets des hôpitaux ? La demanded’audience de l’intersyndicale CGT-SUD-FO-CFDT a reçu le soutien de la fédération CGT dela santé, et le maire de Villejuif s’est adressée àMarisol Touraine pour que nous soyons reçus. Nous avons une nouvelle assemblée généralemardi 27 août. Tous doivent pouvoir être enten-dus par la ministre. Obtenir satisfaction est vitalpour les patients et pour les agents. » �

Rappelons que les candidats auconcours de recrutement de l’Edu-cation nationale passaient les

épreuves écrites du concours au printemps.S’ils étaient reçus à l’écrit, ils passaientimmédiatement ensuite l’oral. Ils devenaientalors stagiaires de l’Education nationale,avec un an de formation en IUFM et cinq àsept heures de stages en responsabilité dansun établissement scolaire. En 2010, le gou-vernement Sarkozy, avec l’instauration de lamastérisation pour les étudiants (1), avaitsupprimé cette formation initiale. M. Peillona prétendu revenir à une formation, mais laréalité est bien différente des discours. Desmilliers de candidats au concours ont pas-sé l’écrit au mois de juin. Ceux qui sont

admissibles pourrontpasser l’oral dans unan. D’ici là, les recto-rats invitent ceux quiont eu l’écrit duconcours Peillon àsigner un contratpour enseigner six ousept heures cetteannée, voire davanta-ge. Parmi ceux quiont eu l’écrit, il y a de

nombreux contractuels de l’Educationnationale, c’est-à-dire des enseignants quin’avaient pas le concours de recrutement,mais qui étaient embauchés sur un posted’enseignant à temps plein à l’année. Un communiqué de l’académie d’Amiensdu SN-FO-LC rend compte des discussionsavec ces personnels, le 20 août au rectorat :« La dégradation pour ceux qui étaient déjàcontractuels est énorme : leur réussite auconcours signifie une baisse de salaire entre100 et 600 euros (…). Une candidate, mèrede famille de deux enfants, déjà contractuelledepuis quelques années, signe un contrat de9 heures, rien d’autre ne lui étant proposé.Résultat : 600 euros en moins chaque mois.Et à la suite des démarches engagées immé-diatement, elle a réussi à perdre moins ens’inscrivant à Pôle emploi, ce qui lui per-mettra de percevoir une partie du manqueà gagner sous la forme d’une allocation com-pensatoire de chômage. »Il ne s’agit pas d’un cas isolé. Il s’agit d’uneattaque contre toute l’Education nationale.Ces personnels, qui ont réussi l’écrit auconcours, ne sont ni des stagiaires, commele prétend le ministère, ni même des contrac-tuels. La preuve en a été donnée par le faitqu’ils ne pourront pas percevoir le supplé-ment familial de traitement, pour la bonneraison qu’ils ne sont pas rémunérés sur labase de la grille indiciaire, comme, malgrétout, les contractuels l’étaient. C’est là unepréfiguration de l’offensive du ministrePeillon contre le statut des enseignants.

Correspondant �

(1) Jusqu’en 2010, pour devenir enseignant fonction-naire d’Etat, il fallait être titulaire d’une licence pourpasser le concours et réussir l’année de stage. Désor-mais, un étudiant doit posséder un master (cinq ansd’études), puis être admis au concours et réussir l’an-née de stage. Cette réforme a été mise en place en2010 par le gouvernement précédent et maintenuepar celui-ci.

GROUPE HOSPITALIER PAUL-GUIRAUD (VILLEJUIF ET CLAMART)

Au lendemain de la grève du 20 août, les personnels et leurs syndicats demandent à Marisol Touraine de les recevoir

Hôpitaux

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CENTRALE NUCLÉAIRE DE CRUAS (ARDÈCHE)

Mobilisation contre les menaces à l’encontre du secrétaire du CHSCT

Energie

La parole à Eweda Malapa, secrétaire du syndicat CGT de l’hôpital

CONTRACTUELS

DE L’ÉDUCATION NATIONALE

Une dégradation sans précédentLors de l’année scolaire 2012-2013, à grand renfort de médias, M. Peillon avait annoncé qu’il allait créer des milliers de postesd’enseignants et rétablir la formation initiale des nouveaux enseignants.

“600 euros en moins par mois cette année”

Rassemblement le 20 août devant la centrale de Cruas.

Vote du personnel lors de l’assemblée générale de grève du 20 août.

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Mardi 20 août, à l’appel de leurs syndicats CGT,SUD, FO et CFDT, les personnels du groupehospitalier Paul-Guiraud (Villejuif et Clamart)se sont mis en grève pour que la direction retirela note 206 du 16 juillet 2013 qui menace la sécu-rité du personnel et des patients : les remplace-ments des congés de maladie ordinaires de moinsde deux semaines, ou exceptionnels pour rai-sons familiales, les congés de formation sontremis en cause, des personnels subissent la mobi-lité forcée, et ce jusqu’à la fin de l’année « pourtenir le budget 2013 ». Dès que la note a étéconnue, la colère des personnels est montée.Toutes les catégories de personnels ont protesté,y compris les médecins.

Comme expliqué dans notre numéro 264, « cen’est pas à nous ni aux patients de payer le défi-cit, cette note doit être retirée ». Plusieurs assem-blées générales ont eu lieu, la grève a été décidéepour le 20 août.

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II > Été 2013 <INFORMATIONS OUVRIÈRES N0 266 SEMAINE DU 29 AOÛT AU 4 SEPTEMBRE 2013

Par S. K. Koza

Contrairement à un continentbalkanisé, la constitution degrands ensembles est l’une desconditions pour disposer desmoyens d’un développement au

service des masses. L’impérialisme a voulu àtout prix éviter cela, la domination de petitsEtats lui étant plus aisée. Les intérêts de lapetite bourgeoisie qui allait se retrouver à latête des Etats africains, combinés à ceux del’impérialisme, ont permis le maintien decette balkanisation si néfaste aux massesafricaines. C’est ce qui explique aussi les ten-dances à la sécession de certaines régionscomme le Biafra (Nigeria, 1967) ou le Katanga(République démocratique du Congo, 1960).La petite bourgeoisie va être sélectionnée, quihéritera du pouvoir et se transformera en bour-geoisie compradore, totalement dépendantede l’impérialisme. Par des assassinats, elle seraépurée de tout nationaliste qui souhaiteraorienter la politique dans le sens des intérêtsdes masses. Avec les opérations « homo » deses services secrets, l’impérialisme françaiss’est illustré comme l’un des plus actifs dansce domaine. A défaut de réussir à tuer le leader nationa-liste, la solution a été l’organisation de l’iso-lement du pays et de coups fourrés pourdétruire son économie.Les équipes dirigeantes ainsi sélectionnées,maintenues au pouvoir de manière antidé-mocratique depuis plus de cinquante ans, ycompris par des interventions militaires despuissances impérialistes, vont vider les indé-pendances de leur contenu réel. Pas de véri-tables réformes agraires : dans certains pays,les terres agricoles sont restées, pour l’essen-tiel, entre les mains des anciens colons. Lesressources du continent ont été mises à la dis-position des pays impérialistes. L’économiedes pays africains est dirigée depuis les capi-

tales des pays impérialistes. Le cas le plus illus-tratif est celui du franc CFA. Cette monnaieutilisée par la plupart des pays de l’Afriqueoccidentale et centrale n’est qu’une déclinai-son du franc français, et maintenant de l’euro.Par ailleurs, les peuples africains ont été entraî-nés dans la spirale de l’exploitation de la dette.D’abord, au moment des indépendances, lesdirigeants ont accepté de prendre en chargela dette laissée par les colons. Ensuite, dansles années 1970, l’Afrique a été l’un des débou-chés d’excédents de capitaux dont souffraientles pays impérialistes, au cours d’opérationsdont les masses africaines n’ont pas béné-ficié. Au nom du remboursement d’une telle dette,à partir des années 1980, les plans d’ajuste-ment structurel ont été mis en œuvre : priva-tisation des entreprises d’Etat, désengagementde l’Etat des services publics (éducation, santé,etc.), réduction des salaires des fonctionnairesou blocage de leur évolution, etc. Ces mesures,en augmentant la pauvreté et en détruisantce qui lie les différentes composantes de lapopulation dans un cadre national commun,sont l’une des principales causes de la situa-tion de dislocation que connaissent les paysafricains.L’expérience a montré que les tâches démo-cratiques nationales, qui permettent d’existeren tant que pays politiquement et écono-miquement souverain, ne peuvent pas être réa-lisées par les bourgeoisies compradores à la têtedes pays africains. Il revient aux travailleurs,mobilisant derrière eux toutes les couches exploi-tées et opprimées de la société, de prendre encharge la réalisation de ces tâches, dans le com-bat pour leur émancipation (1). �

(1) Le présent volet est le dernier de cette série sur l’his-toire de l’Afrique, forcément non exhaustive. Nous espé-rons néanmoins qu’elle a permis aux lecteurs d’entrevoirque la véritable histoire de l’Afrique est éloignée decette image d’une Afrique perçue comme un monde àpart, peuplée de « Nègres-enfants », que les nains intel-lectuels, à partir du moment où ils ont la peau blanche,se croient en droit de propager. L’Afrique n’est pas unmonde à part. Elle est tout simplement un produit del’émergence du capitalisme dans l’histoire de l’huma-nité.

L’Afrique indépendante(deuxième partie)

� Eléments d’histoire de l’Afrique (VIII) �

Le paradoxe que vivent actuellement presque tous les peuples africains est illustré par la situation du Niger. Troisième producteurmondial d’uranium avec 8 % de la production mondiale, le Niger est l’un des pays les plus pauvres de la planète. L’Afrique estriche, et pourtant, les Africains sont pauvres. Plusieurs facteurs ont conduit à cette situation.

Eclairage

Elimination physique de nationalistes africains par les services secrets français« Dans les Services, depuis la guerre, depuisla Résistance même et le BCRA, on pratiquel’élimination physique de certaines personnes :c’est ce qu’en langage de la maison, vous appe-lez les opérations “homo”, c’est-à-dire “homi-cides” ? — Oui.— Qui les décidait ? — Pour les opérations “homo”, la décision étaitprise par le président de la République. (…)— Il y en eu sous de Gaulle ? — Oui. — Sous Pompidou ?— Oui. — Sous Giscard ? — Oui. (…) Nous avons monté quelques opé-rations de ce type dont une, je m’en souviens,pour empoisonner un extrémiste africain enexil qui agissait contre le gouvernement légalde son pays. Le Service a utilisé l’un d’entrenous pour l’assassiner, voilà ! — Mais elle est connue cette histoire ! Il s’ap-pelait Félix Moumié. C’est ça ? — C’est ça » (1).

Tentatives d’élimination de Sékou Touré, président de la Guinée-Conakry, et déstabilisation de l’économie de ce pays« Ce qui avait marché avec Ahmadou Ahidjoau Cameroun a en revanche complètementéchoué en Guinée. Sékou Touré, lui, a refusécatégoriquement de rester sous influencefrançaise. — C’est plus compliqué que ça, mais effec-tivement tout ce que nous avons tenté pourfaire chuter Sékou Touré a été un fiasco (…).Nous avons monté, souvent depuis Dakar,des opérations de “déstabilisation”, commedisait Jacques Foccart (…)— Même l’histoire assez connue des fauxbillets, en 1960, n’a pas mis à bas le régime ?— Non. Pourtant l’idée était bonne. Elle venaitde chez nous, mais ce n’est pas le serviceaction qui était concerné (…). C’est Morvan,patron du service 7, qui a fait imprimer plu-sieurs millions de faux billets guinéens. Ilsont ensuite, par diverses filières, été injec-tés dans l’économie du pays (…). Je sup-pose que les finances de la Guinée ont dûen prendre un sérieux coup (…) » (1).

(1) Général Aussaresses, Je n’ai pas tout dit.Ultimes révélations au service de la France, Entre-tiens avec Jean-Charles Deniau, Editions du Rocher,pp. 99 à 114. Pour distinguer les questions desréponses, nous avons mis en italique les réponsesdu général Aussaresses.

Repères

� Liste non exhaustive de dirigeantsnationalistes africains assassinés :Ruben Um Nyobé, Félix-Roland Moumié,Ernest Ouandié (Cameroun), Patrice Lumumba (République démocra-tique du Congo), Thomas Sankara (Burkina Faso), Modibo Keïta (Mali), Sylvanus Olympio (Togo).

� De multiples accords et bases mili-taires permettent aux pays impérialistesde contrôler le continent.La France possède des bases militaires au Tchad, en Côte-d’Ivoire, en Centrafrique,à Djibouti, au Gabon, au Sénégal. Les Etats-Unis en possèdent à Djibouti, en Ethiopie, au Kenya, aux îles Seychelles,ainsi qu’une douzaine de bases secrètes.

� De 1961 à 2013, la France a réalisétrente interventions militaires en Afrique,généralement pour aider un de ses affidésà se maintenir au pouvoir.

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Eclairage

Un cas illustratif : celui de Thomas Sankara, président du Burkina FasoLe 29 juillet 1987, à la 25e conférence de l’Organisation de l’unité africaine (OUA) à Addis-Abeba(Ethiopie), Thomas Sankara prononça un discours sur la dette des pays africains, dont voici quelquesextraits : « (…) Nous ne pouvons pas rembourser la dette parce que nous n’avons pas de quoipayer. Nous ne pouvons pas rembourser la dette parce que nous ne sommes pas responsables dela dette. (…) Je voudrais que notre conférence adopte la nécessité de dire clairement que nous nepouvons pas payer la dette, non pas dans un esprit belliqueux, belliciste, cela, pour éviter que nousallions individuellement nous faire assassiner. Si le Burkina Faso tout seul refuse de payer la dette, je neserai pas là à la prochaine conférence (1). En revanche, avec le soutien de tous, dont j’ai besoin, avecle soutien de tous, nous pourrons éviter de payer. Et en évitant de payer, nous pourrons consacrernos maigres ressources à notre développement. (…) »Moins de trois mois après, le 15 octobre 1987, il a été assassiné lors d’un coup d’Etat.

(1) C’est nous qui soulignons.

Eclairage

Mécanisme de la dette : un système d’exploitation dont la seule issue est l’annulation« Tous les ingrédients menant à un défaut de paiement des pays du Sud étaient réunis. A la suite duMexique, de nombreux pays vont se retrouver en cessation de paiement. La situation n’a cessé, depuis1982, de se dégrader. D’après la Banque mondiale, la dette des PED (pays en développement) s’élèveen 2001 à environ 2 450 milliards de dollars, tandis qu’elle était d’environ 560 milliards de dollars en1980. Dans le même temps, les PED ont remboursé 3 400 milliards de dollars (à titre d’intérêt oud’amortissement). Ainsi, les pays du Sud ont remboursé six fois leur dette de 1980 pour se retrouver quatre foisplus endettés (1). Nous allons voir dans un premier temps comment ces pays ont pu se retrouver dansune telle situation. Puis, à partir de ce diagnostic, nous montrerons que la seule alternative possibleau système actuel consiste en une annulation de la dette des PED » (2).

(1) C’est nous qui soulignons.(2) Eric Berr (maître de conférences — IFReDE-CED — Université Montesquieu-Bordeaux-IV), La dette despays en développement : bilan et perspectives.

Par Sam Ayache

L e 23 août 1913 à Dublin, commence lagrève des employés de la compagniedes tramways de la ville. A 10 heuresdu matin, les trams s’arrêtent, sur

l’instant, dans leur parcours, là où ils setrouvent. Les conducteurs et les contrôleurs,arborant l’insigne de leur syndicat les aban-donnent au milieu de la chaussée. Avant quela journée ne se termine, la grève sera totale…

Le déclenchement de la grève...

Les tramways de Dublin sont alors propriétéprivée. Leur patron est William Martin Mur-phy. Il est aussi le propriétaire d’un groupe depresse dont dépendent les journaux les plusimportants d’Irlande, d’une chaîne d’hôtels,d’usines dans le secteur du textile et disposeégalement de gros investissements à l’étran-ger. Murphy a déclaré la guerre au principalsyndicat ouvrier présent à Dublin, l’IrishTransport and General Workers’ Union.Le 21 août, deux cents employés du départe-ment des colis de la compagnie des tramwaysapprennent leur renvoi. Le motif ? Ils sontadhérents de l’ITGWU (« dont les méthodes —dit le communiqué patronal — désorganisentles affaires et le commerce de la ville »). Lariposte, c’est la grève. Les travailleurs exigentla réintégration de leurs camarades licenciés

et l’alignement de leurs salaires sur ceux desemployés du transport urbain de Belfast.

... et ses racines

Le conflit qui se noue en cette dernièresemaine d’août 1913 vient de loin. A l’époque,toute l’Irlande est possession directe de lamonarchie britannique. Dublin est la capitalenominale de l’île, c’est le siège des autoritésbritanniques. Mais c’est Belfast, grand port dunord, qui est la ville la plus industrialisée. Ladomination britannique s’appuie dans lenord sur les sentiments « unionistes » de lapopulation protestante, et c’est là que l’impé-rialisme britannique concentre ses effortsd’industrialisation.C’est d’ailleurs à Belfast que Jim Larkin — quisera, avec James Connolly, l’un des principauxdirigeants de la grande grève de Dublin —construit, en 1907, le syndicat des dockers(une section du syndicat britannique, laNational Union of Dock Labourers — NUDL).Il organise ensemble dockers protestants etcatholiques dans la grève. Lors d’une secondegrève à Dublin, la direction du NUDL s’affoleet décide de mettre fin à la grève en négociantdirectement avec les employeurs, par-dessusla tête des grévistes et contre la volonté deLarkin. C’est alors que celui-ci constitue unnouveau syndicat, l’Irish Transport and Gene-ral Workers’ Union, dont la plate-forme

constitutive précise qu’il se bat pour « la jour-née de 8 heures, la retraite à 60 ans, le suffrageuniversel effectif (c’est-à-dire le droit de votepour les femmes), la nationalisation de tousles moyens de transport. La terre d’Irlande pourle peuple d’Irlande. »Larkin sera rejoint à Dublin en 1911 par JamesConnolly qui se trouvait aux Etats-Unis, mili-tant avec les Industrial Workers on the World(IWW), l’organisation syndicaliste révolution-naire américaine. En 1913, Dublin est une ville d’environ400 000 habitants, les secteurs d’activitéessentiels sont avant tout ceux qui touchentau port et les transports. Larkin et Connollyenracinent de plus en plus fortement le syndi-cat dans ces secteurs.C’est alors que le patronat, sous la conduitede Murphy, passe à la contre-attaque. Il licen-cie d’abord les employés de son journal,membres du syndicat, puis il s’attaque auxtransports. Il a soudé autour de lui les princi-paux patrons de la ville avec un objectif clair :détruire le syndicat. Peu après le déclenchement de la grève destramways, Larkin est arrêté, accusé « d’incita-tion à la haine et au mépris du gouverne-ment ». Il est libéré sous caution, mais laréunion publique qu’il avait prévue pour ledimanche suivant, est interdite.

> Été 2013 <INFORMATIONS OUVRIÈRES N0 266 SEMAINE DU 29 AOÛT AU 4 SEPTEMBRE 2013

III

Irlande : la grève générale de 1913“Guerre de classe à Dublin”

� Il y a un siècle : 1913, la marche à la guerre �

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Les années qui précèdent le déclen-chement de la première guerre impé-rialiste sont marquées par une montéed’ensemble du prolétariat en Europe et dans le monde. Grèves en Belgique,en Italie, en Allemagne ; intensesconflits de classe aux Etats-Unis… En Russie, le 1er mai 1912 est marquépar d’importantes grèves et de grandesmanifestations. L’année suivante, on décomptera 800 000 grévistes dans l’empire russe et 1 300 000 grévistes dans la premièremoitié de l’année 1914.

Au cœur d’une année de mobilisations ouvrières partout en Europe

De 1911 à 1913, l’Angleterre sera marquée par ce qu’on appellera « The Great Unrest » (le grand trouble).Grèves successives des mineurs, des dockers, des métallurgistes, des travailleurs du bâtiment, qui témoignent d’une nouvelle phased’organisation du prolétariatbritannique. En France également, grèves et affron-tements de classe se succèdent tout au long de l’année 1913, touchantdifférentes corporations,dans plusieurs régions. La grève la plus significative est celledes ouvriers des usines Renault,pour protester contre la mise en placedes méthodes industrielles américaines(« le taylorisme »)organisant la productivité maximale.Commencée le 11 février, elle dure jusqu’au 22 mars 1913. Le journal syndical La Bataille syndicaliste écrit : « Le conflit que nos camarades viennent d’engagerpour protester contre la généralisationde la méthode Taylor dans les établisse-ments Renault et contre son applicationsans contrôle, dépasse largement le cadre d’un conflit local. Il s’agit de faire échec à une innovation qui menace tout le prolétariat français. »

Les peuples disponibles pour le combat de classe

Dans ce contexte auquel elle participese situe la grande grève générale de Dublin en août 1913, que nous relatons cette semaine.Un an avant l’éclatement de la guerre,tout le montre : le prolétariat et les peuples d’Europe sont dispo-nibles pour le combat de classe. Ils savent que les dirigeants socialistesse sont engagés depuis plusieursannées à tout mettre en œuvrepour empêcher la guerre impérialiste. Ils considèrent ces dirigeants commeleur direction. Ils attendent d’eux un mot d’ordre de mobilisationouvrière internationaleet internationaliste contre la guerre,dont grondent les prémices.On le sait, cet appel ne viendra pas. Si nous terminons cette semaine dansle supplément de nos abonnementsd’été le tableau de la marche vers la Première Guerre mondiale en 1913,nous lui consacrerons l’année prochaine — au moment de la date anniversaire de son écla-tement — la totalité de notre cahierd’été, et nous reviendrons sur cet événement majeur et dramatique,qui va peser d’un poids très lourd sur tout le cours ultérieur de la lutte des classes mondiale, sur ses causes,sur ses conséquences : la faillite de la IIe Internationale, qui va laissertous les travailleurs d’Europe et du monde entier sans direction.

L’interdiction du meeting transformele 31 août en une puissante journéede manifestations. Par milliers, lestravailleurs manifestent dans toute la

ville et se rassemblent autour de Liberty Hall,le siège du syndicat. Déguisé en clergyman,Larkin parvient à rejoindre la manifestation ets’adresse aux travailleurs depuis le balcond’un hôtel. Alors la police se déchaîne, le diri-geant syndicawl Jim Larkin est arrêté, alorsque les affrontements sont d’une rare vio-lence, que les femmes sont jetées à terre etpiétinées par la police.Les travailleurs résistent : parmi les centainesde blessés, on dénombrera 200 policiers. Unouvrier, James Nolan, est battu à mort. Lemême jour, un autre gréviste, James Byrne,meurt sous les coups des policiers alors qu’il adéjà été arrêté. Une adolescente, Alice Brady,succombe au coup de feu tiré par un policier. Ce dimanche 31 août restera dans l’histoire del’Irlande comme le « dimanche sanglant ». C’estaussi le premier jour d’une mobilisation sansprécédent de la population travailleuse de lagrande ville. Un observateur étranger commen-tera dans un journal ces événements en titrantson article : « Guerre de classe à Dublin ». �

Début septembre, le conflit prendune autre dimension. La grèves’étend. Elle devient une affaireinternationale. Des messages de

solidarité, mais aussi une aide financière, par-viennent de syndicats d’autres pays.En Angleterre, l’émotion est grande : la fédé-ration des mineurs, à elle seule, collecte150 000 livres pour les grévistes de Dublin.L’appareil dirigeant des syndicats britan-niques se refuse à appeler à la grève généraleet à bloquer le port de Dublin, ce qui auraitimposé au patronat de céder. Le 3 septembre, 400 patrons se réunissent sousla direction de Murphy et décident « de ne pasemployer quiconque continue à adhérer au syn-dicat ». Plus de 400 entreprises licencient envi-ron 25 000 travailleurs pour appartenancesyndicale. Les travailleurs, malgré un lock-outqui touche 100 000 habitants de Dublin, necèdent pas. Toute l’économie de la ville est para-lysée, le conflit s’installe dans la durée. Ce même 3 septembre ont lieu les obsèques deJames Nolan, suivies par plus de 30 000 mani-festants. Cette fois, il n’y a pas de violences poli-cières. Sous la direction d’un militant, ancienmilitaire britannique, Jack White, une milice

syndicale s’organise et le cortège est protégé parun impressionnant service d’ordre. C’est là leprélude à la création, en novembre 1913, del’Irish Citizen Army (ICA), dont White sera lepremier responsable. C’est elle qui sera le fer delance de l’insurrection d’avril 1916, trois ansplus tard, en pleine guerre, à Dublin. La situation est, à la longue, lourde de menacespour la stabilité de la domination britanniqueen Irlande. Isolés, les travailleurs de Dublin nepeuvent l’emporter. Le patronat renonce à chas-ser des entreprises tous ceux qui se syndiquent,mais il ne réintègre pas tous les licenciés. Il n’apu briser le syndicat, mais il n’est pas contraintde le reconnaître légalement. Comme l’écritJames Connolly (1) en novembre 1914 : « Ce futun match nul. Les employeurs ne pouvaient assu-rer la production sans le concours des hommeset des femmes demeurés fidèles au syndicat. Maisles travailleurs ne purent imposer la reconnais-sance légale de leur organisation. »L’observateur étranger perspicace que nouscitions plus haut n’était autre que Lénine. Il écri-vait le 29 août 1913 : « Les événements de Dublinmarquent un tournant dans l’histoire du mou-vement ouvrier et du socialisme en Irlande. Mur-phy menaçait d’anéantir les syndicats ouvriers

irlandais. Il n’a anéanti que les derniers vestigesde l’influence de la bourgeoisie irlandaise natio-naliste sur le prolétariat. (…). Il a contribué àaguerrir un mouvement ouvrier indépendantrévolutionnaire. »L’Irish Citizen Army, créée dans les affronte-ments avec la police en 1913, défendit les armesà la main le siège du syndicat après le début dela Première Guerre mondiale, lorsque la façadedu bâtiment portait une banderole proclamant :« Nous ne servons ni le roi ni le Kaiser. »Ce sontles volontaires ouvriers de l’ICA qui furent auxpremiers rangs du soulèvement de 1916.Son fondateur, Jack White, devait bien plus tardreprendre les armes pour défendre la révolu-tion : lors de la révolution espagnole, il prit partau combat dans les rangs des milices anarcho-syndicalistes de la Confédération nationale dutravail (CNT). �

(1) James Connolly (1868-1916) : fondateur en 1896 de l’IrishSocialist Republican Party. Il combat toute sa vie, pour l’in-dépendance et l’unité de l’Irlande et pour la constructiond’organisations indépendantes du prolétariat, au plan syn-dical comme au plan politique. Il milite pendant un tempsaux Etats-Unis. Il est l’un des organisateurs de l’insurrectiond’avril 1916 et sera fusillé le 12 mai de cette année, alors qu’ila été grièvement blessé pendant les combats.

La répression meurtrière quis’abat sur les ouvriers de Dublinle 31 août 1913 restera gravéedans la mémoire ouvrièrecomme “le dimanche sanglant”.

Le grand lock-out et la résistance ouvrière

L’effroyable répression du “dimanche sanglant” de Dublin

La Poste

La signification de la nomination de Philippe Wahl à la direction de La Poste(Première partie)

> L’actualité politique et sociale <INFORMATIONS OUVRIÈRES N0 266 SEMAINE DU 29 AOÛT AU 4 SEPTEMBRE 2013

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Correspondants postiers

Philippe Wahl va être nommé à laprésidence du groupe La Poste, enremplacement de Jean-Paul Bailly. Il était au cabinet de Michel Rocard,alors Premier ministre, de 1988 à1991 (loi Quilès-Rocard de 1990)…« Proche de Pierre Moscovici — qu’ilappelle par son prénom — il l’est aussi de Jean-Pierre Jouyet, le direc-teur général de la Caisse des dépôts,l’autre grand actionnaire de La Posteau côté de l’Etat » (Le Journal dudimanche, 30 juillet 2013). Philippe Wahl est aussi le banquierqui, entre 2004 et 2006, avait été mis-sionné comme consultant par Jean-Paul Bailly pour étudier le projet detransformation des CCP en banquepostale.

Le banquier à l’origine de la privatisation des servicesfinanciers de La Poste

A la création de la Banquepostale, Philippe Wahl a éténommé pour diriger l’acti-

vité en France de la Royal Bank ofScotland, laquelle n’a pas résisté à lacrise des subprimes. Jean-Paul Baillyl’a appelé en 2011 pour le mettre à latête de la Banque postale. L’effectiftotal des services financiers de LaPoste est passé de 17 760 emplois à17 042 en 2012 : moins 718 (bilanofficiel 2012) !C’est donc le banquier qui est à l’ori-gine de la privatisation des servicesfinanciers de La Poste qui prendaujourd’hui la présidence de la tota-lité du groupe La Poste.Rappelons que par la loi du 10 février2010, le statut juridique de La Poste aété transformé en société anonyme,transposition en droit français de ladirective postale de l’Union euro-péenne achevant la suppressiontotale du monopole postal.A cette époque, la grande majoritédes responsables syndicaux ont dit, àjuste titre : « L’objectif de la privatisa-tion de La Poste est de préparer l’arri-vée des actionnaires privés. Pour cela, illeur faut accélérer la baisse de la massesalariale, la filialisation des secteursrentables (en sortant de plus les per-sonnels du statut de la fonctionpublique et de la convention com-mune) et se séparer de l’activité nonrentable, c’est-à-dire mettre en causele service public. »

Le gouvernement Hollande-Ayrault n’est pas revenu sur la loi de privatisation

On pourrait citer des dizaines dedéclarations de ce type, à l’époque,de différentes organisations syndi-cales. Nous ajouterons, quant ànous, le rôle majeur joué par lesdirectives postales européennesdétruisant le monopole postal.Il faut savoir qu’aujourd’hui, à Paris,70 % des colis ne sont plus distribuéspar La Poste !Notons que le gouvernement Hol-lande-Ayrault-Montebourg (ministrede tutelle de La Poste) n’est pas reve-nu sur la loi de privatisation qu’ilavait dénoncé à l’époque. Alorsmême que les actionnaires de LaPoste… ne sont que l’Etat, à 74 %, etla Caisse des dépôts et consignations(CDC), à 26%. ( Jean-Paul Bailly aéchoué, en mars 2012, dans l’intro-duction de l’actionnariat privé face

au refus unanime des fédérationssyndicales). Notons aussi que leFront de gauche n’a déposé aucunprojet de loi allant dans ce sens.Or voici ce que dit le plan stratégique2013-2018 : « Groupe public à la foisentièrement soumis à la concurrenceet remplissant des missions de servicepublic, La Poste se doit d’assurer sarobustesse financière à long terme.Cela signifie que loin de viser lamaximisation immédiate du profit,elle cherche à dégager des résultatssuffisants pour rémunérer sesactionnaires tout en finançant sacroissance organique courante »(page 17). Tout est dit : Bailly a pré-paré la première phase avec la loi deprivatisation et les 90 000 emploissupprimés en dix ans.

Supprimer 80 000 nouveaux emplois en cinq ans

Wahl a comme feuille de route « dedevenir le leader de la distribution etdes services au domicile » (page 11) etcela afin de « dégager des résultatssuffisants pour rémunérer ses action-naires ». Ce qui nécessite de tout déréglemen-ter, d’accélérer les processus encours de filialisation et de suppres-sions d’emplois et aussi de mise encause du statut et de la conventioncommune. Ce que disent les col-lègues : « Ils ne respectent plus rien, niles règlements intérieurs, ni les fichesde poste… »Philippe Wahl a participé à l’élabora-tion du nouveau plan stratégique2013-2018. Il s’agit maintenant desupprimer 80 000 emplois, mais cette fois… en cinq ans, « pour nepas aggraver le climat social. Le che-min est étroit. La grande vague dedéparts en retraite n’interviendraqu’en 2017 alors que l’objectif fixé par l’Etat est d’enrayer la baisse desprofits dès 2015 » (Le Journal dudimanche, 30 juillet 2013).

Une campagne de La Poste pour que les postiers acceptent les réorganisations incessantes

Pour ce faire, La Poste a lancé unecampagne présentant volontaire-ment sa situation d’une manièrecatastrophiste. Regardons ce qu’il enest réellement : « Le chiffre d’affaires

est presque stable (- 0,3 %) et l’objectifd’une “légère croissance” en 2013 a étéconfirmé » (Libération, 2 août).Un correspondant nous informe quedans son département, les effectifsau courrier ont baissé de 32 % entre2007 et 2012 inclus, mais que le vo-lume courrier n’a baissé, pour lamême période, que de 18 % !C’est-à-dire que La Poste a anticipéconsidérablement la baisse du cour-rier en supprimant des emplois pardizaines de milliers et cherche à fairepaniquer les postiers… pour qu’ilsacceptent les réorganisations inces-santes. Mais il y a loin de la coupeaux lèvres.Le trafic courrier a baissé de 4 % paran. Mais, là encore, il faut dire claire-ment les choses. Cette baisse de l’ac-tivité courrier-papier, qu’on ditinéluctable, ne résulte que pour unepart de l’évolution « technique » dela société vers le courrier numérique.Elle exprime aussi une évolution dela société qui n’est pas du tout tech-nique : le volume du courrier est unindicateur du niveau de l’activitééconomique globale, son reculmesure la récession économique.Enfin, pour une part, la baisse envolume du courrier est organisée parLa Poste elle-même. Comme toutesles entreprises, elle anticipe les effetsde cette récession sur elle-même, etpour faire baisser le coût du travail,elle organise elle-même un recul deson activité courrier, par exemple entransférant du courrier sur desfiliales (Mediapost), ou en externali-sant sur des PME certaines activitésde son traitement (notamment lacollecte).

Le gouvernement annonce une baisse de sa participationaux missions de service public

Et en plus, comment ne pas aborder lerôle joué dans cette opération par legouvernement, puisque l’Etat aannoncé une baisse de sa participa-tion aux missions de service public de50 millions d’euros et une de 32 mil-lions d’euros d’aides à la presse ? Celadans le cadre du renouvellement du« contrat de service public entre l’Etatet La Poste » qui expire au 31 dé-cembre 2013 et qui, loin de remettreen cause le processus de privatisation,serait désormais dénommé « contratd’entreprise »… !Que cherchent tous ces gens-là ? �

Claude Brochard

A trois (Valls, Lebranchu etEscoffier), ils ont signé le 8 août une circulaire à l’ob-

jet obscur : « Mise en œuvre du dis-positif codifié à l’article L.5210-1-2du Code général des collectivités ter-ritoriales ».Nos ministres, si occupés en août(quoique Valls…), adressent aux pré-fets un rappel à l’ordre.Ils leur exposent l’obligation d’achè-vement de la carte intercommunaleet le rattachement des « dernièrescommunes qui resteraient isoléesdans vos départements ou qui setrouveraient en situation d’enclaveou de discontinuité territoriale avecleur EPCI… de rattachement ». Levillage d’Astérix oublié !Application de suite, le L.5210-1-2est entré en vigueur le 1er juin. Ils tancent les préfets : « Obligationd’action et compétence liée pour agir(…). Le représentant de l’Etat dans ledépartement constate (…), il rat-tache (…), il vous revient de mettrefin à cette situation. »La célérité conseillée (ou pis, àlaquelle les communes doiventobéir) : opérations achevées pour le

1er janvier 2014 : « Toutes les com-munes isolées devront être rattachéesà un EPCI… ». Circulez…

UN PRÉFET NE DOIT JAMAIS FLÉCHIRIl faut saisir le circuit entre l’admi-nistration centrale (bref, le ministèrede l’Intérieur, place Beauvau) et lespréfets de la République, autoritédéconcentrée, chargée de représen-ter la nation et l’Etat aux quatrecoins du territoire.Paris n’a pas pour rôle d’exiger tousles matins des préfets d’appliquerles centaines de lois, décrets, arrêtéset circulaires. Ils le savent. Ils ont étéformés et nommés pour cela. Doit-on leur dire constamment qu’enFrance toute voiture doit rouler àdroite ? Non. Si, hélas !, cela va mal,on use téléphones, fax, SMS, mails.Si le mal est contagieux, il ne resteplus que la circulaire. Derrière sacruauté, l’arme des faibles. En déduire que nombre d’obstaclesdurent, s’étendent : Roanne, Mar-seille… Avec la résistance visible, la résis-tance souterraine s’accroît. Dès lors,faire signer la lettre à Hollande esttonique. �

IndustrieUsine Elba, à la Monnerie (Puy-de-Dôme)

Les salariés, premières victimes de la loi CFDT-Medef-gouvernementsur la compétitivité

Correspondant

Dès le lendemain de la publi-cation des décrets d’appli-cation de la loi sur la

compétitivité et la sécurisation del’emploi (issue de l’accord nationalinterprofessionnel (ANI) dont ladiscussion avait été impulsée par legouvernement et qui a été signépar la CFDT, la CFTC, la CFE-CGCavec le Medef et la CGPME), legroupe Hamelin (une des grandesfortunes françaises…) a brutale-ment annoncé la fermeture del’usine Elba, à la Monnerie dans lePuy-de-Dôme (ainsi que celle dessites de Troyes et de Villeurbanne),entraînant ainsi soixante-quatresuppressions d’emplois.

“La compétitivité : un prétexte pour justifier la remise en cause des droitsdes salariés et le permis delicencier pour les employeurs”

La décision du groupe Hamelinillustre parfaitement l’objectif del’ANI et de la loi : faciliter les licen-

ciements. La direction du groupe acomplètement compris toutes lespossibilités offertes par cette loi dedestruction du Code du travail, enparticulier en annonçant sa vo-lonté d’utiliser la possibilité établiepar l’accord CFDT-Medef de mettreen place un PSE (plan de « sauve-garde » de l’emploi — NDLR) surdécision unilatérale de l’employeurtout en réduisant les délais denégociation. De plus, l’argumentde la défense de la compétitivité netient plus quand on sait que ladirection d’Elba reconnaissait lesperformances de l’entreprise pourlaquelle le groupe avait investi : lacompétitivité est un prétexte pourjustifier la remise en cause desdroits des salariés et le permis delicencier pour les employeurs. Le délégué CFDT de l’entrepriseavoue lui-même, en parlant del’ANI, dont les salariés d’Elba sontles premières victimes : « C’est de lam… ! »La sécurisation de l’emploi façonMedef-CFDT-gouvernement, c’estla fermeture d’une usine et 64 sup-pressions d’emplois ! �

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Acte III de la décentralisation

Une circulaire sur l’intercommunalitéobligatoire

Les salariés devant l’Usine Elba, à la Monnerie.

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Philippe Wahl va être nommé à la présidence du groupe La Poste, en remplacement de Jean-Paul Bailly.

François Forgue

Depuis le 20 août, en Afriquedu Sud, le secteur de l’auto-mobile est paralysé par une

« grève géante », comme la qualifie lequotidien Le Monde (23 août). La « rentrée sociale » se fait sous« haute tension », expliquent lesmédias. On a envie de dire : comme ailleurs.Sauf que pour l’Afrique du Sud, cen’est pas l’été qui se termine, maisl’hiver austral qui s’achève, périodeoù, traditionnellement, les tra-vailleurs et leurs organisations pré-sentent leurs revendications. En2013, cette période aura été marquéepar une série de grèves — arrachantfréquemment des augmentations desalaires supérieures à ce que lespatrons étaient prêts à concéder —,notamment dans lestransports, le textile,chez les travailleursagricoles.Ce mouvement généra-lisé de la classe ouvrièrese dressant pour sesrevendications s’est dé-veloppé après la grèvede Marikana, après lapuissante grève géné-rale des mineurs, qui afait céder le patronat desgrandes multinationalesmalgré le soutien queleur a apporté le gou-vernement de l’ANC— auquel participe leParti communiste sud-africain —, malgré lasanglante répression déchaînéecontre les grévistes et la tentative de ladirection de la NUM (historiquementle principal syndicat des mineursnoirs) de briser la grève (1).La COSATU — la principale confédé-ration syndicale du pays, à laquelle laNUM est affiliée — est organique-ment liée à la coalition gouverne-mentale dans le cadre de ce qu’onappelle la « coalition tripartite ». Lagrève des mineurs commencée àMarikana a nourri une crise profondeau sein de la COSATU et de ses syndi-cats, et a accentué les contradictionsau sein de l’ANC. Ce qui se passe

aujourd’hui constitue à la fois unenouvelle phase de l’action de la classeouvrière noire pour ses revendica-tions, un approfondissement de lacrise politique qui touche aux ass-sises mêmes du pouvoir tel qu’il estexercé depuis 1994.Le secteur de l’automobile n’occupepas numériquement dans l’industriesud-africaine la place de l’industrieminière : alors que cette dernièreregroupe près d’un million de sala-riés, il n’y en a que cent mille dansl’automobile. Il s’agit d’une main-d’œuvre extrêmement concentrée,pour l’essentiel employée par degrandes firmes étrangères (Ford,General Motors, Volvo, etc.), avec unelongue tradition de luttes.Les salaires dans le secteur de l’auto-mobile se situent au-dessus de lamoyenne salariale en Afrique du Sud.

Ce qui, d’ailleurs, suffità souligner le degréd’exploitation de laclasse ouvrière noirevingt ans après l’effon-drement politique durégime de l’apartheid.Un salaire mensuel de1 000 euros pour untravailleur qualifié estconsidéré comme élevé— il est vrai que dessalariés agricoles negagnent que 40 eurospar mois !Massivement, les tra-vailleurs ont répondu àl’appel de la NUMSA, lesyndicat de la métallur-gie, aujourd’hui le plus

grand syndicat de la COSATU. Dansun communiqué, la NUMSA expliquequ’au centre de la grève, il y a larevendication d’une augmentationde 14 % des salaires.Que les travailleurs de l’automobilesoient en grève est ressenti commeun appel à la lutte pour tous les tra-vailleurs : les revendications de tousdoivent être satisfaites et peuventl’être.Comme le dit le communiqué de laNUMSA : « Nous rejetons les menacesde délocalisation de la productionailleurs, faites par les constructeurs,au motif que nos revendications

seraient irréalistes. Nous refusonsd’être traités comme des sous-hommes, ce qui alimente la triplecrise dans notre pays : pauvreté, sous-emploi et inégalité. En tant que tra-vailleurs, nous méritons de meilleurssalaires pour nos enfants et pour lesjeunes qui subissent le plus la bruta-lité et la barbarie du capitalisme. »La grève des travailleurs de l’automo-bile met en cause la politique du gou-vernement Zuma qui vise à attirer lesinvestisseurs étrangers en s’appuyantsur les bas salaires. La décision de laNUMSA d’appeler à la grève s’inscritd’ailleurs dans la crise aiguë au seinde la COSATU concernant l’appui à lapolitique gouvernementale.Cette crise s’exprime aujourd’huidans une tentative d’évincer de sonposte le secrétaire général actuel,Zwelinzima Vavi, considéré, commel’explique un article publié par leSocialist Party of Azania (SOPA, uneorganisation politique ouvrière quiparticipe aux campagnes de l’Ententeinternationale des travailleurs et despeuples), comme « un ennemi poli-tique de l’alliance tripartite, dont laprésence à la tête de la COSATU estpar conséquent indésirable ». La NUMSA, dans ce conflit interne àla COSATU, s’est rangée du côté deVavi.Le SOPA précise : « Quels que soientles désaccords que nous avons aveccertaines des positions de Vavi, nousconsidérons l’attaque contre ce mili-tant non comme une affaire indivi-duelle, mais comme une attaquecontre le mouvement ouvrier, alorsqu’il cherche à rompre les liens desubordination au patronat et au gou-vernement. »Les tensions sociales et politiques enAfrique du Sud ne sont pas près des’apaiser. L’action de la classe ouvrière noire, lavolonté des travailleurs de reprendrele contrôle de leurs organisationsmenacent tout l’équilibre sur la baseduquel le pouvoir de l’ANC a pu semaintenir pendant des années. �

(1) On trouvera une analyse de ces événements,faite par le camarade Lybon Mabasa, secrétairegénéral du SOPA, dans Informations ouvrières,n° 225 (du 8 au 14 novembre 2012).

Un sommet du G 20 se réunirales 5 et 6 septembre à Saint-Pétersbourg (Russie). Le

19 août, le comité exécutif de laConfédération du travail de Russie(KTR) a décidé de lancer une cam-pagne intitulée « Pour l’augmenta-tion des salaires ! », dont l’initiativeavait été prise par des organisationsaffiliées à la KTR, notamment leMRPA (syndicat interrégional del’industrie automobile). A la veille dusommet, le 31 août, dans de nom-breuses régions, la KTR a appelé àdes mobilisations, afin de présenterles revendications salariales. En par-ticulier, des initiatives sont annon-cées à Moscou, Saint-Pétersbourg,Petrozavodsk, Tver, Kalouga, Belgo-rod, Omsk, Tchita.

Pour l’abrogation de la loi fédérale n° 108

La KTR indique en outre, qu’à l’occa-sion de ces rassemblements, seraexigée l’abrogation de la loi fédéralen° 108 qui suspend les principalesdispositions du Code du travail de laFédération de Russie pour les entre-prises brevetées « entrepreneursFIFA », en vue de la préparation, enRussie, de deux échéances spor-tives : la Coupe du monde de foot-ball de 2018 et la Coupe des confé-dérations de 2017. Les syndicatsrefusent d’accepter une situationdans laquelle un grand nombred’entreprises et d’organismes, direc-tement ou indirectement impliquésdans la préparation des activités dela Fédération internationale de foot-

ball (FIFA), obtiennent des déroga-tions à la législation du travail russepour ce qui est de l’utilisation de lamain-d’œuvre.

3 000 postes supprimés dans les combinatsd’aluminium de Rusal

Cette mobilisation syndicale a lieudans un contexte où les annonces de« ralentissement économique » enRussie (l’un des pays appartenantaux fameux « BRICS » — Brésil, Rus-sie, Inde, Chine, Afrique du Sud, queles économistes, après les avoirencensés, appellent désormais le« maillon faible de l’économie mon-diale ») — se traduisent d’ores et déjàdans la vie quotidienne de centainesde milliers d’ouvriers. Le numéro un mondial de l’alumi-nium, Rusal, qui appartient à « l’oli-garque » Oleg Deripaska, vient ainsid’annoncer le licenciement de troismille ouvriers dans ses usinessituées en Russie occidentale etjugées « non rentables », ce qui aprovoqué de premières manifesta-tions ouvrières pendant l’été. Un motif d’inquiétude pour le jour-nal Le Monde : « La mise à pied de3 000 personnes, invitées à se recon-vertir ou à déménager vers les sitessibériens rentables, risque de provo-quer une vague de protestation sem-blable à celle que le pays avaitconnue en 2008 à Pikaliovo (régionde Saint-Pétersbourg), quand Vladi-mir Poutine, alors Premier ministre,avait dû fustiger M. Deripaska poursa gestion de la crise. » D. F. �

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En bref

Pretoria (Afrique du Sud), le 20 août 2013 :des travailleurs sud-africains de lamétallurgie en grève portant le tee-shirtde la Numsa, exigent des augmentationsde salaires.

Photo AFP

Un quart des foyers allemands ne peuvent pas se payer de vacances L’Allemagne est présentée comme un havre de prospérité en Europe. Pas pour tous. C’est ce que montre une étudede l’agence statistique Destatis, publiée le 12 août, selon laquelle « un foyer allemand sur quatre n’a pas les moyens de partir en vacances ». « De nombreux foyers en Allemagne estiment ne pas disposer des moyens financiersnécessaires pour passer au moins une semaine de vacances par an en dehors de leur domicile », révèle l’agence.Les parents élevant seuls leur enfant sont les premiers concernéspar ce problème, puisque, dans cette population, presque la moitié(47 %) n’a pas les moyens de partir en vacances, alors que, parmi les couples avec enfants, 79 % en ont la possibilité, souligne l’étude.

Massivement, les travailleurs ontrépondu à l’appelde la NUMSA, le syndicat de la métallurgie,aujourd’hui le plusgrand syndicat de la COSATU.

Oberhausen (Allemagne) : le manque considérable de crèches en Allemagnecontraint très souvent les jeunes mères de famille à abandonner leur emploi,réduisant leurs revenus de manière importante.

Photo AFP

100 000 travailleurs de l’automobile en grève

Afrique du SudRussie

Mobilisation syndicale à la veille de la réunion du G 20, à Saint-Pétersbourg

Le président mexicain, EnriquePeña Nieto, a présenté le moisdernier un projet de révision

constitutionnelle qui permettrait à lacompagnie pétrolière nationalePemex de nouer des partenariats avecdes intérêts privés pour l’explorationet l’extraction d’hydrocarbures.Cette « réforme énergétique » pro-pose également que soit autorisé l’oc-troi de « permis » pour que la com-pagnie puisse s’associer à des sociétésprivées dans ses activités de raffinage,de pétrochimie, de transport et destockage.La réforme nécessitera une modifica-tion des articles 27 et 28 de la Consti-tution encadrant, depuis 1938, lemonopole de la compagnie nationalesur les activités pétrolières et gazièresdu Mexique.Cette réforme, embrassant l’en-semble des secteurs énergétiques,prévoit aussi la participation d’ac-teurs privés dans les opérations de lacompagnie nationale électrique, laCommission fédérale l’électricité(CFE). L’Organisation politique du peuple etdes travailleurs (OPT) et de nom-breuses organisations syndicales etpopulaires appellent à une grandemobilisation nationale le 12 sep-tembre prochain contre cette« contre-réforme » qui brade les res-sources énergétiques appartenant aupeuple et à la nation mexicaine.On lira ci-dessous, à ce sujet, l’édito-rial du journal ouvrier El Trabajo(n° 225).

“Pour la renationalisation de toutes les ressourcesénergétiques !Front unique pour la défense de Pemex !”

« Le président Peña Nieto a décidéd’offrir les bénéfices du pétrole mexi-cain aux grandes entreprises pétro-lières étrangères. C’est l’un desprincipaux objectifs du “pacte pour leMexique” sur lequel se sont engagésle PRI, le PAN et le PRD (1) ainsi queles autres partis institutionnels mino-ritaires.

Quarante pour cent du budget fédéralproviennent des impôts payés parPemex, ce qui signifie que 40 % dubudget de l’Education nationale, desdépenses du système de santé et desservices en général dépendentaujourd’hui des bénéfices du pétrole.C’est pourquoi le gouvernement dePeña Nieto accompagne la contre-réforme énergétique d’une réformede la fiscalité. Il prévoit d’augmenterla TVA de façon généralisée, et de lafaire payer sur les aliments et lesmédicaments. Comme cela ne va pas suffire pourremplir le trou que laissera la remisedes bénéfices du pétrole, il y aura denouveaux impôts et des coupes dansles budgets sociaux. C’est le peuplequi paiera cette politique de bradagedes intérêts nationaux.Ajoutons à cela l’augmentation de ladette publique, qui n’est pas celle dupeuple, pour le paiement de laquellele gouvernement augmente les excé-dents fiscaux, sacrifiant de cettemanière l’argent de la nation.La souveraineté de la nation (elle nesera plus maîtresse de ses propresressources pétrolières et énergé-tiques) et les conditions de vie de lagrande majorité sont mises en dan-ger. Aujourd’hui, la politique menéepar le régime du PRI-PAN a fait que60 % de la population sont dans lapauvreté et a créé une situation deviolence sans précédent.

Le PRD accompagne Peña Nieto dans sa politique de privatisation

Le PRD, qui se présente comme uneorganisation de « gauche », fait partiedu “pacte pour le Mexique” et ilaccompagne Peña Nieto dans cettepolitique de cession au privé des inté-rêts nationaux. Aujourd’hui, il a pris l’initiative d’uneconsultation sur la contre-réformeénergétique organisée par un grouped’intellectuels qui prétendent êtresans parti. Il suffit d’indiquer que dans ce son-dage, une des questions est : “On s’in-

terroge aussi sur quelle participationprivée il peut et il doit y avoir.” Laquestion mène à choisir un pourcen-tage de privatisation. Ajoutons que la plate-forme du PRDpose la nécessité de la gestion indé-pendante de l’entreprise pétrolière,qu’elle agisse comme une entrepriseprivée régie par les lois du marché etdonc par le bénéfice… naturellementen faveur des capitalistes mexicainsou étrangers. Il propose une entre-prise qu’ils appellent aujourd’hui“publique-privée”, dans la voie de laprivatisation totale.De son côté, Morena se prononcecontre la privatisation de Pemex,mais propose un combat à l’écart desorganisations sociales, syndicales etpolitiques qui dans le pays se posentla question de la résistance à la priva-tisation de Pemex. Pour sa part, l’Organisation politiquedu peuple et des travailleurs (OPT)s’unit à l’appel à la mobilisation quele SME (2) et une série d’organisa-tions syndicales et sociales lancentpour le 12 septembre prochain, pourle retrait de la contre-réforme énergé-tique. L’OPT se prononce tout à la fois pourla renationalisation de toutes les res-sources énergétiques qui ont étéremises aux entreprises impérialistespar les derniers gouvernements panistes (du PAN) et priistes (du PRI).La situation est alarmante. La défensede la nation exige la plus large mobili-sation unitaire de toutes les organisa-tions qui disent défendre la souve-raineté nationale, unité sur un pointde base en ce moment : retrait du pro-jet de contre-réforme énergétique, caril signifie la remise des ressources dupétrole aux grands consortiums étran-gers (Shell, Exxon, BP…) ! �

(1) Le PRI (Parti de la révolution institution-nelle), PAN (Parti de la droite catholique) etle PRD (Parti de la révolution démocratique)sont les trois principaux partis constitution-nels au Mexique.(2) Mouvement fondé par Lopez Obradoraprès sa rupture avec le PRD.(3) Syndicat mexicain des travailleurs de l’élec-tricité.

INFORMATIONS OUVRIÈRES N0 266 SEMAINE DU 29 AOÛT AU 4 SEPTEMBRE 20139

Brésil

“Avec ce Congrès des députés, ça ne peut pas aller !”Lu dans O Trabalho, journal du courant O Trabalho du Parti des travailleurs (PT)Le Brésil traverse depuis plusieursmois une période de crise profondequi a commencé avec le soulèvementde centaines de milliers de jeunescontre l’augmentation des tarifs et ledélabrement des transports publics.Cette crise pose aujourd’hui directe-ment le problème d’en finir avec desinstitutions encore largement héri-tées de la dictature et qui font obstacleaux aspirations les plus élémentairesdes travailleurs, de la jeunesse et dupeuple brésiliens. La présidente de la République, DilmaRousseff, avait dans un premier tempsfait un pas dans ce sens, avant de recu-ler sous la pression des partis institu-tionnels (à commencer par les alliésdirects du Parti des travailleurs augouvernement). A la veille d’une nou-velle grève appelée le 30 août natio-nalement par la CUT et les autrescentrales syndicales, la question n’endemeure pas moins posée. On lira ci-dessous, à ce sujet, l’éditorial de O Tra-balho, journal du courant O Trabalho.

“A près avoir sabordéla proposition d’uneConstituante exclusive

pour la réforme politique, tentant dereprendre le contrôle de la situation,le Congrès national revient “au tra-vail”. Après les mobilisations de juin etjuillet, toutes les enquêtes ont con-firmé le fossé qui existe entre la majo-rité du peuple et les institutionsactuelles. L’institution la plus discré-ditée est le Congrès national.Ce n’est pas sans motif. LeParlement est garni degroupes majoritairementopposés aux intérêts expri-més dans la rue, intégrantdes parlementaires enfonction depuis la dicta-ture miliaire — tel l’actuelprésident de la Chambre,Henrique Alves (PMDB).Le Congrès national n’estpas une institution oùpeuvent être entendues lesrevendications que clamela rue.Le Congrès a écarté la proposition deConstituante exclusive pour rendreimpossible toute réforme qui com-mence réellement à répondre auxproblèmes brûlants de la nation. Desréponses qui poseront la question desprivilèges garantis par les règlesactuelles et les institutions en vigueurdans le pays. Au sujet de l’Action pénale 470, le nouveau ministre du Tribunalsuprême fédéral (STF), Luis RobertoBarroso, a déclaré : “L’immense éner-gie juridictionnelle dépensée dans lejugement de l’AP 470 (le “mensalao”)aura été vaine si des mesures urgentesde réforme du modèle politiquen’étaient pas prises, tant pour le sys-tème électoral que pour le système despartis. Sans réforme politique, tout res-

tera comme auparavant. La distinc-tion se fera à peine entre ceux qui ontété mouillés et ceux qui ne l’ont pasété.”De fait, tout comme le STF qui a rendu un jugement d’exception avecl’AP 470, il veut préserver tout enl’état, et le Congrès national appelleégalement à la réforme politique pourpréserver tout en l’état. Les institu-tions, secouées par la rue, tentent dese préserver, en faveur des intérêtsqu’elles protègent.Finalement, alors que les paysanssans terre demandent à hauts cris laréforme agraire, la majorité duCongrès abrite un groupe de rurauxacharnés qui garantissent la préserva-tion de l’actuelle structure agraire dupays et combattent les paysans, lesindigènes et les travailleurs ruraux.Quand les travailleurs exigent desdroits, on discute au Congrès le projetde loi 4330, de précarisation.Selon le député Sandro Mabel, duPMDB, le parti qui a dirigé le sabor-dage de la proposition de Consti-tuante exclusive faite par la présidenteDilma, le PL 4330 est une attaquefrontale contre les travailleurs. Les organisations patronales et leurslobbies, bien reçus au Congrès, pré-tendent à une véritable politique deterre brûlée contre les droits du tra-vail.Contre le PL 4330, la CUT (Centraleunique des travailleurs — NDLR) etd’autres centrales syndicales appel-lent à un blocage national le 30 août.

Oui, le 30 août, il fautque le Brésil s’arrête,pour abattre le PL 4330. Oui, le 30 août, il fautque le Brésil s’arrêtepour l es aut res ex i -gences exprimées parles centrales et adres-sées également au gou-vernement Dilma, avecla fin des enchères surle pétrole, une mesurenécessaire pour que lanation dispose de toutesses richesses et réponde

à la puissante exigence sur les ser-vices publics dressée par la rue.Tout de suite, dans la préparation du30 août, il faut renforcer le combatpour que commencent à se fairedans le pays de profondes réformesque les manifestations populairesont exigées. Nous savons que cela necommencera pas à se faire avec l’ac-tuel Congrès. Finalement, les son-dages ont aussi montré que 73 % dela population sont favorables à uneConstituante. La parole doit être rendue aupeuple : plébiscite oui, pour uneConstituante librement élue, pourcommencer à modeler des institu-tions qui correspondent aux intérêtsde la majorité opprimée de lanation. » �

Mexique

Les bénéfices du pétroleappartiennent à la nation ! Non à leur privatisation !

“Les organisationspatronales et leurs lobbies,bien reçus au Congrès,prétendent à une véritablepolitique de terrebrûlée contre les droits du travail”

Manifestation à Mexico contre la privatisation du pétrole : “Assez de livrer les biens du peuple mexicain aux étrangers,plus de privatisations dans l’Etat, nous exigeons le respect de notre source de travail. Nos propriétés collectives,nous les payons de notre sang qui n’a pas de prix. Nous ne vendons pas.”

Manifestation des enseignants à Rio de Janeiro, le 23 août 2013.

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(CES) ne suffit pas au « dialogue socialen Europe » !

De la théorie à la pratique :« Réinventer la croissance », un ouvrage commun en vue d’une œuvre commune

� Il serait vain de croire que lorsqueMM. Hollande et Ayrault militent pourl’intégration des syndicats au plannational et européen, le patronat soitseulement dans l’attente. Il y a unitéd’action, il agit de son côté et avance sespions — toujours les mêmes d’ailleurs :le trio CFDT-CFTC-CGC. Dans un fasci-cule de 165 pages, intitulé Réinventer lacroissance, on apprend tout d’abord quecet ouvrage est le fruit de discussionsengagées en 2005… avec toutes lesconfédérations. Au final, les deux confé-dérations ouvrières ont refusé de cosi-gner l’ouvrage et nous ne pouvons quenous en féliciter, mais, au demeurant, nepeut-on se demander : mais qu’allaient-elles faire en cette galère ?

� Il n’est pas ici question de dépecer les165 pages de cette œuvre collective,mais sachons qu’elle aborde nombre desujets : la transition énergétique, lacompétitivité, le développement de lafilière agricole, la restauration de laconfiance des restaurateurs, la mal-bouffe, la télémédecine, sans oublierl ’exemple mervei l leux des Anglo-Saxons, la gestion prévisionnelle desemplois et des compétences, etc. L’ou-vrage entend proposer une « vision posi-tive » de l’économie française. Quelquespassages du final, tout de même.

— Page 162 : « L’enjeu est de réussir lestransitions économiques et sociales. Lesorganisations signataires considèrentcomme absolument prioritaire une véri-table gestion de ces transitions à tous

niveaux (…). » On est en plein dans lesdispositions de la conférence sociale.

— Page 163 : « Chacun pourra ainsi éta-blir dans un premier temps un diagnosticpartagé. » Outre le fameux thème du« diagnostic partagé » qui nous est res-sorti, invitons les lecteurs à appréciertout le sel de cette locution : « Chacunétablit un diagnostic partagé » ! Nulbesoin d’étudier la syntaxe pour com-prendre que cette grossière erreur derédaction est due au fait qu’il n’y a euqu’un rédacteur, le Medef.

— Page 164 : « Il est nécessaire de dévelop-per une culture collective stimulanteouverte à l’économie, au progrès et à l’in-novation, dans un dialogue plus équilibréet plus volontariste entre la précaution etl’expérimentation. » Le dialogue, la culturecollective… comment ne pas comprendreque le patronat applaudisse la quasi-tota-lité des préconisations gouverne-mentales ? Il n’y a pas l’épaisseur d’une

feuille de cigarette entre les propositionsgouvernementales et ce charabia intégra-tionniste des signataires.

— Page 164, encore : « Promouvoir l’es-prit d’entreprise dès l’école, encouragerl’entrepreneuriat (…). » Ces gens-là s’in-téressent aussi aux jeunes générations !

— Enfin, page 165, nous assistons à unvéritable appel politique. Le sous-titred’abord : « Ainsi, les organisations signa-taires appellent l’ensemble des acteurs dela société française à se remobiliser autourd’un nouveau projet de croissance. »« Parce que la réalité auxquelles (lesfautes de français sont des rédacteurs del’ouvrage, il ne s’agit ici que d’une repro-duction du texte — NDR) sont confrontésles citoyens, les entreprises, les salariés estdésormais mouvante, l’anticipation desévolutions économiques et sociales et l’accompagnement des transitions doivent désormais se situer au cœur despolitiques publiques. » Le dernier paragraphe est, lui, consacréau « dialogue respectueux et constructifau sein des entreprises » pour trouver un« consensus sur un projet économique etsocial équitable ». Faut-il commenter ?

� Certes ! Le désir du patronat est là,clairement évident, et personne nedevrait se demander pourquoi la CFDTcosigne, finalement, une profession defoi patronale. Quand on est persuadé durôle historique de cette centrale, issue del’encyclique Rerum Novarum, qui —déjà au début du XXe siècle — préconi-sait la collaboration des classes dans lalogique du bien commun, on ne poseplus la question. Mais, ce faisant, uneautre question demeure. Pour un vraiconsensus national, la CFDT, fût-elleaccompagnée de la CFTC et de la CGC,ne suffit pas. Il faut intégrer au moinsl’une des deux confédérations ouvrièresen plus. Mais là, il y a loin de la coupe aux lèvres.Le combat continue, et le POI en est par-tie prenante, naturellement. �

Raymond Herrera

Le contrôle sur les instances existantes des représentations des salariés

La feuille de route prévoitexpressément que, avant la finde l’année 2013, seront prisesdes dispositions législativessur la transparence des comi-tés d’entreprise (CE). Ces dis-

positions seront établies à partir des travauxde la Direction générale du travail (un ser-vice expert du ministère du même nom)effectués en avril 2012.

� Cette « transparence » risque fort de s’ar-ticuler selon les dispositions de la loi du 20 août 2008, qui ne se borne pas seulementà déterminer la prétendue représentativitédes syndicats, mais également leur transpa-rence financière. Les syndicats dépassant unbudget de deux mille euros annuels doiventprésenter un bilan comptable intégrant leur« plans d’amortissement », par exemple. Lesfédérations et les confédérations doiventobligatoirement se doter d’un commissaireaux comptes. Gageons qu’il en sera de mêmepour les comités d’entreprise. Les principauxbénéficiaires de ces contrôles ne seront pasles salariés (les CE devront régler les frais surleur budget de fonctionnement), mais lescabinets d’expertise comptable. On a lesamis qu’on peut !

� Les comités d’hygiène et de sécurité(CHSCT) feront également l’objet d’unemission pour établir un « état des lieux » (le« diagnostic partagé », encore et toujours)afin de « déterminer les forces et les faiblesses »et « envisager les pistes d’évolution ». Làencore, c’est à la fin 2013 que l’on verral’œuvre achevée.

L’Europe, enfin…

� Il eût été inconcevable que la conférencesociale n’ouvrît pas le chantier du « dia-logue social en Europe ». C’est chose faite. Ils’agit là d’associer les « partenaires sociaux »à la préparation des sommets européens. Lafeuille de route prévoit que la position desdits partenaires sociaux soit prise encompte dans la préparation du Conseileuropéen. Par partenaires sociaux, vousl’avez compris, il faut entendre le patronat,derrière le Medef, et les organisations syndi-cales, derrière la CFDT. Car, même avec lamanipulation concernant la représentati-vité, tous ces braves gens ne désespèrentpas d’associer la CGT et la CGT-FO au trioemmené par la CFDT. On apprend donc que « les participants sontconvenus d’examiner au sein du CDSEI(Comité de dialogue social pour les questionseuropéennes et internationales) des proposi-tions sur l’amélioration du dialogue socialen Europe ». A croire que la mal nomméeConfédération européenne des syndicats

Conférence sociale : le début ou la continuitéd’une attaque antisyndicale ? (Deuxième partie)

INFORMATIONS OUVRIÈRES N0 266 SEMAINE DU 29 AOÛT AU 4 SEPTEMBRE 201310

Dossier & arguments

La conférence sociale, convoquée les 20 et 21 juin 2013, par le gouvernement de MM. Hollande et Ayrault, a accouché de nombreuses pistes de travail, visant toutes à intégrerles organisations syndicales du payspour en faire un rouage permanentde l’Etat et des colégislateursoccasionnels.

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Le Premier ministre, Jean-Marc Ayrault, aux côtés de Michel Sapin, ministre du Travail, de Marisol Touraine, ministre de la Santé et des Affaires sociales,rencontre les dirigeants de la Fédérationsyndicale unitaire (FSU), le 5 juillet à Matignon.

> La page quinze <INFORMATIONS OUVRIÈRES N0 266 SEMAINE DU 29 AOÛT AU 4 SEPTEMBRE 2013

Artistes, comédiens et techniciens sous la menace de la ministre Filippetti

Professionnels du spectacle

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La ministre de la Culture, Aurélie Filippetti, prétend légaliser parun texte officiel la pratique insupportable du bénévolat dans tousles secteurs de la production artistique, la surexploitation la plusextrême. Si les mots ont un sens, ils veulent dire que des emploissalariés vont être supprimés par dizaines de milliers avec tous lesdroits qui s’y attachent. Le comédien Jean-Baptiste Caron dénonceici ce projet scélérat contre le spectacle vivant.Dans les milieux du cinéma, le coup de force de Filippetti intervientalors qu’une violente campagne se développe contre la nouvelle

convention collective couvrant tous les personnels concourant àla réalisation des œuvres cinématographiques (1). Nous avons reçu la lettre ouverte que le directeur de la photo-graphie Pierre-William Glenn vient d’adresser à un réalisateur,Lucas Belvaux, qui a dénoncé récemment l’application de cetteconvention collective. Nous en publions de larges extraits.

(1) Lire à ce propos, à l’occasion du dernier Festival de Cannes, « Les paillettes et le cambouis », Informationsouvrières, n° 250 (8 au 15 mai 2013).

Jean-Baptiste Caron

Déja, dans une lettrepublique adressée le 5 juin 2013 au présidentde la République, lesfédérations CGT et FOdu spectacle ainsi que lesdirecteurs salariés desthéâtres publics et com-

pagnies subventionnées protestaient contreles réductions budgétaires : « Si la levée du gelde 6 % sur tous les crédits de la création, enparticulier, et ceux de la culture, en général »n’était pas confirmée, écrivaient-ils, « l’éven-tuel non-respect de vos engagements publics(aurait) des conséquences destructrices (…). Ilserait inévitable de procéder, à partir de cet étéet pour l’automne prochain, à l’annulation denombreuses productions et (…) de renoncer àde nombreuses actions fondamentales. » A la profonde inquiétude des professionnels dela création, Hollande et Filippetti répondentpar un projet de loi d’orientation relatif à lacréation artistique, au travers duquel ils tententd’instituer et de légaliser le travail gratuit.Qu’on en juge : « Les activités artistiques prati-quées en amateur sont une source de dévelop-pement personnel et de lien social (…).Lorsqu’un amateur ou un groupement d’ama-teurs de spectacle vivant participent à la repré-sentation en public d’une œuvre de l’espritorganisée dans un cadre non lucratif, leur par-ticipation à ces spectacles ne relève pas desrègles du Code du travail. » (article 16, alinéas1 et 2). D’aucuns pourraient se rassurer, ladérogation au Code du travail ne concerneraitque des événements associatifs. Mais avecl’alinéa 3, c’est la douche froide : « Le cadrelucratif n’exclut pas la mise en place d’unebilletterie. » L’alinéa 4 enfonce le clou : « Par

exception à l’article L.7121-1 du Code du tra-vail, afin de permettre l’exposition des pra-tiques amateur dans des lieux de diffusion duspectacle vivant (…), les entrepreneurs de spec-tacle vivant peuvent accueillir ou produire,dans un cadre lucratif tel que précisé à l’articleci-dessus, des spectacles auxquels participentdes groupements d’amateurs sans que les dis-positions du Code du travail soient applicablesà ceux-ci. »Les entrepreneurs de spectacle vivant dontparle le projet de loi, ce sont tous les théâtreset les compagnies professionnelles. L’articleL.7121-1, auquel le texte gouvernemental per-mettrait de déroger, garantit la présomptionde salariat des artistes. Pour pallier les réduc-tions de budget, les théâtres publics seraientdonc incités à produire des spectacles réaliséspar des groupements d’amateurs, dans lesconditions commerciales habituelles puis-qu’une billetterie serait possible. En réalité,sous couvert d’accueillir les pratiques ama-teur, il s’agit bien de légaliser jusqu’au cœurdes institutions le travail gratuit qui sévit déjàdepuis des années dans la plupart des festivals« off ». Et pour ce faire, le projet de loi s’enprend même à l’historique présomption irré-fragable (1) de salariat des artistes (articleL.7121-1 et suivants du Code du travail), seconformant ainsi aux injonctions de la Coureuropéenne de justice. Il est clair que ce projet de loi est scélérat etdoit être retiré ; toutes les subventions ampu-tées ou supprimées doivent, elles, être réta-blies. Il en va de la survie de la créationartistique dans notre pays et des milliersd’emplois salariés qui en dépendent. �

(1) Une disposition irréfragable est une disposition d’ordrepublic contre laquelle on ne peut apporter de preuvecontraire, qu’on ne peut ni réfuter ni contredire.

Dire qu’avec (...) laconvention collectivedu 1er juillet 2013 tun’aurais jamais tournéParfois trop d’amourou Pour rire ! est faux :de tout temps, les col-laborateurs de créa-

tion que sont tous les personnels detournage, de préparation et de post-pro-duction, de tout temps les salariés ont eu àparticiper à des films « pauvres », à des films« militants », à des films « difficiles ». Unsimple coup d’œil à ma filmographie temontre que j’ai, peut-être plus que d’autres,participé à des films de ces catégories : deRené Gilson à Peter Goldman, de JacquesRivette à Jacques Bral, deMarin Karmitz à Yannick Bel-lon, etc. La liste est longue demon engagement aux côtés deréalisateurs et de productions« pauvres ». (...)Sans me poser le problème depayer mes collaborateurs auSMIC et me sentant obligé derespecter la convention collec-tive en vigueur. (...)Te rends-tu compte que tu exo-nères d’engagements patro-naux quant au droit du travailet à une convention collective,les quelque 5 000 structures deproduction actuelles dont laseule devise est (je le répètesouvent) : « Socialisation despertes et privatisation des pro-fits » ?Pourquoi reprends-tu, en fili-grane, toutes les déclarationshaineuses et ridicules à l’égarddes « techniciens » (oh, levilain mot) et des ouvriers(encore pire !) qui seraient lesfossoyeurs du cinéma ?Je te communiquerai le salairemoyen des salariés du cinémafrançais si tu le souhaites mais, avoue qu’ilest cocasse de voir des producteurs quigagnent 1,5, 2 ou 2,5 millions d’euros apriori, sur un film, se déclarer incapables depayer correctement des habilleuses ou descoiffeurs en les traitant de fossoyeurs. (...)Je regrette de ne pas avoir revu le bonus deSérie noire avant cette polémique pourriequi oppose des gens que tout amène à colla-borer et à s’estimer. Série noire, film culted’Alain Corneau, qui n’a lui non plus pas dû

coûter plus cher que tes premiers films, oùtous les protagonistes d’une petite équipe,qui ont travaillé avec un engagement exem-plaire, étaient payés au minimum syndi-cal… Je vais t’envoyer le DVD et on enparlera ensemble, peut-être aussi du pre-mier film du même Alain Corneau, France,société anonyme, et de ses conditions detournage sûrement au moins aussi difficilesque les tiennes à tes débuts.(...) Je peux déplorer avec toi la concertationinquiétante de la distribution — ce n’est pasen nous opposant que ça va s’arranger —, lecourage de trop rares producteurs quigarantissent personnellement leur engage-ment financier, mais, cher Lucas, la pierrede touche de l’édifice social est le respect du

monde du travail, même s’il est« artistique », le paiement desalaires et l’observation « répu-blicaine » du Code du travail etdes conventions signées. Endehors de ce cadre, certains sontamenés à se sentir plus « égauxque d’autres » en une tristerégression vers le Moyen Age etla féodalité. (...)Peut-on poser maintenant lesquestions qui fâchent ?Qu’est-ce qu’un « film fragile » ?Quelle est la différence avec unfilm sous-financé ?Est-ce qu’une œuvre cinémato-graphique qui ne paie ni sescréateurs ni nos industries tech-niques et qui ne sort pas ensalles (ou mal) est vraimentutile ? A qui ?Et quand, par miracle, le succèspublic arrive, quelle est la réalitéde la redistribution des profits etquelle est alors la crédibilité dela « participation » ? (...) Je pense que ta vilaine réac-tion affective dessert « l’intérêtgénéral » de notre cinéma et queta conscience militante de la

collectivité reprendra le dessus après uneanalyse sérieuse de la situation, j’espèreenfin que tu ne serviras pas d’alibi à desentreprises concertées de désinformationqui incarnent aussi ce qu’il y a de pire dans« une certaine tendance du cinéma fran-çais » : la mesquinerie, le parasitisme, lenombrilisme, le cynisme et la prétention…« le produit de la prétention par le savoir faitune constante » (...).

Paris, le 18 juillet 2013

Retrait immédiat du projet de loi scélératprétendant légaliser le bénévolat !

Extraits de la lettre ouverte de Pierre-William Glennà Lucas Belvaux

“Te rends-tucompte quetu exonèresd’engagementspatronaux quant au droitdu travail età une conventioncollective les quelque 5 000 structuresde productionactuelles ?”

87, rue du Faubourg-Saint-Denis, 75010 Paris (M° Château-d’Eau)Tél.-Fax : 01 42 46 09 53e-mail : [email protected]

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Le Festival des Vieilles-Charrues, à Carhaix (Finistère), ayant réalisé 4 millions d’euros de bénéficesl’année dernière, a refusé d’embaucher de nombreux personnels cette année, pour ne pas avoirà les payer.

L a violente répression contre lesmanifestants pro-Morsi n’a passeulement abouti à un carnage,

elle a eu pour conséquence d’inter-rompre la mobilisation des millionset millions qui, en juin dernier, vou-laient poursuivre le processus quiavait chassé Moubarak. Le fait quel’« opposition » soutienne l’armée arendu plus difficile la situation. Danscette situation difficile, la classeouvrière, qui par ses grèves, manifes-tations et sit-in a largement contribuéà la chute de Moubarak puis à celle deMohamed Morsi, cherche malgré toutà lutter pour ses droits.

Le 12 août, les ouvriers des usinesmétallurgiques d’Etat de Suez se sontmis en grève contre la non-applica-tion par la direction d’un accord col-lectif signé en février 2012 à la suitede manifestations et portant sur lamise en place d’une grille dessalaires, la prime d’intéressement etl’assurance maladie. C’est alors que les blindés de l’arméeet les forces anti-émeute ont assiégél’usine et arrêté deux responsablesgrévistes. Une campagne de soutienaux métallos en grève a été lancée, àl’initiative, notamment, de plusieurssyndicats indépendants (Transports

publics, Aéroport du Caire, Textile,Mahalla, etc.), exigeant du général al-Sissi et du ministre du Travail, KamalAbou-Aïta (président de la Fédérationégyptienne des syndicats indépen-dants [EFITU] jusqu’à sa nominationdans le gouvernement mis en placepar l’armée), la libération des grévistes,la levée du siège de l’usine et la satis-faction des revendications. A noter que ce dernier a déclaré que« les travailleurs qui furent les cham-pions des grèves sous le régime précé-dent devraient désormais être leschampions de la production »

Correspondant �

INFORMATIONS OUVRIÈRES N0 266 SEMAINE DU 29 AOÛT AU 4 SEPTEMBRE 2013

Le capitalismejugé… par lui-mêmeL’auteur est un écono-miste expert, consultantdes banques centrales.Défenseur convaincu du système capitaliste, il signe un articlequelque peu désespéré(Michel Santi, La Tribune, 20 août,« Que reste-t-il du capitalisme ? »). Son constat : le capitalfinancier tue la produc-tion industrielle.La spéculation, dit-il,« a progressivementprivé l’appareil de pro-duction des investisse-ments qui y étaientcanalisés ». Au contraire, « la financea littéralement pompédes capitaux indispen-sables à la recherche, à la technologie, à la for-mation, dans la quasi-totalité des secteursproductifs ». C’est une « confiscationdes ressources qui a privéles citoyens d’une crois-sance stable, empêchél’amélioration de leurniveau de vie, qui adéstabilisé l’économie à la faveur de l’implo-sion répétitive de bullesspéculatives ». « L’investissement d’an-tan a cédé la place autrading, la manipulationdes cours en Bourse étantquotidienne ». Il cite la maxime en vogue à Wall Street, à proposdes cataclysmes prépa-rés par cette folie spécu-lative : « Je ne serai plus là, vous ne serezplus là ! », qu’il rap-proche du cynique« après moi le déluge »,précédant la Révolution.Que faire pour empêcher la catas-trophe qu’il prévoit ? Selon lui, expert ducapitalisme, « la spécu-lation a remplacé le travail ». Dès lors, ce sont bien les forcesdu travail qui doivents’emparer fermement de tous les moyens de crédit, les restituer à la production, à la collectivité, les arracher au profit ! C’est l’affaire de la classedes travailleurs,et d’un tout autre Etat.

L’HUMEURde Michel Sérac

ou formation politique qui entend sincèrementcombattre pour l’émancipation des travailleurs.Cela sous leur propre responsabilité.L’hebdomadaire est édité par l’association (loi 1901) Informations ouvrières. Daniel Gluckstein, directeur de la publication.

INFORMATIONS OUVRIÈRESTribune libre de la lutte des classes,hebdomadaire du POI. Dans le cadre de sa tribune libre, Informations ouvrières,fondé par Pierre Lambert, offre la possibilité de s’exprimer librement à tout groupement

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Égypte

Les grèves ne sont pas bien vues du régime

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Moubarak libéréHosni Moubarak, le dictateur renversé le11 février 2011 par le soulèvement dupeuple égyptien, est sorti de prison. Unmois et demi à peine après la mise enplace d’un gouvernement provisoire parles généraux, Moubarak, lui-même géné-ral, a été libéré le 22 août, et toutes lescharges justifiant son maintien en déten-tion ont été levées. Même s’il ne peut quit-ter le pays et que ses avoirs restent gelés,la décision de le libérer sonne comme uneprovocation alors que règne l’état d’ur-gence depuis la sanglante répression.

POINT DE VUE

Marguerite Leuwen

D epuis des mois, le peuple syrienvit un effroyable cauchemar :des dizaines de milliers de

morts, des dizaines de milliers de bles-sés, des centaines de milliers de Syriensont dû fuir les zones de combat. Des millions de Syriens sont terrés dansla crainte des attentats, bombardementset autres combats. Après de longues semaines de négocia-tions avec les responsables de l’ONU, lerégime de Bachar el-Assad avait acceptél’envoi d’une délégation internationalepour vérifier s’il y avait ou pas utilisationd’armes chimiques. Quarante-huit heures après l’arrivée decette délégation à Damas, « l’opposi-tion » a accusé le régime d’avoir utilisédes armes chimiques. Immédiatement,une série de déclarations de respon-sables des « grandes puissances » a ac-cusé le régime syrien d’avoir utilisé desarmes chimiques. Certains — France etGrande-Bretagne en tête — ont appelé àune intervention militaire des grandespuissances en Syrie.Ce n’est pas une découverte que le ré-gime syrien est capable d’organiser desanglants carnages. Il l’a déjà fait dans lepassé ; mais jusqu’à maintenant, lesgrandes puissances n’avaient jamais misen cause la violence de ce régime. Aucontraire, Bachar el-Assad était même

l’invité d’honneur du président Sarkozyà la tribune présidentielle lors du défilédu 14 juillet 2008.De l’autre côté, l’« opposition » syrienne,financée par l’Arabie Saoudite, est sous lacoupe des islamistes dont l’un desgroupes militaires les plus importantssur le terrain est le Front al-Nosra, qui,officiellement, se revendique d’al-Qaida.La violence et la barbarie de ce côté-làn’ont rien à envier au régime de Bacharel-Assad. Celui qui paie la sanglante noteest le peuple syrien, qui est entre cesdeux feux. C’est pourquoi la réaction desgrandes puissances se lamentant sur lesort du peuple syrien ressemble à deslarmes de crocodile.Pour les tenants d’une intervention mili-taire, l’utilisation d’armes chimiquestombe à pic. Tout le monde a vu avecindignation les images de cadavres defemmes et d’enfants, mais, personne nesait à l’heure actuelle ce qui s’est passé enSyrie. Ce que l’on sait en revanche, c’estque l’annonce par le président Bush de ladétention par l’Irak d’armes de destruc-tion massive avait pour but de justifierl’intervention militaire en Irak en 2003.On sait, depuis, que le régime irakien nepossédait pas ces armes de destructionmassive. On sait également le résultat de l’inter-vention en Irak, qui laisse ce paysexsangue et disloqué, où près de quatremille personnes sont mortes depuis ledébut de l’année 2013 à la suite d’atten-tats.

On sait aussi que nombre de ces atten-tats sont revendiqués par la branche ira-kienne d’al-Qaida, l’émirat islamiqued’Irak qui a fusionné avec le groupesyrien al-Nosra. On sait également les résultats de l’inter-vention en Libye, avec un pays égale-ment disloqué, livré à la loi des milicesarmées — armes qu’elles ont reçu desgrandes puissances pour lutter contreKadhafi — et c’est une partie de cesmilices, avec les armes fournies par lesgrandes puissances, qui a mené un raidau Mali, justifiant l’intervention militairefrançaise.

« MAINTENIR UN “PAT” EST L’OBJECTIF DES ÉTATS-UNIS »Les dirigeants de l’Union européenne, etnotamment le gouvernement français,poussent à une action des grandes puis-sances, mettant en cause diplomatique-ment les « hésitations » américaines.L’administration américaine avait faitpreuve en effet d’une grande prudence,notamment en rapport avec l’actuellesituation en Egypte et la crainte de voirl’ensemble de cette région exploser.A vrai dire, les sommets de l’adminis-tration américaine sont très diviséssur l’attitude à avoir ; certains sontpour une réaction forte, d’autres pourtemporiser.Le quotidien américain Herald Tri-bune (24 août) publie un article d’unspéc ia l i s t e mi l i t a i re , Edward Luttwak, exprimant le point de vue

d’une fraction des sommets améri-cains : « Une victoire de l’un des deuxcamps n’est pas souhaitable pour lesEtats-Unis. »Après avoir noté qu’Obamane souhaite pas la victoire de Bacharel-Assad, le quotidien ajoute : « Maisune victoire des rebelles serait aussiextrêmement dangereuse pour les Etats-Unis. Cela car les groupes extrémistesliés à al-Qaida sont devenus la princi-pale force combattante en Syrie. (…)C’est pourquoi maintenir un “pat”(terme d’échec qui désigne une im-passe dans laquelle aucun protago-niste ne peut triompher — NDLR) estl’objectif des Etats-Unis. Et la seuleméthode pour cela, c’est d’armer lesrebelles quand il apparaît que les forcesde Bachar el-Assad ont l’avantage etd’arrêter d’armer les rebelles quand ilssont sur le point de triompher. »Lundi 26 août, à Amman (Jordanie),les représentants des grandes puis-sances se sont réunis. Un porte-avions américain croise en mer aularge de la Syrie. Selon les dernièresinformations qui ont filtré dans lapresse, la réaction serait des bombar-dements en Syrie pour affaiblir lerégime face aux rebellesIl est une chose qui doit être réaffirmée,quelle que soit la barbarie des régimes :l’intervention des grandes puissances,loin de résoudre la situation dramatiquedes peuples, ne fera que l’aggraver. Toutel’histoire récente des interventions mili-taires le démontre. �

Frappes aériennes sur la Syrie : dans quel but ?