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Rev. Fr. Transfus. H6mobiol., 1993, 36, 499-507 499 MEMOIRE ORIGINAL Diminution du risque d'h6patite C post-transfusionnelle chez les patients soumis une allogreffe de moelle osseuse par F. Norol*, B. Roche**, M.F. Saint Marc Girardin**, M. Kuentz***, L. Desforges****, C. Cordonnier***, N. Duedari*, J.P. Vernant**** * CDTS du Val-de-Marne. D6partement d'H6patologie, H6pital H.-Mondor. *** Unit6 de Transplantation m6dullaire, H6pital H.-Mondor. **** Laboratoire de Virologie, H6pital H.-Mondor. RESUME L'incidence de l'hdpatite C post-transfusionnelle a dt~ dtudide chez une cohorte de patients allogreff~s de moelle osseuse. Le risque de sdroconversion HCV a dtd dvalud relativement ~ la date de la greffe et aux tests de d~pistage rdalisds chez les donneurs de sang ?~ cette pdriode. Les anticorps anti-HCV (anti-HCV) ont dt~ d~pistds ~ l' aide de tests Elisa de deuxidme g~ndration et confirm~s par des tests Riba de deuxidme gdn~ration. Les bilans hdpatiques ont ~t~ analysds. Sur 181 patients consdcutifs, allogreff~s de janvier 1987 ~ ddcembre 1991, 120 anti-HCV ndgatifs avant greffe et ayant au moins 6 mois de suivi postgreffe ont dtd consid~r~s dvaluables en terme de s~roconversion HCV. Tous ces patients avaient refu des produits sanguins ddleucocyt~s et la plupart d'entre eux des concentr~s unitaires de plaquettes. Avant Ia mise en place des tests de ddpistage pour l'h~patite non-A, non-B, 14 % des Tir~s ~ part : Dr F. Norol, Centre d6partemental de Transfusion sanguine du Val-de-Marne, 51, avenue du Mar6chal-de-Lattre-de-Tassigny, 94010 Cr6teil Cedex.

Diminution du risque d'hépatite C post-transfusionnelle chez les patients soumis à une allogreffe de moelle osseuse

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Rev. Fr. Transfus. H6mobiol., 1993, 36, 499-507 499

MEMOIRE ORIGINAL

Diminution du risque d'h6patite C post-transfusionnelle chez

les patients soumis une allogreffe de moelle osseuse

par F. Norol* , B. Roche**, M.F . Saint Marc Girardin**, M. Kuentz***, L. Desforges****, C. Cordonnier***,

N. Duedar i* , J.P. Vernant****

* CDTS du Val-de-Marne. D6par tement d 'H6patologie, H6pital H.-Mondor.

*** Unit6 de Transplantat ion m6dullaire, H6pital H.-Mondor.

**** Laboratoire de Virologie, H6pital H.-Mondor.

RESUME

L'incidence de l'hdpatite C post-transfusionnelle a dt~ dtudide chez une cohorte de patients allogreff~s de moelle osseuse. Le risque de sdroconversion HCV a dtd dvalud relativement ~ la date de la greffe et aux tests de d~pistage rdalisds chez les donneurs de sang ?~ cette pdriode. Les anticorps anti-HCV (anti-HCV) ont dt~ d~pistds ~ l' aide de tests Elisa de deuxidme g~ndration et confirm~s par des tests Riba de deuxidme gdn~ration. Les bilans hdpatiques ont ~t~ analysds. Sur 181 patients consdcutifs, allogreff~s de janvier 1987 ~ ddcembre 1991, 120 anti-HCV ndgatifs avant greffe et ayant au moins 6 mois de suivi postgreffe ont dtd consid~r~s dvaluables en terme de s~roconversion HCV. Tous ces patients avaient refu des produits sanguins ddleucocyt~s et la plupart d'entre eux des concentr~s unitaires de plaquettes. Avant Ia mise en place des tests de ddpistage pour l'h~patite non-A, non-B, 14 % des

Tir~s ~ part : Dr F. Norol, Centre d6partemental de Transfusion sanguine du Val-de-Marne, 51, avenue du Mar6chal-de-Lattre-de-Tassigny, 94010 Cr6teil Cedex.

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patients avaient s~roconverti (0,44 % par produit transfuse); apr~s l'introduction de la recherche des marqueurs indirects [dosage de l'alanine amino-transf~rase (ALT) et d~pistage des anticorps dirig~s contre l'antig~ne du core du virus de l'h~patite B (anti-HBc)] l'incidence de s~roconversion dtait de 4 % (0,26 % par produit). Le risque actuel, depuis Ia mise en place du d~pistage de l' anti-HCV est de 1,6 % (0,03 % par produit transfusE). 6 patients sur 7 ayant s~roconverti ont d~velopp~ une h~patite chronique.

SUMMARY

Reduction of the post-transfusion hepatitis C risk in patients with bone marrow allograft.

Post-transfusion hepatitis C incidence was studied in a series of patients with bone marrow allografl. The risk of HCV seroconversion was evaluated according to the date of grafting and the screening tests carried out in blood donors at this time. Anti-HCV antibodies were screened using Elisa tests of 2d generation and confirmed by Riba tests of 2d generation. Results were analysed. Out of 181 alIografted patients from January 1987 to December 1991, 120 patients found anti-HCV negative prior to grafting, with at least six month post-transfusion follow-up were considered as evaluable in terms of HCV seroconversion.

All these patients had received leucodepleted blood products and the most of them platelet unit concentrates.

Prior to implementation of screening tests for non-A, non-B hepati- tis, 14 % of patients had seroconverted (0, 44 % per transfused product) ; after introduction of the screening [or indirect markers (ALAT) and [or antibodies directed against the antigen of hepatitis B virus core (anti- HBc), the seroconversion incidence was 4 % (0,26 % per product). At the present time, since the implementation of anti-HCV screening tests, the risk has reached 1,6 % (0,03 % per transfused product). 6 patients out of 7 having seroconverted have been developing chronic hepatitis.

INTRODUCTION

L'h6patite non-A, non-B a 4t6 pendant de nombreuses ann6es la complication infectieuse la plus fr6quente de la transfusion [4]. En l'absence d'un agent ~tiologique identifi6, la recherche des marqueurs indirects, comportant le dosage de l'alanine amino-transf6rase (ALT) et la recherche des anticorps dirig6s contre l'antig6ne du core du virus de l'h6patite B (anti-HBc) a 6t6 r4alis6e chez les donneurs de sang [1, 17]. Le clonage mol6culaire du RNA du virus de l'h6patite non-A, non-B et la production de prot6ines recombinantes comme source d'antig6ne du virus, nomm4 virus de l'h4patite C (HCV) [5], ont permis le dfveloppe-

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DIMINUTION DU RISQUE D'HEPATITE C POST-TRANSFUSIONNELLE 501

ment de tests de d6pistage des anticorps anti-HCV et une d6termination plus pr6cise de l'incidence de l'h6patite C [2, 12].

Les pafiems soumis / tune allogreffe de moelle osseuse (MO) sont parficuli~rement/t risque de maladies infectieuses transmises par trans- fusion, du fait de l'importance de leurs besoins transfusionnels et de l'immuno-suppression secondaire au traitement. Nous avons entrepris cette ~tude pour ~valuer l'efficacit~ des tests de dSpistage successifs effectu6s chez les donneurs de sang, marqueurs indirects de l'h6patite non-A, non-B puis anticorps anti-HCV, sur l'incidence de l'h~patite C post-transfusionneUe, chez une cohorte de patients allogreff6s de moelle O S S e U S e .

PATIENTS ET METHODES

Un total de 181 patients cons6cutifs, soumis h une allogreffe de moelle osseuse entre janvier 1987 et d6cembre 1991 ont 6t6 analys6s de malli6re r6trospective en refine d'hfpatite C post-transfusiolmeUe. 61 patients ont 6t6 exclus de l'6tude : 7 patients avaient des anticorps anfi-HCV d6tectables avant greffe et 54 avaient moins de 6 mois de suivi postgreffe. Ces derniers ont 6t6 consid6r6s non 6valuables compte tenu des d61ais parfois longs requis pour que les anticorps anti-HCV soient d6tectables [3] et la cin6tique de reconstitution de l'immunit6 ~t m6dia- fion celiulaire B apr~s greffe de MO [13]. Les 120 patients restants ont 6t6 stratifi6s en 3 groupes en fonction des tests de d6pistage qui 6taiem prafiqufs chez les dolmeurs de sang/t la date de la greffe. Le premier groupe inclualt 36 patients soumis h une allogreffe de MO de janvier 1987

d6cembre 1988, ~ une p6riode off aucun test de d6pistage de l'h6patite non-A, non-B n'6tait pratiqu6. Le second groupe comprenait 22 patients allogreff6s de MO de janvier 1989 h d6cembre 1989 ;/~ cette p6riode, les marqueurs indirects de l'h6patite non-A, non B, taux d'alanine amino- transf6rase sup6rieur h deux lois la limite sup6rieure de la normale et pr6sence d'anticorps anti-HBc, 6talent recherch6s chez les donneurs de sang. Le troisi6me groupe comprenait 62 patients soumis h une allogreffe de MO de j anvier 1990 h d6cembre 1991 ; outre les marqueurs indirects, les produits sanguins 6taient 6galement test6s pour la pr6sence d'anti- corps anti-HCV. Les tests utilis6s 6taient des tests Elisa de premi6re g6n6ration jusqu'/~ avril 1991 et des tests de seconde g6n6ration secon- dairement. Les patients dans les trois groupes ont ~t6 analys6s en termes d'fige, de sexe, de maladies h6matologiques, de conditiolmement/t la greffe, de besoins transfusionnels et de statut HCV.

Proc6dures de transplantation

116 patients avaient re~u une greffe de MO provenant d'un donneur familial HLA identique, alors que 4 avaient 6t6 greff6s h partir d 'un

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dolmeur non apparent6. Le conditionnement ~ la greffe consistait en : 1) Cyclophosphamide 120 mg/kg plus irradiation corporelle totale (TBI) ou 2) Cyclophosphamide (120 ou 200 mg/kg) plus Busulfan (16 mg/kg) ou 3) en une TBI combin6e avec une chimioth6rapie Cyclophosphamide (60 mg/kg) plus VP16 (60 mg/kg) ou 4) TBI plus cytosine arabinoside (12 g/m 2) plus melphalan (140 mg/m 2) ou 5) TBI totale plus VP16 (400 mg/m 2) nitrosour6a (120 mg/m 2) et melphalan (110 rag/m2). Tous les patients avaient requ du m6thotrexate g J1, J3, et J6 et de la cyclosporine comme prophylaxie de la GVH. Tous les donneurs de moelle ont 6t6 test6s, prospectivement ou r6trospectivement, avec des tests Elisa de seconde g6n6ration et 6taient anti-HCV n6gatifs.

Donn6es transfusionnelles

Tous les patients avaient requ des produits sangnins d61eucocyt6s ; les concentr6s globulaires rouges 6taient d61eucocyt6s par filtration et les concentr6s plaquettaires par centrifugation. La plupart des patients avaient 6t6 transfus6s avec des concentr6s unitaires de plaquettes; certains d'entre eux avaient 6galement requ des concentr6s plaquettaires standards, particuli6rement dans les cas d'6tat r~fractaire aux transfu- sions de plaquettes d'origine non immunologique (MVO, GVH, etc.). Certains patients avaient aussi re~u des concentr6s granulocytaires selon les indications usuelles [8].

Recherche d'antieorps anti-HCV

Les anticorps anti-HCV ont 6t6 d6pist6s/~ l'aide de tests Elisa seconde g6n6ration (EL 2, Ortho diagnostic systems). Ces tests sont bas6s sur les polypeptides recombinants d6riv6s de I'HCV c100.3 et les prot6ines structurales c22.3 e t non structurales c200. Les s6rums initialement r6acfifs ou ind6termin6s ont 6t6 retest4s en double. Les s6rums positifs en Elisa ont 6t6 soumis/~ un test de confirmation Riba (Chiron*, Riba HCV test system, seconde ghn6ration). Un s6rum 6tait consid6r6 comme positif lorsque les anticorps anti-HCV 6taient d6tect6s sur au moins deux des trois tests Elisa et que le test de confirmation Riba 6tait positif. Les tests s4rologiques ont 6t6 r6alis6s star du s6rum frais ou des 6chantillons congel4s/t - 80 °. Ces tests ont 6t4 r6alis6s sur des s6rums pr61ev6s avant greffe et en moyenne 11 (6 ~ 54) mois aprbs greffe. Quand plusieurs 4chantillons 6taient disponibles, au moins deux tests anti-HCV ont 6t6 r6alis6s postgreffe, incluant en particulier le s6rum le plus tardif par rapport ~ la date de la greffe. Tousles patients avaient requ des immuno- globulines intraveineuses pendant une dur6e maximale de trois mois apr6s la greffe.

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DIMINUTION DU RISQUE D'HEPATITE C POST-TRANSFUSIONNELLE 503

Evaluation des fonctions h6patiques

Des bilans h6patiques avaient 6t6 r6alis6s chez tous les patients, comportant le dosage de la bilirubine, des phosphatases alcalines, des alanines et aspartates aminotransf6rases (ALT et AST) et le temps de prothrombine. Un taux de transaminases /~ plus de 2 fois la limite sup6rieure de la normale du laboratoire a 6t6 consid6r6 comme patholo- gique. Ces bilans avaient 6t6 effectu6s une fois par semaine jusqu'/~ la sortie de l'h6pital, puis une fois par mois pendant un an apr6s la greffe, puis au moins deux lois par an par la suite. Le diagnostic d'h6patite chronique a 6t6 port6 sur un taux 61ev6 d'ALT, avec ou sans fluctuation, retrouv6 sur plusieurs pr61~vemems successifs, pendant plus de 6 mois.

Les autres causes d'atteinte h6patique postgreffe (maladie veino- occlusive, maladie du greffon contre l'h6te, cytom6galovirus...) ont 6t6 diagnostiqu6es selon les critbres usuels.

Analyses statistiques

L'incidence de s6roconversion par patient et par unit6 transfus6e a 6t6 compar6e/t l'aide d'un test de CHI-2.

RESULTATS

Comme le montre le tableau I les patients analys6s dans les trois groupes 6taient comparables en termes d'hge moyen au moment de la greffe et de sexe; un pourcentage identique de patients avaient 6t6 greff6s pour une leuc6mie aigu~ lymphoblastique, une leuc6mie aigu~

Tableau I Donn~es cliniques et transfusionnelles relatives aux tests de ddpistage de l'h~patite NANB.

Sexe ratio Age (ann~es) Maladie h6matologique (%)

LAL LAM LMC Autres

Conditionnements EDX-TBI/Polychimioth6rapies- TBI/Chimioth6rapies Haute Dose

Donn6es transfftsionnelles Nombre total de produits trans- fus6s (CE/CUP/CPS/CUG)

Auctm d6pistage Marqueurs Marqueurs indirects indirects + HCV

n =36 n =22 n =62

16 F/20 M 29 (8-53)

25 26 24 25

(24/7/5)

1 136 (390/320/414/12)

12 F/10 M 27 (6-47)

13 23 23 41

(11/7/4)

625 (231/196/198/0)

33 F/29 M 29 (7-58)

23 27 22 28

(23/11/18)

4 367 (756/532/3070/9)

CE = Concentr6 Erythrocytaire CUP = Concentr6 Unitaire de Plaquettes CSP = Concentr6 Plaquettaire Standard CUG = Concentr6 Unitaire de Granulocytes

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my61o'ide, tree leuc6mie my61oide chronique ou une maladie h6matologi- que autre. Les conditionnements/~ la greffe 6taient 6galement compara- bles. Le nombre total de produits transfus6s dans le premier groupe de 36 patients 6tait de 1 136 dont 390 concentr6s 6rythrocytaires (CE), 320 concentr6s unitaires de plaquettes (CUP), 414 unit6s de concentr6s plaquettaires standards (CPS) et 12 concentr6s de granulocytes (CG), soit en moyenne 31 unit6s par patient. Les 22 patients darts le second groupe avaient requ 231 CE, 196 CUP et 198 CPS, c'est-g-dire tm total de 625 unitfs avec une moyenne de 28 unit6s par patient. Les 62 patients dans le troisi6me groupe avaient 6t6 transfus6s avec 756 CE, 532 CUP, 3070 CPS et 9 CG soit un total de 4367 unit6s et une moyenne de 70 unit6s par patient. Les valeurs plus 61ev6es par patient dans le troisibme groupe 6taient dues/~ des besoins transfusionnels massifs chez 4 patients allogref- f6s ayant requ une greffe de moelle provenant d ' un donneur non apparent6.

Cinq patients, soit 14,5 % des 36 patients qui avaient 6t6 allogreff6s avant la mise en place des tests de d6pistage pour l 'h6patite non-A, non-B ont s6roconverti ; un patient qui 6tait positif en Elisa mais Riba 2 ind6- terrain6 pour la prot6ine c100 n 'a pas 6t6 pris en cornpte Apr6s l'intro- duct ion des rnarqueurs indirects, 1 sur 22 patients a s6roconverti, soit une incidence de s6roconversion de 4 %. Une r6duction suppl6mentaire du risque de s6roconversion HCV /~ 1,6 % (1 sur 62 patients) a 6t6 obtenue apr6s l ' introduction des tests de d6pistage pour l 'anticorps anti-HCV. La diff6rence entre les groupes 1 et 3 est statistiquement significative (p = 0,05) (Tableau II), alors que celles entre les groupes 1 et 2 et les groupes 2 et 3 ne le sont pas.

Le tab leau I I I met en 6vidence l ' incidence de s6roconversion par unit6 transfus6e. Le risque de s6roconversion HCV h l 'heure actuelle est de 0,03 % par unit6. Ce risque est significativement r6duit par rappor t la pbriode pr6c6dente quand seule la recherche des marqueurs indirects 6tait pratiqu6e (0,26 %) et ceUe off aucun test de d6pistage n 'avait 6t6 mis en place (0,4 %), Le nombre de produits sanguins transfus6s chez les patients qui ont s6roconverti 6tait bas : les patients du groupe 1 avaient requ une moyenne de 19 produits sanguins chacun, alors que les deux patients contamin6s dans les deuxi6me et troisi6me groupes avaient requ respectivement 11 CE plus 9 CUP et 14 CE plus 10 CUP.

Tableau II Incidence de sdroconversion H C V par patient.

Type de dfpistage

Aueun

Marqueurs indirects

Marqueurs indirects et anti-HCV

Nombre de patients

36

22

62

Nombre de s6roconversions

5 ( 5-1 RIBA

ind6termin6) 1

* NS : non significatif.

Incidence de s6roconversion

1 4 %

4 % '[p =0,05

1,6% I)} NS*

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D I M I N U T I O N D U R I S Q U E D ' H E P A T I T E C P O S T - T R A N S F U S I O N N E L L E 5 0 5

Aucull

Marqueurs indirects

Marqueurs indirects et anti-HCV

Tableau III Incidence de sdroconversion HCV par unitd trans "usde.

Nombre Nombre de Incidence de d 'unit6s transffm6es S6roconversions S~roconversion

1 136

625

4 194

5 (+1 RIBA

ind6termin6) 1

0,44

0,16

0,023

NS*

p =0 ,002

NS*

* NS : non significatif.

Sur les 7 patients qui ont s6roconverti, 6 (86 %) ont d6velopp6 une h6patite chronique avec un suivi de 18 mois h 6 ans. Un patient a pr6sent6 une h6patite spontan6mem r6solutive avec un retour/~ la normale des ALT apr6s 11 mois d'6volufion. Le d61ai de s6roconversion HCV n'a pu 6tre d6termin6 avec pr6cision du fait de l'absence d'6chantillon s6rique disponible entre 6 et 12 mois : tousles patients ont s6roconverti entre 6 et 12 mois, except6 un qui a pr6sem6 une r6ponse retard6e g 17 mois. Chez 3 patients, la positivit6 en tests Elisa a pr6cSd~ de 3 h 9 mois une r6ponse d6tectable en tests Riba. Chez 3 patients, le diagnostic d'h6patite chronique a 6t6 confirm~ par la ponction biopsie h6patique. Aucun patient n'est d~c6d6 d'h6patite C.

DISCUSSION

Du fait de l 'importance de leurs besoins transfusionnels, les patients porteurs de maladies h6matologiques sont d 'un int6r~t particulier pour l'6valuation des risques infectieux li6s h la transfusion et leurs moyens de pr6vention. A la p6riode off aucun test de d6pistage de l'h6patite non A, non-B n'6tait r6alis6 chez les donneurs de sang, le risque de s6roconver- sion HCV 6tait de 14 %. Apr6s la raise en place de la recherche des marqueurs indirects ALT et anti-HBc, ce risque est tomb6 h 4 % et l'incidence actuelle, depuis que les produits sanguins sont 6galement test6s pour les anticorps anti-HCV, est de 1,6 %. Le risque de s6roconver- sion HCV durant ces trois p6riodes est plus ~lev6 que celui rapport6 par Donahue et coll. [7] dans une 6tude pr6alable, mais les besoins transfu- sionnels de nos patients 6taient plus 61ev6s que chez ceux analys6s dans cette 6tude. Si nous consid6rons l'incidence de s6roconversion par unit6 transfus6e, nos r6sultats sont similaires ~t ceux de Donahue, c'est-h-dire respectivement 0,44 et 0,45 % durant la premi6re p6riode, 0,26 et 0,19 % apr6s l'introduction des marqueurs indirects, et 0,03 % et 0,03 % depuis le d6pistage des anticorps anti-HCV. Ces r6sultats sont en accord avec une 6tude r6alis6e en France avec des tests Elisa de premi6re g6n6ration et qui comparait l'incidence de s6roconversion par patient et par unit6 transfus6e avant et apr~s la raise en place des tests indirects: ces incidences 6taient respectivement de 4,5 % et 0,41% avant et 0,8 % et

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506 N O R O L F. et coll.

0,14 % aprbs l'introduction de ces marqueurs indirects [11]. Des r6sul- tats comparables ont 6galement 6t6 rapport6s dans des 6tudes faites au Japon [10] et en Espagne [9]. L'incidence globale d'infecfion HCV chez nos patients 6tait plus faible que ceUe habituellement rapport6e chez des patients porteurs de maladies h6matologiques : Locasciulli rapporte une incidence de 48 % chez des enfants porteurs de leuc6mie, test6s avec des tests Elisa de premibre g6n6ration [15] et 28,6 % chez des patients soumis/: une allogreffe de moelle osseuse [14]. Ceci peut s'expliquer par le fait que nous n'avons pris en compte que des patiems transfus6s depuis 1987 h une p6riode off la connaissance du risque de contamination HIV post-transfusionnelle avait entrain6 l'introduction de nouveaux crit~res d'exclusion ainsi que la mise en place de tests de d6pistage des anticorps anti-HIV chez les donneurs de sang [4]. De plus, cette faible incidence est peut-~tre aussi li6e h la transfusion de produits sanguins d61eucocyt6s et dans la plupart des cas uniquement de concentr6s unitaires de plaquettes. Le nombre de produits sanguins transfus6s dans les 2 6tudes pr6cit6es n'est pas pr6cis6. Chez trois patients de cette 6tude, la positivit6 en tests Elisa avait pr6c6d6 de plusieurs mois celle en Riba, sugg6rant que les tests Elisa pourraient peut-btre 6tre pris en compte attssi bien que les Riba pour des diagnostics pr6coces des infections HCV chez les patients immunod6prim6s ; la cin6tique de la r6ponse s6rologique anx diff6rems antigbnes du test Riba 4 concordalt avec ce qui avait initialemem 6t6 rapport6 par Van der Poel [16]. La significativit6 de la d6tection des anticorps anti-HCV chez des patiems immunod6prim6s est discutable. Le taux d'ALT 6tait anormal chez 49 patients qui n'avaient pas s6roconverti et des causes possibles ont 6t6 identifi6es chez 38 d'entre eux (GVH, infection /: CMV, toxiqne, r6cidive de l'affection h6matologique). Les autres patients pr6sentent une 616vation mod6r6e des ALT sans grande fluctuation. La PBH r6alis6e chez 5 d'entre eux n'est pas contributive. I1 n'est pas exclu que certains cas d'h6patite chronique HCV n6gative puissent cependant 6tre rapport6s au virus de l'h6patite C mais sans qu'aucune r6ponse immune ne soit d6tectable, bien que nous ayons exig6 pour le d6pistage des anti-HCV un d61ai d 'au moins 6 mois aprbs la greffe, h une p6riode ou l'immunit6 h m6diat~on cellulaire Bes t , en principe, reconstitu6e [13] ; ceci pourrait 6tre explor6 par l'utilisation de la PCR. Par ailleurs, certains cas pourraient 6tre expliqu6s par une r6ponse anticorps transitoire h I'HCV. Enfin la possibilit6 que certalns de nos patients HCV n6gatifs et pr6sentant une atteinte h6patique chroniqne soient infect6s par un virus non-A non-B non-C ne peut 6tre exclue. N6anmoins, l'incidence de s6roconversion par unit6 transfus6e 6tait la m6me que celle rapport6e par Donahue chez des patients non immuno- d6prim6s et il est probable que la majorit6 des contaminations HCV chez nos patients a 6t6 d6tect6e.

En conclusion, cette 6tude montre que le risque actuel d'h6patite C post-transfusionnelle chez des patients soumis h une allogreffe de moelle osseuse en France est bas, que ce risque avait d6jh 6t6 r6duit grace h la recherche des marqueurs indirects de l'h6patite non-A, non-B chez les

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d o n n e u r s de sang et q u ' u n e r6duc t ion suppMmemai re a 6t6 observ6e depuis l ' i n t roducf ion des tests de d6pistage des ant icorps anti-HCV.

R E F E R E N C E S

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