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Beijing+5 et Geneva 2000 L AssemblØe gØnØrale des Nations Unies a tenu en juin 2000 deux sessions extraordinaires qui ont ØtØ particuliLrement importantes pour le dØveloppement social. A la premiLre, à New York, elle a ØvaluØ les progrLs accomplis vers la rØalisation des ob- jectifs fixØs par la QuatriLme ConfØ- rence mondiale sur les femmes de 1995. A la seconde, appelØe Geneva 2000, elle a dØbattu des moyens de promouvoir le Programme daction du Sommet mondial de 1995 pour le dØveloppement social. A ces deux occasions, lInstitut a or- ganisØ des rØunions. Le prØsent nu- mØro des UNRISD Infos contient des extraits de discours qui y ont ØtØ pro- noncØs et de documents qui y ont ØtØ prØsentØs, ainsi que de brefs comptes rendus dautres confØrences organi- sØes par lInstitut au cours des six derniers mois. A LIRE: Livres documents INTERNE: Compte rendu de Geneva 2000 Beijing+5 Atelier du projet InfoTech Le rôle de la sociØtØ civile VIH/SIDA et dØveloppement La dØmocratie dans des Øconomies en voie de mondialisation Atelier N-AERUS NØolibØralisme et rØforme des institutions en Asie orientale DANS LE MONDE: LUNRISD et lExpo 2000 Development and change Autres horizons LE DERNIER MOT: RØsultats de la session extraordinaire consacrØe au dØveloppement social, par John Langmore Sommaire . . . S i cette rØunion, destinØe à Øvaluer les progrLs rØalisØs dans la mise en oeuvre des engagements du Sommet mondial pour le dØveloppement social, sØtait tenue il y a un siLcle, la situa- tion du monde nous serait sans doute apparue sous un jour tout à fait extra- ordinaire. Certains orateurs auraient pu cØlØbrer une longue pØriode inin- terrompue de paix et de prospØritØ en Europe. Dautres auraient soulignØ les avancØes spectaculaires des sciences et technologies et les perspectives nou- velles de progrLs et de bien-Œtre sans prØcØdent qui souvraient pour lhu- manitØ. Daucuns auraient fait obser- ver que le monde sØtait rØtrØci et que les chemins de fer, les voies maritimes et le tØlØgraphe tissaient des liens en- tre des personnes trLs ØloignØes les unes des autres. Le commerce et lindustrie sØtaient considØrablement dØveloppØs entre les nations, rapprochant les peu- ples du monde. Grâce aux traitØs et aux accords quavaient su conclure des hommes dEtat avisØs, le risque de voir se rØpØter les guerres dynastiques ou de conquŒte dhier sØloignait. Le monde, divisØ en sphLres dinfluence, Øtait parvenu à un Øquilibre qui allait garantir la stabilitØ et la paix aux gØ- nØrations futures. LEurope (comme Des progrLs aux 20 Lme et 21 Lme SiLcles Besoins, droits et dØveloppement social Rodolfo Stavenhagen Le Bulletin de lInstitut de Recherche des Nations Unies pour le DØveloppement Social printemps/ØtØ 2000 NumØro 22 maintenant les Etats-Unis) avait as- sumØ sa mission civilisatrice et sa destinØe manifeste qui Øtait dap- porter la lumiLre et les bienfaits de la civilisation et du progrLs aux races infØrieures de lhumanitØ. CØtait lØpoque de limpØrialisme bØat et triomphant. La reine Victoria, Bis- marck et Teddy Roosevelt (les That- cher, Kohl et Reagan de cette Øpoque dorØe, toutes proportions gardØes) rØgnaient littØralement sur le monde. Pourtant, mŒme alors, il y avait des sceptiques et des contestataires. Le ca- pitalisme industriel suscitait lagitation et le mØcontentement de la classe ouvriLre qui revendiquait certains droits fondamentaux: des conditions de tra- vail dØcentes, des salaires minimum, la libertØ de sassocier et de sorganiser. Les paysans abandonnaient les villa- ges des campagnes pauvres et reculØes pour affluer dans les villes, alors que dautres fuyaient les famines et la per- sØcution religieuse et politique en tra- versant les frontiLres et les ocØans. Alors quune classe moyenne urbaine à peine Øclose affichait son style de vie et ses niveaux de consommation, des masses danalphabLtes, de chômeurs et de crLve-la-faim vivotaient en marge de

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Beijing+5 et Geneva 2000

L�Assemblée générale des NationsUnies a tenu en juin 2000 deux

sessions extraordinaires qui ont étéparticulièrement importantes pour ledéveloppement social. A la première,à New York, elle a évalué les progrèsaccomplis vers la réalisation des ob-jectifs fixés par la Quatrième Confé-rence mondiale sur les femmes de1995. A la seconde, appelée Geneva2000, elle a débattu des moyens depromouvoir le Programme d�actiondu Sommet mondial de 1995 pourle développement social.

A ces deux occasions, l�Institut a or-ganisé des réunions. Le présent nu-méro des UNRISD Infos contient desextraits de discours qui y ont été pro-noncés et de documents qui y ont étéprésentés, ainsi que de brefs comptesrendus d�autres conférences organi-sées par l�Institut au cours des sixderniers mois.

A LIRE: Livres � documents

INTERNE: Compte rendu de Geneva 2000� Beijing+5 � Atelier du projet InfoTech� Le rôle de la société civile � VIH/SIDAet développement � La démocratie dansdes économies en voie de mondialisation� Atelier N-AERUS � Néolibéralisme etréforme des institutions en Asie orientale

DANS LE MONDE: L�UNRISD et l�Expo2000 � Development and change� Autres horizons

LE DERNIER MOT: Résultats de la sessionextraordinaire consacrée au développementsocial, par John Langmore

Sommaire . . .

Si cette réunion, destinée à évaluerles progrès réalisés dans la mise en

oeuvre des engagements du Sommetmondial pour le développement social,s�était tenue il y a un siècle, la situa-tion du monde nous serait sans douteapparue sous un jour tout à fait extra-ordinaire. Certains orateurs auraientpu célébrer une longue période inin-terrompue de paix et de prospérité enEurope. D�autres auraient souligné lesavancées spectaculaires des sciences ettechnologies et les perspectives nou-velles de progrès et de bien-être sansprécédent qui s�ouvraient pour l�hu-manité. D�aucuns auraient fait obser-ver que le monde s�était rétréci et queles chemins de fer, les voies maritimeset le télégraphe tissaient des liens en-tre des personnes très éloignées les unesdes autres. Le commerce et l�industries�étaient considérablement développésentre les nations, rapprochant les peu-ples du monde. Grâce aux traités et auxaccords qu�avaient su conclure deshommes d�Etat avisés, le risque de voirse répéter les guerres dynastiques oude conquête d�hier s�éloignait. Lemonde, divisé en �sphères d�influence�,était parvenu à un équilibre qui allaitgarantir la stabilité et la paix aux gé-nérations futures. L�Europe (comme

Des progrès aux20ème et 21ème Siècles

Besoins, droits et développement socialRodolfo Stavenhagen

Le Bulletin de l�Institut de Recherche des Nations Unies pour le Développement Social

printemps/été 2000 Numéro 22

maintenant les Etats-Unis) avait as-sumé sa mission civilisatrice et sa�destinée manifeste� qui était d�ap-porter la lumière et les bienfaits dela civilisation et du progrès aux �racesinférieures� de l�humanité. C�étaitl�époque de l�impérialisme béat ettriomphant. La reine Victoria, Bis-marck et Teddy Roosevelt (les That-cher, Kohl et Reagan de cette époquedorée, toutes proportions gardées)régnaient littéralement sur le monde.

Pourtant, même alors, il y avait dessceptiques et des contestataires. Le ca-pitalisme industriel suscitait l�agitationet le mécontentement de la classeouvrière qui revendiquait certains droitsfondamentaux: des conditions de tra-vail décentes, des salaires minimum, laliberté de s�associer et de s�organiser.Les paysans abandonnaient les villa-ges des campagnes pauvres et reculéespour affluer dans les villes, alors qued�autres fuyaient les famines et la per-sécution religieuse et politique en tra-versant les frontières et les océans. Alorsqu�une classe moyenne urbaine à peineéclose affichait son style de vie et sesniveaux de consommation, des massesd�analphabètes, de chômeurs et decrève-la-faim vivotaient en marge de

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la société bourgeoise. Les femmes ré-clamaient les mêmes droits que leshommes et les citoyens demandaientune place bien à eux dans les Etats dé-mocratiques naissants. Et, fait plusnotable encore, les peuples des empi-res coloniaux commençaient à se direqu�il n�était peut-être pas inévitablequ�ils eussent à porter le fardeau del�homme blanc et préparaient leur lon-gue marche vers la liberté. Durant ledemi-siècle précédent, de vrais vision-naires avaient bâti des théories sur lescontradictions internes du système ca-pitaliste mondial et prédit qu�une ré-volution en occasionnerait la chute. Defait, des groupes et mouvements révo-lutionnaires préparaient déjà ce jour.

Un siècle plus tard, ce tableau nesemble-t-il pas familier? Le monde a-t-il vraiment changé autant qu�on vou-drait nous le faire croire? Sommes-nousfinalement parvenus au terme del�histoire (ou plutôt l�humanité a-t-elleété stoppée dans son cheminement) ous�agit-il du calme avant la tempête?Est-ce simplement une coïncidence sile �vingtième Siècle abrégé�, commecertains historiens se plaisent à ledésigner, commence et se termine àSarajevo? Ce vingtième Siècle abrégéa été celui des contradictions et des ex-trêmes. On comprend Yehudi Menuhinlorsqu�il déclare: �Si je devais résumerle vingtième Siècle, je dirais qu�il a sus-cité les plus grands espoirs jamais con-çus par l�humanité et détruit tous lesidéaux et illusions�. Et pourtant, si noussouscrivions totalement à la dernièrepartie de la phrase, nous ne serions paslà aujourd�hui.

Si l�on discerne de grandes tendancesmondiales, il n�existe pas de consen-sus général sur ce que pourraient êtreles priorités en ce début de millénaire.L�économie devrait-elle continuer àcroître et à créer des richesses? Faut-il se soucier avant tout de l�environne-ment? Faut-il mettre fin à �l�explosiondémographique�? L�emploi doit-il êtreen tête de liste? Faut-il d�abord s�at-

tacher à éliminer la pauvreté? Qu�enest-il des droits de l�homme et des li-bertés fondamentales? La démocra-tie n�est-elle pas la condition premièreà réaliser avant de s�attaquer auxautres problèmes? Quelle importanceattacher à la convivialité et à la tolé-rance dans un monde enclin aux con-flits et à la violence? Si nous avionsune cellule mondiale impartiale, com-posée de citoyens concernés et bieninformés, peut-être aurions-nous punous entendre sur un ordre de priori-tés valable à l�échelle mondiale. Maiscomme ce n�est pas le cas, force est dereconnaître que sur notre planète secôtoient des sociétés et des cultures trèsdiverses et que, dans chacune d�elles,s�affrontent des conceptions différen-tes de ce qui est bien et mal, de la na-ture des tâches à accomplir et de lamanière d�aborder les problèmes.

Même lorsque des priorités ont étédéfinies et approuvées, il n�y a pas en-core d�accord sur la manière de pro-céder ensuite. L�absence de volontépolitique ou même simplement l�in-compétence et l�indifférence peuventavoir raison de la meilleure des inten-tions. Il est regrettable que le dévelop-pement social et humain (termesétroitement liés quel que soit l�anglesous lequel on se place) soit le parentpauvre des priorités internationalesmais il est inexcusable que la notion dedéveloppement puisse encore se cons-truire sans référence aux valeurs hu-maines et aux objectifs sociaux. Je faisnaturellement allusion à l�habitude trèsrépandue de confondre le développe-ment avec la croissance économique etde mesurer les résultats économiquesavant tout au PNB et à d�autres indi-cateurs macro-économiques.

Il y a plusieurs décennies, la croissancecomme mesure du développementayant suscité une déception générale,on a beaucoup parlé de la nécessitéd�aborder le développement sous l�an-gle des besoins fondamentaux et d�in-téressants ouvrages théoriques ont été

consacrés à ce sujet. Cependant, desuniversitaires de pays pauvres ont cri-tiqué la notion de besoins fondamen-taux, laissant entendre qu�elle servaità enfermer le tiers monde dans unepauvreté perpétuelle tandis que lespays riches avaient toute liberté desuivre la voie de la croissance. Les be-soins fondamentaux ont été bientôtremplacés par les besoins humains ousimplement par la notion de besoinset les universitaires ont eu tendance às�entendre sur le fait que, fondamen-taux ou non, tous les êtres humainsavaient des besoins matériels, cultu-rels, sociaux et spirituels et que lesstratégies et politiques de développe-ment devaient avoir pour but de lessatisfaire. Si cette approche du déve-loppement�le développement vusous l�angle des besoins�semble neplus avoir la faveur des puissants, ledébat sur les objectifs généraux desstratégies et politiques de croissance,au-delà du maintien d�un taux decroissance minimal ou de l�augmen-tation du PNB national, n�a rien perdude sa vivacité.

A l�ère des transactions mondiales, desmégafusions et des macrostratégies, ilest peut-être nécessaire de renverserune fois de plus l�ordre du monde. Onne soulignera jamais assez qu�il ne fautpas confondre le développement avecla croissance économique. Il peut y avoirune croissance sans développement et,bien que beaucoup se refusent à l�ad-mettre, il peut y avoir aussi un déve-loppement sans croissance. Je veux direpar là que la condition des gens situésau plus bas de l�échelle sociale, pouremployer la métaphore habituelle, peuts�améliorer même en l�absence de crois-sance macro-économique.

Mais comment? Il nous faut revenir àcertaines idées et valeurs anciennes,curieusement tombées en désuétudedepuis quelques décennies. Elles sonttoutes simples et bien connues et il estsurprenant qu�au début du troisièmemillénaire nous en débattions de nou-

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veau comme si l�histoire des deux der-niers siècles ne nous avait rien appris.

Premièrement, le développement doitservir à satisfaire les besoins des êtreshumains, et avant tout ceux des pau-vres. En d�autres termes, les besoinsdoivent être à nouveau pris en comptedans les stratégies de développement,qui doivent être élaborées de manièreà y répondre directement: la satisfac-tion des besoins ne doit pas être con-çue comme un effet secondaire ou uneretombée tardive mais se situer au cen-tre de la réflexion sur le développement.

Deuxièmement, le développement�quelle que soit la définition qu�on luidonne et, si le consensus fait défaut, lesdéfinitions abondent�doit être consi-déré non seulement comme un proces-sus d�accumulation ou de changement,mais plutôt comme un bien collectif,dans la mesure où il répond aux be-soins communs de groupes sociaux etculturels spécifiques. Ici, j�entends nonseulement la vieille problématique dupeuple ou du tiers état mais aussi laquestion plus épineuse de la relationentre entreprise individuelle ou collec-tive et bien-être du groupe, que cegroupe soit un petit village agricole, unetribu d�autochtones, le quartier d�uneville, une région géographique ou unenation. On ne peut pas réduire le dé-veloppement à des kilowattheuresd�énergie ou à la production d�acier oude voitures sans tenir compte de leurincidence sur la vie quotidienne despeuples, leur environnement, leur exis-tence, leurs perspectives d�avenir etleur identité comme celles des généra-tions futures.

Troisièmement, partons de l�idée que lasociété, et non l�économie, se fixe sespropres règles et qu�en conséquence sesmembres doivent participer, avec leursavoir et leurs convictions, à la concep-tion et à la gestion des institutions des-tinées à servir le bien commun. L�Etatest, bien sûr, l�une de ces institutionsmais ce n�est pas la seule. L�Etat a posé

un problème au 20ème Siècle en cesens que, pour dire les choses crûment,on ne pouvait ni vivre avec lui, ni s�enpasser. Pourrons-nous faire mieux au21ème Siècle?

Je pense qu�il devrait être clair main-tenant qu�un développement centré surles êtres humains suppose non seule-ment une participation populaire maisaussi des institutions, y compris un Etat,qui placent la personne au centre.

Permettez-moi d�ajouter quelques motssur ces trois idées toutes simples et pastrès originales.

A l�exception des fonctions physiologi-ques les plus élémentaires (par exem-ple l�ingestion de nourriture ou lesommeil), tous les besoins sont desconstructions sociales, de même que lafaçon de les satisfaire (y compris l�in-gestion de nourriture ou le sommeil)parce que les humains sont des ani-maux sociaux et culturels. La façondont les besoins sont formulés, définis,exprimés, assouvis ou subis porte danstoutes les sociétés humaines une em-preinte culturelle. Et toutes les sociétéshumaines passées et présentes ont ins-titué des mécanismes réglant par uneinfinité d�us et de coutumes, de nor-mes et de relations la satisfaction ou lanon-satisfaction de ces besoins. Lors-que les besoins sont ressentis, expriméset reconnus mais non satisfaits ou in-suffisamment ou mal satisfaits, les êtreshumains ont alors la faculté étonnanted�agir pour remédier à cet état de cho-ses. Lorsqu�ils ont faim, certains leurconseillent de travailler plus mais ilspeuvent aussi essayer d�émigrer versdes contrées plus vertes, piller un en-trepôt ou prendre la Bastille. Lorsqu�ilséprouvent le besoin de participer (be-soin très humain en vérité), ils peuventprendre part à une assemblée, chanterà l�église, aller danser dans une disco,fonder un parti politique, organiser unemanifestation ou faire la révolution.Leur réaction dans chaque cas devientune question sociale et culturelle et sou-

vent un drame politique. S�il fallait énu-mérer les formes sous lesquelles les be-soins et leur satisfaction s�insèrent dansle moule socioculturel du lieu et del�époque, la liste serait longue.

On peut cependant souligner que laplupart des besoins humains ont étéérigés à l�époque moderne en droitslégitimes auxquels les citoyens peuventaspirer et que la société dans son en-semble est tenue de respecter et degarantir. Selon Johan Galtung, la ma-jorité des droits énoncés dans les ins-truments légaux internationaux (laDéclaration universelle, les Pactes in-ternationaux) répondent en fait à desbesoins fondamentaux de la personne.Tout au long de l�histoire, les hommesont lutté�parfois violemment et con-tre les plus cruels revers�pour obte-nir la satisfaction de leurs besoins,depuis les révoltes d�esclaves de l�An-tiquité aux initiatives syndicales de larévolution industrielle en passant parles luttes de libération nationale et lachute récente du mur de Berlin. Cesluttes ont transformé les besoins endroits et ceux-ci sont devenus le cadrelégitime et juridique de l�action politi-que et sociale dans les Etats-nationsmodernes. Nous vivons à une époquede droits où, comme le rappelleNorberto Bobbio, �le fait que le débatactuel sur les droits de l�homme s�élar-git et s�intensifie peut être interprétécomme un �signe prophétique� (signumpronosticum) du progrès moral del�humanité, puisqu�il est si général quetous les peuples du monde y sont as-sociés et tellement intense qu�il figureà l�ordre du jour des plus hautes ins-tances judiciaires internationales�.

Le Pacte international relatif aux droitséconomiques, sociaux et culturels,adopté par l�Assemblée générale en1966, reconnaît �le droit de toute per-sonne à un niveau de vie suffisant pourelle-même et sa famille, y compris unenourriture, un vêtement et un loge-ment suffisants, ainsi qu�à une amé-lioration constante de ses conditions

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d�existence�. Il reconnaît aussi le droitfondamental qu�a toute personned�être à l�abri de la faim et fait auxEtats signataires, l�obligation de prendredes mesures appropriées pour assurerla réalisation de ce droit. Tout cela,chacun le reconnaît, est de l�ordre dugénéral et a suscité de graves débatssur la notion de �suffisance� et sur lesmesures spécifiques que les Etats sonttenus de prendre pour s�acquitter decette obligation. Il est tout à fait évi-dent que sont suggérées ici des straté-gies de développement fondées sur unénoncé international des droits del�homme résultant de la reconnais-sance de besoins précis de la personne.La conception du développement quise dégage ici est ancrée dans le coupledroits-besoins humains. Dans quellemesure la croissance entretenue par lemarché relève-t-elle le défi? On saitque le prix du pain sur le marché résultedes lois de l�offre et de la demandemais celles-ci ne font rien pour soula-ger la famine et la faim. Ne devrait-on pas attendre des stratégies dedéveloppement qu�elles apportent uneréponse? Et si c�est le cas, comme jele crois, comment devraient-elles êtreformulées et par qui?

Il est significatif que pendant les an-nées 80 les Etats membres des NationsUnies aient jugé bon d�aborder le déve-loppement comme un droit de l�homme.Comme beaucoup de déclarations in-ternationales avant elle, la proclama-tion de ce nouveau droit n�a pas suscitéd�activités débordantes tendant à fairede ce droit une réalité. De plus, lesspécialistes des droits de l�homme nesavaient pas très bien comment s�yprendre pour traduire les principesénoncés dans la Déclaration en mesu-res concrètes et, à ma connaissance,les Etats n�ont pas été nombreux àadapter leurs stratégies nationales dedéveloppement pour observer cesprincipes. Au contraire, il semble queces stratégies aient été subordonnéesà des objectifs généraux de croissancesur le marché mondial en formation.

Le moment n�est-il pas venu de reve-nir aux principes de la Déclaration desNations Unies et de tenter d�adapterles stratégies de développement autout indivisible que constituent lesdroits de l�homme?

Si le développement durable supposeun investissement dans une croissancefuture et non pas des réponses rapi-des aux revendications immédiates, lacruelle expérience du 20ème Sièclenous a appris que miser sur un avenirglorieux mais lointain en remettant àplus tard la satisfaction de besoinsfondamentaux, c�était courir à la ca-tastrophe, du point de vue politiquecomme du point de vue humain. Il estcependant tout aussi dangereux etmoralement inadmissible de comptersur la main invisible du marché et defaire fi des besoins et des droits desexclus de la société.

Une �bonne société�, c�est naturelle-ment une société dans laquelle les be-soins des individus sont équitablementsatisfaits et leurs droits respectés. Siles pays du Nord doivent pour cela re-penser l�Etat providence, reconstituerle capital humain, offrir des emploiset inscrire dans la loi les aides aux dés-hérités (à plus forte raison reconsidé-rer les politiques d�immigration�letragique accident survenu récemmentà Douvres, où l�on a découvert dansune remorque 50 immigrants sanspapiers morts asphyxiés, et la chasseà �l�immigrant clandestin� dans ledésert de l�Arizona ont montré com-bien c�était important), le problème auSud prend de tout autres proportions,gigantesques en fait. L�une des gran-des illusions des 20 dernières annéesa été de croire que les lois du marchéréussiraient à tirer de leur marasmeles pays les plus pauvres et les popu-lations les plus démunies du globe.Mais il ne s�agit pas seulement de lapauvreté des individus en termes sta-tistiques (combien de personnes viventen-deçà d��un seuil de pauvreté� dé-fini arbitrairement) mais plutôt de la

problématique de l�inégalité structu-relle et de l�exclusion sociale de grou-pes entiers.

Il s�ensuit que les politiques de déve-loppement conçues pour atténuer lapauvreté, surmonter l�exclusion so-ciale et réduire des inégalités tenacesdoivent être axées sur les besoins etles droits de catégories ou de groupessociaux spécifiques. Mais les mesuresdoivent porter sur des domaines oùles résultats soient sensibles: activi-tés de production, propriété et maî-trise des moyens de production et desfruits du travail, organisation au lieude travail, modalités de prise de dé-cision, cadre juridique propre à fa-voriser une participation autonome,respect des différences culturelles etdes identités sociales et, bien sûr,gouvernance démocratique.

La construction d�un avenir sociale-ment porteur doit reposer sur l�idéeque c�est en mettant en place à tousles niveaux de la société des institu-tions participatives que l�on parvien-dra le mieux à servir la cause des droitsde l�homme et à satisfaire les besoinsdes êtres humains. L�Etat doit appa-raître non seulement comme un mé-canisme régulateur d�intérêts divers etparfois conflictuels (c�est ainsi que lespartisans de la liberté de marché aime-raient le voir) mais aussi comme uninstrument aidant la société à acqué-rir les biens collectifs qu�elle désire etfacilitant l�accès de tous ses membresau bien-être. Un tel Etat ne peut s�édi-fier qu�à partir de la base et ne prospé-rer qu�en démocratie. Il est comptableà tous les niveaux et lié à diversesautres institutions de la société civilequi, de leur côté, doivent faire contre-poids aux pouvoirs publics.

La démocratisation, la décentralisation,la déréglementation et la �dévolution�sont toutes des notions liées à un Etatsocialement responsable. Dans ce sens,

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L�ESSENTIEL

Les inégalités se creusent dans lemonde, nous le savons tous: nom-

bre d�indicateurs inquiétants nous leprouvent. L�une des études les plus ré-centes à ce sujet émane d�une sourceplutôt inattendue et c�est pourquoij�aimerais vous la signaler. L�étude, deBranko Milanovic de la Banque mon-diale, est peut-être la première de ce typeà se servir de données provenant dumonde entier pour essayer d�estimer larépartition des revenus entre 1988 et1993, époque à laquelle la mondialisa-tion néolibérale s�est nettement accélé-rée. B. Milanovic constate que lesinégalités se sont creusées pendant cettepériode, à l�intérieur des pays mais sur-tout entre eux. Le revenu moyen des 5pour cent les plus riches de la popula-tion mondiale, qui était 78 fois plus im-portant que celui des 5 pour cent les pluspauvres en 1988, s�était multiplié par114 en 1993. Les 5 pour cent les pluspauvres se sont appauvris, tandis que lequintile le plus riche a gagné 12 pourcent en termes réels. C�est plus du dou-ble de l�augmentation du revenu mon-dial moyen. Le 1 pour cent le plus richedes habitants du monde a gagné autantque les 57 pour cent les plus pauvres.

Cette évolution a pour toile de fond leschangements de politique des années80: les approches du développementéconomique jusque-là admises sontalors sévèrement remises en cause. Lekeynésianisme est spécialement criti-qué, tout comme son homologue pourle tiers monde, l�économie du dévelop-pement. Le socialisme d�Etat traverseune profonde crise qui aboutit à la créa-tion de ce que l�on appelle aujourd�huiles économies de transition. Mais sur-tout, on assiste à cette époque, dans lesillage de la crise de la dette, à la mon-tée du capitalisme financier, qui est àmon avis l�un des principaux défis quinous soient lancés aujourd�hui.

Mondialisation, inégalité des revenus ettendances de la politique sociale

Jomo K.S.Il faut attendre les années 90 pour queles premiers excès du néolibéralisme, ycompris la mondialisation néolibérale,suscitent une réaction. Les institutionsde Bretton Woods commencent à ma-nifester le désir de s�attaquer aux pro-blèmes sociaux. Le Sommet mondialde Copenhague pour le développementsocial est organisé pour attirer l�atten-tion sur certains des enjeux majeursdu développement social. Et dernière-ment, nous avons vu apparaître uneécole de pensée très influente en Occi-dent, celle de la �troisième voie�,

qui reprend en grande partie la logi-que du néolibéralisme mais en prônantplus d�intérêt pour le social. Le tournouveau pris par la réflexion sur le dé-veloppement social dans certaines ré-gions du tiers monde, en particulier enAmérique latine, fait écho à cette écolede pensée.

Malgré tout, je n�hésite pas à affirmerque la tendance à la libéralisation et àla mondialisation ne fléchit guère. Lalibéralisation du commerce s�est sensi-blement intensifiée, ce qui a favoriséune nouvelle dégradation des termes de

l�échange pour les produits de base etles articles manufacturés du Sud. Bienque les premières négociations sur lesmesures concernant les investissementset liées au commerce et l�initiative del�Organisation de coopération et de dé-veloppement économiques en faveurd�un Accord multilatéral sur les inves-tissements aient capoté, les efforts ten-dant à encourager la libéralisation desinvestissements se poursuivent aussi.Quant à la libéralisation du commercedes services, elle fait l�objet de nom-breux travaux, ce qui a une incidenceparticulière sur ce qui nous intéresseaujourd�hui parce que cela touche à lafois à la libéralisation financière et à lalibéralisation du commerce des servi-ces dans le domaine social, notammentaux assurances, aux fonds de pension,à la santé et à l�éducation.

En revanche, la libéralisation a reculédans deux domaines très importants.Premièrement, d�importantes restric-tions à la circulation des personnescontinuent d�être appliquées, ce qui estmanifestement lié aux inégalités crois-santes entre pays dans l�économiemondiale actuelle. Deuxièmement, lalibéralisation se heurte au renforce-ment des droits à la propriété intel-lectuelle, qui limite les transferts detechnologie, en augmente le coût (lors-qu�ils ont encore lieu) et consolide en-core les monopoles technologiques.Enfin, évolution capitale dans le do-maine du commerce, l�Accord généralsur les tarifs douaniers et le commerce(GATT) a été remplacé par l�Organi-sation mondiale du commerce (OMC)qui est bien autre chose que l�ancienneorganisation rebaptisée. La nouvelleorganisation est très attachée à l�éga-lité de traitement alors que le GATTreconnaissait que, le monde étantcomposé de pays aux capacités diffé-rentes, des différences de traitement

Pendant la période 1988�1993,les inégalités se sont creusées à

l�intérieur des pays, mais surtoutentre eux. Le revenu moyen des5 pour cent les plus riches de lapopulation mondiale, qui était78 fois plus important que celuides 5 pour cent les plus pauvres

en 1988, s�était multipliépar 114 en 1993.

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étaient parfois nécessaires. De plus,l�OMC prévoit des mécanismes de re-présailles qui permettent à des payspuissants non seulement d�employerdes moyens légaux mais aussi de re-courir à d�autres sanctions économi-ques contre des membres récalcitrants.

Permettez-moi de m�attarder quelquepeu sur les répercussions de la libérali-sation financière internationale parceque�et j�y ai déjà fait allusion�elles révèlent la montée du capitalismefinancier qui a des retombées assez in-quiétantes pour nous tous. Contraire-ment à ce que nous promettaient lespartisans de la libéralisation financièreinternationale, le coût des fonds pourles pays destinataires, en particulière-ment ceux du Sud, n�a pas baissé. Il amême probablement augmenté. Onavait promis un apport net de fonds despays riches en capitaux aux pays pau-vres en capitaux mais il ne s�est pasproduit, si ce n�est temporairement enAsie de l�Est et du Sud-Est au début etau milieu de la décennie 90. Ce mou-vement a été inverse vers le milieu del�année 1997, avec les conséquencesdésastreuses que l�on sait pour la po-pulation de la région. On constate, de-puis quelques années, des mouvementsimportants de capitaux à destinationde certaines régions d�Amérique latinemais ces mouvements peuvent s�inver-ser, eux aussi. La promesse d�une moin-dre instabilité n�a pas été tenue nonplus. Bien que certains des anciens fac-teurs d�instabilité du système financierinternational aient été effectivementréduits, ils ont été remplacés par desdérivatifs et d�autres instruments finan-ciers qui présentent leurs propres ris-ques et incertitudes.

La montée du capitalisme financier in-ternational soumet les gouvernementsde par le monde à d�énormes pressionsdéflationnistes. Elle restreint considé-rablement le champ de la politiquebudgétaire, ce qui a d�importantes ré-percussions sur les dépenses sociales. Lalibéralisation financière limite aussi les

possibilités qu�ont les Etats d�appliquerune politique industrielle sélective, siimportante dans le passé pour l�indus-trialisation tardive de l�Asie de l�Est. Ellerestreint aussi le champ de manoeuvredu gouvernement en matière de créationd�emplois, et dans d�autres types depolitique redistributive. Tout cela con-court, à mon avis, à créer une situationdans laquelle ce n�est pas la croissanceque l�on défend, contrairement à ce que

prétend le discours néolibéral, mais untype particulier de croissance, celle quifavorise le capitalisme financier. C�estune croissance beaucoup plus modéréeque celle des années 50 et 60, l�âge d�orde l�après-guerre.

Certains courants de la réflexion sur lapolitique sociale ont eu aussi des retom-bées négatives sur le développement.Le ciblage appliqué à l�excès en faitpartie. L�UNRISD s�est livré à une cri-tique très sérieuse des hypothèses quisous-tendent le ciblage, faisant obser-ver que les gouvernements du tiersmonde qui se voient vivement encou-ragés aujourd�hui à cibler les pauvres,en testant leurs moyens de subsistanceentre autre, sont ceux-là mêmes aux-quels on disait qu�ils étaient incapablesde cibler lorsqu�il s�agissait de straté-gies économiques telles que la promo-tion sélective de telle ou telle industrie.Ce n�est pas seulement ironique mais

cela dénote aussi une certaine sélecti-vité dans la réflexion sur les capacitésdes gouvernements et des Etats du Sud.Et cette insistance nouvelle sur leciblage sous-entend quelque chose deplus pernicieux encore, à savoir quel�exclusion sociale inhérente aux modè-les de croissance néolibéraux n�est pasà proscrire, mais simplement à atténuer.Réduire l�exclusion, ce n�est pas inté-grer et c�est sur l�intégration de tous quenous devrions insister.

Nous devons aussi mettre fin à la dis-sociation qui est faite dans le débat surle développement entre l�économiqueet le social. Les discussions qui ont eulieu récemment sur des formes pluscomplètes de développement ne sontpas allées assez loin dans ce sens. Il estnécessaire d�intégrer la politique sociale,d�en faire un élément important de lapolitique macro-économique. Les iné-galités qui existent aujourd�hui ne sontpas supportables à terme, d�un pointde vue économique comme d�un pointde vue social. Elles sont incompatiblesavec les droits fondamentaux de tous.

Jomo K.S. est professeur au Département

d�économie appliquée de l�Université

de Malaya, Malaisie. Cet article est extrait

du discours liminaire qu�il a prononcé à la

conférence de l�UNRISD, Mains visibles:

Assumer la responsabilité du développement

social (29 juin 2000, Genève).

Références

� Branko Milanovic, Income, Inequality

and Poverty during the Transition from

Planned to Market Economy, Banque

mondiale, ISBN 0-8213-3994-X, 1998.

� Thandika Mkandawire et Virginia

Rodríguez, Globalization and Social

Development after Copenhagen:

Premises, Promises and Policies,

OPG 10, UNRISD, Genève, juin 2000.

La tendance à la libéralisationet à la mondialisation ne

fléchit guère. La libéralisationdu commerce s�est sensiblement

intensifiée, ce qui a favoriséune nouvelle dégradation destermes de l�échange pour les

produits de base et les articlesmanufacturés du Sud.

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printemps/été 2000UNRISD Infos No. 22 7

L�ESSENTIEL

Il est possible d�éliminer la pauvretéde la surface de la terre, et elle le sera,

comme l�a été l�esclavage. Les pauvresseront délivrés du fardeau de la dette.Les programmes d�ajustement structu-rel seront réaménagés et les êtres humainsplacés au centre du développement.Tels sont les engagements que nos gou-vernements ont pris en 1995 à Copen-hague, lors du Sommet mondial pourle développement social, le plus grandrassemblement de chefs d�Etat jamaisorganisé. Et ce sont des engagementsqui ont vraiment de quoi inspirer. Cer-tes, il y a toujours un certain scepti-cisme du public devant ce que disentles hommes et femmes politiques, qu�ils�agisse de promesses électorales ou dedéclarations internationales commecelles qui émanent du Sommet social.Nous savons qu�en pratique, des ac-cords contraignants tels que ceux aux-quels ont abouti les négociationscommerciales d�Uruguay, ou les con-ditions imposées aux pays en dévelop-pement par la Banque mondiale et leFonds monétaire international (FMI),réduisent fortement le champ de ma-noeuvre politique.

Mais nous croyons que nos dirigeantsétaient sincères lorsqu�ils ont pris cesdix engagements en 1995. Depuis lors,un peu partout dans le monde, des or-ganisations de la société civile deman-dent à leurs gouvernements ce qu�ilsfont pour honorer leurs engagementset communiquent leurs conclusions.Voilà résumée en quelques mots la mis-sion de Social Watch.

On manifestait aujourd�hui dans lesrues de Genève, comme on le faisait àSeattle en décembre dernier, contre uneéconomie mondiale transformée en ca-sino. Mais aujourd�hui, les manifesta-tions n�avaient pas pour but d�empêcherl�Assemblée générale des Nations Unies

�J�étais à Genève!�Roberto Bissio a prononcé cette allocution

à l�ouverture du Geneva 2000 Forum le 25 juin 2000.

de siéger, comme elles l�avaient fait pourla conférence de l�Organisation mon-diale du commerce (OMC) à Seattle.Les manifestants aujourd�hui expri-maient des préoccupations et des re-vendications dans l�espoir qu�il en seraittenu compte.

L�Organisation des Nations Unies estune institution transparente et démo-cratique, la seule institution mondialeà avoir cette légitimité. Les gens saventque l�ONU n�est pas dominée par quel-ques gouvernements se réunissant ensecret et que ce n�est certainement pasle lieu où l�argent décide des votes. Tousles pays y ont le droit de vote. Même sinous nous battons avec nos gouverne-ments au niveau national, nous savonsqu�ils sont nécessaires. Sans un Etatpour arbitrer les conflits, la guerre ci-vile n�est pas loin. Nous ne sommes ci-toyens que pour autant qu�il y ait unEtat, si critiques que nous puissions êtrede ce que font nos représentants unefois en poste.

Quelles sont les conclusions de SocialWatch? D�abord et surtout, nous avonsle sentiment que les objectifs fixés àCopenhague sont réalisables. Ils ne sontpas inaccessibles. En fait, bon nombrede pays parmi les plus pauvres dumonde présentent des indicateurs so-ciaux en très nette progression. Les vio-lations des droits de l�homme sontmoins répandues dans de nombreuxpays, il y a moins de gouvernementscorrompus (beaucoup ont été chasséspar la société civile ces dernières an-nées) et moins de guerres civiles. De telschangements ont des répercussions fa-vorables immédiates sur le développe-ment humain.

Mais nous avons le regret d�annoncerqu�aucun pays du monde n�a atteinttous les objectifs fixés par les conféren-

ces des Nations Unies pour l�an 2000.Quelque 30 pays ont vu leur situationse dégrader depuis 1990 et les progrès,s�il y en a, sont terriblement lents dansla grande majorité des pays.

Social Watch s�emploie à recueillir desdonnées sur les progrès allant vers laréalisation de chacun des objectifs, etce pour tous les pays, ceux du Nord etdu Sud. Les statistiques, nombres réelset objectifs à atteindre, concernant lamortalité maternelle et infantile, l�anal-phabétisme, la scolarisation des garçonset des filles, les vaccinations et beau-coup d�autres questions sont extrême-ment importantes. On peut avoir desdiscussions passionnées sur la mondia-lisation et l�existence de �mains invisi-bles� mais, lorsqu�on a sous les yeux lenombre des enfants qui meurent cha-que année, le nombre de ceux que l�onaurait pu sauver avec des politiquesadaptées, alors c�est d�action que l�ondébat et pas d�idéologie.

Nous avons donc été très heureux lors-que l�Organisation de coopération et dedéveloppement économiques (OCDE)nous a invités à contribuer à l�établis-sement d�un rapport sur les objectifsfixés par la communauté internationaleet les moyens de mesurer le cheminparcouru. Le Secrétaire général del�ONU vient d�annoncer qu�il procéde-rait demain au lancement de ce rap-port qu�il co-signe avec les dirigeantsde l�OCDE, de la Banque mondiale etdu FMI.

Je dois malheureusement ajouter quebeaucoup d�ONG ont déjà vu la ver-sion définitive de ce rapport, Un mondemeilleur pour tous, et qu�il ne nous plaîtpas. S�il rend bien compte des progrèsaccomplis dans les pays en développe-ment vers la réalisation de sept objec-tifs, il ne rend pas compte du tout des

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L�ESSENTIEL

problèmes sociaux du Nord, oubliantque tous les gouvernements se sont en-gagés à s�attaquer aux problèmes so-ciaux dans chaque pays du monde.

En plusieurs occasions, les pays richesse sont engagés à accroître leur aide, àalléger les dettes et à ouvrir leurs mar-chés aux pays les plus pauvres. Cesengagements n�ont pas été tenus, ce quepasse sous silence Un monde meilleurpour tous. Le rapport engage les paysen développement à ouvrir leurs mar-chés aux importations, aux exporta-tions, aux investissements et aux fluxfinanciers et à continuer de privatiserles services sociaux alors que ces recom-mandations ne reposent sur aucun ac-cord international. Pourquoi ce rapportrecommande-t-il d�ouvrir encore les

marchés financiers lorsque les débats àl�Assemblée générale qui commencerademain porteront essentiellement surles moyens de maîtriser la spéculationfinancière, peut-être par des mécanis-mes tels que la taxe Tobin?

La société civile respecte l�Organisationdes Nations Unies et veut qu�elle s�at-taque aux problèmes de l�économiemondiale. En fait, comme les Etatsmembres de l�OMC sont incapables deparvenir à un accord et que l�action dela Banque mondiale et du FMI est cri-tiquée par de nombreux économistes,de plus en plus de gens parviennentchaque jour à la conclusion que lesNations Unies doivent jouer un rôledans la restructuration de l�économiemondiale. Mais l�ONU ne peut pas être

à la fois l�arbitre et l�alliée d�une deséquipes. L�OCDE est un club de paysriches et ses membres ont tout pouvoirsur le FMI et la Banque mondiale.

Toutes ces questions qui nous préoccu-pent seront discutées ici à Genève parl�Assemblée générale des Nations Unies.Nous avons tous une chance de changerles choses. La vidéo que nous venons devoir nous a rappelé Seattle. Je me sou-viens que lorsque j�étais adolescent, j�en-viais ceux qui pouvaient dire: �J�étais àWoodstock�. Ces derniers temps, on estfier de pouvoir dire qu�on était à Seattle.Moi, j�espère sincèrement que, dans unesemaine, nous serons tous fiers de dire:�J�étais à Genève!�

Roberto Bissio est le secrétaire de Social Watch.

Le féminisme conteste le type de re-lations qui règne actuellement entre

les sexes, partout où elles se caractérisentpar la soumission et l�inégalité. Ce faisant,il s�en prend aux coutumes et pratiquesdes sociétés, ce qui laisse à penser qu�il estattaché à un discours de droits et d�éga-lité fortement teinté d�universalisme. Onne se tromperait certainement pas si laseule solution de rechange à l�universa-lisme était le relativisme culturel.

Par relativisme culturel, j�entends l�idéeque les normes de justice sont toujoursrelatives à la société qui les édicte. Cetteopinion a le tort de présenter les culturescomme hermétiquement scellées et par-faitement homogènes. Elle ignore la mul-tiplicité des cultures à laquelle toutepersonne a affaire. Le relativisme cultu-rel laisse aussi entendre qu�il existe entre�nous� et �les autres� une cloison étan-che, ce qui est aujourd�hui bien loin de laréalité du monde contemporain. A celas�ajoute le problème que, vue sous l�angledes rapports sociaux entre hommes etfemmes, la �société� qui édicte les nor-mes en usage et les consacre n�est jamaisun acteur inoffensif; au contraire, commela justice sexuelle ne règne nulle part, ce

qui apparaît bon et juste dans une sociétédonnée doit toujours être soumis à un exa-men rigoureux.

Le relativisme culturel n�est donc pas unallié utile pour le féminisme. Mais les rai-sons mêmes qui le rendent si peu sédui-sant ont également posé des problèmes àl�universalisme. Si les féministes ont étésensibles au risque d�ériger des interpré-tations culturelles en normes incontestées,elles ont été tout aussi sensibles (et à justetitre) à la façon dont ces interprétationsculturelles façonnent ce qui est ensuiteprésenté comme des principes universelsde justice et de vérité. Les discours uni-versels de droits et d�égalité ignorent sou-vent les différences (de classe, de sexe,d�ethnie, etc.). Il y a là manifestement unespace où justice sexuelle et justice cultu-relle se recoupent.

L�une des critiques de l�universalisme con-siste à dire que derrière toutes les diffé-rences il perçoit un noyau commun à toutel�humanité. Ce faisant, il tend à confondreégalité et similitude et ignore ainsi les iné-galités systémiques du pouvoir. A cela, onobjecte que certaines différences existeronttoujours, que nous sommes attachées à

beaucoup d�entre elles et tenons à les gar-der. Les femmes ne veulent pas être accep-tées comme égales si c�est à la condition queles autres ne remarquent pas si elles sontde sexe féminin ou masculin; et il en vamanifestement de même pour ceux dontla couleur de la peau, par exemple, fontappartenir à des groupes minoritaires.

Tensions entre l�égalité sexuelle et culturelleLa différence sexuelle a presque toujoursété associée à l�inégalité: ce qui rend lesfemmes différentes des hommes est priscomme une marque de leur infériorité. Ladifférence culturelle, elle aussi, évoqueencore des images de supériorité et d�in-fériorité; on dit qu�il y a des cultures plusou moins �bonnes�, plus ou moins �avan-cées�. Le recours à des principes univer-sels comme l�aune à laquelle se mesurentles pratiques et valeurs d�autres culturessemble alors assez suspect.

Le hic, en l�occurrence, c�est que l�un descritères actuellement employé pour diffé-rencier les cultures �meilleures�, �plusavancées� que les autres, c�est la façondont elles traitent les femmes: tiennent-elles à confiner les femmes au foyer? lesobligent-elles à se voiler pour paraître en

Multiculturalisme, universalisme et revendications égalitairesAnne Phillips

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L�ESSENTIEL

public? etc. Certaines féministes (et j�ensuis), ont vu une relation étroite entre leféminisme et le multiculturalisme: nousles considérons comme liés, pas simple-ment parce qu�ils s�attaquent aux ques-tions à la fois d�inégalité et d�oppressionmais, plus profondément, parce que lestypes d�oppression qu�ils combattent sontde même structure. Dans les deux cas, l�in-capacité de reconnaître les êtres humainscomme égaux semble être liée à l�inapti-tude à accepter la différence. On part del�idée que ceux qui portent la marque dela différence (et ce sont toujours ceux quisont en marge qui portent cette marque)devraient se conformer aux autres pourêtre accueillis comme membres à partentière de leur société. De ce postulat dé-coule une forte coïncidence entre les pré-occupations d�égalité sexuelle et culturellemais il annonce aussi certaines tensions.

En énonçant les conditions de la citoyen-neté multiculturelle, Will Kymlicka expli-que que les arguments en faveur de droitsculturels pour les minorités cadrent par-faitement avec l�universalisme, aussi long-temps que celui-ci est conçu sur unmodèle assez faible. Il fait observer no-tamment qu�il faut distinguer les �pro-tections externes�, qui peuvent se révélernécessaires pour garantir les droits descultures minoritaires, des �restrictions in-ternes� qui imposent aux membres d�ungroupe des contraintes illégitimes. Danscette conception de l�harmonie multicul-turelle, les groupes ne devraient pas êtreautorisés à exercer entre leurs membresdes discriminations fondées sur le sexe, larace ou la préférence sexuelle.

Cela semblerait, à première vue, désamor-cer toutes les tensions entre l�égalitésexuelle et l�égalité culturelle. Pourtant,examiné de plus près, l�argument de WillKymlicka satisfait moins. Premièrement,il n�est pas toujours facile de distinguer les�protections externes� légitimes des �res-trictions internes� illégitimes. L�une despremières préoccupations identitaires d�ungroupe par rapport aux autres ou à l�Etatest de garder la faculté de décider qui sontses membres. Ce pouvoir passe essentiel-lement par le droit familial qui peut com-

porter de sérieuses atteintes aux droits desfemmes. Dans bien des cas, les critèresd�appartenance à un groupe donné ontété discriminatoires dans les faits. Il n�estpas toujours possible de tracer une ligneentre les droits externes du groupe et lesdroits internes de ses membres, et les pre-miers peuvent être souvent en conflit avecles seconds.

Un autre problème se pose lorsque WillKymlicka envisage les conditions dans les-quelles l�Etat peut raisonnablement pren-dre des mesures contre la discriminationexercée à l�intérieur d�un groupe culturel.�A l�évidence�, écrit-il, �l�intervention estjustifiée dans le cas de violations flagran-tes et systématiques des droits del�homme, telles que l�esclavage, le géno-cide, les tortures et les expulsions massi-ves�. Cela laisse encore au débat unchamp très large. Will Kymlicka ajoute ques�il y a consensus dans la communautésur la légitimité d�une restriction de droitsindividuels, il n�est peut-être pas appro-prié que le gouvernement intervienne. Lesprotections théoriques dont pourraient bé-néficier les femmes sont ainsi balayées,chassées par la crainte que l�Etat n�exerceune contrainte sur le groupe, et il sembleque seules des �violations flagrantes et sys-tématiques� justifient une action de l�Etat.Une grande partie des discriminationsexercées à l�encontre des femmes ne rem-plissent pas cette condition, étant de na-ture plus voilée, �privée� et indirecte.

C�est dans ce contexte que Susan MollerOkin se pose la question suivante: lemulticulturalisme est-il mauvais pour lesfemmes? L�aspect du multiculturalismequi la préoccupe le plus, c�est l�idée (as-sociée à Will Kymlicka) que, la garantiedes droits individuels de leurs membresne suffisant pas à protéger les cultures oumodes de vie des minorités, celles-ci de-vraient l�être de surcroît par des droits ouprivilèges spéciaux aux groupes. Citons àtitre d�exemples la décision prise par legouvernement français dans les années 80d�étendre la notion normale de �conjoint�pour permettre à des hommes immigrésde faire venir leurs nombreuses épousesdans le pays; ou la reconnaissance du droit

coutumier (religieux) dans des payscomme l�Inde, où l�on a tellement redoutéles retombées politiques que pourrait avoirl�application d�une législation identiqueaux musulmans et aux hindous qu�on alaissé les autorités religieuses contrôler denombreux secteurs du droit de la famille.

Dans ces cas, la sensibilité aux différencesethniques ou religieuses a amené à modi-fier des règles et des règlements qui, si-non, auraient été d�application universelle.Dans beaucoup de cas, les exemptionspermettent une plus grande inégalité en-tre femmes et hommes.

Egaliser le pouvoir des femmesNi les cultures ni les principes ne devraientêtre considérés comme statiques et, si nousdevons inlassablement affirmer la valeurde l�équité, y compris de l�égalité sexuelle,nous devons reconnaître que cela laisseune large place à l�interprétation et dé-bouche souvent sur des revendicationségalitaires antagoniques. Ce qu�il faut sou-ligner ici, c�est l�importance du dialoguedans l�établissement des principes de lajustice sexuelle et l�importance de la �pré-sence politique� lorsqu�il s�agit de résou-dre les tensions entre la justice sexuelle etles droits multiculturels. Là où les fem-mes sont exclues des assemblées et desinstances de prise de décision (ou y sontsimplement très insuffisamment représen-tées)�et cela vaut a fortiori pour toute�communauté� ou �culture��l�univer-salisme présumé des principes édictés estsujet à caution.

Anne Phillips est professeur de théorieféministe et directrice du Gender Institutede la London School of Economics. Cetarticle est tiré d�une étude qu�elle arédigée pour l�atelier de l�UNRISD,�Justice, développement et droits pourles femmes: Comment donner un fonde-ment à leurs droits dans un environnementdéfavorable� (voir l�article page 16).

Références� Will Kymlicka, Multicultural Citizenship,

Oxford University Press, 1995.� Susan Moller Okin, �Feminism and

multiculturalism: Some tensions�,Ethics, 108(4), pp. 661�684.

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L�ESSENTIEL

Lorsque l�Afrique du Sud est devenueun Etat démocratique en 1994, l�idée

d�élections et de citoyens, acteurs de cesélections, était étrangère à la plupart deceux et celles qui y ont participé. L�idéed�électorats que les partis politiquesauraient pu gagner par leur position surdes questions politiques concrètes l�étaittout autant. Lors des deux élections (cel-les de 1994 et de 1999), la contributiondes organisations féminines au débat élec-toral a essentiellement consisté à plaiderpour que les femmes soient plus nombreu-ses à accéder aux fonctions électives etpour que les �préoccupations des femmes�soient plus présentes dans le débat politi-que national. Lors des élections de 1999,cependant, le débat sur la représentationet la participation électorale a porté moinssur le nombre que sur la nature ou la qua-lité de la représentation et les questionsde responsabilité. Cette évolution est lesigne que les femmes ont mûri dans leurpolitique électorale et sont en train de for-mer un électorat propre.

Action féministe collective:des électorats souhaitablesBien que les femmes aient lutté collecti-vement contre l�apartheid, ni les organi-sations féminines ni les écrivains féministesd�Afrique du Sud n�ont prétendu que lesfemmes constituaient un électorat politi-que homogène. Au contraire, la notion dedifférence a tenu une place centrale dansle discours des femmes politiques des an-nées 90: différences de race, d�âge, de lieuet d�ethnie. Les angles sous lesquels lesfemmes peuvent être considérées commeun groupe cohérent pour des besoins po-litiques et électoraux font cependant l�objetd�un vaste débat parmi les féministes.

Le fait de réclamer une plus large repré-sentation, au sens le plus général, ne préjugepas de la manière dont les représentantess�attaqueront aux inégalités sexuelles lors-qu�elles siégeront à l�assemblée législative.Il s�agit davantage d�accéder aux instan-

ces publiques de prise de décisions afinque les intérêts divers des femmes puis-sent être débattus et faire l�objet de déci-sions. Sans une large représentation, il y aen effet peu de chances que la complexitédes inégalités entre hommes et femmespuisse être pleinement prise en comptedans l�élaboration des politiques. Le vastedébat suscité par les quotas de 1994 a eule grand mérite d�amener la plupart despartis politiques d�Afrique du Sud à ad-mettre publiquement la nécessité d�uneplus large représentation des femmes.

Divers arguments (justice, différences devaleurs et d�intérêts) militent en faveur demécanismes positifs qui accroissent la re-présentation politique des femmes commegroupe. Tous reposent sur l�idée que laprésence des femmes dans les assembléeslégislatives en nombre proportionnel estune condition nécessaire, mais non suffi-sante, de la sensibilisation aux inégalitésentre hommes et femmes. A un niveauplus général et pragmatique, l�argumentrevient à dire que plus les femmes sontnombreuses en politique, plus on a dechances de voir soulever les questions desinégalités entre hommes et femmes etprendre des mesures politiques pour lescorriger. C�est en effet la stratégie du �tirdispersé�; on admet que la simple pré-sence de femmes ne garantit pas forcé-ment la représentation des intérêtsféminins mais on estime qu�elle augmenteles chances de voir les politiques s�atta-quer à ces inégalités. Certaines des éluesn�auront peut-être ni les moyens ni l�en-vie de lutter contre les inégalités entrehommes et femmes, mais l�effet cumula-tif de leur présence finira par se faire sen-tir au parlement.

Les militantes féministes sud-africaines sesont servies de la disposition constitution-nelle qui consacre officiellement l�égalitépour ériger en problème la représentationinsuffisante des femmes au parlement.Cependant, les féministes ne sont pas

d�accord entre elles sur les moyens de cor-riger cet état de choses et sont très divi-sées sur l�usage des quotas. L�argumentgraduel (la représentation des femmess�améliorera à mesure qu�elles acquerrontleur autonomie sociale et économique) estamplement développé par le Parti démo-crate (DP) mais également repris par leNouveau parti national (NNP) et le Partide la liberté Inkatha. Les militantes del�ANC ont fait valoir la nécessité d�inter-venir pour corriger le préjugé systémati-que et institutionnel à l�encontre desfemmes comme acteurs politiques. LaLigue des femmes de l�ANC a exigé l�adop-tion d�un quota pour les femmes sur leslistes électorales du parti et a obtenu gainde cause. Nombreuses sont les femmes quiont pu accéder au parlement grâce auquota de 30 pour cent adopté par l�ANCpour les élections de 1994 et de 1999.

Représentation: résultats des électionsL�expérience a montré que la proportiondes femmes élues était étroitement liée ausystème électoral en vigueur. Celui qui aété appliqué lors des élections de 1994 etde 1999 a été celui de la représentationproportionnelle avec listes de parti. L�in-térêt principal de ce système est de per-mettre à des chefs de parti progressistesde vaincre la réticence traditionnelle à éliredes femmes. Ce système a favorisé l�usagede quotas pour assurer la représentationdes femmes au parlement, bien que seull�ANC ait fixé des quotas lors des deux élec-tions. Néanmoins, de l�avis général, il ainfluencé d�autres partis politiques et a eupour effet de faire élire les femmes en as-sez grand nombre lors des élections légis-latives de 1994. Les résultats ont étéanalogues lors des élections de 1999, etmême supérieurs grâce à la forte majo-rité de voix remportées par l�ANC. Lepourcentage élevé des femmes siégeant auparlement sud-africain la place au sep-tième rang mondial pour la représenta-tion féminine. Ce degré de représentationa eu des effets très sensibles sur l�impor-

Pour que la représentation électorale compte:Le renforcement des électorats féminins en Afrique en Sud

Shireen Hassim

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L�ESSENTIEL

tance accordée aux questions d�inégalitésentre les sexes pendant la première légis-lature démocratique. Celle-ci a par exem-ple à son actif trois lois ambitieuses maistrès controversées.

Constitution d�un électorat�politique interneSi elles ont réussi à faire de la représenta-tion des femmes une préoccupation com-mune à plusieurs partis, les organisationsféminines ont aussi amené la majorité despartis politiques à se prononcer pour l�éga-lité des sexes dans leurs manifestes élec-toraux. Ces engagements étaient cependantrhétoriques pour la plupart, car ils n�en-traient guère dans le détail de l�actionpolitique à mener. La réaction des orga-nisations féminines a été d�exiger davan-tage des partis lors des rassemblementspublics et de réclamer un programme po-litique plus détaillé. L�attitude qu�elles ontadoptée dans le débat sur l�opportunitéd�offrir un traitement contre le VIH/SIDAaux rescapées de viols est exemplaire àcet égard.

Les campagnes nationales visaient à amélio-rer la représentation féminine et à amenerles électrices à prendre en considération,dans leur vote, la position des partis surles questions d�inégalités entre les sexes.Comme on pouvait s�y attendre, le soucisoudain de la qualité de la représentationféminine et de la responsabilité devantleurs intérêts a amené les femmes despartis politiques à entrer en lice sur l�ac-tion politique à mener. Bien que les mili-tantes de tous les partis aient été unies surla nécessité de maintenir la pression pourobtenir une meilleure représentation po-litique, on prenait bien soin, dans les ins-tances féminines, de réaffirmer les limitesdes intérêts communs. Sous l�action col-lective couvaient le mécontentement, sus-cité par le pouvoir relatif dont jouissaientcertaines organisations féminines par rap-port à d�autres, et la méfiance à l�égardde certains partis politiques, soupçonnésde ne pas être prêts à épouser les causesdu mouvement féminin. Au parlement, lestensions entre le DP, l�ANC et le NNP onteu raison des tentatives faites initialementpour donner aux femmes parlementaires

une tribune multipartite telle que leGroupe des femmes parlementaires.

Les femmes ne constituent pas un électo-rat homogène. Même là où les femmesparlementaires souscrivent aux grandsprincipes de l�égalité sexuelle, les défini-tions qu�elles en donnent, leurs stratégiespour parvenir à l�égalité et les femmesqu�elles représentent peuvent être extrê-mement différentes. Il est révélateur quel�âme de la réforme législative destinée àsupprimer les discriminations fondées surle sexe ait été le comité électoral des fem-mes de l�ANC et non pas l�instancemultipartite où le poids accordé à l�éga-lité entre les sexes différait manifestementselon les partis politiques. Une adhésiongénérale à l�égalité des sexes ne peut pasvenir à bout des divergences idéologiquesentre partis.

Aux élections de 1999, les organisationsféminines ont été beaucoup plus scepti-ques quant à la capacité des femmes par-lementaires de représenter les intérêts deleurs consoeurs plutôt que leur parti oumême leurs intérêts politiques personnels.La question de la responsabilité s�est poséeavec force dans de nombreuses réunionsélectorales. Bien que la responsabilité resteune notion vague dans la politique fémi-nine (responsabilité devant leur parti?devant les femmes du parti? devant tou-tes les femmes?), le débat sud-africain aporté sur des aspects à la fois formels dela responsabilité (devant les partis politi-ques) et moraux (loyauté envers la causede l�égalité des sexes). Dans les deux cas,le regroupement des électorats fémininsest d�une importance vitale.

Pour garantir la responsabilité publiquedes élues, les femmes des partis politiquesdoivent améliorer sensiblement leur or-ganisation, pour que les femmes parle-mentaires fassent oeuvre utile dans ledomaine législatif et soient tenues par desmécanismes internes à rendre compte auxautres femmes du parti et pas seulementà ses dirigeants. Sans section féminineactive dans les partis, les femmes parle-mentaires peuvent être laissées à la dé-rive, sans orientation politique précise sur

l�action à mener. La première tâche desfemmes parlementaires devrait être dedéfinir les domaines où une interventionau niveau de la législation s�impose, desoutenir les femmes de leur parti et de leurfaire rapport: de représenter un électorat,et non pas de le constituer. L�inaptitude àdistinguer ces tâches l�une de l�autre a créédes tensions entre les femmes des partispolitiques et les organisations féminines dela société civile.

Le mouvement féminin attend aussi desélues une responsabilité morale. Les pre-mières femmes parlementaires étaient trèsconscientes de cette responsabilité, leurélection étant présentée comme le fruit deluttes collectives. Bien que la tâche depionnières ne soit guère aisée, nombred�entre elles se sont données beaucoup depeine pour consulter la société civile, luitransmettre des informations et élaborerdes stratégies avec elle. Cependant, avecla démobilisation relative du mouvementféminin depuis 1994, les listes de particompteront moins de femmes associéesétroitement et de longue date aux organi-sations féminines. Sans une pression mo-rale et politique extérieure au parlement,il y a toujours le risque que les femmesparlementaires soient incapables de repré-senter de manière satisfaisante les diversintérêts des femmes (ou soient de plus enplus réticentes à le faire).

Shireen Hassim est chargée de cours

en études politiques à l�Université de

Witwatersrand. Elle est membre du

Groupe de référence pour les questions

de parité et les élections, coordonné par

l�Institut électoral d�Afrique du Sud, et

membre du conseil d�administration

de Women�sNet (http://www.womensnet.

org.za), site pour les femmes. Cet article

est tiré d�une étude qu�elle a rédigée pour

l�atelier de l�UNRISD, Justice, développe-

ment et droits pour les femmes: comment

donner un fondement à leurs droits dans

un environnement défavorable (voir

l�article de la page 16).

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printemps/été 200012UNRISD Infos No. 22

A LIRE: LIVRES

Lima megaciudad:Democracia, desarrollo

y descentralizaciónen sectores populares

Jaime Joseph

Table des matières: Introduction � Lima: Grandeville, gros problème � Gouverner la ville: Modali-tés, blocages et défis � Pauvreté, ajustement struc-turel et réaction de la base � Les organisations debase urbaines en période de néolibéralisme, de crisepolitique et de terrorisme � Considérations finales� Résumés des études de cas: De nouveaux défispour les femmes et leurs efforts visibles pour amé-liorer l�habitat urbain: Le cas du cône nord�J.Huamán, G. Cubas et P. Mora � La Fédérationdes organisations communautaires locales (de lazone) et ses liens avec les autorités locales du côneest�J. Calderón � L�établissement de réseauxcommerciaux et d�une infrastructure de base: L�ex-périence du Front unifié des détaillants de Villa ElSalvador, cône sud�E. Ballón � Les organisa-tions de la base dans le centre historique de Lima:Formes d�organisation et de participation à la ges-tion urbaine�F. Arnillas

Jaime Joseph est coordinateur de l�Escuela deLíderes del Cono Norte-Lima, centre de forma-tion novateur d�Alternativa pour responsables decollectivités. Il a coordonné les recherches me-nées à Lima pour le projet de l�UNRISD et desVolontaires des Nations Unies (VNU), Action bé-névole et démocratie locale: Partenariat pour unmeilleur avenir en ville.

Lima megaciudad est copublié avec Alternativaet les VNU. Broché, 252 pages, 1999, s�adresserà Alternativa pour en connaître le prix.

Les commandes sont à adresser à: Alternativa,Jr. Emeterio Pérez 348, Urbanización Ingeniería,San Martín de Porres, Lima 31, Pérou; tél. (51 1)4815801; fax (51 1) 4816826; courrier électro-nique: [email protected]; Web: http://www.alter.org.pe

[email protected]:Globalización y

derechos humanospublié sous la direction de Cynthia

Hewitt de Alcántara et d�Alberto Minujin

Table des matières: Introduction�CynthiaHewitt de Alcántara et Alberto Minujin � Mon-dialisation et politique des droits�Yash Ghai �La mondialisation: Fait et fiction�Aldo Ferrer �Développement et mondialisation: Les défis pourl�Amérique latine�Alberto Minujin et OsvaldoSunkel � La réévaluation de l�aide extérieure:Conséquences à en tirer pour une citoyenneté so-ciale dans une économie mondiale�E.V.K.FitzGerald � L�avenir de la citoyenneté à l�èrepost-westphalienne�Björn Hettne � Le déclinde la citoyenneté à l�heure de la mondialisation�Richard Falk � L�intégration mondiale sanséquité: Notes inspirées par l�expérience latino-américaine�Rolando Cordera Campos � Lesenfants et leurs droits: Facteur de changement�Marta Mauras, Alberto Minujin et Raquel Perczek� La mondialisation, les enfants et autres mino-rités�Karl Eric Knutsson et Pauline O�Dea

Cynthia Hewitt de Alcántara est directrice adjointede l�UNRISD. Alberto Minujin est le principal spé-cialiste de l�analyse des politiques à la Divisiondes politiques, de la planification et de l�évalua-tion de l�UNICEF.

[email protected] est copublié avec l�UNICEFet l�Editorial Santillana. Broché, ISBN (UNICEF)92-806-3479-8, ISBN 958-24-0383-7, 374pages, 1999, 39.000 pesos colombiens.

Les commandes sont à adresser à: Editorial San-tillana, Calle 80 No. 10-23, Santafé de Bogatá,Colombie; tél. (571) 6357255; courrier électroni-que: [email protected]

Social Developmentand Public Policy:A Study of Some

Successful Experiencespublié sous la direction de Dharam Ghai

Table des matières: Développement social et poli-tique publique: Leçons de quelques expériencesheureuses�Dharam Ghai � Le développementhumain dans un Etat de l�Inde: Ce qui a été réa-lisé au Kerala�V.K. Ramachandran � Le déve-loppement social et les changements apportés parla Chine à sa stratégie de développement�CarlRiskin � Acquis et problèmes sociaux au SriLanka�Godfrey Gunatilleke � Développementsocial, capacité de l�Etat et réforme économique:L�expérience du Viet Nam�Valentine M. Moghadam� La protection des acquis sociaux à Cuba pen-dant la crise économique�Solon Barraclough �Lancer et soutenir le développement social avecpeu de moyens: L�expérience du Costa Rica�Carmelo Mesa-Lago � Politiques sociales entreciblage et universalisme: L�expérience chilienne�Jaime Ruiz-Tagle

Dharam Ghai a été directeur de l�UNRISD de1987 to 1997. Il est aujourd�hui conseiller auprèsde l�Institut international d�études sociales del�Organisation internationale du travail.

Social Development and Public Policy est copubliéavec Macmillan. Broché, ISBN 0-333-77912-6,379 pages, 2000, £25. Relié, ISBN 0-333-73411-4,379 pages, 2000, £70.

Les commandes sont à adresser à: Macmillan Dis-tribution Limited, Brunel Road, Houndmills,Basingstoke, Hampshire RG21 6XS, Royaume-Uni; tél. (44 1256) 302699; fax (44 1256) 64733;courrier électronique: [email protected]

Pour commander aux Etats-Unis, s�adresser à:St. Martin�s Press Inc., Scholarly Reference Divi-sion, 175 Fifth Avenue, New York, NY, 10010.

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printemps/été 2000UNRISD Infos No. 22 13

A LIRE: LIVRES

Renewing Social andEconomic Progressin Africa: Essays in

Memory of Philip Ndegwapublié sous la direction de Dharam Ghai

Table des matières: Le développement africain,rétrospective et perspective�Dharam Ghai �Situation sanitaire et politique de la santé enAfrique subsaharienne: Perspective à long terme�Giovanni Andrea Cornia et Germano Mwabu �Urbanisation, chômage et migrations en Afrique:Théorie et pratique�Michael P. Todaro � Pau-vreté, emploi et secteur informel: Quelques ré-flexions sur la mission de l�OIT au Kenya�HansW. Singer et Richard Jolly � Guerres civiles enAfrique subsaharienne: Les coûts économiques etsociaux�Frances Stewart � La modification del�environnement et sa dynamique sociale en Afrique�Dharam Ghai � Environnement et développe-ment durable en Afrique�Maurice Strong �Démocratisation, équité et stabilité: Politique etsociétés africaines des années 90�Yusuf Bangura� L�Afrique dans un monde d�interdépendance:Un partenariat inspiré et à principes�DunstanWai � Organiser la réforme économique en Afrique�Edgar O. Edwards assisté de Wilson Kinyua �Les voies du régionalisme: Survie, sécurité et effica-cité�Reginald Herbold Green � L�Afrique dansl�économie mondiale�Gerald K. Helleiner �Annexe: Philip Ndegwa: Portrait biographique

Dharam Ghai a été directeur de l�UNRISD de 1987à 1997. Il est aujourd�hui conseiller auprès del�Institut international d�études sociales de l�Or-ganisation internationale du travail.

Renewing Social and Economic Progress inAfrica est copublié avec Macmillan. Broché,ISBN 0-333-77911-8, 334 pages, 2000, £25.Relié, ISBN 0-333-73412-4, 2000, £70.

Les commandes sont à adresser à: Macmillan,voir les informations données à la page 12.

Gendered Povertyand Well-being

publié sous la directionde Shahra Razavi

Table des matières: La pauvreté et le bien-êtreselon le sexe: Introduction�Shahra Razavi �Ressources, action et réalisations: Réflexions surla façon de mesurer l�autonomisation des fem-mes�Naila Kabeer � La sensibilité des indica-teurs de bien-être aux différences entre hommeset femmes�Ruhi Saith et Barbara Harriss-White� La pauvreté dans les pays en transition: Criti-que ethnographique des enquêtes réalisées auprèsdes ménages dans l�Asie centrale post-soviéti-que�Deni Kandiyoti � La pauvreté selon le sexe:Etude de six bilans de pauvreté établis par laBanque mondiale en Afrique�Ann Whitehead etMatthew Lockwood � Repenser la dimension fé-minine de la pauvreté et du travail�Cecile Jack-son et Richard Palmer-Jones � Les femmesdémographiquement défavorisées en Inde, 1981�1991: Avortements sélectifs et infanticides prati-qués sur les enfants de sexe féminin�S. Sudhaet S. Irudaya Rajan � Le préjugé sexuel en Chine,en Corée du Sud et en Inde, 1920�1990: Effetsde la guerre, de la famine et de la baisse de lafécondité�Monica Das Gupta et Li Shuzhuo �Emplois pour le marché de l�exportation, pau-vreté et parité: Des chiffres contestés�ShahraRazavi � Comment réduire la pauvreté féminine:Chances et défis�Gita Sen

Shahra Razavi est chef de projet à l�UNRISD. Cetexte a été publié initialement comme numérospécial de Development and Change, Vol. 30, No. 3.

Gendered Poverty and Well-being est copubliéavec Blackwell. Broché, ISBN 0-631-21793-2,291 pages, 2000, £14.99.

Les commandes sont à adresser à: BlackwellPublishers Ltd., 108 Cowley Road, Oxford OX4 1JF,Royaume-Uni; tél. (44 1865) 791100; fax (44 1865)791347; Web http://www.blackwellpublishers.co.uk

Visible Hands:Taking Responsibility

for Social DevelopmentAn UNRISD Report for Geneva 2000

Table des matières: Une mondialisation à mas-que humain � Qui paie? Le financement du dé-veloppement social � Fragiles démocraties � Unenouvelle mission pour le secteur public � Les en-treprises appelées à rendre des comptes � Socié-tés civiles � Le droit au développement pour lesfemmes � Pour un développement durable

Pour de plus amples informations sur cet ouvrage,voir page 15.

COMMENT COMMANDER LESPUBLICATIONS DE L�UNRISDPour commander des copublica-tions: S�adresser à l�éditeur.

Pour commander des publicationsmaison: S�adresser au Centre deréférence de l�UNRISD, Palais desNations, 1211 Genève 10, Suisse.Tél: (41 22) 9173020Fax: (41 22) 9170650Courrier électronique: [email protected]: http://www.unrisd.org (cli-quer sur Publications/Catalogue despublications).

Modalités de paiement pour les pu-blications maison: Par un chèque li-bellé en dollars EU et tiré sur unebanque américaine ou par un vire-ment bancaire en dollars EU ou d�unmontant équivalent en francs suisses.

Nous n�acceptons pas les paiementspar carte de crédit.

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printemps/été 200014UNRISD Infos No. 22

A LIRE: PAPIERS

* Documents spéciaux pour Geneva 2000� OPG 1 Civil Society, NGDOs and Social Development:

Changing the Rules of the Game, Alan Fowler,janvier 2000

� OPG 2 Business Responsibility for SustainableDevelopment, Peter Utting, janvier 2000

� OPG 3 Public Sector Restructuring: The Institutionaland Social Effects of Fiscal, Managerial and Capacity-Building Reforms, Yusuf Bangura, février 2000

� OPG 4 Women in Contemporary Democratization,Shahra Razavi, février 2000

� OPG 5 Globalization and Social Policy: The Threatto Equitable Welfare, Bob Deacon, mars 2000

� OPG 6 Promoting Sustainable Human Developmentin Cities of the South: A Southeast Asian Perspective,Adrian Atkinson, mai 2000

� OPG 7 The Political Economy of Pension Reform:Latin America in Comparative Perspective,Evelyne Huber et John D. Stephens, mai 2000

� OPG 8 Reproductive and Sexual Rights: Chartingthe Course of Transnational Women�s NGOs,Rosalind P. Petchesky, juin 2000

� OPG 9 Global Economic Trends and SocialDevelopment, Ajit Singh, juin 2000

� OPG 10 Globalization and Social Developmentafter Copenhagen: Premises, Promises and Policies,Thandika Mkandawire et Virginia Rodríguez, juin 2000

n Comptes rendus de conférences� Perspectives on Social Development Research at

the Millennium, Report of the UNRISD InternationalConference, Rayong, Thailande, 26�28 mai 1999

� The Role of Civil Society in Policy Formulation andService Provision, Report of the UNRISD Geneva2000 Seminar, New York, 31 mars 2000

� Gender Justice, Development and Rights:Substantiating Rights in a Disabling Environment,Report of the UNRISD Women 2000 Workshop,New York, 3 juin 2000

* Documents de programmeEntre décembre 1987 et avril 2000, les documents de tra-vail de l�UNRISD ont été publiés sous la forme de Discus-sion Papers. Au début de l�an 2000, les DiscussionPapers�ces publications vertes bien connues!�ont été rem-placés par cinq nouvelles séries de �documents de pro-gramme�, qui correspondent à la réorganisation desrecherches de l�Institut en cinq programmes. Une sixièmeest prévue pour les documents traitant des préoccupations

constantes de l�UNRISD. Ces nouvelles publications de-vraient faciliter la diffusion auprès de publics spécifiques etresserrer les liens avec les universitaires qui constituent lelectorat traditionnel de l�Institut. UNRISD 2000+ A Visionfor the Future of the Institute, qui expose les nouveauxchamps de recherche par rapport à la fois aux travaux pas-sés de l�UNRISD et de l�utilité qu�ils pourraient présenter àl�avenir pour les Nations Unies et les milieux internationauxde la recherche, est paru. On peut se le procurer gratuite-ment en s�adressant à l�UNRISD.

* Documents du programmePolitique sociale et développement

� PP SPD 1 External Dependency and InternalTransformation: Argentina Confronts the LongDebt Crisis, Jorge Schvarzer, mai 2000

� PP SPD 2 Social Indicators and WelfareMonitoring, Gøsta Esping-Andersen, mai 2000

� PP SPD 3 Empirical Inquiries and the Assessmentof Social Progress in Western Europe: A HistoricalPerspective, Jean-Michel Collette, juin 2000

* Document du programmeSociété civile et mouvements sociaux

� PP CSSM 1 Trade Unions and NGOs: A NecessaryPartnership for Social Development, Dan Gallin,juin 2000

* Document du programmeDémocratie, gouvernance et droits de l�homme

� PP DGHR 1 Pay and Employment Reform in Develop-ing and Transition Societies, Willy McCourt, juillet 2000

* Discussion Paper� DP 117 Recent Changes in Social Conditions of

Countries in Transition: Eastern Europe, the BalticStates and the Commonwealth of Independent States,Wolf Scott, avril 2000

* Document spécial sur les questions de genre� OPB 12 Gender and the Expansion of Non-Traditional

Export Crops in Uganda, Deborah Kasente, MatthewLockwood, Jessica Vivian et Ann Whitehead, mai 2000

* $5 par copie pour les lecteurs du Nord; $2.50 par copiepour les lecteurs du Sud.

n Gratuit.

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printemps/été 2000UNRISD Infos No. 22 15

INTERNE: CONFERENCES, SEMINAIRES ET ATELIERS DE TRAVAIL

Il y a cinq ans, l�Institut rédigeait un rap-port pour le Sommet mondial pour le déve-

loppement social de Copenhague. IntituléEtat de désarroi: Les répercussions socialesde la mondialisation, il a été, depuis, traduiten sept langues et a servi de base de discus-sion dans de nombreux pays du monde.Pour le cinquième anniversaire du Sommetsocial, l�Institut a publié une suite, VisibleHands: Taking Responsibility for SocialDevelopment (à paraître au printemps 2001sous le titre Mains visibles: Assumer la res-ponsabilité du développement social).

L�événement: Ce nouveau rapport a été pré-senté lors d�une conférence qui a coïncidéavec la session extraordinaire de l�Assem-blée générale des Nations Unies et Geneva2000. Jomo K.S. a donné le ton à la séancede la matinée en analysant les grandes ten-dances de la mondialisation, ainsi que l�évo-lution de l�inégalité des revenus et despolitiques sociales au cours de la décenniepassée, et a accordé une attention particu-

Mains visibles: Assumerla responsabilité dudéveloppement social29 juin 2000, Genève

lière à la montée du capitalisme financier(voir pages 5�6). Puis il a été question de lamondialisation et de la politique sociale,ainsi que de la réglementation des grandesentreprises. A l�ouverture de la séance del�après-midi, Rodolfo Stavenhagen a re-gretté qu�à l�aube du troisième millénaireon ait si peu appris du passé. Il a vivementincité la communauté internationale à fairepression pour que la personne soit placéeau centre des solutions choisies et des pré-occupations des Etats et a traité de manièregénérale des besoins, des droits et du déve-loppement social (voir pages 1�4). Ont suivides discussions sur la démocratisation et laréforme du secteur public, ainsi que sur la�réalisation du droit au développementpour les femmes�.

Le rapport: Le Sommet social étant encoretrès récent, il est peut-être irréaliste d�es-compter de grands progrès dans la réalisa-tion des objectifs fixés à Copenhague. Maison devrait du moins s�apercevoir à certainssignes que les changements de politique etles réformes institutionnelles rendent lesconditions plus favorables au développe-ment social. En huit chapitres, VisibleHands dresse le bilan de ce qui a été ac-compli sur des terrains aussi divers que la

politique macro-économique, la démocra-tie et l�égalité entre les sexes. Le rapportrecense aussi nombre de conditions qui frei-nent le progrès.Le panorama qui se dégageest assez troublant: d�une part, des initiati-ves qui se placent davantage au niveau dudiscours que de la pratique et, de l�autre,des modes de croissance économique, unelibéralisation et des inégalités qui continuentd�entraver le développement social plusqu�ils ne le favorisent. Néanmoins, le cli-mat idéologique est plus propice à une re-mise à plat de la politique de développementqu�il ne l�a été pendant des années. L�in-sensibilité de l�ajustement structurel à ladimension sociale suscite une oppositionpolitique de plus en plus forte tandis queles recherches universitaires ont fragilisé lesocle théorique et empirique du modèlenéolibéral dominant. Les droits de l�hommesont très présents dans les esprits.

Comme l�indique le titre, Visible Hands estun plaidoyer en faveur des valeurs humai-nes, de priorités et d�actions humaines. Lamain invisible du marché est incapabled�imaginer ou de construire une société oùtous puissent vivre décemment. Seuls desgouvernements et des personnes soucieu-ses du bien public en sont capables.

Visible Hands, broché, ISBN 92-9085-032-9, 173 pages, 2000, $25. Commande à adresser à: UNRISD (voir page 13). Versions française etespagnole à paraître au printemps 2001.

Table des matières CHAPITRE 6 � Sociétés civiles� Société civile et prestation de services� Précaires partenariats� Partenariats entre OSC et autorités locales� Société civile et sensibilisation sur la

scène internationale� Intelligence, énergie et droits

CHAPITRE 7 � Le droit au développementpour les femmes

� Les femmes dans la démocratisation� Réalisation des droits des femmes� Les droits en matière de santé génésique� Les droits des femmes en matière

d�éducation� Les droits économiques des femmes� Une contre-alliance pour les femmes

CHAPITRE 8 � Pour un développementdurable

� Des villes vivables� Une agriculture viable� Des réserves d�eau durables� Conservation des forêts� Des réalités tenaces� Continuité ou changement?

CHAPITRE 3 � Fragiles démocraties� Le dilemme du gouvernement� Transitions incomplètes� Le progrès des partis politiques� Système présidentiel ou

parlementaire?� La démocratie, moyen ou fin?� L�option démocratique� La montée des technocrates� Ethnicité et démocratisation� Systèmes électoraux et diversité

ethnique� Le processus démocratique

CHAPITRE 4 � Une nouvelle mission pourle secteur public

� Les Etats contraints à la réforme� Stabilité budgétaire� Un rigoureux management� Renforcement des capacités� L�avenir de la réforme du secteur public

CHAPITRE 5 � Les entreprises appeléesà rendre des comptes

� De l�affrontement au partenariat� Motivation des entreprises� Des progrès très ponctuels� D�autres options que l�affrontement� Tendance à l�assouplissement

CHAPITRE 1 � Une mondialisation àmasque humain

� Du développement à l�ajustement� Le Sommet social� Mondialisation et croissance économique� Des tendances défavorables en

matière d�emploi� Pauvreté et inégalité� Causes de l�échec� Regards nouveaux sur la croissance et

le développement social� Une mondialisation à masque humain

CHAPITRE 2 � Qui paie? Le financementdu développement social

� L�allégement de la dette pour les paysles plus pauvres

� L�allégement de la dette pour les paysà revenu intermédiaire

� Un nouveau départ pour la dette� L�aide au développement� Réforme fiscale� Réforme des pensions� La mobilisation des ressources à la base� Bilan

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printemps/été 200016UNRISD Infos No. 22

INTERNE: CONFERENCES, SEMINAIRES ET ATELIERS DE TRAVAIL

L�UNRISD a organisé cet atelier pu-blic d�une journée à l�occasion de

la session extraordinaire de l�Assembléegénérale des Nations Unies consacrée àl�évaluation de Beijing+5, �Les femmesen l�an 2000: Egalité entre les sexes, dé-veloppement et paix pour le 21ème Siè-cle�. L�atelier faisait partie d�un projetde recherche d�une année qui consiste àévaluer en quoi les débats contempo-rains sur les droits et la démocratie ontrenforcé les luttes des femmes pour uneplus grande justice sexuelle. Une séried�études avait été commandée et huitont été présentées et discutées à l�atelier.

L�atelier de l�Institut a examiné trois di-mensions d�un développement �fondésur les droits�: le rapport entre besoinset droits, la question de savoir si la dé-mocratie a contribué à l�autonomie desfemmes et les droits des femmes et lemulticulturalisme.

Réconcilier besoins et droitsDans bien des pays, la proclamation of-ficielle des droits n�a pas été suivie d�uneamélioration de la qualité de la vie pourla majorité. Les années 90 ont été ja-lonnées de crises financières et le fossés�est creusé entre pays et peuples richeset pauvres. Le consensus mondial sur lerôle de l�Etat comme dispensateur deprotection sociale a volé en éclats. Lesservices publics ont été réduits et la pres-tation en a été confiée à des intérêts com-merciaux, des organismes caritatifs, desONG et aux familles.

Une étude sur le Chili, présentée à l�ate-lier, a analysé le transfert à la société civilede la gestion des projets de protection so-ciale et de développement. D�une part, cetransfert est associé à une remise à l�hon-neur des approches participatives, quidonnent la possibilité aux laissés-pour-compte d�intervenir dans la planificationdu développement et la prise de décision.

D�autre part, il risque de mettre encoreplus les femmes à contribution pour dis-penser des soins gratuitement ou à peu defrais dans les ONG où elles sont employées,leurs familles et leurs collectivités.

Des participant(e)s de différentes régionsont constaté avec inquiétude qu�en gé-néral l�accès aux droits politiques s�étaitfait aux dépens des droits sociaux. Plu-sieurs conférencières et participantes sesont même demandées dans quelle me-sure on pouvait jouir de ses droits poli-tiques lorsque les dispositions socialesétaient insuffisantes.

Une étude sur le peu d�éducation don-née aux filles en Inde a abouti au rai-sonnement suivant: si l�Etat reconnaîtun droit de principe, il est égalementtenu d�adopter des politiques pour engarantir la réalisation universelle. Ensuivant l�évolution et en insistant pourque l�Etat remplisse sa mission, les or-ganisations de la société civile sont sou-vent utiles mais ne peuvent pas sesubstituer à lui.

L�une des animatrices du débat a exa-miné l�affirmation selon laquelle la pour-suite des droits se fait aux dépens de lasatisfaction des besoins. Il peut être utilede voir dans les droits la codification debesoins, de les reformuler sous forme derègles d�éthique et de droit, ce qui im-plique de la part de ceux qui sont aupouvoir le devoir de fournir tous lesmoyens nécessaires pour que les besoinssoient satisfaits. En d�autres termes, lelangage des droits permet à des indivi-dus ou à des groupes sociaux de formu-ler officiellement des revendications pourdéfendre leurs besoins.

Les femmes dans le processuscontemporain de démocratisationLes droits, de quelque nature qu�ilssoient, dépendent des conditions politi-

ques et l�on pourrait dire que, sans droitspolitiques et civils, on n�a nullement lagarantie que d�autres droits puissent seréaliser, même s�ils sont consacrés parla législation ou la constitution. Les pro-grammes d�action fondés sur les droitsachoppent principalement à l�impuis-sance à rendre les gouvernements comp-tables et responsables devant lescitoyens, et ces droits et pouvoirs sontnormalement associés à la démocratie.

Sur le plan de la représentation politi-que, les femmes ont beaucoup avancédans les années 90, mais il faut dire queleur point de départ était extrêmementmodeste. Dans de nombreux pays, lesorganisations féminines et les femmesmembres de partis politiques n�ont pasménagé leurs efforts pour accroître lareprésentation féminine, notammentgrâce aux quotas. Cette insistance surla représentation numérique (�faire en-trer des femmes�) pose naturellementbien d�autres questions. Ces �représen-tantes� sont-elles comptables devantleurs électrices? Réussissent-elles à faireévoluer la situation dans le sens d�uneplus grande égalité entre les sexes?

L�exposé sur l�Iran a porté sur les mou-vements féminins en période de chan-gement de régime. Dans les sociétéscontemporaines, les femmes sont acti-ves dans de nombreux domaines de lavie politique, notamment dans des or-ganisations de base et des institutionsofficielles. S�ils veulent grossir leurs rangset gagner en dynamisme, les mouve-ments militant pour plus de démocratiedoivent tenir compte des besoins et despréoccupations des femmes. En Afriquedu Sud, elles ont réussi à accroître leurreprésentation en militant au sein del�ANC, grâce à la sensibilité de la direc-tion du parti à leurs préoccupations etau soutien d�un mouvement fémininactif. Et si certaines élues n�ont ni les

Justice, développement et droits pour les femmes: Comment donnerun fondement à leurs droits dans un environnement défavorable

3 juin 2000, New York

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printemps/été 2000UNRISD Infos No. 22 17

INTERNE: CONFERENCES, SEMINAIRES ET ATELIERS DE TRAVAIL

moyens ni l�envie de lutter contre lesinégalités entre hommes et femmes, l�ef-fet cumulatif de leur présence finit parse faire sentir dans les délibérations par-lementaires. En revanche, la sensibilitédes politiques macro-économiques auxbesoins et aux intérêts des femmes nes�est guère améliorée.

En général, les participantes ont estiméque l�accession des femmes au pouvoirpolitique au cours des dernières décenniesavait résulté d�un contexte particulière-ment favorable et que les acquis pouvaientêtre plus fragiles qu�il n�y paraissait.

Multiculturalisme et universalismeLes stratégies qui reposent sur les droitssoulèvent une autre question, extrême-ment délicate du point de vue politique,celle de savoir si elles pourraient trouverune application universelle sans nier laspécificité culturelle. Si le langage desdroits et de la citoyenneté a un large pou-voir de séduction et s�il est politiquementacceptable et efficace dans certains pays,

il suscite la méfiance dans d�autres. Onentend parfois affirmer que les droits etnormes universels sont une forme d�hé-gémonie occidentale et ne conviennentpas à d�autres cultures. Quelles traditionssont essentielles au maintien de l�intégritéet de la souveraineté des nations et descultures? Cette interrogation soulève biendes questions épineuses. Y a-t-il unmoyen de concilier ces traditions avec larecherche de l�égalité entre hommes etfemmes? L�exposé sur l�Ouganda a per-mis de constater que les mouvements fé-minins avaient remis en question despratiques culturelles dommageables pourles femmes telles que les mutilations desorganes sexuels féminins. Ils ont réussi,lorsqu�ils ont pu entamer le dialogue avecles autorités communautaires en se fon-dant sur une certaine conception des nor-mes et valeurs culturelles dominantes. Lesfaits ont prouvé que la culture était plusapte à s�adapter qu�on ne le prétendaitparfois et que l�identité culturelle ne te-nait pas à des pratiques mutilantes pourles femmes.

Des participant(e)s à la conférence ontdéclaré que l�Occident n�avait pas lemonopole des idées de droits et de jus-tice. Qu�elles viennent de traditionsautochtones ou qu�elles se soient pro-pagées de pays en pays au fil de l�his-toire, ces idées ont un large pouvoir deséduction moral et ont amené des indi-vidus et des collectivités du monde en-tier à demander justice. S�il doit y avoirun vrai consensus international sur lesdroits, en particulier sur les droits desfemmes, il ne pourra résulter que d�undialogue dans lequel les femmes ferontentendre leur voix.

Ce projet de l�UNRISD a été financé

par l�Agence suédoise d�aide au

développement international (Sida) et

par le budget général de l�UNRISD (assuré

par les contributions des gouvernements du

Danemark, de la Finlande, du Mexique, de

la Norvège, des Pays-Bas, du Royaume-Uni,

de la Suède et de la Suisse).

Un nouveau projet de l�UNRISD,intitulé Technologies de l�informa-

tion et développement social au Sénégal,a été lancé officiellement lors d�un ate-lier de travail qui s�est tenu à Dakar les31 janvier et 1 février et a réuni autourdes chercheurs un petit groupe d�hom-mes d�affaires et de syndicalistes tra-vaillant dans l�informatique et lestélécommunications, de journalistes, demilitants d�ONG et d�universitaires.

La séance d�ouverture a été consacrée àla présentation d�une étude d�Olivier Sagnasur l�état des lieux des Technologies del�information et développement social auSénégal. Elle retrace l�évolution des tech-nologies de l�information et de la commu-nication dans le pays depuis l�introductiondu télégraphe au milieu du 19ème Sièclejusqu�à l�explosion des abonnements au té-léphone des années 90 et rend compte

d�études consacrées aux technologies del�information et au développement, réali-sées par des universitaires ou des ONG oucommandées par le gouvernement et desdonateurs. Elle montre aussi combien ilest difficile de comprendre comment cestechnologies de l�information sont utiliséespar différents groupes sociaux.

Après la discussion de l�étude d�OlivierSagna, les 11 membres de l�équipe ont pré-senté leurs propositions de recherche, quel�on peut regrouper en six grands thèmes.

Technologies de l�information,croissance et développementDeux économistes sénégalais examinentactuellement les conséquences des nou-velles technologies de l�information pourla croissance et les modes de développe-ment économique. Ils commencent parune étude empirique de la façon dont ces

technologies sont introduites dans diverssecteurs d�une économie fragilisée par unelongue crise économique et divers pro-grammes d�ajustement structurel. Ils étu-dient les changements que l�entrée destechnologies de l�information dans les in-dustries et les services entraîne inévita-blement dans les rapports sociaux etéconomiques, ainsi que les tentatives fai-tes pour dynamiser l�économie locale enexploitant de nouveaux créneaux d�unmarché international en pleine expansion,celui des services offerts sur l�Internet. Ilss�intéressent aussi aux principales diffi-cultés que rencontrent des pays commele Sénégal lorsqu�ils décident d�être pré-sents dans la �nouvelle division interna-tionale du travail� et d�en tirer parti.

L�utilisation des technologies del�information par le secteur privéDeux autres projets de recherche portent

Atelier du projet Infotech au Sénégal31 janvier�1 février 2000, Dakar

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printemps/été 200018UNRISD Infos No. 22

INTERNE: CONFERENCES, SEMINAIRES ET ATELIERS DE TRAVAIL

spécifiquement sur l�entrée des technolo-gies de l�information dans les entreprisesdu secteur privé organisé du Sénégal. L�unse concentre sur les perspectives qu�ouvrel�Internet aux petites et moyennes entre-prises à Dakar, sur les menaces qu�il re-présente pour elles et sur la manière dontune centaine d�entre elles tentent des�adapter à leur époque (notamment enutilisant des sites Internet et le courrierélectronique, en mettant au point de nou-velles stratégies de commercialisation, enchangeant leur politique du personnel eten adoptant de nouvelles formes de travail).C�est à des questions analogues que tentede répondre une étude complémentaireportant sur un échantillon de 50 moyenneset grandes entreprises industrielles (pêche,production alimentaire, textile et pièces demachines, notamment). Elle note les chan-gements survenus dans la gestion et lesrelations avec les fournisseurs et la clien-tèle, les nouveaux contacts internationauxet les avantages ou inconvénients que pré-sente, du point de vue des entreprises,l�adaptation au nouvel environnement.

Les technologies de l�informationet les Sénégalais émigrésEn quoi les nouvelles technologies de l�in-formation facilitent-elles des �relations àdistance�, sociales et financières, entre lesSénégalais émigrés et leur pays d�origine?C�est le sujet d�une autre étude. La crois-sance rapide et la diversification des ser-vices téléphoniques et les options offertespar l�Internet sont en train de modifier lamanière dont les émigrés peuvent inter-venir dans les décisions quotidiennes rela-tives aux affaires de famille et de gérer lesentreprises tributaires de leurs investis-sements. Elles stimulent aussi la créationd�entreprises dans les pays d�immigra-tion car les Sénégalais qui résident àl�étranger répondent à la demande deleurs compatriotes qui veulent des servi-ces de virement, des communications in-ternationales bon marché et de nouvellesformes de troc international.

Les fraternités mourides etles technologies de l�informationUne autre équipe étudie comment lestechnologies de l�information sont utili-

sées pour renforcer les intérêts religieuxet économiques des fraternités mouridesà Touba, la deuxième plus grande villedu Sénégal, dont la croissance rapiderepose avant tout sur le rôle qu�elle jouedans le rituel religieux de la société wo-lof traditionnelle. Les intérêts temporelset spirituels des fraternités sont servisnon seulement par un important sec-teur commercial informel mais aussi parl�établissement de nouveaux liens reli-gieux avec d�autres personnes dans lemonde entier. Les chercheurs étudieronten quoi ces occasions nouvelles modi-fient les identités et les rapports sociaux(entre hommes et femmes, entre leschefs spirituels et leurs fidèles) dans unenvironnement naguère traditionnel.

Les technologies del�information et les médiasLes technologies de l�information et lesmédias au Sénégal font l�objet de deuxautres projets de recherche. L�un s�inté-resse au rôle des systèmes informatisésdans la modernisation du journalisme.L�avenir du journalisme africain dépendde sa capacité à exploiter les nouvellestechnologies de l�information. Pourtant,pour bien servir son public, il ne doit pastrop dépendre de nouvelles internationa-les pré-digérées. Les nouvelles technolo-gies doivent être utilisées de manière àrépondre aux besoins locaux. Commentles journalistes sénégalais relèvent-ils cedéfi? Comment accèdent-ils aux nouvel-les technologies de l�information et com-ment les utilisent-ils? Le deuxième projetporte sur le développement de la radioqui, surtout depuis la création de stationsFM en 1990, est devenue pour la majo-rité des Sénégalais, qui ne sont ni alpha-bétisés ni francophones, une sourced�information vitale dans les langues lo-cales. Les rapports entre préoccupationslocales et préoccupations mondiales de-viennent d�autant plus complexes à laradio que la radio et la télévision par sa-tellite donnent accès maintenant à denouvelles émissions d�information et dedivertissement.

Participation populaire et démocratieIl y ensuite deux études consacrées aux

questions de participation populaire etde démocratie. L�une met en évidenceles changements survenus dans la ma-nière dont les milieux des ONG au Sé-négal se servent des technologies del�information et de la communication.L�autre analyse la politique officielle enmatière d�information et de liberté d�ex-pression et son évolution, notamment laperte progressive par l�Etat de son con-trôle sur les médias et la tentative faiterécemment pour améliorer la commu-nication avec les citoyens en créant desbureaux dans les différents voisinages oùchacun peut avoir accès aux archivespubliques et obtenir les informationsqu�il désire. Le rôle joué par les techno-logies de l�information lors des récentesélections présidentielles, qui ont amenéle parti dominant à céder le pouvoir àl�opposition pour la première fois depuisl�indépendance, sera également étudié.

Les technologies del�information dans l�éducationLa dernière étude porte sur l�usage qui estfait des technologies de l�information (et enparticulier de l�Internet) dans l�enseigne-ment secondaire et supérieur au Sénégal.

Le premier jet des rapports est attendupour l�automne 2000 et la version défi-nitive pour la fin de l�année. Pendant lepremier trimestre 2001, le coordinateurdu projet, Momar-Coumba Diop, écriraun livre qui fera la synthèse de toute ladocumentation recueillie par le projet.L�étude d�Olivier Sagna est dès à présentaccessible sur le site Internet de l�UNRISDen français et en anglais. L�Institut le pu-bliera en français en automne 2000 sousla forme d�un document du programmeTechnologie et société. Il est prévu de lediffuser largement au Sénégal, au traversde divers programmes universitaires,d�écoles techniques et d�ONG.

Le projet de l�UNRISD Technologies

de l�information et développement social

au Sénégal, y compris l�atelier de Dakar,

est financé par le Ministère néerlandais

de la Coopération au développement.

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printemps/été 2000UNRISD Infos No. 22 19

INTERNE: CONFERENCES, SEMINAIRES ET ATELIERS DE TRAVAIL

Le Sommet mondial pour le déve-loppement social s�est fié dans une

large mesure à la société civile pourconstruire un monde meilleur. Dans lecadre des préparatifs de Geneva 2000,conférence consacrée à l�évaluation,cinq ans après, de la mise en oeuvredes engagements du Sommet social,l�UNRISD a organisé un séminaire surLe rôle de la société civile dans l�élabo-ration des politiques et la prestation deservices. Le séminaire a permis à l�Ins-titut de communiquer aux délégués,aux ONG et aux institutions présentesà la deuxième session du Comité pré-paratoire les principales conclusions deses recherches en cours sur la sociétécivile et les mouvements sociaux auxniveaux local, national et international.

La première séance a été l�occasiond�un débat sur l�évolution du rôle desorganisations de la société civile (OSC)dans la prestation des services sociaux.On dit souvent que les OSC présen-tent, comme prestataires de services,l�avantage de mieux parvenir à tou-cher les plus pauvres, de fournir desservices de haute qualité, d�être plusperformantes et plus rentables que lesprestataires publics et plus novatricesdans leurs approches. Or, les partici-pants ont eu de la peine à le confir-mer. Les orateurs ont également faitobserver que ce sont les femmes quisupportent en grande partie les con-séquences de la décision de l�Etat dese décharger sur les OSC de la respon-sabilité de la prestation de services.

La deuxième séance a commencé parun exposé qui a mis en évidence l�im-portance de la collaboration syndicats-ONG: les syndicats aujourd�hui nepeuvent pas faire adopter leurs idéessans les ONG qui, de leur côté, ontaussi besoin d�eux. Certains des défisles plus importants que doivent rele-

ver les travailleurs organisés du Ban-gladesh dans leurs efforts de dévelop-pement social ont été soulignés, lestravailleurs se heurtant notamment àde sévères réglementations régissantleur organisation et à la division dumouvement syndical, lui-même en fac-tions. Même les ONG n�encouragentpas leurs employés à se syndicaliser etsont souvent peu attentives aux droitsdes travailleurs.

A la troisième séance, la discussion aporté sur quatre facteurs qui ont uneincidence décisive sur le rôle que jouentles OSC dans l�élaboration et l�exécu-tion de la politique aux niveaux natio-nal et local. Ce sont l�existence, lesavoir, l�accès et l�influence. Leur exis-tence dépend de la législation et desconditions politiques et financières, fac-teurs qui, tous, peuvent gêner la créa-tion et le bon fonctionnement des OSC.Deux types de savoir sont cruciaux: ilfaut savoir ce qui se passe et ce donton a besoin sur le terrain et savoir com-ment s�élabore une politique. Le troi-sième élément, c�est l�accès auxpersonnalités les plus influentes�souvent le ministre de l�économie�etau public, par les médias. Pour qu�uneOSC ait quelque poids, il faut que lesdirigeants, comme le public, soientpersuadés de la valeur de ses straté-gies et de ses objectifs. Le quatrièmeélément est l�influence, la capacité dechanger tant soit peu les choses, par lapersuasion intellectuelle, la force poli-tique et la puissance financière.

La dernière séance a été consacrée à laréforme des institutions internationa-les. Elle a commencé par une descrip-tion des efforts déployés par la Banqueinteraméricaine de développementpour être plus accessible aux OSC. Ona fait valoir que les OSC, de leur côté,devaient apprendre à travailler avec des

établissements financiers, conclure desalliances solides et utiles avec des OSCinternationales et faire pression sur leursgouvernements respectifs. Pour résu-mer, les participants sont tombés d�ac-cord pour estimer que, tant que les OSCresteraient à l�écart des grandes déci-sions sur le commerce, les investisse-ments, les finances et la direction del�économie mondiale, les conditions neseraient pas propices au développementsocial et que le principal défi lancé à lasociété civile mondiale était de conce-voir un cadre qui obligerait les institu-tions économiques multilatérales àrendre des comptes.

L�UNRISD a distribué l�avant-projet ducompte rendu du séminaire à ladeuxième session du Comité prépara-toire. La version définitive fait l�objetd�un numéro des UNRISD ConferenceNews (voir page 14), que l�on peut seprocurer (en anglais) et qui est accessi-ble sur le site http://www.unrisd.org

Ce séminaire était la deuxième contri-bution du programme de recherche del�UNRISD �Société civile et mouve-ments sociaux� aux préparatifs deGeneva 2000. En automne 1999, l�Ins-titut a effectué, à la demande de l�As-semblée générale des Nations Unies,une étude sur Les organisations de lasociété civile et l�intégration sociale.On peut se la procurer au siège des Na-tions Unies à New York où elle a étédiffusée comme document de l�Assem-blée générale sous la cote A/AC.253/16/Add.6 (10 février 2000). Elle est aussidisponible sur le site http://www.un.org

Ce séminaire a été financé par le

Département des affaires économiques et

sociales des Nations Unies (UN-DESA).

Le rôle de la société civile dansl�élaboration des politiques et la prestation de services

31 mars 2000, New York

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printemps/été 200020UNRISD Infos No. 22

INTERNE: CONFERENCES, SEMINAIRES ET ATELIERS DE TRAVAIL

Des millions de personnes de par lemonde voient leur vie et leurs moyens

d�existence ruinés par la pandémie duSIDA. On estime que, chaque jour, 15.000personnes sont infectées et que le rythmene peut que s�accélérer. C�est dans les payset régions pauvres, où les inégalités entrehommes et femmes sont omniprésenteset les services publics faibles que la situa-tion est la plus grave. En fait, la propaga-tion du VIH/SIDA en ce début du 21èmeSiècle est un signe de maldéveloppement,l�indice d�une inaptitude à instaurerl�équité et à apporter la prospérité à devastes régions du monde.

En collaboration avec le Programmecommun des Nations Unies sur le VIH/SIDA (ONUSIDA), l�Institut rédige ac-tuellement un document sur le VIH/SIDAet le développement qui devrait servir debase à de nouvelles recherches compa-ratives sur la question. Ce document, quin�aborde pas le sujet sous l�angle épidé-miologique ni sous celui de la santé pu-

blique, rattache la propagation du VIH/SIDA à de multiples facteurs qui ont ap-pauvri et déraciné des multitudes de gensdont le nombre ne cesse d�augmenter.Cette recherche sociologique porte surdes situations locales concrètes et signaleles facteurs qui encouragent divers grou-pes à adopter un comportement à hautrisque. Elle examine aussi les tendancesqui se dessinent dans la fourniture desservices sociaux et éclaire d�un jour nou-veau la manière dont la population lo-cale perçoit les programmes en rapportavec le SIDA. Les résultats de la recher-che devraient aider les autorités et insti-tutions locales à affronter certainschangements sociaux et économiquescomplexes liés à la catastrophe du SIDA.

Aux niveaux national et international, ilest important d�analyser la politique pu-blique adoptée face au SIDA et de com-parer l�action menée par différentsgouvernements et institutions. Les spécia-listes des sciences sociales devraient être

en mesure de replacer ces efforts dans unvaste contexte politique et d�expliquerpourquoi certaines approches sont préfé-rées à d�autres. Quels sont les différentsintérêts en jeu? Quelles sont les compo-santes politiques des programmes effica-ces de lutte contre le VIH/SIDA? Etpourquoi la communauté internationalea-t-elle été relativement impuissante de-vant l�un des problèmes les plus gravesdes 20 dernières années? A moins decomprendre et de chercher à surmontercertains des problèmes structurels de fondque posent les programmes nationaux etinternationaux en place, il est peu probableque les crédits importants affectés à la luttecontre l�épidémie aient les effets souhaités.

Ce sont des questions telles que celles-ciqui ont été débattues au petit atelier in-formel qu�a financé l�ONUSIDA à Genève.Le document final que l�UNRISD publieraen automne 2000 en dira plus sur les dis-cussions auxquelles il a donné lieu.

Atelier de travail sur le VIH/SIDA et le développement30 mai 2000, Genève

l�accent mis actuellement sur les élec-tions démocratiques peut renforcer à lafois certains régimes politiques et lacompétition entre partis politiques maisne garantit ni la satisfaction par l�Etatdes besoins de la collectivité, ni la par-ticipation de la société civile à la prisedes décisions, ni la comptabilité socialeet politique des classes dirigeantes dansles pays en développement et les socié-tés en transition. Par �Etat�, je n�en-tends pas uniquement le gouvernementcentral mais plutôt les institutions qui,à tous les niveaux, gèrent les affairespubliques et qui sont tantôt intégréesaux institutions nationales, tantôt n�en-tretiennent avec elles que des liens as-sez lâches.

S�agissant du développement, le retraitde l�Etat ne peut pas servir des objec-tifs sociaux valables; l�Etat dans toutesses ramifications doit redevenir une ins-titution responsable et comptable de-vant la société, qui gère les affairespubliques en ayant une vision claire dece que la sphère publique doit faire pourque les êtres humains voient leurs be-soins satisfaits et leurs droits respectés.Il ne peut le faire, je le répète, qu�enliaison étroite avec les multiples et di-verses organisations et institutions de lasociété civile. Et où se situe le marchédans tout cela? C�est un mécanismenécessaire à l�attribution de certains ty-pes de biens de consommation et deservices et il stimule les changementsdans la productivité, mais il n�est cer-tainement pas le juge et dispensateurde biens collectifs appréciés par la so-ciété. Pour cela, il faut retourner à la

politique: recherche du consensus, par-ticipation de la collectivité, transparencedans la prise de décision et engagementsdémocratiques inspirés par les valeursde liberté, de justice et d�éthique.

Rodolfo Stavenhagen est professeur-chercheur au Colegio de México. Cetarticle est extrait du discours liminaire qu�ila prononcé à la Conférence de l�UNRISD,Mains visibles: Assumer la responsabilitédu développement social (29 juin 2000,Genève). Le discours intégral sera publiéen automne 2000 dans la série desdocuments de programme de l�Institut.

Références� Norberto Bobbio, The Age of Rights,

Polity Press, Cambridge, 1996.� Johan Galtung, Human Rights in Another

Key, Polity Press, Cambridge, 1994.� Yehudi Menuhin est cité dans Eric

Hobsbawm, The Age of Extremes: AHistory of the World, 1914�1991,Vintage Books, New York, 1994.

Des progrès aux20ème et 21ème Sièclessuite de la page 4

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printemps/été 2000UNRISD Infos No. 22 21

INTERNE: CONFERENCES, SEMINAIRES ET ATELIERS DE TRAVAIL

Dans le cadre de son projet, Politi-ques de technocrates et démocratisa-

tion, l�Institut a organisé une conférenceinternationale pour attirer l�attentionsur les contraintes imposées aux nou-velles démocraties par leur intégrationcroissante dans le marché mondial. Ladiscussion s�est articulée autour de qua-tre tables rondes: autorités indépendan-tes et responsabilité; démocratisation etpolitique sociale; société civile et gou-vernement de technocrates; élaborationde la politique économique et contrôleparlementaire. Deux discours princi-paux ont été prononcés, l�un sur lamondialisation, l�élaboration de la po-litique économique et la démocratisa-tion et l�autre, sur les moyens derenforcer les institutions démocratiquesà l�heure de la mondialisation.

Dans son discours liminaire, SylviaMaxfield a examiné l�influence com-plexe qu�exercent différents types d�in-vestisseurs internationaux sur les choixpolitiques des gouvernements et le ren-forcement des institutions démocrati-ques dans les pays dont le marché s�estouvert depuis peu. Les échéances etpréférences des investisseurs étrangersdirects et des actionnaires peuvent être,selon elle, différentes de celles des ban-ques commerciales et des obligatairesqui veulent des taux d�intérêt élevés,une politique de prudence budgétaireet l�indépendance des banques centra-les. Les investisseurs internationauxpeuvent restreindre la liberté d�actiondes institutions démocratiques lorsqueles entrées et sorties de capitaux sontimprévisibles, que les investisseurs for-cent les décideurs des économies endéveloppement à élever les taux d�in-térêt pour suivre la tendance des éco-nomies avancées et que les pays endéveloppement ne peuvent pas adop-ter de politiques propres à enrayer l�en-grenage en période de choc, de peurde provoquer la fuite des capitaux. Lesinvestisseurs dont les choix favorisent

Quels choix la mondialisation économique laisse-t-elle aux démocraties?27�28 avril 2000, Genève

l�instabilité des capitaux sont plus fa-cilement des obligataires que des in-vestisseurs étrangers directs ou desactionnaires. Selon Sylvia Maxfield,une modification de la structure ducapital peut donc aider à renforcer lesinstitutions démocratiques, et ce deplusieurs manières. Premièrement, latendance à la libéralisation des mar-chés d�obligations et d�actions peutsaper les structures oligopolistiques etrendre le crédit accessible à un éven-tail plus large d�investisseurs, l�évolu-tion récente des technologies del�Internet pouvant entraîner une �dé-mocratisation des marchés des capi-taux�. Deuxièmement, pour comblerle manque d�informations, les inves-tisseurs peuvent être amenés à récla-mer la transparence des politiquespubliques, des rapports financiers fia-bles et de solides institutions de régle-mentation. Ces revendications risquentd�avoir des répercussions sur des insti-tutions politiques telles que les fonc-tions électives, la justice et le législatif.

La première table ronde a débattu dela tendance à mettre en place des ins-titutions indépendantes pour limiter lepouvoir discrétionnaire des gouverne-ments dans des secteurs politiques clés.Parmi ces institutions figurent les ban-ques centrales, les autorités fiscales etles agents d�exécution. Trois cas ont étéenvisagés. Le premier est l�expériencede la Banque centrale européenne(BCE) à laquelle les gouvernementsnationaux laissent une énorme autono-mie. Bien que la BCE se soit astreinteà la transparence, elle continue à souf-frir d�un �déficit démocratique�. Onpeut le combler en grande partie sansmodifier le traité portant création de laBCE: en persuadant les cadres de labanque de ne pas limiter leurs objectifsen politique économique à la stabilitédes prix et en revoyant les relations del�institution avec le public et les repré-sentants élus.

Le deuxième cas est celui du Japonqui, pour soutenir les politiques qui ontcontribué à faire de lui un géant éco-nomique, isole les administrationsresponsables du commerce et de l�in-dustrie. Au fil des années, les pratiquesdémocratiques s�étant renforcées, l�in-fluence de la classe politique japonaiseen matière de politique économiques�est accrue, mais sans entamer vrai-ment le pouvoir des élites technocrati-ques. La faible spécialisation desconnaissances auxquelles peuvent ac-céder les partis politiques et le législa-tif en sont la cause. La récession desannées 90 a amené à faire d�impor-tantes propositions en vue d�une ré-forme bureaucratique dont les résultatssont encore incertains.

Le troisième exemple est celui des paysde l�OCDE et d�autres pays tributairesde l�aide extérieure qui ont fait la partbelle aux agents d�exécution et aux ré-formes de l�administration publique.En Tanzanie et en Ouganda, par exem-ple, les donateurs poursuivent des po-litiques de réforme contradictoires: ilssoutiennent, d�une part, la dévolutiondu pouvoir à des fonctionnaires locauxélus et, de l�autre, une gestion centralepour les organismes de services sociaux.

La technocratisation des politiquess�observe aussi dans le domaine social.Un des exposés a porté, lors de la se-conde table ronde, sur les coûts sociauxet économiques de la réglementationpar des technocrates des systèmes desoins de santé en Tanzanie. A cette ex-périence on a opposé le choix del�ouverture et de la recherche de colla-borations, qui semble avoir de meilleu-res chances d�aboutir à un système desoins de santé efficace et viable. Le dé-bat à ce sujet s�est orienté sur la ques-tion générale des rapports entrepauvreté, réformes économiques et dé-mocratie et sur les raisons pour lesquel-les les décideurs politiques d�Afrique

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printemps/été 200022UNRISD Infos No. 22

INTERNE: CONFERENCES, SEMINAIRES ET ATELIERS DE TRAVAIL

n�ont pas su réduire la pauvreté de lamajorité de la population, étant donnéque, pour les électeurs pauvres, démo-cratisation et protection sociale sontétroitement liées.

La discussion a porté ensuite surl�Amérique latine. Depuis quelquesannées, les politiques de la région sontplus structurées et privilégient de pe-tites élites économiques qui sont ex-trêmement sensibles à la dynamiquedes marchés financiers internationaux.Certains gouvernements ont recouruà des programmes �résidualistes� deciblage et à des filets de sécurité so-ciale pour décourager toute participa-tion à la définition des politiquesmacro-économiques. Certains groupesde la société civile adoptent même unstyle de gestion technocratique dansleurs activités.

La troisième table ronde a débattu desgroupes de la société civile qui s�effor-cent d�influencer la prise de décisiondans les institutions multilatérales et lesinstances nationales. Il est difficile demodifier le style technocratique de laprise de décision dans les institutionsmultilatérales à cause du cloisonnementdes politiques qui y règne et parce quel�efficacité l�emporte sur d�autres va-leurs, telles que la justice sociale ou laviabilité environnementale. Les effortsdéployés par les syndicats d�industriespour influencer la politique économi-que de leur gouvernement au traversde pactes sociaux ont fait l�objet d�uneintéressante comparaison entre huitpays. Le droit du travail et de l�envi-ronnement dans les relations commer-ciales, ainsi que l�opposition Nord-Sudet syndicats-ONG sur ces questions, ontsuscité un débat animé.

La table ronde consacrée à l�élabora-tion des politiques et au contrôle par-lementaire a fait état des expériencesde sept pays dont la diversité même estintéressante: le Chili, l�Argentine, leMalawi, le Bénin, l�Inde, la Républiquede Corée et la Hongrie. Au Chili, les

partis politiques et le législatif se sontprofessionnalisés et les économistes do-minent. Il en est résulté un consensussur la gestion budgétaire et une inquié-tante dépolitisation. En Argentine, ledésir de politiques viables semble avoiramené l�exécutif à renoncer à gouver-ner par décret et la tendance est à uneplus grande participation du législatifà l�élaboration de la politique écono-mique. Au Malawi et au Bénin, les ins-titutions multilatérales de prêt ont plusde pouvoir que les marchés financiersen matière de gestion économique etdécident même du recrutement d�ex-perts pour les principales institutionséconomiques. Le parlement participepeu à l�élaboration de la politique éco-nomique dans ces deux pays.

En Inde, si le parlement contrôle peul�élaboration de la politique économi-que, la faute en est moins à la techno-cratisation du gouvernement qu�à desproblèmes généraux de capacité.L�Inde, comme la Hongrie, est une dé-mocratie parlementaire: toutes les loiset décisions politiques importantes doi-vent être débattues au parlement. Deplus, l�administration indienne se mé-fie des experts recrutés hors de sesrangs. En Hongrie, le principal objec-tif des partis est de satisfaire aux con-ditions d�adhésion fixées par l�Unioneuropéenne, bien que le coût social de

l�intégration ait suscité quelque réac-tion. La Corée, comme le Japon, doitson développement économique à unrégime technocratique fort qui met lesprincipales institutions publiques del�industrie et du commerce à l�abri dela classe politique et des groupes d�in-térêt. Le régime bureaucratique de laCorée a essuyé un revers après la dé-mocratisation des années 80: les grou-pes d�intérêt et le parlement ayantdavantage leur mot à dire dans l�éla-boration de la politique, la gestion éco-nomique est devenue plus complexe.Cependant, la crise financière de 1997a entraîné une recentralisation de l�éla-boration des politiques due à la créa-tion de puissantes institutions quiéchappent en grande partie au contrôleparlementaire.

La conférence s�est close sur le discoursde Richard Joseph qui a incité sonauditoire à dépasser les limites impo-sées par le néolibéralisme en matièred�élaboration des politiques et de dé-mocratisation. Les institutions démo-cratiques, a-t-il déclaré, devraient seconstruire sur un solide programme dedéveloppement social qui prenne ausérieux la lutte contre la pauvreté. Ri-chard Joseph a aussi plaidé en faveurde gouvernements citoyens, de la ga-rantie des droits civils et de la partici-pation la plus large possible à ladiscussion des politiques publiques.

Un rapport complet de la conférence

paraîtra sous peu dans un numéro

des UNRISD Conference News, qui sera

également accessible en ligne sur le site

UNRISD ON-LINE (http://www.unrisd.

org). La conférence a été financée par

le budget central de l�Institut (assuré

par les contributions des gouvernements

du Danemark, de la Finlande, du Mexique,

de la Norvège, des Pays-Bas, du Royaume-

Uni, de la Suède et de la Suisse).

Il est difficile de modifierle style technocratique dela prise de décision dans

les institutions multilatéralesà cause du cloisonnementdes politiques qui y règne

et parce que l�efficacitél�emporte sur d�autres valeurs,telles que la justice sociale ou la viabilité environnementale.

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printemps/été 2000UNRISD Infos No. 22 23

INTERNE: CONFERENCES, SEMINAIRES ET ATELIERS DE TRAVAIL

Sous les auspices de l�UNRISD etl�IREC/EPFL* s�est récemment

tenu l�Atelier international N-AERUS**2000 sur le thème �les Villes du Sud:Vivables pour qui?�. Des chercheurs,des urbanistes et des architectes, desfonctionnaires nationaux et internatio-naux et des militants d�ONG se sontattachés à approfondir deux questions:� Quels devraient être les objectifs d�un

développement urbain durable etcomment faudrait-il l�aborder?

� En quoi les milieux de la recherchepeuvent-ils aider les donateurs àcomprendre les besoins et à trouverdes moyens efficaces d�y répondre?

Malgré leurs perspectives et leurs ori-gines différentes, les participants sontconvenus que le modèle de développe-ment néolibéral dominant n�était paspropice à un développement durable.La diversité sociale et culturelle et lesdifférences de pays, de ville et de com-munauté ont été quelque peu oubliéesdans les débats sur la nature du déve-loppement durable. En fait, il n�y a pasde consensus sur le sens à donner à ce�développement durable�, de sorte queles pauvres du Sud se sont vu imposerdes modèles de viabilité par leurs pro-pres élites ou par les donateurs du Nord.Les participants à l�atelier ont estiméqu�il fallait combler ces lacunes si l�onvoulait que les villes du Sud soient plusvivables pour la majorité de leurs ha-bitants. Les participants ont été égale-ment d�accord pour penser que, dansla recherche de voies plus équilibréeset réalistes susceptibles de débouchersur un développement urbain durableà l�échelle de la planète, il était urgentde concentrer son attention sur les mo-des de vie des riches, au Nord et au Sud.Enfin, comme un habitat urbain du-rable dépend avant tout des acteurs enprésence (la collectivité, le gouverne-ment, les entreprises) et des institutions

Les villes du Sud: Vivables pour qui?Atelier international N-AERUS 2000

3�6 mai 2000, Genève

et des systèmes politiques démocrati-ques par lesquels les acteurs locaux dé-cident de leur propre développement,il fallait accorder plus d�attention auxdimensions politiques et sociales dudéveloppement durable qu�on ne le faitaujourd�hui, où seuls les aspectsenvironnementaux, techniques et éco-nomiques sont pris en considération.

Les chercheurs du Nord et du Sud pré-sents à l�atelier ont reconnu que, pouraborder le développement urbain du-rable sous un angle plus productif, ilétait important qu�ils imaginent, con-çoivent et effectuent ensemble des re-cherches et mettent leurs conclusions àla disposition de ceux qui sont directe-ment appelés à construire des villes plusdémocratiques et plus humaines. Ens�efforçant de parvenir à une définitioncommune des concepts et en établis-sant des cadres théoriques clairs, ils ontestimé qu�ils feraient un premier pasdans ce sens. Mais il est aussi impor-tant d�avoir, en contre-partie, des re-cherches qui présentent un intérêtpratique immédiat. Les chercheurs duNord pourraient aussi s�employer par-ticulièrement à améliorer leurs relationsavec les réseaux de chercheurs du Sud,

dans le but de sensibiliser les institu-tions de financement du Nord aux prio-rités et aux capacités de recherche deschercheurs et des institutions du Sud.

L�UNRISD et le N-AERUS vont faireparaître sous peu le compte rendu del�atelier qui sera ensuite disponible surles sites Internet de l�IREC/EPFL (http://www.urb.ch) et de l�UNRISD. Une sé-lection des documents présentés à l�ate-lier paraîtra dans un numéro double dela revue de l�Oxfam Development inPractice en mai 2001, juste avant quene soit dressé le bilan d�Habitat II, cinqans après. Il est également prévu de con-sacrer un livre au rôle de la coopérationtechnique internationale dans la promo-tion du développement durable dans lesvilles du tiers monde.

L�UNRISD et l�IREC/EPFL ne se sontpas contentés d�assurer la logistique etde donner aux travaux de l�atelier uneorientation thématique. Ils ont aussi vi-vement engagé le réseau N-AERUS àaccueillir des chercheurs du Sud à saréunion de l�an 2000. Ils ont financé laparticipation de 15 chercheurs de paysen développement qui ont, à tous égards,joué un rôle de premier plan à l�atelier.Celui-ci a bénéficié de financements dela Fondation européenne de la science,de la Direction du développement et dela coopération (Suisse), du Ministèrefrançais des Affaires étrangères et del�Agence de la francophonie.

* Institut de recherche sur l�environ-

nement construit/Ecole polytechnique

fédérale de Lausanne

** Network-Association européenne

de recherches urbaines pour le Sud

Un habitat urbain durabledépend avant tout des acteursen présence (la collectivité, legouvernement, les entreprises)

et des institutions etdes systèmes politiques

démocratiques par lesquelsles acteurs locaux décident de

leur propre développement.

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printemps/été 200024UNRISD Infos No. 22

INTERNE: CONFERENCES, SEMINAIRES ET ATELIERS DE TRAVAIL

La crise financière asiatique, qui s�estdéclarée en Thaïlande il y a près

de trois ans, a été imputée à l�échecd��institutions� situées à plusieurs ni-veaux. Aux yeux de certains, l�échec leplus retentissant a été celui du capita-lisme mondial, dont les institutions ré-glementent insuffisamment les flux decapitaux spéculatifs à l�entrée et à lasortie des marchés fragiles du mondeen développement. Le Fonds monétaireinternational (FMI) a été lui aussi blâmépour la façon contestable dont il avaitréagi à la crise. Il en est résulté un granddébat sur la réforme de l�architecturefinancière internationale, qui repose surles institutions de Bretton Woods. On areproché aux institutions des pays tou-chés par la crise d�échapper au con-trôle démocratique. On a accusé cespays d�avoir des systèmes de �capita-lisme de copinage�, entendant par làun manque de transparence, un risquede dérive morale et un Etat de droitinsuffisant. Le démantèlement des ins-titutions relevant de ce type de capita-lisme et leur remplacement par desorganismes de réglementation telsqu�on peut en trouver dans le mondeanglo-américain, telle est, pour l�essen-tiel, la réforme exigée par les institu-tions financières internationales.L�Institut a organisé cette conférence,qui relève de son projet Néolibéralismeet Réforme des institutions en Asieorientale, pour envisager le pour et lecontre des propositions de réforme.

La première séance de la conférence aporté sur le sens et les pratiques del�Etat de droit en Asie orientale, au re-gard en particulier de ce capitalisme decopinage dont sont accusés bien despays de la région. Le copinage est unenotion relative et couvre toutes sortesd�acceptions, désignant aussi bien l�ar-deur de Ferdinand Marcos et ses alliésà se servir dans les caisses de l�Etat que

Néolibéralisme et réformedes institutions en Asie orientale

12�13 mai 2000, Bangkokles relations tissées par la politique in-dustrielle entre l�Etat et les entreprisesau Japon et en République de Corée, parexemple. Les participants à la confé-rence ont débattu des moyens de favo-riser la transparence dans les relationsentre l�Etat, les banques et les entre-prises. Ils ont aussi évoqué certains liensinformels qui fonctionnent bien et donton pourrait se servir pour créer uneculture juridique différente, qui amè-nerait le développement économique etl�autonomie. Constatant que la façon

de concevoir et d�appliquer la pri-mauté du droit variait selon les tradi-tions juridiques, ils ont relevé�et c�estlà l�une des conclusions importantesde cette séance�que, même dans lesystème juridique des Etats-Unis(considéré comme le berceau du dis-cours sur l��Etat de droit�), celui-ci a

été intentionnellement subordonné àd�autres objectifs institutionnels et àd�autres valeurs politiques. Autrementdit, tout système juridique est à rap-procher de la théorie politique et desvaleurs sociales. L�argument selon le-quel les tribunaux, même aux Etats-Unis, n�appliquent pas toujours la loi(au sens étroit du terme) n�a qu�uneimportance mineure. Ce qui est im-portant, c�est que la loi devrait êtreune affaire de théorie politique et quela réforme du système juridique de-vrait être un processus normatif ré-pondant à des buts sociaux généraux.

Pendant la deuxième séance, les par-ticipants se sont intéressés à la politi-que industrielle et à la bureaucratieéconomique. L�administration chargéede guider l�économie en Républiquede Corée, qu�on a longtemps cru dé-tentrice de nombreux secrets de dé-veloppement, apparaît maintenantcomme un obstacle majeur au pro-grès. L�Etat de la province chinoise deTaiwan, en revanche, a parfaitementréussi à faire démarrer des entrepri-ses dans le domaine des technologiesde l�information. Ainsi, au lieu de dé-manteler les institutions de l�Etatchargées d�élaborer la politique indus-trielle, aujourd�hui décriées, ne fau-drait-il pas plutôt essayer de lesréinventer? En Amérique latine et enAfrique, les réformes néolibérales ontsouvent abouti à l�éclatement des ins-titutions publiques compétentes enmatière de développement économi-que, sans que rien ne vienne les rem-placer. Les participants ont estiméprimordial d�examiner ce qui, dans lapolitique industrielle et la coordina-tion bureaucratique, a donné de bonsrésultats, en vue de l�adapter et des�en servir pour protéger les sociétésnationales à l�ère de la mondialisationéconomique.

Même dans le système juridiquedes Etats-Unis (considéré

comme le berceau du discourssur l��Etat de droit�), celui-ci

a été intentionnellementsubordonné à d�autres objectifs

institutionnels et à d�autresvaleurs politiques. ... Ce quiest important, c�est que la loi

devrait être une affaire dethéorie politique et que la

réforme du système juridiquedevrait être un processusnormatif répondant à desbuts sociaux généraux.

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printemps/été 2000UNRISD Infos No. 22 25

INTERNE: CONFERENCES, SEMINAIRES ET ATELIERS DE TRAVAIL

La politique sociale et la politique dutravail ont été les thèmes de la troisièmeséance. Dans le cadre des réformesprescrites pour l�Asie orientale, on esten train de démanteler des marchés dutravail jugés rigides. Cependant, là où

il n�existe pas de programme de pro-tection sociale, l�institution de l�emploià vie est souvent le seul filet de sécuritésociale dont dispose la population. Dansce sens, de grandes sociétés au Japonet en République de Corée, par exem-ple, sans parler des entreprises d�Etatchinoises, sont des agents d�utilité pu-blique. Par leur système de l�emploiquasi permanent, elles ont assumé enmatière de protection sociale bien desfonctions qui échoient à l�Etat dans lespays industrialisés d�Occident. Pour-tant, au lendemain de la crise finan-cière, le FMI a exigé des licenciementsmassifs en République de Corée, enThaïlande et dans d�autres pays. Ceslicenciements, conjugués à l�exigence denouvelles lois sur la mise en liquidation

judiciaire des entreprises, ont réduit ànéant les pactes sociaux qui existaientdans certaines parties de la région. Lesparticipants à la conférence se sont alorsdemandé comment les marchés du tra-vail fonctionnaient réellement dans lespays en développement d�Asie orientale,s�ils étaient aussi rigides qu�on le pré-tendait et ce qui pourrait remplacer lepaternalisme des relations entre em-ployeurs et employés. Les réformesnéolibérales vont-elles amener l�Etat àse charger de la protection sociale pouren décharger le secteur privé? Va-t-onvoir apparaître des Etats-providencekeynésiens en Asie orientale? Si oui, quelpourrait être le rôle nouveau, dans cettesphère politique élargie, des travailleurset d�autres acteurs?

Le quatrième sujet étudié pendant laconférence a été la gestion du secteurprivé, puisque la crise financière asiatiqueest venue de ce secteur (contrairementaux crises qui ont secoué l�Amériquelatine). On compare souvent les con-glomérats de l�Asie du Nord-Est à desfiefs féodaux, tenus et contrôlés par unefamille, souvent extrêmement influentsmais inefficaces�du moins c�était cequ�on disait lorsque la crise financièrea frappé. Pendant cette séance, les par-ticipants se sont demandés s�il étaitpossible ou souhaitable de prendre unmodèle de gestion d�entreprises ayantune aussi longue histoire, de faire abs-traction de la structure sociale qui l�en-toure et d�essayer de le calquer sur lemodèle anglo-américain.

Enfin, la cinquième séance a été l�oc-casion d�une réflexion sur les normesculturelles, l�idéologie et d�autres my-thes mobilisateurs�tels que les �va-leurs asiatiques�. Les participants sesont demandés si l�on ne pouvait pas,par une réinterprétation des normes etvaleurs propres à des civilisations don-nées, obtenir des résultats socialementsouhaitables. Est-il possible de présen-ter les règles communautaires d�Asieorientale de manière à faire ressortir lesdroits sociaux? Comment créer des ins-

Au lieu de démantelerles institutions de l�Etatchargées d�élaborer lapolitique industrielle,aujourd�hui décriées,

ne faudrait-il pas plutôtessayer de les réinventer?

C�est primordial d�examinerce qui, dans la politique

industrielle et la coordinationbureaucratique, a donnéde bons résultats, en vue

de l�adapter et de s�en servirpour protéger les sociétésnationales à l�ère de la

mondialisation économique.

titutions économiques qui se servent dela culture et du système de valeurs enplace au lieu de les combattre?

Le projet de l�UNRISD repose sur lepostulat que les réformes des institu-tions en Asie orientale doivent s�appuyersur une reconnaissance des échecs dupassé et sur l�acquis d�une industriali-sation réussie, qui a bien fonctionnélorsque les conditions étaient favorables.Le changement, pour être durable, doitvenir de l�intérieur et les besoins, éta-blis à partir des usages présents et pas-sés. Il est probable que les institutionsde l�Asie orientale changeront en évo-luant dans le droit fil de ce qui a existéplutôt qu�en appliquant les remèdesque leur aura imposés l�Occident.

Les études commandées pour ce projet,qui ont servi de base aux discussionsde la conférence, seront rassembléesdans un volume qui devrait intéresserles universitaires autant que les déci-deurs de l�Asie orientale et les institu-tions financières internationales. Laconférence a été financée par la Fon-dation Rockefeller et le budget centralde l�UNRISD (lui-même assuré par lesgouvernements du Danemark, de laFinlande, du Mexique, de la Norvège,des Pays-Bas, du Royaume-Uni, de laSuède et de la Suisse).

Les réformes néolibéralesvont-elles amener l�Etat à se

charger de la protection socialepour en décharger le secteur

privé? Va-t-on voir apparaîtredes Etats-providence keynésiens

en Asie orientale? Si oui, quelpourrait être le rôle nouveau,dans cette sphère politique

élargie, des travailleurset d�autres acteurs?

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printemps/été 200026UNRISD Infos No. 22

DANS LE MONDE

L�UNRISD etl�Expo 2000Dialogue mondial 4 � La lutte contrela pauvreté: Innovations sociales etalliances nouvelles, Exposition univer-selle, Hanovre, Allemagne, 25�27 juillet.Ce Dialogue mondial 4, coparrainé parl�UNRISD à l�Exposition universelle deHanovre, a duré trois jours et a permis detraiter des sujets suivants:� la responsabilité sociale et les relations

économiques, commerciales et finan-cières à l�heure de la mondialisation;

� les nouvelles alliances pour la paix,les droits de l�homme et un mondesans violence;

� la culture, comme richesse pour lespauvres et dimension négligée dudéveloppement durable;

� la lente prise de pouvoir et d�influencedes populations pauvres;

� les meilleures pratiques: initiativesd�entreprises allant dans le sens d�uneplus grande responsabilité sociale;initiatives citoyennes en faveur de lapaix et d�un monde sans violence;savoir traditionnel et gestion desressources naturelles;

� autonomisation et nouvelles formesde coopération; et

� comment infléchir en faveur despauvres les programmes d�ajustementstructurel, les politiques nationales et lagestion gouvernementale de l�économie.

Pour toute information, s�adresser à:Marc Beckmann, Deutsche Gesellschaftfür Technische Zusammenarbeit (GTZ),Büro EXPO 2000, Postfach 5180,65726 Eschborn, Allemagne.Tél: (49 6196) 797316Fax: (49 6196) 797369

L�UNRISD etDevelopmentand ChangeGendered Poverty and Well-being,(Pauvreté et bien-être selon le sexe),publié sous la direction de Shahra Razavi,numéro spécial, Vol. 30, No. 3 de Develop-ment and Change, ISSN 0012-155X, juillet1999. Les articles publiés dans ce numérospécial (pour la table des matières, voirpage 13) ont été initialement présentéslors d�un atelier organisé conjointementen Inde par l�UNRISD et le Centre forDevelopment Studies en 1997.Pour toute information, s�adresser à:Blackwell Publishers Journals,

P.O. Box 805, 108 Cowley Road, Oxford,OX4 1FH, Royaume-Uni. Tél: (44 1865)24408, Fax: (44 1865) 381381Courrier électronique:[email protected]: http://www.blackwellpublishers.co.uk

Autres horizonsGeneva 2000. La documentation de laVingt-Quatrième Session extraordinairede l�Assemblée générale, �Sommet mondialpour le développement social et au-delà:Le développement social pour tous à l�heurede la mondialisation�, est accessible enanglais sur le site Internet du Départementdes affaires économiques et sociales desNations Unies. Elle comprend les docu-ments suivants: Ière partie: Projet dedéclaration politique; IIème partie: Bilande la mise en oeuvre du Sommet social;IIIème partie: Nouvelles actions etinitiatives tendant à honorer lesengagements pris au Sommet.Web: http://www.un.org/esa/socdev/geneva2000/index.html

Building a World Community: Globalisationand the Common Good, (La constructiond�une communauté mondiale: Mondiali-sation et bien commun), publié sous ladirection de Jacques Baudot, Ministèreroyal danois des Affaires étrangères, ISBN87-7265-923-8, juin 2000, 272 pages.En mars 1995, le Danemark accueillait leSommet mondial pour le développementsocial. La conférence adoptait la Déclarationde Copenhague sur le développement social,dans laquelle les gouvernements s�enga-geaient à axer leurs efforts sur l�éliminationde la pauvreté, la promotion du plein emploi,de la stabilité et de la justice sociales. Pourcontribuer à la réalisation de ces objectifs,le Gouvernement danois a organisé lesséminaires de Copenhague pour le progrèssocial. Cet ouvrage présente une synthèsedes travaux de ces séminaires. Les chapitress�intitulent: Les dimensions de la démocratiemondiale; Des économies propres à répondreaux besoins et aux aspirations de l�homme;Une culture politique humaniste; Des forcessociales aux ambitions mondiales; et Desinstitutions pour la défense du bien commun.L�ouvrage comprend en outre des contribu-tions de Richard Falk, Peter Marris, SaadNagi, Deepak Nayyar, Ignacy Sachs, NafisSadik, Peter Townsend et Tu Weiming.Pour toute information, s�adresser au:Ministère royal danois des Affaires étrangères,Département de l�information, AsiatiskPlads 2, 1448 Copenhague K, Danemark.Tél: (45) 33920000, Fax: (45) 32540533Courrier électronique: [email protected]:http://www.copenhagenseminars.dk

Development, Vol. 43, No. 2, juin 2000,publié par la Société internationale pourle développement. Le numéro de la revue,intitulé �Commitments and Challenges:Reviewing Social Development� (Engage-ments et défis: Bilan du développementsocial), est paru à l�occasion de l�évaluationcinq ans après du Sommet mondial pourle développement social à Genève. Lesarticles portent sur l�emploi, la pauvreté, laparité des sexes, la sécurité alimentaire, lesfinances, la dette et la santé. Parmi les thèmescommuns à tous les articles, citons la nécessitéd�un développement centré sur la personne,d�importantes réformes institutionnelles etd�une participation plus judicieuse de tousles acteurs. Les auteurs semblent tous penserqu�il n�est plus possible de prétendre que ledéveloppement social passe par l�ajustementstructurel, la croissance économique et lamondialisation et reconnaissent presque tousque le développement social est lié à la culture,à l�histoire, aux attentes politiques, à l�ethnieet au sexe des populations concernées.Pour toute information, s�adresser à: WendyHarcourt, rédactrice, Société internationalepour le développement, 207 via Panisperna,00184, Rome, Italie. Fax: (39 06) 4872170Courrier électronique: [email protected]

Gender in the 21st Century (La parité dessexes au 21ème Siècle), publié sous la direc-tion de Caroline Sweetman, série Focus onGender de l�Oxfam, ISBN 0-85598-4297,2000, 119 pages, £7.95/$12.95. Cet ouvrage,qui se place dans la perspective des spécialistesdu développement et de la parité des sexes,examine les problèmes que rencontrent cesspécialistes et les décideurs au 21ème Siècle.Malgré certaines réussites, les femmes con-tinuent à vivre dans la misère dans de nom-breux pays, sans avoir de quoi se nourrirconvenablement, privées d�eau potable,d�instruction et de soins médicaux. A uneépoque où la mondialisation des entreprises,de l�industrie et des technologies de commu-nication entraîne partout des changementsprofonds, les femmes sont encore économi-quement, politiquement et socialementlaissées pour compte à l�échelle mondiale.Qui décide des règles de cette �société sansEtat� et en quoi les hommes et les femmesqui vivent dans la pauvreté les remettent-ilsen cause? Quelles autres questions se posentles personnes travaillant dans le domainedu développement et de la parité?Pour toute information, s�adresser à:Bournemouth Book Centre, P.O. Box 1496,Parkstone, Dorset BH12 3YD, Royaume-Uni.Tél: (44 1202) 712933, Fax: (44 1202) 712930Courrier électronique: bebc@ bebc.co.ukAux Etats-Unis, s�adresser à:Stylus Publishing LLC, P.O. Box 605,Herndon, VA, 20172-0605.Tél: (1 703) 6611581Fax: (1 703) 6611547Courrier électronique: [email protected]

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printemps/été 2000UNRISD Infos No. 22 27

DANS LE MONDE

L�UNRISD est une institution auto-nome qui entreprend des recherchesmulti-disciplinaires sur les dimensionssociales de problèmes contemporainsdu développement. L�Institut est guidédans son travail par la conviction qu�ilest indispensable de bien comprendrele contexte social et politique pour dé-finir des politiques efficaces de déve-loppement. L�Institut tente donc dedonner aux gouvernements, aux orga-nismes de développement, aux organi-sations de base et aux universitaires, lesmoyens de mieux comprendre com-ment les processus et les politiques dedéveloppement affectent divers grou-pes sociaux. Travaillant par l�intermé-diaire d�un vaste réseau de centresnationaux de recherche, l�UNRISD viseà encourager une recherche originaleet à renforcer la capacité de recherchedes pays en développement.

L�UNRISD remercie les principauxdonateurs à son budget général�leDanemark, la Finlande, le Mexique, laNorvège, les Pays-Bas, le Royaume-Uni, la Suède et la Suisse�du soutienqu�ils apportent à ses activités.

UNRISDPalais des Nations1211 Genève 10, SuisseCourrier électronique: [email protected]: http://www.unrisd.org

Comité de rédaction:Jenifer Freedman et Rosemary MaxConseillère: Cynthia Hewitt de AlcántaraTraduction de l�anglais: Martine CullotCorrection d�épreuves: Véronique MartinezMise en page: Pamela Smaridge

Les opinions exprimées dans les arti-cles signés sont celles du/des auteur(s).Leur publication ne reflète pas néces-sairement le point de vue de l�UNRISD.

Imprimé sur papier recyclé.

Development, NGOs and Civil Society(Développement, ONG et société civile),Development in Practice Reader de l�Oxfam,ISBN 0-85598-442-2, 2000, 208 pages,£9.50/$15.95. Les dépenses publiquesayant diminué dans de nombreuses régionsdu monde, le secteur non gouvernementala beaucoup gagné en acceptant de jouer lerôle de prestataire de services. En mêmetemps, les ONG en tant que représentantesde la société civile sont, pour les institutionspubliques, un moyen commode de favoriserle pluralisme politique. Mais les ONG peuvent-elles à la fois favoriser la démission desgouvernements dans le domaine de laprestation de services essentiels pour touset prétendre représenter les pauvres et lesdéshérités? Les ONG sont-elles des acteurspolitiques légitimes en soi? Cet ouvrage nouslivre une étude approfondie de ces questions.Pour toute information, s�adresser à:Bournemouth Book Centre; P.O. Box 1496,Parkstone, Dorset BH12 3YD, Royaume-Uni.Tél: (44 1202) 712933, Fax: (44 1202) 712930Courrier électronique: [email protected] Etats-Unis, s�adresser à:Stylus Publishing LLC, P.O. Box 605,Herndon, VA, 20172-0605.Tél: (1 703) 6611581, Fax: (1 703) 6611547Courrier électronique: [email protected]

Poverty, Social Welfare and SocialDevelopment: Challenges for the 21stCentury (Pauvreté, action sociale etdéveloppement social: Les défis du 21èmeSiècle). La 29ème Conférence internationalede l�action sociale, organisée par le Conseilinternational de l�action sociale (ICSW), setiendra du 23 au 27 octobre 2000 au Cap(Afrique du Sud). Cette conférence se com-posera de séances plénières, de symposiumset d�ateliers qui se pencheront sur desquestions d�intérêt international touchantà la sécurité sociale et au développementsocial. Plus de 50 ateliers sont prévus. Ilsauront pour thèmes: le financement dudéveloppement social; terre, environnementet pauvreté; régionalisme et développementsocial; femmes et pauvreté; droits écono-miques, sociaux et culturels; le VIH/SIDA;privatisation et action sociale; les filets desécurité sociale; travail et bien-être; cor-ruption et justice sociale; le développementcommunautaire; problèmes liés aux handi-capés et soins aux personnes âgées. Pouranimer un atelier ou recevoir de plusamples informations, visitez le siteInternet de l�ICSW: http://www.icsw.org.Pour toute information, s�adresser auSecrétariat de la Conférence.Tél: (27 21) 7628606, Fax: (27 21) 7628600Courrier électronique: [email protected]

Market Power in Agricultural Markets: SomeIssues for Developing Countries (Le pouvoirdu marché sur les marchés agricoles:Quelques enjeux pour les pays en dévelop-

pement), de Sophia Murphy, Trade-RelatedAgenda, Development and Equity WorkingPaper No. 6, Centre du Sud, novembre1999, 29 pages. Cette étude signale certainesdes omissions de l�accord sur l�agriculturede l�Uruguay Round/de l�Organisationmondiale du commerce, en particulier lerôle des sociétés multinationales. Les faitsexposés amènent à s�interroger sur certainsdes postulats de l�accord, à commencer parle modèle théorique de la concurrencemondiale sur lequel il repose. L�auteursoulève des questions fondamentales surl�orientation future des négociations. Ellesouligne la nécessité de soumettre l�accordsur l�agriculture à un examen détaillé, en seplaçant en particulier dans la perspective dudéveloppement. Enfin, elle laisse entendrequ�il faudrait traiter de l�agriculture soustous ses aspects, dans le cadre général desNations Unies, parce que les rapports entreagriculture, sécurité alimentaire et dévelop-pement vont bien au-delà du mandat del�OMC et touchent à de nombreux aspectsde la vie et de la société humaines.Pour toute information, s�adresser au:Centre du Sud, 17 Chemin du Champ-d�Anier,1211 Genève 19, Suisse.Tél: (41 22) 7918050, Fax: (41 22) 7988531Courrier électronique: [email protected]: http://www.southcentre.orgEn Tanzanie, s�adresser à: South Centre,P.O. Box 71000, Dar es Salaam.Tél: (255 51) 113431, Fax: (255 51) 112790

Green Politics (La politique du vert),publié en Inde par le Centre for Scienceand Environment (CSE), 1999, sous ladirection d�Anil Agarwal, Sunita Narainet Anju Sharma. Il s�agit là du premierrapport paru dans la nouvelle série duCSE consacrée aux négociations mondialessur l�environnement. Il analyse d�importan-tes conventions et institutions relatives àl�environnement et démystifie les politiquesde �sauvetage de l�environnement�. L�ouvrageexamine les politiques consacrées à l�environ-nement respectives des pays riches et despays pauvres et montre comment laposition d�un pays influence celle desautres. Il brosse un tableau complet, vudu Sud, des répercussions qu�a sur la viedes populations la façon dont est gérél�environnement mondial, et prendl�information comme point de départd�une meilleure entente entre les gouverne-ments du Nord et du Sud et la société civile.Pour toute information, s�adresser à:CSE, 41 Tughlakabad Institutional Area,New Delhi 110 062, Inde.Tél: (91 11) 6081110, Fax: (91 11) 608587Courrier électronique: [email protected]: http://www.cseindia.org

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LE DERNIER MOT

Printed in Switzerland ISSN 1020-6833GE.00-03546-November 2000-1,600 UNRISD/NEWS/22/00/1

Les résultats de la session extraordinaire de l�Assemblée géné-rale des Nations Unies consacrée au développement social (26�

30 juin 2000, Genève) ont été très appréciables. Plus de 5000 per-sonnes ont assisté à la conférence et les délégations des 160 paysreprésentés, conduites le plus souvent par des ministres, regroupaient2000 participants. Dix-neuf chefs d�Etat ou de gouvernement sontvenus à Genève à cette occasion. Tandis que les chefs de délégation,pendant les cinq jours, prenaient la parole ou assistaient au remar-quable Geneva 2000 Forum, leurs collègues achevaient de négocierle texte de la Déclaration de Genève. Après un vibrant manifestepolitique sur l�importance de la justice sociale et de sociétés pluséquitables, plaçant les êtres humains au centre de leurs préoccupa-tions, la Déclaration retrace l�évolution suivie depuis le Sommetmondial pour le développement social, tenu à Copenhague en 1995,et consacre quelque 160 paragraphes à des initiatives nouvelles.

La plus importante de ces initiatives est peut-être celle qui consisteà réclamer �une analyse rigoureuse des avantages, inconvénients etautres conséquences des propositions relatives à l�exploitation desources nouvelles et novatrices, publiques et privées, pour financerle développement social et des programmes d�élimination de la pau-vreté�. Autrement dit, une étude (approuvée sans objection par lesEtats membres des Nations Unies) doit être effectuée sur une éven-tuelle taxe sur les transactions monétaires�la taxe Tobin�et surd�autres sources de revenu susceptibles de financer le développe-ment social. La délégation canadienne, qui s�exprimait aussi au nomde la Norvège, a répété lors de la séance plénière finale que l�inten-tion de ce paragraphe était de faire procéder à une étude de ce type.

Il est juste de signaler cette décision parmi beaucoup d�autres parcequ�elle pourrait préluder à une gestion publique plus efficace dusystème financier international. L�étude pourrait proposer d�autresmoyens de lever les fonds nécessaires au financement de l�éduca-tion et des services de santé, de l�infrastructure et des crédits desti-nés à stimuler le développement socio-économique. Ce paragraphen�est pas le seul à insister sur l�importance de réduire l�instabilitéfinancière et de mieux gérer les crises par l�octroi de moratoirestemporaires aux débiteurs lorsque des hémorragies de capitauxmenacent de se produire et par la protection des dépenses consa-crées aux services sociaux en période de crise.

Pour la première fois, les participants se sont entendus sur un ob-jectif mondial de lutte contre la pauvreté: réduire de moitié d�ici à2015 la proportion des personnes vivant dans une misère extrême.Par là, on entend implicitement tous ceux qui vivent avec un re-venu inférieur à un dollar par jour, soit 1,2 milliard d�individusselon les estimations. La décision a été prise de lancer une campa-gne mondiale pour orchestrer la lutte contre la pauvreté. Un forummondial de l�emploi donnera l�année prochaine le coup d�envoi àl�élaboration par l�Organisation mondiale du travail d�une straté-gie internationale de l�emploi.

Ce n�est là qu�un échantillon parmi quelque 40 initiatives origina-les et ambitieuses ou actions approuvées par la communauté inter-

nationale et énumérées dans la Déclaration. Citons quelques autrespoints d�accord: les Etats ont reconnu que l�éducation fondamen-tale pour tous d�ici à 2015, qui est l�objectif fixé, allait coûter 8milliards de dollars par an; ils ont invité toutes les institutions desNations Unies à mieux intégrer les politiques de santé dans leursprogrammes; ils se sont entendus pour améliorer, par le biais d�ac-cords commerciaux et de meilleures incitations à la recherche, l�ac-cès des pays en développement à des produits pharmaceutiquesabordables et efficaces; ils ont exprimé leur volonté de mieux dé-fendre les droits fondamentaux des travailleurs et d�assurer la pro-tection sociale des personnes et groupes vulnérables; ils ontrecommandé de fixer des objectifs nationaux et de redoubler d�ef-forts pour ralentir le rythme de contamination par le VIH/SIDA.Un long débat s�est conclu par un accord sur l�importance del��action positive� pour réaliser l�égalité entre hommes et femmes.Pour la première fois, la responsabilité sociale des entreprises a étéinscrite à l�ordre du jour international.

Il y a eu aussi des annonces concrètes. L�Irlande, par exemple, aannoncé qu�elle se préparait à augmenter son aide de manière àatteindre l�objectif de 0,7 pour cent du PNB; le Japon a annoncél�annulation des dettes des pays à faible revenu et l�Italie, une ini-tiative d�aide de plus de 100 millions de dollars.

Les décisions sont assez nombreuses pour qu�on puisse se réjouirdu résultat. Bien sûr, ce n�est pas suffisant; les formulations, soi-gneusement modulées, pèchent souvent par un excès de prudenceet beaucoup d�autres questions auraient dû être abordées. Maisl�on s�est entendu sur des tâches immenses et les gouvernements,les parlements, les institutions internationales, les entreprises, lessyndicats, les ONG et les personnes concernées ont tous fort à faire.

La mise en oeuvre dépend principalement des gouvernements, maisaussi beaucoup du système international. La Division des politi-ques sociales et du développement du Département des affaires éco-nomiques et sociales a déjà commencé à écrire à d�autres sectionsdu système des Nations Unies pour leur signaler les recommanda-tions qui les concernent. Les préparatifs de l�étude indépendantequi sera menée sur les nouvelles sources de financement sont encours. Il est probable qu�un groupe d�experts faisant autorité, re-présentatif des diverses régions, sera constitué et chargé de présen-ter un rapport avant la conférence des Nations Unies sur lefinancement du développement, prévue pour 2001. Le groupepourra inviter des gouvernements intéressés et des organisations dela société civile à présenter leurs conclusions. Le Programme desNations Unies pour le développement et d�autres organisations com-pétentes se sont mis à réfléchir à la façon de monter une campagnecontre la pauvreté dans le monde à partir des initiatives en cours.

John Langmore est directeur de la Division des politiques sociales

et du développement social, Département des affaires économiques

et sociales des Nations Unies.

Résultats de la session extraordinaireconsacrée au développement social

John Langmore