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UNIVERSITE PANTHEON-ASSAS (PARIS II) Année universitaire 2014-2015 TRAVAUX DIRIGES - 2 ème année de Licence en Droit DROIT CIVIL Cours de Monsieur le Professeur Nicolas MOLFESSIS ___________________________________ Distribution : du 13 au 18 avril 2015 Dix-neuvième et vingtième Séances Responsabilité contractuelle et responsabilité délictuelle ------------------------------------ I. - Observations générales La présente séance implique une bonne assimilation de connaissances relevant de divers passages du cours, et ce au sujet des relations entre responsabilité contractuelle et responsabilité délictuelle. Relations qui doivent être bien comprises car il existe des différences importantes entre les deux sortes de responsabilités : dommage réparable, clauses relatives à la responsabilité, mise en demeure, etc. Les règles relatives aux prescriptions ont longtemps constitué une des différences entre les deux ordres de responsabilité. Avant l’intervention de la loi du 17 juin 2008 portant réforme de la prescription en matière civile, si les actions en responsabilité civile extra-contractuelle se prescrivaient par dix ans à compter de la manifestation du dommage ou de son aggravation (anc. art. 2270-1 C. civ.), en matière contractuelle, l’action du créancier était soumise au délai trentenaire de droit commun, sauf délai spécial. Ainsi par exemple, en matière de vices du consentement, l’action doit être intentée dans un délai de cinq ans à compter de la découverte du vice.

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UNIVERSITE PANTHEON-ASSAS (PARIS II) Année universitaire 2014-2015

TRAVAUX DIRIGES - 2ème année de Licence en Droit DROIT CIVIL Cours de Monsieur le Professeur Nicolas MOLFESSIS ___________________________________ Distribution : du 13 au 18 avril 2015

Dix-neuvième et vingtième Séances

Responsabilité contractuelle et responsabilité délictuelle

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I. - Observations générales La présente séance implique une bonne assimilation de connaissances relevant de divers passages du cours, et ce au sujet des relations entre responsabilité contractuelle et responsabilité délictuelle. Relations qui doivent être bien comprises car il existe des différences importantes entre les deux sortes de responsabilités : dommage réparable, clauses relatives à la responsabilité, mise en demeure, etc. Les règles relatives aux prescriptions ont longtemps constitué une des différences entre les deux ordres de responsabilité. Avant l’intervention de la loi du 17 juin 2008 portant réforme de la prescription en matière civile, si les actions en responsabilité civile extra-contractuelle se prescrivaient par dix ans à compter de la manifestation du dommage ou de son aggravation (anc. art. 2270-1 C. civ.), en matière contractuelle, l’action du créancier était soumise au délai trentenaire de droit commun, sauf délai spécial. Ainsi par exemple, en matière de vices du consentement, l’action doit être intentée dans un délai de cinq ans à compter de la découverte du vice.

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Dans certains domaines, le législateur avait déjà commencé à unifier les deux régimes de responsabilité. Ainsi en est-il - et le domaine considéré est très vaste - du régime issu de la loi du 5 juillet 1985 (Loi Badinter) puisque, aux termes de l’article 1er de cette loi, « les dispositions du présent chapitre s’appliquent, même lorsqu’elles sont transportées en vertu d’un contrat, aux victimes de la circulation dans lequel est impliqué un véhicule terrestre à moteur ainsi que ses remorques ou semi-remorques, à l’exception des chemins de fer et des tramways circulant sur des voies qui leur sont propres. De même, en matière de responsabilité du fait des produits défectueux, ou encore en matière de responsabilité médicale pour les dommages qui relèvent de la solidarité nationale (art. L 1142-1 du Code de la santé publique). II. - Premier thème de la séance : les domaines La mise en œuvre de la distinction des responsabilités délictuelle et contractuelle suppose de déterminer quels sont les domaines respectifs de chacune. C’est l’existence d’un contrat - et plus particulièrement la violation d’une obligation contractuelle – qui permet de déterminer si l’on se situe dans la responsabilité contractuelle ou délictuelle. Ce critère de distinction n’est pas toujours évident à mettre en œuvre : Document 1 : Cass. civ. 1ère, 19 février 2013, pourvoi n°11-23017. Parfois la jurisprudence, désireuse d’améliorer la situation des victimes - surtout à une époque où toute la construction jurisprudentielle édifiée à partir de l’article 1384, al. 1er, était loin d’être achevée - a admis l’existence, dans un certain nombre de contrats, d’une obligation contractuelle de sécurité. A. - Le contrat de transport La Cour de cassation a ainsi décidé que le contrat de transport de personnes comporte pour le transporteur l’obligation de conduire le voyageur sain et sauf à destination (Civ. 21 nov. 1911), mais encore faut-il délimiter le contrat pour s’assurer de son existence (et donc de l’application des règles de la responsabilité contractuelle). Document 2 : Cass. civ. 1ère, 6 octobre 1998, JCP 1999. II. 10 186. En la matière, les limites dans le temps de l’obligation de sécurité de résultat ne coïncidaient pas nécessairement avec celles du contrat de transport. La Cour de cassation a longtemps considéré que dès lors qu’il y avait contrat de transport, il existait, à la charge du transporteur une obligation de sécurité dont la portée était variable, tantôt obligations de moyens, tantôt obligation de résultat :

- obligation de moyens jusqu’à ce que le voyageur commence à monter dans le véhicule ;

- obligation de résultat depuis le moment où le voyageur commence à monter dans le véhicule jusqu’à celui où il achève d’en descendre ;

- obligation de moyens depuis le moment où le voyageur achève de descendre du véhicule jusqu’à celui où il quitte la gare.

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Mais, compte tenu de l’évolution du droit de la responsabilité délictuelle (art. 1384, al. 1er), le recours à l’obligation de sécurité n’était plus favorable à la victime, dès lors qu’il s’agissait d’une obligation de moyens. Mieux valait alors le régime de responsabilité délictuelle. La jurisprudence a donc évolué. Elle a restreint le domaine de la responsabilité contractuelle. B. - La convention d’assistance. Dans certaines hypothèses, la Cour de cassation a découvert un contrat, là où l’on ne l’attendait guère à se trouver sur le terrain de la responsabilité contractuelle. Ainsi en est-il à propos des conventions dites d’assistance, véritables inventions jurisprudentielles. Document 3 : Cass. civ. 1ère, 13 janvier 1998, Bull. civ. I, n° 15 ; D. 1998, 580, note Viala. Document 4 : Cass. civ. 1ère, 7 avril 1998, Bull. civ. I, n° 141 ; JCP 1998, II, 10203, note

Gout. C. - La faute du contractant préjudiciable au tiers. Lorsqu’un tiers subit un préjudice du fait de l’inexécution ou de la mauvaise exécution d’un contrat, il ne peut qu’engager la responsabilité délictuelle du contractant responsable. Mais quelle preuve doit-il alors rapporter ? Peut-il se contenter d’invoquer un manquement contractuel ; autrement dit, la faute contractuelle vaut-elle, en elle-même, faute délictuelle ? C’est la question de l’équivalence (ou non) des fautes contractuelle et délictuelle. L’Assemblée plénière de la Cour de cassation a entendu mettre fin à la divergence qui opposait la Chambre commerciale et la première Chambre civile par un arrêt du 6 octobre 2006. Document 5 : Ass. Plén., 6 octobre 2006, Bull. A.P n°9 ; RTDciv. 2007, p.123, obs. P.

Jourdain ; D. 2006, p.2825, note G. Viney ; JCP 2006, II, 10181, avis A. Gariazzo et note M. Billiau.

III. - Deuxième thème de la séance : du problème dit du « cumul des responsabilités » délictuelle et contractuelle La question doit être posée ainsi : le créancier qui se plaint de l’inexécution fautive du contrat par son cocontractant peut-il invoquer à son choix, soit les règles de la responsabilité contractuelle, soit celles de la responsabilité délictuelle, si celles-ci ou celles-là lui sont plus favorables ? Réponse : NON Document 6 : Cass. civ. 11 janvier 1922, Grands arrêts, n° 177.

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Sur l’application du principe : Document 7 : Com., 13 juillet 2010. Document 8 : Cass. civ. 1ère, 28 juin 2012, pourvoi n°10-28492. Document 9 : Com., 10 mars 2015, pourvoi n°13-10003. Indépendamment des raisons théoriques tirées de la nature différente des fautes contractuelle et délictuelle, cette solution s’explique par le fait que le régime de la responsabilité contractuelle est généralement moins favorable à la victime que celui de la responsabilité délictuelle (limitation, par exemple, de la réparation au dommage prévisible). Si le créancier pouvait, à son gré invoquer la responsabilité délictuelle, ces limitations deviendraient lettre morte. Enfin le principe même de la force obligatoire du contrat condamne le cumul des responsabilités : lorsque les parties ont décidé, par exemple, qu’il n’y aurait pas de responsabilité dans tel ou tel cas, permettre cependant au créancier d’invoquer alors la responsabilité délictuelle, ce serait, en quelque sorte, l’autoriser à violer le contrat, en tournant les clauses conventionnelles relatives à la responsabilité. C’est ici qu’il faut à nouveau prendre en considération le mécanisme de la stipulation pour autrui, car il aboutit à étendre le cercle contractuel au tiers bénéficiaire d’une stipulation pour autrui (si ce tiers accepte la stipulation pour autrui), donc à étendre en conséquence le domaine de la responsabilité contractuelle. - ce qui peut être avantageux pour le tiers bénéficiaire dans certains cas ; - ce qui ne l’est pas nécessairement, de sorte que le tiers peut avoir intérêt à ne pas accepter la stipulation pour autrui. On observera ici - comme on l’avait déjà constaté au cours d’une précédente séance (Le juge et le contrat) - le pouvoir inventif de la jurisprudence. Document 10 : Cass. civ., 6 décembre 1932, 24 mai 1933, 23 janvier 1959, Grands arrêts,

n° 182-184. Document 11 : Cass. civ. 2ème, 17 décembre 1954, D. 1955, 269, note Rodière ; JCP 1955,

II, 8490, note Savatier. IV. - Exercice :

• 19ème séance :

Commentaire : Ass. Plén., 6 octobre 2006 (document 5).

• 20ème séance : Dissertation : La relativité de la distinction des responsabilités contractuelle et délictuelle.

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Document 1 : Cass. civ. 1ère, 19 février 2013 Vu l'article 1147 du code civil ; Attendu que lors d'un cours de "pencak Silat", (art martial pratiqué sous forme de combat rythmique), dispensé au sein de l'association PGB Paris, Silat de l'école de la Grue blanche, (l'association), Mme Y..., élève, a reçu un coup au visage ayant entraîné des blessures, porté par M. X..., son instructeur ; que Mme Y... et la société d'assurances GAN ont assigné l'association et son préposé, la mutuelle d'assurance MAIF, leur assureur ainsi que la CPAM devant le juge des référés pour obtenir une mesure d'expertise destinée à l'évaluation de son préjudice et le versement d'une provision de 25 000 euros ; Attendu que pour rejeter la demande tant de l'association que du préposé, la cour d'appel énonce que les circonstances dans lesquelles Mme Y... a été blessée sont celles d'un cours de sport dispensé par M. X... préposé de l'association et que cette dernière qui est son

commettant est, de plein droit, par application de l'article 1384, alinéa 5, du code civil, responsable du dommage qui a été causé, sauf démonstration que le coup porté aurait été étranger aux attributions de M. X..., à d'autres fins que l'esquive enseignée lors du cours, qu'il y a lieu de renvoyer Mme Y... et l'association devant le juge du fond en ce qui concerne la charge d'une obligation de réparation incombant au préposé en l'absence de démonstration évidente de ce qu'il a excédé les limites de ses fonctions ou agi à des fins étrangères ; Qu'en statuant ainsi alors que la responsabilité de l'organisateur d'une activité sportive est de nature contractuelle et suppose, lorsque le créancier a un rôle actif, la faute prouvée du débiteur, la cour d'appel a violé le texte susvisé; PAR CES MOTIFS : CASSE ET ANNULE.

Document 2 : Cass. civ.1ère, 6 octobre 1998. Attendu que le 20 mars 1991, M. X... est monté sur le marchepied d'un train quittant la gare de Meaux et a été précipité, peu après, sur la voie ferrée lors de l'ouverture d'une portière actionnée de l'intérieur par un voyageur ; qu'ayant été grièvement blessé, il a assigné la SNCF en réparation de son préjudice sur le fondement de l'article 1147 du Code civil et, subsidiairement, sur celui des articles 1382 et 1384, alinéa 1er, du même Code ; que l'arrêt confirmatif attaqué (Paris, 30 mai 1995) l'a débouté de son action ; Sur le moyen unique, pris en sa première branche : Attendu que M. X... fait grief à cet arrêt de ne pas avoir retenu l'obligation contractuelle de sécurité pesant sur la SNCF à l'égard des voyageurs au motif qu'il ne démontrait pas être en possession d'un titre de transport, sans rechercher s'il n'avait pas, néanmoins, contracté avec la SNCF dont les agents étaient en grève le jour de l'accident ;

Mais attendu que le contrat de transport se formant par la délivrance du billet et M. X... n'ayant ni rapporté la preuve lui incombant qu'il était en possession d'un titre de transport lors de l'accident, ni allégué qu'il n'aurait pu en obtenir un en raison de la fermeture des guichets, c'est à juste titre que la cour d'appel a écarté le fondement contractuel de son action ; Sur la deuxième branche : (sans intérêt) ; Et sur les trois dernières branches : Attendu que M. X... fait enfin grief à l'arrêt attaqué de ne pas avoir retenu la présomption de responsabilité de la SNCF sur le fondement de l'article 1384, alinéa 1er, du Code civil, alors que, selon le moyen, l'accident a eu pour cause non sa prétendue faute, mais l'ouverture d'une portière que la SNCF avait l'obligation de condamner en cours de transport et qui ne pouvait constituer un événement imprévisible et irrésistible susceptible de l'exonérer ; Mais attendu qu'après avoir relevé que M. X... était monté, en infraction avec la réglementation ferroviaire, sur le marchepied

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d'un train commençant à s'élancer après le signal du départ, puis s'était vu contraint de lâcher prise lorsque celui-ci avait pris de la vitesse, la cour d'appel a pu déduire de ces constatations que la faute ainsi commise par la victime constituait la cause exclusive de son

dommage; qu'elle a, par ce seul motif, légalement justifié sa décision ; PAR CES MOTIFS : REJETTE le pourvoi.

Document 3 : Cass. civ. 1ère, 13 janvier 1998 Vu l'article 1147 du Code civil : Attendu que si la convention d'assistance bénévole emporte pour l'assisté l'obligation de réparer les conséquences des dommages corporels subis par celui auquel il a fait appel, toute faute de l'assistant, quelle que soit sa nature, peut décharger l'assisté de cette obligation, dans la mesure où elle a concouru à la réalisation du dommage ; Attendu que le 23 octobre 1988, M. Bernard Y..., qui aidait bénévolement les époux X... à clôturer un champ, est décédé accidentellement après avoir été heurté à la tête par la masse hydraulique d'un enfonce-pieux qu'il était chargé de manoeuvrer ; que sa veuve a assigné en réparation la caisse primaire d'assurance maladie d'Angers, les époux X... et leur assureur, la compagnie La Concorde, lesquels

ont appelé en garantie l'EURL Portais ayant vendu l'enfonce-pieux et son assureur, le Groupe Azur, ainsi que le fabricant de cet engin, les Etablissements Rabaud ; Attendu que pour écarter toute exonération des époux X..., l'arrêt attaqué retient que la faute de la victime par eux invoquée ne présentait pas le caractère de la force majeure ; Attendu qu'en statuant comme elle l'a fait, alors qu'elle avait relevé qu'on pouvait reprocher à la victime de s'être imprudemment placée sous la trajectoire de la masse, la cour d'appel a violé le texte susvisé ; PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur le second moyen, et sur le pourvoi incident : CASSE ET ANNULE (…).

Document 4 : Cass. civ. 1ère, 7 avril 1998. Attendu que, le 25 juin 1989, M. X..., cousin de M. Y..., aux droits de qui vient aujourd'hui sa veuve, a cherché à aider celui-ci à manoeuvrer une échelle métallique, à l'issue de l'opération d'enlèvement d'un nid d'oiseau en bordure de la toiture de la maison de M. Y..., à une faible distance d'une ligne électrique à moyenne tension ; que, lors de la manipulation, l'échelle a frôlé la ligne électrique ; que M. X... a été blessé par électrocution ; que, soutenant qu'une convention d'assistance s'était formée entre les parties, il a assigné M. Y... et la compagnie d'assurances Axa en réparation de son préjudice ; Attendu que M. X... fait grief à l'arrêt attaqué (Poitiers, 11 juin 1996) de l'avoir débouté de ses demandes, alors, selon le moyen, que lorsqu'une personne offre d'en aider une autre,

l'offre étant faite dans l'intérêt exclusif de son destinataire, le silence conservé par ce dernier fait présumer son acceptation, que cette présomption si tant est qu'elle n'est pas irréfragable ne peut tomber que devant la preuve du défaut d'acceptation de l'offre par son destinataire, et qu'en refusant d'admettre cette présomption d'acceptation de la convention d'assistance au prétexte que l'intervention de M. X... n'aurait pas été utile ou efficace et en refusant l'indemnisation par l'assisté des dommages subis par son assistant, la cour d'appel a violé ensemble les articles 1134, 1135 et 1315 du Code civil ; Mais attendu que la cour d'appel retient souverainement, au vu des éléments de preuve qu'elle énumère, que M. Y... avait décidé seul de retirer le nid de son toit avec une échelle

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qu'il savait parfaitement manipuler, et que M. X..., de passage à la propriété pendant l'opération pour lui emprunter un outil, a pris l'initiative de l'aider en fin de manoeuvres par une intervention dont l'opportunité était douteuse, compte tenu de la spécificité des lieux exigeant de la précision dans les mouvements et, en cas de pluralité d'acteurs,

une bonne coordination entre eux, laquelle n'a pu être organisée ; que de ces constatations, elle a pu conclure à l'inexistence d'une convention d'assistance ; D'où il suit que le moyen est inopérant ; PAR CES MOTIFS : REJETTE le pourvoi.

Document 5 : Ass. Plén., 6 octobre 2006. Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 19 janvier 2005), que les consorts X... ont donné à bail un immeuble commercial à la société Myr'Ho qui a confié la gérance de son fonds de commerce à la société Boot shop ; qu'imputant aux bailleurs un défaut d'entretien des locaux, cette dernière les a assignés en référé pour obtenir la remise en état des lieux et le paiement d'une indemnité provisionnelle en réparation d'un préjudice d'exploitation ; Sur le premier moyen : Attendu que les consorts X... font grief à l'arrêt d'avoir accueilli la demande de la société Boot shop, locataire-gérante, alors, selon le moyen, « que si l'effet relatif des contrats n'interdit pas aux tiers d'invoquer la situation de fait créée par les conventions auxquelles ils n'ont pas été parties, dès lors que cette situation de fait leur cause un préjudice de nature à fonder une action en responsabilité délictuelle, encore faut-il, dans ce cas, que le tiers établisse l'existence d'une faute délictuelle envisagée en elle-même indépendamment de tout point de vue contractuel ; qu'en l'espèce, il est constant que la société Myr'Ho, preneur, a donné les locaux commerciaux en gérance à la société Boot shop sans en informer le bailleur ; qu'en affirmant que la demande extra-contractuelle

de Boot shop à l'encontre du bailleur était recevable, sans autrement caractériser la faute délictuelle invoquée par ce dernier, la cour d'appel a entaché sa décision d'un manque de base légale au regard de l'article 1382 du code civil » ; Mais attendu que le tiers à un contrat peut invoquer, sur le fondement de la responsabilité délictuelle, un manquement contractuel dès lors que ce manquement lui a causé un dommage ; qu'ayant relevé, par motifs propres et adoptés, que les accès à l'immeuble loué n'étaient pas entretenus, que le portail d'entrée était condamné, que le monte-charge ne fonctionnait pas et qu'il en résultait une impossibilité d'utiliser normalement les locaux loués, la cour d'appel, qui a ainsi caractérisé le dommage causé par les manquements des bailleurs au locataire-gérant du fonds de commerce exploité dans les locaux loués, a légalement justifié sa décision ; Et attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer sur les 2ème et 3ème moyens, dont aucun ne serait de nature à permettre l'admission du pourvoi ; PAR CES MOTIFS : REJETTE le pourvoi ;

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Document 6 : Cass. civ. 11 janvier 1922.

Document 7 : Com., 13 juillet 2010 Attendu, selon l'arrêt attaqué, que les sociétés ITP et Coflexip, qui exercent leur activité notamment dans le domaine de la conception et de la fabrication de conduites sous-marines pour le transport d'hydrocarbures, ont collaboré à plusieurs reprises entre 1993 et 1998, et ont conclu à cette occasion divers engagements de confidentialité et accords de non exploitation ; que la société ITP expose avoir mis au point en 1996 un système de pipeline à double enveloppe calorifugé utilisant un isolant microporeux fourni par la société Micropore ; qu'elle a notamment conclu en 1997 des accords de secret réciproque avec la société Coflexip, afin de permettre de sélectionner le système approprié d'isolation à double paroi de pipeline pour le projet Shell Etap, puis, de le chiffrer ; qu'un accord de secret et de non exploitation a été signé en 1998 pour le projet Girasol ; qu'en 1999, la société Coflexip a remporté le marché relatif au projet BP Nile, dans le golfe du Mexique, en faisant fabriquer un pipeline double enveloppe calorifugé au moyen d'un isolant microporeux acheté à un tiers ; que la

société ITP a assigné les sociétés Coflexip, aux droits desquelles se trouvent les sociétés Technip France et Technip UK limited, en réparation du préjudice résultant de la violation de leurs obligations contractuelles ; Sur le premier moyen, pris en sa première branche : (…) Et sur le premier moyen, pris en sa quatrième branche : (…) Vu les articles 1134 et 1147 du code civil ; Et sur le quatrième moyen, pris en sa première branche : Vu les articles 1147 et 1382 du code civil ; Attendu que pour déclarer irrecevable la demande subsidiaire formée par la société ITP au titre de la concurrence déloyale, l'arrêt retient que les sociétés Technip invoquent, à bon droit, le principe de non cumul des responsabilités contractuelle et délictuelle qui

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exclut, entre les mêmes parties, les demandes subsidiaires fondées sur un autre ordre de responsabilité que celui invoqué au soutien de la demande principale ; Attendu qu'en statuant ainsi, alors que ce principe interdit seulement au créancier d'une

obligation contractuelle de se prévaloir, contre le débiteur de cette obligation, des règles de la responsabilité délictuelle, la cour d'appel a violé les textes susvisés ; PAR CES MOTIFS : CASSE ET ANNULE (…)

Document 8 : Cass. civ. 1ère, 28 juin 2012. Vu les articles 1147 et 1384, alinéa 1er, du code civil ; Attendu, selon l'arrêt attaqué, que, le 29 juin 2003, M. Eddy X..., alors âgé de 11 ans, qui s'était rendu avec d'autres enfants, accompagnés d'un adulte, dans un restaurant, a été blessé alors qu'il s'apprêtait à descendre d'un élément de l'aire de jeux, dépendante de l'établissement, l'anneau qu'il portait au doigt s'étant pris dans une aspérité d'un grillage de protection qu'il venait d'enjamber ; que ses parents, tant en leur nom personnel qu'au nom de leur enfant mineur, ont recherché la responsabilité de la société ADOS, exploitante de l'établissement, et de la personne accompagnant les enfants ; Attendu que, pour déclarer la société ADOS responsable du préjudice subi par M. Eddy X... et par ses parents, la cour d'appel a retenu que le principe de non-cumul des responsabilités contractuelle et délictuelle ne s'opposait pas à ce que cette responsabilité fût recherchée sur le fondement de l'article 1384, alinéa 1er, du code

civil, que M. et Mme X... n'auraient d'ailleurs de lien contractuel avec la société ADOS que par le biais de leur fils, qui lui-même, mineur au moment de l'accident, ne s'était pas trouvé engagé dans un lien contractuel, même par stipulation pour autrui, avec cette société, en utilisant une aire de jeux, indépendante du contrat de restauration ; Qu'en statuant ainsi, quand elle avait constaté que l'enfant avait fait usage de l'aire de jeux, exclusivement réservée à la clientèle du restaurant, au cours d'un goûter auquel il participait en compagnie d'un adulte et d'autres enfants, la cour d'appel a violé les textes susvisés, le premier par refus d'application et le second par fausse application ; PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres branches du moyen : Constate la déchéance partielle du pourvoi en tant que dirigé contre l'arrêt du 3 décembre 2009 ; CASSE ET ANNULE (…)

Document 9 : Com., 10 mars 2015. Sur le moyen unique, pris en sa première branche : Vu les articles 1147 et 1382 du code civil ; Attendu que le créancier d'une obligation contractuelle ne peut se prévaloir contre le débiteur de cette obligation, quand bien même il y aurait intérêt, des règles de la responsabilité délictuelle ; Attendu, selon l'arrêt attaqué, que, par acte du

30 mai 2005, la société Bernadette Texier a cédé à la société Ambulances Nicolas sa branche d'activité ambulances agréées, avec une clause de non-concurrence ; qu'estimant que la société Bernadette Texier était l'auteur d'actes de concurrence déloyale, la société Ambulances Nicolas l'a assignée en dommages-intérêts sur le fondement de l'article 1382 du code civil ; Attendu que pour faire droit à cette demande, l'arrêt retient que la société Bernadette Texier a

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refusé de transmettre la totalité du fichier de clientèle informatisé prévu à l'acte de cession, qu'elle a gagné de nouveaux clients tout en en conservant d'autres dont elle a déloyalement continué d'assurer le transport médical, en contravention avec ses engagements contractuels ;

Attendu qu'en statuant ainsi, la cour d'appel a violé les textes susvisés ; PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs : CASSE ET ANNULE (…)

Document 11 :

- Cass. civ., 6 décembre 1932.

- Cass. civ., 24 mai 1933.

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- Cass. civ., 23 janvier 1959.

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Document 12 : Cass. civ. 2ème, 17 décembre 1954.