3

Click here to load reader

Diabète et cardiopathie hypokinétique, quand évoquer une cytopathie mitochondriale ?

Embed Size (px)

Citation preview

Page 1: Diabète et cardiopathie hypokinétique, quand évoquer une cytopathie mitochondriale ?

R

hsic©

M

A

iwCda©

K

krcMb

0d

Annales de Cardiologie et d’Angéiologie 60 (2011) 176–178

Fait clinique

Diabète et cardiopathie hypokinétique, quand évoquerune cytopathie mitochondriale ?

Diabetes and hypokinetic cardiopathy : When to consider mitochondrial disease?

C. Nozières a, V. Quillasi b, C. Mouly-Bertin a, V. Thomson c, E. Gachon-Lanier d, P. Lantelme a,∗a Service de cardiologie, hôpital de la Croix-Rousse, 69317 Lyon cedex 04, France

b Service de cardiologie, hôpital de Paray-le-Monial, boulevard Charmes, 71600 Paray-le-Monial, Francec Service de radiologie, hôpital de la Croix-Rousse, 69317 Lyon cedex 04, France

d Service de médecine interne, hôpital de l’Hôtel-Dieu, 1, place de l’Hôpital, 69288 Lyon cedex 02, France

Recu le 29 decembre 2009 ; accepté le 3 aout 2010Disponible sur Internet le 26 aout 2010

ésumé

L’association diabète et cardiopathie hypokinétique est fréquente. Nous rapportons une situation clinique de diabète associé à une cardiopathieypokinétique chez un homme de 40 ans, évocateurs d’un diabète mitochondrial. La présence de la mutation A3243G au niveau des leucocytesanguins a permis de confirmer le diagnostic. Les phénotypes de l’atteinte cardiaque sont variables, allant de l’hypertrophie ventriculaire gauchesolée et modérée à un aspect de cardiopathie hypertrophique évoluant vers une cardiopathie hypokinétique. Certains auteurs ont proposé leoenzyme Q comme traitement, afin d’améliorer la fraction d’éjection et l’insulino-sécrétion.

2010 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.

ots clés : Cardiopathie hypokinétique ; Diabète sucré ; Cytopathie mitochondriale ; Hypertrophie ventriculaire gauche ; Coenzyme Q

bstract

The association between diabetes mellitus and hypokinetic cardiomyopathy is frequent. We report a case of diabetes and hypokinetic cardiopathyn a 40-year-old man which led to the hypothesis of maternally inherited diabetes and deafness (MIDD) due to a mitochondrial disease. This diagnosisas confirmed by genetic testing which showed a DNA A3243G mutation in the mitochondria, the prevalence of which is 1–2% in diabetes mellitus.

ardiac abnormalities are frequent (18–34% of patients depending on the series) and the co-existence of left ventricular hypertrophy and systolicysfunction is suggestive of this disease. Some authors have proposed co-enzyme Q as a treatment to improve the left ventricular ejection fractionnd insulin secretion.

2010 Elsevier Masson SAS. All rights reserved.

ease;

1

ceh

eywords: Hypokinetic cardiomyopathy; Diabetes mellitus; Mitochondrial dis

La coexistence d’un diabète et d’une cardiopathie hypo-inétique est fréquente dans la pratique cardiologique. Nousapportons une situation clinique particulière de cytopathie mito-hondriale responsable d’un diabète et d’une atteinte cardiaque.ême rare, cette pathologie mérite d’être connue car elle peut

énéficier d’un traitement spécifique.

∗ Auteur correspondant.Adresse e-mail : [email protected] (P. Lantelme).

scetdi

003-3928/$ – see front matter © 2010 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.oi:10.1016/j.ancard.2010.08.003

Left ventricular hypertrophy; Co-enzyme Q

. Cas clinique

Il s’agit d’un homme de 40 ans, diabétique, chez qui uneardiopathie hypokinétique asymptomatique avait été misen évidence de facon fortuite lors d’une hospitalisation pourépatite à cytomégalovirus (CMV) deux mois auparavant. Danses antécédents marquants, on retenait une surdité bilatéraleongénitale et une hépatite B guérie. Outre le diabète, il

xistait comme autre facteur de risque cardio-vasculaire unabagisme (six à sept cigarettes roulées par jour). Il n’y avait pas’hypertension artérielle ni d’hypercholestérolémie connues etl n’y avait aucun argument en faveur d’un éthylisme chronique.
Page 2: Diabète et cardiopathie hypokinétique, quand évoquer une cytopathie mitochondriale ?

C. Nozières et al. / Annales de Cardiologie

Le

vanNaT

àq

abddgIrtdsa

d

raCLué

cmll

alaé

2

Cseadd5dOllMlpdp3vtE

Fig. 1. Échographie cardiaque. Vue apicale, quatre cavités.

e diabète avait été diagnostiqué deux ans auparavant lors d’unxamen systématique et était traité par Metformine.

Les données cliniques à sa prise en charge étaient les sui-antes : poids à 52 kg, taille à 1,60 m (IMC : 20,3 kg/m2), tensionrtérielle 110/85 mmHg. Aucun signe d’insuffisance cardiaque’etait retrouvé chez ce patient par ailleurs en stade I de laYHA. L’ECG était en rythme sinusal régulier autour de 80 bpm

vec des QRS fins mais des troubles de la repolarisation (ondesnégatives) en V4, V5, V6 et DII, aVF.L’hémoglobine glyquée était à 7,5 % et le cholestérol LDL

1,31 g/l. La créatininémie était normale à 76 micromol/l ainsiue les lactates sanguins à 1,7 mmol/l.

L’échographie cardiaque objectivait un ventricule gaucheux parois modérément épaissies, de fonction contractile glo-alement altérée (Fig. 1). Un aspect hyperéchogène et brillantu myocarde était noté. La coronarographie ne révélait pas’atteinte significative et la fraction d’éjection (Fe) ventriculaireauche mesurée en angiographie (OAD) était à 35 %. L’examenRM réalisé (Fig. 2) mettait en évidence, lors de l’étude duehaussement tardif après injection de gadolinium, une réten-ion du produit de contraste hétérogène, diffuse à l’ensembleu myocarde, sans prédominance sous-endocardique, tradui-ant une fibrose intramyocardique. La masse myocardique était

ugmentée à 124 g/m2 (N : 70–113 g/m2 avec cette technique).

Le bilan étiologique a été complété par la recherche d’une car-iomyopathie de surcharge : la ferritine était normale, la biopsie

Fig. 2. IRM, Réhausement tardif.

Lppmh

gAcpdpm

du[

et d’Angéiologie 60 (2011) 176–178 177

ectale ne mettait pas en évidence de signe d’amylose et il n’yvait pas de déficit en alphaglucosidase. Les sérologies EBV etMV étaient positives en IgG, signe d’une infection ancienne.a sérologie VIH était négative. Il n’y avait pas d’argument pourn diabète de type 1 : les anticorps anti-glutamate décarboxylasetaient négatifs, il n’y avait pas d’acétonurie.

Compte-tenu de l’association diabète-surdité, une atteinteardiaque dans le cadre d’un diabète mitochondrial a été finale-ent évoquée. Le diagnostic a été confirmé par la présence de

a mutation A3243G de l’ADN des mitochondries au niveau deseucocytes sanguins.

Le patient a été traité pendant deux ans par coenzyme Q, enssociation avec un traitement conventionnel par inhibiteur de’enzyme de conversion. Une nouvelle IRM a été réalisée, sansmélioration de la fonction cardiaque. L’équilibre du diabètetait optimal au prix de l’ajout d’un sulfamide hypoglycémiant.

. Discussion

L’association diabète et cardiomyopathie est fréquente.ependant, l’âge de survenue, l’absence de surpoids ou de

ignes évocateurs d’insulinopénie, associés à une surdité, étaientn faveur d’un diabète par cytopathie mitochondriale [1]. Cestteintes sont dues à une mutation de l’ADN mitochondrial,ont la plus fréquente est la substitution A3243G, responsableu mitochondrial inheritance diabetes and deafness, OMIM20000 (MIDD), ou dans sa forme la plus grave du mitochon-rial encephalopathy, lactic acidosis and stroke-like episode,MIM 54 000 (MELAS) [1]. Toutes les mitochondries de

’organisme ne sont pas porteuses de la mutation, ce qui explique’hétérogénéité clinique de ces maladies [1]. La fréquence du

IDD est de 1 à 2 % des diabètes sucrés selon les ethnies etes séries [2]. Il survient chez des patients plus minces et plusetits que la population témoin, a fortiori qu’une population deiabétiques de type 2 [2]. Une atteinte cardiaque est présente enroportion variable selon les séries : de 18 à 34 % des patients [2],0,4 % dans la série japonaise de Suzuki et al. [3]. L’hypertrophieentriculaire gauche (HVG) est une des caractéristiques essen-ielles de l’atteinte cardiaque associée à la mutation A3243G [4].lle est retrouvée chez 33 % des patients atteints de MIDD [4].’épaisseur du septum interventriculaire, mesurée en échogra-hie serait cependant significativement plus importante chez lesatients atteints de MIDD que ceux non atteints mais insuffisam-ent marquée pour conduire au diagnostic de myocardiopathie

ypertrophique[4].L’association HVG et dysfonction systolique ventriculaire

auche (DSVG) semble être fortement liée à la mutation3243G [5]. Ainsi, chez les patients atteints de MELAS, la

ardiomyopathie est caractérisée par une HVG d’aggravationrogressive, parallèlement à une dilatation et une détérioratione la Fe [5]. La prévalence de la DSVG semble moins élevéearmi les patients porteurs d’un phénotype moins sévère de lautation sous la forme d’un MIDD [4].

L’existence de trouble de conduction est notée pour 26,8 %

es patients dans la série de Suzuki [3], les plus fréquents étantn syndrome de Wolff-Parkinson-White, et une maladie du sinus3], associés à des cas de morts subites.

Page 3: Diabète et cardiopathie hypokinétique, quand évoquer une cytopathie mitochondriale ?

1 logie

ddcàm

3

da(éz

C

R

[

[

[

[

[

78 C. Nozières et al. / Annales de Cardio

La metformine n’est pas indiqué en traitement de ce type deiabète, compte tenu du risque d’acidose lactique. L’évolutione la maladie semble pouvoir être ralentie par l’adjonction deoenzyme Q [6], qui pour certain auteurs, diminuerait le recoursl’insulinothérapie et améliorerait la fonction contractile duyocarde [6].

. Conclusion

Devant la présence d’une dilatation associée à une altératione la FEVG associée à une hypertrophie gauche inhabituelle,fortiori dans un contexte de diabète de présentation atypique

surdité), le diagnostic de cytopathie mitochondriale doit êtrevoqué. Le diagnostic est génétique et un traitement par coen-yme Q peut être proposé si le diagnostic est confirmé.

onflit d’intérêt

Aucun.

[

et d’Angéiologie 60 (2011) 176–178

éférences

1] Aure K, Jardel C, Lombes A. Mitochondrial diseases: molecular mecha-nisms, clinical presentations and diagnosis investigations. Ann Pathol2005;25(4):270–81.

2] Guillausseau PJ, Massin P, Bellane-Chantelot C, Timsit J. Diabètes par ano-malies du génome mitochondrial. In: Encyclopédie médico-chirurgicale.Paris, Endocrinologie-Nutrition: Elsevier SAS; 2005 [10366D-25].

3] Suzuki S, Oka Y, Kadowaki T, Kanatsuka A, Kuzuya T, KobayashiM, et al. Clinical features of diabetes mellitus with the mitochon-drial DNA 3243 (A-G) mutation in Japanese: maternal inheritance andmitochondria-related complications. Diabetes Res Clin Pract 2003;59(3):207–17.

4] Momiyama Y, Suzuki Y, Ohsuzu F, Atsumi Y, Matsuoka K, Kimura M. Leftventricular hypertrophy and diastolic dysfunction in mitochondrial diabetes.Diabetes Care 2001;24(3):604–5.

5] Ueno H, Shiotani H. Cardiac abnormalities in diabetic patients withmutation in the mitochondrial tRNA(Leu(UUR)) gene. Jpn Circ J

1999;63(11):877–80.

6] Salles JE, Moises VA, Almeida DR, Chacra AR, Moises RS. Myocardialdysfunction in mitochondrial diabetes treated with coenzyme Q10. DiabetesRes Clin Pract 2006;72(1):100–3.