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LA LETTRE D’INFORMATION DE LA FONDATION FRANÇAISE POUR LA RECHERCHE SUR L’ÉPILEPSIE - Décembre 2013
C omme nous l’avons si souvent dit
dans ces colonnes, l’épilepsie est
une double maladie.
A la complexité de la maladie et
aux lacunes de sa prise en charge,
s’ajoutent une honte et des préjugés qui per-
turbent la vie des patients, celles des familles
et poussent à cacher la maladie, voire à être
dans le déni…
A l’aube d’une nouvelle année, nous avons
donc décidé de mettre en lumière quelques
épileptiques célèbres, en essayant de voir quel
rôle l’épilepsie avait joué dans leur rayonne-
ment.
Lumière toujours : celles qu’apporte le
regard de Didier Van CAUWELAERT,
écrivain de renom qui a généreu-
sement accepté d’être le parrain
de la Fondation. Les témoignages
d’Arnaud SÉLIGNAC et Catherine
DIRAN montrent aussi que regarder
l’épilepsie en face est moins délétère que
le maintien des tabous. C’est dans le même
état d’esprit que nous donnons la parole à une
maman qui dit sans fard les tourments d’un
parent d’enfant atteint d’épilepsie. Tabou ! Jus-
tement, pour tenter de comprendre si et pour-
quoi l’épilepsie est encore taboue en 2014, la
FFRE organise le 10 février prochain, à Paris,
un colloque au cours duquel des intervenants
de prestige débattront… Nous vous y attendons
nombreux, de même qu’au dîner et à la vente
aux enchères au bénéfice de la recherche qui
suivront.
Côté recherche, lisez les interviews de Nadia
Bahi-Buisson et Philippe Kahane qui lèvent
un coin de voile sur la complexité de la prise
en charge des épilepsies pharmacorésistantes ou
liées à des maladies rares.
Autre tabou : celui de la parole sur les risques
de mortalité et l’épilepsie. C’est le sens du sou-
tien renouvelé de la FFRE au Réseau Sentinelle
Mortalité Epilepsie qui travaille d’arrache-pied
aux causes de mortalité. Dire les risques ne
les accroît pas et mieux les connaître doit per-
mettre de mieux les éviter.
Enfin, nous ne cesserons jamais de le répéter,
rien ne peut se faire sans VOUS. C’est avec
plaisir que nous avons de plus en
plus de bénévoles pour nous aider
notamment dans l’organisation
d’évènements, la recherche de
partenaires, etc. Grâces leur en
soient rendues, mais il y a en-
core tant à faire que vous ne serez
jamais trop nombreux pour nous aider !
Une plaquette à diffuser largement est ainsi
notamment jointe à ce numéro. C’est aussi et
à nouveau pour le conseil d’administration de
la Fondation, qui va accroître son nombre, que
nous avons besoin de volontaires et de mécènes
impliqués. Enfin, c’est encore et toujours de vos
dons dont nous avons besoin pour continuer à
franchir les montagnes, en accroissant l’effort de
recherche et améliorant la prise en charge et la
connaissance de la maladie.
Du fond du cœur, merci, et que vos fêtes de fin
d’année se passent dans la lumière ! l
EpilEpsiE(s) : EntrEr dans la lumièrEL’ÉPILEPSIE DANS LA LUMIÈRE
• Célèbres et épileptiques... C’est possible ! .................. P.02
• Didier VAN CAUWELAERT s’engage pour l’épilepsie ..... P.04
• Arnaud SÉLIGNAC, réalisateur, raconte ............. P.05
• Catherine DIRAN : l’épilepsie en face .............. P.06
• 10 février 2014 : l’épilepsie en pleine lumière .. P.07
dossiEr
• Facteurs de risque de mort subite dans l’épilepsie : premier bilan ..................... P.13
projEts financés
PhARMAcoRÉSIStANcE, SURhANDIcAP Et ÉPILEPSIE :
qUELLES AvANcÉES ?
• Epilepsies survenant au cours de maladies métaboliques et génétiques rares ................ P.08
• Quelles avancées pour la prise en charge des épilepsies pharmaco-résistantes de l’adulte ? ...... P.11
la rEcHErcHE
Bernard ESAMBERT, Président
Emmanuelle ALLONNEAU-ROUBERTIE, Directrice générale
REgARdER L’épILEpSIE EN
fAcE EST MOINS déLéTèRE
Recherches & Perspectives • décembre 2013 • p.1
BillEt d’HumEur
• Dur dur, pour une maman, l’épilepsie d’un enfant ! ...... P.15
aidEZ la fondation
• Informez sur l’épilepsie, en fai-sant connaître la Fondation . P.16
prince, un génie épileptique
Il est né pauvre, dans une famille noire américaine, à une époque où le racisme faisait encore rage, Et
était épileptique. comme aurait dit coluche, certains sont nés « moins égaux que les autres » ! Eh bien, la personne dont je vous parle n’est autre que le chanteur génial Prince qui a fait danser bien des quadragé-naires jusqu’au bout de la nuit avec des morceaux aussi géniaux que Kiss, Shame on You ou Purple Rain.
Son épilepsie, il l’a eue à la naissance
et pour très peu de temps. Ses crises
se sont arrêtées alors qu’il avait 7 ans.
Et pourtant, il n’a fait cette révélation
concernant sa maladie qu’à l’âge de
51 ans. J’ai bien dit 51 ans ! Il lui a fallu
un demi-siècle pour accepter de parler
de la maladie qui l’a traumatisée toute
sa vie. Mais qu’est-ce qui peut bien ef-frayer tant que ça dans cette fichue ma-ladie pour qu’une star du rock adulée, comme Prince, mette 51 ans pour parler d’un mal qui affecte 500 000 personnes rien qu’en France ?Et puis les rockeurs, ce n’est pas
comme si l’on s’attendait à ce qu’ils
soient tout à fait conformes. Alors,
pourquoi clamer sa foi, sa sexualité,
son excentricité, comme l’a tant fait
Prince, mais ne jamais parler de sa
maladie ? Je ne comprends toujours
pas, ou peut-être trop bien… Il n’y a
rien à faire, cette foutue maladie pétri-
fie tout le monde.
Prince le dit : ses parents faisaient
comme ils pouvaient. Prince serait un
jour venu voir sa mère en lui disant
qu’il ne serait plus malade, parce
qu’un ange le lui avait dit. Cette his-
toire me plaît déjà moins. Je n’ai rien
contre les miracles et les anges, mais
pour une maladie qu’on appelle déjà le
célèBrEs Et épilEptiquEs... c’Est possiBlE !“Grand Mal”, je préférerais une autre
cure qu’un angelot. Ça n’est pas bon
du tout pour l’image de la maladie que
beaucoup essaient déjà d’associer au
diable.
Vous me direz, Prince ne se rappelle
pas de l’incident ; c’est sa mère qui
le lui a raconté. Nous pouvons donc
nous permettre de douter d’une mère.
Prince, lui, ne doute plus du tout : il
est aujourd’hui Témoin de Jehovah et
prêche tant qu’il peut dans ses der-
niers albums.
Prince avoue, dans son interview choc, qu’alors qu’il n’avait plus de crises, les moqueries et les humiliations des petits camarades à l’école continuaient. Il dit
que c’est pour ça qu’il est devenu ex-
centrique au début de sa carrière, que
c’est pour ça qu’il hurlait plus fort que
tout le monde, pour qu’on le remarque,
rien que pour son rock et pas pour son
épilepsie, pour oublier ces 7 années
de la toute petite enfance pendant les-
quelles il avait tant souffert.
Il a écrit une chanson sur ce thème :
The Sacrifice of Victor (Le Sacrifice de
Victor). Le titre en dit long ! Il a écrit:
« I was born on a blood stained table (je
suis né sur une table tachée de sang)
Cord wrapped around my neck (le cor-
don autour du cou)
Epilectic ‘til the age of 7 (épileptique
jusqu’à l’âge de 7 ans) […]
My name will be Victor (je m’appellerai
Victor) »
Je ne vois vraiment en rien, dans ces
paroles, un sentiment de libération ou
de soulagement pour avoir vécu sans
crises à partir de 7 ans. Je n’y vois pas
vraiment la célébration d’une victoire
sur la vie et sur la maladie. J’y vois le
mal, l’inexplicable et l’inavouable. C’est
une maladie qui accuse, qui vous rend
coupable. Parfois, il ne faut même pas
le regard des autres pour se sentir cou-
pable, les épileptiques semblent y arri-
ver très bien tout seuls.
Pourtant, ce qu’il faut retenir de tout
cela, c’est que l’épilepsie n’a pas em-pêché Prince d’être génial. Et si son
épilepsie avait eu un rôle à jouer dans
ce génie ? Si, à force de courts cir-
cuits entre ses neurones, de nouvelles
connexions s’étaient créées, bien plus
créatives. Sans épilepsie, Prince n’au-
rait peut-être pas existé. Je ne vais
pas vous faire l’apologie de la maladie,
mais simplement faire remarquer que,
dans certains cas, l’épilepsie va de pair
avec génie musical : Jimmy Reed, Neil
Young, Lindsey Buckingham (chan-
teuse des Fleetwood Mac) ou encore
Ian Curtis des Joy Division. Je ne peux
qu’espérer que les générations à venir, n’auront plus à souffrir du regard des autres, qu’ils pourront affronter la mala-die avec des remèdes chaque fois plus performants et une société chaque fois plus compréhensive. On aurait ainsi le
génie musical, sans la souffrance, par-
fois extrême comme ce fut le cas pour
Ian Curtis. l
Vanessa Barros-JonEs
L’épiLepsie dans La Lumière dossiEr
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Recherches & Perspectives • décembre 2013 • p.2
Témoignages
L’épilepsie salvatrice et créatrice de dostoievski
Dostoïevski est sûrement l’un des épileptiques les plus célèbres et celui qui aura, à travers ses
personnages, le plus écrit sur sa mala-die. De nombreux critiques littéraires et médecins se sont plongés sur son cas, tentant d’identifier la maladie, et de comprendre le rôle qu’elle avait pu jouer dans la vie et l’œuvre de ce génie litté-raire.
Fedor Dostoïevski naît le 30 octobre
1821 à Moscou, où son père exerce la
médecine. La famille Dostoïevski vit alors
dans une certaine aisance. Les rapports
familiaux sont eux envenimés par un
père alcoolique et violent que Dostoïev-
ski déteste. La mère est, elle, atteinte de
tuberculose. Alors qu’elle doit s’absenter
pour une cure, elle écrit à son mari : « Ne
te fâche pas contre Fedia, tu sais bien,
c’est du feu ! ». La mère tente de protéger
un fils fragile qui est « émotionnellement
instable, hypocondriaque, présente au
moins un épisode d’hallucination audi-
tive, une aphonie transitoire et des maux
de tête » (Sébastien Dieguez). Certains font remonter la première crise d’épilep-sie de Dostoïevski à l’âge de sept ans. Dostoïevski vit, vers 25 ans, de moments
de popularité, avec des textes acclamés
par la critique qui l’introduisent dans les
cercles les plus prestigieux. Cette popula-
rité fait vite place à une période de misère
et d’oubli de l’auteur, qui vit mal le rejet
de la critique autrefois si élogieuse, la
misère, et la mort violente d’un père qu’il
ne s’est jamais pardonné de haïr autant.
A l’âge de 30 ans, Dostoïevski est arrêté
alors qu’il est innocent, du fait de ses
amitiés dans les réseaux révolution-
naires. Il sera ensuite emprisonné 4 ans
en Sibérie. Il vivra au total 10 ans d’exil
avant de pouvoir reprendre son métier
d’écrivain. Il connaîtra à cette époque ses
premières crises généralisées, rapportées
dans sa correspondance et les rapports
médicaux du médecin troupier.
Les années qui suivent ne sont pas plus
heureuses, avec la mort de sa première
femme, celle de son frère et ami, une
passion pour le jeu et des démêlés avec
les créanciers et la mort de deux enfants.
A tout cela, s’ajoutent une fréquence et une gravité de crises toujours plus grandes. D’après les archives du Musée
de l’Epilepsie à Kork, « l’épilepsie de Dostoïevski se déroulait de manière dramatique avec des crises de type grand mal : il bégayait un court ins-
tant, comme s’il cherchait ses mots et
ouvrait sa bouche... Soudainement de sa
bouche béante sortait un long cri étrange
et il tombait inconscient à terre... Son
corps se tournait et tressaillait sous l’effet
des spasmes... à l’encoignure des lèvres,
de la mousse était visible. II est fort pro-
bable que ces crises soient des crises
focales avec une généralisation secon-
daire ; Dostoïevski avait en effet avant ses crises une aura prolongée qui évo-quait le bonheur. » Cette dernière carac-
téristique de sa maladie lui faisait dire, au
travers d’un autre personnage célèbre,
Kirilov, l’athée mystique et suicidaire
dans Les Démons : « Il y a des instants,
ils durent cinq ou six secondes, quand
vous sentez soudain la présence de l’har-
monie éternelle, vous l’avez atteinte. Ce
n’est pas terrestre : je ne veux pas dire
que ce soit une chose céleste, mais que
l’homme sous son aspect terrestre est
incapable de la supporter. Il doit se trans-
former physiquement ou mourir. C’est un
sentiment clair, indiscutable, absolu. Vous
saisissez tout à coup la nature entière et
vous dites : “Oui, c’est bien comme ça,
c’est vrai”. Ce n’est pas de l’attendrisse-
ment… c’est autre chose, c’est de la joie
[…] Ce n’est même pas de l’amour ; oh !
C’est supérieur à l’amour. Le plus terrible,
c’est que c’est si épouvantablement clair.
Et une joie si immense avec ça ! Si elle
durait plus de cinq secondes, l’âme ne la
supporterait pas et devrait disparaître. En
ces cinq secondes je vis toute une vie et
je donnerai pour elles toute ma vie, car
elles le valent. »
Ces moments d’état de grâce ont pu être
salvateurs pour cet homme accablé par
le destin, qui sans eux n’aurait peut-être
pas survécu. L’attente d’une nouvelle
extase aura peut-être donné la force à
Dostoïevski, à la santé très fragile, de
continuer à vivre. on peut également se demander si ces états de grâce ne sont pas à l’origine de son génie littéraire. N’entraînaient-ils pas une pulsion créa-
trice qui nous donne aujourd’hui parmi
les plus beaux romans de la littérature
mondiale. Le neurologue anglais John
Hughlings Jackson, dans la seconde
moitié du XIXe siècle, répertoria les épi-
lepsies dont les répercussions sont uni-
quement d’ordre psychologique et parmi
ces répercussions, on trouve un proces-
sus automatique de pensée, des mo-
ments de conscience totale très courts,
des états de semi-hypnose qui auront
tous pu impacter le travail d’écriture de
Dostoïevski.
Ainsi cette maladie, ce démon d’une vie, aura peut-être aussi été un ange salvateur pour ce génie littéraire... l
Vanessa Barros-JonEs
références • Le mal sacré de Dostoïevski – Sébastian Dieguez. Sebastian Dieguez est neuropsychologue au Service de neurologie du Centre hospitalier universitaire Vaudois de Lausanne, en Suisse.• Archives du Musée de l’Epilepsie de Kork.• Dictionnaire Larousse.autres ouvrages pour en savoir plusBaumann CR, Novikov VPI, Regard M, Siegel A. Did Fyodor Mikhailovich Dostoevsky suffer from mesial tem-poral lobe epilepsy? Seizure 2005 ; 14 : 324-30.Bear DM. Temporal lobe epilepsy: a syndrome of sensori- limbic hyperconnection. Cortex 1979 ; 15 : 357-84.
dossiEr©
Blo
guei
ra
Recherches & Perspectives • décembre 2013 • p.3
Article
Recherches & Perspectives • décembre 2013 • p.4
didiEr van cauwElaErt s’EngagE pour l’EpilEpsiE
Didier Van Cauwelaert, parrain de la FFRE
FFRE. Didier van cauwelaert, en tant qu’écrivain toujours très impliqué dans la vie de vos personnages et dans la vie tout court que vous inspire le mot “épilepsie” ?Didier van cauwelaert - Une confu-
sion d’enfance. La première fois que
j’ai entendu ce mot, je l’ai confondu
avec “épiphanie”. J’ai cru qu’une crise
d’épilepsie était une sorte de crise de
foie quand on avait trop mangé de ga-
lette des rois. Ou qu’on avait avalé la
fève.
FFRE. que connaissiez-vous de cette maladie avant votre rencontre avec la FFRE ?Dvc - Le premier épileptique que j’ai
rencontré, c’était justement ce copain
d’école que je croyais victime d’un
abus de frangipane. L’instituteur nous
avait prévenus qu’il pouvait avoir une
crise à tout moment, et nous avait ap-
pris une chose essentielle : mettre des
vêtements roulés autour de lui pour évi-
ter qu’il ne se blesse lors de ses convul-
sions et de ses mouvements incontrô-
lables. Cet élan de solidarité vigilante
nous faisait du bien. C’était aussi un
excellent prétexte pour ne pas suivre
les cours…
FFRE. quelles sont, vues de votre fe-nêtre, les actions à mener pour que les patients souffrant d’épilepsie n’aient plus peur de nommer leur maladie ?Dvc - J’ai été frappé d’apprendre que
l’épilepsie était perçue comme l’une
des dernières maladies “honteuses”.
Qu’elle était souvent boudée par les
médias et les mécènes de l’humanitaire
parce qu’elle faisait peur. Ou parfois,
pire encore, parce qu’elle faisait rire.
Peut-on “censurer” une maladie parce
que certaines de ses manifestations
provoquent des réactions physiques
incontrôlables ? A-t-on le droit d’exclure
du monde du travail des personnes à
cause de symptômes qu’elles sont sus-
ceptibles de manifester un jour ? C’est
en donnant la parole à des épileptiques,
dans la réalité comme dans les oeuvres
de fiction, qu’on pourra changer le
regard réducteur (ou délibérément
aveugle) que la société pose sur eux.
Il n’est pas inutile non plus de rappeler
que de grands génies tels Jules César,
Molière, Richelieu, Napoléon, Flaubert
ou Alfred Nobel furent épileptiques.
FFRE. Pensez-vous, en tant qu’écri-vain, pouvoir aider à ce changement de regard ?Dvc - Je l’ai fait au moins une fois, dans
La Femme de nos vies. L’un des person-
nages essentiels du roman est David,
un enfant surdoué épileptique qui se
sacrifie, dans l’Allemagne hitlérienne,
en échangeant son identité avec celle
d’un voisin de dortoir qu’il juge plus
“viable” que lui, et dont il sauve ainsi
la vie. Plusieurs parents d’épileptiques
m’ont remercié d’avoir fait d’un malade
comme leur enfant, pas seulement une
victime, mais un héros. l
Propos recueillis par Emmanuelle
aLLonnEaU-roUBErTIE
C’est au cours du dîner orga-
nisé par le Lion’s club Paris
Necker Pasteur au bénéfice
de la FFRE, le 1er octobre
dernier, que la Fondation a
eu l’occasion de rencontrer
Didier VAN CAUWELAERT
et d’échanger avec lui sur
l’épilepsie. Didier VAN
CAUWELAERT est un écrivain
à succès : Prix Goncourt,
Grand prix du Théâtre de
l’Académie française… Il
a également obtenu le prix
Science-Frontières de la
vulgarisation scientifique et a
aussi participé à de nom-
breuses expériences avec des
chercheurs renommés sur les
états modifiés de conscience
et les pouvoirs de la pensée.
Il vient de publier le Diction-
naire de l’impossible, chez
Plon ainsi que La Femme de
nos vies chez Albin Michel.
L’épiLepsie dans La Lumière dossiEr
Recherches & Perspectives • novembre 2013 • p.5
Témoignages
arnaud sélignac, réalisatEur,racontE...
Nous sommes le 24 juin 2013 et il
est un peu plus de 11h. Arnaud
Sélignac m’a donné rendez-vous
pour une interview. C’est un homme char-
mant, discret, mais de ceux qui n’arrêtent
jamais, dont la tête fourmille de projets, de
rencontres et d’histoires passionnantes.
Mais le sujet qui m’amène aujourd’hui à
le rencontrer n’est pas aussi réjouissant :
l’épilepsie. Arnaud Sélignac a en effet une fille épileptique. L’ayant su, je l’ai
contacté pour savoir s’il serait prêt à témoi-
gner pour le magazine de la FFRE. Il a tout
de suite accepté. « L’épilepsie n’a ja-mais été un tabou dans notre famille. Au contraire, c’est bien d’en parler »
avait été sa réaction spontanée. C’est aussi
l’un des objectifs de la FFRE : en parler au
plus grand nombre, pour mettre fin à cette
double maladie à la fois pathologique, mais
aussi sociale, du fait du regard des autres.
Arnaud Sélignac me raconte alors très sim-
plement comment sa fille a eu sa première
crise d’épilepsie à l’âge de 8 ans, en classe.
Cela l’avait beaucoup gênée vis-à-vis de
ses petits camarades, eux aussi ébranlés
par l’incident. « C’est très violent une crise d’épilepsie, on a l’impression de perdre la personne, elle se déforme, c’est traumatisant pour un enfant comme pour un adulte. Ses cama-rades la prenaient pour la petite fille dans L’Exorciste. » Elle s’était mise à
faire des crises régulières, avait commencé
à suivre des traitements, mais s’était vite isolée du monde des enfants, refusant
d’aller chez des amis de peur d’y faire une
nouvelle crise, mais se faisant également
inviter de moins en moins par des enfants
qui craignaient qu’elle ne refasse une crise.
Arnaud me parle de la mise en échec sco-laire de sa fille et de son refus au bout de
deux ans d’aller à l’école et de tout faire
pour quitter l’école, et comment elle s’est
réfugiée dans le monde des adultes auprès
desquels elle se sentait plus en sécurité.
Il me parle des nombreux traite-ments et de leurs effets secondaires,
des prises de poids, du visage bouffi de sa
fille, des longs séjours à l’hôpital. Il raconte
les crises qu’elle faisait devant des amis
pourtant prévenus, mais qui étaient sur le
coup extrêmement choqués par leur vio-
lence. Il exprime cette difficulté à l’adoles-
cence pour sa fille, de ne pas pouvoir crier
son indépendance, ni envoyer bouler ses
parents, parce que même pour prendre un
simple bain elle avait besoin d’eux. Elle ne parlait pas de sa maladie aux rares amis qu’elle avait du même âge.
« L’épilepsie était une réalité à la maison
dont on parlait ouvertement, en essayant
de comprendre et de trouver une solu-
tion. C’est le noyau familial et amical qui
était soudé ». Avec le reste du monde , c’était plus compliqué. L’école n’avait
jamais été un soutien. « Pourquoi, la maî-
tresse d’école, par exemple, alors que ma
fille venait de faire sa première crise, n’a-t-elle
pas eu l’idée de faire un cours sur le sujet,
de faire témoigner ma fille, victime de la
crise, sur son ressenti, et les camarades de
classe spectateurs de l’incident sur le leur ?
Cela aurait pu briser la glace, cela aurait
pu aider ma fille à mieux s’intégrer par la
suite ». L’école n’avait jamais vraiment soutenu la famille. Ils connaissaient la
situation mais n’avaient jamais pris d’ini-
tiatives pour aider à l’intégration sociale de
Arnaud Sélignac est un réalisateur
prolifique ayant réalisé près d’une
trentaine de films, téléfilms et
documentaires. Il a travaillé avec
les plus grands, ayant commencé
sa carrière en tant qu’assistant de
John Boorman (Excalibur et Hope
and Glory), qu’il considère comme
son mentor et qui l’a encouragé à
réaliser son premier film, Nemo,
en 1984 avec une distribution
prestigieuse: Harvey Keitel (une
rencontre qui l’a particulièrement
marqué), Carole Bouquet, Michel
Blanc, Dominique Pinon ou encore
Mathilda May alors à ses débuts.
Il a ensuite suivi Patrice Ché-
reau au Théâtre des Amandiers
pour réaliser L’Envers du Décor,
a enchaîné sur Gawin, et la liste
continue avec plus récemment un
téléfilm, Vieilles Canailles, réunis-
sant Claude Brasseur et Patrick
Chesnais, ou encore son téléfilm
très controversé, L’Evasion de
Louis XVI, pour son portrait inat-
tendu de Louis XVI et que certains
ont interprété comme une apologie
de la royauté ce qui n’était en rien
l’intention du réalisateur.
dossiEr
Recherches & Perspectives • décembre 2013 • p.5
Recherches & Perspectives • décembre 2013 • p.6
cette fois où, sentant une crise venir, sa fille
était venue le retrouver dans sa chambre
alors qu’il était profondément endormi. Il
avait été réveillé en sursaut par sa fille en
pleine crise et encore inconscient avait cru
à un cauchemar, à une attaque extra-ter-
restre et avait envoyé valser sa fille de l’autre
côté de la pièce. Sa fille et lui riaient encore
aujourd’hui de l’énormité de cette scène qui
leur était restée gravée à tous les deux dans
la mémoire.
Arnaud Sélignac reconnaît que l’épilepsie est un tabou et qu’il n’a jamais rencontré de comédiens qui en parlaient : « Pourtant c’est sûr qu’il y en a ! ».
En guise de conclusion je lui demande
ce qu’il pense du sujet de l’épilepsie à
l’écran. Il me dit qu’il a souvent songé à ce
thème et qu’il le traitera peut-être un jour.
Une cicatrice dans la tête (1) est un livre
qui l’a beaucoup marqué et qui pourrait
l’inspirer. Il sait combien un tel sujet sera
difficile à défendre à l’heure où nos socié-
tés ont de plus en plus de mal à exprimer
l’intime par peur de ne pas respecter le
«politiquement correct».
Nous en restons là, je remercie Arnaud
Sélignac pour son temps et sa sincérité et
le quitte marquée par la générosité de son
témoignage, le témoignage d’un père qui a
accompagné sa fille comme il pouvait tout
au long de sa maladie et qui aujourd’hui se
réjouit qu’elle vive une vie normale, sans
avoir à se cacher ; une fille qu’il trouve au-
jourd’hui encore « réservée, même si elle a
une grande facilité à socialiser », une fille
enfin qui a trouvé sa vocation et s’épanouit
à la plus grande joie de toute sa famille. l
Propos recueillis par Vanessa Barros-JonEs
notes
1 - Valérie Pineau-Valencienne. Une
cicatrice dans la tête. Plon, 2000
cette jeune fille épileptique.
Arnaud Sélignac mentionne avec beaucoup
d’estime le médecin qui, dit-il, « a sorti ma
fille de la maladie ». Vers 17 ans, sa fille
avait cessé de faire des crises, et c’est ce
médecin qui l’a convaincue d’arrêter pro-
gressivement les traitements. La fille d’Ar-
naud Sélignac vit aujourd’hui sans crises, et
s’est découvert une passion pour la cuisine
dont elle va faire son métier. « Les autres
médecins ont plutôt été des techniciens
qui s’occupaient des symptômes mais ne
proposaient aucun accompagnement psy-
chologique ». Arnaud Sélignac estime que
sa fille a cruellement souffert de cette tech-
nicité dénuée souvent de psychologie. Les
parents ont insisté pour que la jeune fille
voie des psychologues, mais c’était plus
leur choix que le sien. « Aujourd’hui, elle
voit un psychologue régulièrement mais
c’est elle qui l’a choisi ».
Et puis Arnaud Sélignac me raconte ce
moment d’horreur dont il valait mieux rire,
L’épiLepsie dans La Lumière dossiEr
« Faire une virée à deux..(.. )
au milieu de la nuit En catimini E va la nove
va la douce vie On s’en ira toute la nuit
Danser le calypso en Italie »
Nous avons tous en tête le refrain de Voyage
en Italie, chanson populaire du groupe Lili-
cub !
Et bien la tête féminine du groupe LILICUB est
Catherine DIRAN, auteur-compositeur-in-
terprète, qui a enregistré avec le groupe, en
France et au Japon une dizaine de disques…
Une preuve de plus que l’épilepsie n’em-pêche pas la réussite puisque Catherine souffre d’épilepsie.En 2012, elle entame un nouveau projet, à
la croisée de la musique et de la recherche
scientifique, avec le chercheur François
Pachet (Sony Computer Science Labora-
tory) et le chanteur Jean-Christophe Urbain
(Les Innocents).
Parallèlement à sa carrière musicale, Ca-
therine Diran investit en 2007 le champ de
la littérature, avec sept romans, dont la tri-
logie noire Victoria reyne (Le Masque), re-
quiem pour Mona (La tengo), et plusieurs
romans jeunesse (L’Archipel). Elle aborde
également le scénario, dans plusieurs sé-
ries pour Canal +.
Après plusieurs courts-métrages et docu-
mentaires, elle réalise son premier film
« sutra », volet initial d’une trilogie traitant
de l’exil et des femmes, et prépare le se-cond, « Refuge », qui traite de ce thème par la maladie, choisissant pour cela d’aborder l’épilepsie.Catherine DIRAN qui a souffert de l’épilep-sie comme de l’ostracisme et du déni de celle-ci, aide désormais la Fondation avec sa fougue et son talent. l
EMManUELLE aLLonnEaU-roUBErTIE
catherine dIRAN : L’EpILEpSIE EN fAcE
Dossier
Recherches & Perspectives • mai 2013 • p.7
10 févriEr 2014 : l’épilEpsiE En plEinE lumièrE
Colloque et soirée caritative au bénéfice de la recherche sur l’épilepsie
Al’occasion de la Journée Européenne de l’Epilepsie, la Fondation Française pour
la Recherche sur l’Epilepsie organise un colloque et une soirée caritative au bénéfice de la recherche.
L’ÉPILEPSIE, DERNIÈRE MALADIE tABoUE ?Alors que des célébrités parlent au-
jourd’hui ouvertement de la maladie
qui les atteints, aucune souffrant d’épi-
lepsie ne souhaite que cela se sache.
Pourquoi ? Alors que notre regard sur
le malade a beaucoup évolué ces der-
nières décennies, nous restons mal à
l’aise face à une personne qui souffre
d’épilepsie. Pourquoi ?
Le colloque sera organisé en deux
tables rondes :
1 - Epileptique : et alors ???De Dostoïevski et Flaubert à Prince
et Marion Clignet, leurs épilepsies ne
les ont pas empêchés de réussir dans
leurs domaines : écriture, politique,
musique, sport.
2 - Epileptique : j’assume !!Comment réussir à vivre au quotidien
dans la France du 21e siècle lorsque
l’on souffre d’épilepsie.
Les discussions seront suivies par un dîner de gala et une vente aux enchères au bénéfice de la recherche, animée par Maître Cornette de St Cyr. l
Didier VAN CAUWELAERT, écrivain, par-
rain de la FFRE,
Jean-Christophe BUISSON, responsable
du service culture et art de vivre au
Figaro Magazine,
Gérard LARChER, sénateur maire de
Rambouillet, ancien président du Sé-
nat, ancien président de la Fédération
Hospitalière de France,
Edwige AVICE, ancienne ministre,
Marion CLIGNET, ancienne championne
de cyclisme,
débattront avec historiens, journalistes,
chefs d’entreprises et patients pour ten-
ter de comprendre pourquoi il est encore
si difficile de parler de cette maladie qui
bouleverse en France, au quotidien, la
vie de près de 2 millions de personnes.
dossiEr
Recherches & Perspectives • décembre 2013 • p.7
RENSEIgNEMENTS pRATIqUES
Lieu : Ecole du Val-de-Grâce, à Paris
• Colloque : de 14 h à 19 h
Entrée gracieuse, inscription impérative.
• Dîner caritatif : à partir de 20 h
Inscription payante obligatoire
Pour vous inscrire et pour tout renseignement :[email protected] ou 01 47 83 65 36.
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pHarmaCOrésisTanCe, surHandiCap eT épiLepsie : QueLLes aVanCées ?
Contrairement à la majorité des situa-tions chez l’enfant, le but de la prise en charge de l’épilepsie chez les enfants atteints de ces maladies neurogéné-tiques, n’est pas nécessairement de supprimer totalement les crises. En ef-fet, dans la plupart des cas, ces épilep-sies s’avèrent pharmacorésistantes, et le risque d’avoir des effets secondaires des antiépileptiques (sous la forme de somnolence, d’agitation, ou de troubles du comportement) est majeur.Le rôle du praticien en charge de ces patients, est de bien évaluer, avec la famille et l’équipe éducative, les objectifs du traitement des crises épi-leptiques dans le contexte de la défi-cience intellectuelle et du handicap neuromoteur. Ainsi, la prise en charge la plus adaptée n’est pas d’essayer à tout prix de supprimer l’épilepsie. C’est au contraire la recherche, au cas par cas, du meilleur compromis entre le traitement de l’épilepsie et celui de l’autre maladie. Il s’agit de trouver la prise en charge de l’épilepsie qui, en fonction des conséquences de la mala-die grave et de son traitement, don-nera les meilleures chances de limi-ter les retards de développement des capacités cognitives et motrices de l’enfant, fût-ce au prix de l’acceptation de crises d’épilepsie. Ceci met gran-dement à contribution les familles et nécessite un accompagnement et une relation étroite, avec confiance réci-proque, entre le médecin et la famille.
FFRE. L’association avec l’épilepsie dans le cadre de déficiences intellec-tuelles d’origine génétique est-elle fré-quente ? Dr Nadia Bahi-Buisson - Certaines
formes de déficiences intellec-
tuelles sont associées de façon quasi
constante à l’épilepsie. On distingue
classiquement les maladies dans
lesquelles une lésion ou une malfor-
mation cérébrale est visible sur l’IRM
cérébrale et celles où le cerveau dys-
fonctionne sans qu’aucune lésion ne
soit visible en IRM. Les maladies avec malformations cérébrales sont asso-ciées de façon quasi constante à des épilepsies. Plus la malformation est
sévère (comme une pachygyrie) plus
le handicap neuro-moteur est impor-
tant et plus l’épilepsie est pharmaco-
résistante. Par contraste, dans des mal-
formations cérébrales moins sévères
(comme les hétérotopies), l’épilepsie
peut être plus tardive voire absente
jusqu’à l’âge adulte. L’association des
épilepsies dans les déficiences intellec-
tuelles sans lésion cérébrale est émi-
nemment variable. Certaines maladies
sont fréquemment associées à une épi-
lepsie, telles que le syndrome de Rett
ou le syndrome d’Angelman, alors que
d’autres sont plus rarement associées,
telles que le syndrome de l’X Fragile.
Bien qu’aucune donnée ne soit dispo-
nible sur l’épidémiologie de l’épilepsie
dans ces maladies considérées dans
leur ensemble, on estime que l’épi-
EpilEpsiEs survEnant au cours dE maladiEs métaBoliquEs Et génétiquEs rarEs surHandicap ou co-morBidité ?
Entretien avec le Dr Nadia Bahi-Buisson
Le Dr Nadia Bahi-Buisson,
Neuropédiatre MCU-PH
(Maître de Conférence des
Universités-Praticien Hospita-
lier) à l’Hôpital Necker-Enfants
Malades dans le Service du
Professeur Desguerre, est spé-
cialiste des maladies neuro-
génétiques rares, telles que le
syndrome de Rett, auxquelles
l’épilepsie est associée.
Dans ces situations particu-
lièrement difficiles, l’épilep-
sie apparaît souvent après
l’annonce d’une maladie
neurologique grave, et est sou-
vent vécue comme un second
drame pour les familles. En
effet, la survenue d’une épilep-
sie dans ce contexte de han-
dicap neurologique constitue
un véritable surhandicap pour
l’enfant. En outre, l’épilepsie
peut être à l’origine de véri-
tables difficultés d’intégration
de l’enfant dans les structures
de rééducation car l’épilepsie
«fait souvent peur» aux éduca-
teurs peu expérimentés dans le
domaine.
la rEcHErcHE
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des médicaments antiépileptiques à
proposer, en limitant au maximum les
effets secondaires cognitifs et compor-
tementaux.
FFRE. quels sont les critères qui guident vos décisions de prise en charge dans ces contextes de défi-cience intellectuelle ou retard du déve-loppement avec épilepsie ?NBB - Plusieurs éléments sont né-
cessaires à une prise en charge opti-
male. D’une part, il
est indispensable
d’avoir une bonne
connaissance de la
maladie génétique
et de son évolution.
Cette connaissance permet d’antici-
per le type d’épilepsie chez l’enfant et
surtout de limiter la confusion avec les
mouvements anormaux, les stéréoty-
pies ou les phénomènes paroxystiques
non épileptiques fréquemment rencon-
trés dans ces maladies
D’autre part, il est très important d’ob-
tenir une caractérisation “opération-
nelle” de l’épilepsie avec notamment
la distinction de la fréquence des crises « qui gênent l’enfant », telles que les crises toniques, ou encore les spasmes ou les chutes, des crises qui « altèrent peu sa qualité de vie », telles que les absences, les myoclonies ou sursauts. Par exemple, dans le syndrome de Rett
ou encore le syndrome d’Angelman,
certaines crises comme des absences,
ou des myoclonies (sursauts) gênent
peu la vie et les progrès de l’enfant. Ces
absences peuvent persister pendant
plusieurs années sans altérer la qua-
lité de vie de l’enfant. En outre, elles
sont souvent résistantes au traitement
antiépileptique, qui est de plus souvent
mal toléré chez ces enfants. Ainsi, il est
souvent préférable de choisir de “tolé-
rer” ces crises en concertation avec
les parents et l’équipe éducative. Cette
caractérisation permet de faire le choix
entre traiter et ne pas traiter.
Il est également nécessaire d’avoir une
bonne connaissance des antiépilep-
tiques et de leurs effets secondaires.
En effet, certains antiépileptiques ont
des effets secondaires intolérables
pour l’enfant en situation de handi-
cap. Parmi ceux-ci l’anorexie sévère, la
perte de poids, ou encore l’agitation ou
les cris. Enfin, la décision de traiter ou
ne pas traiter, et
le choix des trai-
tements s’effec-
tuent souvent en
concertation avec
les parents. Dans
ce contexte, l’alliance thérapeutique
est un atout majeur pour le succès du
traitement chez ces enfants.
FFRE. comment les familles concer-nées sont-elles épaulées pour faire face aux difficultés auxquelles elles sont confrontées ?NBB - Dans ces situations de maladies
neurologiques parfois sévères dans
lesquelles l’épilepsie est un surhandi-
cap, il est fondamental de soutenir les familles. Le seul soutien qu’apportent
le médecin hospitalier et l’équipe soi-
gnante est largement insuffisant. Diffé-
rents relais sont proposés. D’une part,
des relais avec les personnels présents
au quotidien dans les structures de
rééducation médico-sociales (1) et les
établissements médico-éducatifs (2)
sont organisés en lien avec l’hôpital de
référence. Le médecin traitant est éga-
lement un atout important dans la prise
en charge de ces enfants.
D’autre part, les parents trouvent un
soutien de la part des associations de
patients nombreuses, spécifiques à
certaines maladies ou plus généra-
listes, fédérées dans le cadre de l’Al-
lepsie est relativement fréquente dans les déficiences intellectuelles d’origine génétique. Cette fréquence, relative-
ment élevée, observée chez les enfants
atteints d’une maladie orpheline, re-
couvre une très grande variété de cas :
la grande diversité des maladies rares se combine avec une gamme très large de formes d’épilepsies, dont certaines sont pharmacorésistantes. Il s’agit donc
à chaque fois d’une situation particu-
lière, à traiter de façon adaptée sur le
plan médical mais aussi sur le plan re-
lationnel et psychologique, car la prise
en charge met grandement à l’épreuve
les familles.
FFRE. Y a-t-il des spécificités à la prise en charge des épilepsies appa-rues dans un contexte de déficience intellectuelle préalablement diagnos-tiquée ?NBB - L’annonce d’une épilepsie
chez un enfant dont le diagnostic de
déficience intellectuelle a été préa-
lablement annoncé aux parents, est
très douloureuse pour les parents. Au
premier abord, leur première inter-
prétation est que leur enfant a une
seconde maladie, «l’épilepsie», encore
plus grave car plus impressionnante
que la première «la déficience intellec-
tuelle». L’épilepsie fait peur et leur fait craindre pour la vie de leur enfant avec des angoisses de mort souvent formu-lées. En réalité, l’épilepsie fait partie de
la déficience intellectuelle et s’exprime
dans ces cas après les premiers signes
de la maladie qui s’est exprimée tôt
dans la vie de l’enfant par un retard du
développement. Il est important que le
praticien ait connaissance de ce vécu
des parents dans la prise en charge de
l’épilepsie dans ce contexte. En outre,
le fait que l’enfant ait un retard du dé-
veloppement et/ou des troubles autis-
tiques doit faire réfléchir sur le choix
la rEcHErcHE
chAqUE SITUATION pARTIcULIèRE EST à TRAITER dE fAçON AdApTéE.
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notamment sur des modèles ani-
maux va permettre d’avancer dans
la compréhension des mécanismes
des épilepsies. Il est nécessaire de la
favoriser à l’avenir. Dans d’autres ma-
ladies où des
lésions céré-
brales sont vi-
sibles en IRM
comme les
hétérotopies, l’avancée des connais-
sances pourra provenir des études
fonctionnelles telles que l’EEG IRM
fonctionnelle mais aussi des modèles
animaux. Ces recherches pourront permettre de définir le point de départ de l’épileptogenèse et son évolution. Connaître ce processus pourra certai-
nement nous donner des perspectives
pour de nouvelles pistes thérapeu-
tiques. l
liance Maladies Rares (www.alliance-
maladies-rares.org/).
FFRE. De quoi avez-vous besoin dans les années qui viennent pour que ces maladies soient mieux prises en charge et po-tentiellement guéries ?NBB - Chacune de
ces maladies neurolo-
giques rares est assez mal connue.
Pour certaines, on connaît les causes
génétiques, liées soit à des mutations
dans des gènes identifiés (ex : muta-
tions dans MECP2 dans le syndrome
de Rett, ou UBE3A dans le syndrome
d’Angelman), soit à des anomalies
chromosomiques (ex : délétion 1p36
dans le syndrome de del1p36). Dans
ces situations, le mécanisme des épi-
lepsies n’est pas connu. La recherche
notes
1- CAMSP : centre d’action médico-so-
ciale précoce ; CMPP : centre médico-
psycho-pédagogique ; SESSAD : ser-
vice d’éducation spéciale et de soins à
domicile
2- IME : institut médico-éducatif.
- De 3 à 20 ans, en institut médico-
éducatif (IME terme générique).
- De 3 à 14 ans, en internat médico-pé-
dagogique (IMP) ou externat médico-
pédagogique (EMP).
- De 14 à 20 ans, en institut médico-
professionnel (IMPRO). Ces derniers
prennent en charge des adolescents et
assurent l’acquisition d’un savoir-faire
pré-professionnel ou professionnel.
Propos recueillis par Florence PICarD
pHarmaCOrésisTanCe, surHandiCap eT épiLepsie : QueLLes aVanCées ?la rEcHErcHE
chAcUNE dE cES MALAdIES NEUROLOgIqUES RARES EST ASSEz MAL cONNUE.
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Recherches & Perspectives • mai 2013 • p.11
ArticleNos chercheurs
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quEllEs avancéEs pour la prisE En cHargE dEs EpilEpsiE pHarmaco-résistantEs dE l’adultE ?
FFRE. qu’appelle-t-on "épilepsie phar-macorésistante" ? Dr Philippe Kahane - La définition la
plus communément admise en France
est celle proposée par l’ANAES en 2004 :
« persistance de crises de nature épi-
leptique certaine chez un patient com-
pliant (…), malgré l’utilisation préalable
en monothérapie séquentielle d’au
moins 2 médicaments antiépileptiques
et d’au moins une association de 2 mé-
dicaments antiépileptiques pendant une
durée suffisante pour permettre d’en
apprécier l’efficacité ». Récemment, la
Ligue Internationale Contre l’Epilepsie
a défini la pharmacorésistance comme « l’échec à obtenir une disparition per-sistante des crises en dépit de l’utili-sation adéquate de deux médicaments antiépileptiques bien tolérés et appro-priés, prescrits en monothérapie ou en association ».
Il est habituellement accepté qu’environ
30 % des épilepsies s’avèrent pharma-
corésistantes, et il a été estimé en France
qu’il existait environ 150 000 cas phar-macorésistants prévalents, dont plus de 20 000 touchant la population des moins de 20 ans.
FFRE. quelles sont les avancées en ce domaine ? Est-ce que de nouvelles molécules apparaissent, qui améliorent le taux de réussite des traitements et diminuent le taux d’épilepsies pharmacorésis-tantes ?PK - Il existe désormais plus d’une tren-
taine de molécules disponibles pour
traiter les épilepsies. Ce choix élargi
donne plus de chances aux patients de
trouver le traitement qui leur convient.
Les molécules les plus récentes, dites
Entretien avec le Dr Philippe Kahane
Dr Philippe Kahane neurologue et neurophysiologiste, est responsable de l’unité d’épileptologie du CHU de Grenoble et est rattaché à l’équipe
de recherche d’épileptologie fondamentale dirigée par Antoine Depaulis (INSERM U836, équipe 11). Il est membre du
Conseil scientifique de la FFRE.
Il fait le point avec nous sur la prise en charge des épilepsies pharmacorésistantes chez l’adulte, et sur les espoirs nés
des nouvelles molécules et des traitements chirurgicaux. Le souhait bien légitime des patients épileptiques dont les crises
résistent au traitement médicamenteux est de voir leurs crises disparaître sans porter atteinte à leur santé. Pour se faire,
les médecins disposent d’une gamme de molécules de plus en plus large, et des progrès en ce sens sont réalisés en perma-
nence, notamment pour limiter les effets secondaires des médicaments. En cas d’échec des médicaments, la chirurgie
peut s’avérer un recours, mais elle n’est indiquée que dans certaines formes d’épilepsies bien particulières. Dans tous les
cas, c’est le rapport bénéfice/risque du traitement, par médicaments ou par chirurgie, qui doit toujours être pris en compte.
de 3e, voire 4e génération, présentent
surtout l’avantage d’entraîner moins d’effets secondaires et d’être d’utilisa-tion plus aisée. Ces nouveaux médica-
ments ont indiscutablement amélioré
le confort des patients dont l’épilepsie
s’avère phar-
m a c o s e n -
sible, mais ils
n’ont eu que
peu d’impact
sur les crises
des patients dont l’épilepsie est mal
contrôlée. Leurs utilisation ne doit pas
pour autant être négligée car certaines
formes d’épilepsies peuvent s’avérer
finalement pharmacosensibles même
après utilisation d’innombrables traite-
ments, et leur recours semble suscep-
tible de réduire le risque de mortalité
associé aux épilepsies pharmacorésis-
tantes.
la rEcHErcHE
6 000 ET 12 000 pATIENTS pOURRAIENT BéNéfIcIER EN fRANcE d’UN BILAN pRé-chIRURgIcAL.
Article
FFRE. ce risque de mortalité est-il im-portant ?PK - Ces dernières décennies, de nom-
breuses études ont montré que les pa-
tients qui souffrent d’une épilepsie, en
particulier pharmacorésistante, ont un
risque de décès environ 5 fois supérieur
à celui de la population générale.
Cela représenterait en France environ
3 000 décès par an. Ces décès sont
de causes variées, souvent identifiables
(étiologie de l’épilepsie, circonstances
de survenue des crises, état de mal
épileptique, suicide), mais parfois aussi
de mécanisme plus incertain, cas de la
mort subite et inattendue (ou SUDEP)
qui semble survenir au cours d’une crise
mais dont les mécanismes ne sont pas
encore clairement élucidés.
Le problème de la mortalité lié à l’épi-
lepsie fait l’objet de nombreuses re-
cherches, notamment en France, et la
FFRE s’est d’ailleurs largement investie
dans ce combat.
FFRE. Et les effets secondaires des médicaments ? Sont-ils si graves qu’ils puissent empêcher le traitement ?PK - Ils sont de nature et de gravité très
diverses. Ils dépendent à la fois du médi-
cament lui-même et de sa possible toxité
(par ex. allergie, atteinte hépatique, prise
de poids, etc.), du patient (âge, sexe,
comorbidités associées), et d’autres
médicaments éventuellement co-pres-
crits (risque d’interférences médicamen-
teuses). Ils doivent être rigoureusement
recherchés et discutés avec le patient
pour en évaluer l’impact, et selon les cas,
conduire à l’interruption du médicament
responsable. La large gamme d’antiépi-
leptiques actuellement disponible per-
met dans la très grande majorité des cas
de trouver un compromis acceptable
entre l’efficacité sur les crises et les effets
indésirables.
FFRE. comment procédez-vous en cas d’échec des premiers traitements ? Le mieux pour le malade n’est-il pas d’essayer toutes les molécules et de ne s’avouer vaincu que si elles ont toutes échoué, soit par suite d’effets secon-daires handicapants, soit par efficacité insuffisante sur les crises ?PK - La stratégie d’essais médicamen-
teux séquentiels, tout comme l’initiation
du traitement, ne peut être généralisée
à l’ensemble des patients qui souffrent
d’épilepsie tant les circonstances sont
variables. L’enfant, la femme (contra-
ception et grossesse éventuelles) et la
personne âgée représentent trois popu-
lations particulièrement sensibles pour le
choix des traitements à mettre en œuvre.
En règle générale, c’est le rapport béné-
fice/effets indésirables qui doit guider le
choix de la stratégie thérapeutique, et ce
choix doit être discuté avec le patient et/
ou son entourage afin qu’un contrat clair
puisse être établi. Il peut ainsi parfois s’avérer moins délétère d’accepter la per-sistance de crises peu fréquentes et/ou peu invalidantes plutôt que de vouloir à tout prix les supprimer au prix d’effets se-condaires plus invalidants que les crises elles-mêmes.
FFRE. Et la chirurgie ? quand quels cas est-elle possible ?PK - La chirurgie dite curative (c’est-
à-dire ayant pour but de supprimer
les crises par ablation de la zone céré-
brale responsable de leur survenue)
ne concerne qu’une minorité (10 %)
des patients souffrant d’une épilepsie
pharmacorésistante : elle n’est indiquée
que lorsque les crises sont focales ou
partielles (point de départ localisé dans
le cerveau) et que le geste chirurgical
envisagé peut être réalisé sans créer de
nouveau déficit. On évalue entre 6 000 et
12 000 le nombre de patients qui pour-
raient bénéficier en France d’un bilan
préchirurgical, dont 25 % à 50 % relè-
veront effectivement d’une opération au
terme du bilan - souvent lourd - réalisé.
Dans les autres cas, c’est-à-dire chez
les patients pour lesquels aucun geste
chirurgical curatif ne peut être envisagé,
des interventions palliatives peuvent être proposées, parmi lesquelles la plus com-mune est la stimulation chronique inter-mittente du nerf vague. Il ne faut cepen-
dant pas attendre de cette méthode une
suppression complète des crises, mais
seulement une amélioration de leur fré-
quence et/ou de leur sévérité, et ce chez
seulement la moitié des patients.
D’autres méthodes de neurostimulation
sont en cours d’évaluation, et une étude
multicentrique française va prochaine-
ment débuter en France, visant à évaluer
le bénéfice de la stimulation chronique
du noyau antérieur du thalamus (une
structure située dans la profondeur du
cerveau) chez des patients souffrant
d’une épilepsie pharmacorésistante, ne
relevant pas de la chirurgie curative, et
chez lesquels la stimulation vagale s’est
avérée un échec (Etude “France”, projet
STIC 2013). l
Propos recueillis par Florence PICarD
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la rEcHErcHE pHarmaCOrésisTanCe, surHandiCap eT épiLepsie : QueLLes aVanCées ?
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le dialogue patient-médecin autour
de la mortalité liée à l’épilepsie. Enfin,
les données recueillies dans ce cadre
doivent servir de fondement à la réali-sation de projets de recherche.
Ainsi, à partir des cas signalés au ré-seau et grâce au soutien de la FFRE, une étude sur les facteurs de risque de SUDEP a été mise en place en s’ap-
puyant sur les pistes nouvelles issues
de la recherche fondamentale (évène-
ments de vie stressants, antécédents
familiaux de mort subite, interactions
médicamenteuses...).
Des données médicales sont recueillies
auprès du neurologue après accord
des familles et un entretien est réa-
factEurs dE risquE dE mort suBitE dans l’épilEpsiE : prEmiEr Bilan
par le Dr Marie-Christine Picot, Montpellier
De nombreuses études réalisées au cours de cette dernière décennie ont montré qu’il existe, chez les patients
avec épilepsie, une surmortalité 2 à 5 fois plus élevée qu’en population générale. Cette surmortalité touche
principalement les patients présentant une épilepsie pharmacorésistante. Les causes sont nombreuses. Certains
décès sont directement liés à la pathologie responsable de l’épilepsie comme des accidents vasculaires céré-
braux ou des tumeurs. D’autres sont liés à la survenue de crises dans des circonstances dangereuses (noyades,
brûlures, chutes…) ou à des crises compliquées par un état de mal épileptique (succession ininterrompue de
crises). Les suicides sont également plus fréquents chez les patients avec épilepsie que dans le reste de la
population. Enfin, certains décès surviennent soudainement sans cause précise, on parle alors de mort sou-
daine inattendue dans l’épilepsie (ou SUDEP pour Sudden Unexpected Death in EPilepsy). Il a été montré que
les SUDEP surviennent dans les suites immédiates d’une crise et en seraient donc la conséquence directe.
Avec le soutien de la Fondation Française pour la Recherche sur l’Epilepsie (FFRE) et sous l’égide de la Ligue Fran-
çaise contre l’épilepsie (LFCE), un réseau sentinelle national de surveillance de la mortalité liée à l’épilepsie a été
créé en 2010 afin de répondre aux interrogations des patients et de leur famille et faciliter la mise en place de
projets de recherche. Le premier objectif de ce réseau est de recueillir les causes et les circonstances exactes
des décès liés à l’épilepsie.
L’analyse détaillée des causes et cir-constances des décès signalés dans le réseau devrait permettre d’identifier des décès potentiellement évitables et de promouvoir secondairement des me-sures de prévention. Ce réseau a aussi
pour objectif de mettre en place des
actions pour accompagner les familles endeuillées en leur proposant de ren-
contrer d’autres familles ayant vécu
les mêmes épreuves ou de s’entretenir
avec un neurologue ou un neuropé-
diatre pour répondre à leurs questions.
Ce réseau représente aussi un espace de communication entre les profession-
nels, les patients et les associations,
ce qui devrait permettre de favoriser
projEts financés
Recherches & Perspectives • décembre 2013 • p.13
lisé à distance du décès par un psy-
chologue afin de recenser les attentes
et besoins des familles mais aussi de
connaître avec précisions les circons-
tances du décès, l’histoire de la mala-
die, la recherche d’antécédents fami-
liaux ou encore de troubles associés
(cardiaques, neurologiques, troubles
de l’humeur…). Ces mêmes données
sont collectées dans un groupe de pa-
tients avec épilepsie de sévérité proche
et d’âge comparable. Ce sont les dif-
férences observées entre ces deux
groupes qui permettront d’identifier les
facteurs de risque.
A ce jour, 114 décès ont été signalés
dans le cadre du réseau. Les signale-
Recherches & Perspectives • décembre 2013 • p.14
ments sont principalement effectués
par les neurologues mais 17 familles
ont également choisi de prendre direc-
tement contact avec le centre coordon-
nateur. Le recensement est national ex-
cepté 5 régions n’ayant effectué aucun
signalement à ce jour. La plupart des
signalements (75 %) correspondaient
à des SUDEP. 57 familles endeuillées
ont participé à l’étude sur les facteurs
de risque de SUDEP. Seules 2 familles
ont refusé. Les premiers résultats ob-
tenus sont en accord avec les études
précédemment publiées dans la littéra-
ture scientifique. Les cas recensés sont
essentiellement de jeunes adultes (âge
moyen au moment du décès : 31 ans),
plutôt de sexe masculin (57 %). Ce
sont des patients dont l’âge de surve-
nue de l’épilepsie est majoritairement
inférieur à 16 ans (70 %). La plupart
d’entre eux présentaient une épilep-
sie résistante aux traitements (80 %)
avec une fréquence élevée de crises
tonico-cloniques et traités par plusieurs
antiépileptiques (75 % d’entre eux
avaient au moins 2 médicaments anti-
épileptiques). 20 % des patients
avaient une observance moyenne ou
mauvaise. La plupart des décès ont
lieu au domicile, sans témoin, souvent
durant la nuit ou pendant une sieste
(75 % des cas).
A ce jour, 47 entretiens ont pu être
réalisés auprès de patients du groupe
témoin. D’ici fin 2014, ce sera le témoi-
gnage de 100 familles et 300 patients
qui devra être recueilli pour permettre
d’identifier avec suffisamment de pré-
cision les facteurs de risque potentiels.
Lancé en janvier 2010, le réseau re-présente aujourd’hui un lieu d’échange entre les professionnels de santé, les patients souffrant d’épilepsie et leurs proches. L’information collectée lors
VOUS SOUHAITEz DES INFORMATIONS COMPLÉMENTAIRES SUR LE RÉSEAU, SUR LA MORTALITÉ LIÉE à
L’ÉPILEPSIE, SUR L’AVANCEMENT DES TRAVAUX, LES COORDONNÉES DES CORRESPONDANTS RÉSEAU
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Contactez le centre coordonnateur ([email protected] / Tel. : 04 67 33 89 79)
ou votre correspondant régional ou le réseau des familles endeuillées ([email protected])
ou complétez directement une fiche sur www.mortalite-epilepsie.fr
VOUS SOUHAITEz PARTICIPER AU PROJET DE RECHERCHE ?
Contactez le centre coordonnateur de l’étude ([email protected] / Tel. : 04 67 33 89 79)
projEts financés FaCTeurs de risQue de mOrT subiTe dans L’épiLepsie : premier biLan
des entretiens auprès des familles ap-
porte des éléments précieux pour abor-
der la question du risque de décès, et
particulièrement de mort subite, de
manière plus adaptée. Ces entretiens
montrent également que les familles
sont peu informées des risques liés
à l’épilepsie. Des efforts doivent être
poursuivis dans ce sens pour donner
au patient et à ses proches toute la
connaissance nécessaire pour limiter
ces risques en développant en parti-
culier des programmes d’éducation
thérapeutique. l
Recherches et Perspectives • Lettre d’information publiée par la Fondation Française pour la Recherche sur l’Epilepsie - 28 rue Tronchet, 75009 PARIS - Tél : 01 47 83 65 [email protected] • www.fondation-epilepsie.fr • Directeur de publication : Bernard Esambert • Rédactrice en chef : Emmanuelle Allonneau-Roubertie • Prépara-tion, rédaction et interviews : Vanessa Barros-Jones (pages 2-3, 5-6, 15), Florence Picard (pages 8 à 12) • Remerciements à : tous ceux qui ont contribué à l’élaboration de ce numéro • conception et impression : EXPRESSION GROUPE.
Recherches & Perspectives • novembre 2013 • p.15
billet d’humeur
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Fondation Française pour la
Recherche sur l’épilepsie
28, rue Tronchet 75009 Paris
N° national d’émetteur : 448 164
!
Titulaire du compteNomPrénomN° Rue
CP Ville Pays
2. Coordonnées du compte
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R&
P -
Déc
embr
e 2
013
Signature obligatoire
dur dur, pour unE maman, l’EpilEpsiE d’un Enfant !
temps. J’en ai vu des professionnels avant
que je trouve la personne dont l’approche
me convenait. Je suis contente d’avoir
continué à chercher pour enfin trouver la
bonne personne, même si cela a pris du
temps. C’est une psychiatre remarquable,
mère de 5 enfants dont l’un avec un retard
de développement, qui m’a apporté l’aide
la plus précieuse : elle me parle comme à
une adulte, de femme à femme, me donne
des conseils ultra-pratiques pour gérer le
comportement de mon enfant, m’apporte
des informations précieuses quant à sa
scolarité. J’ai l’impression d’avoir affaire
à une amie ou à une grande sœur plutôt
qu’à la grande spécialiste qu’elle est. Elle
m’a également suggéré une aide médica-
menteuse (dont j’ai longtemps cru ne pas
avoir besoin), qui m’a permis de voir les
choses de façon plus sereine. Je crois que
l’enseignement le plus important qu’elle
m’ait transmis a été que, sans une mère
en pleine forme moralement, mon fils
n’avait plus toutes ses chances, que son
développement passait avant tout par mon
bonheur et mon bien-être. » l
déceptions… Adrian a été ma première
mauvaise note. C’est bizarre d’en par-
ler en ces termes, mais l’idée d’avoir un
enfant malade et avec un retard mental
me mortifiait au-delà du chagrin et des
craintes que je pouvais éprouver pour
lui. Le travail m’a pas mal aidée à gérer
la situation. Je mettais mes problèmes au
vestiaire en arrivant au bureau. Et puis,
il a fallu se rendre à l’évidence bien des
années plus tard (peut-être un peu tard) :
la maladie de mon fils avait affecté mon
moral de façon significative et, sans me
l’avouer, j’étais en dépression depuis long-
« Quand le pédiatre de mon fils m’a
enfin recommandé d’aller voir un neuro-
pédiatre (à l’époque Adrian ne répondait
plus à son prénom, se balançait sans
cesse, mangeait comme un vorace et
criait toutes les nuits), j’étais sur mon lit
de maternité, venant d’accoucher de mon
troisième enfant. Les années qui ont suivi
ressemblent aux années de bien d’autres
parents d’enfants épileptiques : nuits sans
sommeil, services de neuropédiatrie, EEG
de nuit à l’hôpital, médication régulière
infernale à administrer, fatigue nerveuse
et physique, alternances de victoires et de
BillEt d’HumEur
Numéro d’identification international du compte bancaire - IBAN (International Bank Account Number)
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Diplômée de l’ESSEC, Vanessa Barros-Jones a mené une carrière internatio-nale dans la publicité. Elle réside aujourd’hui à Singapour où elle a entamé un Doctorat sur la diversité culturelle tout en gérant un cabinet de conseil en Marketing et Communication. Maman de trois garçons dont un souffrant d’épi-lepsie, Vanessa, découvrant la FFRE, m’a immédiatement envoyé des textes, écrits sur le vif de ses sentiments de maman.S’ils sont parfois iconoclastes, il m’a semblé que les lecteurs de R et P ne s’en formaliseraient pas car ils sont avant tout l’expression de la souffrance, de l’inquiétude et des doutes permanents lorsque l’épilepsie arrive dans une famille. Nous donnerons donc désormais une petite place à Vanessa dans R et P. Un grand coup de chapeau à Vanessa et à vous tous, familles touchées par l’épilepsie ! Ear
Recherches & Perspectives • novembre 2013 • p.16
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D’avance, merciEmmanuelle aLLonnEaU-roUBErTIE